Chapitre 9 La Mondialisation (manzagol)

  • July 2020
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C. MANZAGOL, La mondialisation Chapitre 9/ Du local au mondial : la reconfiguration des territoires La régionalisation du monde •

Formes et étapes de l’intégration régionale

En 47 ans, le GATT a enregistré 110 accords d’association économique. Parmi les ententes, plusieurs avaient vocation à constituer un marché élargi et protégé. Or, la notion de zone protégée va à l’encontre des principes du GATT, notamment la clause de la nation la plus favorisée. L’article 24 instaure cependant une tolérance pour des accords variés. Accords classés par ordre croissant d’intégration Association de coopération économique

Cadre pour favoriser les négociations; OCDE

Union économique

Abaissement progressif des droits de douane mais les partenaires restent maîtres de leur politique commerciale; ALENA Libre-échange des marchandises + Les Etats adoptent un tarif extérieur commun; Mercosur, Pacte Andin C’est une union douanière qui comprend la libre circulation des capitaux et des hommes; CEE (1957) Marché commun + politiques économiques et monétaires communes; UE (1992)

Union politique

Forme ultime de l’intégration; Zollverein (1836), union douanière entre les Etats allemands

Zone de libre-échange Union douanière Marché commun



Modalités et exemples

Une zone de libre-échange : l’ALENA

L’accord de libre-échange Canada-EU (1989) : il a été signé malgré des réticences côté canadien (menace de dissolution culturelle, disparition possible du filet social). La mise en place de l’ALENA en 1994 La création de l’ALENA a provoqué un tollé au Mexique et aux EU. D’un côté, on redoutait une main-mise américaine sur l’économie mexicaine. De l’autre, les syndicats craignaient un effritement des standards américains. Le contenu de l’accord L’ALENA n’est pas une union douanière ; elle est d’abord un accord de libre circulation des marchandises mais pas seulement. En effet, les services financiers, l’investissement direct bénéficient de dispositions au capital et à la protection des investisseurs. Il n’est pas question d’une libre circulation des travailleurs. L’ALENA, bilan provisoire Les échanges du Canada avec les EU ont augmenté de 170% en dix ans ; ceux du Mexique avec ses partenaires ont doublé en cinq ans. Cependant, la dépendance des deux pays à l’égard des EU s’est accrue : ils absorbent 84% des exportations américaines en 2004.

L’effet de la continentalisation sur la géographie est double : renforcement des liens transfrontaliers Canada-EU, extension spatiale des maquiladoras sur le territoire mexicain. •

Un régionalisme ouvert : l’ANSEA (1967)

L’ANSEA (Association des nations du Sud-est) rassemble l’Indonésie, Brunei, la Malaisie, Singapour, les Philippines, la Thaïlande (présents dès l’origine), le Myanmar, le Vietnam, le laos et le Cambodge. Un régionalisme ouvert L’ANSEA n’est pas une zone de libre-échange : c’est à l’origine une aire de coopération en matière de sécurité et d’économie. Tous les pays membres s’inscrivent à des degrés différents sur la courbe d’apprentissage qui marque le processus d’industrialisation : en témoigne le rapport élevé entre taux de formation brute de capital fixe (FBCF) et PIB (supérieur à 20%). Un difficile approfondissement C’est avant tout le fait des traditions, peu favorables à la formalisation de l’association économique. Ensuite, le nationalisme concurrentiel de la Chine et du Japon y est peu propice. Les gros partenaires que sont la Chine et l’Inde ont préféré les ententes bilatérales. La crise asiatique (1997) a montré la faiblesse de l’ANSEA dans la recherche d’un règlement, d’où l’idée d’un Fonds monétaire asiatique et d’un Système monétaire asiatique. Depuis 2001, on parle du 10+3 : les 10 partenaires ont conclu une entente avec la Chine, le Japon et la Corée du Sud pour formaliser un accord diplomatique et commercial. •

L’originalité de la construction européenne

Les étapes de la construction européenne 1957 : le traité de Rome établit un marché commun entre les six pays signataires (Benelux, France, Allemagne, Italie) instaurant la libre circulation des hommes, des capitaux et des marchandises. Le Marché commun est approfondi avec le Marché unique en 1986. 1991 : le traité de Maastricht érige un système monétaire européen, avec une monnaie commune (l’euro) et une Banque centrale européenne indépendante des Etats membres. Evolution des institutions et perspectives Les institutions progressivement mises en place consolident un pouvoir européen supranational. Un droit communautaire s’élabore, qui a préséance sur les droits nationaux. Une sorte de fédéralisme se développe. Mais l’Europe a clairement privilégié la dimension économique de sa construction. Avec la révision à la baisse des critères d’entrée dans l’UE, va-t-on assister à l’émergence d’une Europe à deux vitesses ?

Le repli de l’Etat-nation L’enrichissement contemporain du concept de territoire altère le pacte d’exclusivité : la mondialisation érode la capacité de contrôle que possédait l’Etat ; les réseaux qui le traversent font qu’il se trouve menacé de l’extérieur comme de l’intérieur. Une redéfinition de ses rôles est donc nécessaire. •

L’Etat investi par les réseaux

A l’aube du XXIème siècle, 52 FTN figurent parmi les 100 premières puissances économiques du monde. Chacune de ces 52 firmes pèsent plus que 140 des Etats inscrits à l’ONU. L’interpénétration dissolvante L’ouverture aux flux font éclater les cadres nationaux et entraînent l’acceptation de règles supraterritoriales.

L’essoufflement de l’Etat-développeur L’effondrement du régime soviétique tient à son inadaptation à l’ère de l’économie du savoir. La Chine a rompu avec le centralisme pour accueillir les investissements étrangers. L’accès au financement privé a permis à une catégorie d’« entrepreneurs bureaucratiques » de court-circuiter le Plan central. Les initiatives fusent, la croissance affiche des scores annuels de 8 à 10%. Le Japon, qui fut le modèle de l’Etat-développeur, est au contraire ‘‘en panne’’ depuis les années 1990. Le recul de l’Etat-providence Dans le contexte de mondialisation, les entreprises cherchent l’allègement des charges sociales, la réduction de la fiscalité. La pression à la baisse des impôts et des charges conduit au désengagement en matière sociale. L’information sans frontières Privatisation et multiplication des chaînes rendent illusoire le contrôle étatique. Internet érode les frontières, l’information circule et la loi peine à contenir les débordements. Cependant, l’Etat n’abdique pas. Ainsi la Chine a pu contenir le débat politique, interdire le site du Falun Gong, etc. La logique du réseau Contre le territoire, le réseau impose l’ouverture. Il est porteur de « solidarité sans territoire » (V.Badie), qu’il soit à vertu économique ou affective.



Etat et territoires de pertinence

Le territoire est le fondement de l’Etat, la pierre angulaire de l’ordre politique moderne. Avec la mondialisation, on a affaire à des territorialités multiples. Le territoire national est devenu un carcan contesté par les firmes. La dépossession par le haut Les limitations de la souveraineté de l’Etat sont de plusieurs ordres. 1. Les impératifs de l’ouverture : arbitrages supranationaux, règle de l’universel marchand 2. Les retraits consentis : le dépassement du territoire national conduit à renoncer à une part de souveraineté, notamment sous la forme d’un transfert de compétences. Par exemple, la création de l’euro est allée de pair avec la fin du privilège d’émission des banques nationales. 3. L’Etat sous surveillance : un droit d’ingérence apparaît ; parallèlement, des réseaux transnationaux (Greenpeace, Amnesty International, …) veillent. La dépossession par le bas : les nouveaux pactes nationaux Le pacte national peut être redéfini entre l’Etat et ses composantes : individus, collectivités, régions. L’avenir est aux régions, dirait Kenichi Ohmae (Nota bene : c’est lui qui a popularisé le terme ‘‘Triade’’). Selon Ohmae, les régions qui émergent ont un gabarit de 5 à 20 millions d’habitants, un aéroport international, souvent un bon port. La « politique étrangère » des régions Exemple : la Californie. Elle compte 32 millions d’habitants et sa puissance économique la placerait à la 8ème place mondiale. Favorable à l’ALENA, elle développe deux axes principaux dans sa politique extérieure : renforcement des liens avec le Mexique, stimulation des liens avec l’Asie de l’Est et du SE (deux tiers de ses échanges extérieurs). Le nouveau fédéralisme américain Les Américains dans leur majorité adhèrent à un mouvement de décentralisation comme réponse au contexte de mondialisation. Les gouverneurs reçoivent des enveloppes (block grants) qu’ils utilisent pour stimuler le développement économique de leur Etat. L’affirmation du local

Les lois de décentralisation de 1981 rompent avec la conception du développement par le haut qui était prégnante durant les Trente Glorieuses (aménagement du territoire avec un souci de répartition des richesses (distribution de subsides)). L’Etat reprofilé L’échec de l’AMI (Accord multilatéral dur les investissements, préparé par l’OCDE) et la volonté de souveraineté culturelle témoignent de la capacité de réaction de l’Etat. Etat et compétitivité Pour Michael Porter, le « diamant de la compétitivité » a quatre composantes: la composante majeure (dotation en facteurs donnés (ressources) et construits (éducation, …) ; la structure des firmes, le contexte de concurrence, la demande. L’action du gouvernement est essentielle sur ces quatre points. Pour Robert Reich, le rôle économique d’une nation n’est pas d’accroître la profitabilité des entreprises enregistrées sous son pavillon mais d’améliorer le niveau de vie de ses citoyens. Le concept de compétitivité se déplace donc : c’est une action dans la durée que l’Etat doit déployer s’il veut être ‘‘compétitif’’. Faire société C’est bien l’ensemble du modèle de développement et de solidarité mis en place pendant les Trente Glorieuses que la mondialisation contemporaine met à rude épreuve. Dans ce contexte, quels sont les moyens d’action alors qu’une forte proportion de la production nationale est destinée aux marchés étrangers, qu’une proportion croissante de celle-ci est le fait d’entreprises qui sont propriété étrangère ? « Nous ne sommes plus une économie ; pouvons-nous être une société ? » s’interroge Robert Reich. Des choix s’imposent. Peut-être faut-il renoncer à l’égalitarisme au profit de l’équité (John Rawls). Quoi qu’il en soit, il semble que la volonté de faire société dépend aujourd’hui, comme le dit Reich (encore lui), du « sentiment profondément ancré d’un héritage et d’une destinée nationale partagée ».

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