Compétitivité Territoriale La Recherche D'avantages Absolus

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COMPÉTITIVITÉ TERRITORIALE : LA RECHERCHE D'AVANTAGES ABSOLUS Roberto Camagni De Boeck Supérieur | « Reflets et perspectives de la vie économique » 2006/1 Tome XLV | pages 95 à 115

Article disponible en ligne à l'adresse : -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------https://www.cairn.info/revue-reflets-et-perspectives-de-la-vieeconomique-2006-1-page-95.htm -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 160.176.35.84 - 11/04/2019 06h56. © De Boeck Supérieur Powered by TCPDF (www.tcpdf.org)

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ISSN 0034-2971 ISBN 2804151700

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Compétitivité territoriale : la recherche d’avantages absolus

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Résumé – L’article discute la notion de compétitivité territoriale en s’attachant à deux questions subordonnées : la solidité de la notion de compétitivité territoriale elle-même, en termes de théorie économique, et les nouvelles assises sur lesquelles s’appuie cette compétitivité, selon une approche de type cognitif-évolutif. La notion de compétitivité territoriale apparaît théoriquement solide, non seulement à cause du rôle que le territoire joue en fournissant aux entreprises individuelles des instruments compétitifs relevant du milieu, mais surtout à cause du rôle qu’il joue dans les processus de construction des connaissances, des codes interprétatifs, des modèles de coopération et de décision sur lesquels se fondent les parcours innovateurs des entreprises. En outre, certaines lois gouvernant l’économie des échanges internationaux et qui se réfèrent au principe ricardien d’avantage comparatif, n’agissent pas au niveau intra-national, ce qui ajoute à l’importance de la compétitivité territoriale. Ainsi, à un niveau territorial plus détaillé, et donc dans des économies ouvertes non seulement aux échanges mais aussi aux mouvements des facteurs, si un certain niveau ou un certain taux de croissance de la compétitivité n’est pas assuré, cette économie peut être destinée à la crise, au dépeuplement, à la désertification. Mots clés – compétitivité territoriale, mobilité factorielle, milieu, apprentissage collectif.

Abstract – The article discusses the concept of territorial competitiveness by examining two subordinate questions: the solidity of the concept of territorial competitiveness itself, in terms of economic theory, and the new bases on which this competitiveness is relying, according to a cognitive-evolutionary type approach. The concept of territorial competitiveness appears theoretically strong not only because of the role played by the territory, supplying the individual firms with competitive instruments connected to the milieu, but especially because of its role in the building processes of knowledge, interpretative codes, models of co-operation and decision on which are founded the innovating courses of the companies. Moreover, economic laws about international trade, which refer to the Ricardian principle of comparative advantage, do not act on the intranational level, adding to the importance of territorial competitiveness. Thus, for a more *

Politecnico di Milano.

Reflets et Perspectives, XLV, 2006/1 — 95

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Roberto Camagni *

ROBERTO CAMAGNI

disaggregated territorial level, and thus for a more opened economy, not only with regard to trade but also factor mobility, if a certain level or a certain growth rate of competitiveness is not ensured, this economy can be subject to crisis, depopulation, and desertification. Key words–– territorial competitiveness, factor mobility, milieu, collective learning. Keywords

La notion de compétitivité est aujourd’hui une notion fort courue dans le débat sur les politiques de développement, nationales et locales. Et ce succès a justement déclenché une série de questions sur les fondements théoriques de cette notion, en particulier lorsqu’elle est appliquée à la problématique des stratégies de développement des régions et des villes. Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 160.176.35.84 - 11/04/2019 06h56. © De Boeck Supérieur

D’une part, il faut considérer que, si les termes sont relativement nouveaux pour le débat public, les concepts qu’ils sous-tendent sont anciens, bien ancrés dans la théorisation des sciences régionales. En fait, à y regarder de près, que sont les réflexions sur les districts industriels sinon une conceptualisation des sources de compétitivité d’un système de PME locales ? Que sont les effets de polarisation de Perroux sinon une théorisation des effets d’attraction locale d’activités complémentaires ? Et à propos de la théorie de la localisation développée dans les soixante-dix premières années du XXe siècle : n’est-elle pas une analyse sur les forces de développement d’activités locales et d’attraction d’activités mobiles, à la recherche des meilleures conditions de production ? D’autre part, la notion de compétitivité, considérée au niveau national, a été vivement contestée par un spécialiste bien connu d’économie internationale, Paul Krugman (1998). Ses considérations, sceptiques et polémiques, ont suscité une certaine perplexité parmi les spécialistes d’économie territoriale quant à leur validité dans des contextes plus restreints que le contexte national, mais n’ont jamais fait l’objet d’une analyse critique explicite, ce qui permet d’affirmer que la question de la légitimité théorique de cette notion demeure à l’heure actuelle toujours ouverte. Nous nous proposons d’affronter directement ce thème, en nous attachant en particulier à deux aspects subordonnés : la solidité de la notion de compétitivité territoriale elle-même, en termes de théorie économique, et les nouvelles assises sur lesquelles s’appuie cette compétitivité, selon une approche de type cognitifévolutif. Selon la thèse que nous avançons ici, la notion de compétitivité territoriale est théoriquement solide non seulement à cause du rôle que le territoire joue en fournissant aux entreprises individuelles des instruments compétitifs relevant du milieu, mais surtout à cause du rôle qu’il joue dans les processus de construction des connaissances, des codes interprétatifs, des modèles de coopération et de décision sur lesquels se fondent les parcours innovateurs des entreprises. En particulier, 96

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1 INTRODUCTION

COMPÉTITIVITÉ

TERRITORIALE

:

LA RECHERCHE D’AVANTAGES ABSOLUS

cela met en exergue les processus que nous définissons comme étant ceux de l’apprentissage collectif (Camagni, 1991a ; Favereau, 1994 ; Capello, 1999 ; Keeble & Wilkinson, 1999), et qui réalisent une croissance « socialisée » des connaissances, en s’intégrant non seulement à la culture interne des entreprises individuelles mais aussi et surtout au marché local du travail (ou, comme l’on disait jadis, à l’atmosphère industrielle locale).

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un système d’externalités technologiques localisées, c’est-à-dire un ensemble de facteurs aussi bien matériels qu’immatériels, qui, grâce à l’élément de la proximité et à la réduction des coûts de transaction qu’elle comporte, peuvent devenir aussi des externalités patrimoniales ;



un système de relations économiques et sociales qui contribuent à la constitution du capital relationnel (Camagni, 1999) ou du capital social (Putnam, 1993 ; World Bank, 2001) d’un certain espace géographique ;



un système de gouvernance locale, qui rassemble une collectivité, un ensemble d’acteurs privés et un système d’administrations publiques locales.

La deuxième thèse que je me propose d’expliciter est que certaines lois gouvernant l’économie des échanges internationaux n’agissent pas au niveau intra-national, ce qui ajoute à l’importance de la compétitivité territoriale. Je me réfère en particulier au principe ricardien d’avantage comparatif, qui assigne à chaque pays son rôle dans la division internationale du travail, quel que soit le niveau d’efficacité et de compétitivité de tous ses secteurs productifs. Je soutiens au contraire que, à un niveau territorial plus détaillé, et donc dans des économies ouvertes non seulement aux échanges mais aussi aux mouvements des facteurs, si un certain niveau ou un certain taux de croissance de la compétitivité n’est pas assuré, cette économie peut être destinée à la crise, au dépeuplement, à la désertification. Il n’est donc pas risqué d’affirmer que les territoires sont en compétition entre eux, aussi bien dans l’attraction d’investissements directs étrangers (ou extérieurs) que dans la définition de leur rôle productif, qui n’est ni automatique ni garanti, à l’intérieur de la division spatiale du travail. L’attraction et la compétitivité locale dépendent de facteurs largement semblables et communs, qui ne résident pas seulement dans des externalités physiques, l’accessibilité ou les qualités d’environnement, mais aussi dans le capital relationnel et dans la capacité d’apprentissage associée au territoire.

2 CARACTÈRE CUMULATIF DE LA PRODUCTION DE CONNAISSANCE La globalisation n’est pas un état mais un processus : l’intégration planétaire croissante du marché des biens et des services, du marché des localisations des activités économiques, du marché des facteurs productifs et notamment des technologies et 97

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Ce résultat est étayé par les différentes dimensions du concept économique de « territoire ». Celui-ci désigne en effet, à la fois :

ROBERTO CAMAGNI

Si l’on observe les processus de globalisation ne considérant que les rapports fonctionnels et de marché, on en pourrait déduire un jugement de neutralité territoriale : opportunités et défis pourraient apparaître équivalents et spéculaires. Mais le jugement change radicalement lorsque l’on considère certains aspects qualitatifs nouveaux du cadre international actuel : l’importance croissante du facteur connaissance et des éléments immatériels liés à la culture, aux compétences, à la capacité innovatrice (Amin & Wilkinson, 1999 ; Keeble & Wilkinson, 2000).

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En fait, ces éléments se développent et s’accumulent à travers de lents processus d’apprentissage, individuel ou collectif, et se nourrissent d’information, d’interaction, d’investissements dans la recherche et dans la formation. En conséquence, ils sont essentiellement localisés et cumulatifs, ils s’intègrent au capital humain et aux réseaux locaux de relation, au marché du travail et au milieu social (Camagni, 1991b ; Asheim, 1996) et s’avèrent donc très sélectifs en termes spatiaux. Analysé dans cette perspective internationale, le progrès technique perd sa caractéristique de bien public, parfaitement mobile et accessible ; au contraire, il ne circule rapidement qu’à l’intérieur de réseaux sélectionnés et exige, pour l’adoption et l’appropriation efficaces des profits potentiels qui en découlent, la disponibilité d’assets immatériels de haute qualité (Savy & Veltz, 1995, Introduction ; Guillain & Huriot, 2000). « Tandis que les entreprises peuvent puiser à un stock croissant de connaissance codifiée, on leur demande un investissement plus grand dans les connaissances tacites – comme le capital humain, l’organisation et le management – pour obtenir des bénéfices concrets du changement technologique e de l’innovation » (OECD, 1999, p. 3). On assiste ici à une dialectique complexe entre l’hyper-mobilité de certains facteurs de production et l’ancrage territorial d’autres facteurs, qui agissent par conséquent comme les facteurs de localisation véritables et cruciaux pour les processus de production les plus avancés. Le résultat probable est un accroissement des forces centripètes du développement – économies d’échelle et d’envergure (scope economies), rendements croissants de tout genre – et des forces centrifuges de l’exclusion territoriale et du déclin. Il s’avère que les nouvelles technologies peuvent être achetées et utilisées partout (mieux : elle doivent être utilisées partout, puisqu’elles imposent des standards désormais partagés, concernant la qualité des produits et des processus) et que les réseaux de télécommunication sont désormais plus ou moins ubiquitaires, mais les compétences professionnelles et le « capital relationnel » qu’elles exigent pour leur utilisation optimale et innovatrice ne sont pas disponibles partout, bien au contraire (Graham, 1999). De ce qui précède découlent deux réflexions : d’une part, certains territoires particuliers comme les villes, et notamment les grandes villes, très riches en capital humain et en « capital relationnel », mais aussi ces territoires tout aussi particuliers 98

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de l’information (Scott, 2001). Certes, il ne s’agit pas d’un phénomène nouveau, car souvent au cours du siècle dernier il a atteint des niveaux comparables aux niveaux actuels, et, surtout, il ne s’est pas manifesté de façon soudaine et catastrophique, comme la brusque fortune de ce mot pourrait le suggérer. Ce qui est nouveau, pourtant, c’est l’accélération simultanée de tant de processus d’intégration à long terme, qui s’interpénètrent et se renforcent réciproquement.

COMPÉTITIVITÉ

TERRITORIALE

:

LA RECHERCHE D’AVANTAGES ABSOLUS

que la littérature définit comme districts industriels ou milieux innovateurs, tireront les avantages les plus grands de la globalisation ; de l’autre, tous ces territoires, mais surtout les premiers, rivaliseront directement pour attirer les grands flux de capital mobile au niveau international, que nous avons cité.

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La globalisation est certainement destinée à faire monter le climat compétitif entre les entreprises. Cela va déclencher d’importants processus de sélection et de « destruction créatrice », capables de bouleverser des équilibres industriels et territoriaux même consolidés. Il est pourtant légitime de se demander si tout cela nous autorise à affirmer que les territoires rivalisent directement entre eux, en cherchant à attirer de nouvelles entreprises ou en aidant les entreprises existantes à survivre aux transformations et à prospérer ? Est-il juste et économiquement correct d’envisager un renforcement de la « compétitivité » des territoires en termes de politiques de développement ? Dans les dix dernières années, un débat important s’est développé sur ce sujet, à la suite des positions polémiques de Paul Krugman. Limité d’abord au niveau national, le débat s’est récemment élargi au niveau régional et territorial qui nous intéresse ici 1. L’hétérogénéité inhérente à la formation scientifique, à la logique et au langage des participants (économistes internationaux, spécialistes d’économie d’entreprise, géographes et économistes régionaux), explique à mon sens les résultats peu concluants du débat où les différents arguments, plutôt que s’opposer, se sont souvent additionnés et juxtaposés, et les différents niveaux territoriaux ont toujours été mélangés, comme si les mêmes « lois » économiques étaient également applicables aux villes, aux régions et aux nations 2. Très souvent on a abouti à des conclusions contradictoires, du type : « cette proposition est vraie, mais la proposition contraire l’est aussi ». Le problème dont il s’agit n’est ni abstrait ni éloigné des préoccupations opérationnelles concernant le développement territorial : de la réponse qu’on donne aux questions qui précèdent dépend la justification théorique des politiques de développement local, visant le renforcement de la compétitivité et du pouvoir d’attraction des territoires et leur capacité de répondre aux besoins des citoyens et aux nécessités des entreprises en termes de bien-être et d’efficacité collective. Je crois donc qu’il est nécessaire d’approfondir ce sujet en déterminant ce qu’il y a de valable dans les différentes positions et en envisageant toute cette thématique de façon unitaire, cohérente et scientifiquement solide. 1. 2.

Le débat a été hébergé par la International Regional Science Review, n° 1-2, 1996 et par Urban Studies, n° 5-6, 1999. Krugman a réuni ses interventions sur ce sujet (Krugman, 1998). Les éditeurs du numéro spécial de Urban Studies affirment dans leur présentation : « Comme on le verra, les auteurs qui contribuent à ce numéro de la revue croient en général que les villes et les territoires rivalisent les uns avec les autres. […] Les conséquences pour les économies régionales restent incertaines » (Lever & Turok, 1999, p. 792 ; nous traduisons).

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3 LA COMPÉTITIVITÉ TERRITORIALE : « HANTISE » OU SOUCI LÉGITIME ?

ROBERTO CAMAGNI

La provocation de Krugman est bien connue. Il conteste la « hantise » croissante pour le thème de la compétitivité internationale, en niant que, au niveau théorique aussi bien qu’empirique, « les fortunes d’un pays dépendent largement de son succès sur les marchés internationaux » (Krugman, 1998, p. 5). Il affirme : a) que « les pays ne rivalisent pas entre eux de la même façon que les entreprises », car ils « ne peuvent pas faire faillite », “do not go out of business”, comme cela peut arriver au contraire aux entreprises qui sont les vrais sujets engagés dans la compétition internationale ;

c)

que la signification la plus importante des exportations n’est pas celle d’indicateurs de compétitivité mais plutôt celle d’instrument de paiement des importations ; ces dernières sont le véritable élément qui détermine une augmentation du bien-être collectif, à travers l’augmentation du revenu réel qu’elles permettent grâce aux coûts plus faibles par rapport à la production interne ;

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d) que, suivant le modèle ricardien bien connu du commerce international, « un pays trouvera toujours un ensemble de biens sur lesquels il montre un “avantage comparatif”, même s’il n’y a pas de biens sur lesquels il montre un “avantage absolu” » (ibid., p. 91). Par conséquent, affirme-t-il, non seulement le but d’améliorer la compétitivité est tout à fait faux (flatly wrong) mais il est aussi dangereusement fourvoyant (misleading), puisque, lorsque les autorités nationales cherchent à intervenir sur l’avantage compétitif de leurs territoires, elles finissent par tomber dans une sorte de néo-mercantilisme, nuisible à une allocation équilibrée des ressources, qui devrait se fonder sur des éléments objectifs, appréciés de façon neutre par le marché. L’argument traditionnel « de l’industrie naissante » qu’on a souvent avancé pour justifier des politiques protectionnistes temporaires, et l’argument plus moderne favorable aux « politiques stratégiques » de commerce international, qui justifient des aides à l’exportation et des tarifs douaniers temporaires (ibid., p. 96-97), sont des arguments pris en considération et théoriquement acceptés par Krugman, puisqu’ils appartiennent aux contributions innovatrices de Krugman lui-même à la pensée économique et à la « nouvelle » théorie du commerce international, mais dont « l’utilisation excessive est vivement déconseillée » (p. 99) et donc pratiquement rejetés dans la pratique. Je me propose de considérer ici ces arguments de Krugman, ainsi que d’autres du même auteur, en soulignant certaines indications acceptables et utiles qui en découlent, mais en montrant aussi les aspects qu’on ne peut pas accepter si on raisonne en termes de développement territorial, et non pas national. Je me tiendrai à une perspective spatiale, à la fois inter-nationale et intra-nationale, en organisant mes réflexions selon un ordre croissant d’importance théorique. 1) Krugman montre avec raison que le but véritable du commerce international est constitué par les importations, non par les exportations. Ces dernières ne sont que le moyen par lequel on finance les importations, « avantageuses en cela 100

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b) que les pays individuels, tout en vendant des produits en concurrence entre eux, se transforment simultanément en grands marchés d’exportation et en fournisseurs réciproques des importations nécessaires (ibid., p. 6 et 9) ;

COMPÉTITIVITÉ

TERRITORIALE

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LA RECHERCHE D’AVANTAGES ABSOLUS

Il s’agit d’une affirmation vraie et importante par laquelle l’économiste peut montrer à l’expert d’économie d’entreprise le fait, suffisamment contre-intuitif, que l’augmentation du revenu réel et du bien-être collectif réside dans la possibilité d’acheter à l’extérieur les mêmes biens à un prix moins élevé, et donc réside dans les importations ; les exportations, au contraire, représentent, au sens macro-économique, une soustraction de ressources à la consommation locale, tout en étant nécessaires pour l’équilibre macro-économique de la balance commerciale et du marché du travail. La division spatiale du travail – y compris la plus spectaculaire, celle entre ville et campagne – se fonde justement sur le principe normatif de l’avantage du commerce, qui permet à chaque partenaire commercial de bénéficier des avantages de la spécialisation (spécificités territoriales, dotation de ressources et de facteurs, économies d’échelle, économies d’apprentissage), en augmentant à la fois son niveau de bien-être et celui des autres.

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Mais il faut considérer en tous cas un autre aspect du problème : les termes de l’échange, c’est-à-dire les prix relatifs entre importations et exportations, lesquels sont très importants pour les partenaires commerciaux individuels. Augmenter l’efficacité des secteurs d’exportation, c’est être en mesure d’importer la même quantité de biens en utilisant une quantité inférieure de ressources ou de facteurs productifs locaux (c’est le cas des innovations de procédé), ou être en mesure d’importer une quantité plus grande de biens avec la même utilisation de facteurs locaux (c’est le cas des innovations de produit ou de la différenciation des produits, qui permettent d’augmenter le prix des produits sans que la demande se réduise). L’efficacité des secteurs d’exportation, ou leur compétitivité, garde donc une certaine importance. S’agit-il d’une attitude mercantiliste ? Oui, dans le sens historique – et le meilleur – du mot. Est-ce que cela implique un jeu à somme nulle ? Non, parce que, en ligne générale, l’avantage d’un partenaire n’implique pas une réduction de l’avantage de l’autre car une partie de l’accroissement d’efficacité intérieure peut déterminer une réduction des prix à l’exportation, proportionnelle au degré de compétition en vigueur dans le secteur, en profitant ainsi aux autres partenaires commerciaux. 2) Krugman nous rappelle avec raison que l’un des éléments les plus importants du bien-être local est représenté par l’efficacité du secteur non exposé à la concurrence internationale, producteur de biens et de services pour le seul marché intérieur. Cela est particulièrement vrai dans un pays comme les États-Unis, où les exportations représentent seulement 10 % du produit intérieur, et où donc, sur la base d’un calcul empirique, la quantité de biens et de services qu’on peut acheter avec un certain revenu monétaire dépend principalement de la productivité intérieure, non de la compétitivité extérieure. Et pourtant l’importance de la productivité intérieure pour le bien-être local dépend de façon cruciale de la taille du pays et de son degré d’ouverture ; si l’on considère l’exemple d’un petit pays, d’une région minuscule, voire d’une île spécialisée seulement dans la pêche ou dans le tourisme, la compétitivité de ces deux secteurs d’exportation déterminera l’emploi, le revenu et le montant de la consommation 101

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qu’elles coûtent moins que produire directement » ce dont on a besoin (Krugman, 1996, p. 19).

ROBERTO CAMAGNI

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3) Krugman nous met en garde contre une acceptation trop facile des implications de politique industrielle de la strategic trade theory, à laquelle il a lui-même fourni d’importantes contributions. Dans un monde caractérisé par des rendements croissants (au niveau des entreprises comme à celui du milieu local), où l’histoire, le hasard et les interventions de politique structurelle expliquent mieux la spécialisation internationale et la structure des échanges que la proportion des facteurs ou les différences intrinsèques des différents pays, une politique industrielle à caractère stratégique peut être très efficace et justifiée. L’opposition de Krugman dans ce cas est moins forte et concerne la difficulté, les coûts et les risques de l’attribution à l’État du choix relatif aux secteurs et aux produits de futur succès. Je pense au contraire qu’il pourrait être profitable de prendre quelques risques, surtout si l’objectif des politiques publiques n’est pas un produit ou un secteur mais une filière technologique, et si l’approche stratégique vise à évaluer les effets des décisions politiques générales, non directement reliées aux impositions de tarifs ou d’aides aux exportations dans tel ou tel secteur 4. Dans ce cas, il est évident qu’il faut procéder à une appréciation attentive des implications des différentes décisions (par exemple : dépense militaire ou recherche médicale), mais il s’agit d’appréciations que l’administration publique devrait normalement effectuer dans tous ses champs d’intervention. En outre, les politiques industrielles peuvent être des politiques horizontales, non sectorielles, comme les politiques visant à l’amélioration de la qualité des facteurs de production : le capital humain, les infrastructures, l’accessibilité régionale, les réseaux de communication et d’information, auxquels on peut ajouter les politiques de régulation et d’intervention sur les règles. Dans ce cas, il ne s’agit pas de politiques visant de façon sélective des secteurs spécifiques, puisqu’elles peuvent s’avérer cruciales pour beaucoup de secteurs importants. 3.

4.

Cette affirmation est analogue à celle exprimée par Thirlwall dans un article bien connu (Thirlwall, 1980, p. 422), lorsqu’il soutient que « la demande d’exportations est un élément vital de la demande régionale, nécessaire pour compenser l’appétit régional d’importations (a region’s appetite for imports) faute d’autres composantes compensatoires de dépense ». À la fin des années 1950 et au début des années 1960, la décision politique explicite de retarder l’introduction en Italie de la télévision en couleurs a produit, pour l’industrie électronique nationale, un désavantage compétitif important, que par la suite elle n’a jamais réussi à surmonter à cause justement de l’existence de positive feed-back, qui récompensent les premiers venus. De même, dans des années plus récentes, l’introduction précoce dans beaucoup de pays de regulations concernant l’environnement a amené le développement anticipé d’une industrie de technologies d’environnement, prête à se répandre sur les marchés étrangers dès que les réglementations initiales s’élargiraient à d’autres pays.

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intérieure réelle, presque totalement tributaire des importations 3. Les pays européens sont trois à six fois plus ouverts au commerce international que les ÉtatsUnis ; la plupart des entreprises vendent aussi bien sur le marché intérieur que sur les marchés étrangers ; beaucoup de secteurs apparemment « domestiques » comme le commerce ou le secteur hôtelier, vendent leurs services sur le marché touristique international ; voilà pourquoi dans ces pays les deux notions de productivité intérieure et de compétitivité extérieure apparaissent bien plus semblables qu’aux États-Unis.

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4) Si, au lieu de se borner au cadre théorique du commerce international (qui exclut tout mouvement international de facteurs), on introduit ces mouvements mêmes, et notamment les mouvements de capital, il est permis d’affirmer qu’un système de production compétitif ne signifie pas seulement une bonne performance dans l’exportation mais – ce qui est plus intéressant – une capacité d’attraction internationale vis-à-vis du capital réel et du capital financier. Cela pourrait aisément tourner le surplus commercial potentiel en déficit, en permettant au pays de financer ses importations à bon marché et des niveaux de vie croissants à travers la confiance des marchés internationaux des capitaux. Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 160.176.35.84 - 11/04/2019 06h56. © De Boeck Supérieur

Voilà pourquoi, dans un pays ouvert, la compétitivité et le progrès technique ne devraient jamais être limités par quelque forme que ce soit de résistance sociale au changement. David Ricardo, qui est avec Robert Torrens le père du principe de l’avantage comparatif, tout en étant convaincu que la technologie exerce un effet destructeur sur le travail, affirme dans le chapitre célèbre On machinery des Principles : « L’utilisation des machines ne saurait jamais être découragée sans préjudice dans un État, puisque si l’on ne permet pas au capital d’y tirer le profit net le plus grand consenti par l’utilisation des machines, il prendra la route de l’étranger, ce qui comporterait une réduction de la demande de travail bien plus grave que l’utilisation la plus étendue des machines » (Ricardo, 1817, p. 388 de l’édition du 1971) 5. Si l’on abandonne l’hypothèse de l’immobilité des capitaux, qui caractérise le modèle abstrait de commerce international, et si l’on adopte une perspective dynamique, l’importance du problème de la compétitivité et de l’efficacité des secteurs productifs locaux par rapport aux autres pays apparaît de façon indiscutable.

4 AVANTAGE ABSOLU ET AVANTAGE COMPARATIF Finalement, et c’est le point essentiel du point de vue théorique, il y a un cas important où une position à la Krugman ne pourrait être défendue : celui de la confrontation et de la compétition entre territoires locaux, intra-nationaux. À ce propos, Krugman lui-même, il faut le préciser, n’évoque jamais ce cas dans sa discussion de la compétitivité, qu’il borne à la compétition entre pays. Mes remarques visent 5.

Ce point pourrait également être accepté par Krugman, qui affirme en effet : « Il est très important d’assurer un taux de croissance élevé en ce qui concerne la productivité et le progrès technique ; mais c’est important en soi, et non pas pour faire front à la concurrence internationale » (Krugman, 1998, p. 101). À notre avis, ils sont nécessaires aussi pour la compétitivité des exportations et pour l’attraction des investissements extérieurs, réels et financiers.

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S’agit-il de néo-mercantilisme ? Encore une fois oui, au sens progressif de la pratique historique et de la théorisation mercantiliste. Nous devons au mercantilisme la démolition des barrières féodales qui entravaient la mobilité des biens à l’intérieur des pays, l’amélioration des infrastructures intérieures destinées à faciliter l’accessibilité des produits aux marchés nationaux et internationaux, l’utilisation du surplus commercial pour augmenter l’offre de monnaie, réduire les taux d’intérêt, stimuler les investissements, encourager l’esprit d’entreprise (Tiberi, 2000, ch. 1).

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À mon avis, le principe de l’avantage comparatif n’est ni pertinent ni utilisable dans le cas de la confrontation entre économies locales et dans celui du commerce inter-régional. Par conséquent, la conclusion selon laquelle chaque région aura toujours son rôle et sa spécialisation garantis dans la division inter-régionale du travail, est irrecevable. Une région, en effet, peut très bien être poussée out of business si l’efficacité et la compétitivité de tous ses secteurs sont inférieures à celles des autres régions, et cela essentiellement parce que, au niveau inter-régional, les deux mécanismes d’ajustement qui permettent théoriquement de passer d’un régime d’avantage absolu à un régime d’avantage comparatif – c’est-à-dire la flexibilité des prix et des salaires vers le bas et la dévaluation de la monnaie – ou bien ne fonctionnent pas correctement ou bien n’existent pas du tout.

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Le raisonnement est le suivant. Le modèle de Ricardo est un modèle de troc, opérant en termes de coûts/prix relatifs de deux biens dans deux pays ; dans un tel contexte on démontre aisément le côté normatif du principe (ou du paradoxe) de Ricardo, selon lequel les pays tirent tous les deux un avantage de la spécialisation et de l’échange. Et pourtant, du point de vue positif, sommes-nous bien sûrs que l’échange a vraiment lieu ? En effet, l’échange est normalement effectué par des opérateurs qui comparent des prix absolus, non des prix relatifs (c’est-à-dire le prix du même bien dans les deux pays, exprimé en devise commune) 6, et donc des valeurs où le coût de production (en heures de travail) est multiplié par un salaire monétaire et par un taux d’échange. Dans le cas de deux pays séparés, qui passent, au sens logique, d’une condition d’autarcie à une condition de commerce international, on peut supposer que chaque pays montre dans un des deux biens un avantage absolu, audelà du seul avantage comparatif. Grâce au fait qu’une productivité éventuellement inférieure dans un pays sera parfaitement contrebalancée, en moyenne, par des salaires réels moins élevés, ce pays montrera vraisemblablement un avantage absolu dans un des deux biens, celui notamment où la productivité interne est plus élevée que la productivité moyenne, c’est-à-dire celui où il existe un avantage comparatif. Après l’échange, le taux d’échange sera en mesure de garantir un équilibre de la balance commerciale. Dans le cas des pays, donc, l’échange aurait effectivement lieu ; mais que se passerait-il si une perturbation faisait augmenter les salaires ou le taux d’échange d’un pays ? À court terme l’avantage absolu pourrait disparaître, et donc le pays n’exporterait plus de biens et les importerait tous, en engendrant un chômage de masse. À plus long terme, pourtant, l’équilibre se rétablirait grâce à deux mouvements alternatifs : i) un mécanisme « classique » de flexibilité vers le bas des salaires réels et des prix, déclenché par le déséquilibre du marché du travail et par la réduction de l’offre intérieur de monnaie (déterminée par la sortie d’or, destinée à payer les 6.

Ricardo lui-même le rappelle : « Toute transaction dans le commerce est une transaction indépendante » (Ricardo, 1971, p. 157) ; « les conditions monétaires de l’échange sont un décalage dans les coûts absolus » (Onida, 1984, p. 81).

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donc principalement les débats de spécialistes régionaux, où la distinction entre les deux niveaux, national et régional (ou local), n’a jamais été respectée comme elle l’aurait dû.

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importations) ; et ii) un mécanisme « moderne » de dévaluation du taux d’échange, déclenché par le déséquilibre de la balance commerciale. Mais, qu’est-ce qui se passe dans un contexte territorial, intra-national ? En principe, ce contexte est caractérisé par trois éléments qui le distinguent du modèle de commerce international : a)

on ne peut pas supposer une condition d’autarchie comme premier moment logique (puisque les échanges entre territoires – entre régions, entre villes, entre villes et campagne – sont la règle) ;

c)

il n’existe de monnaie régionale ni de taux d’échange spécifiques pour chaque territoire.

Les effets théoriques de ces trois conditions ne sont pas négligeables (nos exemplifications se réfèrent au cas des régions faibles) : Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 160.176.35.84 - 11/04/2019 06h56. © De Boeck Supérieur

a’. dans une perspective micro-économique, le niveau des salaires monétaires définis par contrat par les entreprises doit avoir quelque rapport avec la productivité ; mais ce rapport n’est pas aussi étroit que le modèle l’exige, car : i) les salaires monétaires sont définis dans une large mesure par des contrats collectifs nationaux et se réfèrent à un niveau (et à une croissance) de la productivité moyenne nationale (voire à ceux des régions les plus avancées) et non à ceux des régions faibles ; ii) au cas où la productivité moyenne plus faible d’une région dépendrait d’éléments extérieurs aux entreprises (accessibilité réduite, qualité médiocre des services publiques), les travailleurs devraient accepter, pour assurer la compétitivité des produits locaux, des salaires monétaires inférieurs à leur productivité d’entreprise, ce qui apparaît peu réaliste dans un contexte où l’émigration est logiquement et pratiquement admise, et où le niveau des prix de la plupart des biens consommés localement est un niveau « international » ou « inter-régional » (des salaires monétaires inférieurs à la moyenne nationale produiraient donc aussi des salaires réels inférieurs). Il s’ensuit que les salaires dans les régions faibles ne pourront pas baisser jusqu’aux niveaux exigés pour garantir la compétitivité extérieure au moins de certains produits ; b’. au cas où une région présenterait un désavantage absolu dans tous les biens, et souffrirait donc d’un chômage croissant et de déséquilibres croissants dans sa balance commerciale, cette condition pourrait se stabiliser dans le temps sans être rééquilibrée par des mécanismes automatiques. En poussant l’hypothèse à l’extrême, on peut en effet envisager le cas d’un territoire qui ne produirait ni n’exporterait, qui vivrait d’importations, et où le revenu et le pouvoir d’achat intérieur seraient assurés alternativement par les revenus des travailleurs transfrontaliers navetteurs, par la vente d’actifs patrimoniaux (maisons, terrains) à des résidents extérieurs, par des transferts publics (pensions, allocations de chômage) et privés (versements des émigrés). Dans ce contexte territorial, donc, le déséquilibre de la balance commerciale ne représente pas une contrainte macro-économique et n’engendre pas des mouvements automatiques de rééquilibrage ; 105

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b) il existe des mouvements de facteurs productifs entre territoires (travailleurs transfrontaliers qui résident dans un territoire et travaillent dans un autre, mouvements de capital, achats d’actifs patrimoniaux) ;

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b”. il est évident qu’à la longue une situation comme celle qu’on a ébauchée au point précédent n’est pas soutenable ; mais, dans un contexte de mobilité des facteurs, l’ajustement se produirait de façon bien plus rapide et réaliste à travers l’émigration et le dépeuplement plutôt qu’à travers la chute des salaires réels 7. Aussi bien le capital que le travail, s’ils recevaient dans une région des rémunérations moins élevées que les rémunérations nationales par effet de conditions de production inefficaces, émigreraient rapidement à la recherche de conditions d’emploi meilleures, une fois cessé le support des territoires extérieurs ou du gouvernement national à travers prêts, aides et transferts de revenu. L’immobilité des facteurs est donc cruciale pour la validité du principe des coûts comparatifs 8 ; c’. le taux d’échange national, en admettant qu’il soit lié seulement aux mouvements commerciaux (et que par conséquent la balance des capitaux soit en équilibre au niveau national), est défini par une moyenne pondérée des balances commerciales régionales, où coexistent généralement les régions « fortes », exportatrices nettes tendancielles et les régions « faibles », importatrices nettes tendancielles 9 : les unes trouvent donc un change relativement sous-évalué par rapport à leur condition spécifique, tandis que les autres trouvent un change relativement surévalué, peu favorable à leurs exportations ; c”. dans un contexte dynamique, en supposant une situation initiale d’équilibre inter-régional (où chaque région serait spécialisée dans la production de certains biens), si la productivité d’une région (et la compétitivité des secteurs concernés) augmentait à un taux inférieur à celui des autres régions, à égalité de dynamiques salariales (définies au niveau national), son avantage compétitif se réduirait jusqu’à disparaître et elle ne pourrait plus utiliser l’instrument le plus naturel qui s’offre aux pays : la dévaluation du taux d’échange. Pour les raisons qu’on a déjà illustrées, les salaires réels aussi n’auraient pas la flexibilité nécessaire et la région pourrait donc se retrouver sans aucun secteur de spécialisation et d’exportation. En conclusion : régions et territoires locaux, à cause de leur ouverture intrinsèque aux mouvements des biens ainsi qu’à ceux des facteurs, opèrent dans le contexte des échanges inter-régionaux dans un régime d’avantage absolu et non d’avantage comparatif. Les mécanismes d’ajustement qui dans ce dernier garantissent toujours un rôle dans la division internationale du travail, même à des pays 7.

8.

9.

On ne veut pas soutenir qu’il n’y a pas d’effet « salaires réels », mais que, étant donné les conditions d’ouverture au commerce extérieur (prix « internationaux » des biens importés) et à la mobilité des facteurs, cet effet ne serait ni suffisant ni dominant. En commentant le théorème de Ricardo, Mark Blaug affirme en effet : « L’analyse de Ricardo se propose de montrer que les conditions rendant possible le commerce international sont très différentes de celles qui permettent le commerce intérieur. Si l’Angleterre et le Portugal étaient deux régions du même pays [et que la première était moins efficace dans les deux biens], tout le capital et le travail émigreraient vers le Portugal et les deux biens seraient produits dans la région. À l’intérieur d’une même nation, le commerce entre deux localités exige une différence absolue des coûts ; pour qu’il y ait commerce international, en revanche, il suffit une différence des coûts comparatifs » (Blaug, 1997, p. 120 ; nous soulignons). Du point de vue de la comptabilité macro-économique, les régions fortes présentent généralement un surplus commercial vis-à-vis d’impôts plus considérables, transferts publics inférieurs, taux d’épargne plus considérables, et une balance des mouvements des capitaux passive (ceux que Kindleberger appelait de « mûrs créanciers ») ; les régions faibles se comportent généralement de la façon opposée.

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Le monde réel est plein de cas où des régions riches et exportatrices coexistent avec des régions pauvres (avec un déficit commercial), avec des fortes différenciations de long terme dans les niveaux de chômage, l’équilibre de comptabilité macro-économique étant assuré par le rôle de péréquation des politiques fiscales nationales ou des mouvements inter-régionaux de capitaux (par exemple : achats de biens patrimoniaux, terrains ou immeubles dans certaines régions par d’autres régions).

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En ce qui concerne les territoires arriérés, les stratégies possibles de développement ou de survie sont au nombre de trois : la mise en œuvre d’un lobbying politique visant à obtenir des transferts publics (stratégie exclusivement défensive, coûteuse, à rejeter) ; l’amélioration de la compétitivité du tissu productif local ; l’attraction d’investissements des autres régions et de l’étranger. Dans une perspective théorique, donc, il est légitime et pleinement justifiable de s’occuper de compétitivité et de pouvoir d’attraction, deux politiques qui deviennent de plus en plus importantes dans un contexte qui, comme le contexte européen, se fonde sur la création d’une aire monétaire unique, où les différents pays se rapportent les uns aux autres comme les régions d’un seul pays 11.

5 LES SOURCES DE LA COMPÉTITIVITÉ TERRITORIALE Considérons maintenant, de façon plus approfondie, la logique de la compétitivité et du pouvoir territorial comme condition économique aussi bien que comme objectif de politique. Cinq réflexions me paraissent centrales. i. Tous les textes de micro-économie et d’économie régionale considèrent les exportations comme les déclencheurs d’effets multiplicatifs de revenu et d’emploi, 10. À propos de la spécialisation dans le commerce inter-régional, Armstrong et Taylor affirment : « Le fait que le commerce soit fondé sur l’avantage comparatif et non sur l’avantage absolu est une donnée universellement acceptée mais rarement vérifiée du point de vue empirique » (Armstrong & Taylor, 2000, p. 123). À mon avis, une telle affirmation est tout à fait inacceptable au cas où on l’appliquerait aux régions. 11. Dans un travail consacré à l’expérience « régionale » aux États-Unis et aux effets négatifs de choc exogènes sur les secteurs de spécialisation d’États individuels (régions), Krugman semble se rapprocher de conclusions tout à fait semblables aux nôtres. « Si le New England était un État souverain, il aurait pu (une fois frappé par la crise) dévaluer sa monnaie et/ou poursuivre une politique monétaire expansive. En fait, non seulement ces options n’étaient pas disponibles, mais la crise du bilan publique obligea la politique fiscale à un comportement pro-cyclique, en aggravant la crise » (Krugman, 1993, p. 242).

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structurellement inefficaces dans tous les secteurs productifs, ou bien n’existent pas, ou bien s’avèrent insuffisants à rétablir un équilibre au cas où le niveau de compétitivité absolue serait inadéquat ou en voie de réduction 10. Le destin des régions ou des territoires faibles (à cause d’une inadéquation des facteurs productifs ou de conditions géographiques ou d’accessibilité défavorables) pourrait bien être celui du chômage de masse et, si les transferts publics de revenu n’étaient pas adéquats, l’émigration et l’éventuelle désertification.

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Pour exporter, les entreprises locales et leurs territoires doivent offrir quelques formes d’avantage absolu ou compétitif 12, ou mieux : cet avantage local doit avoir un caractère dynamique, car il faut renouveler constamment l’avantage compétitif à travers un flux ininterrompu d’innovations (Camagni, 1996, ch. 5). Sur quels éléments se fonde cette capacité ? Dans le cas des pays avancés, la disponibilité de ressources naturelles et la disponibilité relative des facteurs traditionnels, comme le travail et le capital, joue un rôle de plus en plus faible. Ce qu’on met en évidence aujourd’hui, ce sont deux ordres de facteurs et de processus : dans une vision agrégée, les rendements croissants issus de processus de développement cumulatifs et de l’agglomération des activités 13 ; dans une vision micro-économique et micro-territoriale, plus attentive au rôle des différentes subjectivités territoriales, les avantages spécifiques créés d’une façon sélective et stratégique par les entreprises individuelles, les capacités de coopération et de synergie renforcées par une administration publique pro-active, les externalités fournies par les gouvernements locaux et nationaux, certaines spécificités produites pendant l’histoire par une culture territoriale 14. Dans ce dernier cas, qui nous intéresse surtout, il s’agit évidemment d’avantages artificiels, créés par l’action volontaire des communautés locales et de leurs administrations. ii. Les entreprises exigent, de plus en plus, non seulement des externalités génériques, mais des « ressources spécifiques » et sélectives (en termes de compétences et de services, par exemple), qu’il peut être difficile ou trop lent d’acquérir à travers le marché. Pour cette raison, elles s’engagent de plus en plus dans des actions de coopération avec d’autres entreprises, avec des acteurs collectifs locaux et avec les administrations publiques en vue de la conception, réalisation et production de ces ressources (Maillat et al., 1993 ; Colletis & Pecqueur, 1995 ; Dupuy & Gilly, 1995 ; Cooke & Morgan, 1998). iii. Des conditions territoriales particulières, caractérisées par une richesse particulière d’interactions entre entreprises, peuvent faciliter la coopération entre 12. La notion d’« avantage compétitif » de Porter, élaborée en dehors du contexte de la théorie des échanges internationaux, se rapproche de la notion d’avantage absolu et peut être utilisée avec profit, comme le fait l’auteur (Porter, 1990, 2001), pour réfléchir sur la compétitivité territoriale. 13. Pour une revue des contributions récentes, cf. Catin & Ghio, 2000. 14. Porter affirme : « Les moteurs de la prospérité évoluent de plus en plus [du niveau macroéconomique] vers le niveau micro-économique : les capacités et les comportements d’unités sous-jacents l’économie dans son ensemble, comme les individus, les entreprises, les industries et les clusters. […] On reconnaît de plus en plus que le succès des entreprises doit beaucoup à des éléments qui sont situés à leur extérieur », comme les relations avec les fournisseurs, le partenariat et d’autres ressources territoriales et sociales (Porter, 2001, p. 140). Voir aussi les nombreuses contributions au numéro spécial, cité ci-dessus, de International Regional Science Review (1996) et de la Revue d’Économie Régionale et Urbaine (Bellet et al., 1993).

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et donc comme les moteurs du développement. Dans une perspective conjoncturelle de court terme, nous pouvons nous arrêter à cette indication, qui voit dans la demande l’élément moteur de l’économie ; mais dans une perspective de long terme, et donc si nous voulons expliquer le développement territorial, cette optique n’est plus suffisante et nous devons repérer les raisons d’une croissance prolongée des exportations : il faut prendre en considération les sources de la compétitivité, c’est-à-dire les éléments de l’offre.

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le transcodage de l’information et son évaluation, une fonction centrale dans le processus d’innovation – à travers contacts informels, imitation, interprétation réciproque des « rumeurs » de marché ; bref, à travers un processus collectif et « socialisé » (Camagni, 1991a) ;



la coordination ex ante des décisions privées, de façon à permettre non seulement une décision plus aisée, mais aussi l’action collective (Livet & Thévenot, 1994 ; Arrighetti & Serravalli, 1999 ; Dupuy & Torre, 2000). Cette fonction est facilitée par la confiance entre acteurs locaux et par les dispositifs d’exclusion/sanction (sociale) qui frappent les comportements transgressifs ou opportunistes ;



l’apprentissage collectif, qui trouve dans le milieu local, et en particulier dans le marché du travail local, le substrat permanent auquel s’incorporer (Capello, 1999) 17.

Ces effets sont pour partie spontanés lorsqu’il existe, entre les acteurs locaux, une proximité géographique et une proximité culturelle. Ils représentent alors la base des rendements croissants au niveau local. Ils sont aussi pour partie dépendants d’une coopération explicite entre acteurs locaux, qui exigent quelque forme de gouvernance locale. Dans les deux cas, les éléments d’avantage compétitif résident à l’extérieur de l’entreprise individuelle plutôt qu’à l’intérieur de celle-ci, dans le milieu local plutôt que dans les entreprises individuelles localisées dans son espace géographique. 15. Le milieu innovateur se définit comme un ensemble de relations qui insistent sur un espace limité et qui amènent à l’unité un système local de production, une culture productive, un ensemble d’acteurs et de représentations, en déclenchant un processus localisé d’apprentissage collectif (Camagni, 1991a). 16. L’école française de la « proximité » (Bellet et al., 1993 ; Rallet & Torre, 1995 ; Dupuy & Gilly, 1995 ; Gilly & Torre, 2000) parvient, à travers des pistes parallèles à celles du Gremi, à des résultats tout à fait similaires et comparables. 17. Dans la grande entreprise, les processus d’apprentissage se produisent à son intérieur et s’incorporent à une culture d’entreprise. Dans les petites entreprises, ces processus d’apprentissage, fondamentaux pour l’innovation, ne peuvent pas se produire à cause de la complexité réduite des structures et à cause de leur instabilité excessive. Mais ces processus se produisent de façon socialisée et collective à l’extérieur des entreprises individuelles à travers la mobilité du travail spécialisé et les synergies locales, en s’incorporant à la culture productive et au milieu local.

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entreprises et acteurs sociaux et engendrer un processus cumulatif d’apprentissage qui renforce la capacité innovatrice du système territorial. Une façon efficace d’illustrer ce processus passe par la notion de milieu innovateur (Aydalot, 1986 ; Camagni, 1991b ; Ratti et al., 1997) 15 16. Dans un contexte turbulent, caractérisé par la difficulté de recueillir, élaborer, interpréter l’information, par une grande dépendance réciproque des décisions des acteurs économiques et par une complexité croissante du contexte compétitif extérieur aux entreprises, les agents économiques trouvent dans le milieu local le soutien nécessaire pour maîtriser l’incertitude. En effet, le milieu – caractérisé par des valeurs partagées, représentations et codes de comportement communs, confiance et sentiments d’appartenance – favorise la réalisation de trois fonctions importantes de nature cognitive (Camagni & Capello, 2002) :

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iv. Territoires et milieux rivalisent et coopèrent entre eux, en bâtissant leur avantage compétitif. Et cela profite à l’économie tout entière, si l’on partage une vision « générative » du développement économique en tant que processus qui évolue « par le bas », et non pas en tant que processus défini du point de vue quantitatif au niveau macro-économique et attribué ensuite par parts aux territoires individuels dans une vision « compétitive ». Seulement dans ce dernier cas, les actions réalisées par les territoires individuels aboutiraient à un jeu à somme nulle.

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v. Finalement, s’il est vrai que les entreprises utilisent de plus en plus la localisation comme instrument compétitif et la mobilité dans le territoire global comme instrument d’optimisation des coûts de production et de distribution, on ne peut pas affirmer, par ailleurs, que les territoires ne sont que des objets passifs des décisions de localisation des entreprises. En effet, ils sont formés par des collectivités attentives et par des sujets (économiques, au sens large) qui agissent dans leur propre intérêt en cherchant à retenir ou à attirer des activités économiques : travailleurs, entreprises travaillant en sous-traitance, fournisseurs d’inputs intermédiaires, de services et de facteurs productifs immobiles comme les terrains, les bâtiments et les infrastructures. Ces sujets ou acteurs territoriaux peuvent atteindre leur but non seulement au travers d’une compétition en prix/salaires, mais surtout par une qualification croissante des services fournis, qui exige l’intervention directe ou indirecte de l’administration publique. On pourrait dire que les localisations font l’objet d’un marché global où s’affrontent une demande (de la part des entreprises) et une offre (de la part des collectivités locales). En résumant, la globalisation favorise sans aucun doute le climat de compétition où agissent les entreprises. Pour maîtriser cette situation et le niveau d’incertitude croissant qui en découle, les entreprises misent de plus en plus sur un capital humain de niveau élevé, sur l’accessibilité à l’information, sur des dispositifs collectifs d’évaluation et de transcodage de l’information, sur des formes de coordinationcoopération. En outre, elles favorisent les territoires qui fournissent les nouveaux facteurs relationnels à travers des décisions explicites de localisation (Rallet, 1993). Mais si les entreprises individuelles et les individus s’engagent dans des actions collectives, productrices de – et favorisées par – la confiance et le capital social local, et si leurs interactions multiples donnent lieu à des synergies cognitives considérables, manifestes dans le milieu local, et si finalement ces actions et ces processus gagnent une vitalité supplémentaire de la coopération avec les administrations publiques locales, il semble permis de dépasser l’individualisme méthodologique qui considère l’action et la compétition d’entreprises individuelles, et de supposer la validité d’une notion collective comme celle de territoire, en affirmant que les territoires rivalisent entre eux (par l’élaboration de stratégies collectives).

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Les villes, en particulier, étant donné leur nature de concentrations d’externalités et de déclencheurs d’interaction et de synergie, et à cause de la responsabilisation et de la représentativité de leurs élus vis-à-vis des collectivités résidentes, peuvent être considérées, à juste titre, comme des milieux et des acteurs en compétition sur la scène internationale (Lacour, 1998 ; Camagni, 1999).

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6 CONCLUSIONS ET SUGGESTIONS POUR LES POLITIQUES PUBLIQUES

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Pour cette raison, les territoires à développement retardé, faibles en termes de compétitivité du tissu productif, d’accessibilité, de qualité du capital humain et de l’environnement, de capacité d’apprentissage collectif, risquent davantage l’exclusion et le déclin que par le passé. En particulier, la phase actuelle du développement, où les facteurs cruciaux sont les facteurs de connaissance et les facteurs immatériels liés à la créativité et à la capacité d’utilisation innovatrice du stock existant de technologies et de connaissances, exige des investissements considérables en ce sens (connaissances tacites, capital humain, management et organisation, coopération et intégration en réseau). Elle exige des facteurs rares, qui n’existent pas nécessairement partout, et artificiels (qui peuvent être renforcés par des politiques et des actions appropriées). Heureusement, une stratégie de compétitivité territoriale et d’amélioration de la capacité d’attraction d’entreprises extérieures fondée sur l’engagement des administrations locales et des collectivités territoriales à fournir les facteurs matériels et immatériels cités ci-dessus, apparaît largement légitime du point de vue économique car elle ne se résout pas à un simple jeu à somme nulle. Et cela parce qu’une compétitivité atteinte grâce à la qualité du territoire et à l’efficacité des services locaux profite à toutes les activités locales, qu’elles prennent origine à l’extérieur ou à l’intérieur ; une compétitivité atteinte grâce aux synergies locales entre acteurs, ou en intégrant au tissu local les entreprises extérieures, exploite des effets de débordement technologique et d’organisation (spillover) ainsi que des rendements croissants qui sont à la base de tout processus de développement économique, dans sa signification « générative ». Dans ces conditions, le rôle et les responsabilités de la programmation et de l’aménagement du territoire s’élargissent, et lancent de nouveaux défis de caractère culturel et politique (Guigou & Parthenay, 2001 ; Camagni, 2001b). Intégrer des objectifs spatiaux et économiques ; intégrer des interventions différentes de nature sectorielle ; stimuler et animer des réseaux de coopération, synergie, partenariat entre acteurs locaux ; assurer la possibilité d’une participation effective et efficace des citoyens aux choix qui les concernent : autant de défis considérables qui imposent une évolution rapide de nos modèles de gouvernance. En ce sens, de nouvelles méthodes et pratiques de programmation négociée, des formes différentes de partenariat public/privé et d’accords par négociation dans le domaine des grands projets territoriaux et urbains ouvrent de nouvelles voies à des politiques de développement territorial plus efficaces, transparentes et participatives. 111

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Dans une économie en voie de globalisation, les territoires et non seulement les entreprises rivalisent entre eux d’une façon de plus en plus directe. En effet, à la différence des pays, les régions et les villes rivalisent, sur le marché international des biens et des facteurs productifs, sur la base d’un principe d’avantage absolu et non d’avantage comparatif ; cela signifie qu’il n’existe aucun mécanisme automatique efficace en mesure d’assurer à chaque territoire un rôle dans la division spatiale du travail, quelle que soit sa performance relative.

ROBERTO CAMAGNI

Des réflexions semblables concernent le défi posé par ce qu’on appelle la « société de la connaissance » ou le développement science based. Encore une fois, il faut s’entendre sur la notion même de « société de la connaissance », car souvent on s’arrête à l’indication des préconditions fonctionnelles d’une telle société : savoirfaire et compétence (la « civilisation matérielle » de Fernand Braudel), éducation et culture de base, investissement en recherche scientifique et en recherche-développement, capacité entrepreneuriale. Plus importantes probablement que ces conditions sont celles que j’appelle les préconditions cognitives de la « société de la connaissance », qui résident dans l’intégration, l’interaction et la synergie entre les conditions précédentes (figure 1).

Institutions intégrées de recherche et haute formation Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 160.176.35.84 - 11/04/2019 06h56. © De Boeck Supérieur

Société, Haute formation et Culture

Orientation des entreprises à la science et politiques du capital humain

Recherche, Science et Téchnologie

Économie et Entrepreneuriat

Système efficace de transcodage et transfert technologique

En fait, au lieu – ou avant – d’intervenir directement sur les entreprises ou sur les centres de recherche avec des incitations financières, il faut construire une attitude positive de la société par rapport à l’objectif majeur d’un développement basé sur la connaissance ; développer une capacité accrue des firmes et des entrepreneurs à manager les résultats de la recherche scientifique, et surtout mettre en place un système de transcodage et de transfert de la connaissance scientifique au service de la société et de l’économie. Deux concepts sont centraux à cet égard, celui d’accessibilité et celui d’apprentissage collectif. L’accessibilité est fonction de l’existence de réseaux de communication et transport, mais doit tenir compte de la distance cognitive entre les nœuds, et demande des dispositifs organisationnels et institutionnels pour la réduire. L’apprentissage collectif se manifeste à travers l’interaction entre acteurs ; est liée à l’existence de codes et des langages communs et d’attitudes de confiance et 112

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Figure 1 : Une approche intégrée à la Société de la Connaissance

COMPÉTITIVITÉ

TERRITORIALE

:

LA RECHERCHE D’AVANTAGES ABSOLUS

de coopération réciproques ; se passe en particulier à travers la mobilité du travail technique et scientifique entre firmes et ateliers de recherche. Dans ce contexte, le territoire joue encore une fois un rôle central : dans les processus de construction des connaissances, des codes interprétatifs, des modèles de coopération et de décision sur lesquels se fondent les parcours innovateurs des entreprises, et dans les processus de croissance « socialisée » des connaissances.

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Le développement de la connaissance doit être entendu comme un processus cognitif, pour la plupart interactif – à l’intérieur de la firme – et collectif – à l’intérieur du milieu local –, soumis à des processus synergétiques et basé sur le capital relationnel des territoires.

ROBERTO CAMAGNI

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