CHAPTER 1
Applications mesurables
Etant donn´es deux espaces mesurables (Ω1 , A1 ) et (Ω2 , A2 ), nous pouvons nous int´eresser ` a des applications X : (Ω1 , A1 ) 7→ (Ω2 , A2 ) et voir leur compatibilit´e par rapport aux sigma-alg`ebres A1 et A2 . En particulier, est-ce que les images r´eciproques des parties mesurables de (Ω2 , A2 ) sont mesurables dans (Ω1 , A1 ) ? Si tel est le cas, nous dirons que l’application X conserve la structure d’espaces mesurables. Le principe d’une telle exigence se trouve dans le fait que nous traitons les parties mesurables. Donc nous souhaitons que les objets math´ematiques agissant sur les parties mesurables g´en`erent donc des parties encore mesurables. Ce principe doit ˆetre gard´e `a l’esprit dans tout le texte. En th´eorie de la mesure, tout comme en probabilit´e, la notation d’image r´eciproque est simplifi´ee. Voici un ´echantillon d’exemples X −1 (B) = (X ∈ B) = {ω ∈ Ω1 , X(ω) ∈ B} ⊂ Ω1 , B ⊂ Ω2 . Pour Ω2 = R, pour des r´eels a et b, X −1 (] − ∞, a]) = (X ≤ a), X −1 (]a, +∞[) = (X > a), X −1 (]a, b]) = (a < X ≤ b), etc. D´efinissons la mesurabilit´e d’une application.
1. D´ efinitions et premiers exemples Definition 1. Une application X : (Ω1 , A1 ) 7→ (Ω2 , A2 ) est mesurable, par rapport aux sigma-alg`ebres A1 et A2 not´ee (A1 , A2 ) − mesurable, ssi l’image r´eciproque d’une partie mesurable de (Ω2 , A2 ) est mesurable dans (Ω1 , A1 ), c’esta-dire ` (1.1)
∀(B ∈ A2 ), (X ∈ B) ∈ A1 ,
ou encore (1.2)
{(X ∈ B), B ∈ A2 } ⊂ A1
ou encore (1.3)
{B ∈ A2 , (X ∈ B) ∈ A1 } = A2 i
ii
1. APPLICATIONS MESURABLES
Comme exemples imm´ediat, consid´erons une fonction constante X : (Ω1 , A1 ) 7→ (Ω2 , A2 ), c’est-` a-dire qu’il existe un ´el´ement a ∈ Ω2 tel que ∀ω ∈ Ω2 , X(ω) = a. Montons que X est mesurable. En effet, pour tout B ⊂ Ω2 , (X ∈ B) = (X ∈ B) ∩ (a ∈ B) + (X ∈ B) ∩ (a ∈ / B). Soit a ∈ B, ∀ ω ∈ Ω1 , X(ω) = a ∈ B ⇒ ω ∈ (X ∈ B) et d’o` u Ω1 ⊂ (X ∈ B) ⇒ (X ∈ B) = Ω1 . Soit a ∈ / B, on a ∀ ω ∈ Ω1 , X(ω) = a ∈ /B⇒ω∈ / (X ∈ B) et d’o` u (X ∈ B) = ∅. En conclusion (X ∈ B) =
(1.4)
Ω1 si a ∈ B ∅ si a ∈ /B
Dans les deux cas, (X ∈ B) est mesurable. Donc Proposition 1. Toute application constante est mesurable. Consid´erons maintenant une application prenant des valeurs distinctes et d´enombrables dans Ω2 not´ees a1 , a2 , ..., c’est-`a-dire X(Ω1 ) = {a1 , a2 , ...}. Tout ω de Ω1 est donc dans l’un des ensembles (X = ai ). De plus les ensembles (X = ai ) sont disjoints car X ne peut prendre `a la fois deux valeurs distincts ai et aj pour i 6= j. Donc ils constituent une partition de Ω1 , c’est-` a-dire X Ω1 = (X = ai ). i≥1
Soit maintenant B une partie quelconque de Ω2 , on a (X ∈ B) = (X ∈ B) ∩ Ω1 = (X ∈ B) ∩
X
(X = ai )
i≥1
=
X
{(X ∈ B) ∩ (X = ai )}
i≥1
Il est clair que (X ∈ B) ∩ (X = ai ) = ∅ si ai ∈ / B car on ne peut avoir `a la fois pour ω ∈ Ω1 : X(ω) ∈ B, X(ω) = ai , ai ∈ / B. D’o` u X (X ∈ B) = {(X ∈ B) ∩ (X = ai )} . ai ∈B
Mais pour ai ∈ B, X(ω) = ai ∈ B ⇒ X(ω) ∈ B,
` ´ 2. ALLEGEMENT DE LA DEFINITIONS ET APPLICATIONS.
iii
i.e. (X = ai ) ⊂ (X ∈ B). Ce qui nous permet de conclure (1.5)
(X ∈ B) =
X
(X = ai ).
ai ∈B
Supposons maintenant que tous les singletons de Ω2 soit mesurables, (X ∈ B) est mesurables, d`es que les ensembles (X = ai ) sont mesurables. Et ils le sont si X est mesurables. Donc Proposition 2. Soit X : (Ω1 , A1 ) 7→ (Ω2 , A2 ) une application prenant un ensemble d´enombrable de valeurs Ω2 not´ee a1 , a2 , ... Supposons en plus que les singletons de Ω2 , sont mesurables. Alors X est mesurable ssi les ensembles (X = ai ) sont mesurables, c’est-` a-dire, ∀(i ≥ 1), (X = ai ) ∈ A1 . Parmi les espaces mesurables dont les singletons sont s´epar´es, nous avons les espaces m´etriques munis de leur sigma-alg`ebre bor´elienne, en particulier les espaces Rk . D’ailleurs les applications mesurables g´en´eralement consid´er´ees sont `a valeurs dans Rk . Les applications prenant des valeurs distinctes en nombre d´enombrable sont dites discr`etes. La proposition ci-dessus caract´erise leur mesurabilit´e.
2. All` egement de la d´ efinitions et applications. Notre slogan, rappelons-le, en mesure est nous sommes ´economes. Nous cherchons toujours ` a ´etablir les choses sur une petite ´echelle pour la g´en´eraliser `a une grande ´echelle. Par exemple, pour ´etablir (1.1), peut-on se contenter de la prouver pour une partie de la sigma-alg`ebre A2 . En effet, on a Proposition 3. Soit une application X : (Ω1 , A1 ) 7→ (Ω2 , A2 ). Supposons que A2 est engendr´ee par H, i.e., . Alors est mesurable ssi (2.1)
∀(B ∈ H), (X ∈ B) ∈ A1 ,
Proof. Puisque H⊂ A2, l’implication (1.1)⇒ (2.1) est vraie. Supposons maintenant que (2.1) est vraie. Montrons que (1.1) est vraie. Posons A = {B ∈ A2 , (X ∈ B) ∈ A1 } ⊂ A2 . Il suffit alors de montrer que {B ∈ A2 , (X ∈ B) ∈ A1 } = A2 . Nous savons d´ej`a que A est une sigma-alg`ebre contenue dans A2 (Exercice 3) du chapitre I). Par l’hypoth`ese (2.1), A est une sigma-alg`ebre contenant H, donc contient σ(H) = A2 . Alors A=A2 et donc (1.1) est vraie.
Les cons´equences de cette proposition sont nombreuses.
iv
1. APPLICATIONS MESURABLES
• Une fonction continue est mesurable. Soit (E1 , T1 ) et (E2 , T2 ) deux espaces topologiques et X une application de E1 dans E2 . On peut consid´erons X par rapport aux topologies X : (E1 , T1 ) 7→ (E2 , T2 ) et par rapport aux sigma-alg`ebres bor´eliennes B(E1 ) = σ(T1 ) et B(E2 ) = σ(T2 ) : X : (E1 , B(E1 )) 7→ (E2 , B(E2 )); Supposons que X soit continue par rapport aux topologies T1 et T2 , c’est-` a-dire ∀(B ∈ T2 ), X −1 (B) ∈ T1 . Cela implique, puisque T1 ⊂ σ(T1 ) = B(E1 ), ∀(B ∈ T2 ), X −1 (B) ∈ B(E1 ). Selon notre proposition, puisque σ(T2 ) = B(E2 ), ∀(B ∈ B(E2 )), X −1 (B) ∈ B(E1 ). D`es lors, X est mesurable. On retient alors qu’une application continue, est mesurable par rapport aux sigma-alg`ebres bor´eliennes. • Mesurabilit´ e d’application num´ eriques. Soit une application num´erique X : (Ω, A) 7→ (R, B(R). Puisque les interavalles [-∞, a] engendrent B(R), alors X est mesurable ssi ∀(a ∈ R), (X ≤ a) ∈ A. De mˆeme, puisque les intervalles ]a, +∞] engendrent B(R), alors X est mesurable ssi ∀(a ∈ R), (X > a) ∈ A. Consid´erons maintenant une suite d’applications num´eriques mesurables Xn : (Ω1 , A) 7→ (R, B(R) pour n≥ 1. On a, pour tout a ∈ R, \ (sup Xn ≤ a) = (Xn ≤ a) n≥1
n≥1
et ( inf Xn > a) = n≥1
[
(Xn > a).
n≥1
Ainsi supn≥1 Xn et inf n≥1 Xn sont mesurables. Le supremum et l’infinimum d’une famille d´enombrable d’applications num´eriques mesurables d´efinies sur le mˆeme espace mesurable sont mesurables. Il s’en suit que limXn = sup( inf Xm ) n≥1 m≥n
et limXn = inf ( sup Xm ) n≥1 m≥n
sont mesurables d`es que les Xn le sont. En particulier si les applications ont une limite X, on a X = limXn = sup( inf Xm ) = limXn = inf ( sup Xm ). n≥1 m≥n
n≥1 m≥n
3. COMPOSITION D’APPLICATIONS MESURABLES
v
Cela conduit ` a la proposition suivante.
Proposition 4. Soit une suite d’applications num´eriques mesurables Xn : (Ω, A) 7→ (R, B(R) pour n ≥ 1. Alors l’enveloppe sup´erieure, l’enveloppe inf´erieure, la limite sup´erieure et la limite inf´erieure de cette suite sont mesurables. En particulier, si elle admet une limite X ∀(ω ∈ Ω), Xn (ω) → X(ω), alors elle est mesurable.
3. Composition d’applications mesurables 3.1. Enoncons le r´ esultat. Proposition 5. Soit les deux applications mesurables X : (Ω1 , A1 ) 7→ (Ω2 , A2 ) et Y : (Ω2 , A2 ) 7→ (Ω3 , A3 ). Alors l’application compos´ee Y ◦ X : (Ω1 , A1 ) 7→ (Ω3 , A3 ) d´efinie par ∀(ω ∈ Ω1 ), Y ◦ X(ω) = Y (X(ω)) est mesurable.
Proof. Soit X et Y mesurables. Alors, pour tout B ∈ A3 , (Y ◦ X)−1 = X −1 (Y −1 (B)) ∈ A1 .
vi
1. APPLICATIONS MESURABLES
3.2. Applications aux applications ` a composantes. Soit k espaces mesur´es (Ωi , Ai ) mesurable, i=1,...,k. Soit l’espace produit Y Ω= Ωi . 1≤i≤k
Nous avons d´eju vu que muni de la σ−alg`ebre produit Y S={ Ai , Ai ∈ Ai } 1≤i≤k
d´efinit une semi-alg`ebre. Q Nous dirons que les ´el´ements de S sont des pav´es mesurables. S engendre sur Ω = 1≤i≤k Ωi une sigma-alg`ebre not´ee O A= Ai . 1≤i≤k
appell´es sigma-alg`ebre produit ou sigma-alg`ebre tensorielle. L’application suivante Y O πj : (Ω = Ωi , Ai ) 7→ (Ωj , Aj ) 1≤i≤k
1≤i≤k
qui associe ` a tout ω = (ω1 , ω2 , ..., ωk ) sa j − i` eme composante: πj (ω1 , ω2 , ..., ωk ) = ωj Q s’appelle la j-i`eme projection de l’espace produit 1≤i≤k Ωi sur son j-i`eme facteur Ωj . Remarquons d´ej` a que pour Bj ⊂ Ωj , (3.1)
πj−1 (Bj ) = Ω1 × ... × Ωj−1 × Bj × Ωj+1 × ... × Ωk .
Nous avons les faits suivants. Proposition 6. Les projections sont mesurables, lorsque l’espace produit est muni de la sigma-akg`ere produit.
Proof. La preuve facile et se fonde sur (3.1) qui montre que si Bj ∈ Aj, alors N πj−1 (Bj ) ∈ S ⊂ A = 1≤i≤k Ai . Mais, il y a mieux : N Proposition 7. La sigma-alg`ebre produit A = 1≤i≤k Ai , est la sigma-alg`ebre Q minimale sur Ω = 1≤i≤k Ωi pour laquelle les projections sont mesurables. Q Proof. En effet, soit B une sigma-alg`ebre sur Ω = 1≤i≤k Ωi telle ques les k projections πj : (Ω, B) 7→ (Ωj , Aj ) soient mesurables. Soit A=
Y
Ai
1≤i≤k
un ´el´ement quelconque de S, l’ensemble des pav´es mesurables, avec , Ai ∈ Ai . Par (3.1), on pour tout 1 ≤ i ≤ k, πi−1 (Ai ) = Ω1 × ... × Ωi−1 × Ai × Ωi+1 × ... × Ωk .
3. COMPOSITION D’APPLICATIONS MESURABLES
vii
Puisque qu’une intersection de produits cart´esiens est le produit cart´esien des intersions des facteurs, on obtient \ Y πi−1 (Ai ) = Ai ∈ B, 1≤i≤k
1≤i≤k
par mesurabilit´e des πi . Il s’en suit que S⊂B et donc O
A=
Ai ⊂ B.
1≤i≤k
Ainsi, toute sigma-alg`ebre pour laquelle les projections sont mesurables, contient la sigma-alg`ebre produit, qui rend elle mˆeme mesurables les projections. Enfin, ´etudions la mesurabilit´e d’une application a` composantes, c’est-`a-dire `a valeurs dans un espace produit. Soit une application Y O X : (E, B) 7→( Ωi , Ai ), 1≤i≤k
1≤i≤k
o` u (E, B) est un espace mesurable. Alors pour tout ω ∈ E, X(ω) aura k composantes X(ω) = (X1 (ω), X2 (ω), ..., Xk (ω)). On a bien sˆ ur Xj = πj (X) = πj ◦ X. Chaque Xj est une application de (E, B) dans (Ωj , Aj ) selon le sch´ema Q πj X (E, B) 7→ 7→ Ωj . 1≤i≤k Ωi ω ,→ (X1 (ω), X2 (ω), ..., Xk (ω)) ,→ Xj (ω) Nous avons la caract´erisation. Proposition 8. L’application X est mesurable ssi chaque composante Xi est mesurable. Proof. Supposons que X soit mesurable, alors chaque Xj = πj ◦ X est mesurable en tant que composistion d’applications mesurables. Supposons maintenant que chaque Xi est mesurable. Soit Y A= Ai 1≤i≤k
un ´el´ement quelconque de S, l’ensemble des pav´es mesurables, avec , Ai ∈ Ai . On a (X ∈ A) = (X1 ∈ A1 , ..., Xk ∈ Ak ) \ = (Xi ∈ Ai ) ∈ B, 1≤i≤k
par mesurabilit´e des Xi .
La le¸con qu’on en tire est la suivante. En ´etudiant la mesurabilit´e d’une applications dans un espace produit, on se contente d’´etudier les composantes. Nous allons maintenant nous concentrer aux applications num´eriques mesurables, appel´ees applications bor´eliennes.
viii
1. APPLICATIONS MESURABLES
4. Applications num´ eriques r´ eelles Nous nous concentrons ici sur les applications num´eriques mesurables, d’un k espace (Ω, A) dans R munie de la sigma-alg`ebre usuelle, engendr´ees par ses intervalles. Mais de telles applications X:
k
k
(Ω, A) 7→ (R , B(R ) ω ,→ (X1 (ω), ..., Xk (ω))
sont mesurables ssi leurs composantes le sont, nous nous restreignons aux applications num´eriques ` a valeurs dans R. Lorsqu’on aura affaire aux applications vectorielles, nous les traiterons par composantes. Xn : (Ω, A) 7→ (R, B(R) Nous avons d´ej` a ´etudi´e en partie les applications num´eriques X : (Ω, A) 7→ (R, B(R). En particulier, X est mesurable ssi ∀(a ∈ R), (X ≤ a) ∈ A ssi ∀(a ∈ R), (X > a) ∈ A. De plus, les limites sup´erieures, inf´erieures, les enveloppes sup´erieures et inf´eriences, et les limites, s’il y a lieu, de suites d’applications num´eriques mesurables, sont mesurables. Nous allons ` a pr´esent nous prononcer sur les op´erations de fonctions mesurables. Mais au paravent, nous allons exiber une classe de fonctions mesurables, particuli`erement simples, dense dans l’espace des applications num´eriques mesurables. 4.1. Fonctions ´ etag´ ees. Soit une subdivision finie et mesurable de Ω, c’est`a-dire, un nombre k de parties mesurables A1 , ..., Ak disjointes entre-elles telles que X Ω= Ai . 1≤i≤k
Soit une application X prenant des valeurs constantes αi ∈ R sur chaque partie Ai , c’est-` a-dire X(ω) = αi pour ω ∈ Ai not´ee aussi X (4.1) X= αi 1Ai 1≤i≤k
Une application (4.1) s’appelle une fonction ´etag´ee ou simple. Le qualificatif mesurable est sous-entendu. Les fonctions simples sont finies. Faisons deux remarques. Il peut arriver que l’on ait X Ai 6= Ω 1≤i≤k
dans P (4.1). Dans ce cas, cette application prend la valeur αk+1 = 0 sur Ak+1 = ( 1≤i≤k Ai )c , et qu’on a omis de l’´ecrire: X X X X= αi 1Ai = αi 1Ai + 01Ak+1 = αi 1Ai . 1≤i≤k+1
1≤i≤k
1≤i≤k
´ ´ 4. APPLICATIONS NUMERIQUES REELLES
ix
La deuxi`eme remarque est que l’´ecriture de (4.1) n’est pas unique. Par exemple, soit X = a1A + b1B . Supposons que A = A1 + A2 . Alors X = a1A1 + a1A2 + b1B . Ainsi, en cassant un des paliers Ai , on obtient une autre repr´esentation. Par contre, il y pour une application simple, une seule repr´esentation pour laquelle les valeurs αi sont distinctes. Le changment de repr´esentations nous permet de consid´erer une subdivision communue pour deux applications simples. En effet, soit deux fonctions simples X X= αi 1Ai 1≤i≤k
et X
Y =
βj 1Bj .
1≤j≤m
On a donc Ω=(
X
Ai )(
X
Bj ) =
1≤j≤m
1≤i≤k
X
X
Ai Bj .
1≤i≤k 1≤j≤m
Alors, si Ai Bj est non vide, on a X = αi , Y = βj sur Ai Bj . Donc (4.2)
X
X=
αi 1Ai Bj
i,j
et (4.3)
X
Y =
βi 1Ai Bj .
i,j
Dans ces deux formules, les indices i et j d´ecrivent {1, ..., k} × {1, ..., m} lorsque Ai Bj est vide. Enon¸cons le premier r´esultat. Pour cela, notons que la classe E est munie d’une addition (+), d’une multiplication externe par des r´eels (·), de la multiplication internes des fonctions (×) et de la relation d’ordre (≤). Proposition 9. (E , + , ·, ≤) est un espace de Riesz, c’est-` a-dire un espace vectoriel muni relation d’ordre, contenant le maximum et le minimum finis de ses ´el´ements. De plus (E , + , ×, ≤) est une alg`ebre lattice. Proof. Soit X et Y deux applications simples repr´esent´ees par (4.2) et (4.3) et λ un r´eel queconque. Alors X X +Y = (αi + βj )1Ai Bj , i,j
λX =
X
(λαi )1Ai ,
i
XY =
X i,j
(αi βj )1Ai Bj ,
x
1. APPLICATIONS MESURABLES
X
(αi + βj )1Ai Bj ,
i,j
max(X, Y ) =
X
max(αi , βj )1Ai Bj ,
i,j
et min(X, Y ) =
X
min(αi , βj )1Ai Bj .
i,j
Alors E est stable par addition, multiplication externe, multiplication interne, maximum et minimum finis. Notre deuxi`eme r´esultat concerne la densit´e de E dans l’espace des applications mesurables. Theorem 1. Toute application mesurable positive est limite croissante de fonctions ´etag´ees finies et positives. Une fonction mesurable est limite de fonctions ´etag´ees simples. Proof. Soit X≥ 0 mesurable. Pour n fix´e, consid´erons la subdivision de R+ suivante 22n +1 22n X X k−1 k n Ak . R+ = [ n , n [ + [2 , +∞] = 2 2 k=1
k=1
Pour tout ω ∈ Ω, X(ω) appartient `a l’un des Ak . Chaque Ak est un intervalle de R donc mesurable. Les parties de Ω d´efinies par (X ∈ Ak ) sont mesurables et forment une partition mesurable de Ω : Ω=
2n 2X +1
k=1
2n
2 X k−1 k (X ∈ Ak ) = ( 2n ≤ X < n ) + (X ≥ 22n ). 2 2 k=1
D´efinissons alors la fonction ´etag´ee 2n
(4.4)
Xn =
2 X k−1 k=1
2n
1( k−1 ≤X< 22n
k 2n
)
+ 2n 1(X≥22n ) .
Autrement dit, Xn (ω) prend la valeur de la borne gauche de l’intervalle dans lequel tombe X(ω). Nous allons montrer que • La suite (Xn )n≥0 est croissante, c’est-`a-dire que ∀(n ≥ 1), ∀(ω ∈ Ω), Xn (ω) ≤ Xn+1 (ω).
(4.5)
(4.6)
Prenons le r´ep`ere suivant pour tout k = 1, ..., 22n − 1: k k X(ω) ≥ n ⇒ Xn (ω) ≥ n 2 2 et pour tout k ≥ 22n + 1, k X(ω) ≥ n ⇒ Xn (ω) = 2n . 2 Cela tient au fait que si k X(ω) ≥ n 2
´ ´ 4. APPLICATIONS NUMERIQUES REELLES
xi
alors forc´ement X(ω) est dans un intervalle [ 2mn , m+1 2n [ avec m ≥ k ou dans [2n , +∞] avec k ≥ 22n . Dans les deux cas Xn (ω) =
k m ≥ n ou Xn (ω) = 2n . 2n 2
Maintenant, soit k 2n avec k = 1, ..., ou 22n . On a deux cas. Premier cas : k ≤ 22n − 1, et donc, par d´efinition, k+1 k ≤X< 2n 2n D`es lors 2k 2k + 2 ≤ X < n+1 2n+1 2 Mais 2k ≤ 2(22n − 1) = 22n+1 − 2 ≤ 22(n+1) − 1. La derni`ere in´egalit´e est ´evidente. D’apr`es (4.5), on a Xn (ω) =
k = Xn (ω). 2n Deuxi`eme cas : k = 22n , c’est-`a-dire 2k
Xn+1 (ω) ≥
2n+1
=
X ≥ 2n . Alors
22n+1 m = n+1 2n+1 2 avec m ≤ 22(n+1) − 1. En appliquant (4.5), on a m Xn+1 (ω) ≥ n+1 = 2n = Xn (ω). 2 Dans les deux cas, X≥
∀(ω ∈ Ω), Xn+1 (ω) ≥ Xn (ω). La suite (Xn )≥1 est croissante. • Xn converge vers X. Pour montrer cela, consid´erons deux cas pour un ω fix´e. Premier cas : X(ω) = +∞. Donc pour tout n ≥ 1, X(ω) ≥ 2n et donc Xn (ω) = 2n → +∞ = X(ω). Deuxi`eme cas. 0 ≤ X(ω) < +∞. Il existe n0 , tel que X(ω) < 2n0 . Donc pour tout n ≥ n0 , X(ω) < 2n et il existe un entier k tel que 0 ≤ k < 2n tel que k k+1 ≤ X(ω) ≤ 2n 2n
xii
1. APPLICATIONS MESURABLES
avec justement Xn (ω) =
k . 2n
Alors 0 ≤ Xn (ω) − X(ω) ≤ pour tout n ≥ 2n0 . Alors
1 2n
Xn (ω) → X(ω). En mettant ensemble les deux parties, on a Xn → X • En r´esum´e, la suite de fonction ´etag´ees Xn croit vers X : Xn ↑ X. Ceci prouve la premi`ere assertion du th´eor`eme. Pour finir la preuve, consid´erons pour une fonction mesurable quelconque X + = sup(X, 0) la partie positive de X et X − = sup(−X, 0) la partie n´egative de X. Les applications X+ et X− sont toutes positives et mesurables en tant que maxima de fonctions mesurables. On ´etablit ais´ement que X = X+ − X− et |X| = X + + X − . D’apr`es la premi`ere partie, il existe une suite d’applications ´etag´ees Xn (1) (resp. Xn (2)) croissante vers X+ (resp. X− ). Alors Xn (1) − Xn (2) est une suite de fonctions ´etag´ees qui convergent vers X = X + − X − .
Ceci nous permet d’´etudier les op´erations sur les fonctions mesurables. 4.2. Op´ erations sur les applications mesurables. Soit X et Y deux applications mesurables, alors il existe, d’apr`es les r´esultats de la section pr´ec´edente, il existe une suite de fonctions ´etag´ees Xn convergent vers X et une suite d’application Yn convergent vers Y. Soit λ un r´eel quelconque. On a alors Xn + Yn → X + Y, λXn → λX, Xn Yn → XY, max(Xn , Yn ) → max(X, Y ) et min(Xn , Yn ) → min(X, Y ). De mˆeme, pour Yn 6= 0, Xn /Yn → X/Y. D’apr`es les r´esultats ci-dessus, les suites des membres de gauche sont mesurables. Donc les membres de droite sont aussi mesurables. En r´esum´e :
´ ´ 4. APPLICATIONS NUMERIQUES REELLES
xiii
Proposition 10. Nous avons les propri´et´es suivantes. • La somme deux applications mesurables dont la somme est d´efinie, est mesurable. • Le produit de deux applications mesurables bien d´efini est mesurable. • Le produit d’une application mesurable par un r´eel bien d´efini est mesurable. • Le maximun et le minimum de deux applications mesurables sont mesurables. • Si Y ne prend pas la valeur z´ero, alors X/Y est mesurable. 4.3. Fonctions semi-continues. Proposition 11. Une application num´erique d´efinie sur un espace topologique semi-continue est mesurable par rapport aux sigma-alg`ebres bor´eliennes. Proof. Consod´erons une application. f : (E, B) 7→ R d´efinie d’un espace topologique muni de la sigma-alg`ebre bor´elienne dans R. X est continue en tout x ssi (i) Pour tout x∈ E, pour tout ε > 0, il existe un voisinage V de x tel que y ∈ V ⇒ f (y) ∈]f (x) − ε, f (x) + ε[. Dans cette formule, on s’int´eresse `a tout l’intervalle ]f (x) − ε, f (x) + ε[. Mais on peut s’int´eresser uniquement l’une des bornes de l’intervalle. Cela nous donne les fonctions semi-continues. Pr´ecis´ement, f est dite semi-continue sup´erieurement (not´e s.c.s ) ssi (ii) Pour tout x∈ E, pour tout ε > 0, il existe un voisinage V de x tel que y ∈ V ⇒ f (y) < f (x) + ε Elle est dite semi-continue inf´erieurement (not´e s.c.i) ssi (iii) Pour tout x∈ E, pour tout ε > 0, il existe un voisinage V de x tel que y ∈ V ⇒ f (y) > f (x) − ε L’on voit imm´ediatement qu’une fonction f est continue ssi elle est s.c.i et s.c.s. De plus une fonction f est s.c.i. ssi son oppos´ee -f est s.c.s. Allons plus loin en d´emontrant qu’une fonction f est semi-continue sup´erieurement ssi (4.7)
∀c ∈ R, (f ≥ c) est f erm´ e
Il s’en suit qu’une fonction semi-continue est mesurable. Montrons que f s.c.s ⇒ (f ≥ c) ferm´e. Soit f s.c.s. Soit x∈ G = (f ≥ c)c . Donc f (x) < c. Donc ∀ > 0, f (x) + ε < c. f ´etant semi-continue sup´erieurement, il existe un voisinage V∈ V (x) de x tel que y ∈ V ⇒ f (y) ≤ f (x) + ε < c et donc x ∈ V ⊆ G. Donc G contient ses points x avec un voisinage. Il est ouvert.
xiv
1. APPLICATIONS MESURABLES
Supposons maintenant que (4.7) est vraie. Soit x∈ E quelquonque. Donc pour tout ε > 0, G = (f < f (x) + ) ouvert. Mais x appartient `a G, donc G le contient avec un de ses voisinages V∈ V (x) et donc y ∈ V ⇒ y ∈ (f < f (x) + ε) ⇒ f (y) ≤ f (x) + ε. Donc f est semi-continue sup´erieurement.
4.4. Fonctions partielles. Nous avons d´ej`a ´etudi´e les applications `a valeurs dans un espace `a pr´esent les applications d´efinies sur un espace Qproduit. Etudions N produit (Ω = 1≤i≤k Ωi , 1≤i≤k Ai ) `a valeurs dans R. Nous avons le sch´ema Q N X : ( 1≤i≤k Ωi , 1≤i≤k Ai ) 7→ R . (ω1 , ω2,..., ωk ) ,→ X(ω1 , ω2,..., ωk ) Fixons ω0 =(ω1 , ..., ωi−1 , ωi+1 , ..., ωk ), c’est-`a-dire toutes les variables `a l’exception de ωi . On d´efinit la i-`eme fonction partielle Xω0 :
(Ωi , Ai ) 7→ R . ωi ,→ X(ω1 , ω2,..., ωk )
Nous avons le r´esultat. Proposition 12. Si X est mesurable, alors les fonctions partielles sont mesurables.
Proof. Nous allons le prouver avec k=2. Supposons que (ω1 , ω2 ) ,→ X(ω1 , ω2 ) mesurable. Pour ω1 fix´e, ´etudier la mesurabilit´e de l’application partielle (4.8)
ω2 ,→ Xω1 (ω2 ) = X(ω1 , ω2 ).
Commen¸cons par remarquer que (αX + βY )ω1 = αXω1 + βYω1 et que Xn ↑ X ⇒ (Xn )ω1 ↑ Xω1 . Nous allons d´emontrer (4.8) en utilisant une m´ethode qui sera r´e-utilis´ee inlassablement dans ce cours. Nous invoquerons la m´ethode `a travers l’epxression : en passant par les ´etapes classiques. Etape 1: X=1A , o` u A est une partie mesurable. Remarqez simplement que 1A (ω1 , ω2 ) = 1 ⇔ (ω1 , ω2 ) ∈ A ⇔ ω2 ∈ Aω1 ⇔ 1Aω1 (ω2 ) = 1 D’o` u, pour ω1 fix´e 1A (ω1 , ω2 ) = 1Aω1 (ω2 ) Or les sections Aω1 sont mesurables et donc ω2 ,→ Xω1 (ω2 ) = 1Aω1 (ω2 ) est mesurable. Etape 2. X est une fonction ´etag´ee X X= αi 1Ai . 1≤i≤k
5. EXERCICES
xv
Alors ω2 ,→ Xω1 (ω2 ) = (
X
αi 1Ai )ω1 =
1≤i≤k
X
αi (1Ai )ω1
1≤i≤k
est mesurable. Etape 3. X≥ 0. Il existe une suite de fonctions ´etag´ees Xn telle que Xn ↑ X. Donc (Xn )ω1 ↑ Xω1 . Puisque les fonctions partielles de fonctions ´etag´ees sont mesurables, alors la limite Xω1 est aussi ω2 −mesurable. Etape 4. X = X + − X − et ω2 ,→ Xω1 = (X + − X − )ω1 (ω2 ) est mesurable en vertu de l’´etape 3.
5. Exercices Exercise 1. Soit f une fonction croissante de R dans R. Soit D(n) le nombre de points de discontinuit´e de f dans [-n,n]. Rappelons qu’un r´eel x est un point de discontinuit´e de f ssi f (x+) − f (x−) > 0 o` u f (x−) est la limite ` a gauche et f (x+) est la limite ` a droite de x. Puisque f est croissante f (x+) < f (x−) et f (x+) − f (x−) s’appelle saut de discontinuit´e. Pour k ≥ 1, Dk (n) l’ensemble des points de discontinuit´e de f dans [−n, n] et dont le saut de discontinuit´e d´epasse 1/k, c’est-` a-dire Dk (n) = {x ∈ D(n), f (x+) − f (x−) > 1/k}. • Soit x1 , ..., xm m ´el´ements de Dk (n). – Justifier l’in´egalit´e (recourir ` a un dessin par exemple) X f (n) − f (−n) ≤ f (xi +) − f (xi −). 1≤i≤m
– En D´eduire que m ≤ k × (f (n) − f (−n)) et donc que Dk (n) est fini. • Etablir que le nombre de points de discontinuit´e de f est [ D= D(n) k≥1
et donc que le nombre de points de discontinuit´e de f est d´enombrable. En d´eduire de mˆeme pour une fonction d´ecroissante.
xvi
1. APPLICATIONS MESURABLES
Exercise 2. Le but de cet exercice est de montrer que toute fonction de R dans R telle que son nombre de points de discontinuit´e est au plus d´enombrable et qu’elle admet en tout point une limite ` a droite et ` a gauche, est mesurable. Proc´edons par ´etape. • Etape 1. f ne poss`ede qu’un seul point de discontinuit´e x0 . Soit f (x−) si x ≥ x0 f0 (x) = f (x) si x < x0 et
f1 (x) =
f (x) si x > x0 . f (x+) si x ≤ x0
Etablir que f = f0 1]−∞,x0 ] + f(x0 ) 1{x0 } + f1 1]x,+∞0 ] Etudier la continuit´e de fi , i = 1, 2 (par un dessin). En d´eduire que f est mesurable. • Etape 2. f poss`ede k points de discontinuit´e ´enum´er´ees dans l’ordre x1 < ... < xk+1 . Soit f (x−) si x ≥ x1 f0 (x) = , f (x) si x < x1 et f (x) si x > xk+1 fk+1 (x) = . f (xk+1 +) si x ≤ xk+1 Soit pour 1 ≤ i ≤ k, f (xi+1 −) si x ≥ xi+1 f (x) si xi < x < xi+1 . fi (x) = f (xi +) si x ≤ xi Etabir que X
f = f0 1]−∞,x1 [ + +
fi 1]xi ,xi+1 [ + fk+1 1]xk+1 ,+∞[
1≤i≤k
X
+
f (xi ) 1{xi }
1≤i≤k+1
Etudier la continuit´e des fi (par un dessin) et conclure que f est mesurable. • Enfin f poss`ede une infinit´e d´enombrable de points de discontinuit´e (xj )j≥1 . Example 1. Une fonction f de R dans R continue ` a droite ou ` a gauche est mesurable. Soit f continue ` a gauche et soit fn− (x) =
k=+∞ X
f (k/2n )1[k2−n ,(k+1)2−n [ (x),
k=−∞
c’est-` a-dire fn+ (x) = f (k/2n ) pour
k+1 k ≤x< . 2n 2n
Soit x fix´e, montrer qu’il existe une suite xn =
kn (x) 2n
5. EXERCICES
xvii
telle que 0 ≤ x − xn ≤ 2−n et − fn (x) − f (x) = |f (xn ) − f (x)| En d´eduire que fn− (x) → f (x). En d´eduire que f est mesurable. Faites la mˆeme d´emonstration pour f continue ` a droite en consid´erant k=+∞ X k+1 fn+ (x) = f ( n )1]k2−n ,(k+1)2−n ] (x) 2 k=−∞