France-Côte d’Ivoire
Du sang neuf dans les relations sur fond d’élections transparentes. Le responsable de la diplomatie française, Bernard Kouchner a effectué une visite en Côte d’Ivoire le week-end dernier. Une visite officielle qui a redonné créance dans les relations entre Paris et Abidjan, en froid depuis 2003 Par Kadje Kamga Sous la présidence de Jacques Chirac, Paris et Abidjan avaient connu des relations tumultueuses. En septembre 2002, une crise politico-militaire avait éclaté. Une rébellion armée avait fait surface dans la partie nord de la Côte d’Ivoire, coupant le pays en deux. Cette crise devait atteindre son paroxysme lors des violentes manifestations anti-françaises de 2004. L’aviation ivoirienne allait bombarder un cantonnement français à Bouaké, en tuant 09 soldats français. En représailles, l’armée française neutralisait les appareils ivoiriens. Du coup, les relations entre les deux pays ne pouvaient que s’effilocher. D’emblée, près de 8000 ressortissants étrangers ne pouvaient plus rester sur le territoire ivoirien. La visite de Bernard Kouchner marque donc le réchauffement des relations franco-ivoiriennes. Promesses Tout au long de ces années de froid entre la France et la Côte d’Ivoire, Paris na cessé de demander à Abidjan d’organiser des élections pour que les relations entre les deux pays reviennent à ce qu’elles étaient par le passé, avant la crise de 2002. Au cours d’une rencontre entre Sarkozy et Gbagbo à New York et à Lisbonne, la France avait réitéré sa disposition à apporter son soutien à la Côte d’Ivoire, à conditions que des élections présidentielles soient organisées. « Tu organises des élections, et tu as mon soutien », avait dit Sarkozy à Gbagbo. Le ministre français des Affaires étrangères a suivi la même logique. Puisque Laurent Gbagbo a finalement fixé les élections pour le 30 novembre prochain, la présence de Kouchner à Abidjan ne peut que se justifier amplement. Il faut se rappeler que le scrutin dont il est question a plusieurs fois été reporté, ce qui n’a pas toujours été apprécié par les acteurs politiques qui voyaient dans ces multiples reports des manœuvres de la part de Gbagbo pour se maintenir au pouvoir. Celui-ci s’en défendait, présentant les difficultés d’identification des électeurs, le désarmement des milices, et les problème financiers. Il faut en effet près de 86 milliards de francs CFA pour organiser ces élections présidentielles. L’opérateur français Sagem est chargé des opérations techniques. Il supervise les opérations d’inscriptions
sur les listes électorales et l’élaboration des cartes électorale. Dans la foulée des promesses, on sait déjà que le lycée français Blaise-Pascal rouvrira ses portes en septembre prochain, de même que le centre culturel français. En toute réflexion, Laurent Gbagbo a estimé que l’heure de la réconciliation franco-ivoirienne était « proche. » Rencontres au sommet La visite de Bernard Kouchner a été l’occasion de se rendre à la base militaire française du 43e bataillon d’infanterie marine (BIMA), où est installé l’état-major de l’opération Licorne, déployée depuis 2002. La base comprend 1800 soldats. Kouchner a ensuite rencontré les différents acteurs politiques ivoiriens, dont le président Laurent Gbagbo et l’ex-chef de la rébellion des Forces Nouvelles (FN), Guillaume Soro, devenu premier ministre, l’ancien premier ministre Alassane Ouattara, président du Rassemblement des Républicains (RDR, opposition) et candidat de son parti à l’élection présidentielle. Il a aussi eu des entretiens avec l’ancien chef de l’Etat Henri Konan Bédié, président du Parti Démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI, opposition), et candidat lui aussi à la présidence. Le chef de la diplomatie française a aussi rencontré le président de la commission électorale indépendante (CEI) et les représentant de la société civile. S’il est vrai que la France ne peut pas toute seule financer tout le scrutin, elle a néanmoins promis d’aider dans la collecte des fonds. « Nous pouvons aider nos amis ivoiriens à trouver un financement, mais ça ne peut pas être un financement français », a déclaré Kouchner. On peut déjà dire que des relations normales sont en train de s’établir entre la France et la Côte d’Ivoire. Et la force de la Licorne restera encore en terre ivoirienne, du moins jusqu’à la fin des élections de novembre prochain. Quelle que soit l’issue du scrutin, Kouchner a déclaré sur les ondes de RFI que Paris « soutiendra le candidat qui gagnera, et personne d’autre. » On le saura, le moment venu. Il y a trop de volte-face entre ce que l’on dit et ce que l’on fait ! KK