Turquie Et Islamisation De L'europe

  • May 2020
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La Turquie, cheval de Troie islamique ? Eric Denimal | Alexandre del Valle 08.10.2004 En décembre 2004, le sort de la Turquie dans l’Europe sera définitivement scellé. La commission Européenne de Bruxelles se prononcera sur sa candidature qui, si elle s’avère acceptée, ôtera les derniers freins psychologiques et politiques à l’entrée de la Turquie dans l’Union européenne. Réalise-t-on vraiment les enjeux considérables de cette décision sur l’avenir de cette Union ? Alexandre del Valle qui, en 2002 s’était déjà fait remarquer par son ouvrage quasi prophétique « Le totalitarisme islamiste à l’assaut des démocraties " détaille dans un nouveau livre, sans parti pris " anti-turc " mais avec objectivité, toute la problématique soulevée par cette question. Il met à bas " l’européanité " revendiquée par la Turquie et la considère comme usurpée ; il balaie l’argumentaire d’un islamisme modéré en dénonçant une imposture ; puis il annonce une victoire pour l’islam et une Union européenne vampirisée. D’après Alexandre del Valle, tant que la question des droits de l’homme ne sera pas réglée, tant qu’Ankara n’aura pas reconnu le génocide des Arméniens, tant que le pouvoir actuel demeurera en place et la " stratégie du cheval de Troie " possible, la Turquie ne pourra prétendre à un autre statut géopolitique que celui d’État associé, déjà fort avantageux pour elle et susceptible d’éviter les deux écueils que sont le rejet unilatéral et la pleine intégration irresponsable : un partenaire privilégié de l’Europe et un allié important de l’Occident, membre du Conseil de l’Europe et de l’Alliance Atlantique. Alexandre del Valle, en sous-titrant votre livre " La Turquie dans l’Europe " par cette question : Un cheval de Troie islamiste ?, vous répondez positivement et vous étayez cette redoutable possibilité en quelques 450 pages ! Pour vous, il est clair que l’islam est plus conquérant que jamais et que l’entrée de la Turquie dans l’Union Européenne relève de la ruse du roi de Sparte qui voulait conquérir Troie. En effet, et ce qui n’est pas banal, c’est que la mythique cité immortalisée par Homère se trouve aujourd’hui sur le territoire turc ! Je le dit d’emblée, la Turquie n’est pas européenne, du point de vue de la civilisation et des valeurs, même si elle est un ami et un allié incontestable de l’Occident et un voisin proche de l’Europe. En quoi la Turquie est un cheval de Troie ? Les réponses sont multiples. Si ce pays venait à être admis dans l’Union européenne, loin d’être un membre parmi d’autres, elle y détiendrait une place prépondérante. Elle serait avant tout la première puissance militaire d’Europe (la première puissance armée de l’Otan étant les EtatsUnis) et elle peut aligner, au moindre geste, un million de soldats ! La Turquie détiendrait aussi, dès 2025, le plus grand nombre de voix au Conseil européen et plus de députés au Parlement de Strasbourg que l’Allemagne et la France. Elle serait la première puissance démographique dès 2020 avec 100 millions d’habitants. Mais le plus graves, c’est que fortes d’une population parmi les plus islamisées du monde

musulman, et disposant d’outils de propagandes officiels extrêmement puissants, les islamistes turcs comptent mettre à profit les espaces de liberté offerts par l’ouverture des frontières et les droits en matières d’expression et d’action, pour inculquer aux jeunes issus de l’immigration musulmane leur idéologie obscurantiste et contribuer ainsi à enrayer le processus d’intégration. Votre livre est sorti le 11 mars dernier [1]. Le même jour, en écho au 11 septembre, il y avait les attentats de Madrid, sans doute lié au terrorisme islamiste. C’est une coïncidence, mais que pensez-vous de ce terrorisme qui touchent les capitales européennes (on pense aussi aux journalistes otages en Irak) ! Ce terrorisme n’est pas comparable au terrorisme pro-palestinien que nous connaissions jusqu’ici. Aujourd’hui, l’ennemi principal est l’Occident et je crois pouvoir dire que nous sommes en face d’un terrorisme totalitaire, plus virulent encore que celui qui s’appuyait sur des critères raciaux. En effet, le totalitarisme islamique s’appuie sur la lutte des religions. Il est plus difficile à saisir et à combattre parce qu’il n’est pas uniforme. De très nombreux courants et groupes armés forment un terrorisme polymorphe qui se diffuse partout dans le monde en utilisant les moyens modernes de communications, des outils mis en place, pour la plupart du temps, par les pays occidentaux dont il veut la mort. Comment lutter contre l’intolérance quand la tolérance fait partie de notre identité ? Il y a, de la part de ce mouvement terroriste une volonté indéniable de conquérir le monde, islamiser la planète en passant premièrement par les pays où l’islam est trop modéré pour aboutir, finalement, à mettre à genoux les pays occidentaux et ce en usant de la peur. Il veut subjuguer le monde par l’islam ; et je rappelle que subjuguer, c’est réduire à la soumission complète, faire passer sous le joug ! Or, depuis le 11 septembre, il ne se passe plus un jour sans que l’islam soit évoqué et, paradoxalement, on n’a jamais autant enregistré de conversions d’occidentaux à l’islam ! L’armée turque, la plus puissante d’Europe, est contre l’islamisation du pays, mais l’Europe voudrait une baisse en puissance de cette armée. C’est alors une aubaine pour les islamistes qui veulent radicaliser le pays en travaillant à son islamisation totale. Comment analyser-vous cette situation ? Il y a une énorme contradiction de penser que l’entrée de la Turquie dans l’Union Européenne limiterait l’influence de l’islam dans ce pays ou amoindrirait l’islamisation en cours dans cette région du monde. C’est le contraire qui se produirait puisque l’affaiblissement de l’armée serait équivalent à laisser tomber les résistances aux influences des musulmans. Il faut savoir que l’armée tire toutes les ficelles dans ce pays. C’est elle qui décide des grandes orientations de la politique étrangères et détermine les règles du jeu politique. Elle est présente dans presque tous les secteurs de la vie économique et elle gère un énorme complexe militaro-indistriel. C’est d’ailleurs un militaire qui est à la tête du MGK (le Conseil national de sécurité). Cette armée est un état dans l’état et elle cherche à circonscrire, retenir, les pressions religieuses qui veulent islamiser à outrance. Les islamistes sont ravis d’entendre Bruxelles demander à l’armée d’être moins omniprésentes parce que cette armée limite leurs actions. Dans Le monde des Religions de Septembre Octobre, Semih Vaner encense l’islam modéré et les progrès incontestables réalisés dans le domaine des droits de l’homme en Turquie. Pour vous, c’est de la contre vérité ? C’est de la désinformation. Il y a plusieurs islam en Turquie, mais l’islam d’état n’est pas modéré même si le discours prétend le contraire. Via le YANET (ministère des

cultes) l’état diffuse la religion islamique sunnite, l’un des plus virulent, par des cours de religions obligatoires. Il existe des formes moins radicales de l’islam, par exemple celui des Alévis, or 12 millions d’Alévis, principalement en Anatolie, doivent se soumettre à l’enseignement pur et dur des sunnites. Un dicton sunnite dit " qu’il il y plus de mérite à tuer un Alévi que 72 infidèles ! " Voilà la modération des sunnites qui persécutent aujourd’hui tous ceux qui ne vivent pas la même rigueur islamique. Mais les musulmans réellement modérés ne sont pas les seules victimes des sunnites. Les chrétiens d’Anatolie sont persécutés et sont obligés de fuir le pays ou de passer par des conversions plus ou moins imposées. Quant à la situation de la femme, elle est, en Turquie, identique à celle des femmes du Golfe ou de l’Iran, donc des positions archaïques. Il faut savoir également que tout contribuable paie pour le soutien de l’islam et pour ses édifices. Il n’y a pas un centime sur les impôts qui glisse vers les autres expressions de foi. Les vieilles églises sont en ruine tandis que fleurissent les constructions de nouvelles mosquées, financées par un impôt dit religieux. Les confréries musulmanes sont très nombreuses et très puissantes ; la plupart sont nostalgique du califat, lequel était d’une violence extraordinaire, et bien loin d’encourager les droits de l’homme ! Quant aux extrémistes, ils sont partout, y compris au gouvernement. Au début 2004, on lisait dans la presse turque qu’un nombre record de conversions au christianisme avaient eu lieu ; on annonçait le chiffre de 40 000. Par ailleurs, un animateur à la télévision, aurait été arrêté parce qu’il s’en prenait aux chrétien. Info ou intox ? À propos des conversions, c’est de la propagande pure. Ce qui est vrai, c’est que les chrétiens fuient le pays. Aucune religion chrétienne, à part les grecs orthodoxes, n’a de statut officiel. Les protestants, et notamment les évangéliques de type baptistes, ceux-là même qui gardent la ferveur des premiers chrétiens et qui n’ont peur de rien pour propager leur foi, sont les premiers persécutés. Par contre, l’animateur arrêté est une information réelle. Il faut savoir que les critique à l’encontre des noms musulmans sont très nombreuses. Mais comme le gouvernement cherche à convaincre l’Europe, il ne peut tolérer des prises de positions trop publiques ou qui entraînent trop de publicité. Mais c’est encore de la propagande !

Propos recueillis par Eric Denimal

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