Présentation Des Techniques De Diagnostic De L’état D’un Béton Soumis à Un Incendie

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ISSN 1167-489X

techniques et méthodes des laboratoires des ponts et chaussées

Méthodes d’essai des lpc n°62

Présentation des techniques de diagnostic de l’état d’un béton soumis à un incendie

Présentation des techniques de diagnostic de l’état d’un béton soumis à un incendie

Méthodes d’essai n° 62

Décembre 2005

Laboratoire Central des Ponts et Chaussées 58, bd Lefebvre, F 75732 Paris Cedex 15

Ce document a été rédigé par : ¾ ¾ ¾ ¾ ¾ ¾ ¾ ¾

Loïc Divet (LCPC), animateur Sylvie Arnaud (LRPC de Lyon), Xavier Derobert (LCPC), Pascal Fasseu (LRPC de Lille), René-Michel Faure (CETU), Catherine Larive (CETU), Bernard Naquin (LRPC de Lyon), Gérard Olivier (LREP, Centre de Melun).

Ce document a également été relu par : ¾ ¾ ¾ ¾ ¾ ¾

Odile Abraham (LCPC), Mikaël Dierkens (LRPC de Lyon), Bruno Godart (LCPC), Thierry Kretz (LCPC), Brigitte Mahut (LCPC), Gérard Platret (LCPC).

Pour commander cet ouvrage : Laboratoire Central des Ponts et Chaussées DISTC-Diffusion des Éditions 58, boulevard Lefebvre F-75732 PARIS CEDEX 15 Téléphone : 01 40 43 50 20 Télécopie : 01 40 43 54 95 Internet : http://www.lcpc.fr

Prix : 35 Euros HT

En couverture : Dégradation du béton du tunnel sous la Manche après l’incendie du 18 novembre 1996.

Ce document est propriété du Laboratoire Central des Ponts et Chaussées et ne peut être reproduit, même partiellement, sans l’autorisation de son Directeur général (ou de ses représentants autorisés) © 2005 - LCPC ISSN 1167-489X ISBN 2-7208-0423-1

Sommaire Présentation

5

Généralités

7

La démarche de diagnostic

9

Évolution des propriétés des bétons avec la température

10

Observations et mesures in situ

15

Méthode 62.1 Inspection de l’ouvrage

17

Méthode 62.2 Essai de dureté de surface au scléromètre

21

Méthode 62.3 Auscultation sonique

25

Méthodes d’essai de laboratoire

37

Méthode 62.4 Le prélèvement de carottes in situ

39

Méthode 62.5 Simulation de l’incendie par échauffement du béton en laboratoire

43

Méthode 62.6 Caractérisation du béton par profil sonique

47

Méthode 62.7 Détermination du profil de module d’élasticité dans du béton durci par la méthode de fréquence de résonance

55

Méthode 62.8 Estimation des températures atteintes dans les bétons par microscopie électronique à balayage

61

Méthode 62.9 Estimation des températures atteintes dans les bétons par analyses thermiques

69

Méthode 62.10 Estimation des températures atteintes dans les bétons par diffractométrie des rayons X

77

Partie 1

Partie 2

Partie 3

Partie 4

Retour d’expériences sur d’autres méthodes

85

Méthode 62.11 La réfraction des ondes de compression

87

Méthode 62.12 La méthode radar

91

Méthode 62.13 Traitement d’image appliqué à un faïençage de parement de béton après un incendie

95

Méthode 62.14 La colorimétrie des bétons

99

Méthode 62.15 Forages destructifs avec enregistrement des paramètres pour la détermination de la profondeur de béton endommagé après un incendie

103

Méthode 62.16 Évaluation de l’échauffement du béton par thermoluminescence

107

Méthode 62.17 Les ondes de surface (Masw, Park et al., 1999)

109

Méthode 62.18 La méthode MASW (Modal Analysis of Surface Waves)

111

Présentation Les dégradations de béton par incendie sont relativement rares pour les ouvrages d'art et affectent davantage les bâtiments. Il existe néanmoins quelques cas d'incendie de camions sous des ponts en béton qui ont provoqué un endommagement significatif du matériau. On peut également citer cinq incendies importants dans les tunnels (tunnel sous la Manche 1996, tunnel du Mont-Blanc - 1999, tunnel de Tauern en Autriche - 1999, tunnel du Gothard en Suisse - 2001, tunnel de Fréjus - 2005). L'évaluation précise des caractéristiques du béton des parties d'ouvrage restant après incendie constitue évidemment un préalable indispensable à toute ébauche de projet de réparation. Dans ces conditions, il est nécessaire de pouvoir évaluer les caractéristiques mécaniques résiduelles du béton ainsi que de connaître la profondeur de l'endommagement dans le but d'optimiser les travaux de réparation. Lors de nombreuses missions d'expertise et au cours de travaux de recherche, le réseau des Laboratoires des Ponts et Chaussées ainsi que le Centre d'Études des Tunnels (CETU) ont acquis des connaissances et des compétences dans le diagnostic de l'état d'un béton soumis à un incendie. Par ailleurs, les Laboratoires des Ponts et Chaussées disposent d'une panoplie complète de méthodes pertinentes de mesure et d'essais de terrain et de laboratoire. Le présent recueil a pour objectif d'établir les capacités et les limites des méthodes de diagnostic de l'état d'un béton soumis à un incendie. Mais, dans le cas d'une structure incendiée, il est aussi fondamental de s'intéresser à l'état des aciers car ceux-ci sont très sensibles à la chaleur. Ce recueil est destiné aux donneurs d'ordre pour les aider à formuler leur demande d'études ainsi qu'aux techniciens (futurs utilisateurs de ces méthodes, laboratoires souhaitant s'équiper, etc.). Ce document est structuré en quatre parties : ¾ ¾ ¾ ¾

Partie 1 : Généralités. Partie 2 : Observations et mesures in situ. Partie 3 : Méthodes d’essai de laboratoire. Partie 4 : Retour d'expériences sur d'autres méthodes.

5

Méthodes d’essai n° 62 ‹ Présentation des techniques de diagnostic de l’état d’un béton soumis à un incendie

„ La partie 1 rappelle quelques généralités sur l'évolution du matériau béton sous l'effet de la température (microstructure, propriétés mécaniques, déformation thermique et dégradation par écaillage ou éclatement) et donne des notions sur la démarche à mettre en œuvre pour réaliser un diagnostic fiable et pertinent. „ La partie 2 concerne les observations et les mesures que l'on peut effectuer in situ (essai de dureté de surface au scléromètre et auscultation sonique). „ La partie 3 rassemble les méthodes de mesure et d'essais de laboratoire disponibles dans le réseau des Laboratoires des Ponts et Chaussées et pour lesquelles il existe une longue expérience. L'évaluation de l'endommagement du béton se fait par la détermination des caractéristiques du béton par profil sonique et par la mesure du module d'élasticité à l'aide de la méthode de fréquence de résonance. Les températures maximales atteintes dans le béton et le profil de diffusion de la chaleur peuvent être estimés par trois méthodes : la microscopie électronique à balayage, l'analyse thermique et la diffractométrie des rayons X. „ La partie 4 présente certaines méthodes de mesure et d'essai en cours de développement, mais qui paraissent prometteuses (réfraction des ondes de compression, méthode radar, analyse d'images, colorimétrie, forage avec enregistrement des paramètres, thermoluminescence, ondes de surface et méthodes MASW). Enfin, il est apparu opportun de faire apparaître, pour chacune des méthodes décrites, les coordonnées des interlocuteurs du réseau du Laboratoire des Ponts et Chaussées ainsi que du CETU susceptibles de renseigner efficacement les personnes intéressées.

6

Partie 1 Généralités

7

PARTIE 1 - GÉNÉRALITÉS

 LA DÉMARCHE DE DIAGNOSTIC Les qualités de résistance mécanique, de facilité d'utilisation et de durabilité font du béton un matériau de construction par excellence. Une autre de ses propriétés non moins appréciable est son excellente tenue au feu ce qui, par exemple, conduit à le préférer à tout autre matériau dans la construction d'immeubles de grande hauteur. Excellente ne signifie pas pour autant totale. Soumis à un incendie, le béton se dégrade régulièrement de l'extérieur vers le cœur pendant toute la durée de l'échauffement. Cependant, ce processus de dégradation est suffisamment lent et progressif pour permettre un maintien de la stabilité des structures pendant un laps de temps le plus souvent suffisant à l'évacuation des personnes, mais aussi, pour permettre de retrouver après extinction de l'incendie un ouvrage endommagé mais réparable. Cette réparation doit être précédée d'une phase d'étude comprenant une expertise de la structure en place. L'objectif de cette investigation est d'établir un relevé quantitatif des dégâts occasionnés par l'incendie en termes de surface atteinte, de profondeur d'altération (éclatement, écaillage, fissuration, modifications physico-chimiques, etc.) et de déformations. Un recensement des autres dommages (équipements, superstructures, etc.) doit être réalisé. Des informations en termes de diminution des caractéristiques (module d'élasticité, résistance mécanique) des matériaux restés en place doivent également être apportées ce qui est plus complexe. Ces informations sont notamment déterminantes pour définir d'une part, l'épaisseur de béton à dégager et, d'autre part, les techniques à mettre en œuvre pour reconstituer le béton disparu. Il s'agit d'éléments d'information qui conditionnent directement les délais et le coût des travaux. La difficulté pour les intervenants dans ce type d'expertise est de mettre au point rapidement un programme pertinent d'investigations sur le terrain et sur échantillons en laboratoire. Ces investigations mettent en œuvre des méthodes souvent peu courantes et complexes menées par des spécialistes d'horizons variés. Le choix des différentes prestations est conditionné essentiellement par l'ampleur du sinistre, l'importance de l'ouvrage mais aussi, le plus souvent, par les délais disponibles. Intervient également la nécessité de recouper et de calibrer les résultats donnés par certaines méthodes d'essai indirectes. Avant toute autre opération, il est indispensable de procéder à une inspection détaillée de l'ouvrage incendié. Celle-ci aura pour objet de relever et de quantifier les dégâts apparents affectant la structure. Elle permet d'évaluer l'étendue des désordres. C'est aussi à partir des résultats de cette inspection et, en particulier d'un classement en zones d'égal niveau de dégradations, que l'on pourra décider du choix, du nombre et de la localisation des autres investigations à mener, directement sur le site mais également en laboratoire sur les prélèvements qui seront effectués par carottage sur la structure. Pour ce qui concerne les mesures in situ, et notamment dans le cas de dégâts de grande ampleur, les essais non destructifs sont à privilégier grâce à leur facilité de mise en œuvre et à leur cadence élevée. Parmi ceux-ci, deux méthodes sont intéressantes : la mesure de dureté superficielle au scléromètre et l'auscultation sonique. La sclérométrie ne requiert qu'un matériel léger et sa mise en œuvre est rapide et simple. Elle nécessite toutefois d'être menée avec beaucoup de soin et dans le strict respect des procédures (préparation des surfaces notamment) afin de fournir des données fiables et exploitables. Les inconvénients de cette méthode sont la faible profondeur investiguée et la sensibilité à l'état de surface. L'auscultation sonique exige un matériel plus sophistiqué et une plus grande expérience dans la pratique de la mesure et dans l'interprétation de ses résultats. Les cadences de mesure sont plus faibles, mais les résultats obtenus sont plus fiables. Par ailleurs, la profondeur d'investigation est plus grande et les données restituées plus diverses (hétérogénéités, délaminages, profondeur des fissures, etc.).

9

Méthodes d’essai n° 62 ‹ Présentation des techniques de diagnostic de l’état d’un béton soumis à un incendie

D'autres campagnes de mesures in situ complémentaires renseigneront sur la profondeur d'altération du béton comme par exemple des forages destructifs avec enregistrement des paramètres de forage, des reconnaissances au radar géotechnique ou des mesures soniques par ondes de surface. Des recoupements d'autres essais peuvent également, dans certains cas, être apportés par le traitement numérique des images des parements incendiés. Les investigations in situ peuvent ensuite être complétées par une étude en laboratoire sur des prélèvements carottés. Cette étude comprend une campagne d'essais mécaniques classiques de détermination de la résistance à la compression et à la traction, de mesure de module d'élasticité et de vitesse du son. Ces essais standards permettent, entre autres, de valider et de calibrer les mesures non destructives sur ouvrage. Ces essais portent sur des éprouvettes de dimension d'élancement deux qui ne permettent cependant pas de caractériser finement la variation de dégradation suivant la profondeur. Pour cela, on peut recourir à deux méthodes de mesure : le relevé de profils soniques sur carottes ou la détermination de profils de module d'élasticité par la mesure de fréquence de résonance sur disques minces découpés dans les carottes. Enfin, à ces essais de base peuvent s'ajouter des examens plus approfondis apportant des informations complémentaires (températures atteintes à différentes profondeurs de l'ouvrage, comportement du béton et de ses constituants à la chaleur, composition et homogénéité du béton initial, etc.) mais utiles par la redondance des renseignements fournis. Ceci permet alors de confirmer les résultats d'autres essais ou d'en éliminer les artefacts. Les méthodes disponibles à cette fin sont nombreuses et variées : simulation de l'incendie par échauffement en laboratoire, analyses chimiques et pétrographiques, examen au microscope électronique à balayage, analyses thermiques, diffractométrie des rayons X, étude par thermoluminescence ou colorimétrie. Certaines de ces méthodes peuvent cependant se révéler inadaptées au béton à étudier. De plus, leur délai d'exécution est en général assez important. La stratégie de leur choix est donc fonction des circonstances et des nécessités particulières du chantier. Elle implique donc une concertation étroite entre les différents acteurs du projet.

 ÉVOLUTION DES PROPRIÉTÉS DES BÉTONS AVEC LA TEMPÉRATURE L'élévation de la température du béton entraîne un certain nombre de transformations physico-chimiques et microstructurales qui vont alors conduire à un changement des propriétés mécaniques et de transfert. Dans les pages suivantes, nous allons présenter les principales évolutions des propriétés du béton sous l'effet de la température.

1. Effets sur la microstructure Au cours d'une élévation de température, les différentes catégories d'eau du béton (eau libre, eau liée) sont successivement éliminées en fonction de leur énergie de liaison. De même, les granulats peuvent subir des transformations en fonction de la nature des minéraux constitutifs. Les principales réactions physico-chimiques dans le béton au cours de son échauffement sont regroupées dans le tableau I. Ces transformations physico-chimiques, en particulier le départ de l'eau chimiquement liée, se traduisent par une augmentation considérable de la porosité du béton (Fig. 1 et Fig. 2) qui entraîne alors un changement des propriétés mécaniques du matériau ainsi que de ses propriétés de transfert.

10

PARTIE 1 - GÉNÉRALITÉS

TABLEAU I Les principales réactions physico-chimiques dans le béton en fonction de la température Température

Phénomène

Jusqu'à 80 °C

Départ de l'eau libre.

À partir de 80 °C

Une partie de l'eau adsorbée s'échappe du béton. Début de la perte de l'eau de constitution de certains hydrates (notamment l'ettringite). L'eau liée chimiquement commence donc à s'évaporer du béton.

Jusqu'à environ 300 °C

Première étape de déshydratation des silicates de calcium hydratés (C-S-H).

Entre 450 et 550 °C

Décomposition de la portlandite en chaux libre selon la réaction : Ca(OH)2 ⇒ CaO + H2O.

573 °C

Transformation allotropique du quartz α en quartz β accompagnée d'un phénomène de dilatation (fissuration des granulats siliceux).

600 - 700 °C

Décomposition des phases C-S-H et formation de β-C2S. Il s'agit de la deuxième étape de déshydratation des C-S-H qui produit une nouvelle forme de silicates bicalciques (C2S).

700 - 900 °C

Le carbonate de calcium se décompose en libérant de la chaux : CaCO3 ⇒ CaO + CO2 (décomposition des calcaires).

À partir de 1100 - 1200 °C

Formation de wollastonite β (CaO.SiO2). Début de la fusion de certains agrégats et de la pâte de ciment. Remplacement au cours de l'échauffement des liaisons hydrauliques par des liaisons céramiques (phénomène de frittage).

_ Figure 1 Aspect normal d’une pâte de ciment n’ayant pas subi d’échauffement. (Image obtenue par microscopie électronique à balayage avec un grossissement de 400).

_ Figure 2 Matrice cimentaire vitreuse présentant une macroporosité très importante. Ce phénomène se produit au-delà de 1000 °C et provient de la fusion puis du refroidissement de la pâte de ciment. (Image obtenue par microscopie électronique à balayage avec un grossissement de 150).

11

Méthodes d’essai n° 62 ‹ Présentation des techniques de diagnostic de l’état d’un béton soumis à un incendie

Après refroidissement du béton, certaines phases minérales de la pâte de ciment, telles que la chaux vive (CaO) ou l'anhydrite (CaSO4) peuvent se réhydrater lors d'un apport d'eau et produire éventuellement un gonflement.

2. Évolution des propriétés mécaniques La résistance en compression après échauffement dépend de la composition du béton (nature de ses constituants, teneur en eau, porosité), de son âge, des formes et dimensions des éléments de structure et de l'état de contrainte du béton lors de l'incendie. La vitesse de montée en température et le temps de chauffe ont aussi une influence sur la résistance en compression. D'une manière générale, on observe (Fig. 3) une chute significative de la résistance en compression autour de 200 °C qui peut être attribuée à une modification de la structure du béton (due aux différents coefficients de dilatation thermique, à l'augmentation de la porosité et à l'apparition de microfissures). Figure 3

`

Évolution de la résistance en compression des bétons du tunnel du Mont-Blanc en fonction de la température (cf. fiche simulation de l’incendie par échauffement du béton en laboratoire).

Résistance à la compression (MPa) 50 Béton de la zone I Béton de la zone II

40 30 20 10 0 0

200

400

600

800 1000 Température (°C)

Enfin, de nombreuses études ont également montré une diminution graduelle du module élastique et de la résistance en traction avec la température (cf. fiche simulation de l'incendie par échauffement du béton en laboratoire).

3. Déformation thermique La déformation totale d'une éprouvette de béton non chargée lors d'une élévation de la température est due : ¾ à l'expansion thermique des différents constituants du béton ; ¾ au retrait du béton lié à l'évaporation de l'eau libre ; ¾ aux transformations chimiques ; ¾ aux fissurations ; ¾ à la détérioration physique des divers constituants.

4. Phénomène d'écaillage et d'éclatement du béton La dégradation des bétons se caractérise par le détachement d'écailles d'une épaisseur allant de quelques millimètres à quelques centimètres ou bien par l'éclatement d'éléments

12

PARTIE 1 - GÉNÉRALITÉS

de structure (Fig. 4). Ce comportement est fonction de la sollicitation thermique (vitesse d'échauffement et température atteinte), de la forme de l'élément, de la densité d'armatures et de la porosité du béton.

_ Figure 4 Dégradation du béton du tunnel du Mont-Blanc après l’incendie du 24 mars 1999.

Les deux grands processus contribuant à la dégradation du béton lors d'une sollicitation thermique sont associés d'une part aux gradients de dilatation thermique dans l'élément (appelé processus thermomécanique), d'autre part à l'établissement de gradients de pression de vapeur dans le réseau poreux (appelé processus thermohydrique). Ces processus sont contrôlés par les propriétés et caractéristiques microstructurales du matériau. Ainsi, l'éclatement est le résultat de processus chimiques, thermiques, hydriques et mécaniques couplés par le biais des caractéristiques microstructurales, ces dernières évoluant au cours de la sollicitation thermique.

4.1. Dilatations thermiques différentielles Le processus thermomécanique est directement associé à l'établissement d'un champ de température dans l'élément. Le gradient de température induit dans l'élément un gradient de dilatation thermique : la face chauffée subit une dilatation plus grande que la face froide, ce qui génère des composantes de cisaillement et de traction. Le gradient est très important au voisinage de la surface chauffée.

4.2. Gradients de pression de vapeur dans le réseau poreux Le processus thermohydrique est associé aux mouvements d'eau sous forme liquide et vapeur dans le réseau poreux. Cette eau est celle présente initialement dans le réseau poreux, mais aussi celle provenant de la déshydratation de la matrice cimentaire. Lorsque la température augmente, l'eau qui se trouve dans le matériau (sous forme libre ou liée) s'évapore. Une partie de cette eau vaporisée s'évacue vers la surface chauffée, une

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Méthodes d’essai n° 62 ‹ Présentation des techniques de diagnostic de l’état d’un béton soumis à un incendie

autre migre vers l'intérieur (où la température est encore faible) et se condense. Elle forme ainsi une zone quasi-saturée qui joue le rôle d'une membrane étanche à la vapeur d'eau. C'est à proximité de cette zone que la pression atteint son maximum, induit des contraintes importantes, ce qui conduit à un écaillage du béton.

14

Partie 2 Observations et mesures in situ

15

PARTIE 2 - OBSERVATIONS ET MESURES IN SITU - MÉTHODE 62.1

]

INSPECTION DE L’OUVRAGE

MÉTHODE

62.1

 OBJECTIF L'objectif de l'inspection d'un ouvrage en béton ayant été soumis aux effets d'un incendie est de relever et de classer l'étendue, l'intensité et le type des dégâts apparents subis par les différentes parties de l'ouvrage.

 PRINCIPE Après un incendie, la quantité de débris et le noircissement de la structure peuvent donner une impression exagérée de la gravité des dégradations, notamment dans le cas d'un incendie violent. À l'inverse, lorsque la température atteinte n'a pas été élevée mais s'est maintenue longtemps, la profondeur d'endommagement peut être sous-estimée. Dès qu'il est possible d'accéder sur le site, il est important de pouvoir évaluer le niveau d'endommagement de la structure pour s'assurer de la sécurité de sa stabilité et de déterminer la suite à donner au sinistre : démolition partielle ou totale, confortation et réparation. Le diagnostic nécessite une évaluation aussi précise et exhaustive que possible du niveau de la perte de la résistance mécanique du béton, de l'état résiduel des armatures et de la profondeur d'endommagement. La procédure mise en œuvre comprend en premier lieu une inspection visuelle détaillée de l'ouvrage qui conduira ensuite à fixer le programme d'essais non destructif in situ ainsi que des prélèvements et analyses d'échantillons. Selon la durée de l'incendie, les dégâts apparents sur un élément en béton prennent successivement les aspects suivants : ¾ un écaillage superficiel de profondeur centimétrique se propageant plus ou moins profondément jusqu'aux armatures ; ¾ une chute des caractéristiques mécaniques des armatures de surface, leur dilatation et ses conséquences : perte d'adhérence et éclatement du béton d'enrobage ; ¾ une décohésion généralisée du béton et la ruine totale de l'ouvrage. Avant que les premiers dégâts visibles n'apparaissent, l'échauffement du béton lui occasionne des transformations physico-chimiques délétères. L'eau libre se vaporise, créant ainsi des surpressions internes, la portlandite se décompose en chaux qui sera potentiellement expansive à terme, les hydrates de calcium de la phase liant se décomposent et font ainsi chuter la résistance mécanique du béton, les granulats calcaires se décarbonatent ce qui entraîne leur désagrégation.

 MÉTHODOLOGIE L'examen d'un ouvrage en béton affecté par un incendie révèle en général la présence d'une multitude de faciès de dégradation, ceux-ci pouvant s'étager depuis l'absence totale

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Méthodes d’essai n° 62 ‹ Présentation des techniques de diagnostic de l’état d’un béton soumis à un incendie

de dégradations visibles jusqu'à la disparition totale du béton. Afin de faciliter l'interprétation des investigations et d'en rationaliser la mise en œuvre, il est nécessaire d'établir un recensement exhaustif des différentes zones dégradées de l'ouvrage et de les classer selon des critères objectifs prédéfinis. Le tableau II propose des éléments de classement pour une poutre en béton armée mais ceux-ci sont transposables à d'autres types de structure (poteaux, voiles, dalles, etc.). Il est souhaitable que l'intervention sur le site soit préparée à l'avance en réunissant et en examinant les données disponibles sur l'ouvrage : plans de coffrage, de ferraillage, de câblage, inspections antérieures, nature des bétons ainsi que toutes informations utiles concernant l'incendie lui-même : durée, nature des matières enflammées, mode d'extinction, etc. Une visite préliminaire du site peut être également utile afin d'appréhender les sujétions d'accès et de sécurité de l'inspection proprement dite. Les supports d'examen sont aussi à préparer à l'avance, ceux-ci peuvent être constitués par des copies de fonds de plans d'origine ou des schémas type des différentes parties de l'ouvrage. Les éléments à relever et à positionner sur le support d'examen sont, par ordre croissant de gravité : n Dépôts de suies ; o Zones de coloration, couleurs ; p Écaillage : profondeur moyenne et maximale, étendue relative ; q Fissures : faciès, orientation, densité, ouvertures moyenne et maximale ; r Zones de béton sans cohésion ou/et désolidarisé du cœur (repérage au marteau) profondeur moyenne et maximale ; ] Zone d'armatures apparentes : profondeur moyenne et maximale, étendue relative, état des armatures ; ^ Perte totale de béton : profondeur moyenne et maximale, présence et état des armatures ; _ Déformations rémanentes. Ces relevés seront complétés par des clichés photographiques d'ensemble et de détail (placer un repère d'échelle dans le champ de prise de vue). D'autres informations peuvent être collectées lors de la visite d'inspection, en particulier celles se rapportant à la nature du béton (type et origine des granulats, type de ferraillage, position des sources d'incendie, etc.). Les schémas du tableau II illustrent les différents faciès de dégradation et proposent un indice de classement en terme de gravité. Les figures 5a - 5b, 6 et 7 montrent quelques exemples de faciès.

18

PARTIE 2 - OBSERVATIONS ET MESURES IN SITU - MÉTHODE 62.1

TABLEAU II Classification des dégradations d’ouvrage en béton par incendie Classe de désordres

Vue en élévation d’une poutre sous dalle

Coupe

Désordres observés

Aucun. État de référence de béton sain

Dépôts de suies, coloration, traces de microfissures non orientées (faïençage)

Écaillage superficiel (0 à 10 mm) (figures 1 et 2). Fissures nettes et orientées (> 0,5 mm)

Disparition du béton d’enrobage. (fig. 3). Les armatures sont visibles. Le béton sous-jacent est légèrement feuilleté.

Les armatures sont totalement dégagées et présentent des déformations plastiques. Une forte épaisseur de béton a disparu ou est feuilletée et a perdu sa cohésion (figure 4)

_ Figures 5a et 5b Exemples de désordres de classe 2 sur une voûte de tunnel : écaillage superficiel partiel, vue générale et détail. T

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Méthodes d’essai n° 62 ‹ Présentation des techniques de diagnostic de l’état d’un béton soumis à un incendie

Figure 6

`

Exemple de désordres de classe 4. Les armatures sont totalement dégagées et retiennent des éclats de béton en feuillets. La perte de l’épaisseur de béton atteint localement 50 %.

Figure 7

`

Exemple de désordres de classe 3 . Disparition du béton d’enrobage des armatures elles-mêmes plus ou moins affaiblies.

20

PARTIE 2 - OBSERVATIONS ET MESURES IN SITU - MÉTHODE 62.2

] AU SCLÉROMÈTRE

ESSAI DE DURETÉ DE SURFACE

MÉTHODE

62.2

 OBJET DE LA MESURE ET DOMAINE D'APPLICATION Sous l'effet d'un incendie, le béton perdant ses caractéristiques mécaniques, la mesure de la dureté de la surface d'un parement varie lorsque le béton a dépassé en surface une certaine température. Les mesures sur l'ensemble d'une zone permettront donc de délimiter des zones de béton à réparer pour garder une homogénéité du parement. Cet essai repose sur la norme NF EN 12504-2 [1] qui spécifie une méthode permettant de déterminer l'indice de rebondissement d'une surface de béton durci, à l'aide d'un marteau en acier projeté par ressort. Cette méthode n'a pas été conçue pour des bétons dont la résistance en compression dépasse 70 MPa. Néanmoins, elle peut être utilisée dans le cadre de mesures comparatives au-delà de cette valeur.

 PRINCIPE Une masse propulsée par un ressort projette une tige de percussion au contact de la surface. Le résultat de l'essai est exprimé par la mesure de la distance de rebondissement de la tige. Cette distance est d'autant plus grande que la dureté de surface est élevée. L'indice sclérométrique Ism est l'indication fournie par un scléromètre correspondant à cette distance de rebondissement.

 APPAREIL L'appareil utilisé est un scléromètre Schmidt modèle N standard qui permet de faire des mesures sur des bétons dont les résistances sont comprises entre 10 et 70 MPa (Fig. 8). Il existe deux autres types de scléromètre : ¾ le premier de type P pour des produits dont les résistances sont comprises entre 5 et 25 MPa (revêtements, enduits) ; ¾ le second de type PT pour des produits (plâtre, mousse ou béton jeune) dont les résistances sont comprises entre 0,5 et 5 MPa.

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Méthodes d’essai n° 62 ‹ Présentation des techniques de diagnostic de l’état d’un béton soumis à un incendie

Figure 8

`

Mesures sclérométriques avec un enregistreur.

 MÉTHODOLOGIE L'essai de la mesure de la dureté de surface à l'aide d'un scléromètre se déroule selon trois étapes : 1. Vérification du bon fonctionnement de l'appareil. 2. Établissement de la valeur de référence du béton avant qu'il ne subisse un incendie. 3. Exécution de l'essai suivant le mode opératoire et établissement de la cartographie de la zone de béton altéré.

1. Vérification du bon fonctionnement de l'appareil La vérification du bon fonctionnement de l'appareil est effectuée sur une enclume en acier d'une dureté minimale de 52 HRC et d'une masse de 16 ± 1 kg et d'un diamètre d'environ 150 mm.

2. Établissement de la valeur de référence Des mesures seront réalisées sur des parties de l'ouvrage situées de part et d'autre de l'incendie et ayant été coulées avec un béton identique. La valeur médiane de ces mesures servira de référence pour l'indice sclérométrique auquel seront comparées les valeurs mesurées sur les zones ayant subi l'incendie.

3. Mode opératoire Les essais seront réalisés suivant des lignes s'éloignant du centre des zones visuellement dégradées par l'incendie.

22

PARTIE 2 - OBSERVATIONS ET MESURES IN SITU - MÉTHODE 62.2

Chaque point fera l'objet de neuf mesures. C'est la valeur médiane qui constituera le résultat pour ce point. L'espacement entre les points de mesure sera d'environ 0,20 m. Cet espacement pourra être adapté suivant le degré et l'étendue des désordres. À noter que si des essais doivent être réalisés sur une surface talochée, il conviendra de meuler, avec une pierre prévue à cet effet, le béton, avant de faire des mesures.

 EXPLOITATION DES RÉSULTATS Le résultat de l'essai est la valeur médiane de l'ensemble des neuf mesures réalisées sur une zone. Ces valeurs peuvent être corrigées afin de prendre en compte l'orientation du marteau conformément aux instructions données par le fabricant. La valeur médiane est exprimée sous forme de nombre entier. Si plus de 20 % de l'ensemble des lectures effectuées sur une zone d'essai diffèrent de la valeur médiane de plus de six unités, l'ensemble des mesures doit être écarté. L'ensemble des résultats permet de délimiter la zone altérée par l'incendie, zone où les résultats sont inférieurs à l'indice Ism de référence. De plus, il est possible de tracer des courbes d'iso-dureté à l'aide des différentes mesures Ism (Fig. 9). Points de mesure Ism

_ Figure 9 Schéma d’implantation des mesures.

Lignes de mesures

Zone 1

Zone visuellement dégradée

Zone 2

Limite de la zone dégradée

Zone 1 : Ism inférieur à Ism référence Zone 2 : Ism égal à Ism référence

 EXEMPLE D'UTILISATION DE LA MÉTHODE Un exemple d'application est donné lors du diagnostic du béton de revêtement à la suite de l'incendie du tunnel sous la Manche en 1996 [2]. De nombreuses mesures ont été effectuées à l'aide du scléromètre sur les zones incendiées ainsi que de part et d'autres en zones saines. Des carottages et des essais de compression sur carotte ont parallèlement été réalisés dans ces mêmes zones. Les résultats de l'indice scléromètrique ont été ensuite exprimés en résistance du béton après un étalonnage fiable. Les zones 3 et 4 sont les zones les plus dégradées où la perte d'épaisseur du revêtement varie de 50 à 90 %. Les zones 2 et 5 sont moyennement dégradées pour lesquelles la perte

23

Méthodes d’essai n° 62 ‹ Présentation des techniques de diagnostic de l’état d’un béton soumis à un incendie

d'épaisseur du béton se situe entre 20 et 50 %. Les zones 1 et 6 ne présentent qu'une dégradation superficielle (perte d'épaisseur < 5 %). Le tableau III résume les résultats des mesures obtenues dans les différentes zones du tunnel sous la Manche. TABLEAU III Incendie du tunnel sous la Manche. Mesures in situ au scléromètre et résistances à la compression sur carottes Résistance estimée

Résistance mesurée

au scléromètre

sur carotte

Zones 1 à 6 : faiblement dégradées et saines

81,5 MPa

86 MPa

Zones 2 à 5 : moyennement dégradées

74,4 MPa

84,8 MPa

Zones 3 et 4 : fortement dégradées

59,3 MPa

74,4 MPa

Zones incendiées

On constate que les résistances mécaniques diminuent sensiblement avec l'intensité des dégradations, mais ce phénomène est plus accentué avec les mesures au scléromètre. Ceci s'explique par le fait que les mesures sclérométriques caractérisent l'état de surface du béton (altéré ici par l'incendie) alors que les essais de compression sont réalisés sur toute la profondeur du voussoir comportant une partie non soumise à un échauffement. L'intérêt de la campagne de mesure de dureté de surface est donc de faciliter la localisation des zones de faible qualité résiduelle de surface. Elle permet alors de déterminer rapidement les zones à réparer grâce à la possibilité de cadences élevées de mesure in situ. Néanmoins, des essais sur carottes sont indispensables pour valider les mesures au scléromètre afin de vérifier entre autres le caractère superficiel des désordres dans les zones altérées.

 RÉPÉTABILITÉ DE LA MESURE AU SCLÉROMÈTRE Des essais de répétabilité ont été menés sur une dalle en béton armé. La mesure au scléromètre a été réalisée dix fois par le même opérateur dans une même zone de la dalle. Pour un indice sclérométrique moyen de 30, l'écart type est alors de 5.

 RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES [1]

Norme NF EN 12504-2, Essais pour béton dans les structures - Partie 2 : essais non destructifs Détermination de l'indice de rebondissement, 2003.

[2]

DEMORIEUX J.-M., L'incendie du tunnel sous la Manche - Diagnostic des dommages et inventaire des données nécessaires à la mise au point du projet de réparations, Annales du bâtiment et des travaux publics, pp. 43-65, septembre 1998.

 CONTACT " Gérard OLIVIER 01 60 56 64 75 " LRPC de l'Est Parisien - Centre de Melun Fax : 01 60 56 64 01

24

 [email protected]

PARTIE 2 - OBSERVATIONS ET MESURES IN SITU - MÉTHODE 62.3

]

AUSCULTATION SONIQUE

MÉTHODE

62.3

 OBJET DE LA MESURE ET DOMAINE D'APPLICATION L'objectif de ces essais et mesures est d'obtenir le maximum d'informations sur la qualité des bétons soumis à une élévation de température par les méthodes non destructives d'auscultation sonique telles que décrites dans les normes NF P 18-418 [1] de 1989 et EN 12504-4 de 2005 [2], complétées par des essais mécaniques classiques. Les paramètres mesurés sont la vitesse et l'atténuation sonique des ondes de compression (ondes longitudinales) se propageant dans le béton. Ces méthodes sont applicables aux contrôles non destructifs par ultrasons [3 à 8]. Elles permettent de déterminer des caractéristiques mécaniques du milieu ausculté et d'en apprécier l'homogénéité (en détectant des vides, délaminages et micro-fissurations), de caractériser un béton dont le rapport E/C est incorrect, ou ayant subi une modification structurelle (cas des bétons gelés ou incendiés). Les mesures sont réalisées in situ comparativement sur zone saine et sur zone incendiée et en laboratoire sur des carottes prélevées dans ces zones. Les informations collectées permettent de dresser une cartographie de l'étendue du sinistre sur l'ouvrage et d'en déterminer la gravité et la profondeur affectée.

 PRINCIPE La vitesse sonique et l'atténuation sont deux paramètres qui permettent d'obtenir une information qualitative sur le matériau et sur la structure. La vitesse sonique des ondes longitudinales est en relation avec le module d'élasticité et la résistance à la compression après étalonnage. L'atténuation donne un complément d'information estimatif sur la cohésion, la compacité ainsi que sur l'hygrométrie du milieu de propagation. Sa mesure et son exploitation sont complexes du fait du grand nombre de paramètres qui entrent en jeu (température, humidité, qualité de l'état de surface et du couplage des transducteurs). Dans le cas d'un béton soumis au feu, l'élévation de température provoque une modification physico-chimique du matériau. L'auscultation sonique, basée sur des mesures de temps de parcours et d'énergie transmise, est une méthode particulièrement bien adaptée à ce type d'investigation.

25

Méthodes d’essai n° 62 ‹ Présentation des techniques de diagnostic de l’état d’un béton soumis à un incendie

 DISPOSITIF EXPÉRIMENTAL Un dispositif commun aux mesures soniques in situ et aux essais de laboratoire dénommé AVSP 2000 est disponible dans le réseau des LRPC. Il est constitué : ¾ d'un ensemble émetteur et récepteur d'ultrasons couplés physiquement à la structure en béton, ¾ d'un boîtier électronique de conditionnement et de traitement du signal, ¾ d'un oscilloscope pour visualiser et analyser les signaux reçus, ¾ d'une unité de stockage du signal, ¾ d'un micro-ordinateur et de logiciels usuels de traitements de données (statistiques et graphiques). Il existe dans le commerce des appareillages similaires qui n'exploitent pas l'amplitude de l'onde et qui ne possèdent pas de sortie signal. La lecture du temps se fait sur afficheurs numériques* et dans le meilleur des cas via un traitement automatisé du signal. On trouve de nombreuses variantes dans le conditionnement et la restitution du signal et dans les caractéristiques des capteurs (forme, surface, mode d'excitations, de couplage et fréquences de travail). Les figures 10 et 11 donnent un aperçu du boîtier électronique de la chaîne AVSP 2000, conçue au CECP de Rouen et une vue des capteurs à pointe.

Récepteur à pointe

Émetteur à pointe

c Figure 10

c Figure 11

Boîtier d’auscultation sonique AVSP 2000 distribué dans le réseau.

Capteurs à pointes pour surfaces rugueuses.

* La mesure du temps de trajet se fait par un afficheur numérique à déclenchement sur seuil de tension (immunité aux parasites) qui donne une valeur acceptable dans le cas de bétons homogènes. Il existe également des capteurs plans, couplés par collage ou à la graisse, qui sont plus énergétiques que les capteurs à pointe mais sont moins précis en terme de positionnement. Le couplage manuel des pointes ou des capteurs plans à la graisse est sujet aux fluctuations de la force d'appui. Les meilleurs résultats sont obtenus avec un émetteur plan couplé à la colle (énergie plus élevée, meilleure stabilité) un récepteur à pointe à fort gain (facile à positionner sur tout type de surface) et un oscilloscope numérique à mémoire pour le stockage et le traitement des signaux.

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PARTIE 2 - OBSERVATIONS ET MESURES IN SITU - MÉTHODE 62.3

L'AVSP 2000 possède une sortie signal analogique, une sortie à puissance variable pour l'émission, un préamplificateur immunisé aux bruits, un afficheur numérique et une alimentation autonome. La chaîne de mesure se compose d'un micro-ordinateur et d'un oscilloscope. Les mesures de temps et d'amplitude se font sur le site : toutes les mesures sont saisies sur le microordinateur et les courbes temps-distance-amplitude s'affichent en temps réel au fur et à mesure du déplacement du récepteur. En cours d'essai, les signaux issus de la chaîne de mesure sont obligatoirement visualisés sur l'oscilloscope et enregistrés sur l'unité de sauvegarde. Les figures 12 et 13 donnent une vue de l'oscilloscope et du micro-ordinateur. Ils sont utilisés sur le terrain pour la saisie et l'exploitation automatique des données et en laboratoire pour l'analyse des signaux et l'exploitation finale des résultats. La figure 12 donne la photo d'un oscilloscope numérique. Deux unités de sauvegarde (disquette et disque dur) permettent de conserver l'intégralité des signaux présentant des singularités pour une analyse de signal a posteriori en laboratoire et de constituer une base de données de défauts caractéristiques. La figure 13 donne la photo du micro-ordinateur. Les mesures de temps, distance et amplitudes sont saisies sur micro-ordinateur et les courbes temps/distance et atténuation/distance s'inscrivent en temps réel au fur et à mesure de l'avancement du récepteur et de la saisie de la mesure. Ces opérations sont réalisées sur site. En fin de mesure, les résultats bruts (vitesse, atténuation, coefficients de corrélation des paramètres temps et amplitude) s'affichent sur l'écran du micro-ordinateur.

c Figure 12

c Figure 13

Oscilloscope numérique (visualisation et stockage des signaux).

Micro-ordinateur (affichage temps réel des courbes).

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 MÉTHODOLOGIE La méthodologie s'appuie sur la norme européenne EN 12504-4, dans le choix des méthodes et des modes opératoires.

Choix des méthodes Il existe trois méthodes :

n La méthode indirecte (séries de mesures ponctuelles à partir d'une seule face accessible sur laquelle sont positionnés l'émetteur et le récepteur). Cette méthode, par sa facilité de mise en œuvre et la qualité du diagnostic, est la plus utilisée en contrôle sur ouvrage comme en expertise. o La

méthode directe (mesures unitaires ponctuelles par transparence avec émetteur et récepteur en vis-à-vis, sur chacune des faces de la structure). Cette méthode s'applique en complément d'information sur une partie d'ouvrage présentant deux faces disponibles ou bien sur des carottes en laboratoire (cf. fiche « Caractérisation du béton par profil sonique »).

p La méthode semi-directe (mesures unitaires ou séries de mesures ponctuelles par semitransparence : émetteur et récepteur positionnés sur des faces adjacentes). Cette méthode ne fait pas l'objet d'une fiche spécifique puisque seule la position de l'émetteur diffère. Elle est plutôt destinée à ausculter un volume de béton qu'un état de surface (recherche de défauts internes qui s'apparente à la tomographie sonique). Elle peut être utilisée en complément d'information de la méthode indirecte. Toutes ces méthodes permettent d'ausculter des dimensions variant entre 0,10 et 2 m, voire plus. La méthode directe dite « en transparence », permet en laboratoire d'analyser des profondeurs de dégradation de l'ordre du centimètre. „ Pour les méthodes semi-directe et indirecte, on réalise en règle générale un maillage constitué d'une ligne de 1 m à 1,50 m tous les 2 m2. Cette surface peut varier selon le niveau de précision souhaité et l'étendue de la zone auscultée. „ Trois zones d'investigation sont définies : l'une au centre du foyer, la seconde en zone saine et la dernière en zone intermédiaire (béton noirci non éclaté). „ Les mesures sont réalisées selon des lignes droites constituées d'une douzaine de points espacés de 20 cm (l'espacement des points peut varier selon le niveau de précision souhaité). L'émetteur est positionné en bout de la ligne pour la méthode indirecte ou sur la face adjacente pour la méthode semi-directe. Le récepteur est déplacé sur cette ligne de mesure. Compte tenu de l'endommagement du béton et des variations d'amplitude du signal, il est indispensable de réaliser la mesure avec un oscilloscope, quelle que soit la méthode employée.

Préparation des essais et réalisation des mesures Après avoir choisi les zones à ausculter et tracé les lignes de mesure, pour chacune des lignes et à chacun des points : 1 - On note la position exacte du récepteur et sa distance par rapport à l'émetteur (Fig. 14). 2 - On mesure sur l'oscilloscope le temps de propagation de la première arrivée d'onde et son amplitude (Fig. 15).

28

PARTIE 2 - OBSERVATIONS ET MESURES IN SITU - MÉTHODE 62.3

3 - On relève toutes les observations visuelles faites sur le signal (forme, changements de phase, fréquence, etc.), ainsi que celles concernant l'état de surface associé au point de la mesure. Toutes les valeurs de distance, temps et amplitude sont notées à chaque point de mesure sur un support papier et entrées dans un tableau préparé pour le chantier (Fig. 16).

_ Figure 14 Exemple de chantier en tunnel : ligne de 1 m située dans une zone peu affectée. L’émetteur (E) est positionné en bout de ligne, le récepteur (R1 à R5) est déplacé tous les 20 cm.

_ Figure 15 Oscillogramme obtenu dans la zone donnée dans l’exemple de la figure 14.

Figure 16 Tableau de mesures pour une ligne de 1600 mm. T

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Méthodes d’essai n° 62 ‹ Présentation des techniques de diagnostic de l’état d’un béton soumis à un incendie

Les courbes vitesse et atténuation sont tracées sur l'écran du micro-ordinateur durant la progression des mesures. Lorsque le résultat d'une mesure semble erroné (cas d'un signal trop faible ou bien suite à une erreur de positionnement du récepteur), elle est immédiatement recommencée. Ce traitement en temps réel est appréciable car il évite les erreurs de saisie imputables à la manipulation.

 EXPLOITATION DES RÉSULTATS Les principaux indicateurs qui interviennent dans l'analyse sont : ¾ la vitesse sonique issue du temps de propagation dans le béton ; ¾ l'amplitude de l'onde ultrasonore reçue après passage dans le béton, donc son atténuation ; ¾ les coefficients de corrélation des paramètres temps et amplitude ; ¾ l'observation visuelle du signal (forme, phase, fréquence, etc.). Les résultats bruts issus du tableur sont exprimés en km/s pour la vitesse et en dB/m pour l'atténuation. Leur validité est conditionnée par le coefficient de corrélation des droites de régression temps et atténuation.

Analyse statistique des vitesses Les vitesses varient de 1000 m/s pour un béton très affecté à 4500 m/s et plus pour un béton sain. Une première approche de terrain consiste à valider tous les résultats assortis d'une bonne corrélation. Les autres, c'est-à-dire ceux qui présentent des écarts de temps élevés dans leur progression sur la ligne de mesure, sont rejetés et analysés ultérieurement. Il faut avoir alors recours à l'exploitation graphique. Celle-ci permettra de distinguer : ¾ le béton en tant que « matériau », on parlera alors de célérité* des ondes dans le matériau ; ¾ la « structure » de l'ouvrage dans sa globalité, y compris la micro-fissuration dans le cas d'un béton altéré et les aciers dans le cas d'un béton armé, on parlera alors de vitesse apparente* dans la structure. L'exemple graphique (Fig. 17) montre sur la droite une partie rectiligne constituée de six points suivie de deux points dispersés. ¾ Si l'on effectue un carottage dans la zone correspondant à la partie rectiligne, on constatera que la célérité des ultrasons mesurée sur carotte est conforme à celle calculée sur la portion de droite. ¾ Si l'on effectue un carottage sur le défaut, dans la zone située au-delà du sixième point, on rencontrera une valeur de célérité plus faible que celle donnée par la droite formée par les six premiers points.

* Ces nuances dans la terminologie visent à apporter à la fois plus de commodité de langage et plus de précision dans le terme générique « vitesse sonique » des ondes de compression.

30

PARTIE 2 - OBSERVATIONS ET MESURES IN SITU - MÉTHODE 62.3

_

Temps (μs) 500

Détermination de la vitesse sonique sur une ligne de mesure.

y = 325,5x - 26,6 R2 = 0,9712

400 300

Figure 17

On distingue deux résultats : 1. L’un, donné par l’inverse de la pente de la droite de régression (pointillés), concerne la vitesse sonique apparente dans la globalité de la structure.

200 100 0 0

0,2

0,4

0,6

0,8

1,0

1,2

2. L’autre, donné par l’inverse de la pente de la droite reliant les six premiers points, caractérise la célérité des ondes dans le matériau.

1,4 1,6 1,8 Distance (m)

Cette distinction est fondamentale dans l'analyse, notamment pour la courbe d'étalonnage Vitesse/Résistance établie à partir des carottages. Ceux-ci doivent être implantés sur la zone la plus représentative de la droite, en toute connaissance de cause.

Analyse statistique des atténuations Les atténuations se situent entre 10 et 80 dB/m et voire plus, en fonction de l'endommagement du béton. La démarche est identique à celle appliquée à la vitesse mais s'agissant plutôt d'un indicateur confirmant les mesures précédentes (absence de courbe d'étalonnage), elle se résume à donner les valeurs caractéristiques observées sur la courbe (Fig. 18) 20 log A (dB) 80 70 60 50 40 30 20 10 0 0

_

Figure 18

Détermination de l’atténuation d’amplitude sur une ligne de mesure.

y = -14,85x + 36,07 R2 = 0,41

On distingue deux résultats : 1. L’un, donné par la droite de régression (pointillés) concerne l’atténuation de l’onde dans la globalité de la « structure ». 2. L’autre, donné par la droite reliant les quatre premiers points caractérise l’atténuation de l’onde avant l’atténuation de la structure. 0,5

1

1,5 2 Distance (m)

Les valeurs d'atténuation et la corrélation des mesures sont affectées par : ¾ Les caractéristiques internes du matériau (porosité, rigidité) liées par exemple à la pulvérulence de la pâte, au décollement des agrégats et à la micro-fissuration. ¾ La qualité du couplage entre la structure et le capteur (transmission de l'énergie liée à l'état de surface). L'analyse fine des évolutions des temps et des amplitudes sur la ligne d'auscultation et la distribution des résultats (valeur, corrélation) permettent de connaître la localisation des désordres et le niveau d'endommagement.

Histogramme des vitesses L'histogramme des vitesses est une représentation statistique utile qui permet de quantifier l'état de dégradation. L'exemple donné par le graphique suivant permet de constater que les mesures se situent pour la plupart vers 3100 m/s et que la dispersion est

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Méthodes d’essai n° 62 ‹ Présentation des techniques de diagnostic de l’état d’un béton soumis à un incendie

élevée. La qualité originelle du béton n'est retrouvée que dans 1 % des mesures. L'élévation de température n'a pas affecté une grande superficie de l'ouvrage. Celui-ci présentait à l'origine un béton très micro-fissuré sans relation avec l'incendie (Fig. 19).

`

Histogramme des vitesses

24 00 24 80 25 60 26 40 27 20 28 00 28 80 29 60 30 40 31 20 32 00 32 80 33 60 34 40 35 20 36 00 36 80 37 60 38 40 39 20 40 00

Histogramme de l’ensemble des valeurs (béton sain, incendié et micro-fissuré).

Nombre de mesures 14 12 10 8 6 4 2 0

Vitesses soniques (m/s)

` On observe essentiellement deux familles distinctes : 2100 m/s (béton incendié) et 4100 m/s (béton sain). Les vitesses au-delà de 4800 m/s sont entachées d'une mauvaise corrélation malgré leur vitesse élevée. Les vitesses intermédiaires (31003300 m/s) constituent à elles seules une famille de béton peu endommagé par l'incendie mais néanmoins altéré par la micro-fissuration existante. Cette représentation est moins fiable que la précédente du fait de l'interpolation qui suggère des valeurs pour des zones non auscultées.

Nombre de mesures 12 10 8 6 4 2 0 1500

2000

2500

3000

3500

4000

4500

5000 5500 Vitesses (m/s)

c Figure 19 Histogrammes et courbe des vitesses.

Tableaux récapitulatifs Les tableaux de résultats comportent toutes les valeurs de vitesse (vitesse apparente et célérité), les valeurs d'atténuation et les coefficients de corrélation. Les résultats peuvent s'organiser de manière à faire des tris sur les valeurs d'atténuation, de vitesse et les coefficients de corrélation, toutes les combinaisons pouvant s'observer entre ces données (vitesses élevées et corrélations faibles, vitesses basses et bonnes corrélations etc.).

 EXEMPLES D'UTILISATION DE LA MÉTHODE DE MESURE Cartographie en vitesse La cartographie permet d'avoir une bonne information sur l'étendue de l'endommagement. Elle est déterminante pour le choix des prélèvements par carottage dans le cas ou l'on recherche les profondeurs de dégradation dues au feu et des résultats d'essais mécaniques (modules et résistance mécanique). Elle est utile également pour l'établissement des courbes d'étalonnage vitesse/résistance.

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PARTIE 2 - OBSERVATIONS ET MESURES IN SITU - MÉTHODE 62.3

On attribue généralement une nuance de gris ou une couleur par classe de 500 m/s pour les vitesses et par classe de 20 dB/m pour les atténuations. La cartographie complétée par les caractéristiques mécaniques obtenues sur carottes (ou extrapolées à partir de la courbe d'étalonnage) est une représentation quantitative et qualitative des résultats. Les mesures soniques en surface (méthode indirecte) comme en transparence (méthode directe) ont mis en évidence des zones très affectées mais néanmoins de superficie restreinte. Les vitesses les plus basses, proches du foyer, étaient de l'ordre de 900 m/s. On observe une augmentation des vitesses soniques et une diminution de l'atténuation du signal au fur et à mesure que l'on s'éloigne du foyer (Fig. 20)

_

Figure 20

Incendie d’un camion sous un ouvrage autoroutier.

Exemple de l'incendie d'un camion sous un passage supérieur à l'autoroute : l'incendie a été provoqué par un camion transportant des pneumatiques venu se réfugier sous le tablier. La durée de l'incendie a été limitée dans le temps à 1 heure environ, mais le feu a été attisé par un fort vent du Nord. Les dégradations ont plus affecté la pile que le tablier. L'exemple de cartographie donné en page suivante est établi à partir des mesures brutes de vitesse, c'est-à-dire celles données par la droite de régression, puisqu'on ne cherche pas à qualifier le béton mais la structure. La validité des valeurs de vitesse sur la cartographie est donc fonction du coefficient de corrélation. La partie en rouge correspond à la zone qui a été la plus longtemps soumise à l'élévation de température due à l'incendie. C'est également la zone dans laquelle cette température a été la plus élevée. En général, des dégradations structurelles importantes sont visibles (éclats importants désolidarisés du béton, aciers apparents, etc.). Les parties de couleur orange et beige correspondent à des zones qui s'éloignent du foyer et pour lesquelles on rencontre un béton altéré (pulvérulence du béton, désolidarisation des agrégats et éclats de peau) (Fig. 21). Les parties d'ouvrage situées entre le beige et le rouge (vitesse inférieure à 2500 m/s) sont en général éliminées par piquage jusqu'aux aciers, voire au-delà pour réparation ou reconstruction. La profondeur d'investigation (10 cm en moyenne) dépend de la longueur de la ligne (0,60 m à 1,60 m). Les lignes de mesure sont implantées en diagonale pour éviter les armatures. La densité des lignes est plus élevée dans les zones douteuses et plus faible dans les endroits sains. Les lignes en zone fortement altérées ont une longueur parfois très réduite à cause de la perte rapide de signal (forte atténuation).

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Méthodes d’essai n° 62 ‹ Présentation des techniques de diagnostic de l’état d’un béton soumis à un incendie

Figure 21

`

Profil des dégradations : cartographie iso-vitesses.

< 1500 m/s

1500-2000 m/s

2000-2500 m/s

2500-3000 m/s

3000-3500 m/s

3500-4000 m/s

4000-4500 m/s

> 4500 m/s

Signification des couleurs : Les parties de couleur jaune correspondent aux zones noircies sans dégradation visuelle importante et pour lesquelles l'élévation est restée modérée en durée et/ou en niveau de température atteinte. Les zones de couleur pâle allant du vert au bleu, donc vers les couleurs froides, sont des zones qui s'éloignent du foyer et qui retrouvent progressivement une vitesse sonique conforme à celle du béton sain pour lesquelles aucun traitement spécifique n'est envisagé (hormis un ragréage éventuel ou une protection de surface). Les parties présentant les couleurs les plus froides (bleu sombre) n'ont pas été affectées par l'élévation de température et présentent des vitesses élevées.

Un schéma représentant des zones de 1 à 2 m² de côté est en général suffisant. Pour avoir une meilleure résolution on peut faire un lissage par interpolation en augmentant la densité de mesures à condition de faire des points de transparence par la méthode directe pour délimiter les zones : deux lignes au m² juxtaposées ou en croix sont suffisantes. L'interpolation donnant un rendu lissé aux contours est d'un aspect plus « esthétique », un ensemble « pixellisé » (une représentation en petits carrés) refléterait tout aussi bien l'état de surface.

Cartographie en atténuation (Fig. 22) Les mesures d'amplitude et la détermination de l'atténuation sont réalisées comme précédemment. Les carottages sont choisis sur les zones les plus représentatives des deux cartographies précédentes. Comme pour les vitesses, il s'agit des atténuations brutes, qui sont le reflet de la structure. Les classes de couleur sont échelonnées entre 20 dB/m et 80 dB/m. En pratique, quatre à cinq classes sont suffisantes. La cartographie en atténuation confirme le résultat obtenu en vitesse sonique mais elle est également très représentative des dégradations superficielles. Un étalonnage en énergie n'est pas réalisable à l'heure actuelle (sauf pour un état de surface et une qualité de couplage rigoureusement identiques en tout point).

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PARTIE 2 - OBSERVATIONS ET MESURES IN SITU - MÉTHODE 62.3

_ >80 dB/m

Figure 22

Profil des dégradations : cartographie iso-atténuation.

70-80 dB/m

60-70 dB/m

50-60 dB/m

40-50 dB/m

30-40 dB/m

20-30 dB/m

<20 dB/m

 RÉPÉTABILITÉ ET REPRODUCTIBILITÉ DE LA MESURE PAR AUSCULTATION SONIQUE Des essais de répétabilité et de reproductibilité ont été menés sur une dalle de béton recouverte d'une peinture époxy et comportant une zone hétérogène due à un ragréage. La ligne de mesure tracée comportait 9 points distants de 20 cm. Un émetteur était positionné à une extrémité de la ligne et le récepteur était déplacé tous les 20 cm sur cette ligne. Pour l'étude de la répétabilité, un opérateur a déplacé le récepteur et un autre opérateur a réalisé les mesures de temps et d'amplitude sur l'oscilloscope. Les mesures ont été répétées 4 fois dans les mêmes conditions d'essais par le même opérateur ce qui a donné 36 mesures de temps et 36 mesures d'amplitude. Pour une vitesse sonique moyenne des ondes de compression de 4343 m/s, l'écart type est alors de 4,9 m/s. Pour une atténuation sonique de 18 dB/m, l'écart type s'élève à 1 dB/m. Pour l'étude de la reproductibilité, les mesures ont été réalisées par 4 opérateurs différents sur la même ligne. Le nombre de mesure a été inchangé : 36 mesures de temps et 36 mesures d'amplitude. Pour une vitesse sonique moyenne des ondes de compression de 4321 m/s, l'écart type est alors de 47 m/s. Pour une atténuation sonique de 19 dB/m, l'écart type s'élève à 2 dB/m.

 RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES [1] Norme NF P 18-418, Béton - Auscultation sonique - Mesure du temps de propagation d'ondes soniques dans le béton, décembre 1989. [2] Norme EN 12504-4, Essais pour béton dans les structures - Partie 4 : détermination de la vitesse de propagation du son, mai 2005.

35

Méthodes d’essai n° 62 ‹ Présentation des techniques de diagnostic de l’état d’un béton soumis à un incendie

[3] CANNARD G., CARRACILLI J., PROST J., VENEC Y., Auscultation dynamique des superstructures par les méthodes classiques, Rapport de recherche n° 34, LCPC Paris, 132 pages, avril 1974. [4] CANNARD G., Propagation d'ondes mécaniques dans les solides, Comptes-rendus de travail FAER 1.65.09 - 1.65.13 - 1.69.10, CETE Lyon, dossier E6413, 31 pages, octobre 1985. [5] CANNARD G., PROST J., Caractéristiques de la dégradation des matériaux, Compte-rendu de travail FAER 1.30.35, CETE Lyon, 1987. [6] CANNARD G., Synthèse des résultats du Laboratoire Régional de Lyon sur le contrôle des bétons par ultrasons, CETE Lyon, Dossier E6413, 39 pages, décembre 1989. [7] JONES R., Les essais non destructifs des bétons, Éditions Eyrolles, 165 pages, 1967. [8] GARNIER V., CHAIX J.-F., CORNELOUP G., Caractérisation non destructive du béton par analyses d'ondes ultrasonores, Bulletin des laboratoires des Ponts et Chaussées, 239, juillet-août 2002.

 CONTACTS " " "

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Sylvie Arnaud Bernard Naquin CETE de Lyon

04 72 14 32 16 04 72 14 32 35

 [email protected]  [email protected]

LRPC de Lyon Groupe Ouvrages d'art Section « Construction et durabilité des ouvrages en béton » Fax : 04 72 14 30 35

Partie 3 Méthodes d’essai de laboratoire

37

PARTIE 3 - MÉTHODES D’ESSAI DE LABORATOIRE - MÉTHODE 62.4

] IN SITU

LE PRÉLÈVEMENT DE CAROTTES

MÉTHODE

62.4

 OBJET ET DOMAINE D’APPLICATION Certains essais, destinés à analyser les modifications des propriétés du béton ainsi que les profondeurs de dégradation, ne peuvent être réalisés in situ. En conséquence, il convient de prélever des échantillons sur le lieu de l'incendie et de les rapporter dans un laboratoire. Dans le cas d'un incendie, les essais nécessitant le prélèvement de carottes sont les suivants : ¾ essais mécaniques ; ¾ simulation en laboratoire de l'échauffement du béton ; ¾ détermination du profil des caractéristiques soniques ; ¾ détermination du module d'élasticité par résonance ; ¾ estimation des températures atteintes dans les bétons par microscopie à balayage ou par analyses thermiques ou par diffractométrie des rayons X ; ¾ essai de thermoluminescence ; ¾ essai de colorimétrie.

 MÉTHODOLOGIE

1. Choix de la zone de prélèvement Le choix des zones de prélèvement ainsi que du nombre de prélèvements est fonction des caractéristiques que l'on veut mettre en évidence et de l'étendue du sinistre. Une zone saine sera choisie pour servir de référence. Une zone dégradée permettra de quantifier les propriétés résiduelles du béton ainsi que la profondeur atteinte par les dégradations. À noter que les armatures devront être repérées avant le carottage, pour éviter autant que faire se peut de récupérer des éprouvettes de béton avec des armatures. Le carottage ne doit pas porter atteinte à la stabilité ou à la résistance structurelle de l'ouvrage.

39

Méthodes d’essai n° 62 ‹ Présentation des techniques de diagnostic de l’état d’un béton soumis à un incendie

2. Vitesse de rotation du carottier La vitesse de rotation du carottier est fonction du diamètre du carottier et de la qualité du béton. Un béton dur nécessite une faible vitesse de rotation alors qu'un béton abrasif nécessitera une vitesse plus élevée.

3. Vitesse d'avancement du carottier La vitesse d'avancement du carottier est fonction de la dureté du béton, ainsi que de l'usure de la couronne du carottier.

4. Examen des trous de carottage Les trous decarottage doivent être examinés de façon à apporter des informations supplémentaires sur la qualité du béton (endoscope et photographies).

5. Stockage des éprouvettes Le stockage des carottes est conforme à la norme NF EN 12504-1 [1]. Les carottes doivent être protégées contre la dessiccation et pour ce faire, mises dans un sac en plastique fermé à chacune de ses extrémités.

6. Dimensions des carottes Les dimensions minimales des carottes sont fonction des essais auxquels elles sont destinées. Pour les essais mécaniques : le diamètre doit être au moins égal à 3 D (D = dimension du plus gros granulat). Un élancement de 2 est souhaitable.

7. Rebouchage des trous de carottage Il est recommandé de reboucher les trous des carottages à l'aide d'un mortier à retrait limité.

 MATÉRIEL L'ensemble du matériel est constitué d'un bâti, d'un moteur et d'un carottier. Le refroidissement de ce dernier peut se faire soit avec de l'eau, soit avec de l'air dans le cas d'un carottage à sec. La fixation du bâti se fait par chevillage dans le béton (Fig. 23).

40

PARTIE 3 - MÉTHODES D’ESSAI DE LABORATOIRE - MÉTHODE 62.4

_ Figure 23 Mise en place d’un carottier à la surface d’une paroi en béton.

 INFORMATIONS DANS LE PROCÈS-VERBAL DE PRÉLÈVEMENT Le procès-verbal des carottages devra comporter au moins les éléments suivants : ¾ les références de l'ouvrage ; ¾ l'emplacement des carottages sur l'ouvrage ou la partie d'ouvrage ayant subi un incendie ; ¾ la date des carottages ; ¾ le diamètre et la longueur de chaque carotte ; ¾ des photographies ou une description de chaque carotte. Toutes autres informations pouvant apporter un éclairage sur les dégradations observées (Fig. 24).

c

Figure 24 - Exemple de fiche d’enregistrement d’une carotte de béton.

41

Méthodes d’essai n° 62 ‹ Présentation des techniques de diagnostic de l’état d’un béton soumis à un incendie

 RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES [1] Norme NF EN 12504-1, Essais pour béton dans les structures - Partie 1 : carottes, prélèvement, examen et essais en compression, août 2000. [2] MÉNOU J., Projet de recommandations techniques pour l’extraction des carottes, LCPC Nantes, novembre 1994. [3] MAQ du réseau LPC « Études et expertises » O.A. - Évaluation en place de l'état du béton armé ou non - Prélèvement d'échantillons de béton par carottage - Réf. : EDOA - Fe 2.1, avril 2000. [4] Norme pr EN 13791 - Estimation de la résistance à la compression du béton dans les structures ou les éléments structuraux, juillet 2003.

 CONTACT " Gérard OLIVIER 01 60 56 64 75 " LRPC de l’Est Parisien - Centre de Melun Fax : 01 60 56 64 01

42

 [email protected]

PARTIE 3 - MÉTHODES D’ESSAI DE LABORATOIRE - MÉTHODE 62.5

] PAR ÉCHAUFFEMENT DU BÉTON SIMULATION DE L’INCENDIE

MÉTHODE

62.5

EN LABORATOIRE

 OBJET DE LA MÉTHODE ET DOMAINE D’APPLICATION Les dégradations subies par le matériau béton lors d'un incendie sont fonction des caractéristiques de l'échauffement (en particulier, la température atteinte, la durée et la cinétique de montée en température). L'ensemble des techniques d'évaluation des caractéristiques du béton soumis à un incendie nécessite un étalonnage et/ou une validation par échauffement maîtrisé en laboratoire.

 PRINCIPE Des échantillons de béton sain prélevés dans l'ouvrage faisant l'objet du diagnostic sont placés dans un four de laboratoire et y subissent un traitement thermique. Un cycle de température est programmé. Une connaissance des caractéristiques générales de l'incendie (durée, intensité) permet de déterminer le cycle optimal à appliquer. Toutefois, ce principe ne permet pas de réaliser une simulation réelle de la diffusion de la chaleur obtenue lors de l'incendie. En effet, les conditions de celui-ci ne sont pas parfaitement reproduites (influence des conditions aux limites, de la taille de l'échantillon notamment). Il s'agit donc d'un traitement thermique conventionnel. Il est possible cependant de recréer les transformations physico-chimiques du matériau dues à l'élévation de température. Il faut donc chercher à atteindre des paliers de température dans des conditions de vitesse réalistes. La durée du palier est fonction de la durée de l'incendie, qui est déterminante dans la réalisation des réactions de transformation des constituants du béton.

 APPAREILLAGE L'appareil utilisé est un four de laboratoire équipé d'un système de programmation (cf. modèles de four, figures 25a et 25b). Le module de programmation et de régulation doit permettre de régler : ¾ la vitesse de montée en température (de 30 à 700 °C/h) ; ¾ la durée des paliers ; ¾ la température maximale à atteindre (au moins jusqu'à 1000 °C).

43

Méthodes d’essai n° 62 ‹ Présentation des techniques de diagnostic de l’état d’un béton soumis à un incendie

b

a

c Figures 25a et 25b Modèles de fours utilisés.

 CONDITIONS D'ÉCHAUFFEMENT Le cycle appliqué au béton des échantillons carottés doit permettre de recréer au mieux les conditions d'échauffement subies par le béton de l'ouvrage incendié. Les conditions d'échauffement des échantillons ont des influences différentes sur les caractéristiques à déterminer après traitement. Les caractéristiques mécaniques sont impactées notamment par la taille des échantillons et par la vitesse de montée en température qui ont un effet direct sur la micro-fissuration (transformations s'apparentant à des chocs thermiques). En revanche, ce sont les températures atteintes et la durée des paliers qui importent pour obtenir les transformations chimiques et minéralogiques. Il est nécessaire, dans un premier temps, de rechercher toutes les données relatives à l'incendie (durée, températures atteintes, matériaux ayant brûlé, etc.). Les carottes auront un diamètre minimal de 80 mm et de trois fois la taille du plus gros granulat. Les paliers de température seront suffisamment longs pour obtenir les transformations chimiques et minéralogiques.

 EXEMPLE D'APPLICATION Après l'incendie du tunnel du Mont-Blanc, on a cherché à caractériser les dégradations du béton à partir des différentes méthodes présentées dans ce guide (détermination des modules et caractérisation minéralogique). Les traitements thermiques ont été réalisés sur des échantillons carottés de béton n'ayant pas subi d'échauffement lors de l'incendie (dans des zones saines proches du lieu du sinistre ou en profondeur au niveau de l'incendie). Les paliers atteints étaient de : 200, 400, 600, 800 et 1000 °C. La vitesse de montée en température était de 50 °C / heure à partir de la température ambiante (environ 20 °C), le palier durait 15 heures, le retour à température ambiante a été obtenu four éteint et fermé. Les essais réalisés sur béton sain comprenaient le traitement thermique du béton à différentes températures puis la détermination de la résistance à la compression (Fig. 26a), du module (Fig. 26b) et des caractéristiques chimiques et minéralogiques (Fig. 27).

44

PARTIE 3 - MÉTHODES D’ESSAI DE LABORATOIRE - MÉTHODE 62.5

Résistance à la compression (MPa) 50 40 30 20 10 0 0

200

400

600

800 1000 Température (˚C)

Module (GPa) 40 35 30 25 20 15 10 5 0 0 200

Sonique Grindo Extensométrie

400

600

800 1000 Température (˚C)

c Figure 26a

c Figure 26b

Évolution de la résistance à la compression en fonction de la température du traitement thermique.

Variation des modules statique et dynamique en fonction de la température par trois méthodes distinctes aux paliers retenus.

_ Figure 27 Photos de rondelles de carotte ayant subi un échauffement variant de 100 à 800 °C : Évolution sensible de l’aspect (couleur, cohésion).

La résistance à la compression du béton sain n'évolue qu'après 200 °C, et sa décroissance est alors brutale. La valeur du module chute dès que le béton monte en température, son évolution est très sensible jusqu'à 400 °C. Le palier de 600 °C, a été retenu comme un seuil au-delà duquel les résultats des essais réalisés ne semblent plus discriminants. L'évolution du module au Grindo-sonic n'est alors plus significative. Les valeurs mesurées mécaniquement (module statique et résistance mécanique) sont significatives tant que l'essai est possible. Jusqu'à 600 °C, il est possible d'établir un lien entre la température de cuisson et la valeur des caractéristiques mécaniques (module d'élasticité et résistance à la compression). Le tracé de l'évolution du module d'élasticité du béton incendié permet de déterminer une profondeur approximative au-delà de laquelle le béton n'a pas été dégradé par l'incendie.

 CONTACTS " Sylvie Arnaud 04 72 14 32 16 " Bernard Naquin 04 72 14 32 35 " CETE de Lyon - LRPC de Lyon

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45

PARTIE 3 - MÉTHODES D’ESSAI DE LABORATOIRE - MÉTHODE 62.6

] PAR PROFIL SONIQUE

CARACTÉRISATION DU BÉTON

MÉTHODE

62.6

 OBJET DE LA MESURE ET DOMAINE D'APPLICATION L'objet de la méthode présentée ici est de caractériser l'épaisseur de béton affectée par un incendie. L'application de cette méthode s'inscrit dans les activités d'investigation et d'expertise d'ouvrages en béton endommagés par un incendie ou susceptibles de l'avoir été, en vue de leur réparation. Dans ces circonstances, la vérification de la capacité portante résiduelle de la structure et l'établissement du projet de réparation imposent de localiser et de quantifier aussi précisément que possible les parties endommagées de béton. Les mesures, réalisées sur des carottes prélevées dans l'ouvrage en zone incendiée permettent de déterminer la dégradation des caractéristiques mécaniques du béton en place. Ces mesures peuvent être complétées, d'une part par des mesures soniques réalisées in situ (cf. fiche auscultation sonique) dans les zones citées précédemment et par la détermination directe de caractéristiques mécaniques (modules et résistances à la compression), d'autre part par des mesures réalisées en laboratoire sur des échantillons issus de carottages en zone saine et traités en laboratoire (cf. fiche « Simulation de l'incendie par échauffement du béton en laboratoire »).

 PRINCIPE DE LA MESURE Cette méthode est une application des lois de propagation des ondes soniques de compression dans les matériaux qui permet d'en déterminer les caractéristiques mécaniques et d'estimer l'homogénéité du milieu de propagation, de déceler des vides, délaminages et micro-fissurations [1 à 8]. La dégradation du béton, lorsqu'il est soumis à un incendie, affecte ses propriétés mécaniques. Le niveau de cette dégradation peut être évalué grâce à la mesure de la variation des caractéristiques de propagation des ondes de compression dans le béton. Les vitesses soniques et les atténuations d'énergie sont deux paramètres qui permettent d'obtenir une information qualitative sur le matériau. La vitesse sonique évolue en relation avec le module d'élasticité et la résistance à la compression. L'atténuation donne un complément d'information estimatif sur la rigidité et la compacité du milieu de propagation. La méthode ne nous autorise pas, à l'heure actuelle, à exploiter isolément l'amplitude ou l'atténuation du signal ultrasonore à cause du trop grand nombre de paramètres qui influencent la mesure (humidité, température, qualité de l'état de surface et du couplage aux transducteurs, etc.).

47

Méthodes d’essai n° 62 ‹ Présentation des techniques de diagnostic de l’état d’un béton soumis à un incendie

 DISPOSITIF EXPÉRIMENTAL Le matériel se compose de : ¾ un matériel standard de carottage du béton en place ; ¾ un générateur et un récepteur d'ultrasons : palpeurs à pointe ayant une fréquence propre de 35 kHz (un dispositif commun aux mesures soniques in situ et aux essais de laboratoire dénommé AVS 1500 est disponible dans le réseau des LRPC) ; ¾ une chaîne de conditionnement et de traitement du signal ; ¾ un oscilloscope pour visualiser et analyser les signaux reçus (de préférence numérique à mémoire, permettant de mesurer le 10e de microseconde et de stocker les signaux) ; ¾ un micro-ordinateur et des logiciels usuels de traitement de données (statistiques et graphiques) ; ¾ un pied à coulisse et du matériel de traçage.

 MÉTHODOLOGIE Ces essais se déroulent en deux étapes : ¾ le prélèvement des carottes in situ ; ¾ la mesure des caractéristiques de propagation des ondes de compression.

Prélèvement des carottes Les carottes, d'un diamètre généralement compris entre 80 et 100 mm, sont prélevées suivant la procédure habituelle, au carottier diamanté et sous eau (cf. fiche prélèvement de carottes in situ). Le nombre et l'implantation des carottages sont déterminés en fonction de l'importance des investigations à réaliser et, en particulier selon le type d'ouvrage, le mode de fonctionnement de la structure et l'étendue des dommages constatés. Une localisation du ferraillage par méthode électromagnétique sera menée afin d'éviter la présence d'armatures dans les carottes. D'une manière générale les prélèvements sont répartis sur les différentes parties d'ouvrage et, pour chacun d'eux, dans une zone indemne et dans plusieurs zones endommagées à des degrés divers.

Mesure des caractéristiques soniques La méthode utilisée est la méthode directe dans laquelle les capteurs se trouvent en visà-vis, l'onde traversant l'échantillon de part en part. Les palpeurs sont maintenus en place par simple pression et assurent un couplage ponctuel précis. Toutes les mesures sont effectuées à température ambiante sans sujétion particulière. Deux types de mesures sont réalisés : ¾ des mesures suivant deux diamètres perpendiculaires sont réalisées avec un pas centimétrique et permettent d'obtenir des profils d'évolution des caractéristiques en fonction de la profondeur ;

48

PARTIE 3 - MÉTHODES D’ESSAI DE LABORATOIRE - MÉTHODE 62.6

¾ une mesure suivant la longueur de la carotte, utilisée en complément d'information, donne une valeur intégrant les variations des caractéristiques du béton le long de la carotte. La carotte est identifiée, un premier axe est matérialisé (Fig. 28, trait rouge), les mesures de temps et d'amplitude se font avec un pas constant. Emetteur et récepteur sont situés en vis-à-vis sur le diamètre délimitant le plan de l'axe de mesure.

_ Figure 28 Exemple du dispositif de mesure sur carotte en laboratoire.

 EXPLOITATION DES RÉSULTATS L'exploitation est réalisée en reportant les paramètres soniques obtenus en fonction de la profondeur de la carotte. Généralement, le diamètre de la carotte étant inférieur à deux fois la longueur d'onde, l'exploitation est réalisée en temps de propagation et non en vitesse de propagation. L'amplitude est également exploitée. Les valeurs de temps et d'amplitude ainsi que la profondeur correspondant aux points de mesures sont reportées sur un graphe représentant le profil sonique de la carotte. Les dégradations s'atténuent progressivement depuis la face exposée au feu jusqu'à retrouver le béton sain à une profondeur qui est fonction des caractéristiques de l'incendie. Le passage du profil sonique au profil dynamique peut être effectué dans le cas où le diamètre de la carotte est supérieur à deux fois la longueur d'onde. Le calcul du module sonique selon la profondeur nécessite de réaliser un découpage de la carotte selon le pas de mesures et de déterminer la densité de chaque tranche sur la profondeur auscultée par pesée et calcul du volume unitaire. Une pesée hydrostatique est déconseillée (à cause de la porosité du béton altéré par la température). L'équation donnant le module exprimé en giga Pascal est donnée par la formule : E= KρV2 dans laquelle ρ est la masse volumique du béton en kg/m3, V est la vitesse sonique de l'onde longitudinale en m/s, et K, un paramètre fonction du coefficient de poisson ν est donné par la relation :

(1 + v) (1 – 2v) (1 - v) Le coefficient de Poisson peut être déterminé avec précision par la méthode sonique. Dans la pratique, on considère qu'il est de 0,2 pour des bétons ordinaires et 0,3 pour des bétons altérés.

49

Méthodes d’essai n° 62 ‹ Présentation des techniques de diagnostic de l’état d’un béton soumis à un incendie

En prenant un coefficient de poisson ν de 0,2, K est alors proche de 1 et la relation devient E = ρV2. L'estimation du module d'élasticité dynamique par cette méthode permet de caractériser des éléments portés à des températures extrêmes tant que le béton conserve sa cohésion (alors que d'autres méthodes trouvent leur limite à 600 °C).

 PRINCIPE DE RÉALISATION D'UN PROFIL SONIQUE SUR CAROTTE

c

(Fig. 29 et Fig. 30)

Figure 29

Schéma de traçage et mesures - Exemple d’une carotte prélevée en zone incendiée.

50

PARTIE 3 - MÉTHODES D’ESSAI DE LABORATOIRE - MÉTHODE 62.6

c

Figure 30

Schéma de traçage et mesures - Exemple d’une carotte prélevée en zone saine.

 EXEMPLE D'UTILISATION DE LA MÉTHODE Profil sonique réalisé avec un capteur à pointe de 35 kHz (Fig. 31) Des carottes ont été prélevées en zone brûlée et en zone saine après l'incendie d'un véhicule sous un ouvrage urbain. Le graphe ci-après représente l'évolution du temps de propagation selon la profondeur dans la carotte issue de la zone brûlée.

51

Méthodes d’essai n° 62 ‹ Présentation des techniques de diagnostic de l’état d’un béton soumis à un incendie

Figure 31

`

Cas d’un incendie d’un passage inférieur - Prélèvement en zone incendié.

Temps (µs) 110

ÉVOLUTION DU TEMPS DE PROPAGATION selon la profondeur de la carotte

105 100

Face exposée à l'incendie

95

Fond de la carotte

Épaisseur de béton dégradé

90

D1 Hétérogénéité naturelle du béton

85 80 P1

75

P2

D2

70 0 2 4 6 8 10 12 14 16 18 20 22 24 26 28 30 32 34 Profondeur de la carotte (cm)

On observe : ¾ une zone correspondant à l'hétérogénéité normale du béton, matérialisée par les droites D1 et D2 ; ¾ la profondeur maximale de dégradation, située entre 87 et 100 mm de l'extrémité de la carotte exposée au feu, valeurs minimale et maximale prenant en compte les écarts de temps dus à l'hétérogénéité naturelle du béton et à la précision des mesures. La figure 32 donne le profil sonique d'une carotte prélevée en zone saine : l'évolution des temps de propagation se limite à des variations de quelques microsecondes correspondant à l'hétérogénéité naturelle du béton et à la précision des mesures. Figure 32

`

Prélèvement en zone saine dans la dalle du passage inférieur incendié.

Temps (µs) 110 ÉVOLUTION DU TEMPS DE PROPAGATION selon la profondeur de la carotte

105 100 95

Face exposée à l'incendie

90

Fond de la carotte D1

85 D2 80 75 70 0 2

4

6

8

10 12 14 16 18 20 22 24 26 28 30 Profondeur de la carotte (cm)

On observe un léger gradient de temps entre la face exposée et la face intérieure, correspondant à l'hétérogénéité normale du béton et à la précision des mesures, sans relation avec l'incendie. On note l'absence d'évolution significative des temps de propagation sur la face exposée à l'incendie.

 RÉPÉTABILITÉ ET REPRODUCTIBILITÉ DE LA MESURE PAR AUSCULTATION SONIQUE Des essais de répétabilité et de reproductibilité ont été menés sur une dalle de béton recouverte d'une peinture époxy et comportant une zone hétérogène due à un ragréage.

52

PARTIE 3 - MÉTHODES D’ESSAI DE LABORATOIRE - MÉTHODE 62.6

La ligne de mesure tracée comportait neuf points distants de 20 cm. Un émetteur était positionné à une extrémité de la ligne et le récepteur était déplacé tous les 20 cm sur cette ligne. Pour l'étude de la répétabilité, un opérateur a déplacé le récepteur et un autre opérateur a réalisé les mesures de temps et d'amplitude sur l'oscilloscope. Les mesures ont été répétées quatre fois dans les mêmes conditions d'essais par le même opérateur ce qui a donné trente-six mesures de temps et trente-six mesures d'amplitude. Pour une vitesse sonique moyenne des ondes de compression de 4343 m/s, l'écart type est alors de 4,9 m/s. Pour une atténuation sonique de 18 dB/m, l'écart type s'élève à 1 dB/m. Pour l'étude de la reproductibilité, les mesures ont été réalisées par quatre opérateurs différents sur la même ligne. Le nombre de mesure a été inchangé : trente-six mesures de temps et trente-six mesures d'amplitude. Pour une vitesse sonique moyenne des ondes de compression de 4321 m/s, l'écart type est alors de 47 m/s. Pour une atténuation sonique de 19 dB/m, l'écart type s'élève à 2 dB/m.

 RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES [1] Norme NF P 18-418, Béton - Auscultation sonique - Mesure du temps de propagation d'ondes soniques dans le béton, décembre 1989. [2] Norme EN 12504-4, Essais pour béton dans les structures - Partie 4 : détermination de la vitesse de propagation du son, mai 2005. [3] CANNARD G., CARRACILLI J., PROST J., VENEC Y., Auscultation dynamique des superstructures par les méthodes classiques, Rapport de recherche n° 34, LCPC Paris - 132 pages, avril 1974. [4] CANNARD G., Propagation d'ondes mécaniques dans les solides, Comptes-rendus de travail FAER 1.65.09 - 1.65.13 - 1.69.10, CETE Lyon, dossier E6413, 31 pages, octobre 1985. [5] CANNARD G. et PROST J., Caractéristiques de la dégradation des matériaux, Compte-rendu de travail FAER 1.30.35, CETE Lyon, 1987. [6] CANNARD G., Synthèse des résultats du Laboratoire Régional de Lyon sur le contrôle des bétons par ultrasons, CETE Lyon, Dossier E6413, 39 pages, décembre 1989. [7] R. JONES, Les essais non destructifs des bétons, Éditions Eyrolles, 165 pages, 1967. [8] V. GARNIER, J.-F. CHAIX, G. CORNELOUP, Caractérisation non destructive du béton par analyses d'ondes ultrasonores, Bulletin des laboratoires des Ponts et Chaussées, 239, juillet-août 2002.

 CONTACTS " Sylvie Arnaud 04 72 14 32 16 " Bernard Naquin 04 72 14 32 35 " CETE de Lyon - LRPC de Lyon

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53

PARTIE 3 - MÉTHODES D’ESSAI DE LABORATOIRE - MÉTHODE 62.7

]

DÉTERMINATION DU PROFIL DE MODULE D’ÉLASTICITÉ DANS DU

MÉTHODE

62.7

BÉTON DURCI PAR LA MÉTHODE DE FRÉQUENCE DE RÉSONANCE

 OBJET DE LA MESURE ET DOMAINE D'APPLICATION L'objet de la méthode présentée ici est d'évaluer les caractéristiques mécaniques résiduelles du béton d'un ouvrage ayant été fortement échauffé à la suite d'un incendie. L'application de cette méthode s'inscrit dans les activités d'investigation et d'expertise d'ouvrages en béton endommagés par un incendie ou susceptibles de l'avoir été, en vue de leur réparation. Dans ces circonstances, la vérification de la capacité portante résiduelle de la structure et l'établissement du projet de réparation imposent de localiser et de quantifier aussi précisément que possible les parties endommagées de béton. Comme le béton se dégrade à partir de la surface exposée, la méthode habituelle de caractérisation de la résistance mécanique par essai sur carotte prélevée in situ est inadaptée car elle donne un résultat trop global concernant une épaisseur de béton égale à la longueur de la carotte soit au minimum 50 à 100 mm. La procédure présentée ici permet d'estimer la résistance mécanique du béton en place par pas de 10 mm à partir de la surface.

 PRINCIPE DE LA MESURE La dégradation du béton affecte différents aspects de ses propriétés mécaniques (élasticité et rupture). Le niveau de cette dégradation peut donc être évalué par la diminution relative de l'une de ces caractéristiques comme le module d'élasticité de flexion. Le principe de la mesure repose sur la détermination du module d'élasticité dynamique à partir de la mesure de la fréquence propre de résonance de disques obtenus par sciage en tranches successives de carottes prélevées dans l'ouvrage. Ces mesures, réalisées ainsi à différentes profondeurs dans le béton prélevé, permettent de dresser son profil de module d'élasticité, du parement jusqu'au cœur de la structure [1 à 2].

 DISPOSITIF EXPÉRIMENTAL Le matériel se compose de : ¾ une scie à béton de précision pour la confection des disques. Il s'agit d'une machine équipée d'une lame diamantée à jante continue d'une capacité de coupe adaptée aux

55

Méthodes d’essai n° 62 ‹ Présentation des techniques de diagnostic de l’état d’un béton soumis à un incendie

éléments à découper (découpe en une passe). Le porte échantillon est muni d'un dispositif de bridage qui doit assurer un maintien strict des carottes, ainsi que d'une butée amovible permettant le positionnement toujours identique de la carotte par rapport à la lame pour chaque coupe ; ¾ une balance de précision 0,1 g ; ¾ un pied à coulisse d'ouverture minimale 250 mm et de précision 0,05 mm ; ¾ un analyseur de fréquence de résonance de pièces en béton de type « GRINDOSONIC » (Fig. 33) ou matériel équivalent permettant la détermination (analyseur de spectre, etc.) ; ¾ un marteau de mise en vibration des disques et un support des disques. Figure 33

`

Mesure de la fréquence de résonance d’un disque de béton.

 MÉTHODOLOGIE Ces essais se déroulent en trois étapes : ¾ le prélèvement des carottes in situ (cf. fiche « Le prélèvement de carottes in situ ») ; ¾ la confection des disques à partir des carottes ; ¾ la mesure de fréquence de résonance des disques.

Prélèvement des carottes Les carottes, d'un diamètre compris entre 80 et 100 mm, sont prélevées suivant la procédure habituelle en la matière, c'est-à-dire au moyen d'un carottier diamanté et sous eau (Fig. 34). Dans le cas de la présente application, la longueur des carottages sera fixée de manière à : ¾ pouvoir étudier le profil de module sur une profondeur suffisante (de 50 à 100 mm) ; ¾ disposer d'une longueur excédentaire pour le maintien de la carotte pendant le découpage des disques (50 à 70 mm selon le modèle de scie), et enfin, au besoin ; ¾ pouvoir en plus confectionner des éprouvettes pour essais mécaniques classiques (au moins 100 mm). Le nombre et l'implantation des carottages sont déterminés en fonction de l'importance des investigations à réaliser et, en particulier selon le type d'ouvrage, le mode de fonctionnement de la structure et l'étendue des dommages constatés. Une localisation du ferraillage par méthode électromagnétique doit être menée afin d'éviter la présence d'armatures dans les carottes au moins dans les premiers centimètres.

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PARTIE 3 - MÉTHODES D’ESSAI DE LABORATOIRE - MÉTHODE 62.7

_ Figure 34 Prélèvement de carotte sur le revêtement d’un tunnel.

D'une manière générale, les prélèvements doivent être répartis sur les différents types de parties de l'ouvrage et, pour chacun d'eux, dans une zone indemne et dans plusieurs zones endommagées à des degrés divers. Sitôt les carottes extraites de l'ouvrage, celles-ci sont rincées à l'eau claire, identifiées et immédiatement emballées dans un film étanche.

Confection des disques à partir des carottes Préalablement au découpage des disques dans les carottes, on procède à toutes les observations, prélèvements et constatations utiles relatives à la nature du béton et à son état de dégradation apparent. Les carottes sont ensuite essuyées puis revêtues sur leur périphérie d'une ou deux couches de feuille épaisse adhésive d'aluminium afin de limiter les risques d'épaufrures des bords des disques lors de leur découpage. Dans le cas où le parement extérieur est irrégulier (cf. Fig. 36) ou dégradé (écailles), une rectification de la surface concernée est opérée par meulage ou par découpe à la scie. On doit veiller cependant, dans ce cas, à limiter le plus possible la longueur de carotte éliminée. Le réglage de la butée de positionnement longitudinal de la carotte est réalisé de manière à découper des disques d'une épaisseur constante voisine du dixième du diamètre. La carotte est mise en place et bridée sur le porte échantillon de la scie. La vitesse de progression de la coupe est ajustée selon l'état du béton afin d'éviter toute détérioration, notamment en fin de coupe. Après découpe, chaque disque est ensuite rincé, débarrassé de son film d'aluminium, repéré (numéro du disque - référence carotte) puis stocké à l'air libre en laboratoire.

Mesures de fréquence de résonance des disques Après pesée et mesures dimensionnelles (diamètre et épaisseur), les disques sont placés à l'horizontale sur un support de mesure constitué de bandes de mousse disposées en

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Méthodes d’essai n° 62 ‹ Présentation des techniques de diagnostic de l’état d’un béton soumis à un incendie

croix. Le capteur de vibration est placé sur la couronne du disque entre deux supports puis un coup de marteau est appliqué sur le bord du disque à l'opposé du capteur ou à 90° de celui-ci (Fig. 35). Le chiffre indiqué par l'appareil est relevé et l'opération est renouvelée jusqu'à ce qu'une même valeur se répète suffisamment fréquemment une dizaine de fois. La valeur stable finale est notée.

c Figure 35 Procédure de mesure de la fréquence de résonance d’un disque de béton.

 EXPLOITATION DES RÉSULTATS La fréquence propre de résonance d'un corps dépend de sa forme, de ses dimensions, de sa masse et de l'élasticité du matériau qui le constitue. Pour un objet en forme de disque mince, ces paramètres sont liées par la formule : Edyn = 5,2.103 m d2 / G2 e3 Avec :

Edyn m d e G

Module d'élasticité dynamique en GPa Masse du disque en g (à 0,1 g près) Diamètre du disque en mm (à 0,1 mm près) Épaisseur du disque en mm (à 0,1 mm près) Affichage de l'appareil GRINDO-SONIC : double période de vibration en μs (dans le cas d'un appareil qui fournit une valeur de fréquence f en Hz, G est donné par 2 × 106 / f).

Il est à noter que la valeur du module d'élasticité dynamique est généralement différente du module d'élasticité dit « statique » que l'on détermine en mesurant la déformation d'un corps soumis à une charge donnée orientée dans la même direction que celle de la mesure dimensionnelle. Cet écart est dû à la différence du niveau de sollicitation mécanique des corps d'épreuve entre les deux méthodes. Dans le cas de la mesure par résonance les efforts appliqués sont insignifiants, le module est alors donné par la pente de la tangente à l'origine de la courbe effort - déformation. Dans le cas du module statique, la charge d'essai est élevée, et, les déformations n'étant plus à ce stade proportionnelles aux efforts, le module est donné par une droite sécante à la courbe effort - déformation, c'est-à-dire qu'il est inférieur à la valeur du module dynamique.

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PARTIE 3 - MÉTHODES D’ESSAI DE LABORATOIRE - MÉTHODE 62.7

Pour un béton de bonne qualité, l'écart entre les deux modules est de l'ordre de 7 GPa. Au besoin, une corrélation précise peut être établie expérimentalement sur des carottes prélevées dans l'ouvrage étudié.

 EXEMPLE D'UTILISATION DE LA MÉTHODE Détermination du profil de module d'une paroi incendiée Un exemple de calcul de modules dynamiques sur une série de six disques confectionnés dans une carotte prélevée sur un parement endommagé par un incendie est présenté dans le tableau IV. On y retrouve la valeur du module dynamique de chaque disque, du plus proche au plus éloigné du parement, ainsi que le rapport de chaque valeur de module avec la moyenne de l'ensemble des mesures. On peut donc constater que le module est plus faible pour les deux premiers disques, ce qui correspond à l'existence d'une zone de moindre qualité sur une épaisseur comprise entre 23 et 38 mm. TABLEAU IV Exemple de calcul des masses volumiques et des modules des disques Φ 4,5 mm selon la position par rapport au parement Repère carotteDisque

Profondeur Centre de gravité l parement restant (mm)

Mesures sur disque Masse totale

Diamètre d

Épaisseur e

(g)

(mm)

(mm)

(g/cm3)

G (μs)

GPa

(%)

5-1

8,8

161

94,5

11,6

1,98

368

35,4

82

5-2

23,4

182

94,5

11,7

2,22

356

41,6

96

5-3

38

196

94,5

11,6

2,41

362

44,5

102

5-4

52,6

198

94,5

11,8

2,39

350

45,7

105

5-5

67,2

197

94,5

11,6

2,42

354

46,8

108

5-6

81,8

199

94,4

11,8

2,41

347

46,6

107

43,4

100

Module dynamique moyen Æ

Calcul masse volumique

Lecture Module Pourcentage grindosonic dynamique de la valeur moyenne

Un autre exemple est présenté dans la figure 37 sous forme de graphes représentant, pour plusieurs prélèvements, la variation du module de chaque disque par rapport à la moyenne de chaque prélèvement en fonction de la profondeur résiduelle. Ici encore, on observe un affaiblissement systématique du module à proximité du parement sur environ 30 à 40 mm de profondeur.

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Méthodes d’essai n° 62 ‹ Présentation des techniques de diagnostic de l’état d’un béton soumis à un incendie

Figure 36

`

Aspect de l’une des carottes avant découpe des disques. À noter l’état dégradé de l’extrémité côté parement (à gauche) empêchant la réalisation d’un disque à proximité immédiate de cette extrémite.

Figure 37

`

Courbes de variation du module selon la profondeur pour divers prélèvements de béton dans le revêtement d’un tunnel.

 RÉPÉTABILITÉ DE LA MESURE DU MODULE D'ÉLASTICITÉ DYNAMIQUE Des essais de répétabilité menés sur une série de dix disques confectionnés dans une même carotte extraite d'un matériau homogène (bloc de granite) conduisent à un écart type 1,9 GPa pour un module d'élasticité dynamique moyen de 69 GPa.

 RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES [1] Cyril M. Harris, Charles E. Crede, Shock and vibrations handbook, Ed. Mc Graw - Hill Book Compagny, 1972. [2] FASSEU P., Incendie du tunnel sous la Manche, Expertise des désordres et contrôle de la réparation, Monographies d'études et de recherches 1996-1997, Document LCPC, 1996.

 CONTACT " Pascal Fasseu 03 20 48 49 49 " LRPC de Lille - Unité Bétons et Bâtiments Fax : 03 20 50 55 09

60

 [email protected]

PARTIE 3 - MÉTHODES D’ESSAI DE LABORATOIRE - MÉTHODE 62.8

] ATTEINTES DANS LES BÉTONS

ESTIMATION DES TEMPÉRATURES

MÉTHODE

62.8

PAR MICROSCOPIE ÉLECTRONIQUE À BALAYAGE

 OBJET DE LA MESURE ET DOMAINE D’APPLICATION L'objectif de cet essai, qui repose sur des examens au microscope électronique à balayage, est d'obtenir des informations sur les températures auxquelles les bétons ont été soumis. Ces informations sont obtenues sous forme de paliers détectés, soit par une modification texturale due par exemple à des phénomènes de retrait ou de dilatation des constituants du béton, soit par une transformation de certaines phases minérales due par exemple à des recristallisations après un cycle de chauffage suivi d'une éventuelle réhumidification. Ces modifications structurales se produisent à des températures connues de sorte que cet essai répond comme un thermomètre à maxima. Cette caractérisation peut être réalisée sur du béton provenant d'éprouvettes moulées (simulation des températures en laboratoire) ou sur des carottes prélevées sur ouvrage. Un profil de diffusion de la chaleur dans les bétons peut aussi être obtenu en examinant des échantillons prélevés à différents niveaux de profondeur dans la carotte.

 PRINCIPE Le principe de la microscopie électronique à balayage consiste à déplacer un faisceau d'électrons de haute énergie et très focalisé (environ 50 mm de diamètre) suivant une série de lignes parallèles sur la surface de l'échantillon à analyser. L'interaction du faisceau d'électrons avec la surface induit plusieurs phénomènes (Fig. 38) : absorption d'électrons, rétrodiffusion et diffraction d'électrons, émission d'électrons secondaires et Auger, émission de photons X, UV et visibles (cathodoluminescence). Chacun de ces effets peut donner lieu à la formation d'une « image », si l'on dispose du détecteur correspondant, capable de transformer l'effet obtenu en signal électrique.

61

Méthodes d’essai n° 62 ‹ Présentation des techniques de diagnostic de l’état d’un béton soumis à un incendie

Figure 38

`

Faisceau d'électrons primaires

Effets du bombardement électronique sur la matière. Zone d'échappée des électrons secondaires

Échantillon

Pénétration du faisceau primaire

Zone d'échappée des électrons rétrodiffusés

Zone d'échappée des photons X

L'utilisation des électrons secondaires est le mode habituel de formation d'images pour les microscopes à balayage courants. Elle donne une information sur la topographie d'un échantillon massif. En effet, la grande profondeur de champ et la haute résolution permettent la visualisation de détails très fins de la microstructure. Le contraste de composition ou de numéro atomique peut être visualisé à partir des électrons rétrodiffusés. Par contre, cette technique nécessite de travailler sur des surfaces polies. Enfin, il est possible d'analyser, à l'aide d'un spectromètre, les photons X caractéristiques de chaque élément entrant dans la composition chimique de l'échantillon.

 DISPOSITIF EXPÉRIMENTAL Le dispositif expérimental décrit ici est celui du LCPC. Il s'agit d'un microscope électronique à balayage PHILIPS XL 30. Il est composé d'une chambre à échantillon, d'une colonne, d'un détecteur d'électrons secondaires, d'un détecteur d'électrons rétrodiffusés, de deux écrans de visualisation et d'un système de pompage destiné à assurer le vide dans la colonne et la chambre. Enfin, le microscope est également équipé d'une microsonde EDAX DX 4i pour l'analyse en sélection d'énergie du spectre X émis (Fig. 39).

Figure 39

`

Vue d’ensemble du microscope électronique à balayage.

62

PARTIE 3 - MÉTHODES D’ESSAI DE LABORATOIRE - MÉTHODE 62.8

 MÉTHODOLOGIE Préparation des échantillons Deux méthodes de préparation des échantillons sont nécessaires : ¾ des cassures fraîches obtenues par fracture au marteau afin de préserver l'apparence et l'agencement des minéraux constitutifs du matériau ; ¾ des fragments de béton prélevés par sciage, imprégnés de résine puis polis jusqu'au micromètre. Cette méthode de préparation permet notamment d'observer la microfissuration du matériau sans générer d'artefacts. Dans le cas de l'établissement d'un profil de diffusion de la chaleur dans le béton, des échantillons sont alors prélevés à différents niveaux de profondeur de la carotte. L'épaisseur et le nombre de rondelles à découper sont fonctions de la nature et de la durée de l'incendie. Les échantillons doivent subir, après fracture et sciage, un traitement de dessiccation sous vide qui ne doit pas dépasser une température de 40 °C. Ensuite, les échantillons sont revêtus d'un film conducteur. Dans le cas où la microanalyse par spectrométrie à dispersion d'énergie est utilisée, un dépôt de carbone, peu absorbant pour les rayonnements X et permettant de s'affranchir de certaines interférences (entre Au et S par exemple) est préférable par rapport aux autres métaux conducteurs.

Conditions d'observations au microscope Les microscopes électroniques permettant de travailler de manière courante et efficace à des grandissements compris entre 10 et 10 000, la démarche logique à adopter est de partir des échelles les plus grossières vers les échelles les plus fines. L'examen microscopique s'effectue alors selon la procédure préconisée dans le document « Méthodologie d'approche de la microstructure des bétons par les techniques microscopiques » [1]. Les fractures fraîches sont observées en utilisant la technique des électrons secondaires. Les surfaces polies sont examinées en employant la technique des électrons rétrodiffusés.

 EXPLOITATION DES RÉSULTATS L'exploitation des images obtenues par microscopie électronique à balayage nécessite un personnel spécialisé possédant une bonne expérience de la physico-chimie des bétons et de leur microstructure. Nous donnons dans les pages suivantes plusieurs exemples de photographies (Fig. 40 à Fig. 52) qui illustrent bien les modifications texturales ainsi que les transformations de certaines phases minérales du béton se produisant à des températures connues. Les exemples utilisés sont présentés en relation avec un accroissement de la température.

63

Méthodes d’essai n° 62 ‹ Présentation des techniques de diagnostic de l’état d’un béton soumis à un incendie

c Figure 40

c Figure 41

Surface d'un béton ne présentant pas de faciès d'altération, en particulier absence de fissure. Cet échantillon n'a pas subi d'échauffement au-delà de 100 °C.

Cristaux d'ettringite aciculaire dans une vacuole. L'ettringite (3CaO.Al2O3.CaSO4.32H2O) commence à perdre son eau de constitution à partir de 80 °C et devient amorphe pour des températures supérieures à 100 °C. La présence d'ettringite atteste donc que le matériau n'a pas subi une élévation de température au-delà de 100 °C, sauf si un apport d'eau s'est produit après l'incendie ayant permis alors une réhydratation.

(Surface polie, technique des électrons rétrodiffusés, grossissement × 60).

(Fracture fraîche, technique des électrons secondaires, grossissement × 100).

c Figure 42

c Figure 43

Apparition de fissures au sein de la pâte de ciment dues au départ de l'eau. Phénomène observé pour des températures voisines de 200 °C.

Recristallisation sous forme de « roses des sables » de la portlandite (Ca(OH)2) transformée en chaux vive (CaO) lors de l'incendie. Phénomène observé pour des températures voisines de 500 °C.

(Surface polie, technique des électrons rétrodiffusés, grossissement × 160).

64

(Fracture fraîche, technique des électrons secondaires, grossissement × 1220).

PARTIE 3 - MÉTHODES D’ESSAI DE LABORATOIRE - MÉTHODE 62.8

c Figure 44

c Figure 45

Fractures transgranulaires d'un grain de quartz (SiO2). Ceci correspond à la transformation allotropique du quartz α en quartz β qui se produit autour de 570 °C. Cette transformation réversible a des répercussions importantes sur les propriétés physiques du quartz et induit en particulier une dilatation (0,8 % en volume).

Fissuration en forme d'étoile d'un cristal de quartz (α) et joints inter cristallins (flèches) attestant que le béton a atteint des températures supérieures à 570 °C. (Surface polie, technique des électrons rétrodiffusés, grossissement × 800).

(Fracture fraîche, technique des électrons secondaires, grossissement × 150).

c Figure 46

c Figure 47

Présence de concrétions de sulfate de calcium amorphe à la surface de l'échantillon. À une température voisine de 1000 °C, la décomposition des sulfoaluminates de calcium hydratés (ettringite et monosulfoaluminate) conduit entre autres à la formation de produits anhydres tel que l'anhydrite (CaSO4).

Mamelons d'anhydrite en surface de la matrice attestant que le béton a atteint une température voisine de 1000 °C. (Fracture fraîche, technique des électrons secondaires, grossissement × 700).

(Fracture fraîche, technique des électrons secondaires, grossissement × 2000).

65

Méthodes d’essai n° 62 ‹ Présentation des techniques de diagnostic de l’état d’un béton soumis à un incendie

c Figure 48

c Figure 49

Le faïençage observé traduit un début de décohésion intragranulaire du granite. Les minéraux du granite (feldspaths, quartz, micas) se comportent au feu par des variations de leurs dimensions microstructurelles en fonction de la température. Ce phénomène se produit pour des températures voisines de 800 °C.

Décohésion généralisée des minéraux constitutifs du granulat granitique. En effet, il se produit à haute température (vers 1000 °C) un important retrait des minéraux qui engendre alors une fissuration du granulat. (Surface polie, technique des électrons rétrodiffusés, grossissement × 100).

(Surface polie, technique des électrons rétrodiffusés, grossissement × 30).

c Figure 50

c Figure 51

Matrice cimentaire d'aspect vitreux et présentant une macroporosité importante. La forte porosité provient de la dégradation des phases minérales présentes avant l'incendie (entre autres, vaporisation de l'eau de constitution des hydrates). Ce phénomène témoigne d'une élévation de la température au-delà de 1000 °C.

Densification et vitrification de la matrice cimentaire. Ceci s'explique vraisemblablement par le remplacement au cours de l'échauffement des liaisons hydrauliques par des liaisons céramiques. Ce phénomène débute à partir de 1000/1100 °C.

(Fracture fraîche, technique des électrons secondaires, grossissement × 150).

66

(Surface polie, technique des électrons rétrodiffusés, grossissement × 80).

PARTIE 3 - MÉTHODES D’ESSAI DE LABORATOIRE - MÉTHODE 62.8

Par ailleurs, il est indispensable de faire appel à plusieurs méthodes de caractérisation complémentaires pour garantir la plus grande fiabilité de la synthèse finale. En effet, l'utilisation d'une seule méthode risque d'entraîner une vision tronquée ou erronée de la microstructure du béton. Par conséquent, l'examen microscopique devra très souvent être complété par des méthodes d'approche plus globales telles que la diffractométrie des rayons X et les analyses thermiques [2].

c Figure 52 Phase cristallisée en forme de bâtonnets et de composition SiO2, CaO à la surface de la matrice. Il s'agit de la wollastonite β (CaO.SiO2). D'après le diagramme de phases CaO-SiO2, la formation de wollastonite ne peut arriver qu'à partir d'une température supérieure à 1125 °C. (Surface polie, technique des électrons rétrodiffusés, grossissement × 200).

 EXEMPLES D'UTILISATION DE LA MÉTHODE DE MESURE À la demande d'ATMB (Autoroute du tunnel du Mont-Blanc), des échantillons de béton prélevés dans le tunnel du Mont-Blanc après l'incendie du 24 mars 1999 ont été caractérisés d'un point de vue physico-chimique afin de déterminer les températures auxquelles ont été portés les bétons. Ces échantillons proviennent de différentes zones du tunnel qui ont été classées, lors de l'inspection, selon leur état d'endommagement : ¾ zone en dehors de l'incendie : G ¾ zone de feu intermédiaire : A', B et E ¾ zone de feu intense : D et F Les résultats présentés dans le tableau V ont été obtenus à partir du recoupement des informations provenant de trois méthodes de caractérisation : la microscopie électronique à balayage, l'analyse thermique et la diffractométrie des rayons X. La température atteinte a été estimée sur les parties superficielles de béton (entre 0 et 2 cm de profondeur) provenant des différentes zones du tunnel du Mont-Blanc. TABLEAU V Estimation des températures atteintes dans les parties superficielles du béton (0 à 2 cm de profondeur) du tunnel du Mont-Blanc, suite à l’incendie du 24 mars 1999 Références de la zone Température atteinte (°C)

Références de la zone Température atteinte (°C)

A’

A’

B

B

D

D

E

200-400

200-400

200-400

200-400

700-800

800-900

200-400

E

E

E

F

F

F

G

200-400

200-400

≅ 570

≅ 570

400-500

400-500

< 100

67

Méthodes d’essai n° 62 ‹ Présentation des techniques de diagnostic de l’état d’un béton soumis à un incendie

La zone D apparaît la plus affectée par l'incendie. En effet, le béton a subi une élévation de température proche de 900 °C. Il est vraisemblable que la partie superficielle du béton, qui était en contact direct avec le feu et qui s'est décrochée de la voûte (échantillon non analysé), ait dépassé cette température compte tenu de l'éclatement du matériau. La zone F a également subi une zone de feu intense mais le béton a été porté à une température moins élevée (au maximum 570 °C). La zone E comporte un échantillon pour lequel la température du béton a également atteint 570 °C. Pour les autres échantillons de cette zone, l'incendie n'a pas engendré un échauffement important du béton. Celui-ci se situe vers 200 °C - 400 °C. La pâte de ciment apparaît peu fissurée ce qui milite en faveur d'une température plus proche de 200 °C. Toutefois, nous ne pouvons pas définir plus précisément la fourchette de température étant donné l'absence de modifications minéralogiques dans ce domaine de températures. Les bétons des zones A' et B ont été soumis à des températures similaires à la zone E, c'est-à-dire à une température comprise entre 200° et 400 °C. Enfin, le béton de la zone G, prélevé en dehors de la zone d'incendie, n'a bien subi aucun échauffement significatif.

 RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES [1] Mode opératoire de l'AFPC-AFREM, Méthodologie d'approche de la microstructure des bétons par les techniques microscopiques, 1998. [2] PERSY J.-P., DELOYE F.-X., Investigations sur un ouvrage en béton incendié, Bulletin des laboratoires des Ponts et Chaussées, 145, pp. 108-114, 1986.

 CONTACTS " Loïc Divet 01 40 43 51 48  [email protected] " Thierry Berthelot 01 40 43 52 36  [email protected] " Laboratoire Central des Ponts et Chaussées - Service physico-chimie des matériaux Section Pathologie des bétons, Protection et Expertise Fax : 01 40 43 65 14

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PARTIE 3 - MÉTHODES D’ESSAI DE LABORATOIRE - MÉTHODE 62.9

] ATTEINTES DANS LES BÉTONS

ESTIMATION DES TEMPÉRATURES

MÉTHODE

62.9

PAR ANALYSES THERMIQUES

 OBJET ET DOMAINE D'APPLICATION L'objectif de cet essai est d'obtenir des informations sur les températures auxquelles les bétons ont été soumis. Cet essai permet d'identifier, voire de quantifier, des phases solides présentes dans le béton après une exposition à un incendie. Il peut s'agir alors de minéraux initialement contenus dans le béton ou de produits résultant de modifications chimiques et minéralogiques consécutives à une élévation de température. Dans les deux cas, la présence ou l'absence de phases solides donne une indication sur la température atteinte dans le matériau. Ce mode opératoire décrit le déroulement d'une analyse thermique simultanée qui comprend une analyse thermogravimétrique (ATG) et une analyse thermique différentielle (ATD), appliquées à un échantillon de béton. Un profil de diffusion de la chaleur dans les bétons peut aussi être obtenu en examinant des échantillons prélevés à différents niveaux de profondeur de la carotte. Enfin, il est souhaitable d'associer cet essai avec une détermination de la silice soluble du béton afin de connaître précisément le dosage en ciment des échantillons. En effet, une hétérogénéité du matériau (en fonction de la zone et de la profondeur analysées) peut entraîner des erreurs d'interprétation.

 PRINCIPE Le principe de l'analyse thermogravimétrique est de mesurer en fonction du temps ou de la température les variations de masse d'un échantillon soumis à un programme de température déterminé. Le principe de l'analyse thermique différentielle est de mesurer, en fonction du temps ou de la température, la différence de température entre un échantillon et une référence provoquée par toutes modifications physique et/ou chimique de l'échantillon lorsqu'ils sont soumis à une même loi de variation de température. Ces deux méthodes permettent d'obtenir des données soit qualitatives soit quantitatives [1]. La thermogravimétrie et sa dérivée, notée DTG, quantifient les diverses pertes ou reprises de masse observées au cours de l'essai. L'analyse thermique différentielle permet une identification des phases responsables des différentes pertes ou reprises de masse observées au cours de l'essai.

69

Méthodes d’essai n° 62 ‹ Présentation des techniques de diagnostic de l’état d’un béton soumis à un incendie

 DISPOSITIF EXPÉRIMENTAL Le matériel disponible au LCPC est le suivant : ¾ une thermobalance ou analyseur thermique simultané (25 à 1200 °C) ; ¾ une balance permettant de mesurer la masse initiale de l'éprouvette avec une précision de ± 0,1 mg ; ¾ des creusets de platine. La figure 53 donne le principe de fonctionnement d'une thermobalance.

Porte-échantillon DSC Four

Capillaire pour entrée des gaz Porte-échantillon

Radiateurs

Porte-échantillon TG

Tube de protection Fermeture étanche QR + QS

QR QS

Système d'évacuation Capteur de déplacement Balance

Compensation électromagnétique Caisson étanche au vide

c Figure 53 Principe de fonctionnement d’une thermobalance.

70

PARTIE 3 - MÉTHODES D’ESSAI DE LABORATOIRE - MÉTHODE 62.9

La figure 54 présente l’analyseur simultané utilisé au LCPC.

_ Figure 54 Analyseur thermique simultané.

 MÉTHODOLOGIE Préparation de l'échantillon L'échantillon de béton à analyser est fragmenté au concasseur de façon à obtenir une granulométrie inférieure à 2,5 mm. Cette opération doit se faire en récupérant soigneusement toutes les fines produites. Prélever au moins 100 g d'échantillon au moyen d'un échantillonneur ou par quartage. Broyer l'échantillon pendant quelques secondes puis tamiser à 315 μm. Répéter l'opération « broyage plus tamisage » jusqu'à passage complet à 315 μm. Transférer l'échantillon dans un flacon propre et sec à fermeture hermétique, prendre soin de ne pas perdre de fines et agiter vigoureusement pour l'homogénéiser. Enfin, une prise d'essai de l'ordre de 180 à 230 mg est placée dans un creuset en platine (préalablement calciné) compatible avec l'analyseur et pesée avec précision.

Paramètres de l'appareil Tout appareil analytique nécessite des réglages ou des procédures de correction afin de donner des résultats fiables et corrects. Les étalonnages et les corrections des dérives de l'appareil portent sur : ¾ l'étalonnage en température ; ¾ l'étalonnage de la masse ; ¾ la correction de la poussée d'Archimède ou correction de la variation apparente de la masse en fonction de la température. Les méthodes utilisées varient en fonction du type de thermobalance et doivent être appliquées selon des procédures définies en accord avec les constructeurs des appareils. L'étalonnage et la vérification de la masse peuvent s'effectuer soit par pesage de poids calibrés soit par analyse thermogravimétrique de références (carbonate de calcium RP, oxalate de calcium RP). Le creuset utilisé lors des analyses est calciné avant l'introduction de la prise d'essai et est manipulé ensuite avec des pinces.

71

Méthodes d’essai n° 62 ‹ Présentation des techniques de diagnostic de l’état d’un béton soumis à un incendie

Description de l'essai Selon la nature du liant entrant dans la composition du béton à analyser, l'essai se déroule, soit sous atmosphère inerte, soit sous air. Dans le cas d'un essai sous atmosphère inerte, la thermobalance doit être dégazée, soit par mise sous vide suivie d'un remplissage par le gaz inerte, soit par un long balayage par le gaz inerte avant de commencer les mesures. L'analyse thermique est conduite suivant le programme de température suivant : ¾ départ à la température ambiante (proche de 25 °C) ; ¾ chauffage linéaire depuis la température ambiante jusqu'à 1150 °C et à une vitesse de 10 °C/min selon les conditions suivantes : 3 soit sous balayage d'azote (80 ml/min), 3 soit sous balayage d'air (80 ml/min). Remarque : Le débit du gaz de travail (azote ou air) doit rester constant tout au long de l'essai.

 EXPLOITATION DES RÉSULTATS L'exploitation des courbes permet d'identifier, et parfois de quantifier, les phases minérales contenues dans le béton. Leur présence ou leur absence est associée à des seuils de température. Par exemple, la pâte de ciment soumise à une élévation de température, subit plusieurs évolutions. La plus connue concerne la déshydratation de la portlandite [Ca(OH)2 ⇒ CaO + H2O] qui se produit entre 450 °C et 540 °C. De même, les granulats subissent aussi des modifications consécutives à une forte élévation de température. Par exemple, nous citerons le cas de la décarbonatation des granulats calcaires [CaCO3 ⇒ CaO + CO2] qui se produit vers 800 °C [2]. La comparaison avec un échantillon, provenant d'une zone non soumise à un incendie, est indispensable. Elle donne ainsi des informations sur les températures auxquelles les bétons ont été soumis. Ceci se traduit notamment par une diminution de la teneur en eau liée et/ou en gaz carbonique. L'exploitation des courbes se fait suivant un protocole qui est fonction du logiciel de l'appareil et doit respecter les points suivants selon les possibilités de chaque appareil : ¾ axe des ordonnées en mg ou en pourcentage de variation de masse ; ¾ axe des abscisses en température (°C) ou en temps ; ¾ lissage de la courbe (fonction du logiciel) ; ¾ correction de la poussée d'Archimède (fonction du logiciel) ; ¾ calcul et affichage de la courbe dérivée (fonction du logiciel) ; ¾ calcul des différentes perte ou gain de masse ; ¾ calcul des températures des maximum des pics ATD.

1. Courbe thermogravimétrique (ATG) La courbe DTG, permet de mieux calculer les divers pertes ou gains de masse en précisant avec netteté les températures de début et de fin de réaction donnant naissance aux divers accidents enregistrés sur la courbe ATG. Un exemple est présenté dans la figure 55.

72

PARTIE 3 - MÉTHODES D’ESSAI DE LABORATOIRE - MÉTHODE 62.9

Signal ATD (μV) 10 C-S-H + ettringite Cristallisation wollastonite Carboaluminate de calcium

234,2°C

902,5°C

b

Portlandite 491,4°C

-20

Quartz a

573,1°C

116°C

-15

176,5°C

-10

397,2C

Brucite

-5

ATD

Calcite

C4AHn+/-CO2

0

773,2°C

5

-25

TG

-30 0

200

400

600

800

1000 1200 Température (˚C)

c Figure 55 Courbes ATG et ATD types obtenues avec un échantillon de béton.

La thermogravimétrie permet de déterminer : ¾ la teneur en eau liée aux hydrates (C-S-H, ettringite, etc.) ; ¾ la teneur en eau de la portlandite. Le départ de cette eau se produit entre 450 et 540 °C ; ¾ la teneur en eau correspondant aux groupements hydroxyle contenus dans certains minéraux des granulats (départ à partir de 800 °C) ; ¾ la teneur en gaz carbonique CO2 provenant de la décomposition de la dolomite et/ou de calcite des granulats et/ou de la calcite provenant de la carbonatation du liant ; ¾ la perte au feu totale de l'échantillon de béton.

2. Courbe d'analyse thermique différentielle (ATD) Cette courbe (cf. Fig. 55) permet d'identifier les phases ayant provoqué des pertes ou des gains de masse par la température maximale des pics comme, par exemple : ¾ 110 - 130 °C : C-S-H et ettringite ; ¾ 175 - 190 °C : monocarboaluminate de calcium hydraté ; ¾ 230 - 240 °C : aluminate de calcium hydraté ; ¾ 250 - 270 °C : géhlénite hydratée ; ¾ 390 - 400 °C : brucite ; ¾ 460 - 510 °C : portlandite ; ¾ 575 - 579 °C : quartz (ici, il ne s'agit pas d'un gain ou d'une perte de masse, mais de la transformation quartz α→β) ; ¾ 650 - 750 °C : calcite de carbonatation ; ¾ 780 - 800 °C : partie magnésienne de la dolomite ; ¾ 900 - 930 °C : cristallisation de la wollastonite. La présence ou l'absence de l'un de ces minéraux donne alors une information sur les températures auxquelles les bétons ont été soumis.

73

Méthodes d’essai n° 62 ‹ Présentation des techniques de diagnostic de l’état d’un béton soumis à un incendie

 EXEMPLES D'UTILISATION DE LA MÉTHODE Les figures 56 et 57 présentent l'évolution de la microstructure du béton du tunnel du Mont-Blanc en fonction de la température et, plus précisément à 200, 400, 600, 800 et 1000 °C. En effet, une simulation en laboratoire des températures atteintes dans les bétons lors de l'incendie du 8 mars 1999 a été réalisée sur des disques de deux centimètres d'épaisseur issus de béton provenant de zones indemnes. Cette étude a permis de déterminer les « traceurs de température » et de suivre également l'évolution de la teneur en eau dans le béton. Pour cela, l'eau contenue dans la structure des bétons a été répartie en trois domaines : ¾ l'eau évaporée à des températures inférieures à 500 °C. Cette eau sera considérée comme l'eau faiblement liée des hydrates du ciment et, en particulier des silicates de calcium hydratés (C-S-H). Cette eau sera dénommée « eau hydrates BT », BT pour basse température ; ¾ l'eau évaporée dans le domaine de température allant de 500 à 750-800 °C. Elle sera considérée comme étant l'eau fortement liée des C-S-H. Cette eau sera dénommée « eau hydrates HT », HT pour haute température ; ¾ l'eau évaporée à partir de 850-900 °C qui correspond aux groupements hydroxyle contenus dans certains minéraux des granulats. Cette eau sera dénommée « eau hydroxilique des granulats ». Les différentes teneurs en eau liée (Fig. 56) sont exprimées par rapport à la masse de ciment anhydre, déterminée par analyses chimiques, afin de prendre en compte une éventuelle hétérogénéité du béton et de mieux suivre spécifiquement le phénomène de déshydratation de la pâte de ciment avec une élévation de température.

Figure 56

`

Évolution de la teneur en eau des hydrates du ciment en fonction de la température pour le béton du tunnel du Mont-Blanc. Les résultats sont exprimés par rapport à la masse de ciment anhydre.

% eau liée par rapport à la masse de ciment anhydre 30 Eau hydrates BT

Eau hydrates HT

25 20 15 10 5 0 0

200

400

600 800 1000 1200 Température imposée au béton (˚C)

Au-delà d'un échauffement de 600 °C, il ne reste plus d'eau liée aux hydrates du ciment. Entre 200 et 400 °C, il apparaît des changements dans la répartition de l'eau dite faiblement (eau hydrates BT) et fortement (eau hydrates HT) liée aux hydrates indiquant des modifications dans leurs microstructures. Les teneurs en eau hydroxyle des granulats ainsi que les teneurs en gaz carbonique sont exprimés par rapport à la masse totale de béton (Fig. 57).

74

PARTIE 3 - MÉTHODES D’ESSAI DE LABORATOIRE - MÉTHODE 62.9

_ Figure 57

% eau hydroxilique et % CO2 par rapport à la masse totale de béton 1,8 Eau hydroxilique granulats CO2 1,6

Évolution de la teneur en CO2 et en eau hydroxylique des granulats en fonction de la température pour le béton du tunnel du Mont-Blanc. Les résultats sont exprimés par rapport à la masse totale de béton.

1,4 1,2 1 0,8 0,6 0,4 0,2 0 0

200

400

600 800 1000 1200 Température imposée au béton (˚C)

Les résultats de l'analyse thermique montrent que le béton du tunnel du Mont-Blanc comporte très peu de calcite (CaCO3), de l'ordre de 1,6 %. Néanmoins, ce minéral, même à de très faibles teneurs, reste un très bon « traceur de température » car il n'est plus détecté à partir de 800 °C. Enfin, les minéraux des granulats perdent totalement leurs groupements hydroxyle à une température de 1000 °C. Il est important de rappeler que l'étude de l'évolution de la microstructure du béton avec la température a été réalisée à partir de différentes rondelles d'échantillon de 2 centimètres d'épaisseur. Il en résulte alors une faible hétérogénéité des minéraux contenus dans les granulats qui se traduit par des variations de teneurs en groupements hydroxiliques (de 0,2 à 0,5 % par rapport à la masse totale du béton). La détermination des températures atteintes dans les bétons du tunnel du Mont-Blanc a été ensuite réalisée sur des carottes provenant de zones soumises à l'incendie. L'étude a été réalisée à partir de deux carottes, l'une prélevée dans une zone de feu intense et l'autre provenant d'une zone de feu intermédiaire. Pour chaque carotte, neuf disques de béton d'épaisseur 2 centimètres ont été obtenus par sciage : 0-2 cm, 2-4 cm, 4-6 cm, 6-8 cm, 8-10 cm, 10-12 cm, 12-14 cm, 14-16 cm et 16-18 cm. Dans un premier temps, nous avons vérifié l'uniformité de la qualité des bétons à partir du dosage en ciment mesuré en fonction du niveau de profondeur (Fig. 58). Il apparaît alors une variation importante du dosage en ciment (de 110 à 400 kg/m3). Ce changement de qualité de béton est localisé entre 11 et 13 cm de profondeur. Ceci est susceptible d'induire des difficultés d'interprétation pour mesurer l'endommagement du béton consécutif à l'incendie. C'est pourquoi, nous avons déterminé l'évolution des teneurs en eau liée en fonction de la profondeur par rapport à la masse de ciment anhydre. Dosage en ciment (kg/m3) 450

_ Figure 58 Dosage en ciment des bétons provenant de deux zones du tunnel du Mont-Blanc.

400 350 300 250 200 150 100 Zone de feu intense

50

Zone de feu intermédiaire

0 0-2

2-4

4-6

6-8

8-10

10-12

12-14

14-16 16-18 Profondeur (cm)

75

Méthodes d’essai n° 62 ‹ Présentation des techniques de diagnostic de l’état d’un béton soumis à un incendie

Les informations issues de l'analyse thermique ont été ensuite confrontées aux résultats obtenus par microscopie électronique à balayage et par diffractométrie des rayons X, ce qui nous a permis d'établir le profil de température au sein des deux carottes de béton. La nature du béton du tunnel du Mont-Blanc ne nous a pas permis d'obtenir un nombre suffisant de « traceurs » structuraux dans le domaine des températures inférieures à 500 °C. C'est pourquoi, nous avons donné des plages de températures pour certains niveaux de profondeur. Les résultats de l'estimation des températures auxquelles ont été soumis les bétons sont rassemblés dans le tableau VI. TABLEAU VI Estimation des températures atteintes en fonction du niveau de profondeur Profondeur (cm)

0-2

2-4

4-6

6-8

8-10

10-12

12-14

14-16

16-18

Température dans la zone de feu intense (°C)

≈ 900

≈ 600

600/400

400/200

400/200

< 200

< 100

< 100

< 100

Température dans la zone de feu intermédiaire (°C)

≈ 600

≈ 400

≈ 400

400/200

400/200

≈ 200

< 100

< 100

< 100

Les deux zones d'incendie étudiées se différencient principalement par la température atteinte en surface, respectivement environ 900 °C pour la zone de feu intense et environ 600 °C pour la zone de feu intermédiaire. Cet écart de température est observé jusqu'à environ 6 centimètres de profondeur où la température a été estimée, pour les deux échantillons, proche de 400 °C. Cette étude montre également qu'au-delà de 12 centimètres de profondeur le matériau n'est pas altéré et n'a pas subi d'échauffement significatif.

 RÉPÉTABILITÉ DE LA MESURE DE LA PERTE DE MASSE PAR ANALYSE THERMIQUE Des essais de répétabilité ont été menés sur une série de dix prélèvements d'une poudre de calcite RP (pureté de 99 % minimum). La calcite ou le carbonate de calcium se décompose suivant la réaction : CaCO3 Æ CaO + CO2. La décomposition a lieu pour une température supérieure à 675 °C et se termine vers 920 °C. La teneur en CO2 est de 43,95 %. Les essais de répétabilité conduisent à un écart-type de 0,30 % pour cette teneur en CO2.

 RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES [1] NF T 01-021, Analyse thermique : Vocabulaire - Présentation des résultats. [2] PERSY J.-P., DELOYE F.-X., Investigations sur un ouvrage en béton incendié, Bulletin de liaison des laboratoires des Ponts et Chaussées, 145, pp. 108-114, 1986.

 CONTACT " Gérard Platret 01 40 43 51 47  [email protected] " Laboratoire Central des Ponts et Chaussées - Service physico-chimie des matériaux Fax : 01 40 43 65 14

76

PARTIE 3 - MÉTHODES D’ESSAI DE LABORATOIRE - MÉTHODE 62.10

] ATTEINTES DANS LES BÉTONS PAR ESTIMATION DES TEMPÉRATURES DIFFRACTOMÉTRIE DES RAYONS

MÉTHODE

62.10

X

 OBJET ET DOMAINE D'APPLICATION L'objectif de cet essai est d'obtenir des informations sur les températures auxquelles les bétons ont été soumis. Cet essai permet d'identifier les minéraux cristallisés présents dans le béton après une exposition à un incendie. Il peut s'agir soit de minéraux initialement contenus dans le béton, soit de produits résultant de modifications chimiques et minéralogiques consécutives à une élévation de température. Dans les deux cas, la présence ou l'absence de phases solides donne une indication sur la température atteinte dans le matériau. Cette méthode permet d'obtenir des données qualitatives et semi-quantitatives sur les minéraux présents. Une détermination quantitative peut être réalisée moyennant un étalonnage préalable sur une raie caractéristique du minéral étudié. Ce mode opératoire décrit le déroulement d'une analyse par diffractométrie des rayons X appliquée à un échantillon de béton. Un profil de diffusion de la chaleur dans les bétons peut aussi être obtenu en examinant des échantillons prélevés à différents niveaux de profondeur de la carotte issue de l'ouvrage.

 PRINCIPE Les rayons X sont des radiations électromagnétiques de très courtes longueurs d'onde (de 0,1 à 10 Å). Les cristaux constituent des réseaux naturels dont les intervalles caractéristiques (intervalles entre plans réticulaires) sont du même ordre de grandeur que la longueur d'onde des rayons X. En conséquence, les rayons X sont diffractés par les cristaux comme la lumière l'est par les réseaux et donnent des phénomènes d'interférences identiques. Les conditions de diffraction d'un rayonnement X par une famille de plans réticulaires sont définies par la loi de Bragg : n λ = 2 d sinθ ou n = nombre entier désignant l'ordre de réflexion ; λ = longueur d'onde du rayonnement X ; d = distance entre les plans réticulaires d'une même famille (raie exprimée en Å) ; θ = angle de diffraction.

77

Méthodes d’essai n° 62 ‹ Présentation des techniques de diagnostic de l’état d’un béton soumis à un incendie

Pour qu'il y ait diffraction, il faut que les ondes réfléchies par une famille de plans parallèles, d'intervalle d, soient en phase c'est-à-dire que la différence de chemin entre les rayons passant par A et par A' soit égale à un nombre entier de longueurs d'onde n λ (Fig. 59). Figure 59 ` Démonstration de la loi de Bragg.

S0 S A

A1

n

θ

θ d

m

A' (π')

(π0)

(π)

Chaque espèce minérale ayant un motif cristallin qui lui est propre, deux poudres d'espèces différentes donnent des spectres de diffraction différents sous le même faisceau de rayons X.

 DISPOSITIF EXPÉRIMENTAL Le matériel disponible au LCPC est le suivant : ¾ un générateur de rayons X. Le rayonnement est émis par une anticathode de cobalt bombardée par un faisceau d'électrons de haute énergie (environ 30 kV) ; ¾ une chambre de diffraction, comportant la fenêtre d'entrée des rayons X, le porte échantillon et le compteur proportionnel qui se déplace sur le cercle goniométrique, (cercle gradué en degrés, de 0 à 108°, cf. Fig. 60) ; ¾ une baie de mesure dans laquelle les impulsions du compteur sont amplifiées et traduites en un signal analogique ; ¾ un module informatique d'acquisition de signal analogique transmis et d'exploitation des diagrammes de diffractométrie des rayons X. il s'agit d'une station de travail SUN utilisant des logiciels réalisés sous GKS développés au Laboratoire Central des Ponts et Chaussées à partir des programmes de GOEHNER et GARBAUSKAS [1]. La figure 60 donne le principe de fonctionnement d'un diffractomètre à rayons X. Figure 60

Détecteur

`



Principe de fonctionnement d’un diffractomètre à rayons X.

Enregistreur

ω

θ Foyer de tube à rayon X

θ θ

78

Échantillon

PARTIE 3 - MÉTHODES D’ESSAI DE LABORATOIRE - MÉTHODE 62.10

La figure 61 présente le diffractomètre à rayons X utilisé au LCPC.

_ Figure 61 Vue d’ensemble du diffractomètre à rayons X.

 MÉTHODOLOGIE Préparation de l'échantillon L'échantillon de béton à analyser est fragmenté au concasseur de façon à obtenir une granulométrie inférieure à 2,5 mm. Cette opération doit se faire en récupérant soigneusement toutes les fines produites. Prélever au moins 100 g d'échantillon au moyen d'un échantillonneur ou par quartage. Broyer l'échantillon pendant quelques secondes puis tamiser à 315 ou 80 μm. Répéter l'opération « broyage plus tamisage » jusqu'à passage complet à 315 ou 80 μm. Transférer l'échantillon dans un flacon propre et sec à fermeture hermétique, prendre soin de ne pas perdre de fines et agiter vigoureusement pour l'homogénéiser. Enfin, une prise d'essai de l'ordre de 80 à 100 mg est placée dans la cavité du porte échantillon (0,6 ml) et surfacée afin d'obtenir une surface bien plane pour éviter les phénomènes d'exaltation de certaines raies de diffraction des rayons X.

Paramètres de l'appareil Afin d'améliorer la qualité des enregistrements tant au niveau des tracés, de la symétrie et de la dimension des pics que de la stabilisation du bruit de fond, il est nécessaire de travailler avec : ¾ une puissance appliquée au tube de rayons X ne dépassant pas 1500 watts ; ¾ un pas de comptage suffisamment lent ; ¾ des fentes à ouverture fine ; ¾ un couple vitesse de défilement - temps de comptage le plus approprié possible.

Description de l'essai L'analyse par diffractométrie des rayons X est conduite selon le déroulement suivant : ¾ mise en fonctionnement du générateur de rayons X ;

79

Méthodes d’essai n° 62 ‹ Présentation des techniques de diagnostic de l’état d’un béton soumis à un incendie

¾ mise en place du porte échantillon ; ¾ choix du programme d'analyse (pas, temps de comptage, angle de départ et d'arrivée, tailles des fentes) ; ¾ ouverture de la fenêtre des rayons X ; ¾ début des comptages ; ¾ à la fin de l'acquisition, l'exploitation des données enregistrées peut commencer.

Exploitation des résultats

2.625

C

4.898

INTENSITE NORMALISEE 100.

F

G

C

J

G

H

J

Un exemple de diagramme de diffraction des rayons X est présenté dans la figure 62. Le dépouillement d'un diagramme de diffraction consiste à affecter à chaque raie observée repérée par son angle θ, la distance inter-réticulaire correspondante en appliquant la relation de Bragg, puis à comparer les résultats avec ceux d'un fichier de données de référence [2] indiquant pour chaque minéral la distance inter-réticulaire et l'intensité normalisée des raies expérimentales. L'analyse successive des différents pics du diagramme permet de détecter toutes les phases cristallisées présentes, de donner la nature minéralogique et, accessoirement une appréciation sur le degré de cristallinité (par la forme des raies de diffraction) des composants du matériau soumis à l'essai.

90. 80.

C

E

F

70.

H G C

J H G

1.686

D

E

G B D E 1.795 1.821

1.727

J B E G H G H I J D F G H 2.056 2.022 1.982

J G G F F B 2.190

2.283

A

D

J G F 2.557

H B C

1.926

F J E G H 2.779 B D F E F 2.747 2.671

J H F 3.465

H J A E

F E

4.011 D 3.865

3.650

H G F 4.691

4.398

5.587

F

F

E H

9.654 8.870 J

10.

7.585 7.283

20.

H

J

J

30.

J

J

H

F

J

J

G

40.

3.106 3.030 A 2.967 F

J

F

C

G

50.

G

F

E

H

J

J

G

A

J

H

60.

0. 4.0

11.0

18.0

25.0

32.0

39.0

46.0 2-THETA

53.0 Co

60.0 K

67.0

ALPHA1-

3

c Figure 62 Diagramme de diffraction des rayons X d’une pâte de ciment durcie. (Intensité en coups normalisés en fonction de 2 θ du Co kα 1-3, les raies sont exprimées en Å et correspondent à la distance inter-réticulaire).

80

PARTIE 3 - MÉTHODES D’ESSAI DE LABORATOIRE - MÉTHODE 62.10

L'exploitation de ces diagrammes permet d'identifier et d'évaluer de manière semiquantitative les phases minérales contenues dans le béton. La présence ou l'absence de l'un de ces minéraux donne alors une information sur les températures auxquelles les bétons ont été soumis. Cette technique permet de donner de manière semi-quantitative une teneur des minéraux constitutifs des granulats ainsi que de certains composés hydratés ou anhydres de la pâte de ciment. Par ailleurs, la présence de diverses argiles dans les matériaux apporte beaucoup de renseignements sur les températures atteintes par ces matériaux [3]. Des informations peuvent être obtenues sur la transformation de ces minéraux consécutive à l'élévation de température lors de l'incendie. Des produits néoformés résultant des fortes températures subies par le béton peuvent ainsi être identifiés. Toutefois, cette technique ne permet pas l'identification de produits amorphes ou mal cristallisés comme certains gels d'hydratation (silicates de calcium hydratés C-S-H) et sa limite de détection est voisine de 0,5 % par rapport à la masse totale du matériau. La comparaison avec un échantillon, provenant d'une zone non soumise à un incendie, est indispensable. Elle donne des informations sur les minéraux présents dans le béton n'ayant pas subi d'échauffement. En effet, chaque béton a sa propre minéralogie qui dépend de la nature du ciment et des granulats utilisés dans sa formulation. Cette comparaison permet de déterminer les phases minérales disparues ou apparues lors de transformations minéralogiques consécutives à l'incendie.

 EXEMPLES D'UTILISATION DE LA MÉTHODE L'évolution avec la température de la minéralogie du béton du tunnel du Mont-Blanc a été réalisée pour six températures : 25, 200, 400, 600, 800 et 1000 °C. Pour cela, une simulation en laboratoire des températures atteintes dans les bétons lors de l'incendie du 8 mars 1999 a été effectuée sur des disques de deux centimètres d'épaisseur issus de béton provenant de zones indemnes. Cette simulation a permis de déterminer les « traceurs » de température qui ont été ensuite utilisés pour estimer les températures atteintes dans les zones du tunnel soumises à l'incendie. Les différentes phases cristallines qui disparaissent ou apparaissent en fonction de la température sont regroupées dans le tableau VII. Pour chaque minéral, la principale raie de diffraction est donnée. TABLEAU VII Évolution de la minéralogie des hydrates du ciment et des granulats du béton du tunnel du Mont Blanc Minéral 25 °C

200 °C

400 °C

600 °C

800 °C

1000 °C

Ettringite

9,7 Å

n.e.

n.e.

n.e.

n.e.

n.e.

Carboaluminate Ca

7,57 Å

n.e.

n.e.

n.e.

n.e.

n.e.

Géhlénite

n.e.

n.e.

n.e.

n.e.

n.e.

2,84 Å

Portlandite

4,9 Å

4,9 Å

4,9 Å

n.e.

n.e.

n.e.

Calcite

Température

3,03 Å

3,03 Å

3,03 Å

3,03 Å

n.e.

n.e.

Muscovite

10 Å

10 Å

9,9 Å

9,9 Å

9,85 Å

n.e.

Leucite

n.e.

n.e.

n.e.

n.e.

n.e.

3,26 Å

Trémolite

8,43 Å

8,43 Å

8,43 Å

8,43 Å

8,43 Å

n.e.

Chlorite

14,05 Å

14,05 Å

14,05 Å

13,5 Å

n.e.

n.e.

n.e. = non existence.

81

Méthodes d’essai n° 62 ‹ Présentation des techniques de diagnostic de l’état d’un béton soumis à un incendie

Les principaux phénomènes marquants d'une élévation de la température sur la minéralogie du béton du tunnel du Mont-Blanc sont explicités ci-dessous. Pour un faible échauffement (< 200 °C), la diffractométrie des rayons X détecte des changements dans la minéralogie de la pâte de ciment et, plus précisément, la disparition des raies caractéristiques de l'ettringite et du monocarboaluminate de calcium hydraté. L'ettringite commence à perdre son eau de constitution à partir de 80 °C et devient amorphe pour des températures supérieures à 100 °C. Ceci la rend alors indétectable par cette technique. De même, le monocarboaluminate de calcium hydraté se déshydrate à partir de 150 °C. Ceci explique ainsi la disparition de leur raie dans le tableau VI. Entre 200 et 400 °C, la diffraction des rayons X ne met pas en évidence de changement caractéristique. Dans le domaine des températures comprises entre 400 et 600 °C, la principale raie située à 4,9 Å de la portlandite disparaît lors de la simulation à 600 °C. Ceci résulte de la déshydratation de la portlandite qui se produit entre 450 et 540 °C. À 600 °C, l'examen aux rayons X révèle la structure encore très bien cristallisée de la chlorite (silico-aluminate hydraté ferro-magnésien), avec néanmoins une modification notable du spectre par rapport à celui du béton initial. En effet, la raie principale de la chlorite située à 14 Å est déplacée vers 13,5 Å alors que la raie secondaire vers 7 Å disparaît. La chlorite est un minéral qui subit parfois une diminution de l'intensité et un déplacement des raies de diffraction X lors d'un chauffage sans modification de sa structure cristalline. Ce phénomène se produit pour des températures voisines de 500 °C. L'échauffement du béton à 600 °C conduit également à de légères modifications minéralogiques de la muscovite. La raie principale se déplace de 10 Å à 9,9 Å. Ce minéral se rencontre fréquemment dans les roches granitiques. À 800 °C, la chlorite est décomposée et la raie de diffraction vers 13,5 Å disparaît du diagramme. À 1000 °C, le diagramme de diffraction des rayons X subit des changements encore notables. En effet, la raie principale de la muscovite située vers 9,8 Å disparaît. La muscovite perd son eau de constitution (libération des hydroxyles appartenant au réseau) vers 800-900 °C ce qui entraîne alors la destruction de la structure cristalline. À 1000 °C, une nouvelle phase apparaît caractérisée par la raie située à 3,26 Å que l'on peut attribuer à la leucite. Par conséquent, on peut observer qu'à haute température, il peut y avoir non seulement disparition de minéraux, mais aussi formation de nouvelle phases résultant d'une cristallisation. Enfin, une cuisson à 1000 °C apporte aussi des modifications importantes au niveau de la pâte de ciment. En effet, la géhlénite est identifiée. À partir de 600 °C, les hydrates du ciment contenant du laitier perdent totalement leur eau avec destruction du réseau donnant un mélange d'alumine, de silice et de chaux amorphe qui se combinent à 1000 °C et recristallisent lors du refroidissement en géhlénite. Elle devient même la deuxième phase principale de la partie liante du béton. Dans le cas d'un béton à base de ciment contenant essentiellement du clinker, vers 1000 °C, apparaît la wollastonite qui cristallise à partir de la chaux et de la silice issues de la décomposition des C-S-H.

 PRÉCISION DE LA MÉTHODE DE MESURE L'identification par diffractométrie des rayons X des minéraux présents dans un matériau repose sur la position des angles de diffraction exprimée en degré pour laquelle l'erreur relative est de 0,25 degré.

82

PARTIE 3 - MÉTHODES D’ESSAI DE LABORATOIRE - MÉTHODE 62.10

 RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES [1] RAYMOND P., GOHNER and MARY F. GARBAUSKAS, PDIDENT-A, Set of programs for powder diffraction phase identification, X-Ray Spectrometry, vol. 13, n° 4, pp. 172-179, 1984. [2] Powder Diffraction File (PDF-1), édité par ICDD (International Centre for Diffraction Data), USA. [3] HOLTZAPFFEL T., Les minéraux argileux, Société Géologique du Nord, Publication n° 12, 136 pages, 1985.

 CONTACT " Gérard Platret 01 40 43 51 47  [email protected] " Laboratoire Central des Ponts et Chaussées - Service physico-chimie des matériaux Fax : 01 40 43 65 14

83

Partie 4 Retour d’expériences sur d’autres méthodes

85

PARTIE 4 - RETOUR D’EXPÉRIENCES SUR D’AUTRES MÉTHODES - MÉTHODE 62.11

] DE COMPRESSION

LA RÉFRACTION DES ONDES

MÉTHODE

62.11

 OBJECTIF Dans sa forme la plus simple, cette méthode permet de mesurer les épaisseurs de couches planes ainsi que la vitesse de propagation des ondes de compression dans chacune d'entres elles. Un pré-requis incontournable est la croissance des vitesses en fonction de la profondeur. Plus généralement, un protocole expérimental classique en géophysique permet de traiter le cas de couches non planes et donc de caractériser les variations d'épaisseur des couches [1].

 PRINCIPE La figure 63 explique le principe de la réfraction des ondes de compression dans le cas d'interfaces planes pour un milieu avec trois couches (caractérisées par des vitesses des ondes de compressions V0, V1 et V2 croissantes avec la profondeur et d'épaisseur e0, e1 et e2) reposant sur un milieu infini de vitesse V3 (le principe reste le même quel que soit le nombre de couches) [1].

Source

Temps d’arrivée

Capteur V0

V1 V2

e0

e1

1/V3 1/V2

T3 T2

e2

T1 T0

V3

1/V1 1/V0 xc

Distance source capteurs

Trajets des rayons directs et réfractés des ondes de compression dans le cas de marqueurs horizontaux

c Figure 63 Principe d’utilisation de la réfraction des ondes de compression.

87

Méthodes d’essai n° 62 ‹ Présentation des techniques de diagnostic de l’état d’un béton soumis à un incendie

Pour déterminer les vitesses des ondes de compression en fonction de la profondeur, l'information retenue sur les signaux est un temps de trajet, celui de la première arrivée, entre un point source et plusieurs points de réception alignés. Proche de la source la première arrivée est celle de l'onde directe. Elle permet le calcul de la vitesse de la première couche V0. Ensuite les pentes des segments de droites correspondant à des trajets réfractés permettent de calculer V1, V2 et V3. L'intersection de ces droites avec l'axe des ordonnées, les intercepts T1, T2 et T3, donnent l'épaisseur des couches. Par exemple, pour la première couche : T1 =

V 2e o cos(arcsin 0 ) . V0 V1

Le dispositif expérimental comporte donc au moins un point source et plusieurs points de réception alignés entre eux et avec la source. Le nombre de points de mesure et leur éloignement de la source dépendent de la profondeur d'investigation recherchée. Les points de brisure (abscisse des ruptures de pente de la courbe Temps d'arrivée en fonction de la Distance source capteurs) donnent une idée de la taille du dispositif. Par exemple l'abscisse du premier point de brisure est égale à : x c = 2e 0

1 + V0 /V1 . 1 − V0 /V1

Le dispositif doit donc être plus long et sur chaque portion de droite plusieurs points de réception sont nécessaires pour la détermination fiable des vitesses. Le principe peut être étendu à un milieu bi-dimensionnel : il convient alors de disposer d'au moins cinq points source : un à chaque extrémité de la ligne de capteur, un au milieu des capteurs et un point source éloigné de chaque coté.

 EXEMPLE [2] Les signaux enregistrés pour l'auscultation du tunnel du Mont-Blanc faisaient l'objet d'un travail de recherche sans rapport avec la méthodologie de mesure de géophysique appliquée utilisée classiquement en sismique réfraction. Ceci explique le grand nombre de données recueillies, qui n'est pas nécessaire pour une utilisation optimale de ce principe. L'objectif de ce paragraphe est donc d'illustrer le principe de la méthode décrit plus haut et non de présenter une méthodologie optimale d'application. Dans le cadre de la campagne de mesure dans le tunnel du Mont-Blanc, trois zones tests ont été auscultées : X Une zone dite Non Endommagée (à côté du carottage G1 - PK7268.5) dénommée ciaprès zone NE. Y Une zone dite Moyennement Endommagée (à côté du carottage E1 - PK6680) dénommée ci-après zone ME. Z Une zone dite Très Endommagée (à côté du carottage F1 - PK6898.5) dénommée ciaprès zone TE.

Matériel utilisé ¾ La source est une bille maintenue éloignée de la surface par un électroaimant et couplée à un accéléromètre pré-amplifié pour le déclenchement de l'acquisition. ¾ Le système d'acquisition de transitoire possède 32 voies (ACQTRANS). La fréquence d'échantillonnage utilisée est de 500 kHz par voie. 8192 points sont enregistrés.

88

PARTIE 4 - RETOUR D’EXPÉRIENCES SUR D’AUTRES MÉTHODES - MÉTHODE 62.11

¾ Les capteurs sont 15 accéléromètres pré-amplifiés déplacés pour un même point source plusieurs fois afin d'obtenir en cinq séries une ligne de mesure de 1,5 m de longueur. Ce matériel peut être remplacé par le matériel utilisé en auscultation sonique.

Résultats Les temps de propagation entre source et capteur sont pointés sur les signaux non sommés bruts (Fig. 64).

c Figure 64 Temps d’arrivée en fonction de la distance source capteurs. (À gauche : zone NE - Au milieu : zone ME - À droite : zone TE).

L'interprétation des courbes « Temps d'arrivée en fonction de la Distance source capteurs » est restreinte à un milieu bicouche, par exemple avec comme inconnues : V0, e0, V1 (cf. Fig. 63). En effet, la géométrie du dispositif ne permettait pas de remonter avec assurance à un modèle plus détaillé du milieu ausculté [1]. Les résultats sont résumés dans le tableau VIII.

TABLEAU VIII Résultat avec un milieu bi-couche Zone

V0

e0

V1

Non endommagée

2260 m/s

7 cm

3970 m/s

Moyennement endommagée

870 m/s

13 cm

3870 m/s

Très endommagée

1130 m/s

9 cm

3560 m/s

89

Méthodes d’essai n° 62 ‹ Présentation des techniques de diagnostic de l’état d’un béton soumis à un incendie

Rappelons qu'un béton sain a, en général, une vitesse des ondes de compression supérieure à 3500 m/s. La première information issue de ce tableau est que, quelle que soit la zone considérée, un béton de mauvaise qualité est présent en surface sur des épaisseurs centimétriques. Ensuite, l'analyse des valeurs de V0 obtenues révèle que le béton de surface a des caractéristiques mécaniques, ou niveaux d'endommagement, très différents suivant la zone considérée. La zone ME apparaît comme plus endommagée que la zone TE, avec une vitesse très faible (870 m/s). La zone TE est elle-même nettement plus endommagée que la zone NE. De surcroît, l'épaisseur de l'endommagement e0, calculée avec une hypothèse de milieu bicouche, est plus importante pour la zone ME que pour les zones TE et NE. Finalement, les valeurs de V1, notamment celles obtenues pour la zone TE, et l'allure des courbes « Temps d'arrivée en fonction de la Distance source capteurs » (sans doute plus de deux pentes 1/Vi visibles) suggèrent que le béton a été endommagé plus profondément par l'incendie que sur l'épaisseur e0, et/ou avait des caractéristiques mécaniques initiales faibles. Dans le cas du tunnel du Mont-Blanc cette méthode permet donc de déterminer l'épaisseur de la première couche endommagée et de caractériser cet endommagement par l'intermédiaire de la vitesse des ondes de compression dans cette couche.

 RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES [1] LAVERGNE M., Méthodes sismiques, Edition Technip, 1986. [2] ABRAHAM O., DÉROBERT X., Non-destructive testing of fired tunnel walls : the Mont-Blanc

tunnel case study, NDT&E Int., pp. 411-418, 36, 2003.

 CONTACT

90

"

Odile Abraham

02 40 84 59 18

 [email protected]

"

Laboratoire Central des Ponts et Chaussées Division Reconnaissance et mécanique des sols Fax : 02 40 84 59 99

PARTIE 4 - RETOUR D’EXPÉRIENCES SUR D’AUTRES MÉTHODES - MÉTHODE 62.12

]

LA MÉTHODE RADAR

MÉTHODE

62.12

 OBJECTIF Cette méthode de reconnaissance non destructive à grand rendement permet d'obtenir des informations sur les géométries internes des structures de génie civil [1]. Suivant le choix de la fréquence centrale utilisée, il est possible d'ausculter les structures ou les sols jusqu'à des profondeurs variant de quelques décimètres à quelques mètres. Son emploi reste cependant limité à des matériaux électriquement résistants, laissant les ondes radar se propager. Lorsque l'on cherche avec précision des épaisseurs, il est alors nécessaire de s'étalonner localement dans le but d'obtenir la vitesse de propagation des ondes radar dans le béton. Pour cela, on peut soit utiliser un sondage destructif (réalisation d'une carotte), soit s'appuyer sur des informations précises (épaisseur de béton connue, hétérogénéité connue à une profondeur connue). Cette méthode est bien adaptée à des applications comme la localisation des armatures dans du béton armé ou précontraint ou la mesure des épaisseurs des couches de chaussées (elle est actuellement employée par quatre Laboratoires Régionaux des Ponts et Chaussées). Concernant l'application des bétons incendiés, elle permet d'obtenir les épaisseurs globales de béton coffré, de localiser le renforcement s'il existe, et d'avoir une idée de l'état de fracturation (fractures importantes supérieures au millimètre). Il est à noter que cette méthode manque de recul pour cette application.

 PRINCIPE La technique radar repose sur l'utilisation d'impulsions électromagnétiques émises par une antenne d'émission. Celles-ci se propagent en s'atténuant dans les matériaux et à chaque interface de deux matériaux électromagnétiquement différents, une partie de l'énergie de l'impulsion est réfléchie vers la surface. Les échos successifs sont alors enregistrés dans un signal temporel par l'antenne de réception. En général, les antennes émettrice et réceptrice se situent dans un même boîtier, ce qui correspond à une configuration classique d'acquisition. La juxtaposition des signaux temporels enregistrés lors du déplacement de l'antenne radar (émettrice-réceptrice) permet d'obtenir une coupe-temps, souvent présentée avec une échelle de couleurs (ou de niveaux de gris) corrélée aux amplitudes des signaux, et donnant des informations géométriques sur la structure auscultée (Fig. 65).

91

Méthodes d’essai n° 62 ‹ Présentation des techniques de diagnostic de l’état d’un béton soumis à un incendie

Figure 65

`

Construction d’un profil radar sur un bloc de béton.

 EXEMPLE [2] Après l'incendie du tunnel du Mont-Blanc, la section Reconnaissance et Géophysique du LCPC a été amenée à réaliser des essais radar sur quelques zones tests : une zone saine, une zone moyennement endommagée et une zone très endommagée. La figure 66 montre un exemple de profil, réalisé à 1500 GHz, sur la zone moyennement endommagée. Figure 66 ` Profil radar traité (1,5 GHz), réalisé sur 10 mètres dans la zone très endommagée.

On note que le béton présente un niveau de fracturation important avec des interfaces correspondant à de forts contrastes électromagnétiques, suggérant deux à trois natures de matériaux très différents. Le manque d'expérience n'autorise pas des interprétations plus avancées quant à l'origine de ce type d'échos (qui n'existent pas dans un béton sain, cf. Fig. 65). Les conclusions partielles que l'on peut tirer de cet exemple portent à la fois sur l'existence de plusieurs couches de matériaux électromagnétiquement différents dans le béton (constat que l'on retrouve également sur les mesures de réfraction des ondes mécaniques - cf. exemple sur la fiche correspondante), et sur le fait que cette « structure » reste homogène sur les dix mètres auscultés et donc que les mesures de réfraction sont représentatives de tout ce linéaire. L'avantage de cette méthode est de réaliser de grands linéaires, en amont de sondages destructifs ou de mesures locales non destructives, afin de les positionner au mieux pour qu'ils soient représentatifs de zones considérées comme homogènes. On valorise ainsi à la fois les sondages destructifs et l'interprétation radar qui peut être plus élaborée.

92

PARTIE 4 - RETOUR D’EXPÉRIENCES SUR D’AUTRES MÉTHODES - MÉTHODE 62.12

 RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES [1] DÉROBERT X., COFFEC O., Investigation radar de structure - Performances envisageables pour des applications sur ouvrages d'art, Bulletin des laboratoires des Ponts et Chaussées, vol. 230, pp. 57-66, 2001. [2] ABRAHAM O., DÉROBERT X., Non-destructive testing on fired tunnel walls. A case history: the MontBlanc tunnel, NDT&E, vol. 36, pp. 411-418, 2003.

 CONTACTS "

Xavier Dérobert 02 40 84 59 11 Laboratoire Central des Ponts et Chaussées

 [email protected]

"

Reynald Fahaut LRPC de Saint-Brieuc

02 96 78 93 00

 [email protected]

"

Arnaud Rougé LRPC d’Autun

03 85 86 67 67

 [email protected]

"

Alain Robert LRPC de Bordeaux

05 56 70 66 33

 [email protected]

93

PARTIE 4 - RETOUR D’EXPÉRIENCES SUR D’AUTRES MÉTHODES - MÉTHODE 62.13

] À UN FAÏENÇAGE DE PAREMENT

TRAITEMENT D’IMAGE APPLIQUÉ

MÉTHODE

62.13

DE BÉTON APRÈS UN INCENDIE

 OBJET ET DOMAINE D’APPLICATION Cette méthode est non destructive. Elle consiste à prendre des photographies du parement incendié et à déterminer par un traitement adapté certains paramètres des images. Ceci permet de cartographier en zones homogènes une large surface de béton après un incendie. L'incendie peut générer un faïençage de surface ou en accroître un pré-existant. La méthode de traitement des images du parement s'applique quand un faïençage est bien visible, les lèvres des fissures étant soulignées par exemple par des dépôts de suie.

 PRINCIPE La méthode repose sur l'hypothèse que la géométrie du faïençage reflète la dégradation du béton et dépend de l'intensité de l'incendie. L'appareil photo est positionné par rayon laser au centre du cercle correspondant à l'arc de la voûte, les images sont ainsi toutes à la même échelle. Un logiciel de traitement d'image, utilisable sur PC et disponible au CETU, a été développé pour analyser les clichés réalisés après incendie dans des zones faïencées. Une procédure de traitement a été adaptée à ce type d'images. Le logiciel permet de traiter en série toutes les images stockées dans un même répertoire. Les paramètres calculés (aire, périmètre, etc.) sont stockés dans un fichier exploitable sur tableur [1 et 2]. Les figures 67 et 68 montrent toutes les étapes de la procédure de traitement d'images. La suie des fumées de l'incendie, poussée par un fort courant d'air, s'est déposée suivant une direction privilégiée, soulignant les lèvres des fissures.

_ Figure 67 Image initiale représentant une surface d’environ 1 m2.

95

Méthodes d’essai n° 62 ‹ Présentation des techniques de diagnostic de l’état d’un béton soumis à un incendie

1. Passage en niveau de gris avec rehaussement des contours à l’aide du modèle LIP (Logarithmic Image Processing).

4. Élimination de pixels isolés puis squelettisation et ébarbulage.

2. Filtre médian puis filtre moyenneur (Sobel).

5. Filtre de fermeture 31*31.

3. Seuillage par maximation d’entropie puis filtre de remplissage de trous.

6. Deuxième squelettisation puis second ébarbulage et reconnexion des points les plus proches.

c Figure 68 Séquence d’images détaillant les étapes du traitement.

96

PARTIE 4 - RETOUR D’EXPÉRIENCES SUR D’AUTRES MÉTHODES - MÉTHODE 62.13

 EXEMPLE Après l'incendie du tunnel du MontBlanc, trente images présentant un faïençage quantifiable ont été traitées. L'aire moyenne des cellules et la variance de ce paramètre, permettant d'en exprimer la dispersion, ont été retenues comme paramètres géométriques de chaque photographie.

7. Carte des distances construite sur les lignes précédentes.

Les valeurs centrées réduites calculées à l'aide de la moyenne et de l'écarttype ont été utilisées afin d'enlever toute dimension aux valeurs et d'en faciliter les comparaisons. Afin de valider l'hypothèse de la méthode (paramètres géométriques représentatifs de la dégradation du béton incendié), des corrélations ont été effectuées avec des mesures de dureté de surface, évaluées par sclérométrie dans la zone centrale de chacune des images (Fig. 69).

8. Extraction des cellules par l’opérateur appelé ligne de partage des eaux.

9. Élimination des cellules incomplètes ; on ne garde que les cellules complètes qui ne touchent pas les bords (surlignées de rouge) afin de pouvoir calculer correctement aires, périmètres et coefficients de forme des cellules.

Dans cet exemple, la corrélation entre les aires moyennes et les résistances sclérométriques montre que l'aire moyenne des cellules de faïençage est d'autant plus faible que la résistance superficielle du béton après l'incendie est faible. La résistance diminuant avec la température, cela conforte l'idée que l'aire des cellules de faïençage pourrait être un indicateur pertinent pour évaluer les dommages engendrés par un incendie (Fig. 70). La corrélation de la variance de l'aire avec les mêmes valeurs sclérométriques apporte d'autres renseignements : on remarque que plus la dureté superficielle du béton incendié est faible, plus la variance de l'aire des cellules (dispersion) est élevée. Le faïençage semble être d'autant moins homogène que le béton est fortement endommagé (peu résistant) après l'incendie.

97

Méthodes d’essai n° 62 ‹ Présentation des techniques de diagnostic de l’état d’un béton soumis à un incendie

3

2,5 2,5 2 1,5 1 0,5 0 -2,5

-2

-1,5

-1

-0,5

-0,5

0

0,5

1

1,5

2

-1 -1,5 -2

2,5

Variance de l'aire moyenne des cellules (variable centrée réduite)

Aire moyenne des cellules (variable centrée réduite)

3

2 1,5 1 0,5 0 -2,5

-2

-1,5

-1

-0,5

-0,5

0

0,5

1

1,5

-1 -1,5

-2,5

Scléromètre (variable centrée réduite)

Scléromètre (variable centrée réduite)

c Figure 69

c Figure 70

Corrélation aire moyenne des cellules mesures sclérométriques.

Corrélation aire variance des aires dans une image mesures sclérométriques.

Ces observations nécessitent une confirmation sur d'autres cas de bétons incendiés si l'on veut espérer pouvoir généraliser les résultats, les caractéristiques initiales du béton (résistance, porosité, etc.) risquant de modifier totalement la géométrie du faïençage. L'intérêt de cette approche réside dans son aspect non destructif et sa possibilité de mise en œuvre simple et rapide. On peut pour l'instant envisager une recherche de corrélation « faïençage-résistance » dans une zone limitée et, en cas de succès, une application de la méthode de traitement d'images sur une zone plus étendue.

 RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES [1] MASTIER M., Traitement d'image appliqué au faïençage du béton, mémoire de DEA de

l'Université Jean Monet, 2001. [2] GIROUD C., Traitement d'images numériques appliqué aux tunnels, Mémoire IUP Génie

Mathématique et Informatique, Grenoble, 2004.

 CONTACTS " " "

98

René-Michel Faure Catherine Larive

04 72 14 34 81 04 72 14 34 38

 [email protected]  [email protected]

Centre d’Études des Tunnels (CETU), 25 avenue François Mitterrand, case n° 1 69674 Bron cedex Fax : 04 72 74 59 30

2

PARTIE 4 - RETOUR D’EXPÉRIENCES SUR D’AUTRES MÉTHODES - MÉTHODE 62.14

]

LA COLORIMÉTRIE DES BÉTONS

MÉTHODE

62.14

 OBJET ET DOMAINE D’APPLICATION On cherche à évaluer la température atteinte par un béton lors d'un incendie en utilisant comme indicateur son changement de couleur avec la température. Cette méthode nécessite un étalonnage sur le même béton, chauffé en laboratoire. Le domaine d'application est limité aux bétons pour lesquels une élévation de température provoque un changement de couleur. Cette technique est donc particulièrement tributaire de la nature des granulats, certains bétons pouvant ne pas changer de couleur. L'utilisation des mesures colorimétriques directement sur les parements incendiés est déconseillée, les couleurs étant trop perturbées par les suies ou trop influencées par le nettoyage nécessaire avant la mesure.

 PRINCIPE La couleur dépend des interférences des différentes longueurs d'onde de la lumière incidente quand celle-ci se reflète sur une surface aux motifs réguliers, comme celle d'un cristal. La variation des formes de cristallisation d'un béton se traduit donc par une couleur différente. Comme cette cristallisation n'est pas réversible, le béton conserve la couleur qui correspond à la plus forte température atteinte.

Diagramme L, a, b Les couleurs sont en correspondance avec le cercle des teintes. Une augmentation de a entraîne une teinte plus rouge, sa diminution une teinte plus verte. Une augmentation de b entraîne une teinte plus jaune, sa diminution une teinte plus bleu. Une augmentation de L entraîne une teinte plus claire, sa diminution une teinte plus sombre.

Figure 71

`

Diagramme L, a, b de colorimétrie.

99

Méthodes d’essai n° 62 ‹ Présentation des techniques de diagnostic de l’état d’un béton soumis à un incendie

Les coordonnées chromatiques fournies par un colorimètre sont au nombre de trois (Systèmes L-a-b, ou X, y, z ou R V B par exemple). Leur utilisation pratique peut nécessiter la définition d'une pseudo-norme pour n'avoir qu'une valeur représentant cette chromaticité, par exemple (L2 + a2 + b2)1/2. L'usage de la colorimétrie devrait permettre de connaître la température maximale d'un béton lors d'un incendie en appliquant les trois étapes suivantes : ¾ Calibrage en laboratoire à l'aide d'échantillons de béton (de taille décimétrique), pris dans une zone hors incendie, chauffés uniformément dans un four pendant une durée suffisante à température connue et dont on mesure la couleur à l'aide d'un colorimètre une fois l'échantillon revenu à température ambiante. ¾ Mesure de la couleur du béton avec le même colorimètre sur des tranches de béton découpées dans une carotte prélevée dans la zone incendiée. ¾ Utilisation de la courbe de calibrage obtenue lors de la première étape pour obtenir le profil de température dans la carotte. Une première application de ce principe sur le béton du tunnel du Mont-Blanc a révélé certaines difficultés, conduisant à prendre les précautions suivantes : ¾ Il est recommandé de ne pas chauffer les échantillons à la flamme, de façon à mieux maîtriser la température et son uniformité. De plus, selon le mode de chauffe, la réponse colorimétrique est différente. ¾ Le colorimètre mesure une surface circulaire de 5 cm de diamètre. Il faut donc faire attention à l'homogénéité de cette zone en évitant, par exemple, qu'un gros granulat ne la remplisse. Une moyenne de cinq mesures permet de minimiser les hétérogénéités.

 EXEMPLE Cette méthode a été utilisée après l'incendie du tunnel du Mont-Blanc [1 et 2]. Le colorimètre employé est le CR210 de Minolta, qui peut fournir les valeurs mesurées sous plusieurs formes. Les coordonnées L, a, b ont été retenues (Fig. 72). Figure 72

`

Exemple de découpage d’une carotte de béton incendié. La mesure colorimétrique est faite sur chaque face de chaque tranche.

Sur cet exemple, l'étalonnage n'a pu être réalisé dans des conditions satisfaisantes (Fig. 73). On note toutefois l'évolution des paramètres a et b en fonction de la profondeur. Le paramètre b semble particulièrement sensible. Les cinq centimètres de décroissance rapide correspondent à une profondeur de dégradation rencontrée dans de nombreuses zones du tunnel. D'autres essais sont nécessaires afin de vérifier la pertinence des mesures colorimétriques pour évaluer la profondeur des zones dégradées par incendie.

100

PARTIE 4 - RETOUR D’EXPÉRIENCES SUR D’AUTRES MÉTHODES - MÉTHODE 62.14

_ Figure 73 4

Mesures de deux coordonnées chromatiques le long de la carotte.

b

3

Abscisse : profondeur par rapport à la surface de la voûte (en cm).

2 1

a

0 -1

0

2

4

6

8

10

12

14 x

Ordonnée : les paramètres a et b des mesures de chromaticité (le paramètre L s'est avéré peu discrimant).

-2

 RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES [1] FAURE R.-M., HÉMOND G., Reconnaissance de l'état du béton du tunnel du Mont-Blanc, après l'incendie de mars 1999, Proc World Tunnel Congress, Milan 2001, Patron Editore, Bologna, pp. 555-562, 2001. [2] FAURE R.-M., POZZI V., TRASINO C., HÉMOND G., Colour and speed drill measurement for risk mitigation of a lining after a fire, The experience of Mont-Blanc tunnel, Proc World Congress Tunnel, Sydney 2002, on CD rom, 2002.

 CONTACTS " " "

René-Michel Faure Catherine Larive

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Centre d’Études des Tunnels (CETU), 25 avenue François Mitterrand, case n° 1 69674 Bron cedex Fax : 04 72 74 59 30

101

PARTIE 4 - RETOUR D’EXPÉRIENCES SUR D’AUTRES MÉTHODES - MÉTHODE 62.15

] ENREGISTREMENT DES PARAMÈTRES FORAGES DESTRUCTIFS AVEC

MÉTHODE

62.15

POUR LA DÉTERMINATION DE LA PROFONDEUR DE BÉTON ENDOMMAGÉ APRÈS UN INCENDIE

 OBJET ET DOMAINE D’APPLICATION L'utilisation de l'enregistrement des paramètres de forage est courante en géotechnique. Cette méthode peut être utilisée pour évaluer la dégradation des performances mécaniques d'un béton suite à un incendie.

 PRINCIPE Le principe consiste à mesurer la vitesse de pénétration d'un foret, qui peut être directement reliée à la résistance du milieu traversé.

 EXEMPLE Après l'incendie du tunnel du Mont-Blanc, plus de 500 forages destructifs avec enregistrement des paramètres ont été effectués dans la zone incendiée [1 et 2]. Fixant les paramètres de la machine à une valeur nominale, les principaux paramètres de forage sont enregistrés (vitesse instantanée de pénétration, pression en tête, couple de rotation, pression du fluide et vitesse de rotation) (Fig. 74).

_ Figure 74 Forage en voûte avec enregistrement des paramètres. Cinq forages en étoile ont été effectués par profil.

103

Méthodes d’essai n° 62 ‹ Présentation des techniques de diagnostic de l’état d’un béton soumis à un incendie

La figure 75 montre les valeurs de la vitesse instantanée de pénétration dans différentes zones. Tous ces profils correspondent à une profondeur de foration de 45 cm.

c Figure 75 Graphes d'enregistrement du paramètre vitesse instantanée de pénétration. (Extraits du rapport « Évaluation des dommages », Société GEOS, mars 2000).

Les trois premiers graphes traduisent l'effet de l'incendie qui altère les premiers centimètres de béton (vitesse de pénétration élevée puis nettement plus faible et relativement homogène). Le profil 4 est celui d'un forage dans une zone non soumise à l'incendie (on retrouve une valeur stable comparable à celle des profondeurs non affectées des trois premiers profils). Le profil 5 correspond également à une zone non incendiée mais dont le béton est de très mauvaise qualité (cas fréquent dans le tunnel sous le Mont-Blanc). Une schématisation des ces courbes peut être faite suivant le schéma de la figure 76.

Figure 76

`

Vitesse de pénétration

Schématisation des profils de mesure. Toujours < 10cm

Profondeur du béton de très faible résistance P1

Toujours < 20cm

Profondeur du béton Intact P2

Profondeur

La première valeur (P1) correspond à une vitesse de pénétration rapide dans un béton de très mauvaise qualité. La seconde (P2) est la profondeur au-delà de laquelle la vitesse est stable et une valeur relativement faible. Elle correspond à la profondeur au-delà de laquelle le béton a gardé ses caractéristiques initiales, sans avoir été perturbé par la chaleur. Les profondeurs P1 et P2 ont été évaluées pour les 500 forages réalisés au Mont-Blanc. Les valeurs obtenues ont ainsi pu être cartographiées (Fig. 77).

104

PARTIE 4 - RETOUR D’EXPÉRIENCES SUR D’AUTRES MÉTHODES - MÉTHODE 62.15

c Figure 77 Cartographie des profondeurs de béton dégradé. Portion de 150 m de tunnel avant le garage 21 en arrivant de France, zone la plus touchée.

Cette cartographie s'est heurtée à une difficulté liée au nombre de mesures nécessaires pour obtenir des résultats vraiment représentatifs de l'ensemble d'une zone. Dans cet exemple, l'utilisation d'interpolations linéaires entre deux valeurs et l'espacement longitudinal entre points de mesure rendent le résultat cartographique peu fiable. On retient toutefois que les profondeurs dégradées ont été globalement assez faibles (béton intact après une vingtaine de centimètres). On peut penser que cette faible épaisseur des dégradations est liée à l'absence de phénomène d'écaillage (béton très poreux), les premiers centimètres ayant limité la montée en température du béton en profondeur. Ces faibles valeurs ont été confirmées par d'autres méthodes d'investigation et par les épaisseurs de réparation du béton dégradé mises en œuvre après destruction à l'hydrofraise.

 RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES [1] FAURE R.-M., HÉMOND G., Reconnaissance de l'état du béton du tunnel du Mont-Blanc, après l'incendie de mars 1999, Proc. World Tunnel Congress, Milan 2001, Patron Editore, Bologna, pp. 555-562, 2001. [2] FAURE R.-M, POZZI V., TRASINO C., HÉMOND G., Colour and speed drill measurement for risk mitigation of a lining after a fire - The experience of Mont Blanc tunnel, Proc. World Congress Tunnel, Sydney, on CD rom, 2002.

105

Méthodes d’essai n° 62 ‹ Présentation des techniques de diagnostic de l’état d’un béton soumis à un incendie

 CONTACTS " " "

106

René-Michel Faure Catherine Larive

04 72 14 34 81 04 72 14 34 38

 [email protected]  [email protected]

Centre d’Études des Tunnels (CETU), 25 avenue François Mitterrand, case n° 1 69674 Bron cedex Fax : 04 72 74 59 30

PARTIE 4 - RETOUR D’EXPÉRIENCES SUR D’AUTRES MÉTHODES - MÉTHODE 62.16

] DU BÉTON

ÉVALUATION DE L’ÉCHAUFFEMENT

MÉTHODE

62.16

PAR THERMOLUMINESCENCE

 OBJET ET DOMAINE D’APPLICATION L'étude par thermoluminescence (TL) d'un objet minéral ancien ayant été échauffé permet d'évaluer l'époque de l'action thermique et la température maximale atteinte. Cette méthode habituellement employée en archéologie pour la datation des terres cuites, peut s'avérer également utilisable pour expertiser des matériaux de construction, comme par exemple des structures en béton, qui ont subi l'agression d'un incendie [1 à 3].

 PRINCIPE Les cristaux présents dans les roches se transforment progressivement au cours du temps sous l'effet de la radioactivité naturelle de la terre. Or, si pour une raison quelconque, on apporte au cristal une certaine élévation de température, les modifications structurales engendrées au cours du temps par la radioactivité naturelle disparaissent. L'énergie accumulée par le « bombardement » radioactif est libérée sous l'action de la chaleur et se manifeste par une émission de lumière qui dure tout le temps nécessaire au retour à l'état originel du cristal. Ce phénomène est appelé la radio-thermo-luminescence (Fig. 78 et Fig 79).

c Figure 78

c Figure 79

Exemple d'un étalonnage de la réponse de thermoluminescence (abscisse) sur des échantillons chauffés en four de laboratoire pendant 8 heures à des températures comprises entre 100 à 350 °C (ordonnée) d’après [1].

Résultat de l'évaluation par TL de la température (courbe inférieure) à une profondeur de 30 - 35 mm dans le béton d'un tunnel incendié en fonction de la position par rapport à l'épicentre de l'incendie (ordonnée) d’après [1].

107

Méthodes d’essai n° 62 ‹ Présentation des techniques de diagnostic de l’état d’un béton soumis à un incendie

 EXEMPLE Dans la pratique, pour l'expertise de béton incendié, on procède dans un premier temps à un étalonnage du signal de TL sur des corps d'épreuve en béton issus de zones indemnes de l'ouvrage soumises artificiellement à des échauffements à température variable mais de durée égale à celle subie par l'ouvrage (Fig. 78). Des mesures de TL sont ensuite réalisées sur des échantillons provenant de zones incendiées de l'ouvrage et à différentes profondeurs dans le béton. La comparaison du signal de TL des éprouvettes chauffées en laboratoire avec celui obtenu sur les échantillons prélevés en zones incendiées permet alors d'évaluer les températures atteintes par ces derniers (Fig. 79). La qualité de la réponse de cette méthode dépend essentiellement du niveau du signal de TL que restituent les minéraux présents dans le béton et en particulier de l'état de cristallisation de ces derniers. Dans des conditions favorables, il est possible d'obtenir une résolution de 10 à 20 °C sur l'évaluation de la température atteinte par le béton résiduel de l'ouvrage.

 RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES [1] SANDERSON D.C.W., SPENCER J.Q., NAYLOR J.D., Storebaelt bored tunnel. Luminescence testing of fire damaged concrete. SURRC reports to Mott MacDonald, 1995. [2] PLACIDO F., Thermoluminescence Testing for fire-damaged concrete, Mag. Concrete Res., 32, pp. 112116, 1980. [3] SPENCER J.Q., SANDERSON D.C.W., Mapping thermal exposure by luminescence thermometry, Radiation and Measurements, 23, 2/3, pp. 465-468, 1994.

 CONTACT " "

108

Pascal Fasseu

03 20 48 49 49

LRPC de Lille - Unité Bétons et Bâtiments Fax : 03 20 50 55 09

 [email protected]

PARTIE 4 - RETOUR D’EXPÉRIENCES SUR D’AUTRES MÉTHODES - MÉTHODE 62.17

]

LES ONDES DE SURFACE (MASW, Park ET al., 1999)

MÉTHODE

62.17

 OBJECTIF L'utilisation des ondes de surface permet la détermination d'un profil des vitesses de cisaillement du béton en fonction de la profondeur. Cette vitesse de cisaillement Vs est reliée au module de cisaillement dynamique Gmax par la relation suivante Vs = G max ρ où ρ est la densité.

Cette technique est à ce jour moins familière que la sismique réfraction car elle requière un minimum d'expertise tant en propagation d'ondes guidées qu'en traitement du signal et en théorie des problèmes inverses.

 PRINCIPE Les ondes de surface ont une profondeur de pénétration voisine de leur longueur d'onde, leur comportement va dépendre de la fréquence. Les petites longueurs d'onde porteront des informations sur le milieu proche de la surface tandis que les plus grandes longueurs d'onde renseigneront sur le milieu plus en profondeur. Si les propriétés mécaniques du béton varient en fonction de la profondeur, la vitesse des ondes de surface variera en fonction de la fréquence : l'onde est dispersive. Ce sont ces variations de la vitesse (de phase et ou de groupe) en fonction de la fréquence qui vont être utilisées pour reconstruire le milieu en résolvant un problème inverse. Le dispositif expérimental pour enregistrer les ondes de surface appelé MASW se compose d'une source (impulsionnelle de type marteau ou entretenue de type pot vibrant) et d'une série de capteurs non résonants alignés avec la source (Fig. 80). Comme le problème inverse repose sur des hypothèses de champ lointain, la distance qui sépare la source du premier capteur x1 doit classiquement être supérieure à la moitié de la longueur d'onde maximale utilisée (et par extension supérieure à la profondeur maximale d'investigation). Le milieu reconstruit est uni-dimensionnel : il s'agit d'une succession de couche. Un ordre de grandeur pour la première épaisseur e1 est la moitié de la longueur d'onde minimale utilisable. Plus la résolution en épaisseur de la première couche e1 est faible plus la longueur du dispositif total doit être réduite pour conserver dans les signaux les informations hautes fréquences. L'espacement entre capteur doit être inférieur à la moitié de la longueur d'onde minimale utilisée (Fig. 80).

109

Méthodes d’essai n° 62 ‹ Présentation des techniques de diagnostic de l’état d’un béton soumis à un incendie

Vitesse (m/s) Source

Capteurs

x

Problème

e1

Vsn

en

inverse

x1 > λmax/2

Fréquence (kHz)

z

Vs1

z

c Figure 80 Principe de la méthode MASW.

En déplaçant ce dispositif de mesure il est alors envisageable de remonter à une succession de profils unidimensionnels de vitesse de cisaillement le long d'une paroi de béton. Il est classique de représenter ces profils unidimensionnels bout à bout, mais cette représentation des résultats ne correspond pas une inversion bi-dimensionnel du milieu.

 RÉFÉRENCE BIBLIOGRAPHIQUE [1] PARK C.P., MILLER R., XIA J., Multichannel Analysis of Surface Waves, Geophysics, 64(3),

pp. 800-808, 1999.

 CONTACT " "

110

Odile Abraham

02 40 84 59 18

 [email protected]

Laboratoire Central des Ponts et Chaussées Division Reconnaissance et mécanique des sols Fax : 02 40 84 59 99

PARTIE 4 - RETOUR D’EXPÉRIENCES SUR D’AUTRES MÉTHODES - MÉTHODE 62.18

]

LA MÉTHODE MASW

MÉTHODE

(Modal Analysis of Surface Waves)

62.18

Mise au point à l'Université de Sherbrooke [1 à 4], cette méthode ne doit pas être confondue avec une autre méthode MASW (Multichannel Analysis of Surface Waves). Cette méthode de l'Université de Sherbrooke sera indicée S par la suite.

 DOMAINE D’APPLICATION Pour le mécanicien des sols, il s'agit d'obtenir des valeurs quantitatives sur un sol non remanié, pour une meilleure connaissance du sous-sol. La méthode MASWS permet aussi d'atteindre le coefficient de Poisson, donc dans un sol, l'identification du niveau pièzométrique. Pour le constructeur « béton », elle permet de connaître la qualité de la mise en place d'un béton et les paramètres mécaniques de ce dernier. Suite à un incendie, le niveau de dégradation du béton peut être quantifié.

 PRINCIPE Les ondes de cisaillement utilisées intéressent le squelette solide et l'analyse est faite en contraintes effectives, alors que l'utilisation d'une onde de compression conduit souvent dans un sol saturé à retrouver la vitesse de cette onde dans l'eau, soit environ 1500 m/s. L'analyse est faite en petites déformations et en élasticité. La théorie montre que les ondes de surface (ondes de Raleigh) s'amortissent exponentiellement avec la profondeur. On admet qu'à une longueur d'onde de profondeur, l'amplitude est suffisamment faible pour dire que la pénétration des ondes de surface est d'une longueur d'onde dans le milieu. Ceci va permettre de distinguer les ondes de différentes longueurs d'ondes. Dans la méthode MASWS, l'ébranlement est réalisé par un choc, c'est-à-dire que le spectre des ondes émises est très large. Ce large spectre va permettre de différencier les niveaux du milieu afin d'obtenir un profil de caractéristiques. Le choc initial génère aussi des modes harmoniques qui pénètrent moins profondément que le mode fondamental et seront aussi utilisés dans l'analyse grâce à la puissance des calculateurs. La disposition régulière des seize des capteurs permet un traitement par décalage qui fournit une tomographie du milieu. Les ondes de surface ainsi utilisées permettent d'obtenir une tomographie sur un profil en fonction de Gmax, donc une stratigraphie et les paramètres géotechniques correspondants : Id, s'p, etc. À l'aide de relations empiriques, il est même possible de normaliser les résultats pour une contrainte de confinement connue, par exemple 100 kPa, ce qui est utilisé pour la détection des zones liquéfiables en cas de séisme.

111

Méthodes d’essai n° 62 ‹ Présentation des techniques de diagnostic de l’état d’un béton soumis à un incendie

La profondeur de sol ausculté dépend de la force de l'impact. Avec une masse de 60 kg tombant de deux mètres, on atteint une profondeur auscultée de 15 m. Avec la chute d'une lame de D9, on passe à 60 m. Rappelons que la méthode MASWS ne met pas en évidence les contacts que l'on voit par réflexion ou réfraction dans d'autres méthodes sismiques, mais évalue la qualité du milieu traversé par les ondes de cisaillement, et que les limites des différentes couches proviennent des différences de nature des matériaux.

 MISE EN ŒUVRE DE LA MÉTHODE Seize capteurs (accéléromètres BK) sont reliés à une carte d'acquisition et les signaux sont fournis à un calculateur portable qui en fait l'analyse. Le résultat est présenté soit sous forme d'un profil de vitesses, soit sous forme de coupe du milieu, par interpolation entre profils (Fig. 81 et Fig. 82).

Figure 81

`

Source 16 m

Exemple de configuration de la méthode MASWS.

MASW-1

MASW-2

Profil 1 Profil 2 Profil 3 Profil 4 Profil 5

Vitesse de phase (m) 100 200 300 400 500 600 700 800 0 20

R-6 R-5

40

Vitesse des ondes de cisaillement (m/s) Coefficient de Poisson 50 150 250 350 450 550 650 0,2 0,3 0,4 0,5 0,6 0 5 10 15

R-4 60

20 25

R-3

80 100

R-2

120

35 40 45

140 160

30

50 55 Modes expérimentaux Modes théoriques

180 Longueur d'onde (m)

R-0

60 R-1

Roc

65 Profondeur (m)

c Figure 82 Exemple d’identification des différents modes des ondes de Rayleigh.

112

PARTIE 4 - RETOUR D’EXPÉRIENCES SUR D’AUTRES MÉTHODES - MÉTHODE 62.18

 EXEMPLES Le premier type d'application correspond à la tomographie d'un profil de sol. Cela permet de détecter les zones faibles (risque de liquéfaction, les vides plein d'eau ou d'air, etc.). L'information obtenue est une quantification mécanique et non pas géologique (Fig. 83). b

a

c Figure 83 a. Contours de vitesse des ondes de cisaillement. b. Contours de vitesses normalisées pour une contrainte effective de 100 kPa.

En 2000, comme second type d'application, la méthode MASWS a été, au tunnel du MontBlanc, utilisée pour la première fois sur du béton, pour évaluer l'épaisseur de béton plus ou moins détruite par la chaleur. Des tomographies de 0,8m × 0,8m ont été faites. Les résultats ont été comparés aux nombreuses autres méthodes d'investigation et sont tout à fait concordants. Le contact béton - rocher a été clairement mis en évidence. En 2004, au tunnel de Fontain lors d'une autre campagne, les anomalies de contact roche revêtement ont été mises en évidence (Fig. 84).

_ Figure 84 Tunnel de Fontain : mise en œuvre de la méthode (mars 2004) (16 capteurs collés au parement, la centrale d'acquisition et le calculateur, alimentation par un groupe 1,5 kW).

113

Méthodes d’essai n° 62 ‹ Présentation des techniques de diagnostic de l’état d’un béton soumis à un incendie

 RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES [1] KARRAY M., LEFEBVRE G., Identification and Isolation of Multiple Modes in Rayleigh Waves

Testing Methods, Use of Geophysical Methods in Construction, Proceedings of the sessions of Geo-Denver 2000, ASCE, Denver, Colorado, USA, pp. 80-94, 2000. [2] LEFEBVRE G., KARRAY M., New Developments in in-situ Characterization Using Rayleigh

Waves, 51e Canadian Geotechnical Conference, Edmonton, Alberta, Canada, Vol. 2, pp. 821-828, 1998. [3] LEFEBVRE G., KARRAY M., Utilisation des ondes de surface dans les investigations

géotechniques pour une meilleure évaluation du risque en génie civil, Colloque Risque en Génie Civil, 9 p., Tunis, mars 2004. [4] LEFEBVRE G., KARRAY M., FAURE R.-M., Results of surface waves testing in the investigation

of the Mont-Blanc tunnel after the 1999 fire, Proc Int. site characterization, 9 p., Porto, sept. 2004.

 CONTACTS " " "

114

René-Michel Faure Gilles Chatenoud

04 72 14 34 81 04 72 14 34 54

 [email protected]  [email protected]

Centre d’Études des Tunnels (CETU), 25 avenue François Mitterrand, case n° 1, 69674 Bron cedex. Fax : 04 72 14 34 30

Document publié par le LCPC Conception et réalisation Dessins

sous le numéro J1050423 LCPC-DISTC, Marie-Christine Pautré LCPC-DISTC, Philippe Caquelard

Impression

Jouve - N° 387918 N

Dépôt légal

4e trimestre 2005

L'objet de ce document est de faire le point sur les techniques de diagnostic de l'état d'un béton soumis à un incendie. Il est structuré en quatre parties : - Partie 1 : Généralités - Partie 2 : Observations et mesures in situ - Partie 3 : Méthodes d'essai de laboratoire - Partie 4 : Retour d'expériences sur d'autres méthodes La première partie rappelle quelques généralités sur l'évolution du matériau béton sous l'effet de la température et donne des notions sur la démarche à mettre en œuvre pour réaliser un diagnostic fiable et pertinent. La seconde partie concerne les observations et les mesures que l'on peut effectuer in situ. La troisième partie rassemble les méthodes de mesure et d'essais de laboratoire disponibles dans le réseau des Laboratoires des Ponts et Chaussées et pour lesquelles il existe une longue expérience. La dernière partie présente certaines méthodes de mesure et d'essai en cours de développement, mais qui paraissent prometteuses.

The objective of this document is to describe diagnosis methods to investigate the condition of concrete subjected to fire. It is organised in four parts, as follows : - Part 1: General information. - Part 2: In situ observations and measurements. - Part 3: Laboratory testing methods. - Part 4: Experience feedback with others methods. The first part is devoted to general information on the evolution of the properties of concrete with an increase of the temperature and gives the concepts to carry out a reliable and relevant diagnosis. The second part describes observations and measurements which can be carried out in situ. The third part presents laboratory methods and tests, for which there is a long experiment in the LPC network. The last part presents some measurement and test methods under development, but which appear promising.

Réf : ME 62 Prix : 35 Euros HT

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