Badiou Nature

  • May 2020
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La Nature Cours d’agrégation d’Alain Badiou (Ens-Ulm, 2000-2001) [transcription par François Duvert] 19.10.2000 2 1ère dialectique : nature et être. 5 a) différence......................................................................................................................................5 b) questions.......................................................................................................................................5 c) réponses ........................................................................................................................................6 2ème dialectique : nature et essence. 7 a) différence......................................................................................................................................7 b) transition vers le sensible .............................................................................................................7 ème 3 dialectique : nature-sensible. 8 4ème dialectique : nature-totalité. 11 1ère difficulté : .................................................................................................................................11 2ème difficulté : ................................................................................................................................11 26.10.2000 12 a) Pascal 14 b) Sade 14 c) le romantisme français 15 ème 5 dialectique : nature-liberté 19 a) différence....................................................................................................................................19 α) la grâce 20 β) les miracles 20 b) l’exception à la totalité comme source du sens..........................................................................20 ème 6 dialectique : nature-humanité. 21 a) l’humanité comme nature de la liberté .......................................................................................21 α) l’exemple de Rousseau 21 β) le droit naturel 21 b) transition : la synthèse de la nature et de l’anti-nature (liberté) dans l’humanité est-elle elle-même naturelle ? .......................................................................................................................................22 7ème dialectique : nature-surhumanité 22 a) le surhomme comme nature de l’homme ...................................................................................22 b) la nature du surhumain ...............................................................................................................22 8ème dialectique : nature-Dieu 22 2.11.00 22 1° Je commence par la publicité. 22 2° Nous reprenons à partir du schéma. 23 6ème dialectique : nature et humanité 23 7ème dialectique : nature et surhumanité 25 a) l’homme comme surmontant sa propre nature ...........................................................................25 b) homme et surhomme : continuité ou discontinuité ? (qui est Zarathoustra ?) ...........................25 c) homme et surhomme : continuité ou discontinuité ? (casser en 2 l’histoire du monde) ............26 d) transition.....................................................................................................................................26 8ème dialectique : nature / Dieu 26 a) la nature de Dieu ........................................................................................................................26 α) thèse continuiste de Spinoza 27 β) thèse discontinuiste de Descartes 27 γ) Leibniz comme position intermédiaire 28 ème 3 moment : interventions 29 Hegel 31 9.11.2000 : Texte de Hegel 32 1° Situation : la question du fondement. 32 2° détour kantien 33 16 novembre 2000 42

1er passage : Monde-Nature. 42 ème 2 passage : Dieu-Nature. 42 11.01.2000 : Texte de Kant 50 18 janvier 2001 57 Récapitulatif : problèmes de définition. 57 - figure du redoublement : ..............................................................................................................57 - figure de la circularité : ................................................................................................................58 - figure de l’écart : ..........................................................................................................................59 - figure de l’unité :..........................................................................................................................60 Questions/réponses 62

19.10.2000 Nous allons parler de la nature, 6 leçons sur la nature. Il y a une chose à laquelle vous pouvez être attentif, qui est cette sédimentation, cette sémantique singulière qui fait que, ayant traversé les siècles dans des successives reprises (spéculative, analytique, critique), des concepts ont des couleurs. C’est à cette exigence que je veux m’attacher, il y a un retravail sur le concept, de telle sorte qu’on finit par obtenir une couleur propre des concepts. Il est intéressant de se demander qu’est-ce qu’une notion devient, comment elle finit par avoir une résonance propre, une singularité sémantique - presque peutêtre comme une poétique abstraite - qui fait que, quand on dit nature, quand on parle de la nature, ou quand on détermine ce qu’est la nature, on a affaire à autre chose qu’un mot plastique, disponible, à un mot vide. On a affaire avec le mot nature à qch qui a incorporé sa propre histoire à la langue, et singulièrement à la langue philosophique, et qui n’en est plus séparé. On pourrait parler, de manière kantienne, d’une pathétique transcendantale des concepts, et pas simplement d’une analytique. Alors je peux vous dire ce qu’est, pour moi, le mot nature, commencer par là, quelle est ma propre sensibilité à ce vocable. Cette sensibilité peut varier selon que vous êtes sensible à telle ou telle irisation. Personnellement, je trouve que c’est un concept extraordinairement retors, à la fois labile et un peu insaisissable. Il court dans la pensée, un peu comme dans le jeu du furet, de telle sorte qu’il est impossible de savoir où il est exactement. C’est cette caractéristique qui me frappe. Il y a des concepts dont la stabilité spéculative est établie. Si vous prenez un terme comme transcendantal, celui-ci a un référent historique établi, c’est un terme technique clair, dont l’histoire est ample et importante, mais qui n’a pas cette course dans la pensée que peut avoir le mot nature. Il est retors. Je voudrais dire pourquoi et je voudrais commencer par là. - quant à sa fonction théorique, dans la tentative d’en faire un concept, de le déterminer dans le champ théorique : on voit qu’il y a une extra largeur du spectre interprétatif possible du terme. C’est pourquoi entre parenthèse ce n’est pas un thème facile, ce n’est pas un thème qui est facile à déterminer. Son indétermination est très forte. Dans le spectre théorique, on voit au fond que, nature ça peut se prendre dans une sorte d’extrême tension de caractère ontologique. Ça peut être pris comme ça, c’est inscrit comme ça. Référons-nous par exemple à la manière dont Heidegger tente de faire résonner le mot grec phusis comme originaire du mot nature, mais comme originaire raturé et presque inaudible. Là on voit bien que nature, en tant qu’il remontre vers phusis, au sens que Heidegger donne à cette remontée, fait que ce mot s’inscrit véritablement dans l’extrême tension de la possibilité d’une pensée de l’être. Le concept de nature est tiré vers une sorte d’assignation originaire de la pensée de l’être, et d’avoir par excellence une vocation à cette pensée (phusis doit être entendu comme éclosion, comme venue, comme ouverture première, comme disposition ou éclosion de ce qui est dans sa propre limite etc..). Nature est pris dans un champ sémantique où ce qui domine c’est la tension ontologique. D’un autre côté, nature va se référer ou servir de référent à l’effectivité de la science : les sciences de la nature, et la nature comme règne des lois. Nature va en venir à désigner ce qui par excellence fait obstacle à l’ontologie, justement. La nature va en venir à désigner ce qui est notre immédiat irrécusable tel qu’il n’y a pas lieu de remonter au-delà. C’est une 1ère tension que je voulais souligner : si vous prenez nature dans un concept disons positiviste, au sens large, ou même empiriste ou disons naturaliste, et si vous prenez nature comme ce qui fait résonner l’originaire phusis tel que peut-être mythiquement elle désigne l’histoire même de l’être, le mot nature est presque retourné par rapport à son premier sens. on peut même dire que en un de ses sens il est ce qui assoit la possibilité de la critique de l’autre sens. Cette division est essentielle, on va la retrouver

tout du long. On peut l’appeler incertitude théorique de l’idée de nature, du concept de nature. Si bien que il est vrai que en ce sens, la sémantique du mot nature est en quelque manière une sémantique complexe ou saturée : c’est la grande complexité de la notion. Elle a une sémantique saturée : elle balaye au fond le régime général du il y a, elle est susceptible de se raccorder au régime général du il y a, que vous preniez ce il y a dans l’instance de la question de l’être, disons-le comme ça, ou que vous preniez au contraire ce il y a dans la restriction phénoménale de la loi scientifique. Il est attesté que le mot nature entre en fonction dans les 2 cas, mais il a des fonctions très opposées, très disparates. Pour le dire métaphoriquement, c’est un concept qui est à la fois maître et serviteur. C’est un concept aristocratique et c’est aussi un concept de l’humilité. C’est un concept du registre du noble et du registre trivial. Ce n’est plus seulement l’opposition entre ontologie et science positive. C’est évident dans la langue courante elle-même : vous parlez de nature en un sens qui inclut une référence et une inclinaisons triviale et dans le romantisme, nature est pensé comme le référent noble de l’art, un lieu de registration d’une donation infinie, il y a un registre du mot nature qui en fait la figure noble du référent de l’art. Et puis vous avez aussi l’idée d’une bassesse naturelle, trivialité naturelle, besoins naturels. La nature désigne la trivialité des besoins et la noblesse infinie de la notion. C’est retors, il n’est pas facile de se repérer dans une sémantique aussi explicitement dilatée. C’est dans le registre de la pensée. - mais nature, c’est aussi en même temps, et peut-être surtout, un concept normatif, ie un concept dont le référent est pratique, qui apparaît avec une particulière force dans les normes, la question de la conduite, la question de la vie sage. Aussi bien chez Aristote que chez Epicure, dans 2 dispositions éthiques très différentes, nature n’en est pas moins le nom de la norme. Nature est le nom de la norme, c’est conformément à la nature qu’il convient de disposer sa conduite. Et nature va désigner, si vous voulez, qch de référentiel pour la sagesse pratique, dans un régime de la conformité, même si cette question est compliquée : conformément à la nature, selon la nature, qu’est-ce que ça veut dire ? En tout cas c’est une disposition majeure de la philo pratique que de proposer la nature comme norme pratique. Le problème, c’est que c’est aussi une anti-norme : il y a des thèses selon lesquelles la moralité, par excellence, c’est ce qui est en discontinuité avec la nécessité naturelle (ce qui est, dira Kant, suprasensible), et en ce sens ou bien non-naturelle, ou bien proposant d’autres sens du mot nature, mais en tout cas pas dans la continuité de ce qui est immédiatement reçu comme nature. Nous retrouvons sur le plan pratique cette extension saturée ou complète que nous avions sur le plan théorique. Sur le plan théorique, nature était la désignation de l’envoi premier de la pensée de l’être, et ça désignait aussi le référent sémantique général de la disposition positive des sciences. C’est la même chose au plan pratique : c’est une norme pour une région des sagesses, mais c’est aussi une anti-norme, ie c’est ce à quoi la conduite doit faire exception, pour autant que son référent est naturel. Ce n’est pas seulement Kant : qln qui a disposé la conduite morale dans une négation de la nature, c’est Sartre. La liberté ne se ressaisit elle-même que dans sa non-naturalisation. La naturalisation de la liberté, c’est proprement le mode sur lequel elle se résilie elle-même ou s’oublie elle-même. Du point de vue du champ pratique : nature peut nommer la norme, mais aussi ce à quoi la norme peut faire exception. Finalement, on se retrouve face à 2 problèmes : - d’où provient cette labilité extrême du concept de nature ? qu’est-ce que c’est que cette notion pour qu’elle ait ainsi une sémantique saturée ? quelle en est l’étrange histoire pour qu’elle en vienne à nommer des entreprises explicitement contradictoires ? - comment se gouverner dans cette analytique ? quelles sont les accentuations différentielles majeures qui permettent de disposer en tout cas la nature dans le maximum de clarté ? Ce sont les enjeux, modestes, de ces quelques leçons.

Méthode : aujourd’hui, je vais étudier les dialectiques constitutives du concept de nature. Dans les 5 autres leçons, nous travaillerons sur des exemples, sur un certain nombre de définitions canoniques de la

nature dans l’histoire de la philosophie. Avec l’idée de les inscrire dans l’ambiguïté singulière, et le caractère prodigieusement retors de la notion. Aujourd’hui ce que je vais vous dire pourrait avoir pour titre les 8 dialectiques du concept de nature, ie le rapport du concept de nature à autre chose que luimême dans un cheminement spécifique. Je vous les donne : - nature et être - nature et essence - nature et sensible - nature et totalité - nature et liberté - nature et humanité - nature et surhumanité - nature et divinité C’est ascendant ! Vous imaginez que avec un programme pareil, c’est la logique du parcours qu’il s’agit et non pas du détail historique de la question. Ce que je voudrais c’est montrer comment il y a pertinence à chaque fois, dans ces couples d’opposition, il y a pertinence à s’interroger sur ce qu’est la nature dans le couple, sur la dialectique qui l’unit et le disjoint en même temps à l’autre terme, et comment tout ceci s’enchaîne, et même en un certain sens s’enchaîne circulairement. En fin de compte, c’est vraiment un exercice de repérage, qui ne fait que déployer ce que j’ai dit introductivement, à savoir le caractère saturé du terme dans le champ de la philosophie 1ère dialectique : nature et être. a) différence Prenons comme point de départ le titre du poème de Lucrèce. "De natura rerum" : de la nature des choses. Alors, ce titre au fond pose immédiatement la question suivante : pourquoi le poème de Lucrèce ne s’appelle-t-il pas « des choses », mais de « la nature des choses » ? C’est une question, qu’il aurait été intéressant de poser à Lucrèce. C’est un peu celle que lui pose Virgile, dans le vers fameux : « heureux celui qui peut connaître les causes des choses ». Virgile dit : heureux cet homme, Lucrèce, qui connaît les causes des choses. Mais il ne dit pas qu’il connaît la nature des choses, il dit les causes des choses. Notons ce point, comme si la nature et les causes, c’était la même chose. Hypothèse que nous croiserons souvent. Pourquoi pas « de rebus », « des choses » ? Est-ce la même chose ? Ceci requiert que nature des choses et choses ne soient pas identiques. Qu’y a-t-il d’autre dans la nature des choses que dans les choses ? La réponse ordinaire, c’est que la nature des choses, c'est ce que les choses sont vraiment (c’est ainsi que Lucrèce l’entend), par rapport à ce que nous imaginons fallacieusement que sont les choses, le poème va nous dire ou énoncer ce que les choses sont vraiment. Nous avons là une acception de nature qui est que la nature d’une chose, quelle qu soit cette chose, c’est son réel, ce qu’elle est vraiment, et non pas ce qu’on s’imagine qu’elle est. De ce point de vue là, la nature de la chose c’est bien son être. On est bien sur nature et être. La nature de la chose désigne ce que la chose est, et non pas ce qu’elle semble être, ou ce qu’on s’imagine qu’elle est. On pourrait dire, 1ère scansion dialectique, nature en tout cas dans cet exemple (mais dans bcp d’autres) désigne, en ce sens là, dans cette attaque sémantique, nature désigne quelque chose qui est l’être même de ce qui est, pour autant qu’on le détermine comme tel dans la pensée. Le poème de Lucrèce, c’est la détermination pensante de la doctrine de Démocrite et d’Epicure des choses dans leur être effectif, éloigné de tout imaginaire. b) questions 2 questions surgissent à ce moment là : - pourquoi dans ce cas là dire nature, et non pas être ? C’est une question qu’on recroisera souvent. A quel moment est-il stratégiquement requis de dire nature plutôt que être, ou même plutôt que réel ou que réalité ? pourquoi et à quel moment faut-il dire nature ? C’est la 1ère question. Sur la dialectique nature/être, le point différentiel : d’un côté, la nature c’est l’être, mais d’un autre côté, le nom nature dit aussi autre chose que être. C’est la 1ère question. - s’il y a une nature des choses qui n’est pas identique à chose (sémantiquement, nature des choses dit autre chose que chose), ne faut-il pas demander s’il y a une nature de la nature ? S’il est pertinent, au regard de l’évidence même de la chose, de demander quelle est sa nature (de natura rerum), de dire quelle est sa nature, ne faut-il pas selon le même mouvement de pensée, s’interroger sur l’évidence de nature en tant que synonyme de être et sur la possibilité de l’existence d’une nature de la nature. Nature

désigne-t-il un degré d’évidence supplémentaire supérieure à la chose ? c’est un point qui va courir constamment et qui est le suivant : le mot nature (c’est une de ses difficultés) est employé pour désigner ce que la chose est vraiment (nous verrons l’emploi complexe de cette idée, comme dans l’expression de nature humaine : naturellement, l’homme est une chose, et il y a un dire possible de cette naturalité de l’humanité). La question est de savoir si ce faisant, en disant nature, on entre dans un régime de l’évidence ou de la clarification supérieur à celui dont on part. il faut toujours supposer que quand vous dites nature des choses, nature vous installe dans la pensée de ce qu’il y a avec une clarté supérieure. Y at-il une nature de la nature ? C’est le problème de la nature de la nature. ça donnerait une esquisse de récurrence : nature des choses, nature de la nature, puis une sorte de récurrence, à laquelle Lucrèce en vérité s’est bien confronté : la nature des choses ça veut dire atome et vide. Les choses, leur nature c’est leur reconstruction en terme de vide et d’atomes. C’est bien leur être, en ce sens. La chose, pour penser cet être, il va falloir assigner cet être en termes de vide et d’atomes. Il n’y a 2 types d’être : atomes et vide. Une chose est une production singulière d’atomes dans le vide. L’être de la chose, c’est atome et vide. On est bien dans une dialectique nature / être. Mais ne peut on pas poser la question de la nature des atomes, et j’allais dire la question de la nature du vide. Qu’est-ce qu’un atome ? il va falloir s’expliquer sur ce qu’est une combinaison d’atomes en tant que c’est une chose. La question : qu’est-ce qu’un atome, ou quelle est la nature d’un atome, c’est bien la question : quelle est la nature de la nature, ce n’est pas le même niveau que qu’est-ce qu’une chose ? qu’est-ce qu’une chose ? c’est des atomes. Qu’est-ce un atome ? c’est la nature de la composition même de la chose. La nature supporte toujours la difficulté de cette récurrence. Quand vous dites ce qu’est la nature, l’être des choses, la naturalité de cette nature est aussitôt une question. C’est si compliqué que chez Lucrèce que il va falloir le recours à un concept non-naturel pour régler la question de la nature de la nature. C’est le concept de clinamen. On va être obligé de spéculer sur le clinamen. C’est une déviation originelle. Le concept de clinamen, lui, n’est pas naturel, puisqu’il n’est réductible ni au vide ni aux atomes. Lucrèce va dire : il est hors espace et hors temps. Dans un temps indéterminé et un lieu insaisissable, le clinamen s’est produit. C’est pour vous donner un exemple très simple mais très fort de ce que - récapitulons - lorsque nature signifie l’être vrai des choses, l’être vrai de ce qu’il y a, vous avez 2 difficultés, 2 problèmes : 1° qu’est-ce que nature introduit d’effectivement différent, par rapport au niveau des choses, au niveau du il y a ? C’est la question du régime de clarté. 2° y a-t-il une nature de la nature ? C’est ce que j’appellerais la question de la récurrence. c) réponses La réponse la plus générique à ces questions, la réponse la plus naturelle, est la suivante : - la nature de la chose n’est pas autre chose que la chose (sur l’élément différentiel, ou supplémentaire), mais aussi et en même temps, elle effectue la pensabilité de la chose. La nature de la chose, c’est bien son être, mais c’est son être tel que effectivement pensable, éventuellement scientifique pensable (le régime de la pensabilité peut varier). C’est la chose elle-même, sa nature. La nature de la chose, c’est la chose. Mais c’est la chose telle qu’au lieu d’être imaginée, représentée, elle est connue, pensée (éventuellement scientifiquement connue, positivement connue). C’est la réponse à la 1ère question. - la réponse à la 2ème question, c’est que la nature de la nature, c’est précisément d’être la pensabilité de la chose. Et donc il n’y a pas lieu d’aller plus loin dans la question de la nature que d’avoir rendu raison de ce que la chose est effectivement pensée, connue. Donc là si on suit notre exemple, c’est exactement l’analyse de Lucrèce (vous trouverez d’autres exemples chez Aristote, différents mais c’est la même démarche formelle). D’un côté la chose, c’est les atomes. Il n’y a pas entre elle et sa nature de différence intrinsèque. La chose n’est pas autre chose que les atomes qui la constituent, 1ère réponse. Mais quand vous pensez la chose comme conglomérat d’atomes, vous la penser vraiment. Vous êtes dans la pensabilité de ce qu’elle est. 2èment, en ce qui concerne les atomes et le vide, ie la nature des choses, vous n’avez strictement besoin que de ce qui autorise cette pensabilité. Vous avez strictement besoin de vérifier qu’avec les atomes et le vide, vous installez la chose dans la pensabilité scientifique (mais il faut un plus : le clinamen est exigible ! il y aura un élément non naturel qui va arrêter la récurrence, mais qui va l’arrêter sur quelque chose qui n’est pas naturel exactement). La nature c’est la chose elle-même, elle n’est rien d’autre qu’un conglomérat d’atomes, il n’y a pas lieu de s’interroger au-delà, il faut expérimenter que ça rend effectivement raison de la chose, que ça en délivre la pensabilité. La question devient dans ce cas de savoir qu’est-ce qui différencie la nature de la chose de son essence ? Si c’est ça la réponse, si c’est : la nature de la chose, c’est la chose telle que ramenée à sa

pensabilité naturelle, alors quelle est la différence entre nature et essence ? C’est notre 2ème question, notre 2ème dialectique. Vous voyez le mouvement : on a dit nature est largement synonyme de être, la nature des choses, c’est ce que la chose est, mais ça introduit ce qu’elle est selon un être naturel effectivement pensable, disposé et dit, et finalement à ce moment là on peut dire que la nature est ce qui est désigné traditionnellement comme l’essence. On entendra essence comme ce qui fait qu’une chose est pensable, en un sens ordinaire mais essentiel. Ce qui fait qu’une chose est pensable c’est cela qui détermine en elle son appartenance au royaume des essences. Alors on pourrait dire : la nature des choses c’est leur essence. Et de fait, le frottement des 2 vocables traverse l’histoire du mot nature, jusque et y comrpis dans l’ensemble des spéculations sur la nature humaine. La question de savoir s’il y a une nature humaine, et la question de savoir s’il y a une essence humaine, ce sont 2 régimes différents mais qui sont connexes. Qu’est-ce qui fait que nature des choses n’est pas exactement l’essence des choses ? (puisque essence est précisément le nom classique donné à la pensabilité de la chose) ? 2ème dialectique : nature et essence. Qu’entend-on par essence ? L’essence est ce qui fait qu’une chose est pensable, ce qui détermine qu’une chose appartient au royaume des essences. On pourrait dire : la nature d’une chose, c’est son essence. On a un frottement de sémantismes connexes. Qu’est-ce qui fait que nature dit autre chose que essence la nature n’est pas réductible à l’essence, ou pas exactement ? C’est compliqué ! Qu’est-ce qui fait que nature dit autre chose, même s’il y a souvent intrication ou substitution ? a) différence La nature, c’est l’essence, mais dans l’inséparation radicale de ce dont elle est l’essence. La nature c’est l’essence mais l’essence donnée dans l’extériorité elle-même, dans l’inséparé absolu de ce dont elle est l’essence. On pourrait dire que bien sûr la nature est l’essence, mais la présentation de l’essence, la présentation de l’essence, c’est l’essence présentée, en tant qu’elle est là, et pas seulement en tant qu’elle est dans le registre de la pensabilité. Si on dit la nature des choses, de l’homme, c’est sûr qu’on désigne ce qu’elle est dans son essence mais on la désigne en tant que le sensible de ce dont il y a essence fait aussi partie de l’être naturel de la chose, en tant qu'elle appartient aussi à nature. La nature, c’est l’exhibition de l’essence. C’est l’essence elle-même, mais telle qu’elle est aussi montrée, exhibée. Ou ? dans la nature. C’est l’essence telle qu’elle est naturellement là. Ou l’essence en tant que extérieure, en tant qu’enveloppant si je puis dire l’extérieur. C’est un des points les plus admirablement traités par Hegel. Par exemple, chez Hegel : la dialectique intérieur/extérieur est essentielle, dans la Phéno et Logique, elle touche à ça, elle touche à la nature et à l’essence. La question que Hegel tente de débrouiller est : quelle est la naturalité de l’essence elle-même ? Quand, à quel moment peut-on dire que l’essence est naturellement présente ? A l’arrière-plan, c’est la discussion du platonisme, de toute doctrine qui séparerait l’essence. On pourrait dire ça : vous avez recours au concept de nature quand vous voulez désigner non pas l’essence, mais l’extériorité de l’essence, sa présence ou son exhibition effective, son caractère radicalement séparé. Encore une fois, vous pouvez soit vous référer à la critique hégélienne de la séparation kantienne. Il faut comprendre le concept : la critique hégélienne de la séparation kantienne, elle touche à la séparation de l’essence. Vous pouvez vous référer aussi à la critique aristotélicienne de Platon, qui est une querelle sur l’inséparation de l’essence. Il est frappant que ce qui entre en jeu dans les 2 cas, dans la critique par Aristote de la théorie platonicienne des Idées, de la critique séparation de l’essence, ou dans la critique hégélienne de la séparation de la chose en soi, il est frappant de voir que ce qui vient sur le devant de la scène, c’est la nature de ce qu’il y a. Comme si la nature à chaque fois désignait l’inséparation de l’essence ellemême. b) transition vers le sensible Dans ce cas, ça veut dire que nature inclut le sensible lui-même. Vous voyez bien que dans ce cas, nature inclut le sensible. Dans un 1er temps, nous avions dit que nature c’est l’essence, c’est que la chose. Mais là nature ce n’est pas l’essence, c’est l’être-là de l’essence, ça inclut l’exhibition de l’essence, ça inclut ce qui se montre. Cette rythmique est essentielle : on se déplace du régime de l’intériorité (la nature est ce que la chose est dans son intériorité, on pourrait presque dire dans son intimité essentielle – c’est sa vraie nature), mais à peine ceci fait, nature est obligée au contraire de reconvoquer l’extériorité, l’apparence naturelle, la nature comme ce qui se donne, comme ce qui est là, ce qui est l’effectivité sensible, ce qui se montre. C’est ça aussi son côté retors. C’est cette oscillation

constitutive entre intériorité et extériorité, entre intimité de l’essence, ce que la chose est vraiment, et ce que la chose montre qu’elle est, aussi bien, et qui fait aussi partie du concept de nature. Sur nature et essence, c’est bien de ça qu’il s’agit. Les lieux spéculatifs nodaux sont la critique de Platon par Aristote, critique de Kant par Hegel, dans les 2 cas, convoquer la nature comme synthèse de l’intériorité et de l’extériorité. C’est là qu’on tente de stabiliser la notion. La nature, c’est à la fois l’essence et la visibilité de l’essence. Donc il va bien falloir dire qu’il y a quelque chose de la nature qui a à voir avec le sensible. Nous disons des choses qui en même temps sont des intuitions courantes. Il va falloir poser la question des liens exacts entre nature et sensible. Quels sont les liens exacts sensible-nature ? 3ème dialectique : nature-sensible. Pour autant que la nature est autre chose que l’essence, c’est parce que elle inclut la monstration sensible de l’essence. On va être conduit finalement à ceci que la nature, c’est ce qu’il y a, c’est ce qu’il y a sensiblement, ce qui nous est donné (c’est son acception la plus courante, la plus triviale, et peut-être la plus difficile), ie ce qui naturellement là. C’est la totalité du sensible. Dans science de la nature, c’est bien comme ça que nature est pris. La question devient : qu’est-ce qui distingue nature de sensible, ou qu’est-ce que nature dit de plus que totalité du sensible ? Il faut s’engager dans cette dialectique qui est que si nature ne se distingue d’essence que par l’être-là sensible, alors qu’est-ce qui fait que l’être là sensible est lui-même autre chose que nature ? Qu’est-ce qui dans le sensible n’est pas nature ? Si nature absorbe le caractère immédiat de l’essence, qu’est-ce qui dans nature n’est pas cela ? C’est une question difficile : qu’est-ce qu’on dit quand on dit que l’apparence sensible est aussi qch comme la donation d’une nature ? C’est intéressant, c’est une parenthèse, de convoquer la classique notion romantique de sentiment de la nature. qu’est-ce que la nature au sens romantique du terme ? La nature dans les poèmes romantiques, ou le sentiment de la nature, ou dans les constructions complexes du romantisme allemande, qu’est-ce que la nature pour Novalis ? Il faut étudier les textes. Mais de façon un peu générale que veulent dire les romantiques lorsqu’ils allèguent la nature, le sentiment la nature, le rapport d’une solitude poétique à la nature ? C’est le sensible. C’est pour ça qu’elle est immédiatement poétisable. La nature, c’est un lac, un vallon, une forêt profonde. La nature a des lieux sensibles. Il est clair que dans la poétisation fondamentale, nature est convoquée comme univers sensible, et qui plus est, l’univers sensible dans son extériorité la plus radicale, voire même, voire même dans son indifférence au point de départ, (l’indifférence de la nature aux avatars et au pathos de la subjectivité.) Le poète vient au bord du lac et le lac ne se souvient plus de rien, dans son indifférence temporelle, ou la maison du berger de Vigny, grands lieux de l’académisme littéraire. Ils désignent quoi ? ils désignent la nature comme expansion sensible dans l’extériorité indifférente. C’est ça qui est désigné et saisi poétiquement. C’est ça qui est désigné et saisi poétiquement. Non seulement nature c’est le sensible, là, mais c’est le sensible comme figure de l’extériorité, je dirais même que c’est le sensible quasiment comme non-essence. Basculons : puisque c’est le sensible dans l’indifférence au sens, l’indifférence à la pensabilité subjective. C’est une sorte de sensible dont la magnificence, que le poème va chanter, est écartée de toute essence. C’est une magnificence neutre, une magnificence dont on va se demander si elle est inhumaine, absolument inhumaine, arrachée à l’essentialité humaine. Donc nature en ce sens là devient bien le sensible dans son extériorité, et l’extériorité est là poussée jusqu’au point de l’oubli de l’essence elle-même. Nous étions partis du fait que la nature, c’était le sensible de l’essence, et nous voyons là le point où l’essence n’est plus identifiable. La nature devient le sensible dans son extériorité indifférente. Le problème à ce moment là est de savoir comment on s’incorpore à cette extériorité. Dialectique de nature et sensible, poussé à son terme, est un pb d’incorporation : comment l’essence va-t-elle revenir à l’extériorité ? C’est ce qui anime la dialectique de la nature et du sensible ? Comment faire revenir l’essence si la nature est l’extériorité indifférente du sensible? Sur ce point, relisez les canons romantiques de la chose, vous verrez que c’est exactement le pb. Par où passe, vue l’extériorité absolument indifférente du sensible, renouer l’essence du destin humain et le sensible… ? - je rappelle que dans la disposition romantique (Olympio, maison du Berger, le Lac), la méthodologie réconciliatrice (c’est bien de la réconciliation qu’il s’agit) va être cherchée du côté d’une théorie de la mémoire (c’est toi qui dors dans l’ombre – ô sacré souvenir !). On est dans une théorie de la mémoire qui va se reporter au sensible à l’époque où il accueillait l’essence, au moment où le sensible était en harmonie aléatoire avec l’essence, et la mémoire veut reconstruire cette réconciliation (pour le concours : travailler le lien entre nature et mémoire). C’est un pb précis : la mémoire n’intervient pas comme « je me

remémore l’époque où j’étais bien sur le foin ». C’est plus noble : la mémoire intervient sur un point précis, qui est méthodologie de réconciliation entre l’essence et l’extériorité sensible, ou de réconciliation finalement de l’homme et de la nature. Techniquement, c’est bien que nature ça désigne à un moment donné le sensible exilé de l’essence, et que mémoire, c’est la voie d’une restitution par rapport à cet exil. Je voudrais vous dire que c’est à mon avis au cœur de l’intuition bergsonienne. De ce point de vue là, je considère que Bergson est un romantique. Fondamentalement, Bergson est un romantique, au sens élevé, en ce sens-là. Au sens où finalement, son problème théorique est de ne pas rester dans l’exil de l’essence, et de montrer comment la totalité sensible (vie) communique avec le spirituel, dans un dispositif qui est celui de la mémoire absolue, qui est celui de la mémoire absolue. Il y a une mémoire absolue où en un certain sens le spirituel et le matériel sont indivis. C’est la thèse des romantiques français, qui indiquent que la mémoire est ce qui permet de réconcilier l’essence subjective et l’indifférence sensible. C’est le sentiment de la nature. Le sentiment de la nature c’est un processus, c’est pas un état. Dans le romantisme français, singulier sur ce point, c’est le processus par lequel partant de l’indiff et de l’extériorité sensible, on propose un renouement ou une réconciliation dont la clé est la mémoire. C’est pour indiquer l’espace de la dialectique nature et sensible : si on pousse à son terme, c’est la question de l’extériorité. Le problème est le suivant : si nature est l’extériorité du sensible, poussée éventuellement jusqu’à la séparation d’avec l’essence (la thèse ou la figure de la nature indifférente), qui n’est que la magnificence sensible, alors quel en est le principe d’intelligibilité ? ou est-ce purement du non sens ? - jusque à présent, nous disions : l’intelligibilité de nature vient de ce que en réalité c’est l’essence, l’essence inséparée ou l’essence exhibée, mais c’est l’essence. Mais si on pousse la nécessité pour la nature d’être le sensible jusqu’à extériorité indiff, et-ce que nature reste qch d’intelligible ? quel est le principe d’intelligibilité de nature prise ainsi, ie séparée de l’essence ? Dans cette dialectique, nature et sensibilité, vous allez avoir la question de l’intelligibilité de la nature, éventuellement poussée jusqu’à la question de son non-sens pur et simple. Là encore nous avons retournement : nous suivions la voie que nature était ce à partir de quoi on donnait sens et connaissance aux choses, mais nature peut aussi vouloir dire l’extériorité sensible qui la pousse à la séparation d’avec l’essence jusqu’à la rendre intelligible. Vous allez avoir la possibilité que la nature désigne une extériorité opaque, une extériorité sans principe d’intelligibilité immanent. Ceci peut être poussé jusqu’à une vision noire, comme signifiant la cruauté et la mort. Ce qu’on pourrait appeler la thèse hyperromantique : là, l’exil est irréparable, et la nature finalement a son emblème dans la prédation, dans la cruauté. L’impératif naturel est un impératif de cruauté. C’est une thèse que Sade soutient avec brio et grandeur : il y a une canonique naturelle de la cruauté. On peut s’appuyer sur bien des évidences empiriques, ce n’est pas une thèse diabolique ou originairement perverse. Si vous prenez la nature dans l’extériorité de l’essence, comme un dispositif neutre et anonyme, ce qu’elle distribue le plus universellement, c’est la mort (c’est ce dont nous sommes assurés). si vous isolez cette vision des choses, la nature, par un retournement de signification, nature devient synonyme de mort, de souffrance, et de cruauté, et d’absurdité, d’absurdité cruelle. - et pour autant qu’elle a un sens, dans cette extériorisation menée à son terme, ce sens doit être introduit. Il n’est pas délivré par la nature soi. Si la nature est poussée jusqu’à l’extériorité indifférente, elle n’a pas de principe d’intelligibilité en elle-même, car elle est séparée de l’essence. Ou bien est une absurdité dont l’emblme est la mort, ou bien elle a un sens, mais le sens est introduit de l’extérieur, il vient du dehors. Il va falloir relever l’extériorité naturelle que par autre chose qu’elle-même. Il va falloir que le sens advienne du dehors, ou alors nous serons dans la figure de la nature comme mortification cruelle. C’est pourquoi là, se situe un des branchements de la nature sur la question de la transcendance du sens. c’est toujours quand vous êtes dans une pbtique de la nature comme la déréliction dépourvue de sens, que la seule ressource du sens est la transcendance elle-même (vous reconnaîtrez la méthodologie pascalienne). L’antinomie véritable sur cette question, c’est Sade et Pascal. C’est un couple bizarre mais c’est un couple réel. Car en un certain sens, Sade et Pascal ont le même point de départ, à savoir que ce n’est en tout cas pas dans la nature que nous allons trouver l’essence bonne de l’humanité. Pascal et Sade sont d’accord sur ce point. Les descriptions par Pascal de la nature la présentent comme une extériorité indifférence sensible. L’homme n’est rien. dans ce cas, il se peut que celui qui a raison soient le libertin. Le libertin a peut-être raison, n’ayant pas d’autre maxime que le jouir, puisque de toute façon c’est sinistre et indifférent, puisque la totalité ne nous dit rien. Conséquence que Sade va en tirer sous la impératif : être conforme à la nature c’est être dans la cruauté et la mort dans le jouir. Pascal tire une

conclusion opposé, mais comment ? par un saut dans la transcendance qui dispose Dieu comme sens. C’est la même chose, avec un saut, une discontinuité de la nature à Dieu, de la nature à Dieu la conséquence n’est pas bonne. Vous ne pouvez passer à Dieu que parce qu’il y a les Ecritures. La nature est réellement l’extériorité indifférente. Si vous ne faites pas ce saut dans la transcendance, vous être livré à l’indifférence de la nature, et ce qu’il y a de mieux à faire dans ce cas c’est d’être vous-même indifférent. Vous devez être dans un impératif de la jouissance sans limites comme impératif. Le point commun est repérable : c’est nature est déployée jusqu’à l’extériorité indifférente. Donc là il y a le nihilisme de la jouissance d’un côté, qui est comme un impératif naturel (mais voyez, un impératif de l’inintelligible, un impératif naturel de l’indifférence : être aussi indifférent aux autres que la nature l’est à nous-mêmes), soit rebondissement vers la transcendance radicale (avec le pari pour l’infinité divine, étayé par un argumentaire qui est typiquement un argumentaire non-naturel). C’est en point très remarquable : en dehors de la nature, pour Pascal qu’est-ce qu’il y a ? En dehors de la nature, il y a le Livre. L’apologétique pascalienne n’est pas appuyée sur la nature, mais elle est appuyée sur le livre : il montre que les prophéties, le dispositif de la rédemption, donnent une intelligibilité qui est tracée, écrite. Cette partie négligée des Pensées et fondamentale. Le livre c’est quoi ? c’est exemplairement ce qui n’est pas naturel. C’est un point sur lequel on reviendra souvent : on s’appuie sur le non naturel, et c’est un livre. Le Livre est une trace d’intelligibilité. Or, le livre, c’est ce qui n’est pas la nature. Dans ces théories de la nature comme extériorité, on s’appuie sur le non-naturel, et le non naturel en dernier ressort c’est un livre, toujours, ouvrant la voie à l’idée que la seule chose non naturelle c’est le langage. C’est une intuition pascalienne centrale ce qui nous sauve de la déréliction naturelle, c’est le livre. Avec le livre nous pouvons déployer un principe d’intelligibilité. Sade : c’est celui pour qui il n’y a pas de Livre. Il ne croit pas au livre, bien qu’il n’est fait que ça toute sa vie. Il a écrit le livre noir de la jouissance, car il n’y avait pas le livre de Dieu. Mais nature dans les 2 cas c’est la même chose : c’est ce qui n’a rien à voir avec l’homme. Ce qui le laisse par csqt soit en proie à sa naturalité obscène, soit en proie au message divin. Dans les 2 cas, cependant, va se poser le problème de savoir comment ce dispositif se rassemble. C’est une autre figure de la question de la nature. Je m’explique. Revenons sur nos 3 exemples transitoire, au point de l’extériorité de la nature : Il y a une thèse selon laquelle la nature désigne l’indifférence absolue à l’essence humaine - il y a la poésie romantique ou Bergson qui propose une réconciliation par la mémoire, - il y a Pascal qui contrapose à cela la certitude du Livre et son tracé signifiant, qui permet de parier pour dieu - et Sade qui s’installe dans l’impératif nihiliste de la jouissance. Nature désigne la registration du sensible indifférent pour une non-indifférence. Le pb est que ce sensible indifférent n’est expérimenté comme indifférence que pour une non indifférence. Dire la nature c’est une extériorité indifférent, ça suppose que vous fixiez ce pour quoi ou ce pour qui c’est indifférent : l’attribution à l’extériorité naturelle du pouvoir d’indifférence naturelle ou de cruauté suppose quelque chose qui soit ce pour quoi, ou ce pour qui il y a indifférence ou cruauté. Autrement dit, si loin que vous poussiez la doctrine de la nature comme extériorié sensible, si vous en tirez des csq pasalienne sadienne ou romantique, quelle que soit cette solution ou cette inscription, vous désignez un autre pôle que cette extériorité (implicitement ou explicitement). Vous désignez celui pour qui il y a la question de l’extériorité naturelle. C’est un point qui lui aussi est adhérent aux dialectiques complexes de la nature, qui est : si la nature est séparée de l’essence - disons le techniquement comme ça - si elle est le sensible mais dans sa séparation ultime d’avec l’essence, dans une indifférence à toute signification, l’existence de la question de cette indifférence est autre chose que cette indifférence elle-même, évidemment. Autrement dit, le prédicat d’indifférence suppose le pôle subjectif de cette indifférence d’une façon ou d’une autre, si non il n’y aurait rien que cette indifférence. Il ne pourrait pas y avoir le pathos de l’indifférence. Il y a un pathos de l’indifférence naturelle et pas simplement le jeu indifférent de l’indifférence. Il y a une question, un problème. Vous avez une dramaturgie. Nature désigne à la fois au fond l’indifférence du sensible extérieur, mais aussi la possibilité de questionner cette indifférence ellemême. Et dans les 3 voies. Même Sade fait de longues argumentations sur le caractère indifférent et cruel de la nature, de façon à ce que qln en tire les conséquences ! L’argumentaire est polémique et axiomatique : on doit tirer des csq de l’indifférence de la nature. → le problème surgit aussitôt de savoir qu’est-ce qui est en exception de cette indifférence, de tls que cette indifférence soit pour lui une question ? Si vous voulez pour matérialiser un peu ce cheminement, si on reprend l’exemple de Pascal, c’est le moment où Pascal doit désigner la misère de l’homme mais aussi sa grandeur. Le moment où il ne peut

pas être simplement dans l’élément de la misère. Qu’est-ce que la misère de l’homme sans Dieu ? la misère est l’indifférence absolue de la nature. C’est les 2 infinis, lisez le texte, c’est un texte admirable sur la déréliction du sujet humain au regard de l’extériorité l’indifférente, il est comme un point ou une indiscernabilité essentielle dans l’indifférence naturelle, dans l’indifférence de l’univers. C’est ça la misère de l’homme. Mais s’il n’y avait que la misère, il ne serait pas pour l’homme question de sa misère. L’homme est un roseau le plus faible de la nature mais un roseau pensant. Ça veut dire quoi ? il est minable, sauf qu’il porte la question de cette indifférence. Pensant quoi ? qu’il n’est qu’un roseau. La misère est l’énoncé de la misère, mais l’énoncé de la misère est déjà en excès sur la misère elle-même. De même, dans la poésie romantique, le point du souvenir est en excès sur l’indifférence de la nature. La possibilité de reconstruire la nature du point de la mémoire excède l’indifférence naturelle. Et pour Sade, l’humanité va se distinguer entre maîtres et victimes, entre seigneurs et victimes (du point de la jouissance). Le seigneur n’étant rien d’autre que celui qui sait que la nature n’est qu’indifférence et cruauté. C’est ça qui le constitue comme un aristocrate de la jouissance. La victime est celle qui croit que la nature est bonne, elle croit à la bonté de la nature (Justine, persuadée qu’il y a de la bonté quelque part : elle croit que les gens qu’elle rencontre sont bons, mais pas du tout ! ce fabliau de Justine se transportant incessamment de sauveteur en sauveteur est l’histoire de celui qui pense que la nature est bonne. Justine, c’est une sorte de rousseauisme décalé. Elle croit à la bonté humaine mais elle tombe sur des gens qui savent que la nature n’est qu’indifférence et cruauté). Ceci instaure un régime d’exception. L’indifférence égalitaire de la nature détermine un régime d’exception. Le poème de la mémoire chez les romantiques, l’élément de grandeur humaine chez Pascal, le seigneur de la jouissance chez Sade. Il y a donc un régime de l’exception, mais alors : en quel sens alors nature est-elle totalité du sensible, s’il existe un point de pliure ou d’exception ? que devient l’énoncé selon lequel la nature voulait dire la totalité indifférente du sensible ? nous devons nous poser la question, cette fois, qui est notre 4ème dialectique : nature et totalité. 4ème dialectique : nature-totalité. La nature est-elle identifiable, c’est un de ces sens, au grand tout sensible ? la nature comme la grande totalité sensible ? Et quels sont les rapports entre nature et Tout. Nature veut-il dire autre chose que totalité, puisqu’il y a semble-t-il un point d’exception ? 1ère difficulté : si vous pensez la nature comme la totalité absolue de ce qu’il y a, c’est son sens de cosmos, ou éventuellement d’univers, la nature à ce moment là s’objective comme totalité. Mais si vous la pensez comme totalité, vous allez devoir réduire l’exception dont on parlait tout à l’heure, l’être pour qui il y a la question de cette indifférence ou de cette extériorité. Vous voyez : nature ne peut être que totalité, le grand pan, le cosmos, l’univers, peut-être même ce que Heidegger appelle l’étant en totalité (c’est là qu’il y a le secret perdu de la nature), c’est le sens courant du terme, la nature = le tout, que devient dans ce cas l’exception, l’exception de celui pour qui il y a la question de l’extériorité indifférente du sensible ? 2ème difficulté : peut-on penser le tout sans lui donner un sens ? Est-il simplement possible de considérer que l’extériorité sensible indifférente forme un tout, est un tout, est une totalité ? La dialectique de la nature et de la totalité va être structurée par ces 2 questions. C’est peut-être un des problèmes les plus canoniques, c’est l’antinomie cosmosologique dans la CRP, c’est nature pris comme ensemble des phénomènes, au sens de la totalité. C’est tout ce qui résonne depuis les cosmologies antiques, avec sur ce point un texte capital par les csq qu’il a eu, qui est le Timée de Platon. Nous commenterons je pense le paragraphe final du Timée, où Platon prononce l’éloge de la totalité cosmique. Nature prend la forme de la totalité cosmique comme l’ordonnancement universel du sensible. Mais il y a 2 questions qui ont travers la nature comme totalité : que je disais : 1ère question : que devient l’exception de la question ? qui apparaissait si présente chez Sade, Pascal, les romantiques. Comment l’exception rentre-t-elle dans le tout ? est-ce qu’elle se laisse totaliser ? C’est un débat là aussi qui circule entre Kant et Hegel de façon très vigoureuse, qui deviendra : y a-t-il un statut naturel de la liberté, qch de ce genre. La totalité est-elle pensable ? Est-ce qu’un tout peut-il contenir sa question ? est-ce qu’un tout peut contenir la question du tout ? Comment un tout peut totaliser sa propre question ? Comment la nature comme tout peut-elle être intérieurement représentée ?

Allégoriquement, ça donne la considérable tradition, très questionnante à la renaissance, du microcosme. La question du cosmos donne lieu à la question du microcosmos. Elle touche à la réflexion intérieure de la totalité naturelle : est-elle représentée à l’intérieur d’elle-même ? A-t-elle un sens ? C’est la métonymie cosmique, ie l’inclusion dans le cosmos d’une image du cosmos lui-même. ça revient dans le fil des dialectiques de la nature à se demander, dès lors que la nature est la totalité du sensible, que devient son témoin. Il n’y a Nature que quand il y a un témoin de la nature (je prends témoin comme mot neutre, c’est plus vaste ou plus indistinct que sujet, représentation, conscience etc …). On ne peut pas se représenter la nature comme totalité sans se poser aussitôt la question de son témoin. Qui témoigne ? Si la nature est totalité, où est le témoin ? S’il n’y a pas de témoin, il n’y a pas de raison de dire nature plutôt que être. Alors en réalité, vous pouvez dire être ou essence. 2ème question : d’où la totalité naturelle tire-t-elle sa puissance de faire Tout ? Est-ce que ceci ne suppose pas une signification immanente, une auto-production du sens qui totalise l’effectivité naturelle ? Ou, pour le dire plus simplement : peut-on maintenir la thèse de l’indifférence du sensible, tout en déclarant qu’il fait tout, que c’est une totalité ? Est-ce que dès on déclare « tout », on n’est pas contraint de lui attribuer un sens immanent ? Est-ce que ça peut être totalité naturelle, est-ce que si la nature c’est un tout, on n’est pas contraint de lui attribuer un sens immanent ? Est-ce que vous pouvez déclarer que ça peut être totalement indifférent et totalisable ? C’est la question du cosmos en son sens originellement grec. Pour les grecs, on le voit dans le Timée, que si vous faites tout de l’univers, vous lui attribuez une intelligibilité immanente. La totalisation et la donation de sens, c’est un même mouvement de la pensée. Les vrais matérialistes ne totalisent pas (ce n’est pas un hasard ! il n’y a pas un tout chez Lucrèce, il y a un multiplicité de mondes avec des intervalles mystérieux – il y met des dieux. Mais il n’y a pas de totalisation. C’est une point important : si nature signifie totalité, est-ce que ça ne veut pas dire nécessairement que nature est distribution d’un sens, distribution immanente d’un sens. C’est la question cosmologique proprement dit, la question du cosmos. Et finalement les 2 questions vont être liées (la question de la totalité signifiante et la question de l’exception) parce que la solution spéculative typique de ce problème (que vous trouvez dans l’Évolution créatrice, et chez Hegel) : c’est parce que vous montrez que la totalité est le déploiement d’un sens que l’homme peut y être placé. La question de la totalité peut être placé dans la totalité. D’où vient qu’il y ait une question de la nature dans la nature, d’un côté ? et comment la nature peut faire tout ? les 2 questions vont fusionner. Il va y avoir une auto-constitution de la totalité naturelle, qui va inclure le moment de sa propre question, sous une forme ou sous une autre. C’est pour vous dire à quel point cette question nature et totalité véhicule sur ses bords le problème de l’exception d’un côté (qu’est-ce qui fait exception à la nature ? peut-il y avoir exception ? L’exception hante le problème de la nature : c’est le non-naturel). Et de l’autre côté la question sens : comment s’effectue une donation, une construction de sens ? On a fait 4 dialectiques, il en reste 4, la semaine prochaine. 26.10.2000 Ce que j’avais fait la dernière fois, c’était une sorte de présentation, de commencement de présentation de ce qu’on peut appeler les connexions dialectiques du concept de nature. Comment intervient-il, étant donné que c’est un concept dont la signification est capable de se retourner entièrement selon les concepts dialectiques auxquels il se trouve enchaîné. On avait insisté sur son caractère retors. Il est nécessaire de présenter une sorte d’ordre pbtique qui vous permettra de traiter de ce concept et de ses connexions dialectiques en prenant garde de traiter du site de penser où il va se mouvoir, suivant le système dans lequel il se trouve pris, ou le site de pensée où nature va se mouvoir : la science, l’idéalisme etc… : il y a une série de nuances de pensées extrêmement variables rendant difficile le maniement de ce concept. Pour récapituler tout ça encore mieux, je vous ai fait un dessin, que je vous donne. Une sorte d’escargot. Avant de reprendre, quel est le mode d’usage de ce schéma ? Il s’agit de montrer ou de faire apparaître des occurrences du mot nature qui d’une certaine façon interviennent de telle sorte qu’elles assurent plus ou moins le passage ou le transit d’une notion à une autre. C’est l’usage général. C’est pour cela que le mot nature est répété. A chaque fois la signification du mot nature est modifiée selon le parcours. Et à chaque fois, le contexte de définition du mot nature se situe entre les 2 concepts qui constituent le bord de la trajectoire.

A titre d’exemple, je vous le rappelle, que signifie le segment être-nature-essence ? Il signifie qu’on peut partir d’une sorte d’identité inaugurale entre nature et être. La nature des chose, au sens de Lucrèce, ce que j’avais proposé comme exemple. La nature de la chose, c’est ce qu’elle est vraiment. Par nature, on a l’idée de vérité d’être de la chose considérée, dont on appréhende la nature. Le pb devient immédiatement dans ce cas : quel est le rapport entre la nature de la chose et l’essence, puisque l’essence est chargée de désigner ce qu’elle est en vérité, ce qu’elle est vraiment ou désignant ce qu’il y a d’authentiquement intelligible. On va prendre nature à la fois en amont et en aval. Amont : définition provisoire ou l’identité provisoire à laquelle on l’assigne (par nature de la chose on entend l’être véritable, l’être natif, l’être originaire), puis en aval on aune nouvelle possibilité définitionnelle problématique (dans ce cas y a-t-il réellement une distinction et quelle est-elle entre la nature de la chose et son essence, qui affirmerait vraiment ou authentiquement ce qu’elle est, ou ce qui en elle est intelligible ?). Jae rppelle les 1ère étapes - 1er rappel : nature peut être considéré comme un transit entre être et essence, si on prend nature au sens donné dans l’expression "nature des choses" de Lucrèce. C’était le 1e’ contexte. - 2ème rappel : si on prend nature comme signifiant ou comme désignant l’essence de la chose, si la nature c’est l’essence, alors dans un mouvement d’extériorisation (et plus seulement son être), alors nature c’est la présentation effective de l’essence de la chose. Nature peut être pris comme essence mais voudra dire plutôt ce que l’essence est capable d’être dans son exhibition effective, dans son effectivité, dans sa présentation. A ce moment là, nature va se tourner vers sensible comme désignant l’extériorité de l’essence. Vous voyez le rythme c’est un rythme dont on peut dire que centralement c’est le rythme intériorité /extériorité, c’est ponctuation pertinente. Parenthèse : c’est près de l’usage ordinaire. Nature signifie d’un côté l’extériorité, je contemple la nature, ce qui est là, le donné, le sentiment naturel, le bon naturel, environnement naturel. La nature c’est cette extériorité qui m’accueille en elle, qui me dispose en elle. Et puis nature c’est aussi l’intériorité maximale : ma nature, l’intimité de ma nature, la nature humaine, ce que je suis vraiment naturellement. Vous basculez du côté de ce qu’il y a de plus proche, intime ou d’essentiel. C’est un point important qui permet d’agencer la plupart des questions sur la nature : il y a une ambivalence constitutive de ce concept. Nous la ressaisirons dans des contextes précis. Il y a une ambivalence qui est le mieux nommée par la dialectique intériorité / extériorité. Nature, c’est simultanément ce qu’il y a de plus intérieurement constituant de la chose, ce qui est le plus proche de son être et de son essence, et c’est ainsi le spectacle de l’extériorité, avec l’idée de sensible. Nature comme dans l’expression nature humaine est l’essence invariable, et dans la nature au sens de sentiment ou gout, c’est le spectacle vivant, la donation spectaculaire du il y a. Ce sont ces 2 choses. L’escargot est une possibilité détaillée des possibilités de ce rythme : il y aura une tension vers l’intérieur ou tension vers extériorité qui va déployer les significations dialectiques du mot nature. La 1ère étape je n’y reviens pas. la 2nde c’est partant de l’idée que la nature est l’essence, la chose dans son être authentique, on va se demander ce qui différencie nature de essence, selon le même protocole dialectique. quelle est la différence spécifique ? La nature, pour autant qu’elle désigne l’essence, le fait dans la figure de son déploiement, extériorisation. La nature c’est l’essence mais dans son effectivité. On va retourner la chose dans son dehors. Dans ce cas là, c’est une autre polarité c’est le sensible. La nature, c’est le sensible de l’essence, son propose une formule tendue. Cette 2ème dialectique va tendre le mot nature entre l’intériorité intelligible maximale et l’extériorité sensible maximale aussi. Il va en résulter que si vous voulez appréhender ce qui dans la nature est autre chose que l’essence, c’est du côté de l’extériorité sensible qu’il faut aller chercher. On pousse au bout le protocole d’extériorisation. C’est vrai que la nature de la chose c’est en un certain sens son essence. Si c’est l’exhibition de l’essence, ce qui fonde le mot nature, c’est l’extériorité sensible. D’où l’identification canonique entre nature et sensible, si on pousse ce thème de l’identification jusqu’au bout, la nature devenant l’extériorité comme telle, l’extériorité sensible comme telle. A chaque fois on essaie d’aller jusqu’au bout du protocole antinomique, qui définit toujours nature dans une lisière entre intériorité et extériorité. Nous avons dit : la nature c’est le il y a comme l’extériorité. Si on radicalise cette thèse, la nature c’est l’indifférence de l’extériorité, l’extériorité comme extériorité, l’extériorité indifférente, le sensible, tel qu’il n’a pas d’égard à l’intériorité, le sensible tel qu’il est indifférent à l’intériorité. On avait donné un certain nombre d’exemples : - ça veut être Pascal - ça peut être dans la version noire la position de Sade

- c’est aussi une position romantisme, ou un certain romantisme (qui confronte la douleur subjective à l’indifférence de l’extériorité naturelle). Je voudrais récapituler les quelques lectures que ça peut introduire : - pour le 1er mouvement, j’ai suggéré quand même d’aller voir dans Lucrèce, et dans Lucrèce peut-être plus généralement dans cette inspiration matérialiste qui prend son point de départ dans l’idée que l’être est naturel. Que le mot nature est le mot le plus approprié à désigner l’être comme tel. La nature des choses va être cherchée du côté en effet de l’identité naturelle. Vous pouvez regarder dans Lucrèce, et dans la dialectique complète, telle qu’il la propose, de ce que signifie nature des choses : tout le pb dans le titre est de se demander quelle différence il y a entre les chose / la nature des choses. Quelle différence y a-t-il entre parler des atomes et du vide et parler des objets naturels composés d’atomes. C’est probablement l’illustration la plus frappante de cette première dialectique. - dans la 2ème dialectique, je vous avais proposé 3 références. Je les précise un tout petit peu. a) Pascal Pascal : ce sont les textes sur au fond l’indifférence primordiale du il y a naturel à la réalité humaine (donc les textes sur les 2 infinis). Le silence éternel des espaces infinis m’effraie etc… les thèses qui désignent, autour du concept d’infini, qui désignent l’extériorité absolue de l’être là naturel à l’intériorité de la question humaine. Vous pouvez revisitez ces textes fameux en tentant d’y faire résonner l’ambivalence dialectique du mot nature. b) Sade En ce qui concerne la position de Sade, c’est une position intéressante car c’est une position maximale. Le texte canonique est la déclaration de Dolmancé dans la Philosophie dans le Boudoir. Français encore un effort pour être républicain. C’est un texte référentiel, un texte carrefour, un texte dont l’influence sur la modernité est considérable. C’est quasiment une dissertation séparable, évidemment située entre des épisodes de combinaisons corporelles variées. Elle est le discours de la pose. C’est très singulier, c’est vraiment une dissertation d’agrégation : c’est un texte rhétorique, construit, argumentatif. Il est frappant qu’il n’induise pas la froideur qu’il devrait produire. Vous pouvez le lire dans l’optique que je vous dis : quel est concept de nature est à l’œuvre chez Sade ? C’est central : quelle figure de l’énergie est donnée naturellement ? Avec cet impératif singulier, qui au fond qu’il s’agit d’être aussi indifférent à l’autre que la nature nous est indifférente. Finalement, il y a bien une maxime qui se tire de la nature, qui est une maxime de jouissance, mais une maxime de jouissance dont le secret est d’être indifférente. C’est la reconnaissance de l’extériorité du sensible au sens où le liberté est celui qui est armé de cette indifférence, qui a au fond le même calme indifférent que la nature tout entière, dans l’œuvre de la jouissance. Il sera dans l’œuvre de jouissance, mais l’essence naturelle de ça, c’est finalement l’indifférence. C’est un point qui résonne avec l’épicurisme mais comme à l’envers : il y a une apathie sadienne, qui est une apathie naturelle, être indifférent à la souffrance de l’autre, prise comme témoin, indifférence à la déréliction de l’autre, à son supplice etc… c’est la résonance subjective d’une indifférence plus vaste qui est l’indifférence de la nature tout entière. Et donc il s’agit bien d’être naturel, mais comme Sade le remarque, être naturel est très difficile ! C’est ça le pb. Cette apathie du seigneur de la jouissance est très rare, elle est difficile à obtenir, il n’y a qu’une aristocratie de la jouissance qui en est capable. Au fond, on pourrait dire, c’est le cœur de la difficulté que rencontre Sade, il y a une difficulté particulière qui est la suivante : tout se passe comme s’il n’était pas naturel de se comporter selon la maxime de la nature. C’est un point qu’on retrouve souvent. Il y a une maxime naturelle qui est finalement une maxime de sang froid et d’indifférence. Bien sûr, il y a le désir, qui est une donnée naturelle. Mais ce qui fait le sadien, ce n’est pas le désir comme tel, c’est la capacité à traiter le désir dans l’élément d’indifférence à l’autre. C’est cet élément d’indifférence qui est naturel. C’est lui qui a comme maxime l’indifférence de la nature. La complexité ultime, c’est que ça semble très difficile en réalité d’obéir à la maxime naturelle. Seule une aristocratie de seigneurs en est capable, la plupart des gens ordinaire sont dans le pathos. Ils passent leur temps à gémir, à pleurer, à éprouver de la pitié pour les autres, à être sensible à leurs souffrances etc… ce qui est absolument antinaturel. Finalement il y a un impératif de la nature auquel il est non-naturel de se soumettre. C’est pourquoi nous avons affaire chez Sade à une éthique de la jouissance indifférente, et c’est une éthique aristocratique. C’est bien pour ça que dans un texte très controversé et difficile, mais tout de même intéressant, Lacan a tenté une comparaison entre Sade et Kant. C’est une comparaison dont le point de convergence est le paradoxe de l’impératif. Comment se fait-il que l’impératif soit un fait (fait de la raison chez Kant,

un fait de la nature chez Sade – c’est opposé mais c’est formellement symétrique), et que cependant son effectivité soit absolument improbable ? De même que Kant va dire qu’il se peut qu’il n’y ait jamais eu d’acte effectivement moral. C’est d’une improbabilité très grande que l’effectivité de l’impératif. Que l’impératif soit réellement de part en part la maxime d’une action effective est improbable. De l’autre côté, il y a aussi une improbabilité très grande à ce qui puisse exister le seigneur de la jouissance sadien - c’est une fiction, c’est au lieu du livre, c’est une fiction, et la maxime est naturelle. Cette symétrie tourne bien autour du mot nature, mais de façon inversée. Du côté de Kant, qu’est-ce qui se passe ? Au fond on pourrait dire, très grossièrement : l’improbabilité de l’effectivité de l’impératif catégorique est l’impro d’un acte dont la maxime soit réellement suprasensible. Identifions sensible et nature (ce qui en toute rigueur est inexact) on peut avancer la formule : l’improbabilité d’un acte moral est l’improbabilité du non naturel. Donc improbabilité d’un acte non pathologique, autonome. Symétriquement, chez Sade, improbabilité de l’impératif naturel. C’est improbable tout autant. D’où l’idée que l’improbabilité est celle de l’impératif comme tel, qu’il soit ou contre naturel, qu’il soit sensible ou supra-sensible, on aboutit dans tous les cas à une aporie, à une difficulté. Ça nous ouvrirait à qch qui serait la question qui serait nature et impératif. C’est une question intrinsèque que la question du rapport entre nature et impératif. Si nous n’avions que le dispositif kantien, nous pourrions dire : nature et impératif, c’est une antinomie constituante, puisque l’impératif est en effet référé au supra-sensible. Il y a une schize entre raison théorique et raison pratique, c’est le grand couteau kantien qui sépare : l’impératif est originairement séparé du naturel. Le contre-exemple de Sade semble dire que c’est un tout petit plus compliqué. Si on tente de bâtir un impératif de la nature (ce qui est exactement la volonté sadienne), transformer l’impulsion naturelle elle-même en impératif, transformer le pathologique kantien en impératif (faire impératif de son désir, transformer la vocation à la jouissance en impératif pour organiser l’ensemble de son existence). C’est également improbable. A ce compte, il n’y a pas plus de libertins que de saints, et même encore peut-être moins. On peut faire l’hypothèse kantienne de la disjonction entre impératif catégorique et impératif hypothétique, entre nature et impératif, et on aboutit à l’improbabilité. Il n’y ait pas sûr qu’il y ait jamais eu un seul acte moral. On peut faire l’hypothèse de Sade de la conjonction absolue, la nature est la matrice de l’impératif, et on aboutit aussi à une improbabilité. c) le romantisme français Du point de vue du 3ème exemple : - Tristesse d’Olympio de Hugo - Le Lac de Lamartine - Souvenirs de Musset - La Maison du Berger de Vigny. C’est du solide, mais c’est du bon matériau. En plus c’est tellement démodé que ça redevient piquant. Si vous prenez ce corpus, topos rhétoriques du romantisme français, vous avez une position d’indifférence de la nature. C’est bien l’extériorité sensible indifférente, indifférente en un sens particulier. Indifférente au sens où elle a puissance d’accueillir le bonheur, puissance d’être homogène à l’amour, c’est de ça qu’il s’agit, elle a cette puissance d’accueil et de symbolisation de l’amour, mais elle a aussi puissance de continuer à être sans traces de cela, sans être en quelque manière marquée elle-même par ce qu’elle a accueilli. On est très proche de la nature comme indifférence extérieure à l’intériorité, en l’occurrence intériorité de l’amour. Puis après va se mettre en mouvement une dialectique de réconciliation entre intériorité et extériorité, dont la clé va être le souvenir, dont la clé va être une certaine théorie de la mémoire. Là nous aurions nature et mémoire, ou nature, mémoire et salut, ou réconciliation, ou rédemption presque. L’un de vous me faisait remarquer la dernière fois que somme toute, un horizon possible de cela est la théorie platonicienne de la réminiscence. Il y a un néoplatonisme romantique. Là, ce qui entre en scène, sous le nom de mémoire ou souvenir comme autre rapport à la nature, certainement peut se connecter ou se cheviller à la fonction très particulière de la réminiscence chez Platon (ni dans un cas ni dans l’autre ce n’est pas un souvenir au sens strictement psychologique, la mémoire a une fonction presque ontologique, c’est une fonction ontologique, la mémoire c’est ce qui intériorise la nature, ce qui garde l’extériorité comme intériorité). Nature et mémoire, c’est un thème à lui tout seul, dont finalement le penseur est Bergson. A la fin des fins, si on pousse jusqu’au bout le thème de la co-appartenance de la mémoire et de la figure vitale de la nature, on va trouver Bergson. Bergson est celui qui écrit Matière et Mémoire, c’est bien ce qui nomme la conception de Bergson sur la nature, sur l’évolution créatrice, ie sur la nature comme vie.

Donc une gamme de lectures possibles sur ces dialectiques. - 4ème rappel : si la nature c’est l’extériorité indifférente du sensible, quel est en fin de compte son espace d’existence ? si ce n’est pas l’intériorité ou la conscience, quel est le mode d’existence de cette extériorité naturelle, son calibrage ? C’est le Tout, l’extériorité sensible, c’est la donation de la totalité. Pascal, Sade, romantisme conçoivent la nature comme la totalité, c’est ce à quoi nous avons affaire dans l’extériorité quelconque. C’est tout ce qui se donne. C’est la donation comme donation totale. C’est une signification très classique du mot nature, c’est ce qu’on peut appeler la signification cosmique de la nature. La nature, c’est la totalité cosmique. La nature, c’est l’Univers en tant qu’il se déploie et se donne comme totalité. Et donc on va pouvoir dire : la nature, c’est la donation sensible, c’est la donation sensible en tant que totalité. Et donc nous disons que c’est le site, c’est le site absolu du il y a. C’est la belle totalité, au sens antique, c’est la belle totalité cosmique. Celle-là même dont il est question dans le Timée de Platon (ponctuons la lecture : voyez cette espèce d’exaltation finale dans le Timée, qui est le dernier paragraphe, où Socrate dit nous avons fait là, décrit là, montré là quelque chose de superbe, sur un ton assez exalté : on sent nature, cosmos comme la belle totalité qu’on est fier d’avoir reconstruit, d’avoir exhibé la nature, d’avoir reconstruit son principe d’intelligibilité). Parenthèse : c’est intéressant cette fin du Timée, car c’est exactement le contraire des conclusions aporétiques d’un certain nombre des dialogues de Platon. Il y a des dialogues dont la conclusion n’est pas du tout aporétique mais expressément affirmative. Il y en a en tout cas 2 où c’est très frappant : le Sophiste et le Timée ne sont pas aporétiques, mais affirmatifs. Le Sophiste se proposer de définir le sophiste. Il termine avec une définition explicite et détaillée du sophiste. Le Sophiste est un dialogue qui a réussi. L’enjeu était d’identifier le sophiste, on a réussi. Il a fallu beaucoup ramer : poser le non être, commettre un parricide à l’égard de Parménide, la définition du pécheur à la ligne, c’est un caravansérail inouï. C’est peut-être le texte de Platon que je préfère. Vous êtes dans l’impureté de la philosophie, dans l’ironie absolue (pêcheur à la ligne, gravité subjective extrême pour parricide Parménide, dans le raffinement suprême au niveau de la théorie du non-être, des 5 genres etc… et dans ce sentiment étrange et qui est une sorte de joie particulière qui est le sentiment de victoire vous avez résolu le problème, le sophiste on sait ce que sait. On lui a réglé son compte, on lui a réglé son compte conceptuel, puisque on sait qui il est. Ça entraîne des conséquences un peu noires, plus tard, dans les Lois : le caractère périlleux des victoires, c’est leur usage. On est parvenu au prix d’un effort extrême à l’identifié. Et puisqu’on a identifié, on va pouvoir l’éliminer. On va imaginer qu’il ne serait plus là, il ne pourrait plus exercer son empire néfaste. D’où une tonalité sombre, la raison fondamentale ce n’est pas simplement que Platon était vieux, et que quand on est vieux, la mort n’était pas loin, mais c’est plus fondamentalement l’héritage étatique du sentiment victorieux. Vous reprojetez la victoire conceptuelle extraordinaire que vous avez obtenue dans la réglementation générale (imaginaire, heureusement, mais détaillée). C’est une victoire que définir l’adversaire. C’est un fil de lecture : à quel moment Kant définit l’adversaire (le métaphysicien)s, ou Nietzsche. Il y a des moments de la philosophie où il y a identification de l’adversaire, et ça entraîne des conséquences redoutables : vous en faites ensuite une doctrine, une maxime, une loi, vous en tirez les conséquences. Tout ostracisme commence par la définition. Tout exclusion commence par une définition. Une fois défini l’adversaire, il faut savoir quel espace lui laisser. Et même si on va lui en laisser un… Il y a bien des dialogues de Platon conclusifs, dont là une fin conclusive de Platon, dont le Timée (conception cosmique de la nature, déployée et reconstruite de bout en bout, et ça se termine par une sorte de chant de la victoire). On a réussit, on a vraiment reconstruit et réédifié de bout en bout pour l’essentiel la totalité cosmique. Fin de la parenthèse. Nous en étions là : rapports nature /tout. C’est une acception classique : la nature comme totalité sensible. 2 ordres de questions qui vont nous projeter dans la spirale. Elles sont apparentées : - est-ce que le dire du tout fait partie du tout ? est-ce que l’exposition du tout naturel est elle-même naturelle ? c’est extériorité intériorité mais là sur le point du dire. Si la nature c’est la totalité, l’extériorité prise comme totalité, est-ce que l’énoncé ou même la description de cette totalité est ellemême naturelle, est une partie composante de la totalité ? ou encore, sous sa 2ème forme, qui est une forme logique : est-ce que le tout, la totalité naturelle, est elle-même exhibée par la nature ? est-ce que le tout se montre comme tout de façon naturelle ? Vous voyez. Même si on interroge ce chant de victoire finale du Timée, nous avons présenté et exhibé la totalité naturelle, jusqu’où et dans quelle mesure cette exhibition de la totalité, cette monstration de la totalité, est elle-même la totalité ? ça veut dire : est-ce que la totalité se montre comme totalité ?

Vous voyez bien que là nous sommes au cœur de la question hégélienne de la nature. C’est aussi une chose que nous essaierons de traiter sur texte. La dialectique de la nature n’est même pas vraiment traduit. On ne s’engagera pas sur le passage merveilleux de la déduction des planètes. Il s’est trompé dans le nombre des planètes du système solaire (il a déduit le nombre des planètes avant qu’on en trouve une en plus : il y a parfois des ratés de l’Absolu !). Il a montré qu’en soi et pour soi qu’il est nécessaire qu’il y ait tant de planètes, mais il y en a eu après en plus. Quand on s’aventure dans l’exhibition de la totalité, il peut y avoir des avatars. Mais si la nature c’est la totalité, la totalité du sensible, la totalité universelle du sensible, est-ce que la totalité elle-même fait partie de cette exposition totale du sensible ? C’est un problème très complexe et très difficile, parce que il y a à cela des objections logiques. Il y a des objets logiques à proposer que le tout soit un élément du tout. On les prendra peut-être pour elles-mêmes, elles sont intéressantes. Ça ne va pas de soi qu’on puisse considérer que, étant donné l’exposition de la totalité, la totalité elle-même est montrée dans la totalité. Logiquement, le tout reste extérieur au tout, le fait que le tout soit un tout reste extérieur au tout. Il ne lui appartient pas. Grossièrement dit, le tout n’est pas élément du tout. Ou encore, si vous voulez, l’univers ne peut s’appartenir à lui-même. Il est donc exposé mais il n’est pas montré. Là aussi, on aurait une dérive possible, mais c’est tellement ample que je ne fais que l’esquisser, ce point, cette distinction entre être exposé et être montré, c’est une distinction fondamentale dans le Tractatus de Wittgenstein. C’est très exactement chez lui le statut du monde, de ce qu’il appelle le monde. Le monde, je change son vocabulaire mais peu importe, le monde, c’est l’ensemble de ce qu’il y a, ce dont c’est le cas, mais l’ensemble des cas n’étant pas un cas, n’est pas dans le monde. Le monde n’est pas au monde. Ce qui se dira aussi : les limites du monde sont aussi les limites de mon langage. La dialectique centrale, c’est que le monde n’est pas au monde, car le monde est en effet la totalité du cas que ça soit, mais la totalité elle-même n’est pas un cas. Ce que vous pouvez tout au plus faire, c’est montrer qu’il y a le monde, mais le monde lui n’est jamais montré. Vous pouvez montrer qu’il y a le monde, mais vous ne pouvez pas faire que le monde se montre. Donc ça va conduire Wittgenstein dans le Tractatus à poser qu’il y a autre chose que le monde, ce qu’il va appeler l’élément mystique. L’élément mystique est typiquement cet élément postulé comme autre que le monde, déjà en somme exigé par l’énoncé qu’il y a le monde, car l’énoncé qu’il y a le monde n’est pas mondain, si je puis dire. Vous voyez que c’est la dialectique à laquelle j’essaie de vous engager ici : si la nature c’est la totalité, alors la nature comme totalité ne se montre pas dans la totalité. Ça veut dire qu’il y a quelque chose de non-naturel dans la nature, si la nature c‘est la totalité, comme la tit ne se montre pas dans la totalité, il y a quelque chose de non naturel dans la nature. L’idée même de nature n’est pas naturelle. Elle n’a pas de référent naturel. C’est le mouvement de Wittgenstein dans un autre langage : il y a un élément mystique car il y a quelque chose de non-mondain dans le dire du monde. Il y a qch de non naturel dans l’idée de nature, à savoir la nature comme totalité en tout cas ne se présente pas elle-même, sauf si on adopte le protocole hégélien. Quel est le projet de Hegel sur ce point ? c’est de dire que la totalité n’est rien d’autre que la monstration d’elle-même. C’est l’intuition majeure de Hegel, et la question de Hegel est directement articulée à la totalité : la nature est un moment, c’est le moment de l’extériorité. Hegel va pouvoir éviter le dualisme (ce que nous disions tout à l’heure conduit à un dualisme : il y a autre chose que la nature, autre chose que le monde) en posant que l’essence naturelle de la totalité, c’est d’être son propre déploiement, sa propre monstration. La totalité est exhibition d’elle-même. Sur ce point, vous pouvez reparcourir 2 ordres de textes : - soit en effet le début de la dialectique de la nature dans l’Encyclopédie - soit l’entrée en scène du concept de nature dans la 2ème section de la Logique. Ce 2ème passage là, nous l’étudierons ici. Vous voyez que la thèse hégélienne, si nous essayons de faire résonner de nouveau le mot nature, ça consiste à dire que la nature de la totalité, y compris de la totalité naturelle, est de s’exhiber comme totalité. Il est de la nature du tout, y compris du tout naturel, d’être auto-monstration, si je puis dire, de sa totalité. Ou encore, la totalité est en réalité toujours totalisation. Toute totalité est en réalité un mouvement de totalisation. Ça va donner une définition assez précise de la nature, la définition hégélienne. La nature c’est quoi ? la nature, c’est dans la totalisation, le moment de l’extériorité. C’est très technique mais assez intuitivement saisissable. La totalité est monstration d’elle-même, elle montre son moment le plus extériorité, quand la totalité est l’extériorité, et ça c’est la nature. La nature va être appréhendée comme figure de l’extériorité dans la totalisation. C’est là qu’on va trouver l’extériorité, les planètes, l’univers, les plantes, les animaux etc.. tout cela implacablement déduit du mouvement de totalisation, dans son moment d’extériorité. Évidemment, la question, c’est une tentative héroïque, mais

nous la discuterons sur texte. Vous voyez bien que le grand problème, quand on procède ainsi, quand on propose cette solution (qui est encore une fois de résoudre de façon non-dualiste le problème de la totalité, c’est le programme, contrairement à Kant ou Wittgenstein), le problème c’est d’avoir une clause d’achèvement. C’est la difficulté. Vous ne pouvez proclamer que le mouvement est totalisation que si il y a quand même le tout. Sinon qu’est-ce qui indique que le mouvement est totalisation ? il peut être mouvement contingent qui déplie une multiplicité indifférente sans totalité. Il pourrait ne pas y avoir le tout. On ne peut alléguer que le mouvement universel de toute chose y compris de l’extériorité naturelle est totalisation, que si vous avez un critère d’achèvement qui vous donne le tout, le tout en tant que totalisation certes, mais comme totalisation s’achevant elle-même comme tout. Autrement dit, le problème - si la totalité est totalisation - c’est de savoir comment identifier la totalisation comme tout, même si c’est un tout en mouvement. Il faut que vous ayez ce que Sartre (qui a le même pb pour d’autres raisons) appelle une totalisation totalisée (CRDial). Vous ne pouvez penser la totalité comme totalisation (1er mouvement), que si vous pouvez aussi pensez la totalisation totalisée. C’est le problème de la fin, c’est le problème de la fin, de la clause d’achèvement, quand la totalisation se ressaisit comme totalisation totalisée. Sinon le mot tout n’a pas de pertinence, vous ne pouvez pas donner la définition de la nature que je vous proposais (le moment d’extériorité dans la totalisation). Il va en résulter que finalement, le vrai concept de la nature, c’est la clause d’achèvement. Car c’est ça qui permet de penser la totalité, à la fin des fins. Donc, en définitive, la nature c’est l’Absolu. C’est le moment de l’extériorité de l’absolu. Dans l’escargot, c’est la raison pour laquelle vous avez une diagonale tirée de la totalité à Dieu. C’est la diagonale hégélienne. Elle se lit dans les 2 sens : de totalité à Dieu c’est Hegel, de Dieu à totalité, c’est Spinoza. La diagonale prise vers le haut est hégélienne, prise vers le bas est spinoziste. On transite par l’être. Spinoza, lui, va dire : Deus sive natura. Mais il y a toujours où un moment où Hegel est obligé de dire : la nature – c’est-à-dire Dieu – en quel sens ? au sens où elle est transit de l’Absolu, dans un 1er temps vous la définissez comme extériorité de la totalisation mais finalement elle est transit de l’absolu. Pourquoi ? car on doit avoir une fin, ie un moment où la totalisation est totalisée. Je fais une petite incise définitionnelle : en vérité, l’identification de la nature à Dieu a 2 sens distincts. Je pense qu’elle a 2 sens distincts, étant entendu que ces 2 sens renvoient à la question de la totalité : si vous identifiez la nature à Dieu, c’est toujours dans une certaine intuition de la totalité. C’est ce qu’il y a de commun aux 2 identifications. Mais au fond : - soit on a une totalisation de la divinité : Dieu s’effectue comme tout. Dieu est le nom de l’effectivité du tout, comme production. C’est la signification spinoziste, c’est le 1er sens d e cette identité de Dieu et de la nature. Dieu c’est la nature comme productivité immanente. - soit on va hausser ou exhausser la nature jusqu’à l’absolu, jusqu’à Dieu, on va absolutiser la nature. On va faire une absolutisation de la nature. C’est le mouvement dialectique. On ne peut penser l’extériorité naturelle qu’en la portant au mouvement de l’absolu lui-même. En fin de compte, vous ne pouvez comprendre les planètes et les astres et les arbres que du point où vous montrez qu’ils sont des moments figures des inclusions dans l’exhaussement ou l’exhaustion vers l’Absolu . Sur le sujet nature et Dieu, il y a ce double mouvement : - d’un côté l’exhaussement absolutisant de la totalité naturelle, la totalité naturelle comme emblème dialectique de l’absolu - et la totalité naturelle comme effectivité de l’absolu, comme productivité immanente, sans exhaussement dialectique particulier. On peut le dire simplement de la façon suivante : la nature comme totalité, on peut la considérer dialectiquement ou productivement. Ce sont 2 orientations, du point de vue du concept de nature. Nature peut désigner l’être dialectique de la totalité, vision hegelienne. Ou nature peut désigner simplement le caractère productif de ce qui se donne comme tout, la productivité immanente de la totalité. Si vous procédez dialectiquement, il y a une intelligibilité intrinsèque de la nature comme tout. Ie la nature a un sens, elle a le sens qui la relève dans l’absolu. Pour ça il faut qu’elle ait un sens. Cette question du sens de la nature est fondamentale : la nature comme totalité extérieure, la nature a-t-elle un sens ? dans la dialectique oui, elle a un sens qui est d’être le moment de l’extériorité, il n’y a de sens que dans une corrélation à l’absolu. Si vous concevez la nature dans le schème de la production immanente, vous n’avez pas besoin que la nature ait un sens, il n’y a pas nécessairement de sens, elle peut être le libre jeu de la production, le libre jeu de formes produites dans l’immanence au tout. Mais il n’y a rien qui exige la relève de cette production par un sens. ou ce qui est intéressant, c’est que si vous concevez la nature comme un tout, vous n’avez pas encore pour autant tranché la question du sens. Vous pouvez concevoir la totalité comme concept clé de l’exhibition naturelle, la

question du sens est encore réservée. Vous avez la possible d’une orientation dialectique qui va exiger que la nature ait un sens, et une orientation productive immanente qui est esquissée chez Spinoza et entièrement déployée chez Deleuze, il n’y a pas de sens de la totalité comme telle. Au contraire, pour autant qu’on dise qch de la totalité comme telle, on dira qu’elle est chaotique, c’est le chaosmos. Deleuze l’appelle chaosmos, défigurant le mot cosmos dans la direction du chaos. Nature est un autre nom de la totalité, on peut l’appeler la vie, aussi, sans qu’il y ait une relève absolutisante du sens. si vous êtes dans des figures hegelienne ou spinoziste, la diagonale montre que ça s’arrête là, car il n’y a pas d’autre absolu que la nature comme totalité. Vous allez relever la nature sans son sens absolutisant dans un cas et dans l’autre vous allez dire que la nature est la production immanente de Dieu lui-même. Si vous n’admettez pas la clause d’achèvement, le tout exige autre chose que le tout (Kant ou Wittgenstein). Vous n’admettez pas le court-circuit ramenant de Dieu (Dieu peut se dire la Vie, la Substance, l’Absolu…), le court-circuit n’existe pas, si vous vous installez dans l’objection que la totalité est hors d’état de s’exhiber elle-même. Ce qui veut dire que pour qu’il y ait nature, il faut qu’il y ait du non-naturel. Il n’y a nature comme totalité que parce qu’il y a du non naturel, à partir de quoi on peut prononcer la totalité. Je voudrais dire au passage que c’est un choix philosophique majeur : ce qui se passe en bas de la spirale est une sorte de décision latente de la plus grande portée. C’est le moment où vous décidez, ou pas, dans une philosophie, qu’il n’y a que le tout. Il n’y a que le tout, du point de vue de la pensée rationnelle, ça entraîne des csq considérable. Si vous décidez qu’il n’y a que le tout, vous allez être dans un dispositif qui a 2 bords opposés possibles : le bord heglien et le bord spinoziste, le bord dialectique et le bord antidialectique, qui divergent au point de la totalité naturelle. Hegel et Spinoza sont d’accord pour dire que la nature comme totalité c’est Dieu, ou l’Absolu, ou que c’est ce qu’il y a. L’agencement de cet axiome est entièrement différent mais si sont d’accord sur ce point. Et il y a une décision philosophique autre. Elle peut être implicite ou explicite) : en philosophie anal, elle est éloignée, presque invisible quasiment, mais elle est là quand même. Vous avez décidé sur nature et non nature, qch comme ça, vous avez décidé qu’il n’y avait que la nature, qu’il n’y avait que le tout en tant que configuration de ce qu’il y a, ou vous avez décidé qu’il y a autre chose. On peut faire l’hypothèse que Wittgenstein a décidé dans un sens puis dans un autre sens. Wittgenstein est dualiste dans le Tractatus, puis ensuite ce n’est pas exactement la même registration. Il faut se documenter sur la nature de cette décision. Elle est organique à toute décision de pensée, si éloignée que ce soit en apparence. Il y a toujours une décision là dessus, même implicite, une décision qui distingue, au fond, entre 2 grandes orientations de pensée, sur la question du tout. La question du tout est bien en fin de compte la question de la nature, la question de la nature de ce qu’il y a. Si vous décidez qu’il n’y a que le tout, on va remonter du tout à l’être. Avec encore une fois à mon sens : soit de manière dialectique à l’absolu, soit une orientation de type constructiviste (Deleuze) ou productive. Vous remontez de la totalité à l’être, de la totalité à l’absolu. Sinon, vous allez poser qu’il est dans la nature de la totalité qu’il y ait autre chose que la nature. Il est de la nature de la totalité qu’il y ait autre chose que la totalité. Nature va faire transiter de la totalité à autre chose qu’elle-même. Le nom traditionnel philosophique de ça, c’est liberté. C’est pour ça que, en passant, il y a une invalidation de la liberté chez Hegel et Spinoza : chez l’un comme chez l’autre, ce qu’il y a, c’est la nécessité. Si en fin de compte la décision fondamentale est celle de la totalité naturelle, la liberté est une catégorie non valide, ou en tout cas entièrement reconstruite et subordonnée. Par contre, c’est une catégorie essentielle si vous posez qu’il est de la nature de la totalité naturelle qu’il y ait qch de non naturel. Le point où nous en sommes, c’est de dire que en fin de compte, l’opposition fondamentale qui permet d’élucider le concept de nature c’est l’opposition de la nature et de liberté, en tant que la liberté est l’autre de la totalité naturelle ou de la totalité phénoménale. 5ème dialectique : nature-liberté a) différence La nature va donc se trouver dans une dialectique de l‘intériorité et de l’extériorité qui va concerne la totalité d’un côté et la liberté de l’autre, la liberté d’abord désignée comme anti-nature. ça peut se dire de bien des façons ; il y a une histoire sémantique de la liberté comme antinature. Kant dira supra-sensible, et même nouménale, et il y a par ailleurs les registrations qui opposeront liberté à nécessité. Chez Sartre on dira brutalement que liberté c’est le néant etc… dans tous les cas, cette chaîne nominale désigne liberté comme l’autre de la nature, on désigne la liberté comme l’autre de la nature en tant que totalité.

Il y a une incise dans la totalité naturelle qu’est la liberté. Kant c’est compliqué, mais comme tout le monde transitera par là, ça n’a pas de valeur différentielle. α) la grâce Je vous signale une registration plus ancienne qui est l’articulation de la liberté au suprasensible dans la modalité de la grâce : je vous recommande le père Malebranche, dans le traité de la nature et de la grâce. Le couple, ce n’est pas nature et liberté, c’est nature et grâce. La grâce est l’autre de la nature. Formellement, c’est très suggestif. Ça pose la question de savoir : d’où vient la grâce ? Quel est son régime de distribution ? Comment y a-t-il superposition et articulation du règne de la nature (comme totalité extérieure, étendue cartésienne) et de la grâce etc… quelles sont les lois distributives de la grâce etc… c’est d’une grande richesse à propos du concept de nature. je vous conseille de passer par là, spéculation philosophique et théologique sur la nature de la grâce (Pascal). β) les miracles Une autre entrée que je vous recommande aussi, c’est la théorie des miracles. Vous pouvez traiter la question de la nature à partir de la question du miracle. Parce que le miracle par définition, c’est le nonnaturel par excellence, ce qui est en exception de la nature, quelle que soit la définition de la nature, le miracle c’est ce qui ne peut pas avoir lieu naturellement. Cette notion est instructive sur la conception de la nature. Puisque le miracle est ce qui ne peut pas naturellement avoir lieu, autant de conceptions de la nature, autant de conceptions du miracle. Le miracle va toujours être instancié ou déchiffré sur fonds de nature puisqu’il est par excellence le non naturel. Référez vous au texte pascalien sur le miracle : je rappelle au passage que pour Pascal, le miracle c’est une question décisive. Comme il le dit lui-même, il hait les douteurs de miracle. Ne pas croire au miracle, c’est la définition fondamentale du libertins et de l’homme perdu. C’est intéressant car il y a une haute figure de la rationalité chez Pascal, y compris dans la conception de la nature. Pascal est un théoricien de la nature au sens scientifique, c’est aussi physicien. Il est intéressant de voir comment ce physicien est par ailleurs un théoricien du miracle. On ne peut pas l’accuser d’être obscurantisme quelconque. C’est un scientifique de haute volée, un physicien. Sur ce versant, bien sûr il y a les grandes dialectique liberté nature chez Kant, mais il y a aussi la registration nature et grâce, théologique, et la question des miracles : tout ça désigne la figure de l’exception à la totalité naturelle. Qu’est-ce qui fait exception à la totalité naturelle ? b) l’exception à la totalité comme source du sens Ce qui est intéressant à développer, c’est de montrer comment, pour tous ces penseurs, ce qui fait exception à la totalité naturelle, est la source du sens, y compris du sens de la totalité. Si vous voulez comprendre le sens de la totalité et ce qu’il en est dans cette totalité du destin de l’homme, il faut se situer au point de l’exception, et pas au point de la totalité. - Kant en viendra à dire que le déchiffrement au moins symbolique de la totalité naturelle se fait du point de la liberté (c’est ce vers quoi vont les analyses de l’Analytique du sublime). Pour autant que le spectacle naturel peut avoir une signification symbolique, la signification symbolique ne se laisse déchiffrer que du point de la moralité. - pour Pascal, il y a du sens s’il y a un point d’exception à l’ordre naturel, au point du Livre ou du miracle (il s’agit de 2 choses non-naturelles). Le livre inscrit les prophéties et leur réalisation, et le miracle qui en atteste. - même pour Malebranche, finalement, l’ordre de la grâce influe sur l’ordre de la nature. Finalement, le sens de la nature est délivré à partir de l’anti-nature. C’est la thèse essentielle. - même pour Sartre : l’en-soi n’a de sens qu’avec le pour-soi, du point de la liberté. Quel que soit le dispositif auquel on se réfère, quand vous n’êtes pas un philosophe de la totalité naturelle, Spinoza, Hegel Bergson, vous êtes un philosophe de l’exception à la totalité comme source du sens, avec des dialectiques du sens extrêmement complexes. Là, ayez des textes pour vous armer làdessus : nature prend sens du point du point de la non-nature. En réalité, le sens immanent naturel est défait. Le vrai sens vient à la nature de la liberté, ie de ce qui est en exception de la nature (liberté est le nom principal, mais vous pouvez subsumer sous ce nom la grâce, miracle, nouménal…, ce qui est en exception). L’exception à la totalité naturelle, c’est là qu’est la source du sens. c) transition La question revient, la question va revenir de savoir s’il n’y a pas en fin de compte une nature de la liberté elle-même. Si la liberté est de part en part la source du sens, et en particulier du sens de la nature, quelle est la nature de la liberté pour qu’elle puisse être la source du sens. Si antinaturelle qu’elle soit, il

va falloir s’interroger sur son être, sur son essence, sur son effectivité. Et introduire la thèse qu’il y a une nature de la liberté… C’est exemplairement chez Kant : dans un 1er temps vous avez une disjonction radicale entre nature et liberté, et dans un 2ème temps le problème de la nature de la disjonction fait retour sur la disjonction ellemême. C’est inéluctable. D’où la thèse que la liberté elle-même est une nature, de qui de quoi ? celle de l’homme. 6ème dialectique : nature-humanité. a) l’humanité comme nature de la liberté La liberté est constitutive de cette nature anti-naturelle singulière qu’on appelle l’homme. L’homme est naturellement libre. L’humanisme, c’est ça, c’est au fond la thèse que l’homme est naturellement libre, né libre. α) l’exemple de Rousseau cf Rousseau, 1ère phrase du Contrat Social : l’homme est né libre et partout il est dans les fers. Vous voyez bien l’inversion extraordinaire : alors la nature de l’homme c’est la liberté, et ce qui est nonnaturel c’est d’être dans les fers. L’homme est né libre et partout il est dans les fers : expliquons cette énigme : comment se fait-il que l’homme est né libre et que partout il est dans les fers ? Il n’y a une énigme que si on suppose que c’est la liberté qui est sa nature, et que la servitude est son anti-nature. Le fait qu’il soit dans les fers n’est pas naturel : ce n’est ni comme ça, ni pour ça qu’il est né. C’est la dialectique de l’humanité comme naturalité de la liberté. L’humanité c’est la thèse de la liberté naturelle. L’humanité est ce qui désigne cet être dont la nature est la liberté, cet être dont la nature a d’abord été définie comme une anti-nature. c’est ça l’homme. Le point de départ me semble devoir être Rousseau : la théorie rousseauiste de ce qui est naturel et non naturel va entraîner une analytique très compliquée de la liberté chez Rousseau. Si je propose un texte de Kant, un de Hegel, le 3ème sera un de Rousseau, on a une origine de la réversion du rapport origine/liberté. On s’interroge sur : qu’en est-il de cet être pour lequel la liberté est naturelle et dont c’est la servitude qui est au contraire l’artifice et le non naturel ? Je propose de désigner cela comme la figure de l’homme. C’est pour ça que j’ai mis humanité. L’humanité désigne dans le monde moderne la naturalité de la liberté. L’homme est né libre et partout il est dans les fers : il faut l’interroger comme une nouvelle définition de la nature, encore une fois, comme une nouvelle opération sur le concept de nature. β) le droit naturel Peut-être que l’expression qu’on peut interroger (elle est antinomique à Rousseau) est l’expression de droit naturel. A bien y réfléchir, comme Rousseau le dit, l’expression de droit naturel, c’est un oxymore. Par définition, la sphère du droit apparaît justement comme qui n’est pas naturel. Si vous dites droit naturel, il y a des droits naturels, il y a des droits de l’homme, il y a des droits naturels de l’homme, certaines choses qu’on fait aux hommes ne sont pas naturelles, cette sphère-là suppose en réalité que vous attestiez une naturalité de la liberté. Nous allons avoir affaire avec la question du droit naturel, la question de sa critique par Rousseau, la proposition par Rousseau d’un autre rapport entre liberté et nature. Ce débat est fdtal au 18ème siècle : nous avons ce que je propose d’appeler le moment de l’humanité quant à la catégorie de nature. Le moment de la question de la nature humaine, dans sa disposition complexe au regard de nature d’un côté et de liberté de l’autre. Il y a Hume aussi, bien sûr. Tout cet espace complexe de pensée du 18ème est centré sur cette réversion, qui à partir de l’exception à la nature qu’est la liberté la retourne en nature, en nature comme nature humaine, comme nature de l’homme. Ce n’est pas un hasard si Kant dit que toutes les questions de la philosophie peuvent se ramener à une seule qui est : qu’est-ce que l’homme ? A la fin des fins, c’est la seule question. C’est typiquement 18ème siècle. L’homme c’est quoi ? on peut le dire anthropologiquement, ou métaphysiquement : l’homme est un certain rapport, presque indéchiffrable, entre nature et liberté. Qu’est-ce que l’homme ? c’est ça : qu’est-ce que ce rapport entre nature et liberté qu’on subsume sous le nom d’homme ? C’est encore notre question, nous sommes encore sous la juridiction d’une enquête interminable donnée en ce point de la naturalité possible de la liberté comme figure générique de l’homme. Je fais là en 5 min, la prochaine fois nous terminerons et nous aurons un espace de questions.

Nous terminerons l’escargot. Je termine simplement de façon absolument allusive. Comment tout cela va se boucler ? Il va y avoir 2 temps : b) transition : la synthèse de la nature et de l’anti-nature (liberté) dans l’humanité est-elle ellemême naturelle ? Supposé établi le concept d’humanité, de nature humaine comme une tentative de spécifier la naturalité de la liberté, alors il va y avoir la question de la nature de cette nature. S’il y a une naturalité de la liberté, .va faire retour la question de savoir comment elle s’inclut dans la totalité. La figure vitale de la totalité naturelle, elle va faire retour en questionnant l’homme du point cette fois de sa naturalité globale. Si l’homme est une synthèse ou une réversion de nature et liberté, qu’en est-il alors de la naturalité de cette synthèse elle-même ? c’est une question très tôt adressée à Kant, déjà par les post-kantiens immédiats. L’homme est sensible et supra-sensible. Mais quelle est l’effectivité de cette synthèse entre sensible et supra-sensible ? Où est l’homme dans la totalité naturelle ? Où est la nature humaine dans la nature comme totalité ? Qu’est-ce que c’est que la vie de l’homme ? qu’est-ce que c’est que la nature humaine comme totalité vitalisable ? 7ème dialectique : nature-surhumanité a) le surhomme comme nature de l’homme D’où Nietzsche : il critique l’humanité du point de vue de la nature. Il va falloir que l’homme, la figure de l’homme, supporte à son tour l’épreuve de la naturalité. C’est ce qui va donner chez Nietzsche la surhumanité. Surhumanité, ça ne va jamais être que l’humanité revisitée par la nature. C’est très clair chez Nietzsche : c’est l’humanité mise à la question de sa vraie nature. La surhumanité, c’est ce que devient l’homme dans la figure de l’intensité naturelle, ou ce qu’il doit devenir dans la figure de l’intensité naturelle. b) la nature du surhumain Et puis finalement, on aura la question de la nature du surhumain, puis on arrivera à la question de la nature Dieu. La biographie de Nietzsche est indicative : pour mener à bien son projet, il fallait qu’il se représente lui-même comme un dieu. Devenir Dieu. C’est très compréhensible. Nous restituerons ça du point de la nature. Si le surhomme est l’homme tel qu’il est surmonté par la nature, par sa propre nature. Le surhomme est l’homme lui-même tel que surmonté par sa propre nature, en tant que sa propre nature est en excès sur la figure de l’homme, elle est plus que la figure de l’homme, c’est plus que l’homme (nous retrouvons le mouvement de l’extériorisation naturelle), alors il y a à la fin des fins une divinité de la surhumanité ou un devenir dieu de l’homme comme surhomme, qui est un nouveau nom de la nature elle-même. Puis nous clôturerons sur l’énoncé Deus sive natura. 8ème dialectique : nature-Dieu Parvenu en ce point, il n’y a plus qu’à dire que la nature, c’est un autre nom pour Dieu. Là on a terminé. On a terminé, sauf qu’on peut, nous le verrons à propos de Spinoza lui-même, diviser complètement cette affaire, nature comme naturante et naturée, activité absolue et positivité intégrale. Et donc on peut retomber dans la nature comme être. Ce qui est, je le rappelle, notre point de départ. Ce qui est quand même une réalisation - assez rare - du retour éternel… 2.11.00 Séance en 4 moments, ou 4 morceaux : 1er morceau : publicité pour moi 2ème morceau : l’achèvement du commentaire en survol du schéma 3ème morceau : l’ouverture d’une discussion 4ème morceau : situation de ce qui sera le 1er texte, après cette introduction générale, qui est un texte tiré de la science de la logique de Hegel. 1° Je commence par la publicité. Je vous distribue quelque chose. Très rapidement, il y a quelques années, à la demande d’un théâtre, j’avais écrit 34 petites pièces sur des concepts de la philosophie. Ce sont des pièces très brèves, qui sont toutes construites autour d’une notion, et qui sont soit des monologue soit dialogue soit 3 perso, pas plus, dans la descendance du théâtre forain ou de la commedia dell’arte mais qui tente de transmettre qch de la notion concernée. Il y a 34 notions : elles couvrent l’épreuve de dissertation général de l’agrégation de

façon à peu près exhaustive. C’était une 1ère raison de vous les donner. Au rang 29, vous trouvez la nature, document supplémentaire, puisque la notion qui nous réunit ici figure dans le recueil. Vous pourrez lire cette présentation du concept de nature dans un dialogue entre Ahmed et sa père Fatima qui à sa manière est au fond un commentaire tordu de quelque chose comme la définition spinoziste de la nature comme puissance. Spinoza posait la question, qu’il considérait comme inépuisable et énigmatique de ce que peut un corps ? nous ne savons même pas ce que peut un corps. la question de la nature comme en définitive nature naturante, ou activité divine. C’est ça qui est à l’arrière plan. La dernière raison c’est que un certain nombre de ces pièces vont être jouées en région parisienne ; en janvier. Vous verrez les concepts en scène. Les comédiens vont en jouer une quinzaine ou une vingtaine. A chaque représentation, on ne peut en jouer guère plus de 7 ou 8. J’ai vu le spectacle, qui existe depuis des années, c’est réellement assez drôle. Ce sera à Montreuil, au centre dramatique national, qui est 26 place Jean Jaurès à Montreuil, et c’est entre le 5 et le 26 janvier, Ahmed philosophe par les comédiens de la comédie de Reims. Ce sera tournant : vous pouvez vous informer par téléphone pour savoir quel est le concept, les concepts jour là, en fonction de vos lacunes ! Voilà la fin du 1er moment qui était le moment publicitaire. Tout cela existe en livre, je le signale, par ailleurs j’oubliais le point de publicité le plus important ! 2° Nous reprenons à partir du schéma. Je rappelle brièvement le principe de cette spiracle, ou escargot : en réalité il s’agit de mettre en scène d’une des façons possibles (on peut en trouver beaucoup d’autres) la profonde ambivalence, finalement, du concept de nature, sa scission interne. Qui le distribue finalement tantôt du côté de ce qu’il y a de plus intérieur, de l’essence même de la chose, de ce qu’elle est vraiment, de ce qu’elle est conformément à sa propre nature, mais qui le distribue aussi comme un des noms de l’extériorité : ce qu’il y a, ce qui est déjà là, ce qui est donné. Toute l’histoire à mon avis de la notion est commandé par ce mvt complexe qui la tire tantôt du côté d’un analogue de l’essence, la détermination de la chose saisie dans sa nature intime, et dans l’extériorité, voire indifférence, indifférente à toute intériorité en tant qu’elle est le nom du il y a comme tel. C’est à partir de ça qu’on peut tenter d’éclairer des notions complexes, nature humaine, état de nature, nature des choses etc… si vous prenez le stock de ces expressions, vous voyez que nature est à prendre contextuellement dans l’aspect dominant de sa dialectique interne qui aurait dit Hegel est la dialectique de l’intérieur et de l’extérieur, de l’extériorisation de e qu’il y a de plus intérieur ou de plus essentiel. Le schéma vise à disposer cette ambivalence en disposant nature entre 2 autres notions, entre 2 concepts majeurs de la philosophie, en montrant comment nature désigne à la fois désigne l’intériorité du côté d’un des concepts, et extériorité du côté de l’autre. La nature est un synonyme de essence dans certains contextes, la chose pensée dans la vérité de sa nature, et que aussitôt ça va désigner ce qui de l’essence n’est pas uniquement l’essence mais son extériorisation effective. D’où Il y a naturel, être là, d’où dispo de nature entre essence et sensible et quelque chose comme son essence mais aussi et en même temps le mode propre sur lequel s’effectue ou se réalise… le cheminement général est destiné à présenter ou à illustrer cette complexité en allant si je puis dire du plus indéterminé au plus singulier. Le plus indéterminé, l’être, comme 1ère acception du mot nature, et le plus singulier, Dieu, comme étant susceptible d’être un des équivalents possibles du mot nature, Deus sive natura (équation qui identifie Dieu à nature). Nous avons parcouru ces étapes, pour vous donner des références, des dialectiques locales, nous en étions du côté de l’humanité. 6ème dialectique : nature et humanité Nous avions remarqué que ce qui au fond permet de définir le concept d’humanité tel qu’il est notamment présent dans la disposition humaniste de la pensée, c’est finalement de traiter la liberté ellemême comme constituant la nature de l’homme. L’homme est cet être à qui la liberté est naturelle. Voilà ce qui est la définition adéquate de l’homme de l’humanisme. Alors que dans un 1er temps, nous avions vu que liberté s’opposait à nature, c’est une schize essentielle, règne de la nature, du phénoménal, du pathologique, est précisément ce qui s’oppose à l’autonomie de la liberté. C’est frappant : on passe d’un contexte où liberté s’identifie dans une opposition radicale au il y a radical et à son système de lois, de nécessité ; à une autre figure où dans ce qu’il en et de l’homme et de l’humanité, la liberté devient ellemême nature, au 2ème sens du mot nature, ie devient constitutive de ce qu’il y a d’essentiel à l’humanité comme telle. La liberté est la nature même de l’homme : il y a réconciliation dans la catégorie d’humanité entre nature et liberté. C’est ce qui va donner la dialectique complexe mise en place au 18ème comme dialectique du droit naturel. Il ne faut pas perdre de vue à quel point c’est une expression tendue,

c’est presque un oxymore. C’est ce que Rousseau lui objecte dès le début du CS. Si c’est naturel ce n’est pas de l’ordre du droit. Mais il y a une théorie du droit naturel, adéquate à la considération selon laquelle la liberté elle-même peut s’appréhender comme nature, contre quoi Rousseau va se dresser, avec des complications, en posant que, à proprement parler, la liberté est le résultat d’une convention et non pas d’une donnée naturelle. Je ne veux entrer dans le détail de ces références. A ce stade, ce que vous devez lire et méditer, c’est les théoriciens du droit naturel et Rousseau. c’est ce conflit là qui est constitutif du segment de nature à liberté. Cet arc est saisi et pensé au 18ème siècle, il est porté dans l’ordre de la législation, du droit, de la société. Le centre de gravité à mon sens, c’est la question : qu’est-ce que l’homme ? Même Rousseau l’entend ainsi : la question est de savoir comment l’homme dans la figure du citoyen advient en surimposition négative par rapport à l’homme naturel. Nous sommes bien là dans une problématique qu’est-ce que l’homme en tant qu’i s’agit de distribuer la notion entre nature et liberté. Il est très intéressant de voir que, somme tout, a conception humaniste ordinaire, celle qui l’a emporté, et dans laquelle à vrai dire nous sommes aujourd’hui, est celle qui pose que l’homme qui dispose de droits singuliers en qui ou pour qui la liberté est une figure de la nature, être qui est naturellement libre et qui doit être respecté, y compris dans sa vie naturelle, à ce titre. Les droits de l’homme c‘est la vie des gens, le respect du corps, fondamentalement, le respect de l’existence, le respect de la vie. De ce point de vue là, les droits de l’homme c’est bien les droits de la texture naturelle de l’homme comme vivant. C’est bien à cela que, quand il est porté atteinte, il est déclaré qu’il y a grave offense faite aux droits de l’homme. Sévices, meurtre et massacre désignent dans un 1er temps l’homme comme corporéité naturelle. Une partie des dh est les droits de cet animal singulier qu’est l’homme qu’il ne faut pas offenser, maltraiter, tuer etc… sans que quelque chose de son droit soit nié. Ce droit est un droit du vivant dans un 1er temps. En définitive ce droit du vivant est aussi et en même temps en droit dont cette vie est porteuse comme tel. Avec la discussion de savoir dans quelle mesure ça s’étend aux animaux, aux vivants en général… mais la sphère d’exercice possible du droit naturel, pourquoi n’est-il pas le droit de tous les vivants ? la discussion montre bien ce dont il s’agit : quelle est l’étendue du rapport exact entre nature et humanité. Et le 3ème terme, c’est la liberté. Ceux qui soutiennent que l’homme est singulier parmi les vivants, un vivant qui est naturellement libre, et ceux qui soutiennent que le point principal est la vie comme tel, et que le droit naturel est un droit de la nature. La nature comme telle a des droits. Là, même une certaine écologie radicale revient à ça, la nature comme telle a des droits, et que l’homme comme espèce, comme acteur naturel, ne doit pas méconnaître, ignorer ou bafouer les droits qui sont non seulement des droits naturels comme synthèse de nature et liberté mais qui sont des droits de la nature elle-même. Ceci est un retournement, une fois de plus, pour en faire la matière et l’agencement et la dramatisation de vos travaux. Nature est une notion qui ne cesse de se retourner : quand on en vient à dire que nature est ce au nom de quoi on peut prononcer des droits, droits de la nature, ou de la terre comme habitat planétaire de l’ensemble des vivants, par rapport à ce qui est entendu.. ou même nature et culture, vous avez un retournement. Au fond bien comprendre les appuis historiques, bien comprendre cette notion de nature, c’est comprendre pourquoi elle est susceptible de ce retournement. Quitte ensuite à prendre position sur une stabilisation éventuelle de la notion, la fixation d’un contexte déterminé etc… mais c’est une opération 2nde. Dans un 1er temps il faut produire l’intelligence de cette ductilité de la notion de nature qui fait que véritablement, peut-être plus que n’importe quelle autre notions philosophiques, est susceptible de désigner une chose et exactement son contraire. D’en venir à désigner ce contre quoi dans un 1er temps il avait été identifié et défini. C’est je crois, quelle que soit la connexion du mot, ce à quoi il faut être attentif. C’est ce qui va nous mener à nos derniers paliers que j’avais esquissé la dernière fois et que je vais reparcourir. Si vous prenez humanité comme synthèse de nature et de la liberté. A la question qu’est-ce que l’homme vous répondez : L’homme est cet être tel qu’il appartient à sa nature d’être libre, la question va surgir : quel est l’être naturel de cette synthèse elle-même ? C’est la question qui travaille cette définition possible de l’homme comme synthèse nature et de liberté : quelle est l’effectivité naturelle de cette synthèse ? qu’est-ce qui atteste, avère dans l’ordre naturel, que l’homme est synthèse de nature et de liberté ? vous reprenez nature du côté de l’extériorité. Une fois identifié à liberté, c’est le comble de l’intériorité, mais une fois mené au comble de l’intériorité, et va resurgir la signification en extériorité de cette synthèse. Ça va être : qu’est-ce que l’homme du point de la puissance de la vie ? qu’est-ce que l’homme comme synthèse pris cette fois comme puissance transitive de la vie générale ?

7ème dialectique : nature et surhumanité a) l’homme comme surmontant sa propre nature Au fond si l’homme est synthèse de nature et de liberté alors il est nécessairement ce qui surmonte à tout instant sa propre nature. C’est un thème inéluctable. Ce ne peut pas être une synthèse statique dans laquelle la réversibilité de liberté et nature laisse la nature telle quelle. L’homme ainsi défini est ce dont la nature est d’outrepasser sa propre nature. c’est ça être naturellement libre. quel est le statut naturel d’un outrepasssement de la nature ? c’est la question qui est finalement la vraie question nietzschéenne. Il y a un point de départ kantien chez Nietzsche : ce n’est pas de nier qu’on puisse identifier l’homme sous différentes figures comme complexe de nature et de liberté. Ce n’est pas à ça qu’il en a. L’homme est ce qui doit être surmonté. Son vrai sens, son sens naturel c’est que l’homme doit être surmonté. A savoir qu’il n’y a de synthèse liberté et nature que dans l’outrepassement de la nature elle-même. Donc l’homme en tant que donnée nature passive est ce qui doit être surmontée. Par conséquent, le destin véritable de l’humanité, c’est la surhumanité. L’essence de l‘humanité, c’est la surhumanité. La nature de la nature humaine, c’est d’outrepasser sa nature. Finalement, la vraie nature de l’homme comme esprit libre (ou aussi comme volonté de puissance), la vraie nature, c’est précisément de briser la forme de l’humanité comme telle, de briser en lui la forme de l’humanité comme telle. C’est ce qui accomplit l’impératif naturel de l’outrepassement de la nature. L’horizon naturel de l’humanité c’est la surhumanité. Le matériau référentiel c’est les textes de Nietzsche sur la surhumanité, peut-être plus précisément un certain nombre de passages de Zarathoustra où est traité ou abordé la question de la naturalité ou de la non naturalité du passage. Le mouvement par lequel l’humanité est surmontée dans la surhumanité, quelle en est la nature ? C’est une question extraordinairement complexe. b) homme et surhomme : continuité ou discontinuité ? (qui est Zarathoustra ?) J’y consacre une petite parenthèse : le statut même de Zarathoustra mérite d’être pris en considération. Qu’est-ce que Zarathoustra au regard des figures possibles de la nature de l’humanité ? c’est une question dont il faut reconnaître que Heidegger en a eu une prescience aigue. Je ne suis personnellement pas très séduit pas l’interprétation globale… je la crois trop restrictive, trop essentialiste, trop unilatérale. Mais il faut lire le texte de Heidegger qui est le Zarathoustra de Nietzsche ? C’est incontestablement une bonne question, une vraie question. On a le droit de la poser : la question qui est ? est bien une question nietzschéenne. Si on demande qui est le Zarathoustra de Nietzsche ? on n’est pas en surplomb, on pose à Nietzsche une question nietzschéenne. Nietzsche ne cesse de dire qu’à propos de pensée, il faut demander qui ? (méthodologie fondamentale) : quel type ? quelle figure ? L’analyse d’une pensée se fait toujours en termes de typologie : qui parle là ? la question qui ? est une question capitale. Le métaphysicien du passé c’est celui qui croit pouvoir éviter la question qui ?, qui croit pouvoir évaluer une pensée sans la médiation de la question qui ? qui est le Zarathoustra de Nietzsche ? est une bonne question. Si on la raccroche à notre thème, ici il faut la préciser : qui est le Zarathoustra de Nietzsche, du point de la question de la nature elle-même ? Où est Nietzsche quant au mouvement naturel ? qui est Zarathoustra ? On voit apparaître une hésitation de Nietzsche, au cœur de certains des problèmes concernant la nature, et qui est la suivante : est-ce que l’accomplissement de la surhumanité est dans l’ordre de la continuité naturelle, ou dans l’ordre d’une discontinuité essentielle ? ça c’est une question que nous pouvons ici reprendre, qui est la question : l’extériorisation naturelle, le moment de l’extériorisation naturelle, est-il sous la juridiction de l’essence ? ou est-elle en vérité un événement, une discontinuité ? L’homme est ce qui doit être surmonté. L’essence de l’homme, c’est le surhomme, le surhomme doit venir il va venir. Sa venue (laissons de côté les complications liées au retour éternel), est-elle ce qui est lisible dans son absence même, dans l’état naturel des choses ? ou cette venue est-elle à vouloir de telle sorte qu’en réalité on ait une discontinuité ? Ce point est au fond : y a-t-il un accomplissement naturel des exigences de la nature ? Si vous prenez le mot nature au sens de son intimité essentielle, il prescrit ce qu’est la chose, il dit ce qu’est la chose. La chose est ce qu’elle est dans sa nature même. Mais si vous prenez nature dans le sens de l’extériorisation, du dépliement de la chose conformément à sa nature, le pb se pose de savoir si cette extériorisation est commandée par le 1er sens du mot nature ou pas. Autrement dit, l’ambivalence du mot nature, qui est une ambivalence entre intériorisation essentielle et effectivité extérieure (je le dis en langage hegelien), le passage du 1er sens au 2ème sens est-il lui-même un passage naturel ? c’est la question la plus dense : y a-t-il une naturalité de l’extériorisation naturelle de ce qui est la nature intime d’une chose ? La nature advient-elle naturellement ? c’est autre chose que les 2 sens du mot. Si vous avez 2 sens vous avez un mouvement qui fait passer de l’un à l’autre. S’agit-il d’un

mouvement naturel ? Ou s’agit-il d’un mouvement violent (ie non naturel, qui n’est pas conforme à la finalité de la chose). C’est une très importante question, déjà grecque : les mouvements de la nature sont-ils tous naturels ? Aristote va répondre oui, jusqu’à un certain point. La question pour Nietzsche est très aigue, et c’est elle qui commande la question qui est Zarathoustra. Zarathoustra annonce la venue du surhomme en même temps qu’il décrit l’état dernier de l’humanité. Il est à la fois le polémiste et le psychologue de l’état dernier de l’humanité et le prophète de la venue du surhomme. Il est donc bien celui qui décrit l’état des choses, y compris dans son mouvement, ce qui doit être surmonté. Mais à aucun moment il ne dit qu’il est lui-même le surhomme. A la question qui est le Zarathoustra de Nietzsche, on ne peut pas répondre : Zarathoustra est le surhomme. C’est pour ça qu’il aura cette formule très étrange : je suis à moi-même mon propre précurseur. Qui est Zarathoustra ? Il est en tout cas son propre précurseur. Donc il est celui qui annonce ce que doit être son propre mouvement. Mais cette annonce estelle effective, ie ce qui est annoncé est-il, pour autant qu’il est annoncé, en train de devenir ? Si c’est le cas, nous aurons une continuité, continuité dont le signe est que l’annonce est effective. Si ce n’est pas le cas, si Zarathoustra n’est que, et pour toujours, son propre précurseur, s’il n’advient pas à autre chose qu’à l’annonce de la surhumanité, cela prouvera qu’il faut une discontinuité, ie que rien dans ce qu’il y a ne promet l’effectivité du surhomme. Mais simplement tout indique que l’essence effective ou la nature effective de l’homme, c’est la surhumanité. c) homme et surhomme : continuité ou discontinuité ? (casser en 2 l’histoire du monde) Dans la dernière année, 1888, il faut savoir que Nietzsche en est venu à privilégier la solution de la discontinuité. On dit : oui, mais il était déjà bien excité. Je ne crois pas du tout. Je crois qu’il en est venu là, car la solution de la continuité, telle que Zarathoustra en esquissait le propos, ne l’a pas comblé. L’accélération finale de la pensée de Nietzsche sur la question de la nature, c’est que ce n’est pas naturellement que l’humanité est surmontée. Au fond, on peut stagner dans le dernier homme, on peut s’éteindre. Il y a bien détermination de l’essence naturelle de l’humanité comme devenir de la surhumanité, sauf que le passage à la surhumanité n’est pas naturel. La maxime de Nietzsche va être tout autre : casser en 2 l’histoire du monde. C’est la tache qu’il se propose d’accomplir personnellement. Casser en 2 l’histoire du monde, c’est un autre propos. Je le prends pour le sujet qui nous occupe comme métaphorique, moi je vais casser en 2 l’histoire du monde. Moi, Nietzsche, je suis un destin, ça veut dire le destin de cette cassure, pas le destin comme accomplissement naturel de sa propre essence. Je suis le nom de cette cassure en 2. Là, ça signifie que le destin naturel de l’humanité est la surhumanité mais que l’advenue de ce destin n’est pas naturelle, mais elle est de l’ordre du bris, qch doit être brisé. C’est important de méditer sur cet exemple la grande question de savoir si entre les 2 sens du mot nature, la détermination d’intériorité et le déploiement en extériorité, le passage est continu ou discontinu. A mon sens, Nietzsche est passé de l’une à l’autre, il est passé de l’hypothèse continuiste à l’hypothèse discontinuiste. C’est pourquoi je soutiendrais que ultimement il a abandonné la thématique de l’éternel retour. Car cette thématique évidemment était une des manières de désigner ou de construire la continuité. Voilà pour ce segment là. d) transition Si la surhumanité est le destin essentiel ou naturel de l’homme, quel est l’horizon de la surhumanité ? qu’est-ce qui identifie la surhumanité dans son devenir ultra-humain, si je puis dire, d’outrepassement de la nature humaine ? Evidemment, c’est le devenir dieu de l’humanité elle-même. 8ème dialectique : nature / Dieu a) la nature de Dieu Là, on va avoir la question de savoir quelle est la nature de Dieu. C’est une question très intéressante. Vous voyez bien que Dieu c’est comme toujours un personnage conceptuel intéressant sur la question qui nous occupe. Les 2 significations vont prendre un sens quasiment allégorique : - d’un côté vous aurez la question proprement spéculative de quelle est la nature de Dieu ? quelle est si je puis dire la nature surnaturelle de Dieu ? - et puis de l’autre côté vous aurez comme Dieu comme auteur ou comme créateur de la nature. Vous avez comme toujours dans les débats théologiques des matrices conceptuelles d’une extrême rigueur. Prenons le pb dont nous parlions tout à l’heure, le passage naturel entre les 2 sens du mot nature. Il est particulièrement aigu pour Dieu : est-il de la nature de Dieu de créer la nature ? Est-il de l’essence divine d’être en position de création par rapport à la nature cette fois comme extériorité, comme objectivité naturelle, comme monde ?

Vous pouvez avoir une thèse selon laquelle la création de l’univers naturel n’est que l’accomplissement de l’essence divine : il est de la nature de Dieu de déployer l’univers naturel. C’est la solution de continuité. Et pour vous avez l’autre solution qui est la solution de discontinuité : rien dans la nature de Dieu ne commande qu’il soit créateur de la nature. Les 2 hypothèses sont particulièrement lisibles…. Au fond, l’espace ouvert là, c’est l’espace couvert entre Descartes et Spinoza si on veut donner un référent simple et classique. Que vous pouvez revisiter sous cet angle. α) thèse continuiste de Spinoza La thèse de Spinoza est absolument et radicalement continuiste. Si vous poussez au bout la thèse continuiste, entre l’essence de Dieu et l’essence de la nature, s’établit une indiscernabilité. S’il est de l’essence de dieu d’être créateur de l’ensemble de l’univers naturel, alors l’univers naturel lui-même est immanent à Dieu. Il n’y a plus de critère de discernabilité. C’est la thèse immanentiste : Dieu et la nature, c’est la même chose. L’essence de Dieu, c’est sa puissance. L’essence de Dieu, c’est la production immanente et incessante d’une infinité d’effets. La thèse continuiste aboutit à une vision productiviste de Dieu si je puis dire. Dieu n’est rien d’autre que la capacité à produire en lui-même dans sa propre substance une infinité de modifications. Vous trouverez chez Spinoza un argumentaire radical quant à la thèse continuiste entre la nature comme essence et la nature comme extérioirité. Il a ses noms à lui làdessus : la nature comme productivité immanente, il l’appelle nature naturante. La nature comme effet déployée, comme objectivité produites, la nature comme produit et non plus comme production, il l’appelle nature naturée. La thèse fondamentale, c’est que la nature naturante et la nature naturée, c’est la même chose. C’est la même chose, selon un régime d’intellectualité différent. Vous pouvez prendre la nature du côté en quelque sorte de l’essence productive de Dieu, puisqu’elle est cela, à ce moment là vous avez la nature naturante ; vous pouvez aussi la prendre comme objectivité déployée, et c’est la nature naturée. Mais c’est la même chose. Nous avons ce qu’on peut considérer comme le point culminant du rapport continuiste entre les 2 sens fondamentaux du mot nature, Spinoza est celui qui dans la distinction indivise entre activité et passivité désigne la continuité maximale concevable entre la nature comme productivité immanente divine, et la nature comme déploiement de ce qu’il appellera la face totale de l’univers. La nature, c’est dieu comme production identique à l’être même, et cette production c’est quoi ? c’est la totalité de ce qu’il y a. Pris comme production immanente, c’est la nature naturante, et pris comme extériorité, c’est la nature naturée. C’est l’unité maximale radicalement conçue des 2 significations constitutives de l’ambivalence du mot nature. C’est ce qu’on appelle l‘immanentisme de Spinoza : les 2 sens du mot nature sont indiscernables, ontologiquement unifiés. β) thèse discontinuiste de Descartes Et puis Descartes, c’est la thèse contraire : absolument rien de l’essence divine ne permet de soutenir l’intelligibilité de la création de la nature ; thèse discontinuiste, et si discontinuiste que Descartes soutient que ce geste créateur doit être incessamment réitérée. C’est la thèse de la création continuée. Dieu ne cesse de recréer instantanément l’ensemble de la nature, car précisément il n’y a là aucune espèce de continuité saisissable. Pourquoi il l’a créée ? Là vraiment, on est dans la question qu’il importe de ne pas poser ! C’est son affaire. Il y a un bien moment où l’infinité divine doit s’exhiber comme telle, dans la clarté de son incompréhensibilité, si je puis dire. Il y a une incompréhensibilité claire et distincte de Dieu, ce qui n’en fait pas une notion confuse. Le fait qu’on ne puisse pas comprendre ça [encore moins l’eucharistie soit dit en passant, qui pose beaucoup de problèmes : la présence de Dieu dans l’hostie, lisez les lettres au père Mesland. On éclaire les théories de la nature en examinant les théories du surnaturel. Les théories du miracle sont de manière essentielle une théorie de la nature, puisque c’est une théorie de ce qui y fait exception. Si vous lisez les lettres au père Mesland sur l’eucharistie, vous serez renseignés sur la conception que se fait Descartes de la nature et du surnaturel] S’agissant de Dieu c’est pas la même chose : il est clair et distinct que nous ne sommes pas en état de comprendre tout ce qui concerne Dieu. L’idée de l’infini est claire et distincte, mais l’effectivité de cette idée ne l’est pas. Il n’hésitera pas à dire que l’idée d’infini est plus claire que celle du fini, mais ça ne veut pas dire que nous comprenons les desseins de Dieu. Ça a à voir avec la nature de Dieu pour Descartes, la nature de Dieu est claire et distincte mais incompréhensible dans son effectivité. Le résultat est que, pour ce qui est de la création continuée de l’univers, nous n’avons aucune clé d’intelligibilité, en termes de finalité, de destin etc…, mais ce que nous savons c’est que c’est discontinu pour nous. C’est la thèse opposée à celle de Spinoza. L’expression de création continuée le montre : le temps cartésien est un temps discontinu et dans cette discontinuité temporelle se loge la discontinuité chronique se je puis dire de la création divine. Rien de la nature de Dieu n’éclaire ce qu’il en est de la création de la nature.

Vous avez là un espace qui est une matrice extrêmement puissante pour éclairer la question que je crois être la question la plus délicate de la catégorie de nature, qui est de savoir s’il y a passage naturel ou non nature entre les 2 sens du mot. C’est une torsion : la définition permet-elle ou non de penser comme naturel le passage d’un sens du mot nature à l‘autre ? C’est une grille de lecture. Spinoza et Descartes, c’est pas la même chose. La définition de la nature comme productivité divine immanente autorise chez Spinoza à concevoir un passage absolument naturel de la nature de Dieu à la productivité naturelle et au déploiement de la nature. Par contre Descartes a une conception totalement extérieure de l’univers naturel, de l’étendue physique, qui lui interdit d’accéder à une théorie selon laquelle il y aurait un passage naturel de la création divine à l’univers naturel. γ) Leibniz comme position intermédiaire Celui qui est entre les 2, c’est Leibniz ! Leibniz, malin, est toujours en train de se faufiler entre les autres. Il est entre les 2, parce que Dieu, il a tous les mondes possibles dans sa tête, si vous me permettez cette métaphore de la tête de Dieu. Là qu’est-ce qui se passe, pour la création ? Il fulgure le meilleur des mondes possibles. C’est dans sa nature, s’il fulgure un monde, de fulgurer le meilleur. Il ne peut pas faire autrement. On a bien un enchaînement quasi spinoziste : les contemporains l’ont vu : Dieu, asservi à la nécessité naturelle immanente, il ne peut pas créer un autre monde que celui qu’il a créé, puisque c’est le meilleur. Il ne peut pas créer un monde moins bon, ce serait indigne de son essence. La question est de savoir s’il était de son essence d’en créer un ? est-il de la nature de Dieu de créer une nature, de créer un univers ? si oui, alors on est quasiment dans une continuité spinoziste. S’il est de l’essence de dieu de créer le monde, comme par ailleurs il est certainement de son essence de créer le meilleur des mondes possibles, il n’a pas le choix entre plusieurs variantes, et vous êtes dans une continuité absolue. Il est de la nature de Dieu d’avoir créé ce monde, et la question de savoir comment il se distingue de ce monde qu’il a créé se pose avec acuité. Et on est dans le grief de spinozisme. Leibniz va tenir le cap qu’il n’est pas à proprement parler de l’essence divine de créer, de fulgurer un monde. Mais alors il rame ! C’est très difficile, car quand même, quand tous les mondes sont là, et que le meilleur brille, comment se retenir de donner la petite pichenette qui le fait fulgurer ? si c’était des mondes minables, d’accord, mais ce n’est pas le cas. C’est le problème des discontinuistes : qu’est-ce qui, dans la nature divine, a bien pu l’amener à produire cette chose là ? mais s’il y a le meilleur, si tout est bien, pourquoi ne pas le fulgurer, pourquoi le garder ? Leibniz, comme toujours, a coupé la difficulté en 2. C’est une solution à de nombreux pb en général. Il a dit : le pb de la création du monde par rapport à la nature de Dieu, il y en a 2 : - lui était-il nécessaire naturellement de créer un monde ? - lui était-il nécessaire naturellement de créer ce monde ? Il a déclaré : je suis discontinuiste sur la 1ère question et continuiste sur la 2nde. Sinon on enchaîné Dieu au Styx du destin. Mais s’il en crée un c’est nécessairement celui-là : une solution composite qui distribue d’un côté la continuité et de l’autre la discontinuité. Alors je termine ce parcours du schéma : en fin de compte, que faut-il retenir qui aura pour vous puissance de mise en ordre, de la question, quelle qu’en soit la forme ? Il y a en définitive 3 pb enchevêtrés et liés, dont tout ce mouvement a été une illustration, et que je résume une dernière fois, de manière un peu ressassante, qui peut vous servir : 1° il y a une ambivalence constitutive du mot nature. Essayez de trouver vos propres mots. J’ai proposé intériorité extériorité, mais on peut dire nature naturante et nature naturée, c’est la même chose. Il y a quantité d’exemples. 2° il y a donc toujours une question d’articulation de cette ambivalence. Une question de passage, synthèse, mouvement, ça va dépendre des contextes (dialectique, non dialectique), mais il y a la question de savoir comment s’articulent les 2 sens du mot nature. Toute philosophie est marquée par ce protocole d’articulation. Dans la métaphysique classique, elle est toujours lisible dans la création du monde par Dieu. Et après, c’est lisible dans la question de l’homme. Dans la période classique regardez Dieu, dans la période moderne regardez l’homme. 3° la question suprême c’est celle de la naturalité ou non du passage. La question du caractère naturelle de l’articulation est la question dernière : est-ce naturellement que se produit dans le dispositif de pensée concerné l’articulation des 2 acceptions du mot nature ? C’est lisible dans les moments forts d’une philosophie, dans les moments où elle est en proie à sa difficulté la plus grande.

… affaire à la définition d’un concept, mais à la question de savoir si cette définition est opératoire quant au concept lui-même. Est-ce que la manière dont vous traitez le concept de nature est elle-même naturelle selon votre propre définition de la nature. Si on essaie de logiciser, c’est des questions très complexes. Logiquement, c’est des questions d’auto-référence, de façon sous-jacente malgré tout. Comment un concept tombe en partie sous lui-même. Est-ce que le mouvement ou l’ambivalence du concept de nature peut être surmonté de façon naturelle ? dans la métaphysique, c’est qch de l’ordre de l’auto-référence, dont vous savez qu’elle a été et demeure une question importante en logique formelle. C’était ce que je voulais vous dire sur le schéma, et ma foi si vous souhaitez intervenir d’une façon ou d’une autre, c’est le moment. Après nous allons nous lancer dans des études plus spécialisées. 3ème moment : interventions Question : que faut-il entendre par nature dans l’expression les nombres naturels. Réponse : la question de savoir ce qu’un mathématicien considère comme naturel est une question qui quoique malheureusement un peu technique est très éclairante sur la question qui nous occupe. Vous prenez l’exemple le plus simple, celui de nombre naturel. Il y a des exemples plus récents et complexes d’un extrême intérêt : concept de transformation naturelle, la distinction entre des isomorphismes naturels et ceux qui ne le sont pas. Le mot nature a une occurrence là où on ne l’attendait pas du tout, pour désigner finalement des geste de pensée, je les appellerai comme ça, des gestes de pensée qui, aux yeux du math, selon ses critères à lui, ont une certaine transparence. Transformation naturelle, ou isomorphie naturelle, ça désigne une opération, une correspondance, une fonction qui par rapport à la situation de pensée des objets en cause a une sorte de transparence particulière. Je ne vais pas m’engager dans des considérations trop technique. Qu’est-ce qui est considéré comme naturel est instructif sur ce qu’il faut entendre par nature. Sur les nombres naturels c’est un peu différent. Ils sont dits tels car tout se passe comme s’ils étaient, dans l’ordre du nombre, ce qui est donné avant la math elle-même. Naturel prend à l’intérieur des mathématique un sens pré-mathématique : les nombres entiers sont une donnée, qui est la donnée élémentaire du compte, de l’activité de compter. En ce sens on enregistrera que ce n’est pas une élaboration artificielle de l’espace mathématique constitué, mais pour le mathématicien, quelque chose qu’il traite, fondamental pour lui, presque de l’ordre d’une donnée antérieure à son activité. Naturel est pris en ce sens là. Si on voulait, historiquement on peut renvoyer ça à la crise des irrationnels et à l’origine grecque de la question. Puisque ça a été une thèse pythagoricienne que la nature elle-même était nombre. On a au moins une tentative spéculative d’identifier la nature à la numéricité. Il a été soutenu que la pensée de la nature c’était de découvrir sa numéricité sous-jacente, qu’elle était tissée par le nombre. C’est la na nature qui est nombre, et puis nombre signifiait nombres entiers ou rapports de nombres entiers, donc ce qui est appelé rationnels. Mais vous le savez la question de la mesure de la diagonale du carré a contraint à introduire d’autres nombres. Et au fond très vite ces nb ont été considérés eux comme moins naturels que les autres. On les a appelés irrationnels, ce qui est le mettre très loin de la nature, stt chez les grecs. A ce moment là, naturel est considéré dans la rétroaction de artificiel : comme il y a des nombres très peu naturels, alors les anciens nombres sont devenus plus naturels. Ils ont été naturalisés depuis une mise en ordre de plus en plus axiomatique et artificieuse. C’est un bon topos, il est monnayable, utilisable. Le naturel en mathématique est tout à fait intéressant. Question : la naturalité de la spirale elle-même ? Réponse : Elle va dépendre elle aussi d’un concept de la nature permettant d’interroger la naturalité de ce mouvement. En réalité il faudra répondre que la naturalité de ce cheminement, s’il y en a une, est une comment l’appeler ? Il y a 2 manières de répondre à votre question : - on peut tenter de dire : si ce schéma a quelque chose de naturel dans l’exposition du mot nature (est-il approprié à l’exposition du mot nature), on peut faire une réponse qui dirait oui si on assume de bout en bout que nature est un opérateur dialectique, si on en donne une interprétation semi-hégélienne. Après tout, on va de l’indéterminé absolu (être) à la singularité absolue (Dieu). Le mouvement peut être considéré comme hégélien. Mon escargot est un escargot hégélien un peu trafiqué, ça relève d’une conception de ce type là : intériorisation extériorisation, dans une ligne qui va de l’indéterminé à l’absolu. C’est la ligne hegelienne constante. - on peut avoir une thèse pragmatique différent : on peut dire aussi que sa seule naturalité est didactique, de transmission. La naturalité du schéma c’est sa valeur agrégative. C’est l’interprétation basse ! mais c’est une naturalité aussi : il y a une naturalité pragmatique du schéma. Naturalité ne veut pas dire vérité

ou adéquation conceptuelle. C’est une bonne façon de disposer le concept de nature au regard de sa disposition contradictoire. Voilà les 2 lectures possibles. Question : Réponse : Hegel est continuiste, absolument.. Le texte que nous allons expliquer est de Hegel, pour Hegel la nature c’est l’extériorisation, et cette extériorisation est elle-même une production nécessaire. Il est absolument de l’essence de l’essence de se manifester. C’est le thème hégélien fondamental. La nature comme extériorisation intégrale est perte de soi dans l’extériorité du concept mais est aussi et en même temps un accomplissement de son essence. C’est une continuité disposée avec des questions très compliquées sur le terme final. Le problème chez Hegel, c’est qu’il tente de mettre à la fin ce que Spinoza met au début. Les textes de Hegel sur Spinoza disent expressément ça : Spinoza, c’est bien joli mais il n’a pas pu inscrire dans sa propre construction le moment de la conscience de soi, le moment productif du connaître comme tel. Il y a quelque chose qui n’est pas donné dans l’Éthique c’est la possibilité de la genèse de l’Éthique elle-même. Il faut que le mouvement de production naturelle de l’essence rende raison de son propre mouvement. Hegel, c’est un tour de plus dans la continuité, sauf qu’il y a un problème sur la fin, sur pourquoi et comment ça s’achève, à quel moment et comment il se fait que c’est achevé, pb que n’a pas Spinoza, pour qui c’est toujours déjà là. C’est pour ça que je proposais de dire que la ligne pointillée du schéma, si vous la prenez dans un sens du haut vers le bas c’est Spinoza, et dans l’autre sens, du bas vers le haut c’est Hegel. Pour Spinoza il y a d’abord l’absolu, dieu, et puis la totalité, c’est la production : totalité c’est nature naturée et dieu c’est nature naturante. Hegel veut en venir à la singularité divine, qu’il appelle l’idée absolue, et pour ça il faut exhausser la totalité elle-même. Qu’est-ce qui prouve qu’on est arrivé ? C’est d’une grande difficulté : vous devez parvenir à l’absolu. Nature va prendre des sens différents : pour Spinoza nature c’est dieu même, avec distinction formelle naturante naturée, tandis que pour H nature c’est le moment de l’extériorité. Question : Réponse : la discontinuité ou la continuité va être liée au statut même primordialement accordé au concept de nature dans la philosophie dont il s’agit à la théorie de la totalité, de la multiplicité, de l’extériorité, ça va être très variable. Je ne prétends pas pratiquer l’exhaustion des significations. Ce qui va conduire à des thèses de continuité ou discontinuité va être lié….ça va aboutir à la question du rapport entre l’un et le multiple, à la fin des fins. Le concept de nature est toujours distribué entre la multiplicité et l’un. On peut nommer son ambivalence de bien des façons, intériorité extériorité nature naturante / nature naturée mais aussi l’un et le multiple. Le moment de l’extériorité c’est le moment de la diversité : il y a l’extériorité, la multiplicité pure, la dissémination. Et nature c’est ça, et c’est aussi l’un de cela, la puissance d’intériorité une de cette dissémination. Le rapport entre l’un et le multiple est une précondition fdtale de la question de savoir quel va être le concept de nature et donc en définitive du pb de savoir s’il va y avoir continuité ou discontinuité dans la conception générale de la vérité. Qu’est-ce que le mot nature soutient sur la vérité, ça va se jouer sur continuité discontinuité. Les théories discontinuistes soutiennent que entre vérité et nature il y a un écart, alors que les théories continuistes inscrivent le déploiement naturel dans l’étayage ou le mouvement de la vérité elle-même. Quelque chose comme ça. Question : Réponse : il faut qu’il y ait, pour que la surhumanité advienne, dans l’humanité, une brisure. Comme elle ne se produit pas de manière immanente, il faut en effet quelque chose comme un choc, un heurt, une scission incalculable. C’est pourquoi, dans le moment même où N disait qu’il allait casser en 2 l’histoire du monde, il annonce à ses correspondants abasourdis qu’il va y avoir des guerres comme on n’en a encore jamais vu. Ce mot guerre consonne avec ce que vous dites : ce n’est pas dans l’autoaccomplissement d’une essence vitale de l’humanité que la surhumanité va advenir, mais dans un heurt interne ou un conflit incalculable que va surgir la possibilité d’une brisure. Q : Nietzsche matérialiste ? R : c’est une thèse qui éradique absolument tout finalisme de l’essence. On y reviendra : de façon sousjacente, il y a la question du rapport entre nature et finalité, c’est le biais le plus usé de tous. Si la nature accomplit son extériorisation ou son déploiement sous l’injonction de sa propre intériorité, alors quand

même ça veut dire qu’il y a une finalité naturelle. Si vous appelez matérialisme le renoncement à la finalité, alors effectivement la contingence des guerres, des heurts et des chocs va décider en lieu et place d’un accomplissmeent immanent plus ou moins finalisé. La thèse continuiste est toujours plus ou moins finaliste. Le génie de Spinoza c’est de tenter une continuité non finalité, c’est pour ça qu’il est obligé de postuler une immanence absolue. C’est difficile à penser. Rien d’autre pour l’instant ? En attendant je vous distribue le texte de Hegel. Hegel C’est un texte somme toute didactique de Hegel : il nous sert de transition assez convenable entre les considérations structurales générales que je vous ai proposées jusqu’à présent et les enquêtes plus fines et plus spécialisées sur la dialectique du concept de nature. Je le situe, simplement. On fera l’explication détaillée la prochaine fois. Ce texte se situe dans le 2ème livre de la SdL, ie dans le livre consacré à l’essence. On ne va pas faire du hégélianisme sophistiqué mais il faut se souvenir que la logique de Hegel comporte 3 mouvements : 1° l’être, 2° l’essence, 3° le concept. Quand on dit section 1 du 2ème livre, c’est le début du livre consacré à l’essence. Etre, essence, concept, c’est le déploiement général : ce texte vient dans un développement concernant l’essence qui est un développement sur la notion de fondement. Je ne vais pas vous restituer pas l’ensemble de la dialectique de l’essence, qui est très complexe, mais il n’est pas particulièrement surprenant que dès le début de la logique de l’essence on soit amené à s’interroger sur la catégorie de fondement, en tant que une des dimensions possible de l’essence, c’est d’apparaître comme le fondement de ce dont elle est l’essence. L’essence en tant qu’elle est le fondamental de la chose dont elle est l’essence va ouvrir la dialectique du foncement. Le moment de l’essence, c’est le moment de l’intériorisation, évidemment : être, être là et la ressaisie intérieure de l’essence et le développement complet qui va être le concept effective, et dans l’essence on interroge la question du fdt, de façon classique : l’essence est-elle dans la chose ce qui en fonde l’identité véritable ? et si l’essence d’une chose peut être dite en fonder l’identité véritable, alors il faut s’interroger sur le fdt. La 1ère distinction que fait Hegel c’est entre le fondement formel et ce qu’il appelle l’indication des fondementréel. Il y a une opposition formel / réel qui vient s’ajuster à la dialectique du fondement. Là aussi on a 3 temps : fondement formel, fondement réel, fondement complet. - que signifie fondement formel ? Le fondement formel, c’est au fond ce qui saisit l’essence sans tenir compte de ce qui dans la chose n’est pas son essence. L’essence opère comme un fondement purement formel, quasiment au sens de l’isolement ou de la séparation de la forme chez Aristote, qui est à l’arrière plan de cette discussion. Autrement dit, si vous saisissez l’essence dans la séparation de la matière (dit Aristote) ou de la diversité concrète (dit Hegel), vous avez un fondement mais un fondement purement formel. Si vous dites : c’est un chat, c’est une désignation formelle aux yeux de Hegel, une fonction formelle de l’essence de la bête que vous avez devant vous. Voyez bien ce que veut dire fondement formel : c’est l’essence prise en séparation d’avec ce dont elle est l’essence. Si vous dites c’est un chat c’est vrai mais ce n’est que formellement vrai. Vous ne dites rien de la singularité concrète devant vous. Vous diriez la même chose sur les choses différentes. C’est la forme. C’est ce qui définit le formel : au regard de singularités différentes, vous prononcez la même chose, à savoir la forme, ce que ces choses différentes ont en commun. - Hegel établit le moment du fondement réel : il faut indiquer tous le éléments réels pour que le fondement soit réellement un fondement. Il faut dire c’est un chat, mais il est blanc, et roux il est petit, c’est un mâle etc…. il va falloir indiquer, et ces choses là sont aussi des fondements puisque l’enjeu est de penser la singularité. Penser la singularité c’est un cheminement, vous voyez comment il se distribue là : dans un 1er temps, j’aborde la singularité selon sa forme, je vais désigner sa nature comme essence formelle, puis après je vais basculer dans l’autre sens : je n’ai rien dit de la singularité, si je veux fonder la singularité, ce qu’il importe c’est de dire, d’indiquer les fdts réels, ce qui le constitue vraiment. - et puis ensuite Hegel va montrer que ni l’un ni l’autre n’autorise la pensée de la singularité : dans un cas vous êtes la pure forme, dans l’autre vous êtes la dispersion des matière. Dans les 2 cas vous manquez la singularité qui suppose l’articulation intrinsèque des 2 dimensions. Classique exercice dialectique. Le passage que je propose est une remarque (les remarques sont des passages didactiques, explicatifs, c’est pas dans le corps des énoncés dialectiques). Les remarques chez Hegel c’est comme les scolies chez

Spinoza. Il y a une remarque sur les mathématiques de 150 pages (c’est plus long que l’Ethique). Les remarques c’est pas des éléments accidentels, au point que je conseille quelquefois de ne lire que les remarques, ça en donne une vision plus pertinente peut-être que de suivre le ressassement dialectique. Là c’est une remarque, et c’est une remarque didactique destinée à faire comprendre qu’en réalité le fondement réel, indiquer les fondements réels, est tout aussi formel que le fondement formel. C’est ce que veut éclaircir cette remarque. Quand vous dites « il est roux, il est petit, il est né avant-hier », c’est aussi formel que quand vous dites « c’est un chat ». A l’arrière plan c’est une polémique contre l’empirisme. C’est quelque chose qui veut montrer que l’empirisme est en réalité un formalisme (ce ne sont pas les mots mais c’est l’enjeu). Indiquer le fondement réel, c’est la position empiriste. Isoler le fondement formel c’est la position dogmatique. La position dogmatique et la position empiriste sont l’une et l’autre des formalismes. C’est la dernière phrase « ………………….. tout autant un formalisme que le fondement formel lui-même». Du point de vue des enjeux polémiques, cette remarque est destinée à établir qu’il n’y a pas plus de vérité réelle dans l’empirisme descriptif qu’il n’y en a dans le dogmatisme formel, platonisant (j’extrais ou j’isole la forme). C’est très intéressant de voir que l’orientation de la polémique consiste à montrer que les 2 sont un formalisme. Ce n’est pas que les 2 sont des empirismes. L’empirisme lui-même est un formalisme, l’empirisme dont l’activité consiste à dire « il faut fonder ça de façon réelle etc… », c’est un formalisme. C’est là qu’il va donner comme exemple la nature, et il va prendre la nature dans 2 corrélations. Nous retrouvons une autre mouture de l’escargot ! La nature va se retrouver coincée entre 2 concepts : d’un côté le monde, et de l’autre Dieu. 1ère partie du texte : la nature comme fondement du monde. 2ème partie du texte : Dieu comme fondement de la nature. Vous avez nature au milieu, la relation de fondement, Dieu comme fondement de la nature, et la nature comme fondement du monde. C’est ça qui va être l’enjeu de ce passage : - l’enjeu pour Hegel c’est de montrer qu’en matière de fondement, l’empirisme est tout aussi formel que le formalisme - l’enjeu pour nous, c’est d’éclairer cette double corrélation : nature dans son rapport à monde (question de cours, sur laquelle il faut être équipé) et puis Dieu et nature. Ce qui est intéressant, on en restera là pour aujourd’hui, c’est que Hegel va proposer de dire qu’il y a une symétrie. Quand on pense la nature comme fondement du monde, la relation est la même que quand on pense Dieu comme fondement de la nature. Au milieu du texte : « c’est la même relation ». La thèse de Hegel, éclairée par la question très importante de la philosophie de la nature, la thèse de Hegel, dont on repartira, est la suivante : le rapport de fondement de Dieu à la nature, c’est la même relation que le rapport de fondement de la nature au monde. C’est cette relation, cette même relation, qu’il faut que nous tentions d’éclairer et à partir de là d’éclairer le mot nature lui-même. 9.11.2000 : TEXTE DE HEGEL Ce n’est pas un texte qui expose la conception hégélienne de la Nature (comme ceux que l’on trouve dans l’Encyclopédie, dans les sections initiales de la nature), mais c’est une tentative pour disposer le concept de nature dans son ambivalence, ou sa tension propre. Là il le fait se façon assez indirecte, en intercalant le concept de nature entre celui de Dieu et celui de monde. Le point central du texte, et sa difficulté propre, c’est de proposer l’idée que le rapport entre nature et monde, la relation entre nature et monde est analogue dialectiquement, ou représente un schème dialectique identique à celui existant entre Dieu et nature. De dieu à nature, puis de nature à monde, nous avons à peu près la même relation formelle, et cette relation touche en définitive à la question du fondement. Avant d’entrer dans le texte, je voudrais faire 2 choses : Je voudrais rappeler e que j’avais dit la dernière fois. 1° qu’est-ce que le problème du fondement pour Hegel, pour l’intelligibilité du concept. 2° faire un détour kantien, car sur les concepts en jeu, le triplet Dieu nature monde, l’horizon de référence évident concerne certains passages dans la dialectique dans la CRP 1° Situation : la question du fondement. Le fondement est pour Hegel un moment de la dialectique de l’essence. Je rappelle que la logique de Hegel comporte 3 grands moments, qui sont - l’Etre

- l’Essence - et le Concept. Et le problème du fondement est intérieur au développement de la question de l’essence, sous la forme suivante : on appelle fondement l’essence pensée dans son rapport à ce dont elle est l’essence (c’est ce moment que pour toutes sortes de raisons Hegel appelle réflexif), qui détermine le fondement comme un moment de l’essence, c’est le moment où l’essence va se donner dans un rapport essentiel à ce dont elle est l’essence, et non pas simplement dans sa séparation. Vous voyez comment ça s’articule à ce qe nous avons déjà dit ; le pb de la différence entre l’essence et ce dont elle est l’essence, et de l’ identité entre l’essence et ce dont elle est l’essence, intervient à propos du concept de nature. Car le concept de nature dans une de ses acceptions est au voisinage complexe de l’essence : entre la nature d’une chose et la chose (titre de Lucrèce : de natura rerum), quelle est la différence entre la chose et la nature de la chose ? qu’est-ce que la chose saisie dans son être naturel ou dans sa naturalité ? en quel sens la naturalité de la chose est ou n’est pas la même chose que la chose. Une des acceptions du mot nature est ce que Hegel va installer sous le nom de problématique du fondement (quel est le rapport entre une chose et son essence). Ça se dira aussi le rapport entre le fondement le fondé, quelle est la relation entre ce qui fonde et ce qui est fondé ? Là encore, le rapport en quelque manière entre l’actif et le passif, c’est finalement aussi une dialectique essentielle du mot nature, peut-être est-ce Spinoza qui l’a le mieux résumée en distinguant nature naturante et nature naturée. Nature naturante et nature naturée : c’est explicitement dans l’identité de la nature, elle-même identique à dieu, qu’on a une distinction purement formelle actif-passif. La nature peut être prise productivement ou créativement, ou activement, tantôt l’angle producteur, productif, tantôt l’angle sous l’angle du résultat, comme produit, constitué, créé. Il est vrai qu’on a de bonnes raisons de considérer qu’entre la question de la nature et celle du fondementil y a analogie formelle très forte : ce n’est pas un hasard si Hegel en vient à parler dans cette remarque de la nature daà propos de ce système de rapport entre le fondement et le fondé, ou entre le passif-actif dans l’acte de fondation. Dans la capacité fondatrice, il y a une relation, qui est le la relation entre ce qui fonde et ce qui est fondé. On va voir ce qu’il en est à ce propos de la nature. C’était pour situer cette remarque de Hegel dans le mouvement du texte. Nature monde d’un côté et monde nature de l’autre vont être pris comme exemples de cette relation. C’est l’architecture - simple - du texte : On a 2 exemples de la relation fondement-fondé. 1er exemple : la nature comme fondement supposé du monde. 2ème exemple : Dieu comme fondement supposé de la nature. ce sont 2 exemples de cette relation immanente du fondement entre ce qui fonde et ce qui est fondé. 2° détour kantien C’est ici que pour éclairer ce dont il s’agit, il faut remonter provisoirement à Kant. C’est évidemment dans une référence kantienne que assez naturellement Hegel en vient à prendre justement ces exemples là. Il y a bcp d’exemples possibles de la relation immanente entre le fondementet le fond, mais c’est sur l’horizon de la réflexion kantienne que ces exemples surgissent de façon naturelle. Kant traite de façon systématique, longuement, de cette double relation supposée entre dieu et nature d’un côté et nature et monde de l’autre : il s’agit de 2 passages cruciaux dans la Dialectique Transcendantale. - commençons par une excursion de ce que Kant entend par le rapport nature-monde. Vous trouvez les références dans le chapitre 2 de la Dialectique Transcendantale, dans la 1ère section qui est appelée Système des idées cosmologiques. C’est là que Kant va introduire, comme détermination essentielle, la distinction entre nature et monde. Je vous lis passage, il faut bien l’entendre, car ce qui importe, et ce qui va importer aussi à Hegel, dans ce passage du rapport entre nature et monde, ce qui importe c’est la question de l’identité et de la différence. En quel sens nature se dit du monde ? En quel sens nature n’est effective que comme monde ? En quel sens, cependant, nature et monde ont-ils des significations différents ? Avant la problématique du fondement, on est dans la question identité et différence entre monde et nature, ce que Hegel va ressaisir ou redéployer à sa manière. Kant dit ceci : « nous avons 2 expressions, monde et nature, qui sont quelquefois prises l’une pour l’autre ». Donc 1ère indication : dans un certain langage courant, nature et monde sont substituables. Kant va introduire une discrimination. Il continue : « La première, monde, signifie l’ensemble mathématique de tous les phénomènes, et la totalité de leur synthèse en grand aussi bien qu’en petit, ie dans le développement progressif de cette synthèse, aussi bien par assemblage que par division ». Donc monde, totalité des phénomènes, aussi bien par agrégation macroscopique, si je puis dire, que par division microscopique.

C’est donc cette totalité dans sa double dimension d’agrégation universelle et de division infinie, que l’on nommera du nom de monde. Retenons en réalité comme pertinente et suggestive la désignation de monde comme catégorie mathématique au sens de Kant (ie qui s’oppose à dynamique). Le monde est une totalité statique, c’est la nature comme tout en soi. Ou, on pourrait dire dans un lexique contemporain, c’est l’ensemble de phénomènes naturels, les phénomènes naturels pris comme ensemble, comme multiplicité indifférente au mouvement, aux lois et au devenir. « Ce même monde s’appelle nature en tant qu’il est considéré comme un tout dynamique : on n’a point égard ici à l’ agrégation dans l’espace et dans le temps pour la réaliser comme unité, mais à l’unité dans l’existence des phénomènes". Que dit-il ? Dans un 1er temps, monde et nature, c’est la même chose, si je puis dire (car chose est interne à ce dont il s’agit), mais c’est la même chose vu mathématiquement d’un côté, et vu dynamiquement de l’autre. C’est relativement clair. On appellera monde la totalité pure des phénomènes, on appellera nature cette même totalité ressaisie comme totalité dynamique, ie avec le système général des lois de son devenir propre. Mais quel est ce même ? Voilà la question délicate, et exemplaire de toute investigation de la nature. Quel est ce "même" qui se dit soit mathématiquement, soit dynamiquement ? soit comme monde, soit comme nature ? dans le texte de Kant monde désigne un des sens du monde et la chose vue de 2 côtés. on appellera nature ce même monde, on appellera le monde mais vu dynamiquement. Le monde est pris ici en 2 sens c’est la difficulté : il est pris dans un 1er temps comme signification mathématique des phénomènes. Puis il est pris dans un 2ème temps comme la chose qui peut se dire tantôt math tantôt dynamiquement, comme nature. Il y a une double occurrence de monde : il se dit mathématiquement et dynamiquement, et quand ça se dit math ça se dit nature. C’est l’énigme de même, puisque sa désignation fait problème. On attendrait un 3ème terme, dont on dirait que quand il est pris mathématiquement il s’appelle monde, et quand il est pris dynamiquement qu’il s’appelle la nature. Ce 3ème terme c’est l’ensemble des phénomènes. Il n’a pas de nom particulier. C’est là que Kant va faire une remarque fondamentale, d’une extrême complexité, qui est que ce 3ème terme, l’ensemble des phénomènes, ce n’est pas une agrégation spatiale ou temporelle, mais une unité d’existence des phénomènes. C’est les phénomènes appréhendés dans leur existence, dans leur existence si je puis dire pure, dans leur exister pur. Comme si d’une certaine façon il était quand même fait là allusion à la totalité phénoménale comme totalité non encore ordonnée encore par l’Esthétique Transcendantale, on n’a pas égard ici à l’agrégation dans l’espace ou dans le temps. Totalité des phénomènes n’est pas totalité dans l’espace et dans le temps au sens de ce qui est constitué ou perceptible qui n’est pas encore constituée dans l’expérience. C’est une totalité d’existence. Et donc, ce 3ème terme, j’emploie ici une métaphore, ce 3ème terme est en quelque manière quelque chose comme l’être de la totalité phénoménale, son exister, son exister, mais être n’est pas ici pris au sens de chose en soi, c’est l’être du phénomène comme phénomène (c’est assez voisin, malgré tout, si vous me permettez ce court-circuit historique brutal de ce que dans son contexte à lui Heidegger appelle l’étant en totalité : pour Heidegger aussi, l’étant en totalité, ce n’est pas l’être, ça demeure dans l’espace de l’étantité). Il y a qch d’analogue ici, qui est que au fond on ne peut construire l’opposition nature-monde, ou la distinction nature monde, qu’en se référant à une totalité phénoménale, qui d’une certaine façon est la totalité phénoménale comme telle,… et non pas expérimentable, qui d’une certaine façon est la totalité phénoménale comme telle, dans son exitse phénoménal, et non pas dans son caractère expérimentable selon les catégories de l’espace et du temps. C’est quelque chose formel, ce n’est pas une donation dans l’expérience, cette totalité n’est pas donnée dans l’expérience. Il n’y a pas d’expérience de la totalité phénoménale, et certainement de la totalité phénoménale prise dans son agrégation universelle et sa division infinie. Il n’y a pas d’expérience de ça, mais il n’y en a pas non plus d’intuition intellectuelle. En ce sens, je dis que c’est un terme formel. Ce terme forme, cette idée de la totalité, Kant l’appelle l’existence. Kant introduit dans son lexique le mot d’existence. Ça nous amènerait à dire ceci, en commentaire de ce passage (c’est prospectif, développez le pour votre propre compte) que pour distinguer nature et monde, il faut se référer à l’existence, ou introduire la catégorie d’existence, au regard de la totalité phénoménale comme telle, la totalité phénoménale supposée inexpérimentée, et inexpérimentable,donc donnée comme pur exister formel. Pourquoi il faut introduire la catégorie d’existence ? Il faut nécessairement l’introduire car monde et nature sont 2 modalités de l’existence de la totalité phénoménale. Nature et monde ça désigne 2 modes différents d’existence de la totalité phénoménale : - le mode d’existence mathématique, qui est en quelque manière l’existence totalisée, simplement, et ça c’est le monde, la totalité des phénomènes comme addition de l’exister pur sans considérations des lois ou d’une dynamique du devenir. C’est une 1ère manière opur la totalité phénoménale d’exister.

- 2ème manière d’exister, qui est son mode d’existence dynamique : cette fois on prend en compte ou on saisit l’inflexion, le devenir et le système général des lois de ce devenir dynamique. Ce passage est complexe, mais il en faut retenir une chose : il y a toujours un moment dans la construction du concept de nature, où vous avez affaire au rapport entre existence et totalité. Quel rapport entre existence et totalité désigne ou instruit le mot nature. C’est le dispositif kantien pour distinguer Nature et monde. Nature et monde, c’est 2 modes formels de l’exister de la totalité phénoménale, c’est pourquoi il dira : là nous avons égard à l’unité dans l’existence des phénomènes. L’existence des phénomène est une catégorie remarquable : c’est l’être du phénomène comme phénomène, et ça n’a rien à voir avec le noumène, l’en soi. On peut poser la question non seulement de l’être du phénomène, mais la question de la phénoménalité en tant qu’elle existe. C’est de ça qu’il est question dans la nature : il est question de l’exister du phénoménal dans ses modalités possibles. Kant fait un choix, il assigne nature à la modalité dynamique de l’exister de la totalité phénoménale. Par contre, si vous avez affaire simplement à la totalité de cet exister, alors vous direz que c’est le monde. Cette convocation de l’existence, je voudrais montrer comment elle fonctionne aussi chez Hegel. Pour ça, je suis obligé de refaire une situation du texte, et de vous donne un aperçu du plan de la dialectique hegelienne par rapport à la remarque que nous allons commenter. La Théorie de l’essence dans la Logique de Hegel est divisée en 3 sections. La liste des concepts est importante : nature-monde-existence-totalité. L’argumentaire est structuré par ces catégories. Il y a 3 sections : - 1ère section : l’essence en tant que réflexion, et plus précisément l’essence en tant que réflexion sur elle-même. - 2ème section : elle s’appelle le phénomène. - 3ème section : elle s’appelle l’effectivité. Réflexion, phénomène, effectivité : derrière le jargon, c’est assez simple, c’est un plan passe-partout que vous pouvez adopter pour une question relative à la nature, à savoir: - réflexion : la nature comme intimité ou proximité avec soi-même de la chose (la nature de la chose c’est ce qui lui est propre : agir conformément sa nature, conformément à ce qu’on a de plus propre ou de plus essentiel il fait ça car c’est sa nature : la nature comme le propre…). C’est en tant que réflexion sur soimême. Nature en un de ses sens désigne l’intériorité maximale de la chose dans sa conformité à son être essentiel. - phénomène : renversement, la nature désigne l’extériorisation phénoménale dans son déploiement sensible effectif. Vous avez le 2ème sens dialectiquement retourné du mot nature qui fait passer de ce qu’elle a de plus propre, à au contraire ce qui de la chose est le manifesté. Vous passez du propre à la sa manifestation. Comme nature désignait intimité et manifestation sensible, ou intériorité maximale et l’extériorité comme telle. 1er temps : réflexion sur soi-même, le propre, 2ème temps : phénomène - effectivité : unité de l’intérieur et de l’extérieur, c’est la nature comme concept achevé, ou comme concept complet. C’est le problème du passage du 1er sens au 2ème sens. Avec la question de savoir dans quelle mesure ce passage est lui-même naturel ? Si la nature se prend à la fois du côté de l’essence et du côté de l’extériorité, qu’y a-t-il de naturel dans le passage de l’un à l’autre ? C’est contenu dans la question de l’effectivité : l’effectivité, c’est le moment où ce qui est donné dans l’intimité et dans l’extériorité phénoménale s’avère une seule et même chose, ce qui est déployé. C’est le cadre général. Il est intéressant d’examiner les sous-sections, nous allons nous rapprocher de Kant : - 1er temps : le temps de la réflexion sur soi-même, le temps du propre, va se donner sous 3 figures, que Hegel nomme successivement l’Apparence, la Détermination, et le Fondement. L’essence en tant que réflexion sur elle-même se donne successivement comme l’Apparence, la Détermination, et le Fondement. Je n’entre pas dans l’exégèse de cette triplicité (comment se fait-il que la réflexion commence par l’apparence ? réponse : car il y a un moment de l’immédiat du propre, c’est ce qui se donne dans l’apparence du propre, dans la singularité en tant qu’elle apparaît). On commence par l’apparence, ensuite cette apparence se détermine, elle advient réellement à sa singularié, puis qui touche à son fondement. Notre texte est à la lisière de l’essence comme réflexion et l’essence comme phénomène. - 2ème temps : celui de la phénomène, se donne lui aussi sous 3 figures. Le 1er temps, c’est l’Existence. le 2nd est le Phénomène

le 3ème est ce que Hegel appelle le Rapport Essentiel. C’est la Dialectique du Phénomène : existence, phénomène et rapport essentiel. Vous voyez donc que, juste après le fondement, dans lequel nous allons avoir la remarque qui constitue la substance de notre texte, vient l’Existence. En définitive, la question du rapport entre ce qui fonde et ce qui est fondé ne se règle que dans l’existence, que pour autant que la chose existe. On a une proximité avec Kant, une proximité un peu retournée, un peu biaisée avec Kant. Ce que dit Kant : si on veut en venir au concept de nature dans sa distinction avec le monde, il faut convoquer l’existence. Vous ne pouvez concevoir l’unité et la différence entre monde et natue que du point de l’existence du phénomène en totalité. Hegel : On ne peut comprendre la question du fondement qu’à partir de la question de l’existence.... Le rapport entre fondementet fondé n’est intelligible et clarifié que par la modalité de l’existence. Et cette existence est bien celle de la totalité, exactement comme pour Kant. Car le chapitre sur l’Existence commence par cette sentence magnifique : « tout ce qui est, existe ». C’est quand Hegel se hausse jusqu’à des énoncés présocratiques. Tout ce qui est existe. C’est la maxime de l’existence. Tout de suite après, Hegel va en venir au phgénoène. « tout ce qui est, existe » : l’exister, c’est l’exister du tout, et pour autant que c’est l’exister de tout, alors c’est le phénoménal comme tel, c’est ce qui va construire et délivrer la phénoménalité. Une des grande différence entre Kant-Hegel : ce qui souvent chez Kant vient avant vient après pour Hegel. Kant va dire : il y a l’exister de la tot phénoménale et là distinguer nature et monde. Hegel distingue le fondement et le fondé et ça donne l’exister de la totalité phénoménale. Il y a un retournement de l’ordre conceptuel. Ce qui nous intéresse ici, c’est que tout ça gravite autour de la question : "qu’estce qu’exister pour la totalité ?". Comment la question du phénomène est-elle liée à la totalité et aux modalités d’existence de la totalité ? c’est une chose dépliée par Kant et récupérée, ressaisie par Hegel. Nature vient là, nature vient dans l’espace conceptuel qui inclut l’exister, totalité, phénomène. C’est vrai pour Kant et Hegel. Finalement, nature, c’est un indicateur conceptuel pour savoir ce que veut dire et comment se nomme et se pense l’existence de la totalité phénoménale. L’existence de la catégorie phénoménale exige ou requiert la catégorie de nature, dans sa tension propre, c’est en partage chez Kant comme chez Hegel. C’était la 1ère grande ponctuation, sur l’arrière-plan kantien du texte de Hegel, sur monde et nature. Sur Dieu et nature, nous avons aussi un horizon kantien fondamental : dans la 6ème section Dialectique Transcendantale, ie le texte qui s’appelle De l’impossibilité de la preuve physico-théologique. La preuve physico-théologique, c’est une preuve qui lie immédiatement la question de la nature à la question de Dieu (grosso modo, la preuve physico-théologique, c’est la preuve par les merveilles de la nature. je reviendrai sur ce point. c’est un point intéressant, le motif des merveilles de la nature, pour l’élucidation de ce qui est pensé sous le nom de nature). l’ordre est tel, il est si admirable etc… qu’il y en a forcément un auteur transcendant. Je n’insiste pas là-dessus. La preuve physico-théologique est distincte de la preuve cosmologique. Comme son nom l’indique, la preuve cosmologique a essentiellement affaire à la question du monde. La preuve physico-théologique a essentiellement affaire avec la question de la nature. Cette distinction kantienne entre monde et nature, qui renvoie à l’exxistence de la totalité des phénomènes, qui renvoie à la question de l’opposition entre mathématique et dynamique, elle organise en réalité le système des preuves distinctes de l’existence de Dieu, ou la distinction fondamentale entre preuve cosmologique et preuve physico-théologique, examinée en dernier.. Je rappelle que Kant ordonne preuve ontologique, preuve cosmo, physico-théologique : la physicothéologique renvoie à cosmo, et la cosmo renvoie à l’onto. En réalité, il n’y a qu’une seule preuve valide, c’est l’argument ontologique car il est implicitement contenu dans les 2 autres. Preuve physicothéologique : c’est de la nature qu’il s’agit, de la totalité phénoménale dynamique, ie du spectacle de la nature : c’est pour ça que c’est les merveilles de la nature, les agencements extraordinaires de la dynamique naturelle. C’est bien de ça qu’il s’agit dans l’argument physico-théologique. Kant va nous dire que cette preuve physico-théologique s’appuie sur l’expérience des choses du monde présent, sa nature et son ordonnance. Le point de départ de la preuve, c’est l’expérience des choses du monde présent, sa nature et son ordonnance, et de cette nature et de cette ordonnance, on va passer à la conviction de l’existence d’un être suprême. Il va y avoir dans le pur spectacle expérimenté de la nature et de l’ordonnance du monde de quoi forger cette conviction de l’existence d’un être suprême.

Il y a un point intéressant, et délicat et en chicane : quelle est la différence finalement entre la preuve cosmologique et la preuve physico-théologique ? ie la preuve fondée sur le concept monde de monde, et la preuve fondé sur le spectacle de la nature. c’est très proche : l’expérience des choses du monde présent, on retrouve l’amphibologie du mot monde, le monde est convoqué dans cette preuve physicothéologique. Il vient étayer l’argumentation en faveur de l’existence divine. quelle est la différence finalement entre la preuve cosmologique étayée sur le monde et la preuve physico-théologique étayée sur la nature ? - dans la preuve cosmologique, le référent reste indéterminé. Le point de départ n’est pas l’expérience. Ce n’est pas l’expérience des choses du monde. La preuve cosmologique prétend conclure de l’existence indéterminée du monde à l’existence de Dieu. Monde, là, est une totalité mathématique indéterminée, dans l’argument cosmologique. L’argument consiste en gros à dire : s’il y a un monde, alors il y a un créateur du monde, un principe nécessaire, on remonte de la contingence à la nécessité etc… je ne donne pas le détail de l’argument, que vous devez connaître. Ce qui m’intéresse, c’est ceci : dans l’argument cosmologique, il n’y a pas d’expérience déterminée des choses. Il y a appui pris sur le concept indéterminé de monde, sur le concept indéterminé de totalité mathématique des phénomènes, de totalité phénoménale mathématiquement conçue. Donc l’argument cosmologique réellement n’entre pas encore dans la question de nature, au sens de Kant. Il est réellement cosmologique mondain : il n’a pas besoin de l’expérience des choses du monde, et de leur devenir, et de leur spectacle, et de leurs lois. Il a besoin en réalité du pur concept de monde comme totalité mathématique. - par contre l’argument physico-théologique est enraciné dans l’expérience, dans l’expérience de quoi ? l’expérience de la nature et de l’ordonnance du monde. On passe du monde à la nature du monde. Mais la remarque qu’il faut faire c’est que pour passer du monde à la nature du monde, vous devez passer de l’indétermination à la détermination. Vous devez passer du concept indéterminé de monde comme totalité mathématique indéterminable supposée à une détermination expérimentable des choses dynamiques… dans leur agencement merveilleux, et admirable. Mettons ça dans un coin, comme une pierre d’attente. Il y a dans le dispositif kantien des preuves de l’existence de Dieu la conviction que nature renvoie à ce qui du monde est expérimentable. ça s’appuie sur les choses du monde, l’ordonnance dynamique du monde, la singularité merveilleuse du monde. Donc ce qui est physique dans physico-théologique, ce qui relève de la science de la nature, ou de la connaissance de la nature, renvoie nécessairement à une expérience constituée et déterminée, et non pas à la figure abstraite ou formelle de la totalité mathématique des phénomènes. Il faut donc, pour accéder à la nature proprement dite, quelque chose de plus que l’existence en son sens générique ou formel (la totalité phénoménale). Il faut cette fois une expérience (une expérience, ce n’est pas simplement l’existence, c’est pour Kant des objets, et les lois ou les relations de ces objets, des relations transcendantalement constituées entre ces objets). Ça ouvre une piste, un élément d’investigation, une hypothèse excédant un tout petit peu le texte kantien mais suggéré par le texte, qui est que au fond, il y aurait une solidarité organique, dans le concept de nature, entre existence (comme référent formel indispensable : nature est la totalité formelle existence, c’est le moment comme dit Hegel où tout ce qui est existe, où on prend je dirais tout ce qui est en tant qu’il existe – vous pensez tout ce qui est, mais en temps qu’il existe) et il y aurait par ailleurs un élément d’expérience, distinct, lui, où se donnerait la singularité naturelle, et non pas simplement la nature. Ie où se donnerait cet élément que nous n’avons pas encore fait rentrer en ligne de compte, mais qui est un concept clé, où se donnerait l’élément de contingence du déploiement naturel (ie ce qui ne peut être attesté dans aucune expérience, ce qui n’est en aucune manière conceptuellement déductible ou supposable, mais qui ne peut être que rencontré : l’élément du spectacle de la nature). Vuos voyez : c’est ce qu’il a d’intéressant dans l’argument des merveilles de la nature, à l’arrière-plan. Sur ce point, il y a un petit élément historique qu’il faut avoir présent à l’esprit. Il y a eu au 18ème siècle une reviviscence de l’argument physico-théologique. Cet argument a si je puis dire repris du poil de la bête au 18ème siècle en accompagnant l’investigation scientifique. Il y a eu, pour discipliner et faire face à la mode de la science expérimentale (ce qui caractérise le 18ème c’est une sorte fétichisation de la science expérimentale, et finalement l’empirisme lui-même s’articule sur ce point), pour escorter ce point il y a eu une apologétique des merveilles de la nature. En particulier, vous en trouvez trace dans le texte de Kant, les observations microscopiques la découverte des dispo cellulaires amibiens etc… le fait que dans une goutte d’eau vous trouvez finalement tout un monde. Tout ça a été récupéré repris réarticulées dans l’élément de la preuve physico-théologique. C’était des découvertes : la preuve a repris une nouvelle intensité de la preuve à raison de ce qui était découvert d’improbables. Ce n’est pas un argument tourné vers la nécessité. son espace propre est la contingence de la singularité naturelle, mais tourné vers la

prolifération inouïe et totalement improbable de l’univers naturel tel qu’on l’observe, tel qu’on le rencontre. Le mot rencontre me paraît juste : on tombe sur ces choses là sans en avoir l’idée ou la prescience. Il ne faut pas sous-estimer l’importance et l’impact qu’on eu les observations microscopiques : on était dans la découverte de l’invisible. Ce n’était plus le voir élémentaire. Le voir élémentaire a été un vecteur philosophique essentiel pendant des siècles. Métaphore du voir, intuition, coup d’œil, le voir élémentaire du sensible et le voir intelligible est essentiel dans l’histoire de la philosophie. Or le microscope change le voir plus encore que le télescope : le télescope agrandit ce qu’on voit, tandis que le microscope fait voir ce qu’on ne voit pas. C’est autre chose. C’est un objet philosophique considérable. ça change la nature : la nature n’est plus à la mesure de la visibilité. C’est comme s’il y avait dans la nature une prolifération immanente insoupçonnée, mais qu’on découvre quand même. Vous en avez une trace chez Kant quand il dit la nature c’est le monde par agrégation mais aussi par division. Cet élément de division infinie articulé là soigneusement avec l’opérateur du microscope, à la place du concept de nature, comme incluant une démesure par rapport au voir ordinaire. La nature, ce n’est pas simplement ce qu’on voit, ie la disposition du sensible, c’est peut-être plus encore ce qu’on ne voit pas dans ce qu’on voit. Ce qui est caché, mais effectivement là, dans la part invisible du voir. Et l’argument des merveilles de la nature change un peu de sens avec le microscope. Il change un peu de sens, parce qu’il met l’accent cette fois non pas tant sur l’ordonnance que sur la prolifération : il y a plus dans la nature que ce que notre voir n’en suppose ou n’en enregistre. C’est ça le mouvement réel qui conduit à l’idée d’un principe suprême. Principe suprême qui serait au fond celui qui voit tout, celui qui a la puissance microscopique du voir. Par ailleurs il sera créateur, mais le mouvement de la pensée qui fait qu’on remonte de la prolifération naturelle à l’idée d’un principe suprême, quand il est pris au 18ème dans l’élan admirable de la science ex, du microscope, des dissections…. C’est l’idée qu’il y a certainement un autre œil que le nôtre, même agrandi prolongé perfectionné par le microscopie…il y a une infinité qui soit se prolonger à l’infini. Et ce débordement du voir ordinaire est le ressort des nouvelles preuves sur les merveilles de la nature. La merveille est moins ordonnancement que l’infinité. La merveille de la nature, c’est son infinité latente. L’idée de Dieu devient l’idée de celui pour qui cette infinité latente est patente, celui qui est à la mesure de cette infinité. C’est pourquoi en fin de compte c’est dans son principe un argument leibnizien. L’ontologie est leibnizienne : série phénoménale infini, il doit bien y avoir une raison, au sens mathématique. Tout ça est à l’arrière plan et de Kant et de Hegel. J’y insiste, car il faut entendre par preuve physico-théologique non pas tant une preuve qui remonte de l’ordre au principe d’ordre (c’est plutôt la preuve cosmologique), mais une preuve qui argumente de l’excès sur l’ordre. En tirant un peu les choses, c’est le contraire : ce n’est pas tant l’idée de l’unité totale du monde qui est au départ, que l’idée que ce qui apparaît comme monde est creusé par des labyrinthes infinis qui requiert une intelligibilité autre que celle dont nous sommes capables, comme le microscope l’a prouvé. Il est vrai dans ce cas que Dieu va apparaître comme fondement. Non pas tant comme créateur que comme raison suffisante de tout cela. Comme ce qui, quelque part, indique qu’il y a un ordre de cet excès lui-même, ou un ordre de cette prolifération naturelle. Il va donc être le fondement de la nature. il va être plutôt pensé comme fondement que comme [simple créateur d’un ordre] Dieu est ce qui, eu égard à la complexité, est la simplicité requise du fondement qui nous échappe et qui est requis. C’est une question de savoir pourquoi se pose la question du fondement de la nature. Au vrai, c’est l’énigme essentielle de notre texte. Parce que il semble bien que dans un 1er temps ce soit la nature ellemême qui soit fondement (ce que dit Hegel : c’est le fondement du monde). Pourquoi ce qui est le nom du fondement devrait-il être fondé à son tour ? pourquoi y a-t-il la question d’un fondement de la nature ? Si la nature était un ordre auto-suffisant, on n’aurait pas besoin d’un fondement, peut-être aurait-on besoin d’un créateur ou d’un démiurge, mais pas d’un fondement. Exemple : Timée de Platon. Il n’y a pas de fondement du cosmos. Démiurge n’est pas le fondement du cosmos, mais le fabricateur. Il est transcendant. Le monde a une âme, il est son propre fondement (d’où le motif de l’âme qui désigne ça). Le démiurge commence par fabriquer l’âme du monde. Il y a un changement, qui est parallèle à l’opposition que fait Kant entre l’argument cosmologique (qui est grec), et l’argument physicothéologique qui (bien qu’il soit ancien) est moderne, un argument rénové par les sciences expérimentales, argument transformé car les merveilles de la nature ne sont pas les mêmes qu’avant. On en connaît beaucoup d’autres, et beaucoup plus. Ce n’est que dans ce 2nd cas qu’on a besoin d’un fondement. Pourquoi ? parce la nature n’est plus un ordre cosmique (comme dans le 1er argument), mais la nature c’est une prolifération merveilleuse, labyrinthique, un excès phénoménal qui requiert d’être fondé. Au demeurant, Kant va dire : ça ne prouve pas, ça, qu’il faille un créateur transcendant. Tout au plus en effet ça prouverait qu’il faut qu’il y ait quelque chose qui met tout ça en ordre. Mais qu’il y ait quelque chose

qui met tout ça en ordre, ce n’est pas équivalent au fait d’avoir un principe suprême de l’exister du monde. Ce que je voulais en retenir, c’est finalement que derrière l’opposition monde-nature, nous pouvons trouver un changement de sens du mot nature. En vérité, je dirais volontiers que la conception cosmique de la nature (telle qu’elle est par exemple à l’œuvre dans le Timée de Platon, et peut-être encore présente dans le Traité du Monde de Descartes), cette conception cosmique est une conception qui d’une certaine façon montre l’auto-suffisance naturelle du monde. Et qui d’une certaine manière ne distingue pas vraiment nature et cosmos. Le cosmos, c’est l’effectivité de la nature, ce n’est pas autre chose. Par contre, nature, dans la preuve physico-théologique, ou dans l’argument des merveilles de la nature, c’est autre chose. C’est autre chose, car dans ce cas, effectivement, ça dit autre chose que monde. ça dit qu’il y a dans la puissance dynamique, proliférante, et créatrice de la nature, un excès irrattrapable sur tout ordre cosmique. La nature si vous me permettez une image, c’est plutôt les souterrains du monde, ce qui du monde excède le voir élémentaire que nous en avons. C’est ce qui fait que le monde est bien autre chose que le monde (c’est ça la nature, Kant va dire que c’est la dynamique, ie idée de l’excès sur la totalité). Ou à l’idée de l’excès de la totalité sur elle-même, que le dynamique phénoménale est en excès sur la totalité représentable cosmiquement. Il ne faut pas s’étonner si tout ça conduira finalement à Kant à des méditations sur le sublime, sur ce qu’il en est de la sublimité du phénomène naturel. La sublimité du phénomène naturel, c’est ce qui en lui est de l’ordre d’un excès irrécusable, quelque chose dont le spectacle qui nous écrase, nous humilie, nous rappelle notre insignifiance. C’est la frappe du sublime. Cette idée de la frappe sublime est déjà présente déjà de façon limitée dans la distinction entre les 2 preuves, entre monde et nature et dans la manière dont la conception dynamique de la nature se donne quelque chose qui est en excès sur le monde comme totalité mathématique. Le dernier point introductif, c’est à propos d’une distinction que Kant va introduire, qui est la distinction forme-matière (qui va nous permettre de penser ce qui est en jeu dans cet excès naturel). Je vous lis un bref passage, où se récapitule la critique que Kant va faire de l’argument : « suivant ce raisonnement la finalité et l’harmonie de tant de disposition de la nature ne prouverait que la contingence de la forme mais non celle de la matière, ie celle de la substance du monde. Il faudrait en effet pour établir ce dernier point ». nous démarrons par : de quoi s’agit-il dans cette considérations de la prolifération des formes naturelles ? de quoi s’agit-il quand nous avons sous les yeux le spectacle microscopique de l’excès indéfini de la nature, lorsque nous voyons tant d’organismes, que nous les voyons se reproduire, qu’ils obéissent à leur finalité etc… ? ça, c’est la contingence inépuisable du spectacle naturel. C’est la contingence du côté de la multiplicité injustifiable du côté pour notre raison simple. Ça c’est la contingence de la forme. Retenons ce point : dans l’argument sur les merveilles de la nature, ce qui est touché, c’est la contingence de la prolifération formelle, mais ça ne touche pas la question de la matière, ou de la substance du monde. Parenthèse : c’est compliqué de savoir ce qu’est ici que la substance du monde, ce n’est pas la substance de la nature. ça nous entraînerait trop loin. « pour établir ce dernier point [pour établir la contingence de la substance du monde et pas seulement la contingence des formes proliférantes de la vie ou de la nature] il faudrait prouver que les choses du monde sont par elles-mêmes et suivant des lois générales impropres à un tel ordre et une telle harmonie si elles n’étaient pas même dans leur substance le produit d’une sagesse suprême ». Il est important de faire intervenir cette distinction, dans la question de la nature, entre forme et substance. C’est ce point que je voudrais isoler. Partons de notre intuition microscopique : nous sommes saisis du spectacle insondable des merveilles de l’harmonie et e la corrélation de tout ça, et nous sommes hors d’état d’en découvrir le fondementou le principe de raison. Mais ceci ne concerne que la multiplicité des formes, ça ne concerne pas la matière. Ce que Kant dit, c’est : les merveilles de la nature, macro et micro, c’est une prolifération formelle sur fond d’une matière. Le spectacle de cela nous donne bien la contingence des formes, mais pas la contingente de la matière que ces formes informent. Si on voulait prouver la contingence de la matière, il faudrait prouver que substantiellement, jusque dans leur substance, jusque dans leur identité d’être, les choses sont inaptes à produire ce spectacle. Ce ne serait que là qu’on atteindrait une contingence radicale. Mais une contingence de quoi ? Qu’est-ce que la matière ? Là, je fais l’hypothèse que la matière, c’est l’exister de la chose. Qu’ont toutes ces choses du spectacle de la nature en commun ? c’est de participer de l’existence phénoménal. Quand nous les rencontrons nous rencontrons leur exister. Nous constatons leur existence. Kant dit que : si vous voulez finalement aboutir à Dieu créateur, vous devez non seulement prouver la contingence de ces formes

(amibes et grenouilles etc…), mais vous devez aussi établir la contingence substantielle de l’exister de ces formes, et montrer que cet exister est par lui-même impropre à produire ces formes dans son propre mouvement. Ce qui nous intéresse en profondeur, c’est qu’il y a une distinction qui affecte le mot nature, et qui affecte le mot nature au sens suivant : est-ce que par nature il faut entendre la prolifération ou la forme générale des choses (ie les distinctions, la multiplicité phénoménale des formes), ou est-ce que nature ça enveloppe l’exister phénoménal comme tel ? Quand on dit qu’il y a une contingence de la nature (ce qui est le ressort de la preuve c si contingent qu’il faut une nécessité et cette nécessité c’est dieu), est-ce qu’on la limite à la contingence des formes (il est contingent qu’il y ait des grenouilles, amibes, de serpents… : il faut que qln détienne l’intelligibilité du fait qu’il y a tout ça), ou est-ce que c’est aussi le fait que l’exister pur de tout cela, son exister phénoménal, ne peut pas en rendre raison ? Alors il y a une contingence substantielle et pas seuelment une contingence formelle. Ça concerne le mot nature ; est-ce que le mot Nature est une désignation des dispositions formelles, ou est-ce que le mot nature enveloppe le rapport entre l’exister de ces formes et ces formes ? ce point est pbtiquement capital : Est-ce que par nature on entend au fond un protocole descriptif (nature, ce serait comme dans l’histoire naturelle, ie la narration des formes du vivant ou de l’inerte, la narration de la totalité phénoménale, le parcours, le récit de la multiplicité des formes naturelles), est-ce que c’est ça nature ? ou bien est-ce que nature ça enveloppe l’exister de tout ça, la totalité phénoménale comme existence dans son rapport à ses formes ? est-ce que nature c’est le rapport entre l’exister et les formes de l’exister ? C’est bien ce que va soutenir Kant. Kant soutient qu’il faut entendre par nature le rapport dynamique entre l’exister et les formes de l’exister (et pas simplement la totalité des formes). C’est pourquoi si vous vous contentez de totalité des formes, vous parlez du monde, vous ne parlez pas de la nature. vous restez dans une pensée cosmologique). Nature, c’est le rapport entre l’exister des formes et les formes elles-mêmes. Et la contingence doit envelopper la contingence de l’exister lui-même, ce que Kant va appeler contingence substantielle et pas seulement formelle. L’argument physico-théologique ne vaudrait que si on établissait la contingence au 2ème sens. la contingence de la nature en tant que contingence de l’exister et des formes de l’exister. Si ce n’est pas le cas, si on ne prouve pas ce point là, la preuve pourrait donc tout au plus « démontrer un architecte du monde, qui serait toujours très limité par les aptitudes de la matière qu’il travaillerait, mais non pas un créateur du monde auquel tout serait soumis ». Si la contingence de la nature ne signifie pas la contingence de l’exister substantiel de la nature, alors on prouve quoi ? on prouve juste le Timée de Platon, ie qu’il y a un démiurge. C’est tout ce qu’on prouve : un architecte du monde. Mais si on prouve un architecte du monde, il est empêtré dans la matière qui lui préexiste, il est limité par cette matière, et il n’est pas le créateur du monde. Vous voyez que le rapport Dieu-Nature, si nature est purement formelle (si nature, c’est les formes de l’exister phénoménal), c’est un rapport artisanal de fabrication, architecte du monde, c’est un rapport démiurgique. Vous n’avez pas un Dieu, vous avez un démiurge. Parenthèse : est-ce que chez Platon, le démiurge est embarrassé comme le dit Kant, par la matière ? oui absolument. Il est absolument embarrassé d’une double façon, que je vous rappelle : 1° pour créer l’Ame du monde, il doit mélanger le Même et l’Autre. Le cœur de la nature, ou le cœur dus il y a mondain c’est d’être arrivé à mélanger le même et l’autre. Platon précise bien que l’Autre n’aime pas être mélangé, il ne veut pas. Comment procède le démiurge ? le démiurge procède de force, dit Platon. Qu’est-ce que ça veut dire exactement ? C’est le moment où la fable prend le relais du concept. Si vous voulez un monde, il faut mélanger le même et l’autre. C’est une idée magnifique. Si vous voulez un monde, il faut mélanger le même et l’autre, et Platon a bien vu ça ! Mais l’Autre n’aime pas ça, il faut l’y contraindre : qch d’extérieur résiste à l’action démiurgique. On n’est pas dans la création toute-puissante du Dieu chrétien. Il est décrit comme qln en train de faire se tambouille. Il mélange de force. Il faut vaincre une résistance. 2° il y a cette histoire obscure de la cause errante : il y a quand même une matérialité ultime qui est présupposée. C’est une sorte d’embarras, dit Platon, il y a une matérialité qui n’est pas résorbable dans la planification idéale du démiurge. Platon a la conscience très aigue qu’il y a un reste de la rationalité du monde, qui est l’errance de la matière comme telle, l’errance du passif pur. Si construisez un monde selon l’Idée, il faut bien qu’il soit autre que l’Idée. S’il est autre que l’idée, il y a quelque chose en lui de cette altérité. C’est la cause errante. Si par nature on entend les formes de la vie, de la nature, du sensible, et seulement ça, alors vous aurez une démiurgie créatrice au mieux, et cette démiurgie créatrice sera aux prises avec une résistance inerte, qui est ce que Kant appelle la matière, la substance. A relire le Timée, c’est exact. Si la nature est un agencement formel…, mais le prix payé est que vous avez inertie irréductible. La nature c’est finalement la composition d’un principe idéal et d’une résistance, et un point

de fabrication qui est un point de force, de violence, un point de forçage. Il a fallu forcer l’idée à se tenir dans la matérialité. L’allégorie de ça chez Platon, c’est le mélange du même et de l’autre. Ce serait à la fin des fins sa propre définition de la Nature. c’est homogène à celle de Kant. La nature chez Platon c’est quoi ? c’est le cosmos, et sa généalogie est donnée dans le Timée. En fin de compte, d’où ça résulte, le cosmos ? De son âme, c’est l’âme du monde, et c’est le mélange du Même et de l’Autre. La nature, pour Platon, c’est le mixte du même et de l’autre. Figure qui a qch d’hegelien. Kant objecte que la nature ne peut pas être cela, ce n’est pas ça, sauf si on n’a que le démiurge (mais le démiurge est incommensurable à l’intention de la preuve, qui est de nous donner le Dieu chrétien, le démiurge est insuffisant). Si on veut le Dieu chrétien, il faut partir de la nature en un autre sens, et nature en un autre sens ça inclut la matière, la substantialité, ça ne la laisse pas en reste passif ou résistance inerte. Ça l’absorbe, ça l’inclut. La vraie question est celle du rapport dynamique entre la substance et de ses formes. La contingence de la nature est la contingence de cela, pas seulement a contingence des formes. Si je traduis de façon empirique en merveilles de la nature : il faut partir, non seulement du fait qu’il y a des grenouilles et des serpents (si vous partez de ça, vous aurez au mieux un démiurge), mais il faut partir du fait que la substance naturelle dans son dynamisme est telle qu’elle est foncièrement inapte, quel que soit le registre de nécessité qu’on envisage, à produire les grenouilles et les serpents, à produire la diversité des formes. Nous avons une querelle sur le mot nature (qui est peut-être épocale, ce qui s’est passé entre les grecs et le 17-18ème siècle) : est-ce que la nature c’est la totalité formelle ? ou est-ce que la nature c’est l’exister lui-même dans son déploiement formel et dans le rapport à son déploiement formel ? La question du Dieu dont on a besoin dans les 2 cas est profondément transformée. Cela aboutit à un ensemble conceptuel complexe, qui comprend Monde-Nature-Dieu, sans doute, mais qui finalement pose en réalité la question de l’existence dans son rapport à la distinction entre monde et nature. C’est le cœur de la question : où est l’exister du point de vue de l’opposition monde / nature, le monde étant au fond la conception cosmique de la nature, et la nature désignant la conception dynamique du monde. Les 2 termes n’abordent pas l’exister de la même manière. C’est pour ça que finalement, la question est vraiment de savoir ce que veut dire tout ce qui est existe. Est-ce que ça a un sens ? ça veut dire : tout ce qui est est dans une forme d’existence, car exister c’est exister avec sa forme propre, singularité, c’exister dans la diversité. Tout ce qui est existe, la totalité existe dans la diversité. La nature veut dire ça : pourquoi la totalité de ce qui est existe dans la diversité ? C’est la question de la nature. La nature, c’existence de la totalité dans la diversité, c’est le tout ce qui est, en tant qu’il se manifeste comme diversité formelle. Alors c’est là que effectivement il va y avoir un problème de substance et de forme, de matière et de forme. La tension du concept, ça va être : d’un côté il y a l’exister en totalité. L’existence en totalité, comme le dit Kan, c’est la substance du tout. On ne peut pas parler de nature si on ne parle pas de la totalité phénoménale. Il y a quelque chose qui est une matière, mais matière veut dire l’existence comme telle dans son indétermination. C’est la cause errante, dans l’indétermination existentielle pure, ça existe comme totalité phénoménale. Il y a ça, et il y a la diversité des formes, ie les merveilles de la nature, les lois physiques, la prodigieuse diversité des formes. Et nature ça pense le lien, sinon c’est un mot inutile. Si vous ne parlez que de la diversité des formes, vous pouvez parler de monde. Si vous avez en tête la totalité diversifiée et mathématique des formes, c’est le monde. Si vous ne parlez que de l’exister en totalité, c’est la substance, la matière, ou l’indéterminé. Vous n’avez pas besoin de nature si vous pensez les 2 versants séparément. L’exister pur comme matérialité de tout, c’est le substantiel la matière, l’indétermination de ‘exister comme tel. de l’autre côté, si vous prenez la diversité comme telle, c’est le monde, ou au mieux les choses du monde. Donc il faut bien que nature désigne la relation des 2, que ça enveloppe dynamiquement l’exister de la totalité phénoménale et la diversité proliférante des formes. Si nature désigne ce lienentre exister en totalité et la diversité des formes que se pose la question : 1° du rapport de la nature au mode ? (nature étant le lien entre diversité mathématiques des phénomènes et l’exister pur de ce qu’il y a, en tant qu’il y a c’est la nature, qui s’effectuera comme monde. donc fondement du monde). 2° il faut savoir comment s’opère le passage : d’où vient la puissance de la nature ? comment la nature peut envelopper l’exister dans la diversité des formes ? problématiquement, ça va être le rapport de la nature à Dieu). Qu’est-ce qui fonde la nature comme puissance ? Il est donc cohérent dès Kant que nature vienne se loger entre Dieu et monde, du point de vue de la disposition conceptuelle. Reste à éclairer pourquoi, et avec quelles intentions, Hegel soutient que c’est la

même relation. Ie que la relation de Dieu à la nature et de la relation de la ntaure au monde, c’est la même relation. C’est une chose qui doit être éclairée pour elle-même. Et qu’est-ce que c’est que cette même relation ? nous le verrons la prochaine fois. 16 NOVEMBRE 2000 Nous finirons les 11 et 18 janvier : la séance de la semaine prochaine est déplacée et en quelque sorte redoublée. Aujourd’hui notre enjeu est l’élucidation du texte de Hegel, comme texte concernant le concept de nature. je vais en donner une version simplifiée. Je reviens sur ce qui a été dit la semaine dernière, j’en donne une version simplifiée. La semaine dernière nous avons tenté de situer le texte de Hegel sur l’horizon de Kant. Nous avons examiné dans la CRP - examen dans CRP de la question monde-nature. - __________________________ nature-Dieu. → je coupe court vers les conclusions, c’est labyrinthique. C’est un fil conducteur de Kant et ….. 1er passage : Monde-Nature. Il s’agit d’un passage tiré de la dialectique à propos de la preuve cosmologique et des antinomies de la cosmologie. Qu’avons-nous dégagé de ce que dit Kant ? Nous avons dégagé 2 points, on peut ramener à 2 points : 1er point : si on veut comprendre la distinction entre monde et nature, ou même pour formuler cette différence, nous dit Kant, il faut un 3ème terme, et ce 3ème terme, c’est l’unité totale de l’existence des phénomènes. Il faut que la totalité phénoménale, prise dans son existence, soit assumée. Avec cette difficulté, que je rappelle, que cette totalité phénoménale, Kant l’appelle aussi le monde (il y a une amphibologie sur le monde, mais laissons ça de côté). Ce 3ème terme touche à l’existence de la totalité des phénomènes, et c’est à partir de là qu’on peut distinguer monde et nature. 2ème point : il faut introduire un critère de délimitation entre le concept de monde et le concept nature. Ce critère, appliqué au 3ème terme, donne la distinction conceptuelle entre monde et nature. Ce critère, c’est la distinction entre mathématique et dynamique. Entre un concept mathématique et un concept mathématique. Autrement dit, le monde et la nature, c’est le 3ème terme - donc c’est la même chose (chose est presque une métaphore) - à savoir la totalité existante des phénomènes. Mais ça s’appelle monde quand cette totalité est appréhendé mathématiquement, et ça s’appelle nature si c’est appréhendé dynamiquement (c’était le noyau du 1er passage examiné : un 3ème terme et un critère, pour distinguer monde et nature, qui aboutit à un monde comme totalité mathématique, donnée, ou statique ; et nature, si on prend le point de vue dynamique, la nature du point de vue de son mouvement, de ses lois, de son destin). Retenons-en un concept de la nature. Qu’est-ce que la nature ? La nature, c’est l’existence phénoménale prise en totalité, et examinée ou pensée dynamiquement. Donc vous voyez, la nature c’est bien tout ce qui existe, pour autant qu’existence ici signifie l’existence phénoménale, ie l’existence du phénomène comme phénomène. Nous avions dit, au passage, ça éclaire que Hegel mette la question de la nature sous le signe de la formule : "Tout ce qui est, existe". En vérité, nature, même pour Kant, c’est bien cela : c’est tout ce qui est, en tant qu’il existe phénoménalement. C’est bien le tout de ce qu’il y a phénoménalement, envisagé du point de vue dynamique. 2ème passage : Dieu-Nature. Ce passage se trouve dans la critique par Kant de l’argument physico-théologique quant à l’existence de Dieu. Là aussi, nature va intervenir : argument physico-théologique, ça veut dire argument qui remonter de la nature à Dieu. Il part de la physique, de la nature, et il faut remonter à la nécessité de l’existence d’un Dieu créateur. C’est l’argument fameux au 18ème des merveilles de la nature, du spectacle des merveilles la nature au 18ème siècle comme témoignage de la nécessité de la transcendance divine. Là, ce qui nous a intéressé, c’est la nécessité d’une distinction à faire, qui est cette fois la distinction entre forme et matière. La nature même va se prendre, là, selon la forme ou selon la matière. L’argument physico-théologique doit être envisagé sous double point de vue. Cest le ressort de la critique de Kant. En gros, Kant dit : l’argument vaut pour la forme, mais pas pour la matière (ou alors on a un démiurge comme architecte ou artisan, et pas à un Dieu conçu comme créateur). c’est étayé sur la distinction entre forme et matière. De quoi s’agit-il ? Il va falloir distinguer dans le spectacle de la nature, dans les merveilles de la nature entre :

- d’un côté, l’agencement, la forme, la prolifération des formes, la finalité, la collection des êtres vivants, etc… et on va reconnaître que tout cela, en effet, est en excès en tout cas les hypothèses de la pensée, ou en tout cas en excès sur un strict mécanisme, en tant que spectacle, en tant que donation d’excès proliférant des formes, organisations et finalité. Cela c’est la merveilles des formes. C’est le spectacle, physiquement frappant, de l’agencement des formes naturelles. - il va falloir distinguer cela, la ou les formes, de la matière dans l’intuition. Du fait que cela est. Cela est pour phénoménalement, pour l’expérience. D’une certaine façon c’est l’idée profonde : c’est de nouveau l’existence qui est convoquée. Knat dit que bien sûr dans la nature il y a le spectacle admirable des formes proliférantes, de la vie, des spectacles sublimes, même éventuellement de l’éclat naturel etc… il y a tout cela, et tout cela crée l’admiration légitime de la pensée, ça l’incline vers l’idée d’une toutepuissance. Kant dit : cet argument, il faut le respecter, il est ancien, il exprime au fond une certaine piété naturelle. C’est un argument qui est un argument est moralement respectable ! C’est une chose, mais l’existence phénoménale comme telle, ce qui est appelé l’existence phénoménale en totalité, ou l’unité de l’existence des phénomènes, en tant qu’existence, n’est pas touchée par cette considération. Donc le fait qu’il y a cela doit être distinguée des formes de cela. La matière de l’intuition n’est pas dissoute dans la considération de ses formes. Il y a une matière, il y a le il y a. il y a le il y a phénoménal. Si vous voulez prouver un dieu créateur, vous devez considérer que la nature c’est aussi et peut-être surtout le il y a phénoménal et pas exclusivement l’agencement frappant de ses formes. Sinon, on peut éventuellement prouver l’existence de ce que Kant appelle un architecte du monde, mais vous ne prouverez même pas l’existence d’un créateur de la nature. Vous aurez un architecte du monde, mais pas encore un créateur de la nature. Et même un créateur de la nature, dit Kant, ne serait pas suffisant pour le dieu de la religion. Mais même ça on ne l’a pas dans l’argument physico-théologique réduit à la considérayion des formes → finalement, il y a de commun aux 2 textes le moment où le maniement du mot nature exige la considération de l’existence phénoménale comme telle, pas simplement de ses formes, pas simplement de sa totalité math pas seulement de son élan dynamique, mais de son il y a considéré comme tel. Avec ce point que ce il y a n’est pas la question de la chose en soi, ce n’est pas la question de la réalité nouménale. C’est la question du il y a du phénomène en tant que phénomène. C’est cela qui est appelé existence. Il s’agit bien de l’existence, et pas de l’être, pour autant que existence désignera la manifestation de l’être (et non pas son identité qui nous inaccessible). il ne s’agit pas de la réalité nouménale dans la totalité phénoménale, c’est bien de la totalité des phénomènes en tant qu’il y a totalité des phénomène. C’est pourquoi il y a dans ces spéculations kantiennes ou post-kantiennes sur la nature, il y a quelque chose comme une méditation sur l’existence en tant qu’elle est autre chose que l’essence, l’être, la chose en soi etc… il y a une méditation sur l’existence en tat qu’elle est existence du phénoménal comme tel, en tant que existence du déploiement du phénomène. Nature c’est cela aussi, c’est l’existence en tant que déploiement de la phénoménalité, et ça accroche bien sûr les formes, les agencements, les merveilles, mais ça accroche le fait qu’il y a cette totalité phénoménale. Donc quelque chose qui touche au fond au fait que la nature, c’est une donation d’existence. Une donation agencée, formalisée, organisée, mais c’est une donation d’existence. Cette donation d’existence est donation d’existence d’une diversité phénoménale. C’est axial chez Hegel : il y a une diversité phénoménale qui est donnée comme telle, et la donation de la diversité est autre que les formes de la donation (le fait que le divers apparaît, qu’il soit donné, n’est pas immédiatement la même chose que les formes et l’agencement). C’est une intuition kantienne profonde. Elle est à l’œuvre dans des opérations conceptuelles simples. Elle à l’œuvre dans la distinction monde / nature et elle est à l’œuvre dans la critique de l’argument physico-théologique, ie dans le rapport Dieu-nature. si vous examinez monde / nature et Dieu / nature, ce que vous trouvez, c’est la question l’existence de la diversité comme telle, de la diversité phénoménale. C’est un élément essentiel de la considération de l’être naturel. Pour conclure sur cette brève incise kantienne : si on tendait un peu les choses, on pourrait dire que pour Kant, la nature, c’est l’existence comme dynamique (combinaison des 2 remarques). - la nature, c’est le il y a phénoménal, l’existence comme telle, le fait que ce qui est apparaît phénoménalement dans l’expérience, qui ne nous donne pas son être mais qui donne l’être de son apparaître, le fat que ce qui apparaît apparaît. - pour que ça soit nature, il faut que ça soit saisi dynamiquement. Si convient d’appeler existence, au moins provisoirement, la phénoménalité comme telle, le phénomène non dans sa constitution transcendantale mais en tant que phénomène, on dira que la nature c’est l’existence pour autant qu’elle est dynamique, sen tant qu’on la pense dans des catégories dynamiques. Donc finalement la nature c’est le devenir de l’existence ou l’existence comme devenir, avec ses lois, ses

formes etc… L’existence dans la tension dynamique de sa perpétuation. C’est la stabilité dynamique du phénomène en tant qu’il existe là dans l’expérience. C’est ça qui est la naturel, qui est la nature. C’est pourquoi ça touche bien à "tout ce qui est, existe" (qui est la formulation hégélienne). Mais c’est vrai pour Kant "tout ce qui est, existe", puisque la chose apparaît. Son phénomène ce n’est pas elle. Elle apparaît, et inversement ce qui apparaît est (reportez-vous à ce passage fondamental de la CRP, qu’il est intéressant de relire à la lumière de ce que nous disons ici, qui s’appelle la réfutation de l’idéalisme : c’est fdtal. C’est le passage où Kant affirme si je puis dire qu’il y a bien un être du phénomène, qu’il y a bien quelque chose et non pas rien). Je fais une incise formelle : Kant y tient tant – démo anti-berkeleyenne, anti-idéalisme pereptif – qu’il l’appelle un théorème, il lui confère une dignité mathématique. Il considère que c’est une démonstration, il considère qu’il donne une preuve. Preuve de quoi ? de quelque chose d’important ? c’est la preuve du il y a, qu’il ne peut y avoir une phénoménalité de l’objet sans que en effet il y ait chose en soi. Inconnaissable sans doute, mais quant à son être attestée ou avérée par voie de la preuve. C’est un argument ontologique, c’est un argument qui conclut à l’être, qui conclut à l’être effectif de l’objet. Là il y a ailleurs ce que Kant aurait dénoncé comme grand ton dogmatique (théorème). C’est un grand ton dogmatique. Pourquoi il prend le grand ton dogmatique ? parce qu’on est dans un moment de la CRP où la question de l’existence précisément va s’avérer décisive. Je soutiens que la vraie question de la dialectique transcendantale dans son ensemble, c’est celle de l’existence. Pas simplement la question de la réfutation des preuves de Dieu, pas seulement de savoir si le monde est fini ou infini. C’est l’existence : que pouvons-nous en penser ou en dire ? c’est donnée à travers l’existence de Dieu, du monde, de l’âme. Mais à travers cela, ce qui importe, c’est : quelle est la doctrine de l’existence ? cette question de l’existence, elle ne se résorbe pas dans celle de l’être, chose en soi etc… La réfutation de l’idéaliste va consister à dire : en tout cas il y a, il y a la chose, il y a vraiment. On ne sait pas ce qu’il y a, mais on sait qu’il y a. On le sait parce qu’on le démontre : c’est un théorème. Il y a. La question est : qu’est-ce que c’est que exister, au regard du fait qu’il y a ? qu’est-ce qu’exister, est-ce la même chose que il y a ? Quel est le rapport entre l’être et l’existence, entre la pensée et l’existence ? C’est le champ de la Dialectique. Nature est le nom dynamique de l’existence, ce n’est pas un nom de l’être (nom de l’être : ça peut être Dieu ou le noumène ou suprasensible). On ne peut complètement comprendre ce dont il s’agit que si on suit un peu les chicanes de la dialectique kantienne de l’existence dans sa différence avec l’inconnaissabilité de l’être. L’évidence de l’existence par rapport au caractère inconnaissable de l’être, c’est une tension qui joue dans le problème de la nature.

Venons-en au texte de Hegel. Hegel va donc reprendre à nouveaux frais les 2 questions nature et monde, et nature et Dieu. Il va montrer que au fond, c’est le même rapport. Le rapport de la nature au monde pose le même type de question à la pensée, finalement, que le rapport de Dieu à la nature. Au fond, ce texte va légitimer le rapprochement des 2 passages de Kant que nous avons opéré : il va falloir savoir, là aussi, comment opère la question 3ème terme. 3ème terme que Hegel va appeler la liaison : comment et où opère le 3ème terme dans la modalité de la liaison ? Nous allons y venir de façon méthodique. Pour Hegel, je le redis une dernière fois, le rapport nature / monde ou le rapport Dieu / nature, au stade où on en est dans la Logique, ce sont 2 exemples de la question du fondement. Ce sont 2 rapports, nature / monde et Dieu / nature, ce sont des rapports entre ce qu’on suppose être le fondement et ce qui est fondé. Ce rapport va aussitôt poser - ça va être le fil conducteur de tout le passage - le problème de l’identité et de la différence entre le fondement et le fondé (c’est patent aussi chez Kant : la question est de savoir quelle est l’identité et la différence entre nature et monde, en un certain sens c’est la même

chose, le 3ème terme, l’existence phénoménale, et en un autre sens c’est pas la même chose, distinction entre math et dynamique). Hegel reprend cette même question dans son appareillage propre. Quel va être le mouvement ? Quelle différence des 2 § sur nature et monde et sur Dieu nature ? La thèse de Hegel s’articule de la façon suivante : si on dit qu’une chose est le fondement d’une autre, on affirme d’abord, du point de vue de la pensée, leur identité. C’est la 1ère assertion. On affirme leur identité pourquoi ? parce si vous dites : « la nature est le fondement du monde » (ce qui revient à dire, si on remonte à Kant : le dynamique est toujours le fondement du mathématique, le devenir est le fondement de l’identité), un état du monde n’est qu’un résultat de la nature. Le monde comme totalité à un moment donné n’est qu’un résultat de la dynamique naturelle. Nature est le fondement du monde. Kant en serait d’accord. Si on dit ça, on dit que le monde, c’est la nature. Le monde, c’est un moment de la nature. Mais il n’y a rien d’autre dans le monde que la nature. C’est une assertion d’identité. De même, si vous dites que Dieu est le fondement de la nature, ça veut dire que l’essence même de la nature, en définitive, c’est le geste créateur de Dieu, c’est Dieu lui-même. Ce n’est pas intelligible autrement. Donc dans un 1er temps, déclarer le fondement, c’est déclarer l’identité. ça parce que le fondement est l’opération de venue à l’être du fondé. Fondement en un sens dynamique : ce n’est pas une séparation essentielle interne, c’est la dynamique de venue à l’être de la chose qui est fondée. Dire que la nature est le fondement du monde, c’est dire que la nature est cette puissance immanente qui se déplie comme monde. Quand vous dites Dieu est le fondement de la nature, ça veut dire que Dieu est cette puissance qui fait que il y a nature, qui fait que la nature advient comme il y a, comme existence. Dans les 2 cas, fondement ça veut dire ce qui fait venir à l’existence, c’est pour ça que c’est fondement. C’est ce par quoi dynamiquement advient l’existence de ce qui est fondé, la nature c’est la puissance qui fait que quelque chose comme un monde existe. Et dieu est ce qui fait que quelque chose comme une nature vient à exister. Le fondement c’est la dynamique de l’existence. C’est l’originarité dynamique de ce qui vient à exister. Vous comprenez que une existence ne peut être fondée que si vous pensez comment elle vient à exister. C’est un point qui va roder dans les théories de la nature : la nature est toujours pensée comme la puissance qui fait exister. C’est pourquoi la gde question de la nature est sa capacité créatrice. Créatrice, ça veut dire que la nature, c’est la matrice de l’existence, ce qui fait advenir de l’existence, une dynamique de l’existence. C’est en tant que telle qu’elle peut être dite fondement du monde (vous avez des intuitions de ce type chez Bergson : l’Evolution Créatrice, c’est aussi une intuition de cela ; le titre lui-même est le déploiement de : c’est intuitionner la nature au moment même où elle fait advenir de l’existence, mais pas de façon séparée, mais de façon immanente). C’est la nature comme fondement : quand vous avez Dieu comme fondement de la nature, cette puissance de la nature n’est elle-même venue à être que par la puissance divine. Vous attribuez à Dieu l’originarité de toute venue à l’existence de tout ce qui existe. Vous lui attribuez la venue à l’existence de cette puissance d’existence qu’est la nature ? Quand vous passez de nature et monde à Dieu et nature vous ne faites que reculer d’un cran dans la capacité dynamique de l’existence, ie le fondement de ce qui existe. Je fais une incise qui vous orientera vers d’autres lectures et d’autres réflexions : est-ce que l’existence implique un fondement ? C’est une thèse particulière. C’est une thèse qui au fond est le choix philosophique de l’idée de nature comme idée vectrice. Si nous avons raison, après Kant, Hegel, et beaucoup d’autres, de penser que la nature est la dynamique de l’existence, ou l’existence pensée dynamiquement, ça veut dire que nature nomme bien quelque comme le fondement de l’existence. Nous sommes d’accord, ie quand une chose est éclairée par sa venue à l’existence. On peut appeler naturaliste au sens large toute théorie de l’existence qui la déclare fondée, en ce sens là, qui renvoie à une puissance formatrice de l’existence elle-même (même si cette existence est phénoménale, peu importe). Cette puissance formatrice de l’existence est un des concepts de la nature. A quoi s’oppose la thèse selon laquelle l’existence est infondée. C’est une autre thèse, une autre option. C’est exemplairement la thèse de Sartre : l’existence est infondée. Il va le dire de bien des façons : l’existence précède l’essence, pas d’essence fondatrice de l’existence. Il va dire l’existence est liberté pure : ascendance fichtéenne. Ou il va dire : l’existence est néant. Vous dites l’existence est infondée : il n’y a pas d’intelligibilité de l’existence en tant qu’elle vient à jour. Il n’y a pas ce protocole dynamique d’intelligibilité naturelle de l’existence. Ce sont des philosophies anti-naturaliste, qui passent leur temps à dénigrer le concept de nature. Sartre a horreur de la nature, cf la racine de marronnier. Les descriptions littéraires attestent l’horreur de la nature, dont la racine est de tenir aussi radicalement que possible le caractère infondé de l’existence. Il y a quelque chose de cet ordre chez Kierkegaard. Ie la thèse selon laquelle il n’y a pas de naturalité de l’existence comme telle. Vous voyez c’est pour constituer cette question. Vous voyez à quel point est importante la question nature et existence) quel point cette convocation sourde et permanente de l’existence dans et à travers la catégorie de nature

Pour Hegel, la logique fondatrice est assumée. Il y a une intelligibilité de l’existence, l’existence est une catégorie de la logique, et nature peut parfaitement désigner ce mouvement dynamique de fondement de l’existence en tant qu’existence du monde. Si on attribue la capacité de fondement à Dieu, il est le fondement en puissance de la puissance de la nature elle-même. On décale juste d’un cran la puissance d’existence ou de venue à l’existence. C’est le 1er temps de l’analyse hégélienne : quand on dit cela, c’est une thèse d’identité entre fondement et fondé, parce que tout l’être du fondé est dans le fondement, puisqu’il est le fondement de l’existence. On va dire : ce qui se trouve nommé nature est une chose avec le monde, et le monde rien que la nature elle-même. Ou comme fondement, Dieu est le fondement de la nature, elle contient cette essence en elle et elle est quelque chose d’identique à elle. Évidemment aussitôt, cette thèse d’identité se renverse en différence : s’il n’y avait pas différence, il n’y aurait pas fondement. Le fondement n’est fondement qu’en tant qu’il n’est pas absorbé ou dissous, résorbé dans le fondé. Il faut bien pouvoir penser à part le fondé, à un moment quelconque. L’identifier comme ce qui est fondé dans la relation de fondement. Il y a donc quelque chose du monde qui est autre que la nature, et il y a quelque chose de la nature qui est autre que Dieu. C’est inéluctable. Ça nous intéresse beaucoup, parce que la question est de savoir qu’est-ce que cette altérité ? Si on dit : il y a autre chose dans le monde que cette puissance formatrice, à savoir la nature, c’est quoi cette autre chose ? C’est là que revient 3ème terme. Revient le 3ème terme qui va supporter la différence fondement et du fondé. De même, si on se demande ce que la nature a d’autre que Dieu, quelle est la différence entre la nature et son créateur tout-puissant, il va falloir convoquer un terme discriminant qui est autre chose pour identifier le fondement comme tel, et pas en tant que réductible au fondé (l’argument montre qu’il y a une lisibilité de Dieu dans nature comme étant une création divine). Il faut qu’on puisse différencier le fondement du fondé. Si le fondement et le fondé sont indiscernables, en réalité vous êtes dans la thèse de l’infondé ! vous n’avez plus aucune facteur d’intelligibilité du fondé par son fondement si en définitive vous ne pouvez distinguer fondement et fondé. Pour revenir à la question de l’existence : si vous commencez à dire que la nature est une puissance d’existence et que vous ajouter qu’entre l’existence et la nature il n’y a aucun moyen de distinguer, vous revenez à la thèse que l’existence, c’est infondé. La relation de fondement, ou de, exige dans un 1er temps d’enregistrer l’identité dynamique et dans un 2nd temps la différence math. La différence dans la chose même. Il se peut que le monde soit formé par la puissance de la nature. dynamiquement il est la nature. mais en lui-même, pensé comme ce monde à ce moment là, il faut qu’il soit différent de la nature. on peut utiliser le lexique de Kant : l’identité dynamique doit être contrebalancée par la statique mathématique (Kant). …………..Vous ne pouvez pas dire que le monde est la nature même si dynamiquement il n’est rien d’autre que la nature. la même chose va se dire pour Dieu. Si ……………nature est Dieu, il n’en reste pas moins que cette existence n’est pas non plus celle de Dieu. Vous voyez bien que ce qui va faire intervenir la différenciation ne peut pas être la puissance dynamique. Dès que vous êtes dans la puissance dynamique, c’est indiscernable. C’est une grande question. Elle travaille toutes les questions de la nature de Platon à Deleuze : à quel moment la puissance créatrice se distingue-t-elle de ses résultats ? Dès Platon, cette question est présente dans le Timée, cette question est présente sous la forme de l’obscure question de la matière, chaos, de la cause errante, qui fait qu’il y a quelque chose dans le cosmos qui est autre que l’activité formatrice du démiurge. La puissance formatrice intelligible du démiurge, ….mais qu’à un moment donné elle ne puisse pas être totalement identique au résulta car il y a quelque chose d’autre. Platon est presque au bord de dire que c’est irrationnel. Au point où nous en sommes, si la puissance formatrice ne peut pas être discernée de ce qu’elle forme alors on est dans l’infondé et l’inintelligible. si on veut garder l’intelligibilité, il faut garder la différence du résultat et du processus. penser autre chose. Exemples : - Différencier l’actuel de l’actualisation, bien que l’actualisation soit la totalité de l’essence de l’actuel, c’est le virtuel. Maison ne peut pas dire le virtuel ne soit rien que ce qui a été actualisé. Il y a une relation dissymétrique d’identité et de différence qu’il faut élucider, qui est au cœur des problèmes compliqués de la question de la nature. Comment va répondre Hegel ? Chez Kant c’est le moment où intervient la matière. S’il n’y avait que la forme, ce serait transparent. Mais il y a la matière, il y a le il y a. Il y a la résistance de l’existence. Il y a qch d’intrinsèque dans le fait d’exister qui résiste à la puissance formatrice comme telle, qui ne se dissout pas en elle. Hegel introduit 2 critères : qu’on retrouve tout au long de la Logique : - premièrement, le critère de la diversité

- deuxièmement le critère de la détermination. Ce sont les 2 critères conceptuels que Hegel introduit afin de pouvoir distinguer entre la dynamique du fondement de la réalité du fondé. Je dis fondement fondé mais ça peut être plus général : afin de distinguer entre l’essence d’un processus et la figure de son résultat. Par csqt, la façon de distinguer entre la nature et le monde, ou entre l’activité formatrice ou créatrice de Dieu et la nature. Il faut les préciser un peu : - diversité : c’est ce qui n’est pas résorbable dans l’identité. Il faut qu’il y a une diversité du monde qui n’est pas résorbable dans la puissance formatrice de la nature. Bien que dynamiquement, d’un bout à l’autre de cette diversité, il n’y ait que cette puissance formatrice. Mais la diversité en tant que diversité vous ne pouvez pas la résorber dans la puissance formatrice naturelle. Autrement dit, d’un côté, le monde n’est rien d’autre que le résultat d’un processus naturel, comme processus unificateur. Il n’y a rien d’autre dans l’existence même du monde que la puissance formatrice de la nature. D’un autre côté, la diversité de ce monde, tel qu’il est, ne se laisse pas penser à intégralement à partir de la puissance formatrice de la nature : il y a un reste. C’est intéressant de voir que ce reste (dans le Timée aussi, c’est une problématique du reste) ce reste, là, c’est la contingence de la diversité. Il y a une contingence de la diversité mondaine, au regard de l’intelligibilité de la puissance naturelle. C’est la 1ère figure du reste, le 1er nom du reste : diversité. Chaque fois que Hegel parle de diversité, c’est pour pointer un moment de contingence dans la dialectique. Chaque fois qu’on donne une puissance formatrice unifiante et que ce qu’elle unifie doit être distingué comme diversité, cette diversité est contingente. Ça nous amène à ceci que dans nature, dans le mot nature, il faut concevoir qu’il y a la question de la contingence du multiple comme résultat. Si transparente que vous rendiez la puissance formatrice de la nature, il demeure que la multiplicité du résultat est marqué par un élément de contingence. - détermination : c’est le 2ème critère. Voyez le début du texte : « de telle sorte que la nature est plus l’indéterminé ou au moins…. qu’à la nature, pour qu’elle soit monde, s’ajoute encore de l’extérieur une pluralité de déterminations ». Dans le 1er cas le critère, c’est un et multiple (le fondement naturel du monde c’est l’identité du monde, et cette identité est l’identité d’une multiplicité contingente). Dans le 2nd cas c’est le rapport de l’indétermination à la détermination : la puissance formatrice est l’indéterminé, la nature comme telle est l’indéterminé. Il n’y a que l’indéterminé, mais cet indéterminé s’effectue dans des déterminations, dans une pluralité de déterminations. Ce monde, il est le résultat d’une puissance naturelle indéterminé, mais est une collection de déterminations d’objets singuliers. C’est la question du caractère indéterminé de la puissance naturelle, ce que Deleuze appelle "la puissante vie inorganique", la vie avant les organes, la vie avant les déterminations (avant n’est pas chronologique), la puissance vitale dans son indétermination qui s’effectue dans une multiplicité d’effectuations vivantes. C’est une intuition bergsonienne fondamentale aussi : l’élan vital, la nature c’est l’élan vital. Mais la réalité existentielle de l’élan vital c’est la réalisation des êtres vivants. C’est le modèle de l’idée d’une puissance formatrice vitale et entièrement indéterminée mais qui est fondement, qui est création, et l’effectuation de cette indétermination dans un réseau de déterminations singulières (dont l’espèce est le paradigme le plus évident, c’est la vie se réalisant dans la multiplicité déterminée d’espèces vivantes, c’est le modèle sousjacent dans la dialectique particulière du rapport entre la nature et ses résultats). C’est la vie inorganique (Deleuze), ou l’élan vital (Bergson), ou dans le lexique de Hegel, c’est le fondement indéterminé. Et de l’autre côté vous avez au contraire la pluralité de déterminations et de singularités. Les 2 critères de différenciation du résultat mondain de l’activité naturelle : - un multiple - déterminé indéterminé. Il en va de même pour nature et Dieu : "La nature ne se trouve par conséquent pas connue à partir de Dieu comme du fondement car ainsi il ne serait que son essence universelle qui ne la contient pas comme essence déterminée … ". la nature vous ne pouvez pas la connaître par rapport à Dieu. Ce qu’on peut connaître par rapport à Dieu, c’est qu’il y a une nature, bien sûr. Le fait qu’il y a une nature renvoie à la puissance de Dieu. Mais cette nature dans sa détermination intrinsèque, vous ne le pouvez pas. vous ne pouvez pas la connaître uniquement à partir de son fondement. Va jouer le rapport entre l’indétermination du geste créateur divin par rapport au monde déterminé qu’il crée. C’est l’énigme propre de Dieu qui est : quel est le rapport entre le fait que Dieu créée le monde, et créée ce monde ? Hegel dit qu’on peut penser le fait qu’il a créé le monde, mais ça ne renseigne pas sur pourquoi c’est ce monde. Entre le le et le ce, il y a un rapport d’indétermination (détermination). Dans les investigations concrètes, c’est un guide que se demander quelles sont les parts respectives de la détermination et de l’indéterminé : ça peut ensuite s’élaborer rapport entre forme-matière, rapport entre

puissance et existence, que nous avons esquissé conceptuellement. La racine la plus profonde, que Hegel pointe très bien, c’est la question du rapport de l’indéterminé au déterminé. Nature a toujours été historiquement d’un côté une grande puissance indéterminée qui forme le sensible, qui en est l’unité d’existence, qui rend raison de son unité d’existence. La nature c’est le principe générique du il y a sensible, ce que Hegel appelle le fondement malgré tout. C’est la désignation du spectacle du sensible dans sa donation, dans sa donation effective (ça désigne ça, la nature, donc qch d’absolument indéterminé). On sait que chez les romantiques, le sentiment de la nature, c’est le sentiment de l’indéterminé. Ça commence avec Rousseau, avec Rêveries d’un promeneur solitaire, Rousseau au bord de la rivière fait une expérience extatique. La nature annule la conscience réfléchie, la nature opère comme une dissolution du soi. C’est la description littéraire de la nature comme ressource de l’indéterminé. Le côté extatique ou fusionnel de l’expérience que Rousseau raconte est proprement l’origine d’une littérature du sentiment de la nature comme expérience de l’indéterminé, comme par csqt dissolution des limites du moi, effraction et dissolution des limites du moi. Vous trouvez des traces de ça jusqu’aux expériences extatiques proustiennes. La nature, c’est la puissance d’indétermination en un certain sens immanente à toutes choses. On prendre les choses les plus naturelles, les plus naturelles : eau, air, la stupeur maritime, que n’importe qui éprouve quand il est effondré sur la plage en train de cuire… on est dans une expérience métaphysique de l’indétermination naturelle, si on veut ennoblir cette expérience ! On peut la décrire autrement qu’un avachissement misérable, on peut lui donner sa chance. Somme toute ce dont il s’agit là, c’est l’expérience dont la mer est l’emblème spécial. Le spectacle marin est particulièrement porteur de cette suggestion de l’indétermination : la mer la mer toujours recommencée, dit Valéry, c’est le toujours recommencé de l’indétermination naturelle. - mais la Nature, c’est aussi l’investigation au comble des déterminations singulière. L’histoire naturelle, comme histoire des différences au contraire. Là c’est plutôt les musées, le museum d’histoire naturelle, où on voit que il y a 400 000 espèces de coléoptères différents, avec un débordement de contingence absolue. Avec des gens qui sont contents d’en trouver un de plus ! ils sont allés en Guyane, dans des conditions dramatiques, et sont contents d’en trouver un nouveau avec un point noir de plus sur sa carapace ! C’est ça aussi la nature. Penser la nature, c’est penser quel rapport il y a entre ça, le point supplémentaire sur le coléoptère, et puis l’expérience extatique de l’indéterminé fusionnel avec la puissance formatrice générique de la nature. nous pouvons partir de ces expériences, nous connaissons l’une et l’autre, nous sommes requis par l’expérience de l’indétermination et aussi par la chasse à la différence qui nous fait nous promener dans le zoo, regardant les cornes extravagantes du cervidé. Mais c’est la même chose ! C’est la nature, mais c’est la nature d’un côté en tant que fondement, d’un autre côté en tant que fondé, d’un côté en tant qu’indétermination d’un autre côté en tant que comble de la détermination, d’un côté en tant que dynamique d’un autre côté en tant mathématique. Il faut penser que c’est bien la même chose qui est appelée nature, finalement.

11.01.2000 : TEXTE DE KANT

La finalité de la leçon d’aujourd’hui est de donner une définition de nature. Ce texte est un des plus difficile de toute l’histoire de la philosophie. je ne prétends pas venir à bout de toutes les difficultés. C’est un texte extra compliqué et retors au sujet du concept de nature. On va en venir au texte d’un peu loin d’abord. Je voudrais rappeler le contexte. L’idée directrice de ces leçons, le principe régulateur, c’est que nature est un concept intrinsèquement dialectique, un concept dont l’unité est problématique, un concept habité ou construit sur une tension. Cette tension, c’est la tension entre la nature comme nom de ce qui est donné comme tel, ce qui est là, ou, plus phénoménologue, nature comme un des noms du il y a, de son déploiement, de la donation, dans sa présence explicite : l’extériorité du il y a dans son extériorité native, (1er usage du mot) ; et en même temps nature désigne le comme pouvoir de donation, l’activité de donation, l’énergie de donation, et pas

simplement ce qui est donné comme tel, ie l’essence invisible de la visibilité, l’essence active du déploiement. Nature c’est au fond le visible comme tel, le déployé visible, le sensible comme tel, mais aussi et plus profondément la possibilité du visible comme tel (quelque soit le registre de la possibilité : en termes d’acte, de puissance, d’énergie) y compris de façon sordidement pragmatique, vous avez intérêt à regarder comment cette tension opère. Donc de voir l’acceptions passive et son acception actives, et leur articulation. Le cœur de la question de la nature, c’est l’articulation intelligible entre le donné et la donation, quelque chose comme ça. Une philosophie singulière, quand elle parle de la nature, est une élaboration de cette tension ou un dépliement de cette tension, selon d’autres concepts. Il va falloir introduire d’autres concepts pour nommer la tension du concept de nature. je cite 3 exemples de registration de la nature dans des discursivités philosophiques établies : - ça va fonctionner selon l’acte et la puissance chez Aristote. - nature naturante / nature naturée chez Spinoza, la figure la plus explicite de la tension. Actif et passif sont clairement désignés sous le mot nature. - virtuel / actuel chez Deleuze. Je prends vous voyez un exemple antique, un classique et un contemporain. Ceci aboutit à ce que nature soit toujours pensée à la jointure de 2 autres concepts, il y a une topologie qui fait que nature opère à la jointure (ce n’est pas une propriété accidentelle ou contingente, c’est la situation discursive du concept). C’est ce que j’avais proposé dans le schéma de l’escargot : comment nature intervient à la jointure de tout un schéma conceptuel. Tout était en rappel. Nous pouvons reprendre cette question en disant ceci : nature est un opérateur synthétique dans la discursivité philosophique, c’est un opérateur de synthèse. Nature désigne une opération synthétique de l’intelligibilité, précisément car nature subsume la liaison en tension immanente. Nature nomme la synthèse de cette tension. Spinoza : la nature qui n’est pas autre chose que Dieu nomme la tention entre nature naturante et naturée, activité et passivité. C’est une propriété générique du mot nature. On pourrait montrer qu’il 3 modalités de synthèse : - la synthèse peut être conçue comme rassemblement (nature comme totalisation) - la synthèse peut être conçue comme un passage (la nature est extériorisation) - la synthèse peut être conçue comme création (la nature est vie, vitalité, énergie créatrice). Totalisation, extériorisation, création, ce sont un peu les 3 modalités fondamentales de nature comme opération synthétique. Vous reconnaîtrez au passage des philosophies différentes selon les cas (Spinoza, Hegel, Bergson / Deleuze) Kant : dire que la nature est un opérateur synthétique. Qu’est-ce que Kant ? Kant, c’est le penseur de la possibilité de la synthèse. Fondamentalement c’est ça : s’il y a un philosophie pour que la question de la synthèse est organisatrice chez lui. Kant est paradigmatiquement le penseur de la synthèse, de la possibilité de la synthèse. Parenthèse : il faut bien comprendre que pour Kant, la question de ce qui est purement analytique est réglée depuis toujours. C’est une conviction très importante. Le purement analytique n’est pas une question car la logique pure est achevée depuis Aristote. Et en ce sens, la question du purement analytique est une question close, en tout cas en droit. Il n’y a pas de progrès à attendre sur la question des jugements analytiques car la codification formelle de ces jugements analytique est réglée. Ça se donne sous la forme de l’énoncé de Kant qu’il n’y a eu aucun progrès en logique formelle depuis Aristote. Le dogmatisme c’est quoi ? c’est ceux qui croient qu’on peut légiférer synthétiquement par purs concepts. Il faut partir de là : les questions analytiques ne sont plus en droit des questions, et la question… on peut légiférer synthétiquement par pur concept. Ce qui aligne le synthétique sur l’analytique, le dogmatisme c’est capturer indûment la synthèse par l’analyse. En réalité le jugement qu’il porte sur la tradition est double : la pensée analytique a trouvé ses assises chez Aristote, et la métaphysique dogmatique croyant pouvoir légiférer synthétiquement par concepts analytiques, aligne le synthétique sur l’analytique et fait comme si le synthétique était réglé dans l’espace du concept. Kant : non, il y a une discontinuité essentielle entre analytique – synthétique. Tout prend son départ dans la question de la synthèse. C’est une question en discontinuité avec ce qui est déjà réglé, il y a disjonction synthèse – analyse. Dogmatisme est ce qui n’a pas pris cela en compte, il n’a pas pris en compte la disjonction. Il faut isoler la question de la synthèse comme question. C’est le geste primordial. …..

Kant est donc celui qui va examiner la question de la synthèse comme telle, donc les conditions de possibilité de synthèse. C’est le noyau absolu de l’entreprise. comme vous le savez, la caractéristique de Kant est de déclarer qu’il y a 2 conditions de la synthèse : - une condition matérielle, ou réceptive : il faut qu’il y ait de l’intuition sensible. On ne peut pas légiférer synthétiquement par purs concepts, il faut que quelque chose de réceptif intervienne, l’intuition sensible - une condition formelle et organisatrice : c’est le système du transcendantal. → isolement du synthétique condition de possibilité de la synthèse, disjonction avec l’analytique. et système de double condition : du copté de la réception, du côté de la spontanéité organisatrice du transcendantal. Tout ça aboutit à quoi ? tout ça aboutit à quelque chose qu’on va appeler l’expérience en tant qu’activité de l’entendement, et ce qui se donne dans cette activité va être appelé objet. on va en venir à la nature. Vous voyez le cheminement, il faut se souvenir du chemin. Isolement de la question de la synthèse, discontinuité avec l’analytique, double condition de possibilité du côté de la réception et de l’activité spontanée organisatrice et dispo de la question dans les modalités de l’expérience et de l’objet ; L’expérience désignant le champ général de l’activité cognitive. L’objet désignant le ce qui se donne, ce qui apparaît dans ce champ. Qu’en est-il de la nature dans cette disposition ? Je vais synthétiser : nature va s’inscrire dans une distinction très délicate qui touche directement à la question de la synthèse. Une fois constitué le champ de la question, l’expérience et l’objet, la question de la synthèse est active. Il y a une distinction décisive dans la construction du concept de nature : c’est la distinction entre la liaison et l’unité. Cette distinction est une question qui touche à "qu’est-ce qu’une synthèse ?", qu’est-ce que le synthétique. Le synthétique c’est ce qui lie et aussi ce qui fait un. Il y a synthèse quand il y a une liaison, et quand il y a une unité dans la liaison. Il faut distinguer la question de la liaison et la question de l’unité, subsumées sous le nom de synthèse. Permettez moi une intervention narcissique : dans Court Traité d’Ontologie Transitoire, il y a un texte sur Kant, l’ontologie soustractive de Kant. Le texte prend son départ dans un texte à la fin de l’Analytique des concepts, que vous devez entendre dans sa complexité. "La liaison est la représentation de l’unité synthétique du divers. La représentation de cette unité ne peut donc pas résulter de la liaison, mais plutôt, en s’ajoutant à la représentation du divers, elle rend d’abord possible le concept de la liaison". Je vous le relis, car c’est assez tarabiscoté. Ça veut dire quoi ? ça veut dire que pour qu’il y ait synthèse, il faut qu’il y ait liaison et représentation de l’unité dans la liaison. Qu’est-ce que c’est qu’une liaison, que la liaison entre 2 représentations ? puisque la liaison est représentation d’unité, donc l’unité est présupposée pour identifier la liaison. On ne peut tirer l’unité de la liaison puisque vous ne pouvez vous représenter une liaison que comme une unité. Nous avons une analyse ce que c’est qu’une synthèse ! si on analyse, on voit que les composante d’une synthèse, c’est liaison et unité. Ce qui est originaire, c’est l’unité, comme possibilité de représentation de la liaison. La possibilité de la représentation de la liaison suppose la donation d’une unité originaire. Pour le dire dans un langage qui n’est pas celui de Kant, il faut qu’il y ait une instance de l’Un, il n’y a synthèse des représentations que s’il y a une instance de l’Un. Et cet instance de l’un n’est pas le système des catégories (le système des catégories c’est le système conceptuel des liaisons). S’il faut l’Un pour penser la liaison ou se représenter la liaison, l’Un n’est pas réductible au système des catégories. Vous ne pouvez pas tirer l’un de la liaison car vous ne pouvez vous représenter la liaison que comme forme d’unité. L’analyse de la synthèse montre qu’il y a une originarité de la puissance d’unité sur la liaison phénoménale. Le système des catégories n’est pas le dernier mot de la question de la synthèse. On ne peut pas répondre à la question de la liaison uniquement avec les catégories. S’il n’y avait que les catégories, la liaison resterait indéterminée. Il faut une instance d’unité qui n’est pas réductible aux catégories. Cette instance de liaison ? Kant l’appelle l’aperception originaire. L’aperception originaire, c’est l’instance de l’Un qui raccorde toutes mes représentations à une unité a priori de la liaison. Il y a une chose qu’il faut retenir : sans l’hypothèse de l’aperception originaire, de l’instance de l’un, vous auriez des phénomènes, des représentations, mais - et c’est le point clé – vous n’auriez pas d’objets, vous n’auriez pas de représentation de la liaison comme unité. L’aperception originaire est liée à la question de la forme originaire de l’objet. Si on n’avait que le système des catégories, on aurait des représentations liées mais vous n’auriez pas d’objets. Objet est un corrélat de l’instance de l’Un. L’objet c’est quoi ? c’est ce qui fait un, ce qui compte-pour-un dans l’expérience. Comme le dira Kant : "L’unité transcendantale de l’aperception est celle par laquelle tout le divers donné dans une intuition est réuni dans le concept de l’objet". L’aperception originaire, c’est la question de l’unité de l’objet, qui est ellemême une question différente de celle de la liaison des représentations. La synthèse exige une liaison des

représentations, la liaison est par dans le système catégoriel, mais ce n’est pas encore l’unité de l’objet, qui est l’aperception. Nous voyons bien comment se raccordent liaison, unité, expérience, objet. En définitive, nous sommes au seuil de la question de la nature, le problème ultime de la question de la synthèse est de savoir qu’est-ce qui fait un dans l’expérience ? la synthèse n’est pas simplement la liaison dans la représentation, la liaison ne fait pas un. Ce qui fait un, c’est l’objet, et la condition de l’objet, c’est l’unité de l’aperception et pas le système tabulaire des catégories. La question de l’objet est la question de l’instance de l’Un, non pas la question de la liaison. Comment s’introduit la nature ? quelle va être la place de la nature dans ce dispositif ? l’angle d’attaque est singulier et passionnant : La nature, ça va être nommée quand l’instance de l’Un entre en relation avec le temps. C’est la connexion aperception originaire et forme a priori du temps. on pourra presque dire que la nature, c’est la temporalisation de l’objet dans son accord à l’aperception originaire. Mais il faut ajouter que cette corrélation entre aperception originaire et forme a priori du temps va concerner quoi ? Elle va concerner l’existence des objets. La nature est référée à l’existence des objets, et pas à leurs caractéristiques accidentelles. Comment Kant construit-il le concept de nature ? il y a 3 opérateurs : le temps, l’existence, l’instance de l’Un. Ce sont ces 3 opérateurs, le reste étant donné, le concept de nature ca concerner l’un le temps et l’existence. On peut donc donner une définition provisoire de la nature, à confronter avec celle du texte : la nature c’est l’unité d’existence des phénomènes dans le temps. Examiner ça ce qu’est l’unité d’existence des phénomènes dans le temps, c’est ce qui identifie la nature. Avant d’en venir au texte, je voudrais faire 2 remarques conclusives de ce vaste préliminaire, qui sont intéressantes, même latérale : - le concept de nature est un concept temporel, et pas spatial. C’est intéressant, parce que c’est l’ouverture d’une grande lignée de temporalisation si je puis dire du concept de nature. de ce point de vue là d’ailleurs, très étrangement en apparence, Bergson et Deleuze sont dans cette lignée, dans la descendance de Kant sur ce point très particulier qui est que l’essence intime de la nature, c’est le temps, et non pas l’espace. Nature, c’est un concept temporel, guidé par l’analyse du temps. - comme la nature est l’unité d’existence des phénomènes dans le temps, il n’y a qu’une nature. Il va de soi dans la construction du concept de nature qu’il n’y en a qu’une nature. La question de l’unité ou de la pluralité de la nature est une question passionnante. Est-ce qu’il va de soi que nature veut dire qu’il y a une nature ? Kant tranche cette question dans la construction du concept, en tant que corrélation de l’un du temps et de l’existence, il ne peut y avoir qu’une nature. On va voir comment cela est récapitulé dans la définition que Kant donne de la nature. Situation du texte, dans ce maquis extraordinaire. En mon temps, j’assistais à un cours au Collège de France sur la CRP où Gueroult disait que c’est un chantier, Kant multiplie les indications d’ordre car il ne cesse de ressaisir un ordre défait : il n’a cessé de déplacer des matériaux, à laisser en suspens des choses, insérer des matériaux venant d’ailleurs. - Analytique Transcendantale, divisée en analytique des concepts et analytique des principes (l’analytique Concept culmine dans la table des catégories, puis l’aperception originaire). - Analytique des Principes : le texte n’est pas dans l’analytique des concepts, donc nature n’est pas un concept, au sens de la table des concepts, c’est pas comme causalité. C’est la question des principes, donc des règles a priori. L’analytique des principes est divisée en 3 : En 1er lieu, il y a le Schématisme (comment on raccorde les concepts à l’intuition, ça se raccorde par un schème). Ça commence abruptement, la simplicité est relative ! En 2ème lieu, il y a le Système des Principes de l’Entendement Pur, En 3ème lieu, il y a Phénomène – Noumène. Notre texte est dans la 2ème question, il est extrait du Système des Principes de l’Entendement Pur. - Système des Principes de l’Entendement Pur est lui-même divisé en 3 : Il y a les axiomes de l’intuition Il y a les anticipations de la perception Il y a les analogies de l’expérience Notre texte est dans les analogies de l’expérience. Il y en a 3 ! - Analogies de l’Expérience (la 1ère, la 2ème, la 3ème).

Notre concept de nature vient à la fin, après la 3ème Analogie (dans un commentaire final des 3 analogies). Il est donc, pas un concept mais une règle synthétique, il est juste avant la fin de l’Analytique Transcendantale, avant la distinction phénomène noumène, à la fin de l’Analytique des Principes. Il vient après la machinerie de l’analytique transcendantale : table des concepts, et règles a priori. Il la suppose tout entière. C’est ce que je voulais indiquer par cette situation. Concepts et systèmes des règles a priori rendant possible l’exp. C’est donc bien un Opérateur synthétique, et c’est formellement indiqué par la situation de la définition de la nature dans l’architecture. Qu’est-ce que c’est, les analogies de l’expérience ? que nous disent les 3 analogies ? Vous savez ça par cœur. Les 3 analogies de l’expériences sont organisées à partir d’une analytique du temps. Elles concernent la dimension temporelle de l’existence, du point de vue de ce que Kant va appeler les modes du temps. il y a des modes du temps. Grosso modo, les analogies de l’expérience, c’est quoi ? c’est ce qui fait fonctionner l’instance de l’Un dans les différents modes du temps. c au niveau du raccord entre unité et temps selon l’existence que ça va se jouer…. Ça revient à la question : qu’est-ce que c’est qu’un objet dans le temps ? ça traite de la question de l’objet du point de vue du temps : qu’est-ce un objet dans temps ? un objet, c’est le problème de l’unité, pas seulement celui de la liaison. Vous traitez : à quelles conditions y a-t-il des objets dans le temps ? nature c’est lié et introduit par cette question : à quelles conditions y a-t-il des objets dans le temps ? et dans les différents modes du temps ? il y a 3 analogies car il y a 3 modes du temps. Quels sont ces modes du temps ? c’est la théorie kantienne du temps. Nous avons une analyse du temps, elle préfigure de nombreuses analyses ultérieures y compris la théorie de l’extatique temporel de Heidegger est dans la filiation de l’analyse kantienne. Il y a 3 modes que sont la permanence, la succession, la simultanéité. Il va y avoir 3 analogies, 3 manières d’assurer a priori l’existence des objets dans le temps : - selon la permanence : ça va donner la permanence de la substance (1ère analogie de l’expérience) - selon la succession : ça va donner la liaison causale des représentations dans le temps, les représentations sont causalement liées (2ème analogie) - selon la simultanéité : ça va donner l’interdépendance universelle de toutes les substances (3ème analogie). Tout cela est destiné à garantir la question de l’Un dans le temps. l’Un substantiel de permanence de la substance, l’Un de la liaison dans la succession, l’un de la totalité dans la simultanéité. Nous retrouvons ce que nous avons dit. Prenons la succession comme mode du temps : que va dire l’analogie ? il est nécessaire que 2 représentations soient causalement liées. Ce n’est pas qu’elles soient causalement liées qu’elles ;.. mais la nécessité de la liaison assure la causalité. C’est la distinction entre unité et liaison. Il est possible que… que si 2 représentations sont causalement liées. On ne tire pas du concept de nécessité du concept de causalité : ….le concept causalité assure la liaison, mais ne dit rien sur cette nécessité (quand vous ajoutez à la liaison la question de la nécessité de la liaison, vous passez du problème de la liaison au problème de l’unité). Analogie va raccorder le temps de la succession à l’aperception originaire, à l’instance de l’un. Il va y avoir unité, et donc objet d’expérience, pour autant que dans la succession, la liaison causale va être nécessaire. Cela va assurer l’unité de l’expérience, ie la possibilité de l’objet dans le temps. voyez pourquoi il faut une analytique des principes : parce que seuls les principes raccordent la question de la liaison à celle de l’unité. Sinon vous n’auriez pas synthèse. La question synthèse ne serait pas réglée. La Synthèse n’est pas la question de la liaison mais de l’unité de la liaison. La nécessité de la liaison seule assure l’unité et donc la lie à l’aperception originaire. La question fondamentale des analogies est donc : comment l’instance de l’Un opère dans le temps, la succession, la simultanéité, la permanence ? Il faut mobiliser la machinerie transcendantale, mais selon la nécessité de l’un, ie selon la connexion à l’Un (c’est différent de la capacité à lier le divers). La synthèse ce n’est pas la liaison du divers. La liaison est condition de la synthèse mais ce n’est pas suffisant. Il faut aboutir à l’objet pour la synthèse. Pour l’objet il faut … que l’unité représenté de la liaison. Le problème est particulièrement aigu dans le temps. Dans le temps, par exemple dans la succession : qu’est-ce qui assure l’Un ? C’est la nécessité de la liaison, qui fait que je ne puisse pas me représenter le successif autrement que lié. Mais que je ne puisse pas me représenter le successif autrement que lié ce n’est pas contenu dans le concept même de liaison). Il faut une règle originaire qui est l’analogie de l’expérience. La question de la nature va intervenir dans la connexion Un-Temps. 2 remarques pour conclure cette introduction : - l’Un, c’est l’aperception originaire. "Ma connaissance, ie mon unique connaissance".

- temps : il n’y a qu’un temps. il n’y a qu’un temps. C’est peut-être le point le plus faible et le plus difficile, cette thèse qu’il n’y a qu’un temps. c’est la doctrine de l’un du sujet T comme tel. On a ultimement pour Kant 2 appuis sur l’Un : il y a une connaissance unique (l’aperception originaire), et un seul temps. Nature est le lien organique entre ces deux, entre mon unique connaissance et le fait qu’il n’y a qu’un temps. Tout ceci dit, on peut aborder le texte proprement dit comme synthèse : ……………………………………………………………………………………………… c’est une synthèse de ce que j’ai tenté de vous dire ? c’est un texte très ramassé et difficile, une synthèse de l’ensemble du chemin kantien. La nature est la présentation de la synthèse elle-même. Nature, c’est le nom ultime de la synthèse. Comme c’est la question originaire du chemin, c’est une récapitulation. Ou plus précisément le fait que tous les phénomènes résident dans une nature et doivent y résider, ça c’est une nomination de la synthèse. Autrement dit, nature c’est le nom de ceci que il y a des objets (unité dans la synthèse). Aucune…….. entre l’assertion les phéno résident dans une nature et ……… nature désigne qu’il y a des objets, unité dans la synthèse. C’est l’au-delà de la liaison, ce qui dans la synthèse est plus que la liaison mais unité de la liaison donc nécessité de la liaison. D’où le fait que le texte commence par la nécessité. « par nature nous entendons l’enchaînement des phéno … » Nature c’est les phénomènes dans leur liaison nécessaire. On a l’impression que nature va se contenter de liaison. Mais le mouvement du texte : la nature a besoin d’unité, qui n’est pas dans la figure de la liaison seule. Basculer dans unité après s’être donnée dans la liaison. Ce qui va servir de lien entre la liaison du début du texte et l’unité fin du texte, c’est la questions des lois nécessaires. La nécessité de la liaison c’est autre chose que la liaison. On ne peut se contenter de la liaison : les règles nécessaires, la nécessité de la liaison va faire passer de la liaison à autre chose que la liaison. Que la nature soit liaison, c’est d’accord, mais ce n’est que pour autant que cette liaison est nécessaire. La suite est l’investigation de cette nécessité. ….. il va montrer que la nécessité de la possibilité de la liaison ne peut être trouvée de façon empirique. Si la nature est la nécessité de la liaison, le concept de nature dépend de lois a priori. …… nous avons une transition qui est que nature ne désigne pas quelque chose de l’expérience, mais ça désigne quelque chose de la possibilité de l’expérience. En ce sens, nature c’est du côté de l’a priori. (d’où la fin : "tous les phénomènes doivent être dans une nature" : ce n’est pas un énoncé empirique c’est un énoncé transcendantal). Nature est du côté de la poss de l’exp et pas du côté de l’exp, en dépit du fait que le début démarre doucement. On a une subversion du point de départ : nature va devenir un concept T profonde, qui nomme lien a priori un – temps (absent au début). Il faut remonter aux lois originaires d’après lesquelles l’exp devient possible. C’est les analogies de l’expérience. "Lois originaire = analogies de l’expérience". La nature c’est le problème des analogies. Ce sont nos analogies qui présentent l’unité de la nature. « .. exposant rapport du temps…. » nous avons le cœur : c’est là que se construit le concept à partir des analogies. Les analogies c koi ? c’est le rapport du temps à l’unité de l’aperception. Nature nomme le lien de l’un au temps, qu’est-ce qui fait un dans le temps ? la nature est le rapport du temps à l’unité de l’aperception. On voit se faire le cheminement de la construction synthétique du mot nature comme étant lui-même une synthèse. Une synthèse a priori de quoi ? une synthèse a priori de l’unité de l’aperception et du temps. En schématisant, c’est l’unité du je et du temps (je T vide) : le je qui n’es rien d’autre que le je = je, sans contenu intuitionnable, qui assure formellement l’unité de l’expérience, en tant que l’expérience est mon unique expérience. Nature devient la synthèse du je pur et du temps, des modes du temps. « ;;;;;;;;;;;;; » Si nature c’est unité de l’aperception dans son rapport au temps, on peut aussi dire que nature, c’est la présentation temporelle des objets. Si vous vous souvenez que objet c’est l’instances de l’Un dans la synthèse. La liaison n’est que liaison des phénomène. J’y insiste : il n’y a des objets que s’il y a plus que la liaison. Pour objet il faut autre chose que la liaison, comme la nécessité. La liaison assure la phénoménalité de l’apparaître, et pas son objectivation. L’objet est plus que le phénomène. Nature nomme le déploiement de l’objectivité (la possibilité des objets) dans le temps. « ;;;;;;;;;;;;; » Sans ça, il n’y aurait ni unité de l’expérience, ni détermination des objets. L’unité de l’expérience et la détermination des objets ; c’est la même chose (pas la mêe chose que le fat que les phénomènes sont liés). Nature : c’est l’unité de l’expérience, ie la possibilité des objets, ie l’objectivité dans le temps. Nous avons finalement une définition complexe mais claire de la nature, qu’on pourrait récapituler de la façon suivante : la nature, c’est l’objectivité, en tant que est temporelle. Il faut ajouter encore une question : de quoi y a-t-il objectivité, quand cette objectivité est temporelle ? qu’est-ce qui est affecté de

temporalité ? L’objectivité en tant que temporelle, c’est l’objectivité de l’existence du phénomène (ce n’est pas l’objectivité de sa signification, de son contenu, de sa particularité). « Par nature, nous entendons l’enchaînement des phénomènes, quant à leur existence ». Il faut donc compléter un peu notre définition : la nature, c’est l’objectivité de l’existence dans le temps. Finalement, la nature, c’est l’existence dans le temps sous la forme de l’objet, ou possibilité de l’existence dans le temps sous la forme de l’objet. Qu’il y ait des objets comme existence dans le temps, voilà ce qu’est la nature. Il ne serait donc pas entièrement illégitime de dire, pour revenir à mon introduction générale, que pour Kant la nature, c’est bien la donation des objets, en tant que donation temporelle et en tant que donation d’existence (ce n’est pas une donation de contenu déterminé ou d’empiricité immédiate). Comme dit Kant, le temps est ce qui prend en lui toute existence. C’est de l’existence qu’il s’agit dans cette corrélation au temps. il y a cet élément de donation qui fait que nature est du côté de l’a priori (pas du côté de l’empirique), et qui est du registre de la donation d’existence, pour autant qu’elle est de la forme de l’objet, dans le temps. Ce qui marque le côté transcendantal de cette donation, le fait que nature n’est pas du côté du donné empirique mais du côté de la donation transcendantale, c’est que nature est un concept nécessaire. C’est l’énoncé fondamental : "Tous les phénomènes résident et doivent résider dans la nature". une obligation de cet ordre est nécessairement transcendantal. Ceci insique que Nature est donc du côté de la constitution transcendantale de l’expérience, en tant qu’elle désigne la résidence de la donation objective dans le temps, d’une façon obligatoire, du côté de la description transcendantal. Voilà l’essentiel du texte. Je voudrais conclure par 2 ou 3 remarques. - quelle est la dialectique du mot nature pour Kant, ici ? je crois que la dialectique fondamentale, c’est en réalité bien le paradoxe du rapport de l’unité et du temps. C’est ça que nature traite : l’un et le temps. qu’est-ce que la mise à l’épreuve de l’un par le temps ? le temps est-il compatible avec l’Un ? cf Héraclite : il y a une mise à l’épreuve de l’Un par le Temps (par la succession). Nature au fond est le moment où se récapitule la solution kantienne de ce problème, à savoir l’efficacité de l’unité dans le temps lui-même. Ie le maintien de l’unité de l’expérience, bien qu’elle soit temporelle de part en part. La question de comment l’un traverse-t-il l’épreuve du temps ? veut dire : comment se fait-il que des objets puissent être temporels ? qu’est-ce que l’objet dans le temps ? L’objets dans le temps il est inscrits dans l’unité d’une nature. Le fondement de la réponse c’est les analogies de l’expérience. Si on cherche la dialectique fondamentale du mot nature, c’est le rapport entre un et existence, sous l’emblème ou sous le signe de l’objet, lui-même traité dans son rapport à l’existence. - quelle est la force de cette construction ? A mon avis, la grande force de cette construction, c’est de rendre raison de la représentation scientifique de la nature au régime de lois nécessaires, en se posant la question, si je puis dire, de la nécessité de la nécessité. Ce n’est pas simplement un compte-rendu des liaisons nécessaires, c’est pas simplement montrer ou prodiguer la nécessité des liaisons, c’est s’interroger sur la nécessité de cette nécessité pour qu’il y ait expérience. Ça c’est la gde force de cette conception de la nature, qui est de ne pas la dissoudre dans la seule nécessité des liaisons. Que veut dire penser la nécessité des liaisons phénoménales ? c’est penser la nécessité, penser la nécessité de cette nécessité, il qu’il y a unité de cette liaison, c’est penser la nécessité de cette nécessité. A partir de Descartes, la nature va être interrogée du point de vue de la question des lois, les lois de la nature. c’est bien la question de la nécessité de la liaison qui est le fil conducteur. Kant : il renvoie cette question à la nécessité de la nécessité de la liaison comme condition de possibilité de l’expérience. Il n’y a expérience, objet que si on élucide la nécessité de la nécessité. - quelle est la difficultés ou le point sensible de cette affaire ? A les yeux, le point sensible se trouve du côté de l’axiome de l’unité du temps. Il n’y a qu’un temps. il est l’opérateur de poss du sensible comme tel, mais même là l’énoncé ne va pas de soi. Il dit il n’y a qu’un temps donc les "Divers temps doivent être subsumés sous un temps unique". Le problème de l’unité, c’est aussi le problème de la pluralité, qui est laissé de côté. Ça produira des difficultés dans le rapport de la pensée de Kant à l’histoire : la séquentialité, la pluralité des temps historiques etc… D’où problème dans le traitement de l’histoire. On peut ouvrir à l’hypothèse qu’il y a une pluralité de temps. Comment se développer la difficulté dans le rapport à la nature ? L’analytique du temps est peut-être insuffisante. L’analytique du temps, c’est le divers du temps. Le divers du temps, pour Kant, se réduit à la permanence, la succession et la simultanéité (3 analogies). C’est peut-être une analytique pauvre. Ça ne rend pas justice à la pluralité intrinsèque du temps autant qu’il le faudrait. Kant ouvre à une analytique du temps (idée qu’il y a des modes du temps, une pluralité de temps…). il y a un temps, mais à l’intérieur il y a des modes du temps : il y a une pluralité. Mais elle n’est pas poussée assez loin. Il y a peut-être plus que 3 temps, et peut-être qu’il y a une pluralité temporelle supérieure à celle de ses modes. Les

indications phénoménologiques du temps sont chez Kant trop scolastiques. Cette théorie des modes du temps est scolastique. C’est la question du rapport de Kant à l’héritage. Par exemple, il y a une faiblesse de Kant dans son rapport à la logique, pas de progrès depuis Aristote (thèse controuvée historiquement), c’est le moment où Kant entérine la tradition (comme la fin de la logique : là aussi il s’est planté). Dans sa théorie du temps il entérine aussi la tradition. Si la phénoménologie du temps était plus pluraliste, quelles seraient les conséquences sur le concept de nature ? C’est le problème de son unité qui se trouve atteint : l’idée que tous les phénomènes prennent place dans une nature. Ça, c’est soutenu par l’unité de l’aperception + il n’y a qu’un temps (qui n’est pas représentable comme tel : n’est représentable que la liaison). Ce qui se laisse représenter, c’st les liaisons et pas le temps lui-même. Mais s’il y a plusieurs temps, et si certains sont représentables (conscience intime du temps), alors la thèse de l’obligation d’une nature devient elle-même précaire. Peut-être faut-il ouvrir à la thèse que même si nature est un opérateur synthétique, il n’est pas sûr qu’il y a forcément qu’une seule nature. ça va dépendre de la phénoménologie du temps. A la semaine prochaine, pour une synthèse terminale. 18 JANVIER 2001 Pour cette dernière leçon sur le concept de nature, je vous propose 3 segments un peu hétéroclite : 1° à titre récapitulatif je proposerai quelque chose sur la difficulté de définition du concept de nature, quelques développement sur la nature et protocole de définition, peut-on réellement définir la nature ? 2° un exercice concernant la tentative de définition des multiplicités naturelles, qui m’est propre : l’important est de montrer comment ça illustre la difficulté particulière pour définir ce qui est naturel, ou la nature. ça se finira sur une chicane entre la nature et ce qui est naturel. 3° un temps de discussions ou de questions Récapitulatif : problèmes de définition. Montrer qu’il y a une difficulté singulière dans le problème de la définition de la nature, ou de la proposition d’une définition de la nature. Je vais vous proposer 4 difficultés spécifiques concernant la question de la définition de la nature. Je les nomme : - la figure du redoublement - la figure de la circularité - la figure de l’écart -la figure de l’unité - figure du redoublement : le point de départ de cette difficulté, c’est qu’on peut entendre et qu’on entend généralement par nature d’une chose ce qu’elle est en elle-même ou par elle-même, ie ce qu’elle est dans la supposition d’une donation de son être non encore altérée par des incidences extérieures justement à cette nature. c’est une définition vague mais qui est un peu le fond définitionnel. La nature d’une chose, c’est en fin de compte son être propre, mais son être propre pris dans son immanence, dans son mouvement propre, non encore contaminé, corrompu ou altéré par quelque chose qui serait justement extérieur à cette naturalité constitutive. Par exemple, c’est très frappant dans la thématique de la nature humaine. Pour autant qu’on suppose qu’il y a une nature humaine, c’est un élément qui identifie un être de l’homme, un être générique de l’homme, antérieurement à ce qui l’en écarterait. La nature humaine, c’est une sorte de fond donné. Cette idée de dination est une bonne … C’est le donné primordial, relativement à telle ou relle singularir. Par csqt, la nature d’une chose, dans ce cas, c’est sa définition, ce qui permet d’accéder à son être le plus propre, ou à sa donation originaire non encore déformée, ou aliénée. par démarcation avec une éventuelle altération ou aliénation (même quelqu’un d’aussi éloigné du naturalisme que Marx soutient qu’il existe une nature générique de l’humanité aliénée, contaminée, déterminée. Ça se déploie à partir de la supposition d’une nature cf Manuscrits 1844). Du coup, l’identification de la nature d’une chose c’est en un certain sens une seule et même chose que sa définition. … définir c’est situer sa nature. c’est ce qui situait toujours la nature entre l’être et l’essence. La nature est ce qu’on chose est dans le mouvement de sa donation 1ère, et ce qui l’identifie. La nature vient s’intercaler entre l’être (comme donation 1ère) et l’essence (comme définition). C’est une des acceptions fondamentales que de s’intercaler entre être et essence. Ni exactement être, donation générale, ni exactement essence… Moment où l’être se noue à l’essence (dans sa singularité). C’est bien ça qui supporte la définition. Donc si finalement la nature d’une chose est donnée dans sa définition, à supposer que sa définition soit possible, définir la nature

c’est un peu comme définir la possibilité de la définition. Nous avons déjà croisé cette difficulté. Il y a dans le projet de définir la nature quelque chose qui touche aux conditions de possibilité même de la définition. Si vous définissez ce qu’est une nature ou la nature, vous êtes dans l’espace de…. Quelque chose comme définir la définition. Entre définition et défini, il y a un rapport particulier quand il s’agit de la nature. la nature autorise la définition, mais là c’est ce qu’on essaie de définir, de donner sous une forme définie. Mais le défini de la nature, c’est la définition. Il y a toujours, quand on traite de la nature, la question de la définition mais la question de la définition de la définition. Il y a d’autres figures du redoublement : Kant : nature, c’est moins la nécessité que la nécessité de la nécessité. La nécessité seule est insuffisante (il faut un redoublement, il faut en venir à la nécessité de la nécessité). Par conséquent, nature, c’est quelque chose qui est engagé dans la théorie de la définition. Autrement dit, toute définition véhicule une théorie ce que c’est que la nature d’une chose définie. Il n’y a pas de définition sans théorie implicite ou explicite de ce que c’est que la nature d’une chose, la chose à définir. De sorte que si vous cherchez à définir la nature, vous avez une figure de redoublement : c’est définir la définition. Il y a une difficulté spécifique. En réalité, c’est un mode d’examen possible des définitions de la nature par les grandes configurations philosophiques. La question se pose de savoir quel est le rapport entre la définition de la nature et la nature de la définition. Dans qu’est-ce que définir, il y a une … la nature dune chose, la visée intentionnelle de la définition. Je redis que cette figure du redoublement, il y en a d’autres, qui gravitent autour (comme nécessité et nécessité de la nécessité) - figure de la circularité : elle est apparentée mais un peu différente. Pour une définition, à supposer que vous entrepreniez de définir la nature, il faut d’autres thèmes, d’autres notions. Vous allez identifier ce qu’est la nature à l’aide d’autres concepts que celui de nature. il y a une grande variabilité de ce recours, mais il est inévitable. La question qui se pose est la suivante : ces autres concepts dont vous allez vous servir dont définir la nature, peuvent-ils être soustraits à la question de leur régime naturel, à la question de leur propre nature, à la question de leur insertion dans la naturalité ? Là, c’est une question apparentée, qui engage dans des voie de circularité. Si vous vous servez de tel ou tel concept pour identifier la nature, omment allez-vous soustraire ces concepts à des considérations sur leur être naturel ou leur fonctionnement naturel ? Je donne un exemple : la question de la définition de la nature chez Aristote. Je ne la prends là que dans son arête. Pour l’essentiel, au début de la Physique : Aristote entreprend de définir la nature à partir de l’étude des catégories de changement et de mouvement. La nature est une catégiorie du mouvement, du changement, des différentes espèces de changement : translation (lieu), mais aussi la génération et la corruption. Vous avez une tentative d’identification de la nature à partir de la pensée du mouvement, dans une acception large. Et cependant, on va avoir la distinction entre mouvement naturel et mouvement violent ie non-naturel. le mouvement naturel est le mouvement par lequel un corps se déploie vers son lieux naturels, A quoi s’opposeront les mouvement violent, non naturels, par quoi un corps est écarté de son lieu naturel). Vous voyez le problème : il y a la question de savoir ce qui est naturel dans l’identification même de ce qui est naturel. Si ce qui est naturel est identifiable par la question du mouvement, le mouvement est identifiable par ce qui en lui est naturel ou ne l’est pas. l’identification de la nature est circulaire au sens où elle fait retour sur elle-même. Le mouvement désigne la sphère de la pensée de la nature mais il faut désigner dans le mouvement ce qui appartient à la nature et ce qui est violent, en écart. Il y a toujours un moment où il fau que le concept identifiant soit soumis à l’examen de sa naturalité. Je prends un 2ème exemple : Nietzsche. Pour Nietzsche, toute identification est une évaluation (on a dit interprétation). Le concept clé de l’évaluation est le concept de valeur. La valeur est associée ou attribuable à une force. Et la nature de toute évaluation est vitale, l’essence naturelle de l’évaluation, c’est la puissance de la vie comme telle (dans sa dimension active ou dans sa dimension réactive). Toute identification est une évaluation, et toute évaluation est vitale. Finalement, on peut soutenir que la nature d’une chose (la nature d’un type), elle se donne bien dans la corrélation vitale affirmative propre qui constitue sa généalogie. On voit bien que en définitive, nature est renvoyée comme identifiant la vie. La puissance de la vie est ce qui identifie dans chaque type sa nature propre, ie la possibilité de son évaluation. Tout ceci aboutit à la question : quelle est la nature de la vie ? Comment se fait l’évaluation de la vie elle-même ? L’évaluation des types vitaux se fait selon la vie, mais comment se fait l’évaluation de la vie ? Quel est le principe d’évaluation de la valeur de la vie ? La réponse de Nietzsche est explicite : la valeur de la vie ne peut pas être évaluée. C’est un énoncé essentiel de l’ontologie de N : il n’y a pas d’évaluation de la vie, car c’est la clé de toute évaluation. La valeur de la vie est laissée en suspens. Pourquoi la clause de fermeture est si importante ? Pourquoi la vie est non-

évaluable ? Parce que la vie c’est précisément la clé de toute évaluation. C’est l’énoncé par lequel Nietzsche arrête la circularité concernant la nature. A la question éventuellement circulaire de comment évaluer la vie quand toute évaluation est vitale ? Nietzsche répond : il n’y a pas d’évaluation possible, la valeur de la vie restera non-évaluée. Vous voyez que dans ce cas, point remarquable qui n’est pas propre à Nietzsche, vous introduisez au cœur de la nature de l’indétermination, quelque chose de la détermination va être laissé en suspens. Inévaluable, c’est l’indétermination. Le fonds dernier est inévaluable. C’est le principe de la circularité : quel est le principe naturel de ce qui sert à identifier la nature ? Vous avez 2 voies là-dessus : - soit on assume la circularité, comme Aristote (le mouvement identifie la nature, et il y a des mouvements naturels et d’autres non) - soit on a un énoncé d’interruption, comme Nietzsche, ie quelque chose qui arrête la circularité en un point conceptuel déterminé. Le point d’arrêt pour Nietzsche, c’est la vie. La vie pour Nietzsche est soustraite au régime d’identification, la vie est ce qui ne sera pas évaluable. Si elle pouvait être évaluée, on aurait un cercle complet. Voilà pour la 2nde difficulté - figure de l’écart : on va prendre un autre point de départ, qui est le suivant. Une définition, quelle qu’elle soit, a une puissance différentielle, sinon elle n’a aucun intérêt. Elle doit distinguer le défini de ce qui n’est pas lui, d’une manière ou d’une autre. Il y a toujours une visée différentielle de l’opération de définition. Donc si vous entreprenez de définir la nature, vous allez identifier ipso facto ce qui n’est pas nature (même pour Spinoza : il se peut que le non-naturel soit néant, mais même cette conclusion est une identification). Dans le cas particulier de nature, on dira que tout définition de la nature produit la place – éventuellement vide – du non-naturel. Disons-le comme ça. De ce qui est non naturel, de ce qui est horsnature (même si on ne met rien à cette place, on a toujours une place produite, même si elle est déclarée vide). La question est alors : quelle est la provenance du non-naturel, de ce qui est hors nature ? Quel est le régime de pensée qui aborde la question de la place du non-naturel, place construite par la définition de la nature ? Exemple : Kant dit par nature j’entends la liaison nécessaire des phénomènes. Sera non-nature ce qui n’est pas au régime de la liaison nécessaire. Y a-t-il quelque chose qui n’est pas au régime du non nécessaire ? Oui, la liberté, qui relèvera de la raison pure pratique etc… Le simple fait de définir la nature comme espace des liaisons nécessaire, vous fixez ce qui déroge à cette définition. Vous voyez comme la définition commande non seulement le défini et cette place extérieure, ie certains prédicats de ce qui peut être non naturel, en l’occurrence non nécessaire, non réglé par la nécessité. Kant esquisse une théorie de la liberté comme non nature, comme non nécessité Comment se construit cet écart ? quelle est la généalogie, la provenance le type de pensée de l’écart ainsi constitué entre la nature au régime de sa définition et la place de ce qui est non naturel ou hors nature ? Comment se construit cet écart ? Cet écart suppose que l’on accepte originairement qu’il puisse y avoir une place pour le non nature, pour le surnaturel, ou pour le suprasensible. Y a-t-il une naturalité de cet écart ? vous ne pouvez empêcher le retour de la généralité retorse du concept de la nature ! La question de la naturalité n’est pas la question de la non nature. Avec la définition de la nature on constitue une place, éventuellement vide, pour la nonnature. Le problème n’est pas tant la nature du non-naturel que la nature de l’écart entre naturel et nonnaturel (Spinoza : Dieu est ce qui ne laisse hors de soi aucune possibilité de remplacement d’une place, toute place est intradivine, ie intranaturelle). Ce qui est une question inévitable, c’est la naturalité de l’écart, puisqu’il est créé par la définition même de la nature. Qu’est-ce qui dans la nature telle que vous la définissez autorise de façon intérieure qu’il y ait écart entre nature et autre chose que nous laissons pour l’instant indéterminé ? Autrement dit, y a-t-il une trace dans la définition de la nature de la nécessité qu’il y ait écart entre la nature et autre chose qu’elle-même ? Exemple : c’est ce qui rôde dans la distinction aristotélicienne monde sublunaire – monde supralunaire. Les distinctions de cet ordre sont corrélée à la question de l’écart de ce qui n’est pas (c’est une question interne à question de la nature). c’est la question de savoir dans quelle mesure il est interne à la nature et à sa définition de supporter un écart avec ce qui n’est pas elle. Kant ne cesse de revenir sur cette question. A certains égards, c’est sa question. CRP : noumène et phénomène, raison pure théorique et raison pure pratique. L’organisation interne de la pensée kantienne est de penser ce qui dans la détermination de la nature supporte ou rend possible la trace de la non nature. il ne peut s’empêcher de rêver qu’il y ait qch de synthétique là dedans, qui prendra la forme de la symbolique…. Si on creuse un peu, vous pouvez mettre au travail l’idée que le concept de nature est tel que savoir quel rapport il soutient avec ce qui n’est pas elle, est une question

interne à la construction du concept même de nature. c’est propre au mot nature. Nature, à raison de son intercalation dans les dialectiques philo, supporte nécessairement la question de l’écart. Ce serait trop long à détailler, mais je vous propose une piste : je pense qu’il n’y a que 2 voies de traitement, peut-être 3. - une voie dualiste, qui est de registrer l’écart entre nature et non nature comme une disposition fondamentale de l’être lui-même. A partir du concept de nature, elle organise l’écart naturel entre ce qui relève de la prédication naturelle et ce qui n’en relève pas. - une voie dialectique : la voie qui fait de l’écart un moment, le moment d’une synthèse possible (en gros, Platon, Hegel). - il y a une voie surnuméraire, qui est de tenter de nommer le non-écart, ie il n’y a pas d’écart. Il faut éviter l’écart, écarter l’écart. C’est la tension de pensée, comme celle de Spinoza, ou celle de Deleuze. On pourrait presque définir ces pensées comme des pensées qui tentent de s’installer dans la pensée de la nature en évitant la position d’un écart, et qui donc vont répudier non seulement le dualisme, mais la dialectique. La dialectique est un adversaire de Deleuze. Pourquoi ? Dialectique est une solution au problème originaire de la nature écartée du non-naturel. Deleuze veut une immanence radicale, donc une nature sans écart. Ça aboutit à quelle conclusion inéluctable ? A ceci que il ne faut donc pas définir la nature. La nature, c’est ce qui est soustrait à la définition. Dès que vous avez une définition, vous avez un écart, même si c’est une place vide. La thèse est que nature est ce qui n’est pas autorisé d’une définition. Ça veut dire que nature, c’est au fond ce qu’on pourrait appeler un mot primitif. Vous allez vous en servir comme un opérateur, mais il ne sera jamais thématisé dans des définitions. Toute définition est idéaliste. Définir est un idéalisation fallacieuse de l’immédiateté naturelle et de son immanence. Il faut s’interroger sur les tentatives de définition comme prise de position sur la figure de l’écart. Ce sont des pensées qui appellent à une construction particulière de la pensée où il y a des mots primitifs (j’appelle mot primitif un mot qui avaleur opératoire pour la pensée et qui n’est pas saisissable dans le champ de la définition, un opérateur singulier mais non défini). - figure de l’unité : elle est apparentée à la précédente mais un peu différente. Le problème est cette fois le suivant : nature est un des noms de l’immanence. Nature, c’est ce qu’il y a, mais pris dans l’intériorité de son mouvement. Depuis toujours, c’est ça, nature, c’est déjà ça chez Aristote. C’est ce qu’il y a, mais en tant qu’appréhendé dans l’immédiateté de son mouvement propre. Donc une définition de la nature, suivons ce fil, c’est une définition de ce qui est pensable du mouvement propre de ce qui est, qch comme ça. C’est une définition non pas de ce qui est, mais une définition qui atteindrait l’immanence de ce qui est, le principe de son déploiement. La naturalité, c’est ça. Une chose est dans son mouvement naturel quand elle se déploie suivant le mouvement propre de son être. Mais alors, la question est alors de savoir comment on nomme le résultat, ie l’actualité du il y a comme résultat de son mouvement propre, ou comme découpe de son résultat. Est-ce que ceci est soustrait à la définition de la nature ? si la nature c’est le mouvement propre, que dire du résultat ? C’est le problème de Spinoza : nature naturante - nature naturée. Il y a 2 faces d’une même chose, la face active ou productive, et la face passive du résultat. Chez Deleuze, c’est virtuel / actuel. L’essence de la vie naturelle, c’est la virtualité. Ce qu’il y a, c’est le mouvement d’actualisation. Quel rapport avec l’essence de la nature ? SI l’essence est actualisation, qu’est-ce que l’actuel ? est-ce une partie morte de la nature ? est-il comme une face de mort ? Si la nature est activité, qu’est-ce que la passivité ? De même chez Nietzsche : c’est la question du rapport exact forces réactives – forces actives. L’essence de la vie c’est l’affirmation. Quel rapport à la vie affirmative au réactif, le mortifère, le ressentiment, la culpabilité etc… Si on dit que la nature, ultimement, c’est le principe du mouvement propre des choses, alors comment registrez-vous le résultat de ce mouvement ? ie sa figure de production dans la modalité du produit de la production ? est-ce que ceci n’aboutit pas à toujours scinder le concept de nature ? Ie d’avoir 2 faces, et pas une seule ? Activité / passivité, ou actuel / virtuel, ou nature naturante / nature naturée, ou actif / réactif etc.. Ou même, du mouvement et repos, dès Aristote. Par exemple, prenons le……. principe d’inertie possible : vraie nature du corps c’est quand il est au repos, dans son lieu naturel. S’il doit le rejoindre, c’est qu’il l’a quitté. Nature est-ce le mouvement, même naturel, ou la nature dans son essence intime, est-ce le repos ? Et on a la discussion sur le mouvement circulaire, le 1er moteur immobile etc… Le mouvement suppose qu’on s’en est écarté). Problème : quel est le sort fait à dualité presque irrémédiable du concept de nature, qui en fin de compte est traversé par l’opposition de l’actif et du passif. C’est la question de l’unité du concept : est-il

unifiable, ou toujours dualité ? Le 2 est à l’œuvre, même et surtout dans les pensées non-dualistes. Le 2 est un 2 opératoire. Exemple : Spinoza et Deleuze sont catégoriquement non-dualistes dans la compréhension primordiale qu’ils se font de l’âtre, mais concept la nature est dans une schize. Elle n’est pas ontologique, il y a une univocité de l’être, mais c’est un dualisme opératoire qui traverse concept de nature et en constitue la pertinence. Toute définition supposée du concept de nature doit résoudre ces 4 problèmes. Une philosophie tente de résoudre ces 4 problèmes d’un seul coup. Elle tente de donner une formulation une la solution à ces difficultés d’un seul mouvement. Nature c’est vraiment un opérateur à vocation synthétique. Aujourd’hui, où en sommes-nous, de ce point de vue ? la question de la nature est-elle une question philosophique aujourd’hui ? Je donne juste une esquisse. Une caractéristique contemporaine, c’est que la science a abandonné tout projet de ce genre (OK, il y a une équivoque aux XVIIème, XVIIIème, peut-être même XIXème : équivoque en appui. Il y a une complémentarité sciences-philosophie). Nature n’est pas d’aucune façon un concept de la science contemporaine. Dans son développement effectif, c’est un concept entièrement dissous. Même les sous-concepts sont dissous : matière n’est plus un concept stable ou un opérateur significatif, et vie lui-même est un opérateur indistinct, au fond depuis la biochimie. Même les sous-espèces de nature sont éliminées en tant qu’opérateurs internes. Matière et vie ne sont pas des opérateurs internes de l’activité scientifique contemporaine. On est renvoyé à autre chose que cet espace-là pour identifier ce qu’est la nature. Avant, la philosophie accompagnait la science sur cette question, et elle avait intériorisé le compagnonnage. Aujourd’hui, nous n’avons pas de compagnonnage de cet ordre. Hypothèse : peut-être faut-il sacrifier le concept, si la séquence d’accompagnement est révolue ? Sa consistance est incertaine. Il faut remarquer que le concept est distribué ailleurs que dans la science. Où ? A mon sens, il 2 autres distributions : - il a une distribution poétique ou artistique ( - il a une distribution politique, ou éthique Il se peut que le concept ait changé de système de conditions. Après avoir été dans un compagnonnage avec la science et singulièrement la physique, il accompagne autre chose. Il faudrait prospecter sur les usages contemporains poétiques du référent naturel. La nature dans l’art ou le poème, c’est quoi ? depuis l’esthétique classique, ça fonctionne. Mais dans la période moderne, elle fonctionne de 3 façons,. - la nature comme réserve poétique, répertoire comparatif, ce qui est sa réserve aussi d’intemporalité. C’est un point très important : si vous nommez les montagnes, la mer c’est ce par quoi vous projetez une actualité possible dans l’intemporalité. C’est une ressource possible. - la nature comme lieu ou comme site pour le sujet. C’est un lieu possible de confrontation subjective ou de mesure de sujet. Exemple : la nature peut désigner la permanence indifférente de l’être par rapport à la subjectivité souffrante (topos romantique). Ou bien elle peut au contraire désigner le lieu de l’extase (Rêveries de Rousseau, des textes de cet ordre. Elle peut avoir bien d’autres figures. C’est sa fonction de lieu référentiel pour les configurations subjectives. - la nature désigner une sorte de perte obscure, quelque chose de toujours raturé, devenu obscur, ou perdu, et dont il y a un deuil essentiel. Ça commence assez tôt : Mallarmé dit « La Nature a lieu, on n’y ajoutera pas ». la nature, c’est un avoirlieu désormais sans vertu, c’est une chose à laquelle on n’est plus accordé de façon créatrice. C’est sa signification la plus forte : c’est quelque chose comme "il n’y a plus de nature". quand vous dites ça, vous prononcez en même temps une sorte de mélancolie ou le stoïcisme. Vous êtes dans le deuil prononcé de ce n’avoir plus lieu. Donc je dirais que : - la nature absentée de la science - dans mais le poème ou dans l’art, la nature est prononcée dans son absence. dans la poésie, sourdement, depuis le post-romantisme, ou après le symbolisme, c’est une absence qui se dit comme absence. C’est une absence qui se dit comme telle. Elle est présente dans l’efficace de son absence : c’est la métaphore d’une perte, ou d’un délaissement. Si on construit une définition de la nature à partir de la poésie contemporaine, ce qu’on va trouver est dans le registre du manque. Je ne cherche pas une définition, mais ça ne sera pas une positivité affirmative. Ça ouvrirait un développement sur le thème : la nature comme

nom de ce qui fait défaut. Si la nature nomme ce qu’il y a, il y aurait l’avatar dernier comme ce qui fait défaut, de ce qui s’est retiré, est absent. La nature non plus comme ’exaltation, mais plutôt comme deuil. La nature dans la politique, comme référent écologique : la nature est identifiée dans la rétroaction de la technique. Il existe une identification collective, politique, sociale, de la nature, qui est dans la rétroaction de la technique. Est nature ce qui mérite d’être protégé de la technique. C’ets la définition. Est nature ce qui peut venir à cette place d’avoir à être protégé de la technique. La nature est définie comme une réserve. Ça se solde par des réserves. Vous mettez la nature en réserve, dans des réserves. Prenez les réserves naturelles : nature est dans les parcs… elle est artificielle, c’est un décret de mise en réserve de ce qui est à protéger rétroactivement de l’excès techinque. Nature est un protocole de limitation, c’est une limitation de l’entreprise technicienne (industrielle, financière etc...) Conséquence en philosophie : la nature est définie comme l’espace de la réserve. Vous voyez en quel sens : ce qui peut être réservé, et préservée, et qui doit l’être, de la rétroaction technicienne). Ça incut des choses énormes. Par exemple : la question du caractère naturel de reproduction de l’espèce humaine. Faut-il préserver certains aspects considérés comme naturel de la reproduction de l’espèce elle-même ? ou la question des clônes. Je ne vais pas rentrer dans des questions de société. C’est la définition de ce qui est naturel qui travaille dans cette affaire. Ce qui est mobilisé, c’est bien l’horreur éthique qu’il y aurait à touchern à quoi ? à toucher à la nature humaine etc… La nature est définie comme l’espace de réserve. Il faut une clause de réserve dans le déchaînement des possibilités de la puissance technique. C’est un principe de limitation, ou de restriction de l’entreprise technicienne universelle. Je conclurai donc en disant qu’il y a une triple négation du concept de nature dans le monde contemporain : 1° il y a son absentement scientifique. Qui est une des formes du déliement ininterrompu entre science et philosophie. nature servait de catégorie tampon entre science et philosophique. Au fur et à mesure que le déliement s’accentue, la catégorie ne fait plus tampon. ce qui ne veut pas dire qu’il n’y a pas de catégories tampons. Il n’y a plus de jonction avec la nature quand le déliement s’organise et continue. 2° il y a une prosopopée de l’absence dans l'art ou dans le poème (c’est différent du simple absentement). 3° politiquement, il y a une réserve. Une mise en réserve. A supposer que la philosophie maintienne cet opérateur synthétique, eh bien elle le fera dans des conditions d’abord du délaissement scientifique. Au point que la science apparaître comme une antinature, et pas du tout comme son exploration. On en est au point où il faut mettre la nature en réserve de la science. Délaissement scientifique, mais aussi conditions de précarité esthétiques et politiques : c’est dans les conditions d’absence et de la réserve là aussi le négatif prédomine. Résoudre ces 4 difficultés du concept de nature, et les résoudre c’est proposer une philosophie de la nature, une voie sur ces 4 difficultés, faire cela, c’est suprêmement difficile aujourd’hui. Car on est dans des conditions de délaissement scientifique et de précarité politique. La question est de savoir si le mot nature a terminé sa carrière spéculative. Faut-il dire, comme Mallarmé, que la nature, ça a eu lieu et on n’y ajoutera pas. On n’y ajoutera pas, ça veut dire : on n’aura plus rien à en dire à proprement parler. C’est réellement une question posée. Et contre cela, je ne vois guère de réellement actif que le maintien de nature comme mot primitif, ouvert, et en partie indécidé (c’est la voie deleuzienne). Ça demeure un opérateur synthétique majeur (sous le nom de vie ou même de désir) mais au prix d’une renonciation explicite à toute définition. Donc dans le statut d’un mot primitif ouvert. Ouvert à quoi ? ouvert à une nouvelle situation de la nature sur ce point. Questions/réponses Je sacrifie la partie 2, est-ce qu’il y a des questions ? Question : est-ce qu’elle est vraiment absente de la science (cf vulgarisateur) ? Réponse : La vulgarisation c’est le nouveau présenté dans une figure de la rhétorique ancienne. C’est tenter de présenter un état nouveau de la dispo scientifique dans des connexions ou une rhétorique qui relève de l’état antérieur de la transmission. On ne transmet pas le nouveau comme tel, sauf aux scientifiques. On serait dans un abrupt de la transmission qui la rendrait impossible. La science fait totalement l’économie même de son auto-représentation comme nature. même dans la cosmologique ou la théorie de quanta, on n’a pas le mot nature. Question : polémique des années 20 ?

Réponse : dans les années 20, c’est encore un opérateur. Prenez les réticences de Einstein devant les quanta, c’est une représentation de la nature qui est à l’œuvre, d’ailleurs kantienne. S’il n’y a pas de nécessité ce n’est pas naturel (Dieu ne joue pas aux dés etc…). … La science s’oriente vers la conviction… pluralisme effectif. A chaque échelle sera attenant… plus de place réellement à cette totalisation minimale que désigne le mot nature. c’est un processus qui n’est pas achevé, mais le processus en cours est l’absentement progressif des opérateurs de jonction avec la philosophie. ça affecte nature, mais aussi matière et vie. Dire que la biologie est la science des processus vivants va devenir indéchiffrable. Vie sera absenté de la biologie. Ça laisse la philosophie au regard de ces catégories là dans un assez grand orphelinat, qu’on sent monter. La forme empirique est l’incertitude de détermination totale des commissions d’éthique. Tout ce qui peut se faire se fera. Les opérateurs sont des opérateurs philosophiques délabrés : nature humaine, respect de l’homme etc… tout ça n’a plus de connexion interne ou en pensée avec la science. La difficulté n’est pas qu’il y a des méchants techniciens et des bons éthiciens. La manière de se représenter la normativité de tout cela, qu’est-ce qui est acceptable inacceptable touche au mot nature, ie un respect de la nature, des espèces animales, de la nature humaine, mais ces opérateurs ne sont plus réellement connectés à la science. La question de savoir comment les arbitrages sont réels est compliquée. Il y a une déshérence du mot nature qui est désappropriée à la science…… c’est disjoint. C’est une situation qui à l’égard du mot nature est une situation nouvelle. Badiou : je vais vous poser une question, alors ! Nature est-ce que c’est un opérateur de pensée qui vous sert, qui nous dit quelque chose, et comment ? c’est une hypothèse qui rôde : nature soit désormais un mot sacrifié, qui ne soit plus que le nom d’une défensive (défensive de ce qu’on met péniblement en réserve du déchaînement technique, ou en réserve éthique…). Imaginons ça, que nature ne soit plus qu’une défensive par rapport à autre chose. Et que pour cette raison il est dévitalisé philosophiquement. Il n’a plus de puissance active. Non seulement il ne rend plus possible une philo de la nature (H) mais même un usage argumenté du mot nature dans l’espace philosophique. … catégorie du loisir, mise en réserve du temps ? est-ce qu’elle a eu lieu, simplement ? il faut retrouver une connexion entre les études de philosophie et le réel des choses. Le mot de nature sert encore à qch, au moins dans le champ de transmission de la chose. Est-ce que l’un de vous plaiderait pour un usage renouvelé du mot nature ? Intervention : …… Réponse : sauf que là vous traitez un point intéressant, mais là intervient de manière essentielle la question de l’infini. Le point c’est que la question de savoir si l’univers est infini etc… le mot infini n’est pas présent dans l’organisation scientifique contemporain. La cosmologie n’est pas cosmologie de l’infini, on suppose très communément que l’univers est plutôt fini. Chez Spinoza l’opérateur causal est un opérateur de connexion fondamental : une chose singulière est défini à partir de là…. Vous avez l’indication de niveau, niveau modal, les passions. Spinoza dispose encore d’opérateurs conceptuels synthétiques un peu plus élaborés que simplement l’infinité de la substance. Ça on ne l’a pas dans le dispositif scientifique contemporain. Il faut affronter l’idée que ce dispo travaille contre l’héritage selon laquelle la physique serait la science de la nature. hypothèse que la physique est une déconstruction de la catégorie de nature. je pense que la biologie contemporaine est une déconstruction de la catégorie de vie. Les catégories dont on se sert pour normes les pratique scientifique sont les catégories que la science déconstruit. Par exemple, sur les clones, toute une branche déconstruit la catégorie d’identité. ce n’est pas un problème de normativité mais de connexion : la norme doit avoir un régime de connexion avec ce qu’elle norme. Quel est le schème de la norme ? commet se connecte-t-elle à ce qu’elle norme ? Par exemple, il y a l’impératif catégorique de Kant. Mais il faut un schème minimal de l’efficience d’où la théorie du respect, schème de la loi dans l’action. On a le même problème : la question non pas quelle est la norme mais quel est son schème. Normes : quelles sont-elles, mais surtout quels sont les schèmes qui les relient à leurs objets ? Comment opèrentelles ? Les normes sont des vieille catégorie philosophique qui ont servi interface science / philosophie (comme vie, matière, nature, causalité). Elles pouvaient servir de norme car elles étaient des schèmes de connexion philosophie / science. Elles intervenaient dans la représentation que les scientifiques se faisaient de la science elle-même. Ces catégories sont délaissées ou absentées par la science, de façon telle que la normativité qui continue à utiliser ces catégories est dépourvue de schème. Elle est en disconnexion de ce qu’elle prétend normer. La question n’est même celle de la validité de la norme, qui sont des options philosophiques ou religieuses. Nouvelles discussions, connexions, avec ce qu’elle prétend normer. Pour trancher sur la nature, les mère porteuse, les clones… vous tranchez avec des

catégories philosophico-éthique. Mais quel est le degré de connexion entre ces cat et l’espace du dvp impavide et irrépressible de la science sur ces questions ? dans les conditions actuelles, l’impératif technique l’emportera. Tout ce qu’on peut faire, on le fera. C’est une annonce. C’est pas avec des catégories épuisées qu’on arrêtera quoi que ce soit ? Rappel : la nature comme mise en réserve est un concept nouveau. Qui accepte que nature soi en rétroaction de la technique. Le concept est limité et nouveau. Peut-être peut-il se connecter à la science, en posant les conditions scientifiques de la mise en réserve. le concept de réserve a commencé avec les indiens. Début de l’écologie : idée que la naturalité doit être préservée dans la figure de la réserve ; concept de réserve = plus esthétique, éventuellement politico-éthique. Appui sur des considérations de paysage et d’environnement. Qu’est-ce que l’environnement ? Il faut du naturel dans l’environnement : c’est une thèse nouvelle (pourquoi faudrait-il du naturel ? C’est quoi, du naturel artificialisé par la réserve ?). Environnement = nom donné à la nature dans la rétroaction de la technique. Il faut qu’il reste un peu de ce qu’il y avait avant. Délabrement du concept de nature. –––––––

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