La motivation au travail peut-elle prévenir l’épuisement professionnel? Et si c’était une question de générations… Yanick Chrétien1, Claude Fernet2, Stéphanie Austin2, & Sarah-Geneviève Trépanier3 1Departement
de psychologie 2Département des sciences de la gestion
L’épuisement professionnel est reconnu comme étant une problématique de santé psychologique alarmante chez les infirmier(ère)s. Il réfère à une réaction affective découlant du stress au travail et dont les principales dimensions sont l'épuisement émotionnel et le cynisme (Maslach et al., 2001). L’épuisement émotionnel correspond à l‘affaissement des ressources physiques et émotionnelles de l’individu; Le cynisme reflète une attitude négative de détachement à l’égard du travail. L’épuisement professionnel a été associé à différences conséquences de nature personnelle et organisationnelle: Désengagement envers l’organisation; Insatisfaction professionnelle et diminution de la performance au travail; Augmentation de l’absentéisme et du roulement de personnel. Les employés de différentes générations perçoivent leur environnement de travail et effectuent leur tâche de façon distincte (Chrétien & Leclerc, 2012).
MÉTHODE L’échantillon était constitué de 1 255 infirmier(ère)s, membres de l'Ordre des Infirmières et des Infirmiers du Québec (OIIQ). Femmes (91%); Âge moyen = 31,8 ans (E-t = 6,96); Génération X = 48,1% et génération Y = 51,9% Expérience de travail = 7,77 ans (E-t = 6,53); 61,6% travaillaient à temps plein.
Mesures: Motivation au travail L’échelle de motivation au travail (R-MAWS; Gagné et al., 2013) : Motivation autonome α = .83
INTRODUCTION
Génération Y: Employés nés entre 1978 et 1992 (Teuren & Anderson, 2010). La théorie de l’autodétermination (Deci & Ryan, 2008) met l'accent sur les facteurs sociaux et motivationnels qui favorisent le fonctionnement optimal et le bien-être des individus. Elle propose deux principales formes de motivation: Motivation autonome: Employés qui s’engagent dans leur travail pour le plaisir et la satisfaction ressentis ou parce que le travail est valorisant et concorde avec leurs objectifs personnels. Motivation contrôlée: Employés qui s’engagent dans leur travail pour des raisons instrumentales, telles que pour obtenir des récompenses financières et sociales ou pour ne pas succomber à des pressions internes (p.ex., sentiments d'anxiété, de culpabilité).
BUT DE LA PRÉSENTE ÉTUDE: Évaluer le rôle de la génération (X et Y) dans la relation entre la motivation des employés (autonome et contrôlée) et l'épuisement professionnel.
Motivation Controlée α = .76
Deux générations sont particulièrement actives sur le marché du travail: Génération X : Employés nés entre1965 et 1977 (Alain, 2008).
Bien qu'il soit largement reconnu que la motivation au travail est bénéfique à la santé psychologique des employés, les chercheurs ont largement ignoré le rôle des différences générationnelles dans cette relation. Cette étude examine si les générations (X [1960-1978] et Y [1978-1994]) modèrent la relation entre la motivation (autonome et contrôlée) des infirmier(ère)s et leur épuisement professionnel. Des analyses de régression ont été effectuées sur un échantillon de 1 255 infirmier(ère)s. Les résultats montrent que la motivation autonome des employés de la génération Y prévient davantage leur épuisement professionnel (β = - .41, p <.01) que pour ceux de la génération X (β = - .32, p <.001). De plus, la motivation contrôlée des employés de la génération X contribue davantage à leur épuisement professionnel (β = .26, p <.01) que pour ceux de la génération Y. Nos résultats encouragent les établissements de soins de santé à prendre en considération les différences générationnelles dans le développement d’interventions visant à prévenir l'épuisement professionnel de leur personnel infirmier.
Motivation intrinsèque (3 items) : “Parce que le travail que je fais est intéressant” Régulation identifiée (3 items) : “Car ce travail a une signification personnelle pour moi” Régulation introjectée (4 items) : “Parce qu’ainsi, je me sens fier (ère) de moi” Régulation externe (6 items) : “Car je risque de perdre mon emploi si je ne fais pas assez d’efforts au travail”
DISCUSSION Les résultats de cette étude soutiennent l'idée que la motivation, par sa nature autonome ou contrôlée, peut prévenir ou contribuer à l'épuisement professionnel. En ce sens, les résultats montrent que la motivation autonome prédit négativement l'épuisement professionnel. En revanche, la motivation contrôlée prédit positivement épuisement. Bien que la qualité de la motivation est importante dans la prédiction de l'épuisement professionnel, cette relation est modérée par la génération des infirmier(ère)s.
La motivation autonome est prévient davantage l'épuisement professionnel des infirmier(ère)s de la génération Y, que pour ceux/celles de la génération X. Échelle de l’épuisement professionnel (MBI-GS; Schaufeli, Leiter, Maslach, & Jackson, 1996) :
Épuisement professionnel
Épuisement émotionnel (5 items; α = .92) : “Je me sens émotionnellement vidé par mon travail.” Cynisme (5 items; α = .80) : “Je doute de la valeur de mon travail.”
RÉSULTAS
La motivation contrôlée favorise davantage l'épuisement professionnel des infirmier(ère)s de la génération X que pour ceux/celles de la génération Y. Implications pour la pratique: Les établissement de soins de santé qui souhaitent prévenir l’épuisement professionnel de leur personnel infirmier devraient prendre en considération les différences générationnelles. Pour les infirmier(ère)s de la génération Y , la motivation autonome pourrait être renforcée par l'enrichissement des tâches (p.ex., accroître l’autonomie décisionnelle et le soutien entre les pairs). Pour les infirmier(ère)s de la génération X, la motivation contrôlée pourrait être diminuée en allégeant certaines contraintes au travail (p.ex., surcharge, ambiguïté ou conflit de rôle).
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