Khalid Chraibi - Paradoxes

  • April 2020
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  • Words: 635
  • Pages: 2
Khalid Chraibi - Economia Chroniques d'économie marocaine

Paradoxes Economia n° 7 - septembre 2006 Chronique entreprise

Khalid Chraibi A l’ère de la mondialisation, les marocains ressentent beaucoup d’attrait pour tout ce qui provient de l’étranger, qu’il s’agisse de produits, de services ou de conseil. Mais, dans certaines situations, cet intérêt devient manifestement excessif, et nous fait perdre de vue nos intérêts bien compris. Ainsi, de nombreuses communes confient-elles à des organismes étrangers la gestion des activités de distribution d’eau et d’électricité, ou de ramassage des ordures ménagères, etc. Ne serait-il pas plus raisonnable de les confier à des opérateurs marocains expérimentés, à un moment où tout devrait être mis en œuvre pour promouvoir l’emploi dans le pays ? Ou bien estime-t-on qu’ils ne peuvent pas maîtriser la technicité de telles opérations ? D’autres services nécessitant des investissements plus lourds mais générant aussi des bénéfices plus intéressants, tels que la gestion d’autoroutes ou de ports, sont également souvent confiés à des opérateurs étrangers, après un demi-siècle d’indépendance. De même, au niveau du conseil d’entreprises, des commandes pour des montants considérables sont régulièrement passées aux cabinets spécialisés étrangers, au détriment des professionnels marocains oeuvrant dans les mêmes domaines d’activité. Pendant ce temps, les jeunes marocains diplômés des meilleures écoles étrangères hésitent à rentrer au pays, une fois leurs études terminées, de peur de se retrouver au chômage. Lorsque ces jeunes marocains décrochent un travail à l’étranger, dans une multinationale, faut-il s’en réjouir ? Car, la société marocaine perd tout le bénéfice de l’investissement national considérable qu’elle a effectué dans leur formation pendant une vingtaine d’années, au profit d’opérateurs étrangers. L’attrait de l’étranger se manifeste également, au niveau industriel, à l’occasion de la cession des fleurons de l’industrie marocaine à des investisseurs étrangers. Il ne s’agit, le plus souvent, que d’un transfert de titre de propriété, sans grande signification sur le plan économique, mais l’événement est célébré comme une étape marquante dans le développement de l’industrie nationale. Est-ce bien

raisonnable de se réjouir de la cession de notre patrimoine, qui ne devrait s’effectuer que lorsque nous y sommes contraints et forcés ? Sur un plan un peu différent, au niveau des entreprises, le marché national a été inondé, au cours des dernières années, dans le cadre de la « mondialisation », de milliers de produits et de services de toutes provenances, répondant aux besoins les plus courants comme aux goûts les plus exotiques des consommateurs et des investisseurs. Le consommateur marocain ne peut que s’en réjouir, bien sûr. Mais, de nombreux entrepreneurs marocains voient la part de marché de leurs produits rétrécir comme une peau de chagrin, entraînant des difficultés de tous ordres, qui mènent à des réductions de personnel ou même à des fermetures d’usines. Par ailleurs, les produits marocains connaissent souvent de grands déboires sur les marchés étrangers. Où sont donc passés les bienfaits de la mondialisation, tant vantés lors de la signature des accords internationaux ? Enfin, certains marocains sont tellement subjugués par l’étranger qu’ils demandent une nationalité étrangère dès qu’ils disposent du moindre prétexte pour ce faire. Pendant ce temps, des citoyens moins favorisés perdent, semble-t-il, tout espoir de trouver un travail dans leur pays, d’y fonder un foyer, ou d’y construire leur avenir. Ils n’hésitent pas à traverser l’océan dans de frêles embarcations, au péril de leur vie, pour entrer sans papiers dans des pays étrangers où ils espèrent, éventuellement, un jour, obtenir un travail et régulariser leur situation. Ne serait-il pas plus raisonnable, dans ces conditions, de faire preuve de plus de solidarité au niveau national, et d’œuvrer tous ensemble pour réduire ces paradoxes ? Ne pouvons-nous pas mettre en commun nos ressources, notre savoir-faire, notre ingénuité, pour construire le Maroc de demain, au lieu d’offrir ce que nous avons de mieux à des étrangers, au détriment de la communauté nationale ?

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