Nextaris et Yahoo 360, des bouquets de services en ligne pour gérer l'information personnelle (mars 2005) Par Christophe Deschamps www.outilsfroids.net
Deux innovations que je qualifierai de "bouquets de services en ligne" destinés à l'internaute lambda viennent de voir le jour en une semaine. Je teste Nextaris dans sa phase bêta depuis un bon moment mais son éditeur Surfwax (excellent moteur de recherche par ailleurs) vient d'annoncer que la plateforme était maintenant en version finale. Comment qualifier Nextaris au vu des fonctionnalités dont il regorge? Allons au plus simple, Nextaris est d'abord un espace de stockage en ligne accessible à partir d'un login et d'un mot de passe. Comme en disant cela je ne dis rien voici un schéma qui vous présentera mieux que toutes mes explications les 3 besoins principaux auxquels répond Nextaris, à savoir : rechercher de l'information, la stocker, la communiquer/distribuer/partager avec vos réseaux/proches,...
Je suis surpris de voir cette offre tout public répondre aussi bien à certaines problématiques professionnelles que connaissent les veilleurs. Hormis ses capacités de stockage un peu limitées de très nombreux besoins sont adressés par Nextaris afin de permettre à chacun de mettre en place une "veille domestique". Je ne peux m'empêcher de rapprocher cette initiative d'un article vers lequel je pointais récemment, qui montrait que la veille tendait à devenir, au moins dans ses basiques, une compétence de plus en plus banalisée, une composante de l'"information literacy" de mieux en mieux maîtrisée. On assiste à un rapprochement entre besoins et outils donnant corps au concept de
Personal
Knowledge Management". Cet ensemble de pratiques que j'étudie et défends depuis 4 ans trouve en ce moment sa place sans passer par le monde de l'entreprise. Je pense d'ailleurs qu'il s'imposera à lui par la pression des employés (effet bottom-up). En effet, avec internet tout le monde est amené à travailler avec des monceaux d'information, y compris (et de plus en plus) dans sa vie privée. On apprend à y gérer une multitude de données de formats variés nécessitant des outils logiciels appropriés, rarement les mêmes. Ainsi dans une même séance de surf on peut: • télécharger de la musique • faire une recherche sur Google • tchater avec ses amis • envoyer et recevoir des emails • uploader ses photos sur Flickr • copier des pages intéressantes • bloguer • ... Mine de rien ces activités demandent une somme de compétences qui est en train de devenir le b.a.ba informatique des ados nés fin 80 début 90. Leur démarche de veille domestique, même si elle s'applique au dernier hit de Sum41 téléchargeable gratuitement sur réseau P2P est intégrée comme une simple démarche de bon sens. Je veux, je veille, j'obtiens. Ils acquierent ainsi au quotidien des compétences qui sont le pendant de celles dont ont (auront) besoin les travailleurs de l'information dans leurs organisations. Seul le sujet auquel elles s'appliquent est différent. Et je ne parle pas des compétences nécessaires à l'usage d'un camera phone ou d'un baladeur MP3. Rien de compliqué certes mais beaucoup de temps passé (rappelez-vous le temps qu'il vous a fallu pour maîtriser 50% des capacités de ce petit bijoux d'appareil photo numérique dernier cri). Pour nombre d'entre eux la gestion des données personnelles n'est pas perçu comme une compétence mais juste comme un ensemble d'activités quotidiennes prosaïques. Comment leur expliquera-t'on dans quelques années que les outils pour collaborer facilement en temps réel avec d'autres internautes (icq), capitaliser de l'information ou la gérer ne sont pas disponibles dans le cadre de leur travail parce qu'ils n'ont pas été homologués par la DSI, ou encore que la politique de sécurité la plus élémentaire interdit de télécharger soi-même le logiciel dont on souhaite se servir parce qu'on le maîtrise depuis des années. Ce sera un peu comme d'installer Michaël Schumacher au volant d'une 4L en lui demandant d'être aussi performant que d'habitude. Avec cette banalisation des compétences propres à la maîtrise des phases du cycle de l'information on peut légitimement se poser des questions sur la pérennité du métier de veilleur? Personnellement je pense qu'à condition de conserver comme coeur de compétence l'analyse et l'organisation de l'information, seule partie sur laquelle il peuvent se démarquer en apportant de la valeur ajoutée, il y aura toujours besoin de veilleurs. Passons à Yahoo qui propose un service (ouvert seulement à quelques heureux beta-testeurs) dont les fonctionnalités sont un peu différentes mais dont l'esprit est le même à mon sens. Le nom de ce bouquet est Yahoo 360. Il se compose de 7 services différents, tous centrés autour du partage et de la communication. Avec ce service vous pourrez créer votre blog, votre moblog, votre album photo, vos listes (livres, musique, films,...). Vous pourrez aussi donner votre avis sur des services locaux (restaurants, commerces,...), ou proposer les radios que vous écoutez à travers Yahoo! music
stations. Un service intitulé baptisé Blast me laisse pour l'instant perplexe mais je pense qu'il s'agit plus ou moins d'un chat en ligne. A vérifier tout de même. Tous ses services viennent s'ajouter à la longue liste de ceux déjà disponibles à partir de votre "passeport" (email, My Yahoo, Groupes, stockage,...) et font de Yahoo une véritable plateforme de gestion des connaissances personnelles. Il y manque encore à mon sens une page intermédiaire d'accès aux différents services auxquels vous avez souscrit. Il y a bien My Yahoo mais à ma connaissance il ne prend pas (encore) en compte certains abonnements comme l'album photo, l'espace de stockage ou l'email. Il est conçu comme un espace d'accès à des news personnalisés plutôt que comme une interface de gestion globale de l'information personnelle. N'oublions pas non plus d'observer ces bouquets de service du côté prestataire. Pour Surfwax et surtout pour Yahoo il représentent une masse énorme d'informations marketing pointues susceptible d'attirer des annonceurs. A ce propos je vous renvoie à un billet datant de février dernier relatant les discussions qui s'étaient tenues entre grands acteurs de la recherche sur Internet lors d'une conférence à la Harvard Business School.