Research Book French

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  • Pages: 199
Iran : Défis et Choix de Politique Etrangère

Autonomisation de l’Opposition Démocratique

Rapport au Gouvernement des Etats-Unis

Légende: Si-o-Se Pol, Pont aux 33 Arches, Esfahan, Iran Photo: Simon Richard

Iran : Défis et Choix de Politique Etrangère Autonomisation de l’Opposition Démocratique

Rapport au Gouvernement des Etats-Unis Novembre 2006

Les rapports de DLA Piper et de GlobalOptions n’ont pas été préparés sous la direction, le contrôle ou avec le financement de MEK ou CNRI. © DLA Piper Rudnick Gray Cary US LLP 2006

Table des Matières

Illustration: Carte de l’Iran .......................................................................................................................................................... 2

Table des Acronymes .................................................................................................................................................................. 3

Une Nouvelle Approche de la Politique Etats-Unis - Iran: Réponse à l’Echec de l’Engagement ..................................................................................................................................... 5

Rapport d’Évaluation indépendant sur le Mujahedin-e Khalq et sur le Conseil National de Résistance Iranienne.................................................................................................. 91

DLA Piper Rudnick Gray Cary US LLP a été employé par un citoyen américain afin d’examiner la menace que représente l’Iran pour les Etats-Unis et évaluer les différentes alternatives de réponse prospective. Dans ce contexte, DLA Piper a produit Iran: Défis et Choix de Politique Etrangère. DLA Piper a ensuite fait appel à GlobalOptions pour produire leur propre rapport, Evaluation Indépendante du Mujahedin-e Khalq et du Conseil National de la Résistance Iranienne. Ces deux rapports sont présentés dans cette publication.

IRAN: DÉFIS ET CHOIX DE POLITIQUE ETRANGÈRE

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Carte de l’Iran

Réacteur de Recherche Mine d’Uranium

Arak (usine à eau lourde) Bushehr (réacteur nucléaire)

Esfahan (usine de conversion de l’uranium) Natanz (usine d’enrichissement de l’uranium)

Source: 1155/New Scientist Global Security

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Table des Acronymes ALF APC ANO CIA DFLP EU-3 FPMR/D FTO IACNV IAEA ICCO IED IRA IRNA IRP JAG KDP MEK MIPT MP NLA NPT NSC NSDD CNRI PLF PLO PMOI PUK RIRA SAVAK UNHCR

Arab Liberation Front (Front de libération arabe) Armored Personnel Carrier (Véhicule de transport blindé) Abu Nidal Organizaton (Organisation d’Abu Nidal) Central Intelligence Agency (Agence centrale de renseignements) Democratic Front for the Liberation of Palestine (Front démocratique pour la libération de la Palestine) Royaume-Uni, France et Allemagne Manual Rodriguez Patriotic Front Dissidents (Front patriotique de Manual Rodriguez /Dissidents) Foreign Terrorist Organization (Organisation terroriste étrangère) Iranian-American Community of Northern Virginia (Communauté irano-américaine de Virgine du nord) International Atomic Energy Agency (Agence internationale pour l’énergie atomique) Islamic Culture and Communications Organization (Organisation islamique pour la culture et la communication) International Educational Development (Développement éducationnel international) Irish Republican Army (Armée républicaine irlandaise) Islamic Republic News Agency (Agence d’Information de la République Islamique, Agence d’information officielle iranienne) Islamic Republican Party (Parti républicain islamique, parti de l’Ayatollah Khomeini) Judge Advocate General Corps (Corps du Juge-Avocat général) Kurdish Democratic Party (Partie démocratique kurde) Mujahedin-e Khalq National Memorial Institute for the Prevention of Terrorism (Institut commémoratif national pour la prévention du terrorisme) Member of Parliament (Membre du Parlement) National Liberation Army (Armée de liberation nationale, fait partie du MEK) Treaty on the Non-Proliferation of Nuclear Weapons (Traité de non-prolifération des armes nucléaires) National Security Council (Conseil de sécurité national) National Security Decision Directive (Directive des Décisions de Sécurité Nationale) National Council of Resistance of Iran (Conseil national de la résistance iranienne) Palestine Liberation Front (Front de libération de la Palestine) Palestine Liberation Organization (Organisation de libération de la Palestine) People’s Mujahedin Organization of Iran (L'Organisation des Moudjahiddines du peuple iranien, aussi connue sous le nom de MEK) Patriotic Union of Kurdistan (Union patriotique du Kurdistan) Real Irish Republican Army (Armée républicaine irlandaise véritable) Organization for Intelligence and National Security (Iran), Organisation pour l’intelligence et la sécurité nationale, du Farsi Sazeman-i Ettelaat va Amniyat-i Keshvar Office of the United Nations High Commissioner for Refugees (Bureau du Haut Commissaire pour les Réfugiés des Nations Unies)

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Une Nouvelle Approche de la Politique Etats-Unis - Iran: Réponse à l’Echec de l’Engagement Préparé par DLA Piper Rudnick Gray Cary US LLP, novembre 2006

Avant-Propos Beaucoup d’américains sont aujourd’hui préoccupés, de manière compréhensible, par la présence grandissante de la République Islamique d’Iran fondamentaliste et la menace qu’elle représente pour les Etats-Unis. Les efforts du régime pour acquérir la technologie des armes nucléaires sont au centre de ces préoccupations, alors qu’il agit comme le principal état sponsorisant le terrorisme mondial. Cette inquiétude a été récemment renforcée par l’élection du nouveau président, Mahmoud Ahmadinejad, dont les propos révèlent une hostilité grandissante envers les démocraties occidentales.

C’est dans ce contexte que DLA Piper a été employé par un américain iranien inquiet afin d’examiner la menace que l’Iran représente pour les Etats-Unis et évaluer les différentes alternatives politiques de réponse prospective. Notre conclusion révèle que les deux options les plus fréquemment citées pour faire face à la menace iranienne – la confrontation militaire directe et l’engagement « modéré » continu – ne sont pas défendables et ne pourraient pas fournir de solutions effectives.

Nous pensons, comme beaucoup d’autres, que l’adoption d’une politique de changement de régime avec le soutien actif des organisations défendant la démocratie en Iran constitue une réponse dotée d’un vrai potentiel. Le Mujahedin-e Khalq (MEK), organisation actuellement classée par les Etats-Unis, le Royaume-Uni et l’Union européenne comme une organisation terroriste étrangère (Foreign Terrorist Organization, FTO) est l’une de ces organisations.

Le MEK et ses objectifs ont attiré un ensemble substantiel d’opinions d’experts et de soutien international. En effet, depuis la désignation du MEK comme FTO en octobre 1997, le soutien public en faveur de son retrait de la liste s’est généralisé, dont un groupe non-partisan de 220 membres du Congrès américain, 331 membres du Parlement et 122 membres de la Chambre des lords au Royaume-Uni, un grand nombre de parlementaires de l’Union européenne, ainsi que des représentants officiels irakiens et des membres des forces militaires américaines en Irak. Etant donnée la contradiction entre la désignation du MEK comme FTO et le fort soutien international qu’il a attiré, il nous a également été demandé de rassembler et d’analyser les documents publiques disponibles, afin d’évaluer si la désignation est valide et doit être maintenue.

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Au cours de notre étude, nous avons examiné un grande variété de sources documentaires. Ces sources comprennent des articles de presse écrite, des rapports des principaux « think tanks » de politique étrangère et des ONG, des déclarations de représentants officiels du gouvernement américain et de gouvernements étrangers, et des commentaires du personnel militaire américain en Irak. Nous avons ainsi préparé un rapport détaillé analysant la situation, en se basant sur les données historiques.

Suite à notre analyse, nous pensons qu’il y a de nombreuses raisons de conclure que le MEK et une coalition plus large d’organisations dont le MEK fait partie, le Conseil national de la résistance iranienne (National Council of Résistance of Iran, CNRI), devraient être retirés de la liste américaine des Organisations terroristes étrangères.

A titre informatif, DLA Piper Rudnick Gray Cary LLP est une société juridique mondiale, employant plus de 3 000 avocats, répartis dans 58 bureaux et 21 pays à travers le monde. Nous offrons un support juridique à nos clients dans des domaines variés, incluant l’entreprise et la finance, le domaine législatif et réglementaire, les litiges professionnels généraux, et le conseil stratégique sur des questions internationales. – Dick Armey

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Table des Matières Sommaire..................................................................................................................................................................................... 9 I. La Menace Iranienne envers les Etats-Unis........................................................................................................................... 11 A. Le Programme Nucléaire Iranien............................................................................................................................ 11 B. L’Iran en tant qu’Obstacle à la Paix........................................................................................................................ 17 1. Soutien de l’Iran au Terrorisme ................................................................................................................. 17 2. Terrorisme et Ingérence de l’Iran en Afghanistan et en Irak ..................................................................... 20 C. L’Effroyable Bilan Iranien en matière de Droits de l'Homme................................................................... 23 1. Exploitation de l’Islam par l’Iran............................................................................................................... 24 2. Absence de Liberté d’Expression et d’Association ................................................................................... 24 3. Violations de la Liberté Religieuse............................................................................................................ 25 4. Négation des Droits Fondamentaux des Femmes ...................................................................................... 26 5. Torture et Traitement Inhumain par des Représentants Officiels Iraniens................................................. 26 II. Options de Réponse à l’Iran .................................................................................................................................................. 28 A. Risque de l’Intervention Militaire Américaine ....................................................................................................... 28 B. Poursuite de la Politique d’Engagement ................................................................................................................. 30 C. Soutien à l’Opposition Iranienne............................................................................................................................. 34 III. Retrait du MEK/CNRI de la liste des FTO .......................................................................................................................... 38 A. Le MEK/CNRI....................................................................................................................................................... 38 1. La formation et la dissolution subséquente du MEK ................................................................................. 39 2. La renaissance du MEK............................................................................................................................. 40 3. L’opposition du MEK à la théocratie......................................................................................................... 41 4. L’exil à Paris.............................................................................................................................................. 42 5. Le mouvement en Iraq ............................................................................................................................... 43 6. Le MEK au camp d’Ashraf........................................................................................................................ 43 7. La réaction du MEK à l’invasion de l’Iraq par les États-Unis en 2003 ..................................................... 44 8. Le soutien international au MEK........................................................................................................... 46 9. La campagne du régime iranien pour l’éradication du MEK..................................................................... 48 10. La désignation du M.E.K/CNRI en tant qu’Organisations Terroristes Étrangères .................................. 50 B. L’analyse des critères appuyant la demande de suppression du MEK de la liste des Organisations Étrangères Terroristes ............................................................................................................................................. 52 1. L’organisation étrangère ............................................................................................................................ 53 2. Un engagement dans des activités terroristes ............................................................................................ 53 3. Le MEK ne détient pas la capacité ou l’intention de commettre des actes de terrorisme .......................... 58 4. Le MEK ne représente pas une menace pour les forces de sécurité américaines ni pour les citoyens américains.................................................................................................................................... 59

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5. Des bases solides existent pour appuyer la suppression du MEK et du CNRI de la liste des Organisations Étrangères Terroristes......................................................................................................... 62 C. La sécurité nationale des États-Unis garantit la suppression du nom du MEK et du CNRI de la liste des Organisations Étrangères Terroristes ....................................................................................................................... 63 1. Le régime iranien met en danger la sécurité nationale des États-Unis....................................................... 64 2. La collecte de renseignements sur le régime iranien par le MEK..............................................................65 3. Les activités iraniennes que le MEK pourrait identifier dans le futur........................................................ 66 4. La suppression du MEK de la liste des Organisations Étrangères Terroristes contribuera à la sécurité nationale des États-Unis. .............................................................................................................. 67 IV. Le rejet des allégations contre le MEK/CNRI sur les évènements des années ‘70.............................................................. 71 A. Le putsch à l’Ambassade des États-Unis en 1979................................................................................................... 71 B. L’assassinat d’américains........................................................................................................................................ 73 V. Documentation supplémentaire............................................................................................................................................. 77 A. Le MEK n’a pas réprimé les kurdes........................................................................................................................ 77 B. Le MEK n’est pas une « secte »............................................................................................................................. 81 Annexes ..................................................................................................................................................................................... 86

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Sommaire • En tant que berceau du terrorisme sponsorisé par l’état, l’Iran représente un réel défi pour les responsables de la politique étrangère américaine. L’effroyable bilan de l’Iran en matière de violations des droits de l’homme a été ouvertement condamné par le Département d’état. La sécurité internationale est menacée par la poursuite constante d’un programme d’armes nucléaire par Téhéran. L’Iran a, en outre, tendance à déstabiliser une situation déjà tendue au Moyen Orient. Et l’ingérence de l’Iran en Afghanistan et en Irak menace les intérêts américains essentiels en matière de sécurité.

• Suite à ses actions durant son mandat en tant que maire de Téhéran et ses déclarations anti-américaines acerbes, la présidence de Mahmoud Ahmadinejad accentue encore davantage les tensions dans la relation de Téhéran avec les EtatsUnis. Le président Ahmadinejad est un ancien membre de l’armée islamique privée de l’Ayatollah Khomeini, la Garde Révolutionnaire. Il a également fait partie du Basij, la police de moralité interne iranienne. Depuis son élection, Ahmadinejad affirme son intention de ramener l’Iran vers les valeurs fondamentalistes de la Révolution Islamique. De plus, sa position catégorique quant au droit proclamé de l’Iran à la technologie nucléaire et son appel à la destruction d’Israël et des Etats-Unis ont considérablement aggravé les tensions dans la relation entre les Etats-Unis et l’Iran.

• Les deux options de politique les plus fréquemment évoquées par les Etats-Unis pour contrer la menace iranienne – la confrontation militaire directe et l’engagement « modéré » continu – ne sont pas défendables. A la lumière des engagements américains actuels dans le monde, l’intervention militaire générale directe n’est pas une option viable. L’option de l’engagement modéré ne l’est pas plus, si l’on considère la résolution continue du régime, jamais abandonnée jusqu’à présent, à développer des armes de destruction massive.

• La politique étrangère américaine doit donc trouver une nouvelle voie. L’encouragement et le soutien de l’opposition démocratique au régime iranien est une approche pleine de promesses. Le but serait de favoriser un changement de régime en Iran, grâce à un processus pacifique et démocratique. En supportant l’opposition démocratique, les Etats-Unis créeront un nouvel environnement, préparant le jour où la démocratie et la liberté deviendront réalité pour le peuple iranien.

• Le soutien public des Etats-Unis aux principales organisations de l’opposition iranienne, comme le Mujahedin-e Khalq (MEK) et le Conseil nationale de la résistance iranienne (CNRI), aidera à établir des fondations solides pour le mouvement pro-démocratique en Iran.

• Actuellement, le MEK et le CNRI sont cependant désignés comme des Organisations terroristes étrangères (FTO) par le Département d’état. Cette désignation va à l’encontre des objectifs de la politique étrangère américaine. En retirant le MEK et le CNRI de la liste des FTO, les Etats-Unis peuvent ouvrir la voie pour une coopération directe avec un mouvement prodémocratique bien organisé et influent, capable de fournir un flux stable d’intelligence humaine sur le régime. Cette décision établirait également le fait que les véritables terroristes sont les leaders fondamentalistes iraniens, au centre d’un réseau international de terrorisme, et non le MEK et le CNRI, leaders reconnus du mouvement pro-démocratique iranien.

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• Etant donné la structure et l’objectif du statut de FTO, les faits opérationnels justifient maintenant le retrait du MEK et du CNRI de la liste des FTO. Cela est lié à un changement fondamental et décisif de circonstances qui a eu lieu au cours des quatre ou cinq dernières années. Par exemple, le MEK n’a pas pris part à des activités violentes depuis 2001. En 2003, le MEK a formellement renoncé au terrorisme et à la violence, et a volontairement rendu les armes. Les membres du MEK à Camp Ashraf, Irak, sont désormais internationalement reconnus en tant que citoyens protégés en temps de guerre, dans le cadre de la Quatrième Convention de Genève. Il est important de noter que de nombreux entretiens et investigations des membres du MEK à Camp Ashraf par les agences de sécurité américaines confirment que l’appartenance au MEK ne constitue pas une menace pour les intérêts américains en matière de sécurité nationale.

• Par voie de comparaison et récent précédent, le Département d’Etat a pris la décision de ne pas désigner l’Armée républicaine irlandaise (IRA), historiquement violente mais désormais réformée, comme une FTO. Dans le cadre d’un processus de paix général, l’IRA a décidé de changer de comportement pour se consacrer à une stratégie de changement démocratique pacifique. De manière similaire, le MEK a renoncé à la violence et a volontairement désarmé, pour soutenir un processus de réforme démocratique en Iran.

• Le retrait du MEK et du CNRI de la liste des FTO est une notion qui a rencontré un soutien considérable. Les membres du congrès américain ont demandé le retrait de ces groupes de la liste. D’importants juristes internationaux et des membres des parlements européens ont également fait de même.

• Les allégations indiquant que le MEK a visé les américains se basent sur des incidents qui ont eu lieu 30 ans auparavant: l’attaque de l’ambassade américaine le 4 novembre 1979, lors de laquelle 73 américains furent pris en otages, et le meurtre de six américains au milieu des 1970s. Une analyse complète des faits archivés démontre que ces allégations d’implication ou de complicité du MEK dans ces évènements ne sont pas fondées.

• Le temps est venu de retirer le MEK et le CNRI de la liste des FTO. Les faits soulignent l’importance d’une telle détermination. Ce retrait stimulera le mouvement pro-démocratique iranien et servira les intérêts de sécurité nationale des Etats-Unis.

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I. La Menace Iranienne envers les Etats-Unis A. Le Programme Nucléaire Iranien Le programme nucléaire iranien constitue l’une des plus grandes menaces pour la sécurité nationale américaine.1 Malgré la signature du Traité de non-prolifération des armes nucléaires (NPT), 2 l’Iran est resté déterminé dans sa poursuite des armes nucléaires.3 Jusqu’à récemment, les tentatives pour tenter de mettre un terme au programme nucléaire iranien ont résulté dans une volonté réticente à engager le dialogue. Depuis l’élection du nouveau président, Mahmoud Ahmadinejad, le ton du régime est passé d’un engagement modéré à une position bien plus audacieuse. Accompagnant une déclaration sur le droit de l’Iran au pouvoir nucléaire, le président Ahmadinejad a promis au peuple iranien qu’un « monde sans l’Amérique et le sionisme » était possible.4 En dépit du fait que les activités nucléaires de l’Iran sont connues depuis un certain temps, – car les engagements de l’Iran dans le cadre du NPT permettent l’enrichissement nucléaire pour des besoins d’énergie – c’est seulement depuis la découverte d’installations nucléaires cachées en 2002 que les suspicions d’un programme d’armes nucléaires sont devenues une inquiétude légitime.5 La production d’une usine d’énergie nucléaire à Bushehr, avec l’aide de la Russie, avait certainement alarmé les sceptiques, depuis un certain temps. Cependant, l’existence de l’usine était connue et il n’existait aucune preuve, comme le déclarait le régime iranien, que l’usine était destinée à autre chose que la production d’énergie.6 En 2002, des informations furent néanmoins divulguées par le principal groupe de l’opposition iranienne, le Conseil national de la résistance iranienne (CNRI), concernant une autre installation nucléaire, jusque là inconnue de l’Occident.7 Des enquêtes à l’usine de Natanz révélèrent l’existence de la production de centrifuges, utilisés pour l’enrichissement de l’uranium.8 Peu de temps après la découverte de Natanz, le CNRI révéla l’existence d’une deuxième usine à Arak, qui fut, par la suite, confirmée par des images satellite.9 L’installation d’Arak se révéla être une usine de production à eau lourde, spécifiquement destinée à la production de plutonium.10 Malgré l’assurance de l’Iran que le régime n’essayait pas de dissimuler ces installations, Ari Fleischer, alors Porte-Parole de la Maison Blanche, avait déclaré que ces installations renforçaient considérablement les préoccupations américaines concernant la « poursuite des armes de destruction massive et des capacités de missiles de Téhéran. »11

_____________________________ 1

Voir Susan E. Rice, We Need a Real Iran Policy, WASHINGTON POST, 30 Déc. 2004. Le président George W. Bush a déclaré que la “plus grande menace pour la sécurité nationale américaine est une arme nucléaire dans les mains de terroristes.” Cette déclaration a été interprétée comme faisant référence à l’Iran, un pays qui a démontré un engagement sans précédent envers le terrorisme et un soutien d’organisations engagées dans des activités terroristes, à l’encontre des intérêts occidentaux. 2

Voir Treaty on the Non-Proliferation of Nuclear Weapons, 729 U.N.T.S. 161, 5 Mar. 1970.

3

Voir globalement R. Nicholas Burns, US Policy Toward Iran, US Department of State, 30 Nov. 2005; Policy Options for Iran, Iran Policy Committee, 10 Fév., 2005 [ciaprès rapport IPC]. 4 5

Frank J Gaffney, Jr., Our War with Iran, WASHINGTON TIMES, 1 Nov. 2005. Iran’s Nuclear Program, Wikipedia.org, dernière mise à jour 28 Déc. 2005.

6

Voir Iran Profile: Nuclear Chronology 2002, NTI.org, dernière mise à jour 12 Déc. 2005 (citant IAEA Fails to Find Evidence of Iran’s Nuclear Weapon Program, NCI.org). Nuclear Threat Initiative (NTI) est une organisation sans but lucratif, fondée par Ted Turner et Sam Nunn, ancien sénateur et président du Senate Armed Services Committee et du Permanent Subcommittee on Investigations, et co-sponsor du programme de non-prolifération Nunn-Lugar, pour lequel il a été nominé pour le Prix Nobel de la Paix en 2000 et 2001. “La mission de la NTI est de renforcer la sécurité mondiale, en réduisant le risque d’utilisation et en prévenant la prolifération des armes nucléaires, biologiques et chimiques. La NTI a pour but d’informer l’opinion publique, de servir de catalyseur à une nouvelle façon de penser et d’agir pour réduire ces menaces.” 7 8 9

Covert Nuclear Activities in Iran, JANE’S INTELLIGENCE DIGEST, 3 Nov. 2005. Voir id. Voir id.

10 11

Voir id. Iran Confirms Building New Nuclear Facilities, Iran Press Service, 14 Déc. 2002.

S’ajoutant au fait que l’existence de ces deux installations n’avaient pas été révélées auparavant par les iraniens, la présence du complexe de production à eau lourde à Arak indiquait qu’un programme d’armes nucléaires était en cours. A la différence des

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réacteurs à eau légère, strictement destinés à la production d’énergie, les réacteurs à eau lourde sont spécifiquement conçus pour la production d’armes au plutonium.12 Les russes, en effet, avaient défendu leur contribution dans l’usine d’énergie nucléaire de Bushehr en 2001, en invoquant l’argument qu’“obtenir des armes à partir du réacteur à eau légère en Iran était impossible.”13

En plus de ces trois sites, il existe d’autres complexes de production nucléaire en Iran, certains confirmés par Téhéran ou l’Agence internationale de l’énergie atomique (IAEA). Il existe également des suspicions importantes sur le fait que l’Iran opère également un grand nombre d’autres complexes nucléaires. Cependant, l’existence de ces autres sites n’a pas été confirmée, en grande partie en raison du refus du régime d’accorder l’accès aux enquêteurs de l’IAEA. En février 2003, le CNRI révéla l’existence d’une autre installation en Iran, suspectée d’activités nucléaires, la Kalaye Electric Company.14 Lorsque l’IAEA inspecta le site et préleva des échantillons en Août 2004, il apparut clair que le régime avait pris des dispositions considérables pour modifier l’apparence de l’installation, comme le déplacement de murs internes, par exemple.15 L’IAEA parvint néanmoins à détecter de l’uranium enrichi sur le site.16 Peu de temps après, l’existence d’un autre site basé à Lavizan-Shian fut annoncée et l’enquête de l’IAEA révéla que l’Iran avait rasé des bâtiments et modifié le site, pour certainement dissimuler des preuves d’activités nucléaires secrètes.17 Le CNRI révéla également l’existence d’un autre site nucléaire à Lashkar Ab’ad,18 où, une fois encore, l’IAEA confirma l’existence d’une « usine pilote d’enrichissement au laser » établie.19 La découverte d’une installation d’enrichissement au laser et la révélation que les iraniens étaient déjà parvenus à une certaine réussite en matière de technologie d’enrichissement au laser furent considérées comme « incroyables » par les experts de la non-prolifération nucléaire.20

En 2004, des preuves de l’existence d’une nouvelle installation iranienne à Lavizan (Lavizan II) furent révélées par le CNRI.21 Cependant, étant donné le refus répété par Téhéran d’autoriser l’IAEA à inspecter le site, la nature des activités à Lavizan devra être confirmée par des actions supplémentaires de l’IAEA.22 _____________________________ 12

Nicholas Rufford et Robert Winnett, Britain Offers Iran Nuclear Plant Aid, SUNDAY TIMES (Londres), 7 Nov. 2004.

13

Barry Schweid, Putin Adviser Denies Russia Helping Iran’s Nuclear Program, ASSOCIATED PRESS, 8 Juin 2001, citant Igor Sergeyev, conseiller du président russe, Vladimir Putin.

14

Voir ISIS Imagery Brief: Kalaye Electric, Institute for Science and International Security (ISIS), disponible à http://www.isis-online.org/publications/iran/kalayeelectric.html, Mar. 31, 2005. L’ISIS, fondé en 1993, est une institution sans but lucratif, non-partisane, consacrée à l’information du public sur les questions scientifiques et politiques affectant la sécurité internationale. Ses efforts se concentrent sur l’arrêt de la prolifération des armes nucléaires, d’apporter plus de transparence sur les activités nucléaires mondiales et la réduction significative des arsenaux nucléaires. 15 16

Voir id. Voir id; see also Iran Under Pressure Following Uranium Find, BBC, 25 Sept. 2003.

17

Paul Kerr, the Iran Nuclear Crisis: A Chronology, Arms Control Association, at http://www.armscontrol.org/country/iran/iranchronology.asp, dernière mise à jour Déc. 29, 2005. L’Arms Control Association (ACA), fondée en 1971, est une organisation mutuelle non-partisane destinée à promouvoir l’information du public concernant les politiques de contrôle des armes en place; voir aussi Iran Grants UN Inspectors Access to Nuclear Site, USA TODAY, Nov. 2, 2005. Le Département d’Etat déclarait que les représentants officiels américains pensaient que les bâtiments de Lavizan-Shian avaient été démantelés et que les terres arables avaient été retirées du site, dans le cadre d’une tentative pour dissimuler des expérimentations sur des armes nucléaires. Lors d’une inspection externe, des représentants de l’IAEA confirmèrent par la suite que le site avait été rasé.

18 19 20 21 22

Voir White House Criticizes Iran’s Steps Toward al Qaeda, CNN, 28 Mai 2003. Voir Kerr, supra note 17. Voir Ian Hoffman, Iran’s Lasers Startle Experts, ARGUS ONLINE NEWS, 16 Nov. 2003. William J. Broad, David E. Sanger and Elaine Sciolino, Arms Inspectors Said to Seek Access to Iran Sites, NEW YORK TIMES, 2 Déc. 2004. Voir USA TODAY, supra note 17.

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12

De la même manière, malgré le fait que l’IAEA avait obtenu la permission de visiter le site militaire de Parchin en janvier 2005, les enquêteurs de l’IAEA n’avaient pas pu rentrer dans les batiments.23 L’IAEA fut autorisée à visiter Parchin quelques mois plus tard. Au cours de cette visite, les locaux n’apparurent pas être le lieu d’exécution d’un programme nucléaire. Cependant, les inspecteurs de l’IAEA réalisèrent des tests par écouvillonnage de l’installation. Les résultats de ces tests – qui pourraient confirmer l’existence d’un programme nucléaire dans une installation militaire – n’ont pas encore été divulgués.24 Dans tous les cas, les iraniens auraient entre-temps largement eu le temps de masquer tout travail sur des armes nucléaires réalisé à Parchin. Les attentes restent donc modestes. Enfin, le site, bien connu, d’Isfahan est au centre de tout cela. Isfahan est connu comme l’installation où, en mars 2004, l’Iran commença à convertir du gâteau jaune en gaz d’hexafluorure d’uranium (UF6), devenant ainsi le dixième pays au monde à le faire.25 Le complexe d’Isfahan, selon les observateurs internationaux, est considéré comme le centre du programme nucléaire iranien et soupçonné d’être le lieu de travail d’au moins de 3 000 scientifiques et l’emplacement d’un réacteur de source à neutrons.26 En plus d’installations contenant chaque composant essentiel d’un programme de production d’armes nucléaires, l’Iran développe ses mines locales d’uranium27 et recherche d’autres substances allogènes nécessaires en dehors du pays, comme le polonium-210, substance particulièrement associée à un type d’initiateur à neutrons.28 L’Iran a également été accusé de faire la contrebande de matériaux destinés à la production de graphite nucléaire, pour une utilisation potentielle sur un autre site secret, pas encore confirmé, près d’Ardekan.29 Plus récemment, des allégations ont indiqué que l’Iran construisait des tunnels, afin de pouvoir déplacer la majorité de son programme nucléaire sous terre et hors de la vue.30 De manière surprenante, ces activités, découvertes par le CNRI, furent publiquement reconnues par des représentants officiels iraniens, déclarant que “pour protéger la sécurité de l’équipement contre les risques d’attaques aériennes éventuelles, une grande partie de l’usine avait été construite sous terre, en particulier la partie abritant des milliers de centrifuges.”31 Hassan Rowhani, négociateur nucléaire iranien, confirma, par la suite, que l’Iran construisait bien un tunnel, près de l’installation d’Isfahan.32 En dépit des nombreuses révélations concernant le programme nucléaire complexe et hautement controversé de l’Iran, Téhéran continue d’affirmer au monde que l’Iran ne développe pas d’armes nucléaire, mais poursuit simplement un programme d’énergie nucléaire civile.33 Les preuves rassemblées par les représentants officiels américains contrastent cependant avec les propos de Téhéran et dressent un tableau bien différent.34 En 2004, des représentants officiels iraniens confirmèrent publiquement qu’ils avaient déjà converti 37 tonnes d’uranium brut en gaz UF4, “étape majeure sur la voie de l’enrichissement nucléaire.”35 Après le traitement complet de cet uranium, plus de 90 kilos d’armes à l’uranium ont pu être produit.36

_____________________________ 23 24

Voir UN Monitors to Inspect Iran Site, BBC, 13 Jan. 2005. Voir USA TODAY, supra note 17.

25

Voir Dilip Hiro, The Iranian Issue in a Global Context, MIDDLE EAST INTELLIGENCE JOURNAL, No. 750, 2005. 26 27 28 29 30 31 32 33 34 35 36

Voir Michael Rubin, Iran’s Burgeoning WMD Program, MIDDLE EAST INTELLIGENCE BULLETIN, Mars/Avril 2002. Khatami says Iran Mines Uranium for Nuclear Plant, REUTERS, 9 Fév. 2003. Karl Vick, Another Nuclear Program Found in Iran, WASHINGTON POST, 24 Fév. 2004. Voir Rapport: Iran is Smuggling Graphite for Nuclear Purposes, USA TODAY, 20 Mai 2005. Jane’s Intelligence Digest, supra note 7. Iranian Official: Nuclear Facility Underground, NewsMax.com, 7 Mar. 2005. Voir id. Kashani: Iran Entitled to Peaceful Use of Nuclear Energy, Agence d’information de la République islamique iranienne, 9 Déc. 2005. Voir Burns, supra note 3. Voir Freeze on Uranium Enrichment Extended to End of July, LOS ANGELES TIMES, 6 Juin 2005. Voir id.

IRAN: DÉFIS ET CHOIX DE POLITIQUE ETRANGÈRE

13

Bien que les matériaux et les installations pour un programme d’énergie nucléaire civile soient similaires à ceux d’un programme d’armes, certains pensent que la quantité d’uranium, ainsi que les installations et les technologies spécifiques que l’Iran recherchent dépassent largement les exigences d’un programme de production d’énergie.37 Alors que l’Iran progresse dans le développement d’armes nucléaires, le pays progresse également considérablement en matière de systèmes à capacité nucléaire. Il est communément accepté que l’Iran possède déjà des missiles capables de transporter une ogive nucléaire.38 En fait, certains représentants du gouvernement américain supposent qu’au cours de l’année passée, alors que l’Iran a publiquement suspendu son programme nucléaire, dans le cadre d’un accord avec les EU-3 (France, Allemagne et Royaume-Uni) et l’IAEA, le régime a redirigé ses efforts vers le développement de la technologie des systèmes à capacité nucléaire.39 Le niveau de sophistication de la technologie iranienne actuelle en matière de production d’armes n’est pas clair. Cependant, en dépit de limites importantes, la technologie de système de production de Téhéran continue d’évoluer et devrait éventuellement aboutir à des véhicules de longue portée, plus précis.40 Au-delà du danger spécifique représenté par les capacités nucléaires iraniennes, Téhéran est déjà en possession d’autres armes dangereuses de destruction massive. Malgré sa signature des Conventions sur les Armes Biologiques et Chimiques, il est connu que l’Iran possède des armes chimiques et biologiques, telles que des agents vésicants, des toxiques sanguins et des agents d’étouffement.41 L’étendue et la variété de l’arsenal iranien ne sont pas connues ; cependant, le régime concentre ces efforts sur la poursuite d’autres recherches et d’autres développements avancés.42 L’Iran continue également d’agrandir son arsenal de missiles, qui est déjà « l’un des plus importants arsenaux de missiles du Moyen Orient.”43 Le missile de série Shahab est l’une de ces armes, évoluant vers un missile balistique à longue portée, capable d’abriter des armes chimiques et, sans doute, des ogives nucléaires.44 Le 20 octobre 2004, « le ministre de la défense iranien, Ali Shamkhani, confirma l’essai le plus réussi du Shehab-3 iranien, d’une portée de 2 000 kilomètres, devant les observateurs. »45 L’Iran a également recherché à acquérir des armes sophistiquées sur le marché international. Par exemple, Hrihory Omelchenko, membre du Parlement ukrainien, déclara que six missiles air-sol Kh-55 furent exportés en Iran entre 1999 et 2001.46 Ces missiles de croisière sont supposés être dotés d’un système de guidage extrêmement précis et d’une portée allant jusqu’à 2 900 kilomètres.47 _____________________________ 37

Voir EU/Iran Relations, U.K. PARL, Westminster Hall, Column 177WH, Oct. 19, 2004 [Westminster ci-après].

38

Unclassified Report to Congress on the Acquisition of Technology Relating to Weapons of Mass Destruction and Advanced Conventional Munitions, July 1 through December 31, 2003, CIA, Nov. 23, 2004; voir aussi Atlantic Monthly War Game, Iran Principles Committee, ATLANTIC MONTHLY, 2004 [Jeu de Guerre ciaprès].

39

Iran Rejects Nuclear Site Charge, BBC, 18 Nov. 2004. L’ancien secrétaire d’état Colin Powell a déclaré que les renseignements indiquaient que l’Iran travaillaient activement sur l’adaptation de ses missiles, afin de porter des ogives nucléaires. 40

Voir Shahab, MissileThreat.com, dernière visite, 12 Juin 2005. La série de missiles Shahab iranienne est le système de vecteur à capacité nucléaire. Actuellement, l’Iran développe la Shahab-6 qui aura une longue portée (jusqu’à 5 800 kilomètres). 41

Voir Iran’s Developing Military Capabilities, Center for Strategic and International Studies, Déc. 2004 [Rapport CSIS Report]; voir aussi Hearing ci-après, supra note 50; voir aussi Iran Profile: Chemical Weapon Chronology, NTI.org, dernière visite, 20 Déc. 2005 (citant German Intelligence Services Voir Iran Possessing Biological, Chemical Weapons, Document FBIS EUP2005022000035, 20 Fév. 2005). “Le German Customs Office of Criminal Investigations (ZKA) pense que l’Iran possède des armes chimiques dont le tabun ‘S-Lost [sulfure de moutarde], et l’acide cyanhydrique [hydrogène cyanide], peut-etre aussi le sarin et le VX.’” Voir aussi Iran Profile: Biological Weapon Capabilities, NTI.org, dernière visite, 20 décembre 2005; L’Iran est connu pour posséder des pathogènes considérés comme des armes par d’autres pays dans le passé, comme l’anthrax, la peste et la variole, en plus d’autres pathogènes qui pourraient devenir des armes.

42

Voir Iran Profile: Biological Weapon Chronology, NTI.org, dernière visite 20 Déc. 2005 (citiant German Intelligence Services See Iran Possessing Biological, Chemical Weapons, Document FBIS EUP2005022000035, 20 Fév. 2005). “Le German Customs Office of Criminal Investigations (ZKA) pense que l’Iran poursuit des activités pour développer des armes biologiques. La recherche et le développement d’armes biologiques et (chimiques) sont supposés avoir lieu dans des “petits laboratoires d’universités, strictement protégés du monde extérieur.” Le ZKA a également observe que l’Iran “possédait une grande expérience dans le domaine de la bio-technologie, de manière à disposer du savoir-faire nécessaire pour opérer les programmes d’agents de combat biologiques.” 43 44 45 46 47

Iran Profile: Introduction, NTI.org, dernière visite, 16 Déc. 16, 2005. Voir Shahab-3, Encylopedia Astronautica, at http://www.astronautix.com/lvs/shahab3.htm, dernière visite, 12 Mai 2005. Voir NTI.org, supra note 43. Tom Warner, Ukraine ‘Sold Cruise Missiles to Iran, China’, FINANCIAL TIMES, 3 Fév. 2005. Voir id.

IRAN: DÉFIS ET CHOIX DE POLITIQUE ETRANGÈRE

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En association avec les preuves physiques, les actions et les déclarations des leaders iraniens renforcent encore davantage les craintes concernant leurs intentions. Les représentants officiels iraniens ont explicitement répétés, à maintes reprises, qu’ils n’avaient pas l’intention d’abandonner leurs plans nucléaires.48 Alors que l’Iran maintient que son programme nucléaire est uniquement destiné à des fins de production d’énergie,49 les représentants officiels iraniens eux-mêmes n’ont pas caché leur conviction qu’un Iran nucléaire serait, d’après eux, plus sûre et protègerait le régime des menaces extérieures réelles ou perçues.50 Au cours des années, l’Iran a exprimé sa réticence à négocier, tout en insistant sur le fait que le régime n’a rien à cacher. Cependant, des preuves ont indiqué qu’alors que l’Iran proclamait son innocence, le pays conduisait simultanément un programme nucléaire clandestin.51 Bien que l’Iran se soit soumis aux enquêtes de l’IAEA, sa relation avec l’agence a été tumultueuse et l’IAEA a, à de nombreuses reprises, remis en question les informations reçues de Téhéran.52 Téhéran continue, par exemple, à rejeter des rapports crédibles indiquant que l’Iran avait fait appel à la contrebande, afin d’obtenir des matériaux nucléaires.53 En outre, l’Iran a dissimulé plusieurs sites nucléaires importants de l’IAEA, comme celui de Natanz.54 Le pays a également retardé l’inspection d’installations récemment découvertes. Par exemple, après que l’IAEA ait été alertée de l’existence des installations de Natanz et d’Arak et ait demandé la permission d’inspecter les sites, le directeur de l’IAEA, Dr. Mohamed ElBaradei, s’est vu refuser l’accès aux complexes, car le “président Mohammad Khatami ne se trouvait pas dans le pays et ils avaient besoin de temps pour se préparer.”55 Comme il a été précédemment noté, l’Iran a parfois refusé les inspections de certaines installations et restreint souvent l’accès à des zones de production nucléaire déjà connue.56 Par exemple, à la fin de l’année 2005, l’Iran refusa de nouvelles inspections des structures et de la zone de Lavizan, en dépit des demandes répétées de l’IAEA.57 Pour reprendre les propos d’un diplomate anonyme, les iraniens, « sont tout simplement en train de mentir devant tout le monde. »58 Nonobstant les preuves disponibles et les évasions pratiquées par Téhéran, le directeur de l’IAEA, ElBaradei, resta sceptique sur les intentions de l’Iran de développer des armes nucléaires, et adopta donc une approche modérée envers le régime.59 En septembre 2005, l’IAEA changea, cependant, radicalement de position, en déclarant que l’Iran n’était pas en conformité avec la clause de protection du NPT.60

_____________________________ 48

Voir Déclaration de Porter J. Goss, Directeur des Renseignements Centraux, Committee on Senate Select Intelligence, 16 Fév. 2005.

49

En août 2005, l’Ayatollah Khamenei est allé jusqu’à émettre un fatwa interdisant la production, la mise en stock et l’utilisation des armes nucléaires. Voir Iran, Holder of Peaceful Nuclear Cell Technology, Islamic Republic News Agency, disponible à http://www.irna.ir/en/news/view/menu-236/0508104135124631.htm, posté le 10 août 2005 (déclaration de l’IAEA, Vienne).

50

Voir Iranian Proliferation: Implications for Terrorists, Their State Sponsors, and US Countermeasures, Hearing of the Middle East and Central Asia Subcommittee of the House International Relations Committee (remarques d’ouverture d’Ileana Ros-Lehtinen), 24 Juin 2004 [Rapport ciaprès].

51

Voir The Case for Removal of People’s Mojahedin of Iran (MEK) from Terrorism List, Symposium des Parlementaires et des Juristes, Westminster, Mar. 2005 [Symposium ci-après]; voir aussi Andrea Koppel, IAEA:Iran Secretly Made Nuclear Material, CNN, 12 Nov. 2003. 52 53 54 55

Voir id. “Iran Smuggling Uranium From Azeri Exclave,” BBC, 26 Mar. 2002. Voir, e.g., Weapons of Mass Destruction – Natanz, Global Security, à http://www.globalsecurity.org/wmd/world/iran/natanz.htm, dernière visite, 5 juillet 2005. Iran Press Service, supra note 11.

56

Voir US Slams Iran for Restricting IAEA Access to Military Sites, AGENCE FRANCE PRESSE, 2 Déc. 2004. L’Iran est maintenant connu pour admettre et fournir des informations, seulement lorsque le pays est confronté à des matériaux ou installations spécifiques; voir aussi Iran: Nuclear Threat, Breaking Point, FOX NEWS, 24 Avr. 2005. Par exemple, l’Iran empeche l’accès d’une usine dans laquelle des tests de déclencheurs nucléaires sont soupçonnés.

57 58 59 60

Voir USA TODAY, supra note 17. Christopher Dickey, Iran’s Nuclear Lies, NEWSWEEK, 6 Juillet 2005. Jonathon Beale, US Change of Heart on ElBaradei, BBC, 9 Juin 2005. Mark Heinrich, Iran’s Tough Nuclear Stance Dims Hope for Talks, REUTERS, 12 Déc. 2005.

IRAN: DÉFIS ET CHOIX DE POLITIQUE ETRANGÈRE

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ElBaradei, qui a récemment reçu le Prix Nobel de la Paix, passa alors d’une hésitation réservée à une position de préoccupation notable concernant le programme nucléaire iranien. Malgré le fait qu’il demeure sceptique de “lire leur intention,” ElBaradei a récemment averti que si Nantaz devenait opérationnelle (ce qui devrait être le cas dans deux ans selon les représentants officiels de l’IAEA) ou si l’Iran acquiert le cycle de combustible complet, la République islamique pourrait fabriquer une bombe nucléaire en seulement « quelques mois. »61 ElBaradei a ensuite assuré qu’il « savait qu’ils essayaient d’acquérir le cycle de combustible complet.”62

De plus, les efforts de non-prolifération des EU-3 se sont révélés infructueux. Cependant, les EU-3 avaient, dans un premier temps, réussi à persuader l’Iran de suspendre son programme nucléaire, en échange d’une promesse que le conseil de Sécurité des Nations Unies n’alerterait pas officiellement sur la nature suspicieuse du programme.63 Malgré cet accord, l’Iran poursuivit son programme nucléaire, mais de manière plus secrète.64 Moins de six mois après avoir accepté les conditions des EU-3, l’Iran annonça publiquement qu’il reprendrait officiellement son programme nucléaire.65 Après des pressions supplémentaires de la part des EU-3,l’ Iran annonça ensuite qu’il étendrait sa suspension de l’enrichissement d’uranium jusqu’à juillet 2005.66 Cependant, selon les diplomates familiers avec les récentes inspections de l’IAEA en Iran, alors que le régime respectait l’accord à la lettre, il « poursuivait tranquillement des activités de construction à Natanz, afin de préparer le jour d’une reprise éventuelle de l’enrichissement. »67 En août 2005, le nouveau président, Ahmadinejad, réaffirma fièrement le « droit inaliénable » de l’Iran de produire un combustible nucléaire.68 L’Iran rejeta ensuite publiquement les propositions de bonne foi, avancées par les EU-369 et annonça la reprise de son programme nucléaire.70 Peu de temps avant cette action, le ministre des affaires étrangères français, Philippe Douste-Blazy, déclarait aux journalistes qu’il pensait que “l’affaire était très sérieuse et pourrait être le début d’une crise majeure. »71 L’existence d’un programme iranien de développement d’armes et de missiles nucléaires est indiscutable. Les dernières négociations engagées par les EU-3 génèrent des doutes sérieux, quant aux possibilités de changement de l’attitude de l’Iran par la négociation seule. Les propos du président Ahmadinejad, qui admet qu’il poursuivra le programme nucléaire iranien à n’importe quel prix, sont très révélateurs.72 _____________________________ 61 62

Anne Penketh, UN Chief Urges West and Iran to Cool Brinkmanship Over Nuclear Programme, THE INDEPENDENT (London), 5 Déc. 2005. Id.

63

D’autres stimulations ont été utilisées pour obliger le régime à maintenir la suspension, dont la désignation du MEK comme organisation terroriste. Voir Preparatory Text for Europeans Proposal on Iranian Nuclear Program, AGENCE FRANCE PRESSE, 21 Oct. 2004. L’AFP a reçu un document confidentiel, décrivant l’accord entre les EU-3 et l’Iran concernant les plans nucléaires iraniens. Ce document confirme l’accord de continuer à designer le MEK comme une organisation terroriste, en échange d’une suspension continue des essais; voir aussi le Texte: Nuclear Agreement Between Iran and EU Trio, REUTERS, 15 Nov. 2004, citant le texte de l’accord: « Sans tenir compte des progrès sur la question nucléaire, les E3/EU et l’Iran ont confirmé leur détermination à lutter contre le terrorisme, dont les activités d’al Qaeda et d’autres groupes terroristes, comme les Mujahedin-e Khalq [sic].” Pour d’autres stimulations, voir aussi European Heavyweights Pressure Iran Over Nuclear Program; Talks to Continue, AGENCE FRANCE PRESSE, 21 Oct. 2004. 64 65 66 67 68

Voir Symposium, supra note 51. See Ali Akbar Dareini, Iran Confirms Uranium-to-Gas Conversion, ASSOCIATED PRESS, 9 Mai 2005. LOS ANGELES TIMES, supra note 35. Voir U.N. Experts to Visit Iran Underground Atom Site, REUTERS, 8 Juin 2005. Iran Demands its Nuclear Rights, BBC, 18 Sept. 2005.

69

Voir Iran Turns Down EU Nuclear Offer, BBC NEWS, 6 Août 2005. Le porte-parole du ministre des affaires étrangères déclarait que les propositions européennes n’étaient « pas acceptables car le droit de l’Iran à enrichir de l’uranium n’est pas inclus. »

70 71 72

Voir Iran Restarts Nuclear Programme, BBC NEWS, 8 Août 2005. Dafna Linzer, Iran is Judged Ten Years from Nuclear Bomb, WASHINGTON POST, 2 Août 2005 Stephanie Ho, Rumsfeld: Iran’s President-Elect No Friend of Democracy, VOICE OF AMERICA, 26 Juin 2005.

IRAN: DÉFIS ET CHOIX DE POLITIQUE ETRANGÈRE

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Bien que les estimations varient quant au moment où l’Iran parviendra à mettre au point une arme nucléaire par l’Iran, un agent supérieur des renseignements, ayant connaissance des rapports gouvernementaux américains internes, a declaré que “la communauté des renseignements jugeait que, laissé à lui-même, l’Iran était déterminé à construire des armes nucléaires. »73 Il est difficile d’imaginer une plus grande menace pour la paix mondiale que des armes nucléaires dans les mains d’un pays comme l’Iran, l’un des principaux états sponsorisant le terrorisme.74 Un Iran « nucléaire » ne modifierait pas seulement les dynamiques régionales, mais aussi les perceptions de l’équilibre militaire, et représenterait une très grande menace pour la sécurité des Etats-Unis.75 B. Iran en tant qu’Obstacle à la Paix Le principal objectif de l’Iran en tant que “protecteurs autoproclamés de l’Islam” est de répandre sa philosophie musulmane fondamentaliste violente à travers le monde. L’Iran se présente donc comme un obstacle majeur à la paix dans la région. Les attaques continuent également à l’encontre de l’ennemi original, le « Grand Satan » (les Etats-Unis), que le régime clérical considère comme la plus grande menace à l’établissement d’un Moyen-Orient islamique uni, sous le contrôle de l’Iran.76 La menace terroriste qui a vu le jour en Iran contre les intérêts américains est devenue “mondiale dans sa portée, multifacette et déterminée. »77 L’Iran « opère au sein d’un réseau d’organisations terroristes impliquées dans des meurtres, des enlèvements, des bombardements et d’autres atrocités, destinés à combattre le mal représenté par les Etats-Unis,” afin de permettre à l’Iran de poursuivre sa campagne fondamendaliste.78 1.

Soutien de l’Iran au Terrorisme

L’Iran est affilié à des organisations terroristes connues dont le Hezbollah, le Hamas, al Qaeda, et Jihad Islamique Palestinien.79 En conjonction avec ces alliances, les leaders iraniens ont été directement impliqués dans des centaines d’attaques terroristes80 dans le monde, au cours des deux dernières décennies. L’étendue du soutien direct de l’Iran aux organisations terroristes est globale et comprend des financements, des armes, des formations et de l’expertise tehcnique.81 Les leaders iraniens offrent également un refuge aux terroristes en Iran et fournissent aussi des faux papiers d’identité, dont des passeports contrefaits.82 Certains pensent donc que l’Iran protège un grand nombre de terroristes, activement recherchés par les Etats-Unis.83 Le directeur de la CIA, Porter Goss, a récemment noté que l’Iran continuait à abriter des membres imminents d’al Qaeda.84 _____________________________ 73

Certaines sources, dont un rapport récent des renseignements américains, suggère que cela pourrait prendre jusqu’à dix ans. Voir Linzer, supra note 71; cependant, d’autres sources disent que l’Iran serait à trois ans de réussir une bombe qui fonctionne. Voir IPC Report, supra note 3. De même, ElBaradei pensait que ce n’était qu’une question de mois, selon les circonstances. Voir Penketh, supra note 61. En dépit des variations dans les évaluations, toutes les estimations indiquent les ressources, l’accès et les capacités sont complètement découvertes et déterminées. La réalité est que la majorité du travail associé à un tel programme est probablement enterrée sous terre et il serait difficile de prédire quand l’Iran aura une bombe.

74 75 76 77 78 79

Voir généralement Rice, supra note 1. Voir Hearing Report, supra note 50. Voir Scott Holleran, Iran Should Be the Next Terrorist Target, DAILY NEWS OF LOS ANGELES, 31 Jan. 2002. Warren P. Strobel, Iran Called Top Terrorism Sponsor, KNIGHT RIDDER NEWSPAPERS, 22 Mai 2002. IPC Report, supra note 3. Voir Burns, supra note 3.

80

Voir Iran’s Ministry of Intelligence and Security, Iran Focus, 6 Mai 2005, affirmant que l’Iran avait été impliqué dans au moins 450 attaques; mais voir Thomas Sancton, Iran’s State of Terror: A Berlin Murder Trial Provides Details of How Top-Ranking Iranian Leaders Administer a Bloody International Terror Network, TIME MAGAZINE, 11 Nov. 1996, indiquant qu’en 1996, il y avait eu 200 attaques terroristes perpétrées par le régime et plus de 1 000 morts.

81 82 83 84

Voir Burns, supra note 3. Voir Burns, supra note 3. Voir Symposium, supra note 51. Voir Goss, supra note 48.

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Le rôle de l’Iran en tant que principal état sponsorisant le terrorisme dans le monde est au centre des préoccupations liées au programme iranien d’armes nucléaires, biologiques et chimiques.85 L’attaque de l’ambassade américaine à Téhéran et la révolution islamique qui suivit furent l’inspiration originale du mouvement moderne du Jihad islamique.86 Depuis, la théocratie iranienne s’est appuyée sur la terreur et son bilan de soutien pour promouvoir les activités terroristes est « indéniable. »87 Les intentions du régime se sont caractérisées par des tentatives de déstabilisation du Moyen Orient, avec une hostilité particulière pour Israël.88 Le remarque récente du président Ahmadinejad disant « qu’Israël devrait être rayée de la carte » est emblématique du fondamentalisme extrême et de l’utilisation de propos incitatifs de Téhéran.89

Les déclarations récentes du président Ahmadinejad n’ont fait qu’augmenter les inquiétudes israéliennes concernant la menace que représente l’Iran pour son existence. Un mois après avoir déclaré qu’Israël devrait être détruite, Ahmadinejad publia un fatwa “légitimant” les actes de terrorisme envers Israël.90 Soulignée par les récentes déclarations du président Ahmadinejad, la destruction d’Israël a toujours été l’un des principaux objectifs du clerc en place. Téhéran a, pour cela, engage d’importantes ressources financiers pour soutenir des attaques terroristes contre Israël. Il faut également noter que l’Iran ne se contente pas de soutenir des organisations terroristes, ayant pour but de détruire Israël. Il les crée également. Sa création la plus dangereuse fut sans doute le groupe terroriste libanais Hezbollah,91 auquel le pays continue de fournir son financement principal. Le Hezbollah est depuis devenu une organisation terroriste puissante, avec pour but principal la destruction d’Israel.92 Des diplomates et des analystes occidentaux au Liban ont récemment estimé que le Hezbollah recevait près de $200 millions par an de la part de l’Iran.93 Depuis sa création, le Hezbollah a été accusé de nombreuses attaques anti-américaines et anti-israeliennes.94 Au-delà du soutien financier, le lien entre l’Iran et le Hezbollah comprend des formations directes de la milice par la Garde Révolutionnaire iranienne.95 Il a récemment été révélé que le Hezbollah, avec le financement de l’Iran, payait jusqu’à $9 000 les kamikazes en Israël, afin de briser la fragile trêve entre les palestiniens et les israéliens.96 Le meilleur exemple de la relation opérationnelle maintenue par l’Iran avec le Hezbollah est sans doute le rôle de Téhéran dans le l’attaque à la bombe du centre communautaire juif de Buenos Aires en 1994, qui fit 86 morts. Selon un transfuge iranien haut placé, la décision de bombarder le centre communautaire juif fut prise lors d’une réunion de représentants officiels iraniens le 14 août 1993.97 _____________________________ 85

Voir Tehran Rejects Bush’s Call for Freedom of Iranian People, AGENCE FRANCE PRESSE, 3 février 2005, prononcé par le président Bush lors de son adresse à l’Etat de l’Union. 86 87 88 89 90

Voir Holleran, supra note 76. Voir id. Voir Remarques de la Secrétaire d’Etat Condoleezza Rice et du Secrétaire britannique aux Affaires Etrangères Jack Straw à la presse, US Department of State, 4 février 2005. Heinrich, supra note 60. Arnold Beichman, Dealing with Iran’s Threats, WASHINGTON TIMES, 14 Nov. 2005.

91

Voir Hezbollah Profile, MIPT Terrorism Knowledge Base, à www.tkb.org/home.jsp, dernière visite, 25 juin 2005, les objectifs affichés du Hezbollah incluent l’établissement d’une théocratie Chiite au Liban (similaire à celle de l’Iran), la destruction d’Israël et l’élimination de l’influence occidentale de la région.

92 93 94 95 96 97

Voir id. Voir Scott Wilson, Lebanese Wary of Rising Hezbollah, WASHINGTON POST, 20 Déc. 2004. Voir Hezbollah Profile – MIPT, supra note 91. Voir Porter Goss, supra note 48, La Garde Révolutionnaire est la force militaire qui agit exclusivement sous l’autorité du Chef Suprême l’Ayatollah Khamenei. Voir Marie Colvin, Iran Offers Cash for Bombs to Break Palestinian Truce, SUNDAY TIMES, 3 Avr. 2005. Voir Larry Rohter, Defector Ties Iran to 1994 Bombing of Argentine Jewish Community Center, NEW YORK TIMES, 7 Nov. 2003.

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Un autre exemple de l’engagement de l’Iran en vue de la destruction d’Israël consiste dans le soutien de son leader à l’Organisation de Libération de la Palestine (PLO).98 Des sources des renseignements découvrirent que l’Iran avait expédié 50 tonnes d’artillerie lourde à la PLO, dont des missiles antiaériens à lancement à l’épaule.99 La présence massive de l’Iran dans des organisations créées pour renverser Israël suggère que le pays a également pris le contrôle de nombreuses cellules terroristes palestiniennes.100 Selon la Commission 9-11, al Qaeda et Osama Bin Laden ont également reçu un soutien important de la part de l’Iran, dont des formations militaires de la part de la Garde révolutionnaire iranienne.101 Des collaborations sur des opérations terroristes conjointes ont aussi été suspectées par le passé.102 Most Plus alarmant, cependant, l’Iran a été accusé d’avoir aidé les terroristes impliqués dans les attentats du 11 septembre. Il existe notamment des preuves crédibles qu’avant que les attaques ait lieu, l’Iran avait facilité le transport clandestine de certains des terroristes du 11 septembre en Afghanistan et en dehors.103 L’Iran a même admis “abriter” aujourd’hui des membres d’al Qaeda, tout en, non seulement, refusant les demandes d’extradition, mais aussi en retenant des informations concernant leur localisation et leur statut.104 De plus, Curt Weldon, membre du Congrés, a déclaré que des officiers militaires américains avaient signalé qu’Osama Bin Laden lui-même était rentré et sorti d’Iran à plusieurs reprises, au cours des deux dernières années.105 En plus du soutien iranien à des organisations terroristes, des membres importants de l’armée iranienne ont été directement impliqués dans des attaques à la bombe, causant la mort d’américains. Le ministre de la Garde Révolutionnaire, ainsi que l’ancien président iranien Hashemi Rafsanjani, ont, par exemple, reconnu leur responsabilité dans l’attaque du 23 octobre 1983 contre les baraquements de la Marine américaine, qui fit 241 morts.106 Il a également été découvert que de nombreux représentants officiels iraniens étaient derrière le bombardement d’une base militaire américaine en 1996, aux Tours Khobar en Arabie Saoudite, qui tua 19 membres du personnel militaire américain et fit des centaines de blessés.107 En outre, plusieurs des terroristes, ayant commis cette attaque, avaient été recrutés en Syrie et formés dans les camps du Hezbollah au Liban et en Iran.108 _____________________________ 98 99

Voir Hearing Report, supra note 50. Voir Hearing Report, supra note 50.

100

Voir Westminster, supra note 37.

101

Voir Final Report of the National Commission on Terrorist Attacks Upon the United States (9-11 Commission), présidé par le gouverneur Thomas Kean, 240, 22 juillet 2004 [Rapport de la 9-11 Commission ci-après].

102

Voir id.

103

Voir Rapport de la 9-11 Commission, 240, supra note 101. Huit terroristes sur dix sont arrives en Iran, après avoir suivi une formation en Afghanistan, où les officiels iraniens avaient l’ordre de ne pas tamponner leurs passeports. 104

Voir Country Reports on Terrorism, Office of the Coordinator for Counterterrorism, US Department of State, 27 avril 2005; voir aussi Michael Theodoulou, Iran Holds Al Qaeda Suspects: Now What?, CHRISTIAN SCIENCE MONITOR, 28 Juil. 2003. “L’Iran dit qu’il détient un ‘grand nombre de petits et de grands’ membres du groupe, bien qu’il n’en est encore identifié aucun.” L’Iran dément “vivement” les accusations de protection de suspects et déclare “avoir rassemblé et extradé 500 suspects appartenant à al Qaeda vers leur pays d’origine, plus qu’aucun autre pays.”

105

Voir Meet the Press, NBC, 12 Juin 2005 (entretien avec Curt Weldon). Weldon a déclaré avoir des informations spécifiques concernant les mouvements de Bin Laden, à certains moments, dans le passé. Par exemple, il y a deux ans, il était dans une ville appelée Ladiz, à 10 kilomètres de la frontière pakistanaise.

106

Voir Kayhan Daily (journal iranien), 5 Nov. 1986, citant Rafsanjani, “Je veux vous dire que nous sommes certainement tenus responsables de l’échec rencontré par les EtatsUnis et de l’humiliation qu’ont subie les américains au Liban . . .”; voir aussi Ressalat (journal iranien), 20 Jui. 1987, citant Mohsen Rafiqdoust, Ministre des Corps de Gardes et beau-frère de Rafsanjani, “l’Amérique ressent la douleur de notre poing frappant son corps maléfique . . . [en envoyant] 400 de ses officiers et soldats directement en enfer”; voir aussi 150 Bipartisan House Members Call for an End to Iran’s Terrorist Regime and Support for the Iranian Opposition, publié par les Membres du Congrès, 21 Nov. 2002 [Déclaration de l’Iran ciaprès]. 107

Voir Rice, supra note 1; voir aussi Iranians May Have Been Behind Khobar Bombing, AGENCE FRANCE PRESSE, 24 Fév. 2001. Pour des besoins de divulgation complète, veuillez noter que DLA Piper Rudnick Gray Cary US LLP représente les familles des victimes des attaques sur les Tours Khobar, en litige avec différentes agences du gouvernement iranien à la US District Court for the District of Columbia.

108

Voir Statement of Matthew A. Levitt, Senior Fellow and Director of Terrorism Studies, US Policy Toward Iran: Next Steps, Committee on International Relations, Washington Institute for Near East Policy, 16 Fév. 2005.

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Plus récemment, des preuves édifiantes ont confirmé des attaques sponsorisées par l’Iran en Irak, contre les forces de la coalition.109 En Iran, un site Web sponsorisé par l’état citait les commentaires d’un représentant officiel de la Garde Révolutionnaire: « Le front des infidèles [en Irak] est composé d’ennemis de Dieu et des musulmans, et toute action destinée à les terroriser est sacrée et honorable. »110 Les déclarations anti-américaines du régime sont tout aussi alarmantes. Cette déclaration du théoricien des renseignements de la Garde Révolutionnaire, Hassan Abbassi, est très caractéristique : « les missiles iraniens sont maintenant prêts à frapper . . . . »111 2. Terrorisme et Ingérence de l’Iran en Afghanistan et en Irak Dans le prolongement de son désir d’éliminer l’influence américaine au Moyen Orient, l’Iran a spécifiquement visé l’Afghanistan et l’Irak.112 L’Iran souhaite s’établir en tant que source d’énergie et d’influence dans la région, de manière à étendre son régime fondamentaliste.113 Depuis l’entrée des Etats-Unis en Afghanistan, l’Iran s’est militairement positionné, à l’intérieur de la frontière occidentale de l’Afghanistan.114 Selon Dr. Kenneth Katzman du Service de Recherche du Congrès, « cela faisait partie de l’Empire perse, il y a très longtemps, et l’Iran n’a jamais abandonné l’idée de qu’il avait basculé en Afghanistan occidental. »115 Il est connu que l’Iran a envoyé sa propre Garde Révolutionnaire en Afghanistan.116 L’Iran a justifié sa présence armée en Afghanistan, en utilisant la guerre contre la drogue comme alibi.117 Les champs de pavot en Afghanistan ne sont cependant pas une menace pour l’Iran, mais plutôt un intérêt.118 De nombreuses preuves permettent de conclure que l’argent généré par les ventes d’héroïne est utilisé par l’Iran pour financer le terrorisme.119 L’ingérence de l’Iran en Afghanistan contribue donc à soutenir une partie des objectifs de Téhéran dans la région. Bien que le régime soutienne qu’il possède un programme anti-drogue inspiré par l’Islam, qui nécessite une présence iranienne en Afghanistan afin d’empêcher le mouvement de l’héroïne vers l’Iran, il a été rapporté que des représentants officiels iraniens ont, en réalité, commencé à faire le trafic de l’héroïne eux-mêmes en Afghanistan.120 Le régime a donc, par ce biais, obtenu une source de revenus, dérivée du commerce illicite de l’héroïne. D’autres rapports suggèrent que, dans le cadre d’une tentative pour augmenter ses profits, l’Iran a même engagé des activités pour étendre le marché de l’héroïne au sein de la population irakienne.121 __________________________ 109

Voir Statement by Dr. Abdullah Rasheed Al-Jabouri, ancien gouverneur de la province de Diyala, Irak, Iran’s Future: Iranian Impact, House Iran Human Rights and Democracy Caucus, 10 Mai 2005. 110

Revolutionary Guards Official Says Reconnaissance Done on 29 Weak Points in US and Europe for Terrorist Attacks, National Council of Resistance, à http://www.iranncrfac.org/Pages/press%20releases/May2004/20040525Suicide.htm, dernière visite, 24 juin 2005; citant Ruydad, site Web iranien, qui a rapporté qu’un officiel de la Garde Révolutionnaire, Hassan Abbassi, avait fait cette déclaration à une réunion à l’Université de Téhéran. 111

Steven Stalinsky, Taking Iran at Its Word, JERUSALEM POST, 30 Août 2004 (Stalinsky est directeur exécutif du Middle East Media Research Institute). Beaucoup d’autres déclarations terrifiantes ont été faites, comme celle qu’ils avaient des espions qui avaient découvert les sites sensibles américains, et que le régime savait où attaquer. D’autres rapports, mentionnés plus loin dans cet article, indiquaient que deux gardes de la sécurité iranienne pour les bureaux de l’Iran aux Nations Unies à New York avaient été renvoyés, après refusé de respecter les demandes d’arret de l’enregistrement vidéo des ponts, du métro et de la Statue de la Liberté.

112

Voir Future of Iran, American Enterprise Institute, 6 Mai 2003 (adresse du Sénateur Sam Brownback), la déclaration de la perte de l’Iran pour obtenir le contrôle de l’Afghanistan et de l’Irak vient à la suite de la perte de pouvoir sur le peuple iranien qui devient très virulent contre ce qu’il considère être un régime oppressif. 113

Voir id.

114

Voir Jed Babbin, Iran – Inviting Terrorism, NATIONAL REVIEW, 11 Fév. 2004. Jed Babbin était Député au Secrétaire de la Défense pendant la présidence de George H.W. Bush.

115 116 117 118 119 120 121

What Next in Afghanistan?, HERITAGE LECTURES, Jan. 31, 2002. US Warns Iran over Al Qaeda, BBC, 12 Fév. 2002. Voir Babbin, supra note 114. Voir Babbin, supra note 114. Voir Babbin, supra note 114, une théorie évoquée quand al Qaeda fut découvert, faisant le trafic d’héroïne. Voir Babbin, supra note 114. Voir Al-Jabouri, supra note 109.

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La majeure partie de l’héroïne d’Afghanistan est supposée être envoyée à des organisations terroristes associées au régime iranien; ces groupes distribuent les narcotiques et récupèrent les profits pour financer leurs activités.122 L’implication de l’Iran dans le commerce de l’héroïne afghane lui offre non seulement une source de revenus, mais aussi un alibi crédible, permettant à l’Iran d’organiser des opérations de déstabilisation en Afghanistan. A la suite de cela, l’Iran a pu s’établir en Afghanistan, en rencontrant beaucoup moins de résistance que ce que l’on aurait pu prévoir.123 L’Iran a récemment axé une grande partie de son attention sur l’Irak. Malheureusement, l’Irak est considéré par les observateurs comme une cible plus facile que l’Afghanistan. La majorité musulmane Chiite irakienne, longtemps opprimée, a terriblement souffert sous l’autorité des sunnites Saddam Hussein. Le Grand Ayatollah Ali al-Sistani irakien, qui a passé de nombreuses années en Iran soutenu par le régime clérical, est très respecté par le people irakien.124 Depuis l’invasion américaine de 2003, de nombreux rapports sont apparus en Ira, concernant la présence grandissante iranienne dans le pays.125 Le grand volume de rapports, associé avec l’indépendance des sources, dresse un tableau très noir, mais sans doute très pertinent, de l’infiltration militaire, des transbordements d’armes, du soutien au terrorisme et des campagnes de propagande.126 Les objectifs que l’Iran s’était fixé pendant sa guerre de huit ans avec l’Irak, dans les années 80, restent les mêmes aujourd’hui. Ces quatre objectifs consistaient à mettre la majorité Chiite à la tête du gouvernement irakien, renverser Saddam Hussein, protéger les lieux saints Chiites et prendre le contrôle des champs pétrolifères irakiens. Il a même été suggéré que les Etats-Unis avait accomplit trios de ces objectifs à leur place.127 En outre, suite à la guerre actuelle en Irak, l’Iran a commencé à établir son influence sur le peuple irakien et « l’aide » a du mal à passer.”128 Il existe un certain nombre de rapports authentifiés, indiquant que l’Iran envoie un très grand nombre d’agents, de militaires et de kamikazes en Iran, en parallèle de la provision d’armes et du financement des insurgés déjà en activité en Irak.129 Beaucoup d’agents iraniens ont été capturés par les forces de la coalition, et il n’existe aucun doute que Téhéran est la source de nombreuses attaques terroristes, visant les civiles et les politiciens anti-fondamentalistes.130 Une étude irakienne a montré que des agents iraniens avaient « établi une prime » de $500 pour chaque soldat américain tué.131 Le ministre de la défense irakien a déclaré que l’Iran avait déjà pris le contrôle des positions frontalières irakiennes.132

_____________________________ 122 123

Voir Babbin, supra note 114. Voir Babbin, supra note 114.

124

Voir Richard A. Clarke, Is a State Sponsor of Terrorism Winning?, NEW YORK TIMES, 27 Mar. 2005. Clarke Conseiller en matière de sécurité nationale sous quatre présidents américains. Voir aussi, Iran’s Future: Iranian Impact, House Iran Human Rights and Democracy Caucus, 10 Mai 2005 (Memorandum de Kenneth Katzman, Spécialiste CRS pour les Affaires Etrangères auprès de Tom Tancredo) [Memorandum ci-après].

125

Voir id. Secrétaire à la Défense Rumsfeld et le Directeur de la CIA Goss, avec de nombreux leaders en Irak et des forces de la coalition, ont accusé l’Iran de tentatives répétées, pour développer une présence forte et influente en Iran, dans l’espoir de créer une théocratie islamique Chiite similaire. 126 127 128

Voir Edward T. Pound, The Iran Connection, US NEWS.COM, 22 Nov. 2004, à http://www.usnews.com/usnews/news/articles/041122/22iran.htm. Clarke, supra note 124. Clarke, supra note 124.

129

Voir Memorandum, supra note 124, détaillant le nombre de cellules terroristes opérant en Irak, avec des liens directs avec les leaders iraniens. Un rapport récent suggère que “beaucoup des nouvelles bombes, plus sophistiquées, utilisées pour attaquer les forces américaines et gouvernementales, ont été conçue en Iran et envoyées depuis là-bas.” Voir Eric Schmitt, Some Bombs Used in Iraq are Made in Iran, US Says, NEW YORK TIMES, 6 Août 2005. 130 131 132

Voir Al-Jabouri, supra note 109. Voir Pound, supra note 126. Voir Doug Struck, Officials Warn of Iranian Infiltration, WASHINGTON POST, 26 Juil. 2004.

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De plus, des sources de renseignements associent les actions en Irak avec le pouvoir en Iran.133 Le chef des renseignements irakiens, Mohammed Al Shahwani, a accusé l’Iran de destiner $45 millions pour déstabiliser l’Irak.134 Un ancien membre du Conseil de la Sécurité Nationale a signalé aux renseignements que le personnel de Khomeini, la Garde Révolutionnaire, avaient envoyé 5 000 hommes en Irak, dans le but de garantir une influence iranienne forte, par tous les moyens possibles.135 L’Iran est donc positionné maintenant de la manière que le pays recherchait depuis des années, ayant « pénétré les centres vitaux du pays et mis en place un grand nombre de centres de renseignements et de sécurité.”136 Le soutien iranien au réseau terroriste qui existe en Irak est désormais clair. L’Iran a notamment été lié à l’un des plus dangereux groupes d’insurgés en Irak, l’Armée du Mahdi, responsable de certaines des attaques les plus meurtrières à l’encontre des forces de la coalition.137 Plus récemment, un groupe appelé le Comité pour la commémoration des martyres du mouvement islamique mondial a vu le jour à Téhéran, sous une apparente grande supervision du gouvernement iranien.138 Le but de cette organisation est le terrorisme,139 et sa mission spécifique est de recruter des kamikazes pour les envoyer en Irak.140 Son chef, Foruz Rajaifar,141 a été entendu, tenant les propos de l’Ayatollah Khamenei: « Les attentats-suicide sont la seule méthode efficace et viable pour combattre la domination de l’arrogance du monde [i.e., les Etats-Unis].”142 Bien qu’il n’y ait aucune preuve directe que cette organisation soit officiellement sponsorisée par le gouvernement iranien, un membre de la Garde Révolutionnaire et un important législateur étaient présents lors de sa première réunion, qui fut tenue dans un bâtiment gouvernemental.143 Cela suggère, au minimum, la complicité du gouvernement iranien.144 Ce nouveau développement ne fait qu’approfondir l’inquiétude des forces de la coalition, qui s’efforcent de maintenir un Irak pacifique et démocratique. En dehors de ses efforts militaires et terroristes, l’ingérence iranienne en Irak comprend également un programme de propagande, conçu pour influencer le peuple et son vote, dans le but de garantir un gouvernement Chiite solide. Selon le Roi Abdullah de Jordanie, plus d’un million d’iraniens ont traversé la frontière pour voter, lors des élections irakiennes.145 En fait, beaucoup des leaders élus en Irak ont passé de nombreuses en Iran.146 Le succès des efforts de propagande iraniens en Irak est sujet à débat, étant donné le gouvernement séculaire qui a dirigé le pays pendant de nombreuses années.147 Néanmoins, une augmentation stable du nombre de Chiites fondamentalistes, originaires d’Iran ou convertis, ne ferait qu’amplifiait une situation déjà instable.

_____________________________ 133

Voir Pound, supra note 126. “Des rapports des renseignements indiquent que l’insurrection grandissait, dans certains cas, avec le soutien financier et la direction des factions du gouvernement iranien.” Un entretien en 2004 avec un insurgé, capturé en Irak, a indiqué que les membres de son groupe avaient rencontré de hauts responsables iraniens, dont le Chef Suprême Khamenei. 134 135 136 137 138 139 140

Voir Ned Parker, Iraq’s Spy Chief Accuses Badr Militia of Killing Agents, MIDDLE EAST ONLINE, publié le 14 Oct. 2004. Voir Clarke, supra note 124. Westminster, supra note 37. Voir Pound, supra note126. L’organisation a des liens avec le Hezbollah et le leader est connu pour avoir visité l’Iran par le passé. Voir Pound, supra note126. Voir Pound, supra note 126. Voir Pound, supra note 126.

141

Voir Yoseef Bodansky, Between Tehran, Baghdad and the Heart of the United States, Global Information Systems, à 128.121.186.47/ISSA/reports/Iraq/Jun0104.htm, dernière visite, 24 Juin 2005. Bodansky est directeur de la recherché pour l’International Strategic Studies Association et directeur de la Congressional Task Force on Terrorism and Unconventional Warfare in the House.

142 143 144 145 146 147

Kayhan (journal iranien), 22 Mai 2004. Voir Ali Akbar Dareini, Group Seeks Bombers to Target US in Iraq, ASSOCIATED PRESS, 29 Nov. 2004. Voir id. Voir Robin Wright et Peter Baker, Iraq, Jordan Sees Threat to Election from Iran, WASHINGTON POST, 8 Déc. 2004. Voir Clarke, supra note124. Voir Iraqi Interim President: Insurgents Will Be Gone In a Year, CNN INTERNATIONAL, 8 Déc. 2004.

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La menace spécifique représentée par l’Iran au Moyen Orient et dans le monde provient de son régime fondamentaliste oppressif, qui recherche la domination du monde musulman. Cette intention est exprimée dans sa constitution: « Tous les musulmans ne font qu’une nation et la République islamique d’Iran a le devoir de fonder sa politique générale sur l’unité des nations islamiques et d’engager les actions nécessaires pour réaliser l’unité politique, économique et culturel du monde islamique. »148 A chaque élection truquée et contrôlée par les clercs en Iran, l’espoir nouveau d’un régime plus souple et plus raisonnable naît, pour s’éteindre aussitôt. La dernière élection n’a pas dérogé à la règle. La conduite du président Ahmadinejad et ses actions ont peut-être même alarmé ses partisans conservateurs.151 Mais, les chants « Mort à l’Amérique » se font de nouveau entendre au parlement iranien.152 Le soutien iranien au soutien international s’est accru et a fourni « un véhicule . . . pour répandre le fondamentalisme, grâce à l’exploitation de l’Islam.”153 Les opposants sont recherchés et assassinés où qu’ils soient.154 « Il semble qu’à chaque fois que quelqu’un retourne une pierre, les Ayatollahs et la Garde Révolutionnaire sont là. »155 La vision fondamentaliste de l’Iran associée à son utilisation du terrorisme comme outil de la politique étrangère continue d’en faire l’obstacle principal à la paix au Moyen Orient et dans le monde.156 C. L’Effroyable Bilan Iranien en matière de Droits de l’Homme La situation des droits de l’homme en Iran est “effroyable et a été condamnée plus de 50 fois par les Nations Unies.”157 L’état de droit en Iran se base exclusivement sur une vision extrémiste de l’Islam, punissant sévèrement toute déviation des clercs en place dans l’interprétation du Qu’ran.158 Tout acte incompatible avec cette extrémisme est durement réprimandé et implique des traitements inhumains, comme les violences publiques, les emprisonnements, les tortures et les meurtres.159 De nombreux assassinats et de nombreuses disparitions de dissidents politiques ont donc été constatés, afin d’éliminer la menace qu’ils représentent pour le totalitarisme du régime.160 Malgré les protestations internationales, la situation continue à se détériorer. L’Iran a augmenté son oppression et ses violences à l’encontre des dissidents politiques, des journalistes, des femmes et de minorités.161 _____________________________ 148 149

Jalal Ganje’i, Two Islams Face Off, WASHINGTON TIMES, 27 Sept. 2004. Voir Kenneth Timmerman, Fake Election, Real Threats, WASHINGTON TIMES, 17 Juin 2005.

150

Voir Iran: Time for a New Approach, Conseil des Relations Etrangères, Co-Présidé par Robert M. Gates et Zbigniew Brzezinski, 14 Juil. 2004 [Rapport CFR ci-après]. Les élections ont été lourdement contrôlées par les clercs qui déterminant qui a le droit de concourir à l’élection.

151

Voir Third Oil Nominee Rejected, CNN, 23 Nov. 2005. Le président iranien a eu des difficultés à atteindre des objectifs, au sein du gouvernement, et a fait face aux critiques de ses partenaires conservateurs.

152 153 154 155 156

Joel Gaines, Iran: Sponsor of Terror, NoPunditIntended.com, à http://www.nopunditintended.com/?q=Iran- Sponsor-of-Terror, posté le 29 Nov. 2004. Lettres des Membres de la Chambre des Députés Américains au president William Jefferson Clinton, 7 Mar. 1995 [Lettre 1 ci-après]. Voir id. Symposium, supra note 51. Voir Lettres des Membres du Sénat américain au président Clinton, 10 Fév. 1997 [Lettre 2 ci-après].

157

Voir Situation of Human Rights in the Islamic Republic of Iran, General Assembly Resolution, A/RES/60/171, 16 Déc. 2005; voir aussi UN General Assembly Condemns Human Rights Violations in Iran, TORONTO STAR, 16 Déc. 2005; voir aussi Country Report on Human Rights Practices – 2004, US Department of State, 28 Fév. 2005 [Country Report ci-après].

158

Voir Country Report, supra note 157; voir aussi Brownback, supra note 112. Beaucoup de clercs ont été emprisonnés, suite à leur critique de la manière dont les mullahs iraniens interprètent l’Islam et les punitions sévères imposées, pour punir les comportements provocateurs. 159

Voir Situation of Human Rights in the Islamic Republic of Iran, G.A. Res., UNGAOR, 59ème Sess., 3rd Committee, A/C. 3/59/L.50, 20 Déc. 2004 [UN Resolution ciaprès]. 160

Voir Country Report, supra note 157.

161

Voir Question of the Violation of Human Rights and Fundamental Freedoms in Any Part of the World, Economic and Social Council, Commission on Human Rights, 4 Mars 2005 (written statement by International Federation for Human Rights); voir aussi Leah Krakinowski, Rights Group: Human Rights Violations on The Rise in Iran, VOICE OF AMERICA, 13 Oct. 2004.

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1. Exploitation de l’Islam par l’Iran La majorité des offenses commises par les leaders iraniens sont basées sur l’exploitation de l’Islam.162 La constitution indiquent en effet strictement que « toutes les lois et les réglementations . . . doivent se basées sur l’Islam. » Cela signifie, bien sur, l’interprétation présentée par le régime clérical en place.163 Le leader suprême de l’Ayatollah, Ali Khamenei, apparaît comme le défenseur de la loi islamique et le dirigeant absolu, non élu, de l’Iran.164 Il n’y a aucune branche du gouvernement qui ne soit pas contrôlée, directement ou indirectement, par l’Ayatollah ou son Conseil des Gardes.165 Toutes tentatives législatives en faveur de la libéralisation sont rejetées par le conseil et sont souvent remplacées par des lois plus restrictives.166 Afin de garantir la conformité avec la loi islamique stricte, une police de moralité, le Basij, a été créé pour rechercher les personnes aux agissements non-islamiques.167 La police de moralité possède un haut degré d’autorité pour exécuter les sentences extrajudiciaires, comme les violences dans la rue, les arrestations et les tortures.168 Le Basij existe en parallèle d’autres groupes d’autodéfense indépendants, qui recherchent également les personnes aux agissements nonislamiques. Ils infligent souvent des blessures sérieuses à leurs victimes, qui ne sont pas remises en question par les représentants du gouvernementaux, et leur action est en fait soutenue par beaucoup dans le régime.169

2. Absence de Liberté d’Expression et d’Association Les iraniens possèdent peu, voire aucun droit politique significatif.170 Au niveau le plus fondamental, ils n’ont pas la capacité de changer de gouvernement. L’Iran prétend être une démocratie complète, avec des élections pour la présidence et la législature. Le titre de démocratie est, pourtant, une simple façade. En pratique, le vote n’a pas de signification, car les clercs au pouvoir contrôlent les candidats et le processus électoral.171 Les leaders cléricaux ont également été accusés de falsifier les scrutins.172 De plus, la parole est grandement réprimée et la liberté d’expression n’est pas protégée par la constitution.173 Les manifestations publiques sont généralement interdites et, lorsqu’elles ont lieu de manière spontanée, brutalement réprimandées.174

_____________________________ 162

Voir Promotion and Protection of Human Rights, Written Statement, Economic and Social Council, Commission on Human Rights, 23 Mars 2004 (déclaration écrite du United Nations Watch) [déclaration écrite du United Nations Watch 2004 ci-après].

163 164

Voir Country Report, supra note 157. Voir Country Report, supra note 157.

165

Voir Country Report, supra note 157. Le Conseil des Gardes est un corps compose de douze membres non élus, qui examinent les législations et les candidats potentiels. Ce Conseil a un pouvoir de veto absolu.

166 167 168

Voir Country Report, supra note 157. Voir Country Report, supra note 157. Voir Country Report, supra note 157.

169

Voir Country Report, supra note 157; voir aussi also org/research/freeworld/2004/countryratings/iran.htm, dernière visite, 2 Juin 2005. 170

Iran:

Overview,

2004,

Freedom

House,

à

http://www.freedomhouse.

Voir id.

171

Voir Jerome R. Corsi, Atomic Iran, Cumberland House Publishing, 2005, à 195, notant que le UN Special Envoy on Freedom of Opinion and Expression en 2003 avait mis en garde sur le fait que le processus de sélection en Iran, par lequel les candidats sont sélectionnés par les mullahs est un obstacle à la libre expression; voir aussi Appraisal of E.U. Human Rights Dialogues – Assessment of the Human Rights Situation in Iran, International Federation for Human Rights, Juil. 2004 [IFHR Report ci-après], commentant leur déception concernant les élections de 2004 lors desquelles de nombreux candidats remplis d’espoir, majoritairement des “réformistes,” se sont vus exclus de l’élection par les mullahs. 172 173 174

Voir Iran Election Fraud: 2298,000 Votes from 270,000 Eligible in NE Province, Iran Focus, 22 Juin 2005. Voir Country Report, supra note 157. Voir IFHR Report, supra note 171.

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Bien que la liberté de la presse soit garantie dans la constitution, cette liberté est restreinte et existe seulement, si le discours n’offense pas l’Islam et les clercs au pouvoir.175 Les déclarations critiquant le défunt Ayatollah Khomeini, le Chef Suprème Khamenei, l’autorité des leaders religieux, ou celles faisant la promotion des clercs dissidents et défendant les droits des minorités sont interdites de publication.176 Par exemple, trois journaux iraniens ont été fermés par le gouvernement, peu de temps avant l’élection récente du président Ahmadinejad, après qu’un des journaux ait publié une lettre accusant le gouvernement d’avoir truqué les élections.177 Aussi, bien que la presse ne soit pas officiellement sous le contrôle de l’état, elle pratique souvent l’autocensure par peur de représailles du gouvernement.178 L’Iran reste très sensible aux critiques et combat durement toute opposition politique. Le régime est actuellement encore plus sévère avec les journalistes et les blogueurs, tenant des propos incompatibles avec les vues du régime.179 Les punitions pour des propos insultants le gouvernement, donc l’Islam, varient beaucoup, allant de flagellations publiques et emprisonnements aux exécutions.180

3. Violations de la Liberté Religieuse

La liberté de pratiquer la religion existe, mais se limite à la pratique de l’Islam Chiite, religion officiel de l’Iran. Le Comité américain pour la liberté religieuse internationale a récemment déclaré que “le gouvernement iranien initiait et tolérait des violations systématiques, courantes et flagrantes de la liberté religieuse.”181 Bien que la population sunnite ne soit pas généralement visée par les violences, il existe de nombreux cas de discrimination par le gouvernment.182 En outre, les activités religieuses des Chrétiens et des Juifs sont limitées et les membres de ces fois sont victimes d’une grande discrimination.183 Des preuves suggèrent qu’ils sont plus fréquemment victimes d’arrestation sur des accusations de comportement anti-islamique.184 Le sort des Baha’i est encore pire. Les membres de la foi Baha’i n’ont droit à aucune protection et leur religion a été déclarée non-islamique par la loi iranienne, donc illégale.185 D’autres exemples de discrimination religieuse sont présents dans le code pénal iranien. Si un musulman est assassiné, le coupable est assujetti à des mesures de rétorsion.186 En revanche, si un musulman tue un non-musulman, le tueur doit simplement verser le prix du sang à la famille de la victime pour s'acquitter de sa « dette ».187 Comme c'est le cas dans plusieurs pays intégristes islamiques, celui qui veut se convertir à une autre foi que l'Islam est passible de la peine de mort.188 _____________________________ 175 176 177

Voir Country Report, supra note 157. Voir Country Report, supra note 157. Voir Karl Vick, Sides Scramble in Fight For the Iranian President, WASHINGTON POST, 21 Juin 2005. Plus de 100 publications ont été fermées par l’Iran.

178

Voir Country Report, supra note 157; voir aussi Civil and Political Rights, Economic and Social Council, Commission on Human Rights, 8 Mars 2005 (déclaration écrite du United Nations Watch) [déclaration écrite du United Nations Watch 2005 ci-après]. 179

Voir 2004 UN Watch Written Statement, supra note 162; voir aussi Iran – Voices Struggling To Be Heard, US Department of State, No. de Publication 11140, Bureau of Democracy, Human Rights, and Labor with the Bureau of Public Affairs, Avr. 2004. 180 181 182 183 184 185 186 187 188

Voir Country Report, supra note 157; voir aussi Symposium, supra note 51. Par exemple, l’Iran possède le plus grand nombre d’exécutions politiques dans le monde. Statements by Senator Brownback, Women in Iran, Senate Congressional Record, p. S6711, 16 Juin 2005. Voir Country Report, supra note 157. Voir Country Report, supra note 157. Voir 2005 UN Watch Written Statement, supra note 178. Voir UN Watch Written Statement, supra note 162. Voir IFHR Report, supra note 171. Voir IFHR Report, supra note 171. Voir Country Report, supra note 157.

4. Négation des Droits Fondamentaux des Femmes

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Les femmes, en tant que minorité, sont fortement réprimées. En raison des attentes élevées envers elles en vertu du code islamique, elles sont ciblées plus fortement. Bien que le gouvernement iranien ne manqué pas de mentionner que le nombre de femmes servant dans la législature est « admirable », cela ne reflète pas fidèlement le statut de la femme.189 En réalité, l'application des lois iraniennes à la femme est une violation du droit international en matière de droits de la personne.190 La femme a en fait peu de droits indépendamment de son mari. Elle ne peut pas voyager sans son autorisation.191 Le témoignage de deux femmes équivaut à celui d'un seul homme. Le prix du sang versé à la famille d'une victime de sexe féminin est la moitié de la somme versée pour un homme. Souvent, la police de moralité bat les femmes dans la rue parce qu'elles sont habillées de façon inconvenante, portent des produits de beauté ou fréquentent un célibataire. Ces actes sont, selon la police de moralité, en violation avec les lois iraniennes et islamiques.192 De plus, les femmes reçoivent souvent des peines beaucoup plus lourdes que les hommes pour le même crime. Par exemple, un homme qui commet un viol peut ne recevoir aucun châtiment tandis que des accusations liées à l'absence de chasteté contre une femme, même dans le cas d'un viol, peuvent entraîner la peine de mort. Le traitement est encore pire pour les femmes qui sont emprisonnées, car le viol, en particulier des vierges, y est un châtiment très commun.193

5. Torture et Traitement Inhumain par des Officiels Iraniens En raison du code islamique strict et du système judiciaire anarchique194, le nombre de prisonniers en Iran est alarmant et en augmentation. De plus, le traitement des personnes incarcérées en Iran est horrifiant et largement condamné.195 Par exemple, en décembre 2004, quand des journalistes ont affirmé publiquement qu'ils avaient été torturés et arrêtés sans mandat, le procureur en chef du pays a menacé de leur infliger des préjudices corporels à eux et à leur famille.196

Bien que les tortures infligées sur les iraniens ne soient pas nécessairement commanditées par des leaders iraniens, ces actes sont couramment tolérés. Par exemple, il y a peu de supervision des activités des forces des renseignements et des gardiens de prison.197 De plus, Il y a peu de justice pour les victimes de torture et de « mort accidentelle » subséquente, qui survient souvent pendant les interrogations.198 L'Iran est au sommet de la liste, en ce qui a trait au nombre d'exécutions.199 _____________________________ 189 190 191 192

Voir 2004 UN Watch Written Statement, supra note 162. Voir 2004 UN Watch Written Statement, supra note 162. Voir Country Report, supra note 157. Voir Country Report, supra note 157.

193

Voir Corsi, supra note 171 at 204. Le viol est une pratique commune des gardes en prison, en Irak. Le viol des vierges est une « punition » lourdement infligée, en particulier aux détenues politiques, car selon l’interprétation de l’Islam des mullah, une femme vierge doit aller au paradis. Aussi, pour empêcher une femme vierge d’aller au paradis, elle doit être violée, avant d’être exécutée: la punition « éternelle ».

194 195 196 197 198 199

Voir Corsi, supra note 171 à 200. Le système judiciaire n’est généralement ni indépendant, ni impartial. Les procès sont souvent privés, sans jury ou représentation légale. Voir UN Resolution, supra note 159; see also Freedom House, supra note 169. Voir Corsi, supra note 171 à 198. Voir Country Report, supra note 157. Voir Country Report, supra note 157. Par exemple, la mort récente d’une photographe canadienne, à la suite des violences de son interrogateur n’a pas été punie. A Weekly Review of Developments in and Pertaining to Iran, RADIO FREE EUROPE/RADIO LIBERTY, 27 Déc. 2004.

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Les méthodes d'exécution inhumaines que sont la pendaison, la crucifixion et la lapidation sont encore plus affligeantes.200 La lapidation, souvent une peine imposée pour les crimes allant à l'encontre de la chasteté, est régie par des directives très précises indiquées dans le code pénal iranien. Par exemple, l'article 104 dispose que les pierres « ne doivent pas être assez grosses pour tuer la personne en un ou deux jets. »201 Le but de cette précision est de s'assurer que la personne ne meurt pas immédiatement et connaisse plutôt une mort lente et douloureuse.202

Malgré les accusations nombreuses de l'ONU et d'autres instances partout dans le monde, l'Iran continue de commettre de graves violations des droits de l’homme.203 Bien que toutes les violations ne soient pas commises sous les ordres explicites de l’Ayatollah Khamenei ou du système judiciaire, les représentants officiels demeurent néanmoins complices de ces abus.204

Les récentes tentatives européennes pour engager un dialogue centre sur l’éradication de ces violations ont eu peu d’impact, ce qui a été reconnu par l’Union européenne elle-meme.205 Les mesures sévères récentes prises à l’encontre des dissidents politiques et l’intensification de la « force morale » renforcent la conclusion que ce dialogue n’a pas abouti.206 En outre, la Prix Nobel de la Paix, Shirin Ebadi, accuse l’Iran d’avoir augmenter sa persécution à l’encontre des organisations et des avocats, qui tentent de dénoncer et de combattre les abus.207 Bien que l’Iran déclare parfois qu’il va stopper certaines de ses pratiques les plus horrifiantes, des rapports indiquent le contraire.208 « Le mépris flagrant de l’Iran … est une raillerie du droit international et un affront à ceux qui le représentent.”209 En dépit de ces déclarations contenues dans certains rapports des Nations Unies, l’Iran reste sur ses positions et il est certain que ces pratiques persisteront sous l’autorité «du petit nombre de non élus »210, dont l’interprétation fondamentale de l’Islam sert de justification.

_____________________________ 200 201 202 203 204

Voir UN Resolution, supra note 159; voir aussi Country Report, supra note 157. Corsi, supra note 171 à 207. Voir Corsi, supra note 171 à 207. Voir Freedom House, supra note 169. Voir IFHR Report, supra note 171.

205

Voir Iran – Human Rights – Council Conclusions, E.U. REPORT, 13 Oct. 2003 [EU Report ci-après]; voir aussi Golnaz Esfandiari, Iran: EU Human Rights Dialogue Brings Little Progress, RADIO FREE EUROPE/RADIO LIBERTY, 30 Juin 2004. Les tentatives européennes de dialogue pacifique modéré ne sont pas surprenants, étant donnés leurs intérêts à accroître le commerce avec l’Iran.

206 207

Voir id. Voir 2004 UN Watch Written Statement, supra note 162.

208

Voir Stoning Continues in Iran Unabatedly, Women’s Forum Against Fundamentalism in Iran, à http://www.wfafi.org/Stoning.htm, dernière visite, 6 Juin 2005; voir aussi Canada, Iran: Human Rights Overview, Ministry of Foreign Affairs, 2005. Les amputations ont aussi continué, en dépit des promesses de l’Iran de mettre un terme à cette forme de punition ; voir aussi IFHR Report, supra note 171, de nombreux rapports indiquent que la lapidation et les amputations persistent, malgré les déclarations stipulant que ces punitions ont été suspendues. 209

2004 UN Watch Written Statement, supra note 162.

210

Robin Wright and Michael A. Fletcher, Bush Denounces Iran’s Election, WASHINGTON POST, 17 Juin 2005, citant la référence du président Bush au régime en place en Iran comme “le petit nombre de non élus.”

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II. Options de Réponse à l’Iran A. Le Risque de l’Intervention Militaire Américaine Malgré le fait que « nous ne voulons pas voir les armées américaines marcher sur Téhéran, »211 l’intervention américaine est l’une des options disponibles pour faire face à la menace que représente l’Iran. De manière réaliste, une invasion totale visant un changement de régime se révèlerait, cependant, extrêmement délicate. En raison des nombreuses complexités, l’invasion ne serait pas une option réaliste. En dépit de son infériorité militaire, l’Iran serait, sans aucun doute, capable d’employer des tactiques non conventionnelles, appelant à la surenchère et pouvant donc entraîner des conséquences imprévisibles.212 Par exemple, l’Iran pourrait rapidement lancer ses grands réseaux terroristes à travers le monde, pour perpétrer des attaques terroristes, visant les civiles. De plus, une telle attaque de l’Iran, en association avec la propagande iranienne, serait susceptible de renforcer l’unité islamique au sein des états du Moyen Orient, ce qui pourrait donc provoquer une réponse plus importante que prévu contre les Etats-Unis. Selon Dr. Daniel Byman, ancien membre du Centre Saban d’Etudes du Moyen Orient à la Brookings Institution, toute attaque à petite échelle contre l’Iran avec un but précis, comme la fin du programme d’armes nucléaires iranien, « échouerait probablement et générerait des représailles, en aggravant la situation . . . Les attaques militaires limitées ont un historique particulièrement mauvais, en matière de lutte contre le soutien au terrorisme.”213 Suite à un jeu de guerre récemment réalisé par Atlantic Monthly, le joueur et concepteur de jeu, Sam Gardiner, ancien colonel de l’Armée de l’air, déclara qu’il « n’existait pas de solution militaire pour les problèmes rencontrés en Iran . »214 Selon le jeu de guerre Atlantic Monthly, les options militaires américaines présentent trios possibilités pour l’Iran: une nuit d’attaques aériennes pour stopper l’ingérence iranienne en Irak, plusieurs jours d’attaques aériennes visant à détruire les installations nucléaires iraniennes et une guerre globale dans le but de faire changer le régime en place.215 Bien que les deux premières options soient militairement réalisables, elles ne présentent pas de réel avantage et pourraient provoquer une attitude provocatrice et une détermination encore plus fortes de la part de Téhéran.216 La première option, une attaque aérienne unique, pourrait mettre un terme à l’ingérence iranienne; cependant, il y a aussi un risque de provoquer une colère encore plus grande de l’Iran.217 En outre, à long terme, il est peu probable qu’une telle attaque mette un terme définitif aux actions de l’Iran en Irak; au lieu de cela, l’Iran agirait à un niveau encore plus clandestin.218 La seconde option est également disponible, si les Etats-Unis souhaitaient attaquer le programme nucléaire iranien en cours. Cependant, la probabilité de totalement détruire l’ensemble des installations nucléaires iraniennes est mince.219

_____________________________ 211

Entretien avec Colin Powell by CNN’s Christiane Amanpour, 23 Nov. 2004, disponible à http://www.state.gov/secretary/former/powell/remarks/38667.htm, citant l’ancien Secrétaire d’état Colin Powell. 212 213 214 215 216 217 218 219

Voir Kaveh L. Afrasiabi, How Iran Will Fight Back, ASIA TIMES, 16 Déc. 2004. Towards a New Iran Policy, Saban Center for Middle East Policy, Brookings Institution, 23 Nov. 2004, à 45 [Transcript Brookings ci-après]. James Fallows, Will Iran be Next?, ATLANTIC MONTHLY, Déc. 2004. Voir Michele Kelemen, Mock War Game Shows Limited U S Options on Iran, NATIONAL PUBLIC RADIO, 5 Nov. 2004. Voir Fallows, supra note 214 . Voir Fallows, supra note 214. Voir Fallows, supra note 214. Voir Fallows, supra note 214.

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Les renseignements concernant la localisation de ces installations n’est pas exact; les sites de fabrication des armes les plus dangereuses sont très bien cachés. En résumé, les attaques aériennes contre des sites éventuels n’affecteraient pas le programme, de manière significative.220 Etant données les actions récentes du régime pour déplacer les installations nucléaires sous terre, les observateurs militaires ont exprimé l’opinion qu’une attaque aérienne serait une complication difficile, voire insurmontable.221 Une analyse datant de septembre 2004, publiée par le Centre Educatif pour la Politique de Non-prolifération concluait que « les Etats-Unis et Israël ne possèdent pas les renseignements nécessaires, pour éliminer militairement les capacités nucléaires iraniennes. »222 Ces options militaires limitées ne représentent donc pas une solution permanente et pourraient entraîner une intensification des hostilités.

La seule option militaire disponible pour tenter d’initier un changement de régime permanent en Iran serait l’assaut militaire général.223 Une telle attaque n’est cependant pas seulement irréaliste, mais aurait des conséquences complexes et imprévisibles. D’un point de vue militaire, on ne dispose que de ressources limitées pour préparer une telle attaque. Les forces militaires américaines, ainsi que l’équipement militaire, sont déjà largement concentrés dans les pays voisins.224 En outre, la notion d’occupation, puis de sortie de l’Iran est irréaliste, à la lumière des la grande taille et des capacités du pays; la nature irréaliste de cette notion est encore plus évidente, quand elle est juxtapose à l’expérience des forces de la coalition en Irak.225 De plus, tenter de s’assurer le soutien du peuple américain afin d’investir de l’argent et des vies humaines dans une autre guerre serait délicat. De manière similaire, d’un point de vue international, une telle attaque ne ferait qu’aggraver les tensions actuelles entre les Etats-Unis et l’Europe.226 Une invasion américaine pourrait également opprimer davantage le mouvement anti-régime iranien existant.227 Le gouvernement iranien, dans un état d’urgence, utiliserait une attaque américaine pour justifier l’oppression totale des organisations indépendantes, qui existent à un niveau fondamental, comme les organisations étudiantes et de défense des droits de l’homme.228 Le respect minimal des droits de l’homme qui persiste difficilement à Téhéran serait la première conséquence d’une telle guerre.229 L’Iran mettrait également en pratique son habilité à déployer des tactiques « asymétriques », identiques à celles utilisées en Irak à l’heure actuelle. Ces tactiques ne sont pas destinées à résister à une invasion, mais plutôt à entraîner l’ennemi dans un combat sanglant de « style guérilla » sur le terrain.230 En outre, l’Iran fera, sans aucun doute, appel à ses alliés terroristes, augmentant donc le nombre de ses hommes, ainsi que la maneuverabilité.231

_____________________________ 220 221 222 223 224 225 226 227 228 229

Voir Fallows, supra note 214. Voir generally Target Iran – Air Strike Uncertainties, Global Security.org, dernière visite 27 Déc. 2005. Voir id, citant Competitive Strategies Working Group, Rapport du Centre Educatif pour la Politique de Non-prolifération (NPEC), Sept. 2004. Voir Fallows, supra note 214. Voir Fallows, supra note 214. Voir Fallows, supra note 214. Voir Jim Lobe, Neocons Exploiting Domestic Unrest in Iran, Antiwar.com, 11 Mai 2005. Voir Shirin Ebadi and Hadi Ghaemi, The Human Rights Case Against Attacking Iran, NEW YORK TIMES, 8 Fév. 2005. Voir Ebadi and Ghaemi, supra note 227. Voir Ebadi and Ghaemi, supra note 227.

230

Voir Fallows, supra note 214 ; voir aussi Borzou Daragahi, Iran Readies Military, Fearing a US Attack, SAN FRANCISCO CHRONICLE, 21 Fév. 2005; voir aussi CSIS, supra note 41, indiquant qu’une telle guerre asymétrique aurait un “effet stratégique hors de proportion par rapport à la taille et aux capacités des forces iranienne.” 231

Voir id. La Garde Révolutionnaire iranienne comprend aussi une force spéciale appelée Qods, qui a la capacité de mener des attaques non conventionnelles à l’étranger, grâce à ses positions diplomatiques dans les ambassades iraniennes à l’étranger.

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L’Iran intensifierait aussi l’activité des insurgés en Afghanistan et en Irak, afin d’attirer des troupes américaines supplémentaires dans ces zones, réduisant donc le nombre des forces américaines disponibles pour combattre en Iran.232 De manière similaire, l’Iran avertirait ses voisins des conséquences liées aux « envahisseurs »,233 posant donc des limites aux options américaines, concernant les lieux stratégiques voisins. De plus, l’Iran contrôle le Détroit, une voie d’eau utilisée par tous les pétroliers faisant route vers le Moyen Orient. L’Iran pourrait facilement mettre en place un étranglement sur le mouvement du pétrole, réduisant ainsi considérablement l’accès des forces américaines dans la région.234 Cet étranglement aurait donc des conséquences importantes sur la consommation pétrolière européenne et américaine. Le plus grand atout stratégique de l’Iran réside peut-être dans sa capacité à accroître sa machine de propagande dans la région, afin d’accentuer la haine envers les Etats-Unis, tout en soutenant l’unité parmi les musulmans.235 La guerre prendrait vite un champ d’action plus grand, largement contrôlé par l’Iran. Selon le jeu de guerre Atlantic Monthly, l’intensification est inévitable, car les participants « ne parviennent pas empêcher l’intensification du conflit. »236 Une intensification mettrait non seulement la région entière en guerre, mais elle se répandrait dans le monde – partout où des réseaux terroristes existent.237 Le régime iranien, craignant la destruction, « n’aurait plus de raison de ne pas utiliser les outils de représailles à sa disposition. »238 Bien que les forces américaines soient nettement supérieures à celles de l’Iran, l’armée iranienne est néanmoins importante, selon les standards nationaux, et sa technologie est bien plus avancée que celle de l’Irak et de l’Afghanistan.239 L’Iran serait un adversaire beaucoup plus dangereux que les militaires irakiens ou afghans.240 Tous ces facteurs assurent le succès d’une attaque américaine en Iran ne peuvent pas être déterminés, et les Etats-Unis paieraient sans doute un lourd tribut.241 A la lumière de l’ensemble de ces facteurs, les analystes militaires ont conclu que l’option d’engager un conflit militaire contre l’Iran présentait des risques inacceptables et devrait être évitée. B. Continuation de la Politique d’Engagement Une continuation de l’engagement avec le régime est une autre option pour faire face à la menace grandissante de Téhéran. Les contours de cette politique ont précisément décrits dans un Rapport des Forces opérationnelles par le Conseil des Relations Etrangères, co-présidé par William Gates, ancien directeur de la CIA, et Zbigniew Brzezinski, ancien conseiller à la Sécurité nationale.242 Les Forces opérationnelles ont affirmé que le gouvernement américain devrait rentrer en négociation, de manière sélective, avec le Gouvernement iranien.243 _____________________________ 232

Voir Afrasiabi, supra note 212.

233

Voir Afrasiabi, supra note 212. La réaction initiale de l’Iran à l’invasion américaine serait probablement une démonstration ferme et puissante, accompagnée d’attaques de contre-missiles, pour mettre en garde les pays voisins.

234 235 236 237

Voir Daragahi, supra note 230; see also CSIS Report, supra note 41. Voir Lobe, supra note 226. Elmarie Jack, US Loses War Games, NEWS 24.COM, 19 Sept. 2004. Voir Fallow, supra note 214.

238

Voir Fallow, supra note 214; Voir aussi Westminster, supra note 37, indiquant que l’Iran était prêt accepter un million de pertes humaines, pendant sa guerre avec l’Irak, dans les années 1980. Etant donnée la grande menace que les Etats-Unis représenteraient, l’Iran devrait sans doute dépasser cette limite.

239 240 241 242 243

Voir CSIS Report, supra note 41.L’armée iranienne compte actuellement moins d’un millions de soldats. Son équipement est ancien et d’une qualité contestatble. Voir CSIS Report, supra note 41. Voir Daragahi, supra note 230. Voir CFR Report, supra note 150. Voir CFR Report, supra note 150.

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De plus, le rapport recommande que toutes les stimulations potentielles soient mises en place, pour obtenir la conformité de l’Iran.244 La politique d’engagement récemment poursuivie par l’Allemagne, la France et le Royaume-Uni – collectivement, les EU-3 – est une variation plus modérée de cette approche.245 Cette politique a été la seule méthode diplomatique employée, en dépit du fait que l’Iran ait initié un programme d’armes nucléaires, sponsorise le terrorisme et continue à commettre de graves abus en matière de droits de l’homme.246 Bien que les EU-3 aient récemment exprimé des inquiétudes sérieuses, depuis l’élection du président Ahmadinejad, ils ont maintenu, par le passé, que les négociations avec l’Iran et l’offre des stimulations appropriées persuaderaient Téhéran d’ajuster sa politique, pour s’aligner sur les préoccupations occidentales.247 Un exemple de stimulation consiste dans la proposition d’un réacteur à eau légère, adapté à un programme de production d’énergie, en échange du démantèlement et de l’abandon par l’Iran de son installation à eau lourde.248 Les EU-3 ont également offert une expertise technique pour soutenir le programme de production d’énergie nucléaire iranien.249 Toutes ces concessions ont été offertes, en échange d’une promesse de l’Iran de cesser toute activité nucléaire liée à l’enrichissement.250 Aucune promesse n’a abouti. Aussi, à la fin de l’année 2004, les EU-3 furent contraints de demander à l’Iran de suspendre toute activité d’enrichissement nucléaire, sous peine d’être référé au Conseil de sécurité des Nations Unies.251 Deux mois plus tard, l’Iran acquiesça et accepta une suspension totale.252 Cette suspension, comme mentionné précédemment, fut de courte durée. A la suite de l’élection du président Ahmadinejad en août 2005, les leaders iraniens refusèrent catégoriquement les propositions faites par le triumvirat et l’Iran repris ostensiblement son programme nucléaire à Isfahan.253 En janvier 2006, l’IAEA confirma que l’Iran n’avait pas respecté les sceaux des Nations Unies, mis en place au cours de la période de suspension à l’usine de d’enrichissement de l’uranium de Natanz, afin de pouvoir reprendre l’enrichissement.254 En dépit des déclarations publiques de l’Iran, des preuves quant à une cessation réelle Durant la période de suspension indiquent le contraire.255 Le programme nucléaire iranien semble ne pas avoir été réellement affecté durant les négociations. Certains vont jusqu’à dire que non seulement aucun progrès n’a été accompli, mais que les négociations ont en fait entraîné une regression.256 Par exemple, le temps passé par les EU-3 sur les négociations ont pu permettre à l’Iran de diversifier sa base de clients pétroliers, d’augmenter ses profits et son réseau d’armement.257 De plus, les tentatives de négociations concernant les abus en matière de droits de l’homme n’ont pas d’impact significatif.258 Peu de temps après des négociations, l’Iran a notamment organisé des élections dans lesquelles les leaders cléricaux, qui contrôlent le régime, ont empêché la participation de nombreux candidats éventuels.259 _____________________________ 244 245 246 247 248 249 250 251 252 253 254 255 256 257 258 259

Voir CFR Report, supra note 150. Voir Westminster, supra note 37. Voir Struan Stevenson, Risks of Appeasing Iran’s Mullahs, WASHINGTON TIMES, 5 Jan. 2005. Stevenson est un membre écossais du Parlement européen. Voir id. Voir id. Voir id. Voir id. Matthew Clark, Britain Sets Nuclear Deadline for Iran, CHRISTIAN SCIENCE MONITOR, 9 Sept. 2004; voir aussi AGENCE FRANCE PRESSE, supra note 63. Iran-EU Agreement on Nuclear Programme, IAEA, 14 Nov. 2004. Voir BBC NEWS, supra note 70; voir aussi BBC NEWS, supra note 69. IAEA Confirms Iran Broke UN Seals at Nuclear Plant, REUTERS, 10 Jan. 2006. Voir génaralement Iran Profile: Nuclear Chronology, NTI.org. Voir Esfandiari, supra note 205; Voir aussi Symposium, supra note 51. Gaffney, supra note 4. Voir Esfandiari, supra note 205. Voir EU Report, supra note 205.

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Le régime a également considérablement augmenté le nombre de détenus politiques, ainsi que les executions.260 Cette méthode ne s’est, jusqu’à présent, pas révélée efficace, et il semblerait que les chances de futures discussions avec le régime soient également minces. L’Iran continue d’hésiter sur sa volonté de renouer des négociations avec les EU-3. Cependant, le directeur de l’IAEA, ElBaradei, soupçonne que, pour le moment, on en resterait au stade des « négociations pour les négociations. »261 Pendant ce temps, les iraniens vont sans doute « continuer de manipuler superbement les européens, faisant monter la pression, puis la faisant redescendre, en comptant sur les britanniques, les français et les allemands pour être reconnaissants quand ils retireront leurs menaces. »262 Alors que l’Administration Bush continue de soutenir cette approche, beaucoup de législateurs américains, dont le leader de la majorité sénatoriale, Bill Frist, qui pensent « qu ‘il est maintenant clair que les efforts internationaux pour stopper le programme atomique de l’Iran efforts ont échoué. »263 De même, le député, Brad Sherman, qui a longtemps fait partie du panel des Affaires étrangères et du « très démocrate » Sous-comité de la Non-prolifération, a récemment déclaré : « nous n’avons rien fait et la situation sur le terrain a empiré . . . nous avons des années et des années d’avertissement . . . nous faisons peu ou rien. »264 La députée, Ileana Ros-Lehtinen, présidente du Sous-comité du Moyen Orient et de l’Asie centrale, est certaine que les négociations continues avec l’Iran « lui donneront simplement davantage de temps pour construire son arsenal nucléaire. »265 Aussi, beaucoup d’anciens partisans de l’approche de l’engagement se sont détournés de l’approche modérée, car elle manque manifestement de résultats positifs.266 Alternativement, certains ont évoqué l’idée d’un dialogue plus agressif avec le régime, proposant l’utilisation de sanctions, dont le renvoi de la situation en Iran au Conseil de sécurité des Nations Unies.267 En effet, les EU-3 avaient envisagé cette nouvelle étape, à la suite de l’échec des négociations engagées avec l’Iran. Mais en réalité, cette menace peut se révéler vaine. L’Iran a en effet négocié plus de $100 milliards en accords commerciaux avec la Chine, et les leaders iraniens pensent probablement qu’ils seraient protégés par un veto chinois à toute sanction propose par les Nations Unies.268 De même, le sénateur Frist a mis en garde quant au fait que la Chine et la Russie pourraient s’opposer au Conseil de sécurité en raison « de leurs intérêts commerciaux et stratégiques significatifs en Iran » et « qu’un renvoi pourrait désormais éloigner des alliés dont l’aide sera nécessaire pour stopper le programme nucléaire iranien. »269 De plus, les EU-3 et beaucoup d’autres pays européens restent réticents à adopter une approche plus marquée avec l’Iran, de peur de déclencher la colère du régime.270 Cette crainte est sans doute justifiée, car l’Iran possède des missiles capables d’atteindre des cibles en Europe du sud et poursuit un programme d’armes agressif, dans le but de créer des armes à longue portée.271 _____________________________ 260 261

Voir Country Report, supra note 157; voir aussi 2005 UN Written Statement, supra note 179. Penketh, supra note 61.

262

Dennis Ross, Making Iran Play Ball, US NEWS & WORLD REPORT, 6 Juin 2005. L’Ambassadeur Ross a travaillé comme Coordinateur spécial pour le Moyen Orient, sous le président Clinton, et comme directeur du State Department’s Policy Planning Staff dans la première administration Bush. Il a reçu la Presidential Medal for Distinguished Federal Civilian Service de la part du président Clinton, et les Secrétaires Baker et Albright lui ont décerné la plus haute récompense du Département d’état. Il a aide aux négociations entre les israéliens et les palestiniens pour parvenir à l’Accord Intérimaire de 1995; il a également négocié les Accords d’Hebron de 1997, a facilité le traité de paix Israélo-jordanien de 1994, et a travaillé intensément pour rapprocher Israël et la Syrie. Voir Expert Biography: Dennis Ross, Washington Institute for Near East Policy, à http://www.washingtoninstitute.org/templateC10.php?CID=8, dernière visite 29 Déc. 2005. 263 264 265 266 267 268 269 270 271

Bill Frist, Reining in Iran, LOS ANGELES TIMES, 26 Déc. 2005. Lisa Friedman, Sherman Makes Iran His Mission, Los Angeles Daily News.com, 28 Déc. 2005. Carol Giacomo, Influential Congressman Faults Bush on Iran, WASHINGTON POST, 16 Déc. 2005. Voir IPC Report, supra note 3. Voir IPC Report, supra note 3. Voir Ross, supra note 262. Frist, supra note 263. Voir Stevenson, supra note 246. Voir Stevenson, supra note 246.

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La peur de provoquer l’hostilité de l’Iran n’est pas la seule motivation pour un engagement prudent de la part de certains pays européens. Certains affirment, en effet, que la plus grande crainte est économique. La France et l’Allemagne ont considérablement accentué leur relation commerciale avec l’Iran, augmentant ainsi les opportunités commerciales pour les sociétés dans ces pays.272 L’Iran est notamment récemment devenu le « premier partenaire commercial de l’Allemagne au Proche et au Moyen Orient . . . et les exportations allemandes en Iran s’élèvent à €3 574 milliards et les importations [depuis l’Iran] atteignent €391millions, » a annoncé Werner Schoeltzke, président de l’Association Allemagne-Proche et Moyen Orient.273 Bien que la présence de sociétés françaises ne soit pas aussi prononcée que celle de l’Allemagne, de nombreuses sociétés, telles que Total, Renault et Alcatel ont accru leur présence en Iran et y ont réalisé des profits substantiels.274 Les exportations françaises en Iran sont deux fois plus importantes qu’il y a deux ans.275 Le nombre de sociétés françaises enregistrées à Téhéran est passé d’un petit nombre il y a quelques années à plus de quarante en 2004.276 L’un des résultats de l’engagement est donc que la France s’est établi comme second plus important partenaire commercial de l’Iran en Europe.277

Indépendamment du fait que les actions de certains membres des EU-3 sont partiellement guidées par des intérêts commerciaux, le vrai problème est que l’approche actuelle de l’engagement n’est pas parvenue à offrir une solution diplomatique.278 On peut soutenir que les années de tentatives pour s’engager avec les leaders iraniens ont résulté dans un régime plus oppressif, qui a augmenté le nombre de ses alliés terroristes, tout en améliorant sa technologie nucléaire.279 L’expérience passée suggère que plus Téhéran dispose de temps, plus la situation est susceptible de s’aggraver.280 Cette conclusion a été récemment réaffirmée lors de négociations à Paris, durant lesquelles Hassan Rouhani, négociateur nucléaire principal de l’Iran, a déclaré que les stimulations économiques ne permettraient pas à l’Iran d’accepter une halte permanente de ses activités d’enrichissement.281 Les iraniens semblent apparemment penser qu’ils peuvent poursuivre leur développement de matériaux fissiles, sans encourir aucune conséquence réelle– et l’histoire récente laisse supposer qu’ils ont raison. Il n’y a pas de raison de penser que l’approche de l’engagement modifiera l’attitude de Téhéran dans le futur, plus que dans le passé. Certains pensent que si l’engagement modéré demeure la seule politique, le régime actuel poursuivra ses actions en toute impunité, et que la guerre se révélera alors inévitable.282 Toute politique d’engagement doit donc être associée à un avertissement sérieux, signifiant à l’Iran que l’Occident ne veut plus attendre pour atteindre ses objectifs.283

_____________________________ 272 273 274 275 276 277 278 279 280 281 282

Voir Borzou Daragahi, France Steps Up Its Investments in Iran, NEW YORK TIMES, 23 Juin 2004. Iran Becomes Germany’s Top Trade Partner in Mideast: Official, Payvand’s Iran News, 13 Avr. 2005. Voir Daragahi, supra note 272; see also Paris Arrests Used to Seal Deals, DAILY TELEGRAPH, 19 Juin 2004. Voir Daragahi, supra note 272. Voir Daragahi, supra note 272. Voir Expatriates Protest Business Contracts With Iranian Regime, WASHINGTON TIMES, 18 Juin 2004. Voir Paulo Casaca, People Power, Iranian-Style, WALL STREET JOURNAL, Oct. 18, 2004. Casaca est un membre portugais du Parlement européen. Voir Symposium, supra note 51. Voir Symposium, supra note 51. Voir Ross, supra note 262. Voir Westminster, supra note 37.

283

En réaction à la reprise des activités nucléaires de l’Iran, le président Bush a récemment réitéré sa menace que “toutes les options sont sur la table.” Jonathan Beale de la BBC dit que le président veut envoyer un “signal clair” au régime, mais note que l’action militaire n’était pas un signal réaliste. Voir Bush Warns Iran on Nuclear Plans, BBC, 13 Août 2005.

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C. Soutien à l’Opposition Iranienne La grande majorité des iraniens ont exprimé leur soutien à la démocratie et ont appelé à une fin de l’oppression et de l’exploitation de l’Islam.284 Des études indiquent que 94 pour cent des iraniens souhaitent une fin de la théocratie.285 Le sénateur du Kansas, Sam Brownback, a décrit la situation en Iran comme « réellement historique – le peuple résiste au régime par des moyens non violents et il l’affaiblit progressivement de l’intérieur. »286 Les citoyens iraniens ont pris part à un nombre grandissant de manifestations contre le régime, depuis un certain temps, et cela a continué après la récente élection du président Ahmadinejad. En 1999, les gens sont descendus dans la rue, pour demander la démission de Khamenei.287 Fin 2004, après que Khatami ait reconnu son rôle dans la préservation du régime, des milliers d’étudiants ont participé à une marche: « Khatami, vous êtes l’ennemi du peuple, assez de mensonges, où est notre liberté. »288 Aujourd’hui en Iran, les gens manifestent pour des questions sérieuses, comme les exécutions inhumaines, le manque de liberté politique et la suppression de la liberté d’expression artistique et personnelle.289 Une manifestations en 2005 a particulièrement montré le rejet de la théocratie par les jeunes; lors de cette manifestations, les étudiants de l’Université de Téhéran ont refusé d’assister aux cours, pour protester contre la nomination d’un clerc en tant que président de l’université.290 Le grand nombre de manifestations durant l’élection la plus récente reflétait le rejet généralisé du régime.291 En dépit des réprimandes brutales de Téhéran à l’encontre des manifestants, un nombre croissant d’iraniens continuent de protester contre les abus du régime.292 « Ils savent qu’à chaque fois qu’ils vont dans la rue pour protester contre le régime, ils peuvent être emprisonnés, torturés et peut-être tués . . . mais ils persistent à défier leurs oppresseurs par dizaines de milliers. »293 Le simple fait qu’une dissension généralisée existe face à l’oppression du régime témoigne de la force et de la détermination du peuple iranien pour faire changer les choses. Selon un article récemment publié dans The New York Times Magazine, les jeunes iraniens ayant parlé à l’auteur en Iran se sont révélés tellement hostiles au régime clérical, qu’ils pensaient que l’Iran serait mieux servi, si la religion était exclu de la politique en général.294 La réalité est que le peuple iranien n’est pas anti-américain. Les jeunes iraniens de moins de trente ans, qui représentent 70 pour cent de la population, « voient que les institutions démocratiques sont partout [en Occident] et qu’elles peuvent réussir. »295 Un sondage réalisé en Iran a montré que 74 pour cent des iraniens étaient en faveur d’une relation avec les Etats-Unis.296 46 pour cent d’entre eux pensent que les politiques américaines envers l’Iran sont correctes.297 _____________________________ 284

Voir Casaca, supra note 278.

285

Voir Future of Iran: Oppression or Democracy, Friends of a Free Iran, Meeting on Iran, E.U. Parl., 15 Déc. 2004 [Friends of a Free Iran ci-après]; voir aussi John Nowacki, Who’s Next? Laying Bets on the Next Regime to Fall, Enterstageright.com, posté le 28 Avr. 2003 à : http://www.enterstageright.com/archive/articles/0503/0503iran.htm.

286 287 288 289 290 291 292 293 294 295

Voir Brownback, supra note 112. Voir John Bacher, The Nonviolent Opposition in Iran, PEACEMAGAZINE, 1 Avr. 2005. Friends of a Free Iran, supra note 285; IPC Report, supra note 3. Voir Bacher, supra note 287. Students Protests Erupt in Iran’s Capital, Iran Focus, 27 Nov. 2005. Voir Timmerman, supra note 149. Voir Friends of a Free Iran, supra note 285. Voir Brownback, supra note 112. Michael Ignatieff, Iranian Lessons, NEW YORK TIMES MAGAZINE, 17 Juil. 2005. FOX News, supra note 56, citant le Sénateur Santorum.

296

Patrick Clawson, The Paradox of Anti-Americanism in Iran, MIDDLE EAST REVIEW OF INTERNATIONAL AFFAIRS JOURNAL, Vol. 8, No. 1, Mars 2004. Les deux homes responsables de l’élection ont été accuses d’avoir “publié des études non scientifiques,” et condamnés à huit et neuf ans de prison. 297

Voir id.

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34

Un second sondage a révélé que concernant le choix de gouvernement iranien parmi les quatre proposés, 45 pour cent étaient en faveur d’un changement de régime, même si cela devait se faire avec l’aide d’une intervention étrangère.298 Comme notre étude l’a souligné, la théocratie iranienne actuelle est un danger pour le peuple, et pour le monde. La diplomatie modérée a été poursuivie pendant trop longtemps, sans preuve de changement positif.299 Le message de l’Iran reste le même: « Mort à l’Amérique, mort à Israël. »300 Avec les dernières élections présidentielles iraniennes, qui ont été dénoncées comme n’étant ni libres, ni justes, l’espoir s’amoindrit encore davantage.301 Le président Ahmadinejad a été un Garde Révolutionnaire et un membre de la police de moralité iranienne.302 Il a aussi été rapporté, par d’anciens otages américains et un ancien reporter de la BBC, qu’il était peut-être l’un des étudiants qui a attaqué l’ambassade américaine à Téhéran, en 1979.303 Le président Ahmadinejad a reconnu son appartenance au groupe spécifique d’étudiants qui initia l’attaque, mais a démenti toute implication directe dans l’incident.304 De plus, le gouvernement autrichien affirme qu’Ahmadinejad est impliqué dans le meurtre du leader de l’opposition, Abdul Rahman Ghassemlou, en 1989.305 Le regard d’Ahmadinejad sur l’Amérique diffère peu de celle des clercs, qui contrôlent le gouvernement iranien. Il a clairement exprimé son opinion, indiquant qu’il ne voit pas le besoin pour l’Iran d’avoir une relation avec les Etats-Unis.306 Un analyste pour le Groupe de Crise Internationale, basé à Téhéran, a déclaré, après l’élection, que le résultat « fermait définitivement la prote à une avancée dans les relations entre l’Iran et les Etats-Unis. »307 Le secrétaire de la défense, Donald Rumsfeld, qui critiqua vivement la victoire d’Ahmadinejad aux élections, les qualifiant « d’élection truquées », nota que le nouveau président n’était « pas un ami de la démocratie. »308 Azar Mia, professeur de français à Téhéran et partisan du mouvement de réforme, déclara que « tous les programmes de réforme des huit dernières années sont désormais évanouis . . . nous sommes de retour au Moyen Age, peut-être même avant. »309 Le retour des « valeurs révolutionnaires » est déjà en place.310 L’exemple le plus récent de ces politiques est la décision du président Ahmadinejad d’interdire toutes les musiques occidentales sur les radios et les chaînes de télévision publiques, ainsi que les films étrangers promouvant « les pouvoirs arrogants » (i.e. , les Etats-Unis).311 Le porte-parole du Département d’état, Sean McCormack, a déclaré que le nouveau président iranien « faisait prendre un virage à 180 degrés à l’Iran, par rapport à la direction du reste du monde. »312 Il est intéressant de noter que, face à cette répression grandissante, la réaction du peuple iranien (majoritairement jeune) était encourageante. En réponse aux interdictions du président concernant la musique occidentale, une iranienne a dit, « Si un telle interdiction est en vigueur, les chaînes de télé et les radios ne feront plus d’audience. »313 _____________________________ 298 299 300 301 302

Voir id. Les trios autres choix: politique actuelle (13%), augmentation du pouvoir des réformistes (16%), changements fondamentaux dans la gestion (26%). Voir Casaca, supra note 278. Brownback, supra note 112. Wright and Fletcher, supra note 210. Voir Iran’s Presidential Election – The Ayatollah’s Democracy, CANADA BROADCAST COMPANY, 20 Juin 2005. Ahmadinejad était un instructor pour la malice du

Basij. 303 304 305 306 307 308 309 310

Voir John Simpson, Iran’s New Leader: a Familiar Face?, BBC, 27 Juin 2005. Sources: CIA Finds Iranian President Likely Not Hostage-Taker, CNN, 12 Août 2005. Certains officiels américains pensent qu’il n’était pas impliqué dans l’attaque. Voir Iran Wants Ties with Europe: Ahmadinejad, AGENCE FRANCE PRESSE, 4 Juil. 2005. Voir Ho, supra note 72. Victor Wants Modern Islamic Iran, CNN, 25 Juin 2005. Voir Ho, supra note 72; voir aussi id., Ahmadinejad a clairement dit “nous n’avons pas fait la révolution pour avoir une démocratie.” Karl Vick, Iran Hard-liner Calls For Unity After Vote, WASHINGTON POST, 26 Juin 2005. Voir Where Iran’s Candidates’ Stood, BBC, 25 Mai 2005. Ahmadinejad va certainement fermer les restaurants fast-food et demander aux homes de porter la barbe, comme

il l’avait fait quand il était maire de Téhéran. Voir aussi CNN, supra note 307, citant Ahmadinjad déclarant que les banques privées n’ont pas de “rôle positif ou constructif dans l’économie.”

Voir

aussi

[Iranian]

MP

Defends

Ahmadinjad’s

http://www.iranmania.com/News/ArticleView/Default.asp?NewsCode=32721&NewsKind=Current%20Affairs,

Segregation évoquant

les

Policy, politiques

Iranmania.com,

d’Ahmadinjad

qui

incluent

à la

discrimination entre les sexes er la mise en place de codes vestimentaires plus stricte pour les femmes. 311 312 313

Nasser Karimi, Iran’s President Bans Western Music, ASSOCIATED PRESS, 19 Déc.19, 2005. Ali Akbar Dareini, Music Still Plays in Iran, WASHINGTON TIMES, 22 Déc. 2005. Voir id.

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35

Les propos du président Ahmadinejad ont commence à prendre une tournure plus dure et plus fondamentaliste,314 pour ne pas dire radicale. Il a, par exemple, récemment déclaré que « la vague de révolution islamique atteindrait bientôt le monde entier. »315 Il y a des preuves intéressantes indiquant que le président est peut-être trop radical, même au sein du gouvernement pour certains.316 Néanmoins, il est apparent que le président Ahmadinejad a pris le contrôle du gouvernement et qu’il entreprend « une purge sans précédent » de ceux qu’il juge trop libérales.317 De plus, en dépit des réservations internes, certaines au sein du gouvernement, concernant les politiques du nouveau président, le droit auto-proclamé de l’Iran à poursuivre ses programmes nucléaires fait l’unanimité. Une indication précise de cela réside dans le passage retentissant d’une loi au parlement iranien, qui demanderait au gouvernement de bloquer l’inspection internationale des installations nucléaires, si l’Iran était renvoyé devant le Conseil de sécurité des Nations Unies.318 Selon le Sous-Secrétaire d’état aux Affaires étrangères, R. Nicholas Burns, « le monde doit réagir maintenant à ce changement radical dans l’attitude de l’Iran . . . au cours des huit années du gouvernement de Khatami, alors que la réforme était encore un espoir, beaucoup à travers le monde ont adopté une stratégie d’engagement avec l’Iran . . . n’est-il pas temps de considérer une approche différente, pour faire face au nouveau régime plus radical et plus intolérant?319 Etant donnés la menace grandissante d’un Iran nucléaire, des abus constants et horrifiants de l’Iran en matière des droits de l’homme sur son peuple, son influence régionale croissante et son soutien permanent au terrorisme au Moyen Orient, le changement de régime est la seule option réaliste.320 Pour qu’une telle action réussisse en Iran, le changement de régime ne peut cependant pas être imposé aux iraniens, de manière externe, par le biais d’une intervention militaire.321 Une telle action ne ferait qu’aliéner les iraniens et les pousseraient vers l’identification avec les clercs, qui contrôlent l’Iran.322 Une perspective différente est nécessaire. Beaucoup pensent que le moyen le plus efficace, pour faciliter un changement de régime, consisterait dans le soutien américain des réseaux dissidents forts, qui existent déjà en Iran et en dehors. Le petit fils de Khomeini a déclaré que la « meilleure façon serait que les Etats-Unis aident le mouvement en faveur de la démocratie . . . en Iran. »323 Une politique adéquate devrait donc être mise en oeuvre, pour déstabiliser et affaiblir encore davantage le contrôle du régime, jusqu’à la chute du regime.324 A partir de cette perspective, quand il sera évident que l’Amérique soutient les aspirations du people iranien pour la démocratie et la liberté, un nombre encore plus important de partisans dévoués se rallieront à la cause, en sachant qu’ils devront pas faire face seuls. Dans une moindre mesure, la démonstration de soutien pour une telle position renforcera l’influence de ceux qui continuent d’engager avec Téhéran, en garantissant que l’opportunité de discussions significatives entre dans sa dernière étape. _____________________________ 314

Iran’s Ahmadinjad Looks to Export ‘New Islamic Revolution,’ AGENCE FRANCE PRESSE, 30 Juin 2005, citant Ahmadinjad, “L’ère de l’oppression, des régimes hégémoniques, de la tyrannie et de l’injustice a atteint son apogée.” Selon la source, ceci fait reference aux Etats-Unis. 315 316 317 318 319 320 321

Id. Voir Robert Tait, Iran’s President Forced to Compromise on Oil Chief, GUARDIAN (London), 12 Déc. 2005. Voir Ramita Navai and Richard Beeston, Iran Sacks Diplomats in Purge of Reformers, TIMES (London), 2 Nov. 2005; Voir aussi Dareini, supra note 312. Iran Votes to Block Nuclear Inspections, FOX NEWS, 20 Nov. 2005. Burns, supra note 3. Voir IPC Report, supra note 3. Voir Ebadi and Ghaemi, supra note 227.

322

Voir Ebadi and Ghaemi, supra note 227; see also Warren Strobel, Bush Administration Planning to Increase Pressure on Iran, KNIGHT RIDDER NEWSPAPERS, posté le 7 Déc. 2004, déclarant que les iraniens “sont très suspicieux” de l’ingérence étrangère dans les politiques iraniennes. 323 324

Voir Clawson, supra note 296. Voir IPC Report, supra note 3.

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Comme décrit ci-dessus, le niveau de dissension interne contre le régime iranien s’est intensifié. Il a été soutenu que la méthode la plus efficace pour déstabiliser le régime, avec un risque minimal pour les Etats-Unis, était de soutenir l’opposition déjà en place, qui lutte contre le régime non élu iranien.325 Des expériences positives récentes concernant des initiatives de mise en place de la démocratie en Ukraine et en Géorgie forment des modèles constructifs; dans ces cas, le soutien et l’aide financière ont mené à un changement de régime positif.326 Il est intéressant de noter que les Etats-Unis avaient déjà commencé cette approche par rapport à l’Iran. En 2004, le gouvernement alloua $1 million à des organisations, afin qu’elles documentent les abus en matière de droits de l’homme en Iran et $500 000 à la Fondation Nationale pour la Démocratie pour la programmation.327 De même, les Etats-Unis avaient déjà engagé $3 millions en appropriations parlementaires et affecté une partie d’un autre budget de $6,5 millions, dans le but de faire avancer les droits à l’éducation et les droits de l’homme.328 De plus, l’Iran Freedom and Support Act de 2005, approuvé par plus de 300 des 435 législateurs, alloua $10 millions spécifiquement aux groupes de l’opposition iranienne.329 Généralement, les groupes cherchant à établir un gouvernement démocratiquement élu, plus séculaire, en Iran ont un objectif commun avec les Etats-Unis et peuvent donc devenir des alliés ou des atouts importants.330 La même chose est vraie pour les groupes de manifestants étudiants, qui ont, par le passé, démontré leur capacité incroyable, pour amener un changement politique à grande échelle. Les organisations possédant une structure et la capacité de mener à un changement de régime offrent le plus grand espoir de réforme démocratique et peuvent faire appel au soutien américain et d’autres sources internationales.331 Ce soutien peut aller du financement à la collaboration directe avec les organisations qui diffusent ou publient les messages pro-démocratiques.332 En réalité, les Etats-Unis dépensent déjà $14,7 millions par an pour diffuser la radio et les programmes télévisés Farsi en Iran.333 L’annonce publique du soutien aux organisations politiques dissidentes, qui menacent le pouvoir du régime, transmettrait un message ambigu au régime, indiquant que les Etats-Unis ne soutiendraient pas son étranglement du pouvoir.334 Les changements internes n’auront pas lieu en un jour – mais le soutien des groupes dissidents est un excellent moyen pour établir les fondations et générer un mouvement continu, vers un changement de régime pacifique en Iran. Il a souvent été dit que le monde se trouve dans une impasse extrêmement critique, en matière de relation avec l’Iran, alors que le pays accentue son soutien au terrorisme.335 Il est aussi important de noter que la Secrétaire d’état, Condoleezza Rice, a déclaré que le people iranien devrait se voir offrir la chance de « changer son propre futur. »336 _____________________________ 325

Voir IPC Report, supra note 3.

326

Voir Steven R. Weisman, US Expands Aid to Iran’s Democracy Advocates Abroad, NEW YORK TIMES, 29 Mai 2005. Ce plan a déjà été approuvé par le Département d’état, qui a affecté de l’argent pour les types de projet tels que la Géorgie et l’Ukraine. La politique a été un succès; certains dans les groupes de l’opposition, ayant reçu de l’argent des Etats-Unis ont, par la suite aidé à renverser des gouvernements répressifs. 327 328 329 330 331 332 333

Burns, supra note 3. Burns, supra note 3. Giacomo, supra note 265. Cette loi a été suspendue pour le moment par l’Administration Bush, qui a récemment favorisé les tentatives d’engagements par les EU-3. Voir Friends of Free Iran, supra note 285 Voir Friends of a Free Iran, supra note 285. Voir IPC Report, supra note 3. Sonni Efron and Mark Mazzetti, US May Aid Iran Activists, LOS ANGELES TIMES, 4 Mar. 2005.

334

Voir Friends of a Free Iran, supra note 285; see also Time to Reiterate Our Commitment to a Democratic Solution for Iran, Lettre des Membres du Congrès, 11 Mai 1999. “Il est impératif de nous associer avec le people iranien et leurs aspirations profondes à la démocratie et aux droits de l’homme, plutôt que d’envoyer des messages ambigus—particulièrement concernant le statut de l’opposition – vers un régime brutal qui continue ses actions violentes.” 335 336

Voir Brownback, supra note 112. IPC Report, supra note 3, Citant la Secrétaire d’état Condoleezza Rice.

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37

L’Administration Bush a indiqué qu’elle aimerait voir un gouvernement, légitimement élu, en Iran, « visionnaire et moderne, » et ne poursuivant pas « d’actions agressives basées sur le terrorisme et les armes de destruction massive. »337 Le président Bush a lui-même déclaré que le peuple iranien « méritait un système sincèrement démocratique. »338 La combinaison de ces sentiments avec une déclaration de soutien affirmative à la résistance iranienne, pourrait, dans le temps, amener le remplacement du régime actuel de Téhéran par un gouvernement démocratique pacifique, « né de la liberté. »339 Le Mujahedin-e Khalq (MEK)340 et le Conseil national de la résistance iranienne (CNRI) sont deux de ces organisations de résistance. Chacune de ces organisations consacre son existence à l’établissement de la démocratie en Iran.341

III. Retrait du MEK/CNRI de la Liste des FTO A. Le MEK/CNRI Le Mujahedin-e Khalq, membre du CNRI, coalition de l’opposition iranienne, est la plus grande et la plus soutenue des organisations anti-fondamentalistes, visant le remplacement du régime actuel, par un véritable système démocratique, respectant les droits de l’homme de manière égalitaire.342 Bien que le MEK ait précédemment pris part dans des attaques armées contre les militaires iraniens et des cibles gouvernementales, il n’a entrepris aucune action militaire, depuis 2001. En outre, le MEK a formellement renoncé à la violence, a volontairement désarmé et les forces de la coalition protègent désormais ces membres, comme des civiles, dans le cadre de la Quatrième Convention de Genève. Peu de temps après la désignation du MEK comme FTO en 1997, un groupe bipartisan de 220 membres du Congrès décrivirent l’organisation comme un « mouvement de résistance légitime. »343 Le MEK a un fort soutien,344 un support international considérable et un plan détaillé pour parvenir à un gouvernement temporaire en Iran, afin d’organiser un référendum pour déterminer le futur gouvernement, après le retrait du régime actuel. Une question importante reste cependant posée. Une lutte sans répit oppose l’extrémisme musulman, sous la bannière des clercs de Téhéran, et la philosophie musulmane modérée, défendue par le MEK.345 Expliqué en ces termes, il n’est pas difficile de conclure que le MEK, avec sa vision progressive, tolérante et pacifique de l’Islam, représente un défi de taille à la légitimité des clercs et explique l’acharnement de Téhéran à détruire ceux qui s’opposent à leurs philosophies extrémistes. _____________________________ 337 338 339 340 341

US Favors Different Kind of Regime in Iran: Rice, AGENCE FRANCE PRESSE, 1 Juin 2003, citant des déclarations de la Secrétaire d’état Condoleezza Rice. Statement by the President on Iranian Elections, Bureau du Secrétaire de Presse, Maison Blanche, 16 Juin 2005. Voir Friends of a Free Iran, supra note 285. Le nom official Farsi est Sazeman Mojahedin-e-Khalq-e Iran et la traduction anglaise est People’s Mojahedin Organization of Iran (PMOI). Voir Friends of a Free Iran, supra note 285.

342

Voir Remarks by Prominent Lawyers, Iran Experts and Dignitaries, Séminaire de Washington, 4 Mai 2004 [Séminaire de Washington ci-après]. Dans un discours concernant le status du MEK, Jean Yves de Cara, directeur de l’Institute for International Law, Université de Paris, affirmait que le but du MEK “est purement politique, ce sont des défenseurs des droits de l’homme et ils veulent voir la démocratie et les élections rétablies en Iran.” 343

House Majority Announces Call for Firm Washington Policy on Tehran, Removal of Mojahedin Resistance from State Department Terrorist List; 220 Members Sign “Statement on Iran’s Deeds,” Communiqué de presse, Congrès des Etats-Unis, 16 Sept. 1998 [Communiqué de presse du Congrès ci-après]. 344

Voir Transition 2005: US Policy Towards Iran, Council on Foreign Relations, 12 Jan. 2005. L’ambassadeur Mark Palmer, président directeur général de Capital Development Company et membre du Comité sur le Danger Présent, a déclaré “quelle que soit l’histoire du [MEK], il n’y a aucun doute qu’il existe beaucoup d’iraniens qui le supporte, en Iran et en dehors . . . c’est donc une opposition sérieuse.”

345

Pour une discussion sur les dangers liés aux vues extrémistes de l’Islam et les façons dont les bons musulmans peuvent avoir un effet positif, voir Abdurrahman Wahid, Right Islam vs. Wrong Islam, WALL STREET JOURNAL, 30 Dec. 2005. M. Wahid est l’ancien président indonésien et actuellement responsable et conseiller en chef de la Fondation LibForAll, organisation américano-indonésienne, basée aux Etats-Unis, travaillant pour réduire l’extrémisme religieux.

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38

L’issue de cette guerre d’idées n’est pas encore définie, mais elle présente une opportunité inhabituelle pour les stratèges américains.346 Le soutien du MEK, en permettant à l’organisation de répandre sa contre-idéologie musulmane modérée et progressive en Iran, pourrait permettre d’empêcher le fondamentalisme de se propager dans et en dehors de la région. L’histoire du MEK et son développement, décrits en détails ci-dessous, ne sont pas complètement compris, mais aident néanmoins à replacer les activités de l’organisation dans le contexte historique correcte. Le MEK a été victime d’une persécution continue, depuis sa formation en 1965. Le MEK a d’abord été visé, puis détruit par Mohammad Reza Shah Pahlavi (le Shah), dans les années 1970. Puis, en tentant d’établir la démocratie en Iran suite à la Révolution islamique de 1979, l’organisation a une nouvelle fois été décimée par le régime de Khomeini. En dépit des violences, le MEK a poursuivi son but d’établir la démocratie en Iran. Cependant, les gouvernements, essayant d’établir des relations plus amicales avec le régime clérical, ont utilisé le MEK comme concession dans les négociations diplomatiques.

1. La formation et la dissolution subséquente du MEK

En 1965, le MEK fut formé par un groupe d’universitaires iraniens, qui se revendiquait comme un mouvement politique islamique. Inscrite dans la tradition démocratique de la Révolution Constitutionnelle Iranienne, s’inspirant des idéaux du Premier Ministre Mohammed Mossadeq ainsi que des manifestations pro-démocratiques des années ’60, l’organisation avait une lecture libérale de l’Islam.347 Le MEK avait initialement soutenu le renversement du régime du Shah, faisant valoir le rejet de l’Islam par ce dernier ainsi que les persécutions subies par un grand nombre d’iraniens soumis à un régime

346

Id.

347

Voir Islamic Republican Party, Iran: Country Study, Federal Research Division, Library of Congress, à http://lcweb2.loc.gov/frd/cs/irtoc.html, dernièrement consulté le 20Juin, 2005 [ci-après IRP – Library of Congress].

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39

totalitaire348. Les membres du MEK se trouvèrent par conséquent particulièrement sur la ligne de mire du régime du Shah.349 Suite à une répression brutale dans les années ’70, le groupe cessa d’exister réellement. Plus de 95 pourcent de ses membres, y compris ses fondateurs et l’intégralité de son comité central, furent exécutés, emprisonnés ou assassinés.350 Tandis que les principaux membres du M.E.K étaient incarcérés, des membres subalternes du groupe formèrent une nouvelle organisation avec des idéaux se prévalant du marxisme et non de l’Islam. Le groupe s’appropria le nom de MEK afin d’établir et ancrer d’avantage sa légitimité351. Un renversement de fait eut lieu dès lors que des membres marxistes prenaient la relève de l’organisation352. Le MEK se fit alors connaitre en tant que MEK marxiste353. Les faibles traces qui demeuraient du MEK d’inspiration islamique, survécurent malgré tout dans les prisons où certains membres initiaux du MEK durant leur incarcération - et parmi eux Massoud Rajavi - devaient en 1979 rétablir le MEK islamique, et maintenir vivant son esprit d’origine354. Rajavi servait à l’époque une peine de prison à vie, sa peine de mort initiale ayant été commuée grâce à la pression de la communauté internationale355. En 1979, suite à une pression internationale grandissante, le Shah libéra Rajavi avec d’autres prisonniers politiques356.

2. La renaissance du MEK A sa libération, Rajavi prend la direction du MEK islamique et reprend au groupe marxiste les droits du nom de MEK357. Les marxistes abandonnent alors le nom pour emprunter celui de Peykar 358en 1979359Ce sera le début du MEK sous la direction de Massoud Rajavi tel qu’il existe aujourd’hui360.

Après la Révolution Islamique en 1979 et le renversement du régime du Shah, le MEK poursuit ardemment son objectif d’instaurer une démocratie en Iran361. Bien que le MEK ait débuté sous la forme d’une petite organisation – sachant que la

348

Voir Ervand Abrahamian, Yale University Press, The Iranian Mojahedin, 128, 135-136, 1989. L’auteur, Abrahamian, est un professeur distingué de la City University of New York qui enseigne au Baruch College Abrahamian est titulaire d’une maitrise et d’un DEA de l’Université d’Oxford et titulaire d’un doctorat de la Columbia University.Il a dans le passé enseigné à Oxford, à la NYU et à Princeton. Abrahamian suit depuis longtemps et par intérêt personnel l’histoire et la politique de l’Iran. Il n’est aucunement affilié avec le MEK ou le CNRI. 349 350 351

Voir id. Voir id. Voir id

352

Voir Kenneth Katzman, The People’s Mujahedin Organization of Iran, Rédigé pour le State Department Américain par le Service de Recherche du Congrès en Novembre 1992 [ci-après MEK State Department Report]; voir également Abrahamian, supra note 348.

353

354

Voir id. Voir Abrahamian, supra note 348 at 162.

355

Voir id; see also Casaca, supra note 278. Rajavi échappa à la peine de mort uniquement grâce à une mobilisation internationale organisée par son frère qui vivait alors en Suisse. 356

Voir id.

357

Voir Abrahamian, supra note 348 at 146-147, 183. Rajavi est resté secrétaire général jusqu’en 1989. Le titre est aujourd’hui attribué par vote pour un mandat de deux ans. Actuellement ce poste est occupé par Melle Mojgan Parsai, informaticienne ayant suivi ses études aux États-Unis.

358 359 360 361

Veuillez noter que l’organisation s’écrit parfois Paykar, en plus d’autres orthographes de traduction possibles. State Department Views of the People’s Mojahedin Organization of Iran, Congressional Record, 28 avril, 1992 [ci-après Visions du MEK par le State Department]. Voir Abrahamian, supra note 348 at 184. Voir Abrahamian, supra note 348 at 184.

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40

majorité de ses membres sortait de prison en 1979 – il prendra rapidement de l’ampleur362. Lorsque la première élection présidentielle a lieu en janvier 1980, le MEK parvient à rallier à sa cause un important soutien en Iran, dont celui de la communauté juive et kurde363.

Bien que Khomeiny et le MEK aient eu en commun la volonté de renverser le Shah, ils s’opposaient radicalement dans leur notion de l’Islam et de son rôle dans le nouveau gouvernement iranien364. L’interprétation de l’Islam par le MEK, de par sa modernité et sa tolérance, entrait en opposition directe avec la lecture fondamentaliste et répressive de Khomeiny365. Le MEK n’avait jamais envisagé un Iran gouverné par des fondamentalistes de l’Islam366. En réalité, les membres du MEK n’approuvaient pas le référendum organisé par Khomeiny en 1979367 et qui posait la question : « Une République Islamique, oui ou non ? ». Plus tard, le clergé islamique rédigera une nouvelle constitution, basée sur la doctrine de Khomeiny du velayat-e faqih (suprémacie absolue du règne du clergé). Rajavi et le MEK boycottèrent le vote populaire sur la constitution au motif que la doctrine s’appuyait sur des idées fondamentalistes religieuses et étaient en contradiction avec les idées démocratiques de la révolution de1979368.

Que Khomeiny ait empêché Rajavi de se présenter aux élections présidentielles alors que sa popularité prenait de l’ampleur, n’a rien de surprenant tant il le percevait à juste titre comme une menace pour la théocratie ; cette décision fut d’ailleurs critiquée par Abolhassan Bani- Sadr, lui-même élu président369. Lorsque l’interdiction fut faite à Rajavi de se présenter aux élections, de nombreux kurdes prirent le parti de boycotter ces élections370.

3. L’opposition du MEK à la théocratie

Il devint rapidement évident que Khomeiny n’avait nullement l’intention d’offrir une réelle démocratie au peuple iranien, ce qui poussa le MEK, comme de nombreux autres groupes d’opposition, à exprimer publiquement son désaccord371. Face à cette opposition grandissante, le Parti Républicain Islamique (PRI), un parti loyal à Khomeiny, incita ses membres à harceler

362 363 364 365 366 367 368 369 370 371

Voir globalement, Abrahamian, supra note 348. Voir Abrahamian, supra note 348 at 198 Voir IRP – Library of Congress, supra note 347. Voir IRP – Library of Congress, supra note 347. Voir IRP – Library of Congress, supra note 347. Mohammed Mehdi Khorrami, Thèse de Doctorat., The Islamic Revolution, PBS, 2 juin, 2005. Actuellement, Khorrami enseigne la langue perse et la littérature à la NYU. Voir Abrahamian, supra note 348 at 184. Voir le résumé, NEW YORK TIMES, 20 janvier, 1980 (1980 WLNR 2774675). Voir le résumé, NEW YORK TIMES, le 26 janvier, 1980 (1980 WLNR 272101). Voir Khorrami, supra note 367.

IRAN: DÉFIS ET CHOIX DE POLITIQUE ETRANGÈRE

41

et à attaquer les autres partis372. Le MEK devint la cible de ces agressions plus que toute autre organisation car il représentait le seul groupe capable de « défier sérieusement le PRI »373.

A mesure que la popularité du MEK gagnait du terrain, la résistance anti-Khomeiny prenait également de l’ampleur. Rajavi sut rallier un support de plus en plus massif, malgré le danger que représentaient ces manifestations publiques de soutien à Rajavi ou au MEK374. Khomeiny désigna rapidement le MEK comme le principal opposant au régime et organisa le Règne de la Terreur375. Il exhorta par la suite la population à participer à une chasse aux sorcières à travers tout le pays pour une purge à travers l’Iran devant contrer l’influence du MEK, qu’il désignait comme des « agents américains »376. En 1980 et 1981, les attaques perpétrées à l’encontre du MEK furent sans précédent377 et se traduisirent par une moyenne de 50 à 100 exécutions quotidiennes378. A ce jour, on compte plus de 120 000 dissidents qui ont été exécutés par le régime de Khomeiny, dont une « vaste majorité » de membres du MEK379. Face à cette montée des persécutions, Rajavi et le MEK ont continué à se rassembler pour tenter de renverser un régime qu’ils jugeaient plus despotique encore que celui du Shah, fondé sur un islam radical, et représentant un danger pour le peuple iranien comme pour le reste du monde en général.

4. L’exil à Paris

La guerre sans merci menée par Khomeiny contre le MEK et ses dirigeants, poussera Rajavi à quitter l’Iran pour Paris en 1981380. A Paris, il continuera à diriger le MEK, tout en s’engageant et collaborant plus activement avec des groupes d’oppositions autres que le MEK et avec des individus qui avaient rejoint le CNRI381. Rajavi, ainsi que de nombreux autres membres du MEK, restèrent en France jusqu’en 1986, année où le gouvernement français les chasse du territoire dans une

372

Voir IRP- Library of Congress, supra note 347.

373

IRP - Library of Congress, supra note 347; see also See Clawson, supra note 296. Le journal du MEK compte aujourd’hui le plus grand nombre de lecteurs et ses rassemblements rallient des dizaines de milliers de supporters.

374

Voir Eric Rouleau, Iranian Left and Right Slugging It Out in Chaotic Fighting, NEW YORK TIMES, 14 juin, 1981, traitant d’une manifestation au cours de laquelle Rajavi s’est adressé à une foule de 150 000 personnes au stade de Téhéran. Des« dizaines de milliers » de supporters du MEK s’étaient par ailleurs regroupés à l’extérieur du stade et, bien qu’agressé à coups de pierres et de briques par des supporters de Khomeini montraient une détermination à toute épreuve. La police, présente sur les lieux, n’intervint à aucun moment pour protéger les supporters du MEK qui étaient agressés mais en revanche venait en aide aux supporters de Khomeini dès lors que le camp adverse commença à riposter. On ignore le nombre de victimes. Voir Abrahamian, supra note 348 at 218. Moins d’une semaine plus tard, les manifestants défilèrent dans les rues à travers tout le pays pour exiger l’instauration d’une démocratie. A Téhéran seulement, on comptait 500 000 manifestants.

375

Voir The Reign of Terror, Iran: Country Study, Federal Research Division, Library of Congress, à http://lcweb2.loc.gov/frd/cs/irtoc.html, dernièrement consulté le 20 juin, 2005.

376 377 378

Iranian Lawmaker Says Alliance of Left and Right Opposes Regime, BOSTON GLOBE, 4 juillet, 1981. Voir The Reign of Terror, supra note 375. Voir The Reign of Terror, supra note 375.

379

Voir Ganje’i, supra note 148; Westminster, supra note 37, affirmant que des 120,000, 30,000 furent massacrés au cours de l’été 1988; Voir aussi Nader Shakiba, Profile of Iran’s Master Terrorist: Mohammed-Reza Iravani (a.k.a. Amir-Hossein Taghavi), IranFocus, 28 mai, 2005. « Nul ne saura jamais le nombre de prisonniers qui furent menés au peloton d’exécution au cours de l’été et de l’automne 1988, mais ces tueries ont profondément marqué l’äme de la nation iranienne…Selon les mots du Professeur Maurice Copithorne - dernier Rapporteur des Nations Unies pour l’Iran - le massacre a représenté l’un des plus sombres chapitres de l’histoire de la République Islamique. »

380

Voir 2 More of Tehran’s Leaders Die as Challenge to Revolution Grows, NEW YORK TIMES, 6 septembre, 1981.

381

Voir Iran Islamic Groups, Iran: Country Study, Federal Research Division, Library of Congress, à http://lcweb2.loc.gov/frd/cs/irtoc.html, dernièrement consulté le 20 juin, 2005. Rajavi avait créé le CNRI et invité à rejoindre sa coalition toutes les organisations démocratiques et individus qui s’opposaient au régime théocratique nouvellement établi.

IRAN: DÉFIS ET CHOIX DE POLITIQUE ETRANGÈRE

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tentative d’améliorer ses relations diplomatiques avec l’Iran382. D’autres expulsions de membres du MEK auront lieu en échange d’une promesse du régime iranien d’encourager le Hezbollah à libérer des otages français au Liban383.

5. Le mouvement en Iraq

Rajavi et le MEK gagnèrent ensuite le camp d’Ashraf en Iraq, d’où ils ont depuis continué à combattre la théocratie iranienne384. Deux raisons ont motivé ce choix: l’emplacement stratégique du camp et la dure réalité politique voulant qu’aucun autre pays n’acceptât d’accueillir le MEK par crainte de représailles de l’Iran385. Comme nous le verrons plus en détails dans la section V.A., les membres du MEK, conformément à un accord passé avec le dirigeant iraquien, s’étaient installés le long de la frontière iranienne et évoluaient en toute indépendance vis-à-vis de la politique iraquienne, dans un isolement les excluant des mesures et des activités du leader iraquien386.

6. Le MEK au camp d’Ashraf

Malgré les difficultés liées à l’isolement, le MEK sut émerger en tant que force de combat contre le régime iranien actuel. On sait que cette évolution aurait eu pour conséquence la pénétration en Iraq des Gardiens de la Révolution Iranienne qui lanceront des attaques contre le MEK387. La CIA a suivi le déroulement de quatre attaques de grande envergure commanditées par le régime iranien contre le MEK en Iraq entre 1994 et 2001388. Parallèlement, des membres du MEK ont sporadiquement mené des attaques contre le régime iranien, limitant leurs cibles aux représentants de l’armée et du gouvernement et à leurs bâtiments389. Au cours de récents débats à la Chambre des Lords de Grande-Bretagne, Lord David Alton, un pair indépendant de Crossbench affirmait sa conviction qu’à aucun moment des civils n’ont été visés lors des opérations militaires dirigées par les membres du MEK390.

382

Voir Concept of Neither East Nor West, Iran: Country Study, Federal Research Division, Library of Congress, à http://lcweb2.loc.gov/frd/cs/irtoc.html, dernièrement consulté le 20 juin , 2005.

383 384 385 386

Voir id. Voir Mohammed Mohaddessin, Enemies of the Ayatollah, Zed Books Ltd., 2004. Voir id. Voir id.

387

Voir Iran: Exiled Opposition Group Claim Destroying Security HQ South of Tehran, BBC, 17 août, 2001. La dernière attaque aurait eu lieu en 2001 lorsque l’Iran a lancé des missiles contre un camp du M.E.K. Voir aussi Déclaration faite par Saffi Yasseri, Ecrivain /Journaliste à Baghdad, 27 mai, 2005, qui relate en détails les terribles attaques par les forces iraniennes contre le camp du M.E.K en 1991.

388

Regime Strategy and WMD Timeline Events: Comprehensive Report, Special Advisor to the Director of Central Intelligence on Iraq’s WMD, 30 septembre, 2004, à http://www.cia.gov/cia/reports/iraq_wmd_2004/WMD_Timeline_Events.html. Ces attaques ont eu lieu en novembre 1994, septembre 1997 (frappes aériennes), juin 1999, et avril 2001.

389

Voir MKO Claims Attack by Combined IRGC, Army Force Repulsed, BBC, 8 juin, 2001. La dernière de ces trois attaques a eu lieu en août 2001 ; voir aussi Symposium, supra note 51.

390

Voir Mohaddessin, supra note 384, at 83, reprenant des affirmations faites par Lord Alton durant le débat de 2001 ; voir toutefois M.E.K Profile, Base de données sur le Terrorisme par le MIPT (Institut National du Mémorial pour la Prévention du Terrorisme) à http://www.tkb.org/Group.jsp?groupID=3632, dernièrement consulté le 5 juin 2005 [ci-après MEK Profile – MIPT], établissant un rapport sur l’incident et décrivant une attaque où des civils auraient été tués au mausolée de l’Imam Reza par le M.E.K ; voir toutefois Eric Avebury, Fatal Writ: An Account of Murders and Cover-Ups, British Committee of Iran Freedom, 2000, 43, où il est noté que malgré l’inculpation de deux femmes ayant avoué les meurtres, et qui disaient appartenir au M.E.K, l’organisation n’a jamais revendiqué les meurtres. Il est intéressant de remarquer que pour le meurtre d’innocents durant un pèlerinage, les deux femmes ne furent condamnées qu’à des peines de prison et à l’exil ; peines qui contrastent grandement avec les peines de mort

IRAN: DÉFIS ET CHOIX DE POLITIQUE ETRANGÈRE

43

Il précisait que toutes les victimes des conflits entre le MEK et les forces de la sûreté iranienne étaient des cibles légitimes appartenant à l’armée et au gouvernement391. En 2001, le MEK en tant qu’organisation prendra la décision unilatérale de cesser toute action militaire392. Le groupe n’a depuis commis aucun acte de violence393. 7. La réaction du MEK à l’invasion de l’Iraq par les États-Unis en 2003 Après l’opération « liberté en Iraq » entamée en mars 2003, les forces de coalition ont pris le contrôle du camp d’Ashraf suite à plusieurs attaques de mortiers sur le camp394. Les habitants d’Ashraf, obéissant aux ordres de leurs dirigeants, 395n’ont pas une seule fois tiré contre les forces de la coalition et ne leur ont opposé aucune forme de résistance396. Des rapports indiquent que les attaques de la coalition avaient été planifiées longtemps à l’avance dans le cadre d’un accord selon lequel l’Iran acceptait de soutenir les efforts américains en échange d’une collaboration à sa volonté d’éradiquer le camp d’Ashraf et tous les membres du MEK397. En dépit de tels accords, les forces de la coalition acceptèrent un cessez-le-feu avec le MEK qui à son tour renonçait à tout acte de violence et de terrorisme398. Lorsque les avocats militaires américains, au nom de la coalition, furent prêts à offrir au MEK un accord non-négociable, ils furent surpris par l’érudition des représentants de l’organisation et par leur réticence à accepter toutes les conditions dudit accord399. Les dirigeants du MEK, bien que très respectueux, firent preuve de prudence et restaient particulièrement réservés sur l’énoncé de cet accord400. Cette réaction incita le Capitaine Vivian Gembara - une des juges avocats général participant aux négociations du cessez-le-feu – a conclure que le MEK avait toutes les intentions de se conformer aux conditions posées401. Il apparaissait, autant qu’elle put en juger, que l’organisation avait honoré ces conditions402. Dans le cadre de cet accord, le MEK devait remettre l’intégralité de son armement aux forces de la coalition403. On notera que le communiqué de presse habituellement distribuées, sachant que ces femmes étaient censées appartenir au M.E.K. Par ailleurs, un officier des renseignements iraniens revendiquera plus tard cette attaque. Au regard de ces faits, Lord Avebury en conclut que le M.E.K n’était pas à l’origine de ces attaques.

391

Voir Mohaddessin, supra note 384.

392

Voir Iran: Exiled Opposition Group Claim Destroying Security HQ South of Tehran, BBC, supra note 387, où sont donnés des détails de la dernière attaque par le M.E.K au cours de laquelle le bâtiment des Forces de Sécurité d’Etat . Ce quartier général de la sûreté est connue dans la région pour être à l’origine des pire harcèlements et suppressions d’individus. Il est à noter également que cette attaque suivait une précédente attaque par les Gardiens de la Révolution contre le M.E.K en Iraq qui eut en premier lieu pour conséquence le massacre de civils dans les villages environnants. Voir MKO Claims Attack by Combined IRGC, Army Force Repulsed, BBC, supra note 389.

393 394 395 396

Voir Symposium, supra note 51. De plus, on ne trouve aucun article relatant de possibles attaques par le M.E.K à compter de cette période Voir Karl Vick, In a Delicate Balancing Act, US Woos Iranian Group in Iraq, WASHINGTON POST, 9 novembre, 2003. Voir Patterns of Global Terrorism 2004, US Department of State, avril, 2005 [ci-après Patterns – 2004] Voir Vick, supra note 394.

397

Voir Vick, supra note 394. « L’Iran aurait accepté d’apporter un soutien tacite à la campagne américaine contre Hussein – ennemi juré de l’Iran – mais exigea la suppression du Mujahedin [MEK] »

398

Voir Proclamation by the Commander, Multi-National Forces – Iraq, on the signing of the “Agreement for the individuals of the People’s Mujahedin Organization of Iran (MEK)” at Ashraf, Iraq, (2 juil, 2004) (on file with the author) [ci-après Proclamation].

399 400 401 402

Interview avec Captain Vivan Gembara, 11 mai, 2005 [ci-après Gembara Interview]. Id. Id. Id

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44

militaire mentionnait le comportement pacifique du MEK, un comportement qui aurait considérablement contribué au bon développement d’une mission de sécurisation des zones environnantes menée par la coalition404. Par la suite, diverses agences de sûreté américaines ont enquêté sur les résidents du camp d’Ashraf. Ces enquêtes incluaient des interviews exhaustives de chaque membre du MEK. En conclusion, les enquêteurs américains reconnaissait qu’il n’existait pas d’éléments qui prouveraient l’implication du MEK dans des actes de terrorisme405. Sur la base des résultats de cette enquête, les forces de la coalition accordèrent aux résidents du Camp d’Ashraf - parmi lesquels un grand nombre de femmes406 - le statut de civils protégés, prévu par la Quatrième Convention de Genève407. Dans une lettre rédigée par le commandant adjoint américain en Iraq, Major General Geoffrey Miller aux habitants d’Ashraf affirmait que la décision de reconnaître les résidents du camp d’Ashraf en tant que personnes protégées « envoyait un signal fort et constituait une première étape importante vers la résolution finale de [leur] situation individuelle408 ». A ce jour, les membres du MEK, sont désarmés et résident toujours dans le camp d’Ashraf, évoluant au quotidien aux côtés des forces de coalition stationnées dans cette zone409. Bien que les membres du MEK soient des civils protégés en vertu de la Convention de Genève et cohabitent avec les forces de la coalition, les objectifs essentiels du MEK restent inchangés. Il prône encore un gouvernement laïque, élu démocratiquement qui doit supplanter le régime fondamentaliste en place, et poursuit son action dans ce sens.

A ce jour, le MEK aurait constitué un réseau à l’intérieur de l’Iran et serait infiltré dans les hautes sphères du régime, dont celles de la recherche nucléaire410. Le MEK cherche avant tout à alerter le public sur les activités du régime à travers diverses formes de média et notamment par la transmission d’informations vers une chaine de télévision qui diffuse régulièrement des programmes pro-démocratiques en Iran, en Europe et Amérique du Nord411. Il collabore par ailleurs à l’organisation de mouvements sociaux412et soutient plus généralement les dissidents politiques par le biais d’une assistance financière et stratégique413.

403

Voir Coalition and Iraqi Police Work to Make Iraq Secure, Headquarters of United States Central Command, Multi-National Forces, Release No. 03-05-57, 17 mai, 2003 [ci-après Military Release].

404

Voir Military Release, supra note 403; voir aussi Letter from Tommy R. Franks, US General; US Central Command, Office of the Commander in Chief to Mohammed Mohaddessin, Chairman of Foreign Affairs Relations Committee, NCRI, 28 avril, 2003.

405 406

Voir Douglas Jehl, People’s Mujahedin: US Sees No Basis to Prosecute Iranian Opposition “Terror” Group Being Held in Iraq, NEW YORK TIMES, 27 juil, 2004. Voir Camp Ashraf, Iraq, LOS ANGELES TIMES, 19 mars, 2005.

407

Voir Proclamation, supra note 398; Letter from Geoffrey D. Miller, Major General, US Army, to People of Ashraf, Jul. 21, 2003 [hereinafter Miller Letter]. The letter is reproduced in Appendix A. Il est à noter toutefois, que bien que tous les résidents du camp aient été évacués pour des raisons de sûreté, les individus ne possédant pas la nationalité iranienne pourrait ne pas être techniquement considérés comme « personnes protégées » car elles sont en mesure de regagner leur pays d’origine, et éviter leur déportation vers l’Iran.

408 409 410 411

Miller Letter, supra note 407. Voir Camp Ashraf, Iraq, supra note 406. Voir Friends of a Free Iran, supra note 285; voir aussi IPC Report, supra note 3. Iran Jamming Exile Satellite TV, Iran Focus, 13 juil, 2005. Le régime a tenté de bloquer le signal de la chaine dans de nombreux pays.

412

A titre d’exemple, MEK prêté main forte à 10 jours de manifestations menées par des étudiants et des réformateurs en Iran le 10 juin 2003. Voir Bertrand Rosenthal, Embattled People’s Mujahedin Say They Are Stronger Despite Setbacks, AGENCE FRANCE PRESSE, 3 juil ., 2003.

413

Voir Maryam Rajavi, NCRI’s President in Exile, réunion au parlement européen, 15 déc., 2004.

IRAN: DÉFIS ET CHOIX DE POLITIQUE ETRANGÈRE

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8. Le soutien international au MEK

Il est difficile d’évaluer l’étendue de la popularité dont jouit le MEK aujourd’hui, sachant qu’un soutien publiquement déclaré au MEK représente un danger certain en Iran. Sa popularité en Iran à la fin des années ’70 et au début des années ’80, est toutefois sérieusement documentée414. Aujourd’hui encore, le nombre d’iraniens en exil qui ont participé aux manifestations et aux rassemblements pro-MEK reste important415. Pareillement, des manifestants en Iran aujourd’hui sont porteurs du même message que le MEK cherche à répandre depuis des décennies : un appel à la liberté416. Malgré le danger, nombre d’entre eux se réclament du MEK. On pense notamment aux milliers d’étudiants rassemblés devant l’université de Téhéran lors d’une récente manifestation, dont une partie exigeait la libération de prisonniers politiques, brandissant des photos de Massoud et Myriam Rajavi417.

Le MEK, en tant que membre majoritaire du CNRI, compte sur la coalition pour promouvoir des mêmes objectifs de démocratie et soutient ses projets de gouvernement intérimaire en Iran418. Aujourd’hui, le CNRI compte cinq organisations et plus de 500 individus, qui appellent unanimement à des élections libres et à la fin du régime actuel419. Le CNRI est une coalition organisée autour d’objectifs clairement définis pour l’Iran. On citera comme exemple sa ratification et son adoption de projets spécifiques pour la gouvernance de l’Iran, où seraient assurées la séparation de la mosquée et de l’état, l’autonomie du Kurdistan et l’égalité absolue des sexes, ethnies et religions420. Sachant qu’un grand nombre de ses membres constituants sont des femmes, le CNRI s’est engagé et a exprimé sa volonté d’œuvrer pour la sécurité et l’avancement du statut des femmes en Iran421 ce qui contribuerait au progrès de la condition de la femme dans tout le Moyen-Orient. En outre, le CNRI a créé un parlement-en-exil qu’il propose de rapatrier en Iran pour les six mois qui suivront la dissolution de la théocratie, et d’organiser dans cette période des élections directes d’un nouveau gouvernement par le peuple 422.

Le MEK comme le CNRI jouissent d’un large soutien qui s’explique par une longue tradition commune de défense de la liberté et de la démocratie en Iran et par une vision en adéquation avec les idéaux de la communauté internationale et de

414

Voir Rouleau, supra note 374; voir aussi IRP- Library of Congress, supra note 347.

415

Voir Iranian Exiles Held Rally, Call for End to Clerical Regime, Iran Focus, 10 fév, 2005. Un rassemblement récent qui était prévu à Paris puis déplacé à Berlin prévoyait la participation de 40 000 personnes venues de toute l’Europe avant que le gouvernement allemand ne l’interdise au dernier moment. Bravant l’interdit, une foule de manifestants a malgré tout déferlé dans les rues et le rassemblement a bien eu lieu pour cause d’état d’urgence.

416 417

Voir Bacher, supra note 287. Iran Opposition Airs Footage of Demonstrations, Iran Focus, 13 juil., 2005.

418

Voir NCRI Overview: National Council of Resistance of Iran, NCRI, à http://www.ncriran.org/modules.php?name=News&file=article&sid=87, dernièrement consulté 27 juil., 2005

419

Voir id.

420

Voir Programs for the Future, Foreign Affairs Committee of NCRI, NCRI, 8 mai, 2005, à http://ncr-iran.org.

421

Voir id.

422

Voir NCRI Overview, supra note 418.

IRAN: DÉFIS ET CHOIX DE POLITIQUE ETRANGÈRE

46

l’occident423. Ce soutien internationale est illustrée dans une lettre d’appui adressée au MEK et qu’une majorité des membres de la Chambre des Députés américaine a signée en 1998424.

En septembre 2002, suite au choix qui fut donné aux législateurs britanniques d’approuver ou de rejeter une liste entière qui proscrivait en bloc 21 organisations étrangères soupçonnées de terrorisme425, 331 membres de la Chambre des communes du Parlement (dont une majorité des Communes), et 122 membres de la Chambre des Lords firent la déclaration commune suivante : « [nous] soussignés, soutenir le combat du peuple de l’Iran et du peuple de l’organisation des Moudjahidin du peuple [MEK] pour la victoire de la démocratie et des droits de l’homme comme un élément essentiel à l’éradication du terrorisme dans notre pays comme à l’étranger 426».

Peu après, 150 membres du Congrès américains adressèrent une lettre au président George W. Bush plaidant pour un changement de régime en Iran et affirmant spécifiquement leur soutien au MEK, pressenti comme le plus fiable des groupes d’oppositions427. Au Royaume-Uni, au cours des derniers symposiums des parlementaires ont étudié la possibilité de retirer le MEK de la liste des diverses groupes terroristes, en invoquant le soutien que depuis quinze ans le Parti Travailliste apporte au groupe428. Plus récemment encore, 405 législateurs britanniques dont 279 membres du Parlement et 126 pairs ont désigné l’étiquette d’organisation terroriste attribuée au MEK comme « le principal obstacle » à la démocratisation de l’Iran429. En fin 2005, 1300 avocats britanniques ont appelé le gouvernement à retirer le MEK de la liste des organisations terroristes430. Le MEK jouit également d’un soutien important en Irak, qui se révèle notamment dans une pétition de 2,8 millions d’iraquiens, appelant à la reconnaissance du MEK en tant que « mouvement politique légitime431 ». Le dr. Abdullah Rasheed Al-Jabouri, ancien gouverneur iraquien de la province de Diyala, considère que la présence du MEK a constitué un facteur de sécurisation pour le peuple face aux menaces iraniennes432, tandis que l’ancien directeur du Groupe d’Études sur l’Iraq David Kay a pour sa part déclaré : « Je pense qu’une des raisons pour lesquelles nous ne…voulons pas renoncer au [MEK] aussi facilement que d’autres groupes, est qu’il [sic] représente notre seul atout humain en [Iran]433 ». Par ailleurs, comme nous le

423

Voir La Lettre d’ Elton Gallegly, Président du sous-comité de l’hémisphère occidentale adressée à Soona Samsami, représentant du CNRI aux ÉtatsUnis, 24 sept.,1998, exprimant sa gratitude pour les informations que le M.E.K et le CNRI transmettent avec tant de « courage ». 424

Voir Members Sign “Statement on Iran’s Deeds,” Congress of the United States Press Release, supra note 343.

425

House Magazine (UK), PARLIAMENTARY WEEKLY, No. 1006, Vol. 27, 30 sept., 2002. Les députés n’eurent pas la possibilité ni l’occasion d’étudier séparément chacune des organisations de la liste. Ainsi le M.E.K, la seule organisation à prôner la démocratie et les respects des droits de l’homme, figurait sur ladite liste aux côtés d’Al Qaida. Devant proscrire al Quaida, il n’eurent d’autre choix que de proscrire le M.E.K également. 426

Id.

427

Voir Iran Statement, supra note 106.

428

Voir Symposium, supra note 51. De fait, les membres du M.E.K ont été conviés aux conférences annuelles du parti travailliste.

429 430

British Lawmakers Announce Support for Iran Opposition Group, Iran Focus, 13 déc., 2005.

British Lawyers Want Iran Opposition Group Delisted, Iran Focus, 29 nov., 2005.

431

Voir Excerpts from Congressional Briefing by Iran Human Rights and Democracy Caucus, présenté par Hon. Tom G. Tancredo, 18 mai, 2005 [ci-après Congressional Briefing]. Il est à noter également que parmi les 2,8 millions de signataires, nombreux étaient kurdes.

432 433

See Al-Jabouri, supra note 109. Brookings Transcript, supra note 213, at 63.

IRAN: DÉFIS ET CHOIX DE POLITIQUE ETRANGÈRE

47

soulignerons plus loin, il n’existe aucune charge crédible établissant que le MEK ait jamais été impliqué dans des actes de suppression d’autres groupes en Iraq, y compris les kurdes ; ces derniers ayant d’ailleurs signé une pétition de soutien au MEK.434

Le soutien important dont jouissent le MEK et le CNRI en Occident et au Moyen-Orient, est donc sans surprise au cœur des préoccupations des leaders iraniens qui s’inquiètent de leurs activités. Bien que le régime persiste à nier l’existence d’un soutien au MEK en Iran, ce point de vue est démenti par l’évidence et par l’effort acharné du régime à détruire le MEK. Il est aujourd’hui largement admis que le gouvernement iranien est plus préoccupé par le MEK que par tout autre groupe d’opposition basé à l’étranger435.

9. La campagne du régime iranien pour l’éradication du MEK

A travers les années, le régime iranien a mené une campagne intensive visant à l’éradication des membres du MEK et de leur influence. Le régime continue à exécuter quiconque en Iran affiche son soutien au MEK436. Dans une même ligne d’actions, il semblerait que le régime saisisse la moindre occasion pour attribuer au MEK tout acte de violence perpétré en Iran. On soupçonne en réalité le gouvernement iranien de mettre en scène ces violences dans le but de discréditer ses opposants politiques437. A titre d’exemple, un récent attentat à la bombe en Iran qui est aussitôt imputé par le régime au MEK tandis que des rapports subséquents révèleront que le régime lui-même est l’auteur de l’attentat 438. Depuis que le MEK est en exil, le régime iranien a développé439 sa propagande et sa campagne de violence contre l’organisation. Le régime n’a pas hésité à exporter ses méthodes de violence contre les dissidents basés à l’étranger, visant principalement les membres et les sympathisants du MEK440.Un rapport émis par le Haut Commissariat des Réfugiés (HCR) des Nations-Unies en 2001 maintenait que les « assassinats politiques d’opposants basés à l’étranger sont la signature répétée du régime depuis la Révolution iranienne, à commencer par l’élimination de Tabatabaei, un porte-parole du Shah aux États-Unis. 441» Des agents

434

Voir Al-Jabouri, supra note 109; voir également Jonathon Wright, US Says Iraq-based Iran Opposition Aids Iraq Gov’t, REUTERS, 22 mai, 2002, citant les affirmations d’un leader kurde sur l’innocence du M.E.K.

435 Voir Opposition Political Parties in Exile: Islamist Groups, Iran: Country Studies, Library of Congress, à http://lcweb2.loc.gov/frd/cs/irtoc.html, dernièrement consulté le 20 juin, 2005.

436 437

Voir Abrahamian, supra note 348 at 257. Voir Timmerman, supra note 149.

438

Voir Timmerman, supra note 149. Juste avant les récentes élections dix personnes ont été tuées dans un bombardement. Bien que le régime ait accusé le M.E.K, de fortes présomptions demeurent sur la responsabilité directe du régime iranien lui-même. On sait à présent que ce dernier s’est engagé dans une campagne de violence avec le dessein de jeter le discrédit sur une organisation spécifique ou pour instiller la peur à la veille d’élections.

439

Voir Avebury, supra note 390 at 59-60. La campagne de propagande par le régime n’a pas seulement visé le M.E.K, mais a également été dirigée contre les États-Unis. Lord Avebury cite une lettre des renseignements iraniens à un journal iranien les encourageant à accuser spécifiquement les États-Unis des assassinats commis à l’étranger et à définir ces actes dans la presse comme des tentatives de la part des États-Unis d’interférer dans les relations Iran-Europe.

440

Voir Sancton, supra note 80; voir aussi Iran Presidential Candidate Hints at Bombings Being “Insider Jobs,” Iran Focus, 14 juin, 2005. La police secrète iranienne, le Ministre des Renseignements et de la Sécurité, « se sont révélés coupables d’implication dans une série d’attentats à la bombe et d’assassinats dans les années ’90. » voir également Iran: Country Report, UNHCR/ACCORD: 7ème séminaire sur l’Information d’Origine des Pays Européens, Berlin, 11-12 juin, 2001, affirmant « qu’il existe un danger particulier pour les iraniens qui soupçonnés de liens avec le M.E.K ».

441

Voir id. at 91.

IRAN: DÉFIS ET CHOIX DE POLITIQUE ETRANGÈRE

48

des renseignements iraniens ont même déclaré avoir participé à des assassinats à l’étranger442. Un membre important du clergé iranien, Ruhollah Hosseinian, a par ailleurs affirmé qu’un homme – Sa’ eed Emami – ancien ministre-adjoint des renseignements et assassin notoire agissant pour le compte du régime, était personnellement responsable de centaines d’attaques contre les membres du MEK à l’étranger443.

Il existe de nombreux cas documentés d’assassinats politiques perpétrés sous les ordres du régime iranien. On sait notamment qu’un tribunal berlinois a rendu son jugement en déclarant qu’en 1992 que Khamenei, Rafsanjani et d’autres figures du régime avaient commandité l’assassinat d’un opposant iranien d’origine kurde qui résidait en Europe444. En 1990, par ailleurs, Kazem Rajavi, frère de Massoud Rajavi et défenseur des droits de l’homme renommé est assassiné à Genève445. Le gouvernement suisse a identifié 13 fonctionnaires iraniens, dont le passeport portait le tampon de « mission spéciale », comme responsables de cet assassinat446. Les français arrêteront plus tard deux de ces hommes mais les relâcheront rapidement malgré les demandes répétées de la Suisse et un ordre d’extradition447. Un autre membre de l’opposition, de nationalité américaine, fut tué de sept balles dans son appartement parisien448. La police française confirmera par la suite que l’assassinat a été commis par un membre des renseignements iraniens449.

Un épisode récent rapporté dans le Washington Post fait le récit de multiples tentatives de meurtres visant un autre membre du CNRI, dont une en Turquie, dont il échappera de justesse malgré plusieurs blessures par balles450. La police turque appuiera des rapports signalant la présence d’agents opérant en Turquie avec l’intention d’assassiner des dissidents iraniens451. Le régime iranien est en outre prêt à faire usage d’une artillerie plus lourde dans sa volonté d’éradiquer les membres du MEK. En 1996, un super-mortier de 320 mm est découvert par des fonctionnaires gouvernementaux en Belgique à bord d’un navire iranien amarré à Anvers452. Il fut plus tard déterminé que cette arme, expédiée par le ministère des

442 443 444 445 446

Voir Avebury, supra note 390, citant de nouvelles sources iraniennes, Asr-e Azadegan, 14 déc., 1999. Voir Avebury, supra note 390 at 62. Voir Hossein Abedini, Rafsanjani and His Hit Man, WASHINGTON TIMES, 16 juin, 2005. Voir id. Voir id.

447

Voir Swiss Press on with 15-Year Probe into Killing of Iranian Opposition Leader, AGENCE FRANCE PRESSE, 24 avr., 1005. La France a invoqué des impératifs de sécurité nationale comme motif de leur libération et de leur renvoi vers l’Iran.

448 449

Voir Court Eyes Iranian Assassination Case, UNITED PRESS INTERNATIONAL, 25 avr., 2005. Voir id. Par ailleurs, le frère de l’homme a gagné un procès de 12 millions US$ contre le régime.

450

Voir Abedini, supra note 444. Il y a 15 ans, Hossein Abedini fut blessé par balle lorsqu’en voiture il avait été immobilisé par deux véhicules d’où avaient surgi des hommes armés et faisant feu sur lui. Atteint à la poitrine et à l’estomac il survivra de justesse. Plus tard les mêmes hommes tentèrent de l’assassiner à l’hôpital. Une chaine de radio iranienne par la suite annoncera que cette attaque visait en fait un président retiré du NCRI.

451 452

Voir Safa Haeri, Ankara Accuses Tehran for Murder of Turkish Journalists, Iran Press Service, 18 mai, 2000. Voir Avebury, supra note 390 at 62.

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49

renseignements iraniens, était destinée à une attaque contre le président en exil du CNRI453. Précédemment, une arme similaire avait été saisie à Bagdad, destinée à servir contre le MEK basé en Iraq454. Bien que les revendications d’assassinats par le régime semblent avoir diminué durant le mandat de Khatami, tout porte à croire que Téhéran est toujours engagé dans de telles pratiques dans une volonté de semer la terreur parmi les expatriés iraniens. On pense aux agents des renseignements iraniens qui multiplient les tentatives d’intimidation envers les dissidents basés à l’étranger par des lettres de menace et d’appels téléphoniques455. Plus inquiétant toutefois, est la récente conférence de presse tenue à Washington DC par des agents iraniens connus qui tentaient de discréditer les groupes d’opposition iranienne456. Cette réémergence des opérations iraniennes sur le territoire nord-américain, en inquiète plus d’un y compris des membres du Congrès américain qui observent avec anxiété le signe d’une nouvelle montée en puissance de l’Iran et de sa volonté d’intervenir dans la communauté internationale457.

10. La désignation du M.E.K/CNRI en tant qu’Organisations Terroristes Étrangères

Sachant l’ampleur du soutien international apporté à MEK, et sachant également que le régime iranien voit en lui son principal ennemi, un grand nombre de personnes – et parmi elles des américains, des européens et des iraniens – ont été surprises d’apprendre que le MEK figurait sur la liste d’organisations terroristes depuis octobre 1997458. Cette désignation place le groupe sur une liste de 30 organisations étrangères considérées terroristes. Des rapports ont rapidement révélé que le MEK avait été désigné organisation terroriste pour des raisons politiques459 et que c’était le régime iranien qui avait spécifiquement exigé la désignation du MEK460. Il existe des rapports indiquant que l’administration Clinton aurait accédé à la demande iranienne en premier lieu comme geste de bonne volonté; puis en second lieu, dans une tentative de mettre fin à des années de relations diplomatiques hostiles ; ce sera en dernier lieu en vue de gagner les faveurs du président Khatami nouvellement élu et alors considéré comme le réformateur susceptible de libérer l’Iran de l’étau fondamentaliste des Ayatollahs461. Une documentation substantielle indique 453

Voir Avebury, supra note 390 at 62-63. En janvier 2000, un diplomate iranien haut placé révèlera que l’arme avait bien été expédiée par le ministère des renseignements iraniens.

454 455 456 457 458

Voir Avebury at 390 at 62. Voir VEVEK Steps Up Anti-dissident Activities in Europe, Iran Focus, 8 juin, 2005. Claude Salhani, Analysis: Iranian Agents in U.S.?, UPI, 25 oct., 2005. Une lettre de membres du Congrès au Secrétaire Honoraire Michael Chertoff, de la Division de la Sûreté Nationale, 4 nov., 2005 (Stop Ahmadinejad’s Call for Terrorism). Foreign Terrorist Organizations, Press Release, Office of the Coordinator for Counterterrorism, US Department of State, 8 oct., 1997.

459

Voir Scott Peterson, Why the US Granted “Protected” Status to Iranian Terrorists, CHRISTIAN SCIENCE MONITOR, 29 juil., 2004, citant Magnus Ranstorp, directeur du Département d’Études sur le Terrorisme et la Violence Politique the Head of the Center for the Study of Terrorism and à l’université St. Andrews en Écosse, « le processus de désignation de [terrorisme] est souvent détourné à des fins politiques, et peut virer avec l’air du temps. » voir aussi The “FTO List” and Congress: Sanctioning Designated Foreign Terrorist Organizations, Congressional Research Service, Library of Congress, 21 oct., 2003, où il est indiqué la fréquente concurrence des priorités lorsqu’il s’agit d’opérer une telle désignation, avec le désir d’utiliser un groupe comme « levier pour un autre dessein de politique étrangère ». Au regard des motifs douteux derrière de telles listes, des affirmations sur la nature terroriste d’une organisation peuvent « sonner creux ».

460

Voir Norman Kempster, US Designates 30 Groups as Terrorists, LOS ANGELES TIMES, 9 oct., 1997, citant un fonctionnaire anonyme de l’administration Clinton ; voir aussi Letter from Mohammed Mohaddessin, Chairman of Foreign Affairs Committee, to Richard Boucher, Assistant Secretary of State, 27 fév., 2003, affirmant que dans un discours de 1999, Martin Indyk, alors Secrétaire d’État Adjoint pour les Affaires du Proche-Orient avait révélé que la désignation d’organisation terroriste avait été expressément demandée par le régime iranien.

461

Voir id.

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50

que l’UE-3 avait accepté de maintenir le MEK sur la liste des organisations terroristes en échange d’une promesse de l’Iran d’abandonner ce que l’on soupçonnait être un programme d’armement nucléaire, une demande pourtant déjà exprimée auprès de l’Iran en vertu du Traité de Non-prolifération462. On sait que les pays européens obtempèrent aujourd’hui encore face à l’exigence de l’Iran de maintenir le MEK sur la liste des organisations terroristes. De son côté, l’Iran a rompu ses promesses faites à l’UE-3 et a repris son programme de développement nucléaire. Être sur la liste des Organisations Étrangères Terroristes n’est pas sans conséquences sérieuses463. Si c’est le cas pour n’importe quelle organisation, c’est particulièrement vrai pour le MEK étant donné les inquiétudes légitimes que suscitent les motivations politiques derrière cette désignation. Cette mise à l’index a deux effets immédiats : elle interdit à tout étranger affilié de près ou de loin au MEK de pénétrer le territoire américain et entraine le gel de tous les biens possédés par l’organisation aux États-Unis464. Il est par ailleurs interdit à toute personne aux États-Unis de fournir un « soutien matériel » à l’organisation. C’est ainsi qu’au long terme on assiste à la disparition de ces organisations, ou du moins de leur présence publique465. La désignation du MEK a eu pour conséquence son impuissance à rallier un nouveau soutien aux États-Unis, ce qui a remis gravement en cause ses objectifs de réforme démocratique en Iran. En réaction au maintien du MEK sur la liste noire, et plus récemment à l’ajout du CNRI (étiqueté alter ego du MEK par le Ministère des Affaires Étrangères) d’éminents avocats, des législateurs et des universitaires dans divers pays ont cherché à obtenir la suppression du MEK de la liste des organisations étrangères terroristes466.

On a à maintes reprises remarqué que la suppression du MEK de la liste exprimerait de manière univoque le soutien des pays occidentaux envers le peuple iranien et son désir de liberté467. Par ailleurs, la suppression de la liste servirait d’ « argument décisif pour … convaincre l’administration d’adopter une attitude plus radicale envers le régime iranien ».468 Le membre du Congrès Ileana Ros-Lehtinen, membre de la House International Relations Committee, considère que le cas du MEK mérite d’être réexaminé sous un regard nouveau et reste persuadée que le groupe ne doit pas figurer sur la liste469. Le professeur Raymond Tanter de l’université de Georgetown, et qui partage la présidence du Iran Policy Committee, exige expressément la suppression du MEK de la liste et argue que cette liste fait en réalité obstacle à toute « organisation légitime » de

462 463 464 465

Voir MEK Included in Incentive Offer from Europe, ASSOCIATED PRESS, 22 oct., 2004; voir aussi Symposium, supra note 51. National Council of Resistance of Iran v. Dep’t of State, 251 F.3d 192 (D.C. Cir. 2001). Voir Foreign Terrorist Designations – Fact Sheet, Office of Counterterrorism, US Department of State, 23 mar., 2005. Voir id.

466

Voir Determination Pursuant to Section 1(b) of Executive Order 13224 Relating to the Mujahedin-e Khalq (MEK), US Department of State, Public Notice 4447, 68 Fed. Reg., No. 158, 15 août., 2003; voir aussi Terrorist Designation with Regard to European and International Law: The Case of the MEK, International Conference of Jurists, Paris, 10 nov., 2004. A titre d’exemple, 500 juristes d’Europe et d’Amérique du Nord ont soumis leur expertise juridique au cours d’une conférence internationale à Paris en novembre 2004, détaillant les facteurs permettant de conclure que le M.E.K n’est pas une organisation terroriste et que l’inclusion du M.E.K en tant que telle constitue un vice de forme.

467

Voir Westminster, supra note 37; see also Patrick Goodenough, Bush Urged to Support Iranian Opposition, CNSNews.com, 10 mars, 2005, citant Bush dans un récent discours dans lequel il disait en s’adressant au peuple iranien « [tandis] que vous revendiquez votre liberté, l’Amérique la revendique avec vous ».

468 469

Claude Salhani, Politics & Policies: The Iran Dossier, WASHINGTON TIMES, 10 janv., 2005, citant le président du Strategic Policy Consulting. Voir Aaron Glantz, Laying the Groundwork for War with Iran, Antiwar.com, 19 avr. 2005.

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poursuivre des « objectifs nobles et recommandables »470. MEK a également attiré un soutien important de la part des anciens membres de l’armée américaine qui sont entrés en contact avec les membres de l’organisation en Iraq. Plus précisément, le Capitaine Vivian Gembara, juge avocat général qui a participé aux négociations de cessez-le-feu avec le MEK en Iraq, est convaincu que le MEK est un mouvement légitime qui ne mérite pas d’être stigmatisé en tant que « terroristes471 » une désignation qui relègue indistinctement le MEK au rang de groupes tels qu’al-Qaïda. Elle pense par ailleurs que les ÉtatsUnis ont manqué des occasions décisives de collaborer avec le MEK en Iraq et est fermement convaincue que le MEK peut encore constituer un atout pour les forces de la coalition472.

Dans une démarche similaire, le Lieutenant Colonel Thomas Cantwell, qui commandait le bataillon stationné au camp d’Ashraf et qui eut des échanges avec le MEK, appelle à la suppression de ce dernier de la liste des organisations terroristes, posant la question : « J’y étais…où sont les terroristes ? ».473Comme nous le mentionnions plus haut, l’idée que le MEK n’aurait jamais dû figurer dans la liste des organisations étrangères terroristes est solidement étayé. Aujourd’hui, le soutien pour la suppression du MEK de la liste est plus fort que jamais étant donné l’indéniable changement des circonstances de son existence474.

B. L’analyse des critères appuyant la demande de suppression du MEK de la liste des Organisations Étrangères Terroristes

Pour répondre aux critères qualifiant une entité d’organisation étrangère terroriste, les critères suivants doivent être vérifiés: l’entité doit être étrangère, être engagée dans une activité terroriste ou détenir la capacité et l’intention de s’engager dans une activité terroriste ; enfin, cette activité doit représenter une menace pour la sécurité des États-Unis et de ses citoyens475. Si une organisation a été précédemment désignée organisation terroriste mais qu’elle fournit des informations au ministère des Affaires Étrangères démontrant que les circonstances sont sensiblement différentes de celles qui prévalaient au moment de la désignation, le ministère pourra alors retirer l’entité de la liste des Organisations Étrangères Terroristes476. Selon l’interprétation et la mise en application des législations et règlements pertinents par le ministère des Affaires Étrangères, il est prévu que la révision de ces circonstances concerne les activités du groupe au cours des deux années précédentes477. Une 470

Michael Moran, Can Terrorists Be Turned into Allies, MSNBC.com, mis à jour le 9 mai, 2005. Moran est directeur de la rédaction du Council on Foreign Relations

471

Voir Capt. Vivian Gembara, American Human Intelligence and Anti-Iranian Rebels, Global Politician.com, 11 avr., 2005, affirmant sa conviction que les interdits imposés au M.E.K suite à sa désignation en tant qu’Organisation Étrangère Terroriste avaient en réalité fait barrage aux Forces de la Coalition.

472

Gembara, supra note 471.

473

Voir 2005 Iranian National Convention, DAR Constitution Hall, Washington, DC, 14, avr. 2005 (discours du Lt. Colonel Thomas Cantwell).

474

Voir Washington Seminar, supra note 342, citing Attorney Ronald G. Precup; voir aussi Congressional Briefing, supra note 431, citant Vivian Gembara: « Il est essentiel que nous reconnaissions que la situation a changé, et que nous devons procéder à une réévaluation ».

475 476

Voir Immigration and Nationality Act, 8 U.S.C. § 1189, as amended 17 déc., 2004 [ci-après INA]. Voir INA, (a)(4)(B)(iii), supra note 475.

477

Comme nous en discuterons plus loin, en 1999 la décision de retirer les deux organisations terroristes de la liste noire fut reconnue juste étant donné l’absence d’activités terroristes au cours des deux années précédentes. Voir Foreign Terrorist Organizations, Designations by the Secretary of State, Press Release, Office of the Coordinator for Counterterrorism, US Department of State, Oct. 8, 1999 [hereinafter 1999 FTO list].

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autre alternative, que nous étudierons dans la Section III.C, le ministre des Affaires Étrangères peut également exclure une organisation de la liste des terroristes si la garantie de la sécurité nationale des États-Unis permet une révocation.478 Comme nous le démontrerons plus loin, le MEK ne correspondant pas aux critères établis par le ministère des Affaires Étrangères il ne peut théoriquement pas sur la liste des organisations étrangères terroristes. Toute activité classée terroriste et attribuée au MEK remonte à une période bien antérieure à deux ans. Par ailleurs, le contexte où le MEK évolue aujourd’hui est sensiblement différent de celui qui est décrit dans les rapports et sur lequel s’appuyait le désignation sur la liste en 2003479. Il faut se rappeler notamment que le MEK a signé un accord de cessez-le-feu avec les forces de la coalition et avait alors formellement renoncé à la violence, tout en cédant l’intégralité de ses armes en avril 2003. Par la suite, au terme d’une enquête approfondie menée par les services de renseignements américains, les membres du MEK ont pu bénéficier du statut de civils protégés par la coalition en vertu de la Quatrième Convention de Genève. Ces changements significatifs de contexte plaident par conséquent en faveur d’une suppression du MEK de la liste des organisations terroristes.

1. L’organisation étrangère

Le MEK fut fondé à l’origine en Iran dans les années ’60. Actuellement, ses quartiers généraux et la majorité de ses membres sont basés au camp d’Ashraf en Iraq480. Le MEK, par conséquent, est considéré comme une organisation étrangère.

2. Un engagement dans des activités terroristes En premier lieu, le MEK n’est engagé dans aucune activité violente ni aujourd’hui ni au cours des quatre dernières années481. Il est toutefois pertinent de commenter les activités passées du MEK. Le MEK a mené des opérations militaires dans le passé et, a de ce fait pris publiquement la responsabilité de ces activités482.Toute action engagée par les membres du MEK par le passé, y compris des actes de violence, représentait une suite logique dans le combat continuel de l’organisation contre les mollahs fondamentalistes qui contrôlent l’Iran. En tant que telles ces actions sont à juste titre classées comme des actes de guerre, et relèvent d’un droit universellement reconnu de combattre un régime oppressif. Le préambule de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme vient étayer ce droit : « Considérant qu'il est essentiel que les droits de l'homme soient protégés par un régime de droit pour que l'homme ne soit pas contraint, en suprême recours, à la révolte contre la tyrannie et l'oppression 483».

478

Voir INA 1189(a)(6)(A)(ii), supra note 475.

479

Voir Summary of the 2003 Administrative Record for Redesignation as a Foreign Terrorist Organization under Section 219 of the Immigration and Nationality Act (redacted version), US Department of State [hereinafter 2003 Administrative Record]. Voir aussi Redesignation of Foreign Terrorist Organizations, Press Statement, Spokesman Richard Boucher, US Department of State, 2 oct., 2003.

480

Voir Arshavez M., Mujahedin-e Khalq’s Devolution, Iranian.com, 2 mars, 2005.

481

Voir INA, supra note 475. Encapsulées dans la Section 1189 on trouve des références à deux autres sections, 8 U.S.C. § 1182(a)(3)(B) et 22 U.S.C. § 2656f, qui fournissent des définitions très étudiées du terrorisme.

482 483

Voir Murky Motives Seen Behind Iran Blasts, Iran Focus, 12 juin, 2005. Universal Declaration of Human Rights, G.A. Res. 217A (III), UN Doc. A/810, at 71 (1948).

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Plus éloquente encore, la Déclaration de l’Indépendance qui prévoit que : « …lorsqu'une longue suite d'abus et d'usurpations, tendant invariablement au même but, marque le dessein de les soumettre au despotisme absolu, il est de leur droit, il est de leur devoir, de rejeter un tel gouvernement et de pourvoir par de nouvelles sauvegardes à leur sécurité future ».484 Thomas Jefferson, l’un des plus ardents défendeurs de la liberté, notait : « les opprimés doivent se rebeller et ils continueront à se rebeller et à créer des remous jusqu’à ce que leurs droits civils leur soient pleinement restitués et que toutes les discriminations partiales, les exclusions et les entraves soient supprimées. »485 Ce droit a même été reconnu par l’Église Catholique. Celui qui était alors le Cardinal Joseph Ratzinger (aujourd’hui le Pape Bénédict XVI) déclarait dans L’Introduction à la Liberté Chrétienne et la Libération que le combat armé est le dernier recours pour mettre fin à une tyrannie profonde et évidente qui menacerait sérieusement les droits fondamentaux et des individus et des biens communs.486

Dans le cas de l’Iran, le régime a virtuellement déclaré la guerre à son propre peuple, éliminant plus de 120 000 dissidents, portant des atteintes graves et répétées aux droits de l’homme et supprimant la volonté politique de son propre peuple487. L’objectif du MEK est de renverser un régime qu’il considère tyrannique pour le remplacer par un régime démocratique. Selon le droit international, lorsqu’un état attaque ouvertement et agressivement son propre peuple ou une catégorie de sa population, et qu’il en résulte l’émergence d’une résistance structurée et organisée, il existe un conflit reconnu488.

Le MEK n’est pas une organisation clandestine, mais un groupe disposant d’un réseau de commande important avec une direction reconnue et visible489. Le MEK opère selon un « code de conduite pour les opérations militaires, » et par conséquent, est un vrai parti au sein d’un conflit tel que le définit le Comité International de la Croix Rouge490. L’objectif derrière l’instauration d’un gouvernement élu démocratiquement en Iran ne doit pas être interprété comme terroriste, mais comme un objectif militaire conformément à ceux que prévoit l’Article Commun 3 des Conventions de Genève491. Les terroristes, dans ce cas, sont sans nul doute les dirigeants de l’Iran actuel492 qui « opèrent au cœur même du réseau international du terrorisme », et non le MEK qui « conteste justement ces activités ».493 De plus, à aucun moment dans son 484

Déclaration de l’Indépendance, adoptée le 4 juil., 1776, par le Congrès Continental.

485

Thomas Jefferson, Notes on Religion, 1776, at 548; voir Biography of Thomas Jefferson, White House.gov, à http://www.whitehouse.gov/history/presidents/tj3.html, citant Jefferson, “I have sworn upon the altar of God eternal hostility against every form of tyranny over the mind of man.” (« J’ai juré sur l’autel de Dieu éternelle hostilité envers toute forme de tyrannie sur l’esprit de l’homme ».)

486

CONGREGATION OF THE DOCTRINE OF FAITH, 22 mars, 1986, at ¶ 79. A l’époque, le Cardinal Ratzinger était président de la Commission Biblique Pontificale.

487

Voir Eric David, Can the PMOI Be Regarded As a Terrorist Organization?, présenté à une Conférence Internationale de Juristes : les Listes de Terroristes. Une étude de cas : L’Organisation des Mujahedin du Peuple d’Iran, le 10 nov, 2004. Eric David, directeur du Center for International Law à l’université Libre de Bruxelles, a fourni un avis juridique au sujet de l’indexation de MEK sur la liste des organisations terroristes. David conclut en dernier lieu que le MEK ne devrait pas figurer sur la liste des organisations terroristes ni aux États-Unis ni en Europe.

488 489 490 491

Voir Symposium, supra note 51. Voir David, supra note 487. David, supra note 487. See David, supra note 487, citant le Common Article 3 qui établit les droits de ceux qui sont impliqués dans un conflit interne.

492

State Sponsors of Terrorism, US Department of State, at http://www.state.gov/s/ct/c14151.htm, dernièrement consulté le 23 juin. Le 19 janvier, 1984, l’Iran a été classé parmi les pays qui soutiennent le terrorisme.

493

Symposium, supra note 51.

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histoire le MEK n’a ciblé de civils, 494contrairement à des organisations comme l’IRA, qui a causé la mort de 640 civils (un nombre supérieur à celui des forces de sécurité britannique victimes de la violence de l’IRA)495. Autre cas plus prégnant encore : celui de l’OLP et de ses organisations associées qui ont « assassiné plus de 60 citoyens américains et en ont blessé au moins autant ».496

Parmi les victimes, figuraient « deux ambassadeurs, un athlète olympique, des touristes, des hommes d’affaires et des étudiants ».497 Aucune des organisations, malgré leur longue histoire de violence contre les civils n’ont été désignées comme Organisation Étrangère Terroriste. En comparaison, le MEK dont les actions et les cibles restent en accord avec les normes internationales n’ont jamais visé de civils ni de lieux publics.498 Comme nous l’avons mentionné plus tôt, quelque soit le débat sur la définition des activités passées du MEK, le groupe n’est pas engagé dans une « activité terroriste ». En 2001, le MEK cessa ses opérations militaires. Au terme de longues années de lutte contre le régime iranien, le groupe a adopté la voie diplomatique, et mène un plaidoyer pour un changement de gouvernement. Le MEK n’a donc commis aucun acte de violence contre le régime depuis plus de quatre ans. Le dernier incident de violence imputé au MEK par le régime est une attaque en 2001 contre un bâtiment gouvernemental à Téhéran499. Là encore, il n’y eut aucune victime dans l’attaque.500 Aucun attentat à la bombe ni attaque n’ont été depuis perpétrés par le MEK ou attribués au MEK.501 De façon analogue, la dernière allégation sur le MEK ayant activement sollicité des fonds sur le territoire américain date de 2001.502 Depuis, il n’y a eu ni revendication ni preuve fondée concernant une telle pratique ou intention503. En plus de l’absence de toute violence, 494

Voir Avebury, supra note 390; voir aussi Section IV.A. ci-dessous mettre à l’ordre du jour et dissiper les allégations que le MEK a ciblé et tué des américains.

495

Voir Facts, Figures on Irish Republican Army, ASSOCIATED PRESS, 28 juil., 2005. Entre 1970 et 2005 l’IRA a tué 1 775 personnes dont 640 civils. L’organisation visait des lieux comme les pubs et les hôtels.

496

PLO Profile, MIPT Terrorism Knowledge Base, at http://www.tkb.org/Group.jsp?groupID=4182, dernièrement consulté le 2 août , 2005, qui relate diverses attaques par l’OLP sur des cibles civiles telles que des écoles et des restaurants. Il est intéressant de noter que l’OLP a même assumé la responsabilité d’attaques contre des civils, y compris dans un attentat à la bombe dans une université. William J. Daugherty, Ph.D., Remembering the Many American Victims of Arafat’s Terrorist Network, SAVANNAH MORNING NEWS, 14 avr., 2002. Daugherty était un des otages à l’ambassade des États-Unis à Téhéran en 1979. Depuis, il a été lauréat de multiples récompenses octroyées par le CIA et le ministère des Affaires Étrangères.

497

Voir id.

498

Voir David, supra note 487; see also Symposium, supra note 51. En outré, le critique du Canadian Conservative Foreign Affairs Stockwell Day, indiquait que le MEK a « limité ses attaques à des cibles militaires et gouvernementales » In addition, Canadian Conservative Foreign Affairs critic Stockwell Day, et que le gouvernement du Canada avait « déformé » la signification du mot terrorisme, voir aussi Terrorist Designation of Group Mean to Appease Iran, MPs Say, CANADIAN BROADCASTING COMPANY, 26 mai, 2005.

499

Voir BBC, supra note 387.

500

Voir MEK Profile – MIPT, supra note 390, y compris le rapport d’un incident qui ne fait état d’aucune victime ni blessé dans ce qui semble être le même incident, rapport qui situe toutefois l’incident à la date erronée du 21 janvier.

501

Murky Motives Seen Behind Iran Blasts, Iran Focus, 12 juin, 2005. Le régime a récemment accusé le MEK d’être à l’origine d’une explosion ; cependant, il n’existe aucune preuve pouvant confirmer cette allégation. Dans un article citant cette accusation, il est mentionné par Mustafa Akmal, expert en terrorisme de Moyen-Orient à Cologne, que l’attaque ne portait pas « l’empreinte » du MEK. Le MEK a pour « politique la revendication de toutes ses opérations », ce qui n’était alors pas le cas. Il note également que le « MEK ne s’est engagé dans aucun acte de violence au cours des quatre dernières années » ; voir aussi le MEK, rapport du Ministère des Affaires Étrangères, supra 352. Il est difficile de conclure si oui ou non le MEK se trouve derrière une attaque, à moins qu’elle ne soit publiquement revendiquée, car attribuer la plupart des attaques au MEK est une pratique du régime iranien.

502

Voir US v. Ashfari, 392 F.3d 1031 (9th Cir. 2004). Le dernier incident au cours duquel des personnes auraient accusées de solliciter pour le compte du MEK date de 2001. Certaines personnes avaient alors été accusées de solliciter des fonds à l’Aéroport International de Los Angeles.

503

Mais voir Glenn Kessler, Charity Event May Have Terrorist Link, WASHINGTON POST, 29 janv., 2004. Il y eut des allégations contre une autre organisation, la Communauté irano-américaine de Virginie du Nord (IACNV), selon lesquelles ce groupe aurait organisé un simulacre d’événement dans l’intention de solliciter des fonds. Malgré l’accusation, on n’a pu rassembler aucune preuve tangible confirmant l’affiliation de ce groupe au MEK, ou que l’argent collecté ait été destiné au MEK. En outre, l’IACNV a continué à affirmer que l’argent reçu était destiné aux victimes du tremblement de terre en Iran. Similairement, Juan C. Zarate, Secrétaire Adjoint au Trésor de la Brigade du Financement des Terroristes et des Crimes Financiers, indiquait dans une récente intervention que « le MEK organise des événements de collecte de fonds » mais il ne présentait toutefois aucune preuve étayant ses affirmations. Discours prononcé au Harper’s Bazaar/International Anti-Counterfeiting Coalition Summit (Sommet de la Coalition sur la

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l’organisation – y compris ses dirigeants d’alors et ceux d’aujourd’hui – a formellement renoncé à toute violence et terrorisme en 2003 dans le cadre d’un accord de cessez-le-feu504 conclu avec les forces de la coalition. Dans cet accord, signé par chacun des membres, il était précisément stipulé : a) Je m’oppose à toute participation ou soutien au terrorisme ; b) j’ai remis les armes qui étaient sous mon contrôle ou sous ma responsabilité ; c) je refuse toute violence et je ne prendrai pas les armes illégalement ni n’engagerai d’actions hostiles. J’obéirai aux lois iraquiennes et aux mandats des Nations-Unies en vigueur tant que je résiderai dans ce pays. Le lieutenant général Raymond T. Odierno, qui négocia l’accord du cessez-le-feu avec le MEK, a clairement indiqué que « ce n’[était] pas une reddition ; c’[était] un accord de désarmement et de consolidation ».505 Le commandant note par ailleurs que sa coopération « devrait mener à une révision sur le bien-fondé de la désignation du MEK comme organisation terroriste ».506 Après environ un an et demi, il a été formellement reconnu que les membres résidant au camp d’Ashraf ne représentaient aucune menace pour les forces de la coalition et n’étaient pas considérés comme des combattants. Puisqu’ils étaient désarmés, ils avaient besoin de protection. Grâce à cet accord, les membres du MEK bénéficient du statut de « personnes protégées » en vertu de la Quatrième Convention de Genève en juillet 2004507. La déclaration fut prononcée par le commandant général des forces multinationales en Iraq au nom des 27 pays membres de la coalition508. La Quatrième Convention de Genève protège uniquement les civils innocents et exclut qu’un tel statut soit accordé à tout individu soupçonné d’activités hostiles509. On note par ailleurs - fait révélateur - que cette protection est assurée en vertu de la Quatrième Convention qui couvre les civils, par opposition à la Troisième Convention, qui ne concerne que les prisonniers de guerre. Plus révélateur encore, le fait que cette désignation n’ait pas été accordée en vertu d’un protocole supplémentaire qui protège les combattants non couverts par la Troisième Convention510. Cette distinction prouve que les membres du MEK n’étaient pas perçus par les autorités américaines comme terroristes ou combattants, et qu’il n’y a donc plus lieu de les soupçonner d’engagement dans des activités terroristes ou d’intention d’un tel engagement. Avant que les forces de la coalition décident que les membres du MEK résidant à Ashraf devaient être reconnus noncombattants désarmés en vertu de la Quatrième Convention de Genève, les services de renseignements américains, y compris le FBI et la CIA, ont auparavant mené une enquête approfondie à l’intérieur du camp511. Au cours des 16 mois qu’ils ont Contrefaçon Internationale) Département du Trésor des États-Unis, 1er fév., 2005. Il semble toutefois qu’il n’y a eu ni accusation ni poursuite d’individus qui auraient collecté des fonds sur le territoire américain pour le compte du MEK depuis 2001.

504

Accord entre les individus de l’Organisation des Mujahidines du Peuple d’Iran (OMPI) et les forces multinationales en Iraq, 2003. L’accord intégral est reproduit dans l’Appendice B ; voir également Miller Letter, supra 407.

505 506 507

James Morrison, Iranian Complaints, WASHINGTON TIMES, 4 mai, 2004. Id Voir Proclamation, supra note 398.

508

Voir Multi-National Force – Iraq, à http://www.mnf-iraq.com/coalition.htm, dernièrement consulté le 31 Aoùt 2005. Vingt-sept pays contribue alors à une opération de stabilité permanente à travers l’Iraq. Ces pays sont l’Albanie, l’Arménie, l’Australie, l’Azerbajian, la Bosnie et Herzégovine, la Bulgarie, la République Tchèque, le Danemark, le Salvador, l’Estonie, la Géorgie, l’Italie, le Japon, le Kazakhstan, la Corée du Sud, la Lettonie, la Lituanie, la Macédonie, la Mongolie, les Pays-Bas, la Norvège, la Pologne, la Roumanie, la Slovaquie, le Royaume-Uni, l’Ukraine, et les États-Unis. Multi-National Force – Iraq: Camp Ashraf, à http://www.mnf-iraq.com/TF134/Ashraf.htm, dernière mise à jour le 5 septembre, 2005.

509

Voir Geneva Convention Relative to the Protection of Civilian Persons in the Time of War, 12 août., 1949, 6 U.S.T. 3516, 75 .N.T.S. 287, art. V [ci-après Geneva Convention]; voir aussi Bruno Nascimbene et Henri Labayle, la validité selon la Loi Européenne de l’Enregistrement du MEK sur les listes Anti-terroristes de l’Union Européenne et l’Applicabilité en conséquence par du Juge National, 9 sept., 2004, appuyant l’inapplicabilité de la Quatrième Convention de Genève, basé sur l’Article 5, au MEK s’il était réellement terroriste.

510

Voir Derek Jinks, The Declining Significance of POW Status, 45 HARV. INT’L L.J. 367, 381 (2004), pour une discussion sur un protocole supplémentaire et les couvertures qu’elles sont censées assurer.

511

Voir Jehl, supra note 405.

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consacré à cette enquête, ils ont interviewé individuellement et ont procédé au criblage de cette population de plus de 3700 personnes512. L’enquête semblait conclure qu’aucun membre du MEK résidant au camp d’Ashraf (ni l’organisation intégrale du MEK) n’était terroriste513. Par ailleurs, aucun membre n’ a jamais été accusé d’un crime quelconque514. Il est par conséquent incongru de conclure que le MEK est une organisation terroriste alors qu’il a été déterminé qu’aucun de ses membres n’était terroriste.

Les résidents du Camp d’Ashraf sont encore aujourd’hui sous la protection des forces de la coalition ; le MEK et les forces de la coalition ont cultivé des liens de respect mutuel515. Les résidents du camp d’Ashraf sont considérés comme des alliés et non comme des prisonniers516. Toute question sur les intentions du MEK ont été dissipées. Comme nous l’avons mentionné précédemment, le camp d’Ashraf a reçu une attention publique considérable et a notamment rallié le soutien du personnel militaire américain qui ont eu des échanges poussés avec les résidents517. Le fort soutien de la part de ceux qui ont eu des échanges quotidiens avec le MEK est particulièrement révélateur. Le fait que les officiers en Iraq et la force de la coalition voient l’organisation comme un « mouvement de résistance légitime » confère à la mission et aux objectifs de l’organisation une crédibilité indépendante.

3. Le MEK ne détient pas la capacité ou l’intention de commettre des actes de terrorisme

Comme le prouve cette renonciation au terrorisme et ce désarmement volontaire, le MEK ne détient ni la « capacité » ni l’« intention » de commettre des actes de terrorisme. Néanmoins, dans les registres administratifs qui ont mené à une seconde désignation du MEK en 2003, un certain nombre de questions ont été soulevées par le ministère des Affaires Étrangères. Une des questions mentionnées par le ministère des Affaires Étrangères en 2003 portait sur « l’intention » du MEK de s’engager dans des actions terroristes ; cette question émanait de certaines « présomptions »518 exprimées par les agences de renseignements français.

512 513 514

Voir Jehl, supra note 405. Voir Jehl, supra note 405. Voir Jehl, supra note 405.

515

Voir Staff Sergeant Craig Pickett, 350th Mobile Public Affairs Detachment, MEK Updates, 4th Infantry Division, 22 mai, 2003. Par ailleurs, le Sergent-chef Craig Pickett a déclaré qu’en 2003 les militaires se sont sentis comme des invités dans le camp et que les militaires travaillaient en proche collaboration avec les membres du MEK.

516

Voir Morrison, supra note 505, citant l’avocat des résidents du camp d’Ashraf, Steven Schneebaum : « Ce ne sont pas des prisonniers de guerre et en fait ce ne sont pas des prisonniers du tout ».

517

Voir Congressional Briefing, supra note 431, qui fournit des extraits de déclarations faites par le Juge Avocat Général Vivian Gembara et le Gouverneur de l’Iraq Dr. Abdullah Rasheed Al-Jabouri.

518

2003 Administrative Record, supra note 479. « Les autorités françaises pensent que le MEK utilisait le site comme base d ‘organisation, de logistique, et d’opérations pour le financement et la mise en marche d’activités terroristes ». Les activités spécifiques citées incluent le projet de commettre des assassinats contre d’anciens membres du MEK en Europe. Cette accusation, si elle se vérifie, serait une conspiration criminelle en vue d’un meurtre. Si cette allégation se vérifiait, les personnes arrêtées auraient dû rester en prison et auraient dû avoir un procès au lieu d’être relâchées comme ce fut le cas.

IRAN: DÉFIS ET CHOIX DE POLITIQUE ETRANGÈRE

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En réalité les français agissaient sur la foi de « présomptions » acquises lors d’un raid dans les bureaux principaux du CNRI à Paris en 2003. Quelques 160 personnes furent alors arrêtées519 et seront rapidement relâchées. A ce jour, plus de deux ans plus tard, bien que certains individus puissent encore faire « l’objet d’une enquête », aucun d’entre eux n’a été poursuivi pour un crime quelconque par les autorités françaises.

Un élément supplémentaire dans ce dossier est l’affirmation que le MEK détenait la « capacité » de commettre des attentats terroristes, présomption s’appuyant sur la découverte d’un transfert de fonds (avec d’autres soutiens) provenant de Saddam Hussein520. Cette allégation, bien que revenant fréquemment, n’a jamais été étayée par des preuves crédibles et est depuis longtemps contestée par le MEK. Il est à noter également qu’une telle allégation est peu pertinente de nos jours puisque Saddam Hussein n’est plus au pouvoir. Finalement cette allégation perd tout fondement sachant que depuis la chute de Saddam Hussein en mars 2003 le MEK reste essentiellement autonome au camp d’Ashraf521. Si le MEK avait été dépendant de la seule aide de Saddam, il serait aujourd’hui incapable de financer ses activités. Les archives du ministère des Affaires Étrangères décrivent par ailleurs « l’objectif unique » du MEK qui se résume à une volonté « de renverser le régime de Khomeiny et de s’établir au pouvoir »522. Dans cette proposition, le groupe a l’intention de se référer à la Constitution du CNRI. Il est à noter toutefois qu’il est question dans cette constitution d’un objectif « de renversement du régime de Khomeiny et de la mise en place d’un gouvernement intérimaire523 ». Ce gouvernement intérimaire ne serait au pouvoir que pour six mois et serait spécifiquement habilité à tenir des élections libres et justes pour l’établissement d’une l’Assemblée nationale législative et constituante524. Malgré certaines préoccupations précédemment énoncées, telles que celles citées en 2003 et dont l’exactitude est discutable, les circonstances dans lequel le MEK évolue sont, quoiqu’il en soit, indiscutablement très différentes. On citera entre autres, le fait que le MEK se soit volontairement défait de l’intégralité de son matériel militaire en 2003525. En outre, le MEK a livré à l’usage des forces de la coalition la totalité de son équipement et de ses véhicules526. Le ministère des

519

Voir 2003 Administrative Record, supra note 479; see Charles Recknagel, France: Police Arrests Members of Iran’s Armed Opposition, But Why Now?, RADIO FREE EUROPE/RADIO LIBERTY, 18 juin, 2003. Les quartiers généraux du CNRI furent mis à sac par les forces de sécurité françaises en 2003 et 160 membres furent arrêtés. Des recherches poussées furent menées et il apparaît qu’aucun élément probant n’ait été trouvé, justifiant les arrestations. Par la suite, chacun a été libéré, voir aussi, Arnold Beichman, Iran’s New French Connection, WASHINGTON TIMES, 25 juin, 2003. On ignore la raison pour laquelle les français ont choisi ce moment pour faire irruption dans les quartiers généraux du CNRI, mais on a présumé que l’action était reliée à une tentative de la France de s’attirer les faveurs du régime en vue d’améliorer ses échanges commerciaux avec ce pays. Selon l’opinion de Ben Faulks, un expert iranien à l’Economist Intelligence Union à Londres, il n’y avait certainement aucun projet de mener des attaques en occident.

520

Rapport administratif de 2003, supra note 479.

521

Multi-National Force – Iraq: Camp Ashraf, at http://www.mnf-iraq.com/TF134/Ashraf.htm, derrnièrement consulté le 5 sept.,2005. « Ils restent sous protection en vertu de la Quatrième Convention de Genève, et vivent au camp d’Ashraf , essentiellement auto-suffisants et bénéficiant d’une aide de la FMN-I “

522 523 524

Rapport administratif de 2003, supra note 479. La Constitution du Conseil National de la Résistance Iranienne, adoptée à l’unanimité, 1982, ncriran.org/content/view/31/43/, dernièrement consulté le 27 juil., 2005. Voir NCRI Overview, supra note 418.

525

Voir Proclamation, supra note 398; Vick, supra note 396, affirmant que les militaires montrèrent une certaine hésitation avant de procéder au désarmement. Cette hésitation est tout à fait extraordinaire étant donné les délais rapides exigés par les forces américaines concernant le désarmement d’autres groupes en Iraq. Selon certaines sources, les forces de la coalition pensaient que le MEK était un allié dans la guerre contre la terreur et aurait dû être autorisé à conserver ses armes pour appuyer les actions des forces en Iraq. Voir aussi Al-Jabouri, supra note 109; voir aussi Daniel Pipes and Patrick Clawson, A Terrorists (Group) USAllies, NEW YORK POST, le 20 mai, 2003.

526

Voir Vick, supra note 396.

IRAN: DÉFIS ET CHOIX DE POLITIQUE ETRANGÈRE

58

Affaires Étrangères a confirmé que le MEK avait été désarmé et qu’il ne représente donc plus une menace armée potentielle527. Aujourd’hui, le MEK reste sous la supervision et la protection des forces de la coalition au camp d’Ashraf ce qui exclut sa possible capacité d’engagement ou de planification d’activités proscrites. Le rapport d’administration de 2003 déclarait que si le MEK a renoncé ou désavoué l’usage de méthodes terroristes, cela signifie que le groupe conservait jusquelà l’intention d’avoir recours à ces méthodes528.

Le MEK, toutefois, a aujourd’hui renoncé au terrorisme et à la violence – élément supplémentaire et probant confirmant que l’organisation n’a pas l’intention de s’engager dans ces activités. Cette affirmation est encore étayée par le fait que le MEK, n’a pris part à aucune activité violente pendant plus de deux ans avant de signer un accord de cessez-le-feu en 2003. Par ailleurs, il semble peu probable que les forces de la coalition eussent déclaré les membres du MEK civils protégés s’il existait des signes de leur intention de s’engager dans le terrorisme, une activité qui, aux yeux des américains, est répugnante.

4. Le MEK ne représente pas une menace pour les forces de sécurité américaines ni pour les citoyens américains Le MEK ne représente pas une menace pour la sécurité nationale des États-Unis ou pour ses citoyens529. En réalité, à part certaines accusations passées que nous analyserons plus loin, aucune assertion spécifique n’a été avancée par le ministère des Affaires Étrangères concernant l’appartenance du MEK à la liste des Organisations Étrangères Terroristes. Le rapport administratif de 2003, toutefois, contient des déclarations d’ordre très général telles que : « les activités terroristes du MEK sont préoccupantes pour la sécurité du pays selon les dirigeants iraniens …[ce qui] augmente les risques d’une plus grande instabilité au Moyen-Orient » pouvant également « menacer les relations internationales, les intérêts économiques et la défense nationale des États-Unis530.

Ces affirmations qui tentent de démontrer les potentiels de menace posée par MEK pour la sécurité des États-Unis ne sont cependant pas appuyées par les faits. Tout d’abord, l’Iran lui-même est par excellence le pays promoteur du terrorisme. En outre, le régime est à l’origine de l’instabilité au Moyen-Orient. Les dirigeants iraniens menacent les intérêts des États-Unis dans la région en faisant usage du terrorisme pour saper les efforts américains de paix en Afghanistan et en Iraq. Il est anormal, par conséquent, de censurer une organisation telle que le MEK, qui ne cherche qu’à instaurer une démocratie en Iran, cette même censure qui protège un régime qui est un formidable défi pour la politique étrangère des États-Unis. La seconde raison invoquée par le ministère des Affaires Étrangères pour justifier la présomption d’une menace pour la sécurité

527

Voir Daily Press Briefing Transcript, US Department of State, (25 juil, 2004) à http://www.state.gov/r/pa.prs.dpb/2004/34680.htm, [ci-après Dept. of State Press Briefing].

528 Rapport Administratif 2003, supra note 479.

529 530

Voir INA, supra note 475, section (a)(C) déclarant que des activités terroristes doivent menacer la sécurité nationale des États-Unis ou de ses citoyens. Rapport administratif 2003, supra note 479.

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nationale des américains posée par le MEK, est que « des attentats terroristes commis par le MEK dans des villes iraniennes, et qui frappent souvent des civils, menacent également des citoyens américains en visite en Iran. 531»

En premier lieu, les cibles du MEK étaient limitées à des cibles militaires et gouvernementales, et il n’existe pas de preuves tangibles que le MEK ait ciblé des civils532. De plus, il n’existe aucune preuve tangible – et le ministère des Affaires Étrangères n’en fournit aucune – indiquant que le MEK ait jamais ciblé un site ou bâtiment où des civils auraient pu être touchés. En revanche, lorsqu’une faction dissidente de l’IRA, the Real Irish Republican Army (RIRA) fut à nouveau désignée comme Organisation Étrangère Terroriste, un argument similaire fut avancé533. Une comparaison essentielle s’impose entre le RIRA et l’IRA qui ont traditionnellement ciblé les civils534, tel l’attentat à la bombe perpétré au milieu de passages publics en Angleterre. Il n’y a rien de cela dans l’histoire du MEK. Par ailleurs, le rapport du ministère des Affaires Étrangères n’a jamais fourni de preuve pouvant mener à la conclusion que le MEK ait jamais frappé, et encore moins « fréquemment frappé » des civils535. Outre l’absence de fondement derrière l’idée définie que le MEK est une menace pour les civils en général, l’affirmation que le groupe pose un danger pour les américains est encore moins fondée. D’une part, étant donné les faibles relations diplomatiques entre l’Iran et les États-Unis et les sanctions imposées au régime iranien, le nombre d’américains visitant l’Iran et constituant ainsi une cible potentielle devrait être extrêmement faible. Par ailleurs, en trente ans, aucun citoyen américain n’a été signalé comme victime d’un attentat terroriste536. Enfin, le MEK n’a perpétré aucun acte de violence au cours des quatre dernières années. Ces faits, une fois ajoutés à la renonciation formelle par le MEK à toute violence, nous mène inévitablement à la conclusion que le MEK ne représente aucune menace pour les civils, et encore moins pour les citoyens américains.

Par ailleurs, toute allégation que le MEK aurait ciblé les États-Unis dans le passé, que ce soit dans une possible participation à la prise d’assaut de l’ambassade des États-Unis en 1979 à Téhéran, ne serait pas corroborée par les faits, et même si c’était le cas, il s’agit d’évènements qui remontent à 25 ans. Plus important encore, le fait que de sérieuses questions ont été soulevées sur la crédibilité de ces allégations (qui seront énoncées plus en détails dans la Section IV. A-B) ; de plus, tous les membres du MEK537 ont été l’objet d’une enquête par des agences américaines en Iraq et par des services de renseignements français à Paris. Or, si une preuve avait accusé un membre du MEK, non seulement ce membre aurait été inéligible à la 531 532

Rapport Administratif 2003, supra note 479. Voir Avebury, supra note 390. Pour plus d’informations, se référer aux déclarations inscrites dans la note de page.

533

Voir Northern Ireland: Designation of the “Real IRA” as a Foreign Terrorist Organization, Press Release, Bureau du Porte-parole, ministère des Affaires Étrangères Américain, 16 mai, 2001, RIRA fut ajouté à la liste des Organisations Étrangères Terroristes, suite à des actions violentes ; et leur intention claire de ne pas respecter l’accord de cessez-le feu que l’IRA avait signé ; Redesignation of the Real IRA as a Foreign Terrorist Organization, Press Statement, Deputy Spokesman Philip T. Reeker, ministère des Affaires Étrangères américain, 13 mai, 2003.

534 535

Voir id. Rapport Admnistratif 2003, supra note 479.

536

Les seules allégations d’américains assassinés se réfèrent aux années ’70 dans un attentat que attribuera au MEK. Cette attribution au MEK est fortement discutée et controversée dans la Section IV.B.

537

Bien qu’il y ait des sympathisants au MEK à travers tout l’Iran et en Occident, on ne saurait donner le nombre exact de membres. Des preuves, toutefois, semblent suggérer que les membres du MEK se trouvent en grande partie en Iraq et que le CNRI, qui pourrait compter quelques membres indépendants du MEK, est basé à Paris.

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protection assurée par la Convention de Genève, mais il ou elle aurait été extradé(e) pour présomption de meurtre de citoyens américains538.

Aucune de ces accusations n’a jamais été enregistrée et aucune extradition n’a jamais été demandée. A contrario, le MEK vit aux côtés des forces de la coalition sous une protection assurée par la Convention de Genève. Au final, on peut dire qu’il n’y a pas de preuve que le MEK puisse poser une menace actuelle pour les États-Unis avec qui il partage un objectif commun – la promotion d’une liberté démocratique en Iran. Non seulement le MEK ne représente pas de menace, mais il a en réalité contribué à la sécurité des États-Unis. A titre d’exemple on citera la transmission de renseignements aux États-Unis sur des projets hostiles de d’armement nucléaire par l’Iran ainsi que des informations ayant servi à sécuriser à protéger la frontière539. Un signe que le MEK est perçu comme une force positive se trouve aussi, comme nous le mentionnions plus haut, dans le fait que le personnel militaire de la coalition, de même que les responsables iraquiens en Iraq furent très contrariés lorsqu’on les empêcha de consulter le MEK sur des questions de sécurité540. Il est clair que loin d’avoir été une menace pour les ÉtatsUnis, le MEK s’est en réalité impliqué dans des activités qui ont renforcé la sécurité des citoyens américains.

538

Voir 18 U.S.C.A. 2332 prévoyant que le meurtre d’un citoyen américain sur un sol étranger est passible d’une sentence pouvant aller jusqu’à la peine capitale, aux États-Unis. En outre, les États-Unis et mis à effet plusieurs traités avec l’Iraq et la France. Voir Extradition Treaty and France. Voir, entered into force April 3, 1971, 22 U.S.T. 407; Voir Extradition Treaty between US and Iraq, entered into Force Apr. 23, 1936, 49 Stat. 3380.

539

Voir Al-Jabouri, supra note 109; voir aussi Congressional Briefing, supra note 431; voir aussi MEK State Department Report, supra note 352, où est mentionnée la coopération du MEK avec le ministère des Affaires Étrangères par la transmission de communiqués de presse, discours et interviews etc. - tel que l’exigeait le Foreign Agents Registration Act - avant que le groupe ne figure sur la liste des Organisations Étrangères Terroristes. De plus, le MEK a souvent envoyé des faxes et des lettres non sollicités.

540

Voir Gembara, supra note 471; see also Al-Jabouri, supra note 109.

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5. Des bases solides existent pour appuyer la suppression du MEK et du CNRI de la liste des Organisations Étrangères Terroristes

La section 219 de l’Immigration and Nationality Act permet de supprimer le nom d’une organisation de la liste des Organisations Étrangères Terroristes dès lors que, preuves à l’appui, les circonstances actuelles s’avèrent suffisamment différentes de celles qui prévalaient deux ans plus tôt, lors de la première désignation du groupe comme organisation terroriste541.

En 1999, deux organisations, Front Patriotique de Manuel Rodriguez (FPMR) et le Front Démocratique pour la Libération de la Palestine (FDLP), ont été rayées de cette liste pour ce même motif542. Même si l’on reconnaît que ces deux organisations ont en effet sensiblement réduit leurs opérations, il a été officiellement déclaré que leur suppression de la liste résultait de l’absence d’activités terroristes au cours des deux années précédentes543. En comparaison, les Khmers rouges furent également effacés de la liste, représentant un cas qui par contraste était écarté en tant que menace car ils « n’existaient plus en tant qu’organisation terroriste viable »544. Parallèlement, le ministère des Affaires Étrangères n’a pas inclus l’IRA sur la liste de 1999 ayant reconnu que, malgré son passé lourd d’activiste terroriste, l’organisation n’ayant été impliquée dans aucune activité terroriste au cours des deux années précédentes, toute activité antérieure à ces deux années ne devait plus être prises en compte lors d’une décision d’inclure ou non le groupe dans la liste545. Pareillement, le MEK n’a commis aucun acte de violence au cours des deux dernières années. Pour être plus exact, il ne s’est engagé dans aucune opération militaire au cours des quatre dernières années, ce qui dépasse largement la période conditionnelle. Le ministère des Affaires Étrangères notait en 1999 que sa décision de ne pas inclure l’IRA dans la liste de 1997 était en partie motivée par la récente signature d’un accord de cessez-le-feu546. A peine trente-quatre jours avant la signature du cessez-le-feu en 1997, toutefois, l’IRA abattra deux officiers de police en Irlande547. En outre, lorsque l’IRA ne figurait pas sur la liste en 1997, il n’était pas pour autant désarmé548. Le ministère des Affaires Étrangères a donc jugé que l’accord de cessez-le-feu était la seule preuve concluante de l’intention de l’IRA de pas commettre d’attentats terroristes – et cela malgré de lourds attentats qui précédèrent de peu l’examen du cas de l’IRA. Le MEK en revanche n’était impliqué dans aucun attentat terroriste au cours des deux années qui précédaient la signature de l’accord de cessez-le-feu en 2003 face aux forces de la coalition. De plus, contrairement à l’IRA à cette époque549, le MEK avait lui formellement renoncé au terrorisme comme méthode de

541 542 543 544 545 546 547 548 549

Voir INA 1189(a)(6)(A)(i), supra note 475. Voir 1999 FTO List, supra note 477. Voir 1999 FTO List, supra note 477. 1999 FTO List, supra note 477. Voir 1999 FTO List, supra note 477. Voir 1999 FTO List, supra note 477. Voir ASSOCIATED PRESS, supra note 495. Jioni Palmer, IRA Embraces an End to Warfare, Washington Bureau, Jul. 29, 2005. L’IRA ne se désarmera pas avant 2005. L’IRA ne renoncera pas à la violence avant 2005. Voir IRA Says Ceasing All Armed Activity in N. Ireland, REUTERS, 28 juil., 2005.

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soulèvement en Iran et avait accepté, en toute cohérence, de procéder à son désarmement. Lorsque l’on compare la situation du MEK à celle de l’IRA, il apparaît que les preuves pouvant appuyer la suppression du MEK de la liste des organisations terroristes sont de loin plus nombreuses que celles présentées par l’IRA. La renonciation à toute violence et terrorisme, à l’initiative du groupe en 2001, ainsi que sa réaffirmation publique immortalisée par l’accord du cessez-le-feu en 2003 avec les forces de coalition démentent toute intention de violence de la part du MEK.

De plus, les membres du MEK ont été déclarés civils protégés en vertu de la Quatrième Convention de Genève, un statut basé sur sa propre charte. Cette désignation entre en contradiction avec la qualification de terroristes attribuée aux membres du MEK. Les membres du MEK sont aujourd’hui désarmés. Ils vivent aux côtés des forces de la coalition avec qui ils coopèrent pleinement. Au cours des dernières années, le MEK a eu de très fréquentes interactions avec des responsables américains et iraquiens au cours desquelles le groupe a su gagner le soutien et la confiance de ces responsables. L’ensemble des facteurs que nous venons d’exposer vient étayer la conclusion que le MEK n’est pas une organisation terroriste. L’ancien porte-parole du ministère des Affaires Étrangères, Richard Boucher interprétait les termes « changements de circonstances » comme signifiant qu’une organisation précédemment désignée terroriste a « définitivement cessé toute activité terroriste, y a renoncé et a changé de bannière 550». Cette déclaration décrit un test sur ces « changements de circonstances »551utilisé par le ministère des Affaires Étrangères lors de l’examen d’un groupe pour une possible suppression de la liste des organisations terroristes. Si le texte reconfirme les pratiques administratives du ministère des Affaires Étrangères, il souligne également les circonstances même qui prévalent dans le cas du MEK. Au regard des changements considérables qui ont marqué ses dernières années, la décision de supprimer le MEK552 de la liste des organisations terroristes, et par extension celle du CNRI que l’on dit être son « alter ego », se trouve largement justifiée553.

C. La sécurité nationale des États-Unis garantit la suppression du nom du MEK et du CNRI de la liste des Organisations Étrangères Terroristes

Outre les changements de circonstances, une organisation peut être rayée de la liste des organisations terroristes si la sécurité nationale des États-Unis mandate cette révocation554. Dans le cas du MEK, une suppression pour des motifs de sécurité nationale est également légalement possible. Le MEK a émergé en tant que « mouvement de résistance légitime » avec des intentions déclarées d’assurer un état iranien libre, laïque et démocratique. Cet objectif, s’il est atteint, favoriserait également

550

Voir Statement par Richard Boucher, Porte-parole, Daily Press Briefing, US Department of State, 16 mai, 2001.

551

Voir 8 U.S.C. § 1189(a)(6)(A)(i), supra note 475 « Des circonstances qui étaient à la base de la désignation ont changé de telle manière qu’elles permettent une clause révocatoire ».

552

Voir Redesignation of Foreign Terrorist Organization, Press Statement, Spokesman Richard Boucher, US Department of State, 2 oct., 2003.

553

Voir Designation of National Council of Resistance and National Council of Resistance of Iran under Executive Order 13224, Press Statement, Acting Spokesman Tom Casey, 15 août., 2003. No independent Aucun élément indépendant n’a été apporté concernant le CNRI. Ils étaient simplement sur la liste des alliés du MEK. Il n’est pas nécessaire, par conséquent, d’apporter un argument indépendant pour appuyer la suppression du CNRI. Il est à noter que le CNRI avait mis en avant le fait que le MEK n’est qu’une organisation membre constituante de sa propre coalition et représente une organisation distincte et différente.

554

Voir 8 U.S.C. § 1189(a)(6)(A)(ii), supra note 475.

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les intérêts des États-Unis qui en tirerait des bénéfices importants. Cela se vérifierait quelque soit la participation du MEK à un gouvernement de coalition.

L’enjeu le plus essentiel dans un état iranien libre serait la suppression d’un régime qui soutient le terrorisme et qui s’achemine vers le développement d’armes de destruction massive. Actuellement, le MEK a offert une assistance fiable aux États-Unis en fournissant des renseignements sur le soutien de l’Iran au terrorisme et sur la tentative du régime iranien de se procurer des matériaux en vue de construire une bombe nucléaire. Par ailleurs, le gouverneur iraquien Al-Jabouri a déclaré que les réseaux du MEK en Iraq avaient contribué à la protection de la frontière irako-iranienne et à assurer la sécurité des forces américaines555. Le maintien sur la liste noire du MEK et du CNRI en tant qu’organisations terroristes pourrait s’avérer une mesure contre-productive pour les intérêts des États-Unis dans la mesure où il fait barrage à une perspective plus large de bénéfices que pourraient obtenir les États-Unis par leurs liens avec ces organisations dans le futur.

1. Le régime iranien met en danger la sécurité nationale des États-Unis

En promulguant le décret de 2001 qui réaffirmait l’Iran comme une urgence nationale, le Président George W. Bush affirmait que « les actions et la politique du gouvernement iranien continuent à représenter une menace à la sécurité nationale, et à l’économie des États-Unis556 ». Téhéran ayant refusé d’honorer l’accord de suspension de son programme nucléaire - lequel évolue et se développe dangereusement chaque jour – le Président Bush a récemment renouvelé ses avertissements rappelant que « toutes les options sont sur la table…nous avons utilisé la force dans un passé récent pour assurer la sécurité de notre pays. »557 Bien que le régime affirme avoir suspendu ses activités nucléaires, il existe des preuves suffisantes qu’elles n’étaient ni suspendues ni à visées pacifiques.558Quoiqu’il en soit les activités nucléaires iraniennes continuent559.

Par ailleurs, l’Iran continue à approvisionner ses réserves déjà impressionnantes de missiles conventionnels et de matériel militaire. De plus, des déclarations par les dirigeants iraniens continuent à être à la fois défiantes et trompeuses, laissant entrevoir peu d’espoir de changement. Son attitude, en conjonction à un programme d’armement iranien agressif et son contrôle sur une organisation terroriste de large envergure, font de l’Iran une menace particulièrement grave pour le peuple américain. De plus, l’Iran est le principal « fauteur de troubles » en Iraq, à en juger par ses déclarations sans équivoque sur la paix au Moyen-Orient560. En fait, selon des rapports des services de renseignements, « l’objectif essentiel » est de générer autant d’instabilité que possible en Iraq561. Pour faciliter cet objectif, le régime achemine de l’argent et de la main d’œuvre 555 556 557

Voir Al-Jabouri, supra note 109. Notice: Continuation of Iran Emergency, Press Release, Office of the Press Secretary, White House, 13 mars, 2001. Voir BBC, supra note 283.

558

Voir Alan Clendenning, Iran Said Trying to Fit Missiles for Nukes, ASSOCIATED PRESS, 18 nov., 2004. « Powell a partiellement confirmé des affirmations faites par le groupe d’opposition iranienne que Téhéran, trompant les Nations-Unies et tente de poursuivre secrètement ses activités ».

559 560 561

Voir BBC, supra note 283. Pound, supra note 126, citant un haut responsable du Pentagone qui affirmait que l’Iran est « une menace au sens premier du terme Pound, supra note 126.

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vers l’Iraq dans une tentative d’influencer sa population par tous les moyens possibles.562 Pour mieux cibler les troupes américaines, l’Iran a aussi fait des recherches sur leur armement et leurs positions militaires563. Au regard de la menace que représente l’Iran pour la sécurité nationale des États-Unis, identifier ses alliés ainsi que des groupes d’oppositions sérieux, comme le MEK, pourraient aider les États-Unis à contrecarrer ces menaces564.

2. La collecte de renseignements sur le régime iranien par le MEK

Bien que l’intérêt de l’Iran pour le développement nucléaire soit évident depuis longtemps, la plupart des preuves corroborant cette réalité n’ont été révélées que récemment. Il faut savoir que ce sont les renseignements collectés par le MEK en 2002 qui les premiers révélèrent le programme clandestin de développement nucléaire de l’Iran. Comme mentionné plus haut, le CNRI et le MEK ont identifié et fourni des preuves de l’existence de deux d’installations nucléaires jusque là inconnues à Natanz et Arak565. Similairement, comme nous l’avons précédemment souligné, le CNRI et le MEK ont transmis une quantité innombrable de renseignements concernant le programme d’armes nucléaires de l’Iran. A titre d’exemple, le CNRI a révélé, en se fondant sur des renseignements fournis par le MEK, l’existence soupçonnée de deux installations nucléaires à Lavizan, une ville au nord-est de Téhéran566. Plus récemment, le CNRI a fourni des informations sur des projets de l’Iran d’acquisition de développement nucléaire fondé sur le graphite567. Au moment de ces révélations le secrétaire d’état Colin Powell déclara avoir eu accès à des renseignements qui étayaient les informations fournies par le groupe « dissident »568. On a rapporté que le MEK et le CNRI possédaient des réseaux étendus d’informateurs en Iran, ce qui permet au MEK de rassembler des renseignements sur les matériaux et infrastructures nucléaires en possession de l’Iran, sur ceux qui cherchent à les acquérir, ainsi que sur les progrès généraux de son programme d’armement569. Le MEK continue à fournir des rapports actualisés sur la construction du nouveau missile iranien Ghadar dont la puissance de lancée est estimée à environ 2500 à 2800 km570. Des preuves ont par ailleurs été apportées sur le perfectionnement de la technologie des séries de missiles Sahâb et sur le développement d’ogives nucléaires en Iran571. Le CNRI a également identifié l’ancien directeur du programme

562 563

Voir Pound, supra note 126; see also Al-Jabouri, supra note 109. Voir Pound, supra note 126.

564

Barbara Slavin, Iran’s Terrorists Helped Disclose Nuke Program, USA TODAY, 14 avr., 2005. Bien que certains puissent être inquiets au sujet d’un pouvoir accaparé par ces groupes, il importe de se souvenir de la vieille maxime, « l’ennemi de ton ennemi est votre ami ».

565

Voir Group: Iran’s Nuke Program Growing, NEW YORK TIMES, Aug. 15, 2002; see also Mark Hosenball, Iran: Mixed Signals on MEK, NEWSWEEK, numéro du. 11 avr, 2005.

566 567 568 569 570 571

Voir Clendenning, supra note 558. Voir USA Today, supra note 564; voir aussi Worldthreats.com, supra note 29. Voir Clendenning, supra note 558; Voir Hosenball, supra note 565, rapportant l’interventions de Bush qui mentionnait les informations fournies par les « dissidents ». Voir IPC Report, supra note 3. Voir Report: Iran Hiding Nuke Program in Tunnels, FOX NEWS, 21 nov., 2005. Voir Clendenning, supra note 558.

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nucléaire pakistanais - Abdul Qadeer Khan - comme le fournisseur pour l’Iran d’une quantité indéterminée d’uranium ainsi que de diagrammes de bombes nucléaires572.

Le CNRI et le MEK ont non seulement été des acteurs essentiels dans la révélation au grand jour des projets nucléaires de l’Iran mais ils ont également été « les toutes premières voix dénonçant les violations des droits de l’homme et les atrocités commises au cours de ces deux dernières décennies573 ». Les membres des Forces Spéciales Américaines postées en Iraq ont affirmé que le MEK avait été une « source précieuse de renseignements classés confidentiels », grâce à des informations transmises aux forces de la coalition dans un effort d’assurer en permanence la sécurité des frontières ainsi que la protection des forces de la coalition et du peuple irakien574. A titre d’exemple, le MEK a transmis des rapports sur les méthodes utilisées par le régime pour la collecte de renseignements ainsi que sur les zones où opèrent des agents secrets iraniens575. Le MEK a également fourni des détails sur les livraisons d’armement en Iraq, y compris des descriptions d’armes et le tracé géographique des itinéraires de transit576. Une large part de ces renseignements y compris certains rapports sur des interventions terroristes sponsorisées par l’Iran – a été corroborée par d’autres sources de renseignements577.

3. Les activités iraniennes que le MEK pourrait identifier dans le futur

Bien que le MEK se soit déjà avéré être un précieux atout à travers l’utilisation de ses réseaux en Iraq et en Iran le potentiel de ce groupe à fournir des renseignements aux responsables américain doit encore être pleinement exploité par d’autres renseignements de grande valeur stratégique sur les programmes d’armement de l’Iran, ses activités terroristes, et ses violations de droit de l’homme. Les États-Unis rassemblent actuellement leur propres renseignements sur le régime de l’Iran. Ces actions sont essentiellement menées par voie aérienne, et sont donc pour des raisons évidentes tout à fait limitées578. Des observateurs avertis constatent qu’il manque aux États-Unis l’une des meilleures stratégies de renseignements pour le Moyen-Orient et particulièrement pour l’Iran : un service d’intelligence579. Une organisation qui est capable de rassembler des renseignements, de diffuser des messages pro-démocratiques et de diriger un mouvement du peuple à l’intérieur comme à l’extérieur du territoire iranien – le tout sans être détecté – représente sans aucun doute un précieux allié pour la sécurité des États-Unis580. Le MEK, a-t-on avancé, s’est avéré capable et fiable dans ces domaines et est donc le choix le plus judicieux

572 573 574 575 576 577 578 579 580

Voir Clendenning, supra note 558. US Congressman Criticizes Human Rights Watch for Iran Group Report, Iran Focus, 27 mai , 2005, citant le New York Congressman Ed Towns. Pound, supra note 126; voir aussi Al-Jabouri, supra note 109. Voir Pound, supra note 126. Voir Pound, supra note 126. Voir Pound, supra note 126. Michael Moran, Trusting the Enemy of My Enemy, MSNBC, 26 août, 2003. Voir Pipes and Clawson, supra note 525; see also Gembara, supra note 471. Voir Moran, supra note 470.

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pour la mise en œuvre de ces objectifs581. Il organise et dirige des réseaux en Iran et a déjà engagé des échanges fructueux avec l’armée américaine en Iraq582. De plus, le MEK a offert un aperçu, aux iraniens comme aux iraquiens, d’un Islam solide et anti-fondamentaliste qui pourra aider à maintenir un équilibre pour contrer l’influence de l’extrémisme propagé par les mollahs en Iran583. Des responsables militaires de haut rang ayant eu des échanges avec le MEK en Iraq font valoir les bénéfices potentiels d’une collaboration avec le groupe, dissipant à son sujet les inquiétudes, toutes infondées et dépassées qu’elles puissent être584. Le lieutenant général Odierno, aujourd’hui assistant du Président du Comité des chefs d’Étatsmajors interarmés (Joint Chief of Staff)585, a, à plusieurs reprises affirmé sa certitude que le MEK aurait dû jouer un rôle actif en Iraq, car il partage avec les États-Unis des mêmes objectifs de « former une démocratie et de combattre l’oppression586 ». Par ailleurs, le MEK est la seule organisation dans la région à soutenir la paix au Moyen-Orient587. Les responsables militaires américains ont également averti que ne pas impliquer ouvertement le MEK en Iraq ne fera qu’accélérer la détérioration de la situation en Iraq588. En réalité, continuer à ignorer cette source précieuse et de renseignements sur l’Iran pourrait causer d’avantage de torts aux troupes américaines et par extension au peuple américain589. En outre, les objectifs du CNRI et du MEK sont en adéquation directe avec ceux des États-Unis : la démocratie, l’égalité et la laïcité. Le potentiel de stabilisation et de croissance au Moyen-Orient serait substantiel si le MEK était finalement capable de vaincre le fondamentalisme, quelque soit le nombre de sièges qu’il puisse réellement obtenir dans le gouvernement.

4. La suppression du MEK de la liste des Organisations Étrangères Terroristes contribuera à la sécurité nationale des États-Unis.

Les conséquences légales imposées à une organisation désignée comme terroriste sont dévastatrices. Le département du Trésor peut geler n’importe quel capital conservé dans un établissement bancaire américain s’il existe des présomptions que ce bien est lié aux intérêts d’une organisation terroriste590. En outre, un étranger peut être sous le coup d’une interdiction d’entrée ou de séjour aux États-Unis si le ministère de la Justice le soupçonne d’entretenir des liens avec une organisation terroriste591. Enfin les ministères des Affaires Étrangères et de la Justice peuvent entamer des procédures contre tout individu

581 582

Voir IPC Report, supra note 3. Voir Moran, supra note 470.

583

Voir Congressional Briefing, supra note 431; see also Al-Jabouri, supra note 109, débattant des effets positifs que l’Islam anti-fondamentalistes du MEK a pu avoir sur les iraquiens.

584 585 586 587 588 589 590 591

Voir Congressional Briefing, supra note 431, quoting Captain Vivian Gembara. Biography of Lieutenant General Raymond T. Odierno, Joint Chiefs of Staff, à http://www.jcs.mil/bios/bio_odierno.html/. US Says Iran Opposition in Iraq Agrees to Disarm, AGENCE FRANCE PRESSE, 10 mai, 2003. Voir Letter to President Clinton from Senator Robert Torricelli, 22 oct, 1997. Voir Gembara, supra note 471. Voir Gembara, supra note 471. Voir Foreign Terrorist Designations: Fact Sheet, Office of Counterterrorism, US Department of State, 23 mars, 2005 Voir id.

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soupçonné d’apporter un « soutien matériel » à une organisation terroriste592. Ces interdictions bloquent le recrutement ou le financement de nouveaux membres par l’organisation à qui toute opération devient virtuellement interdite. Le résultat escompté est la destruction de ses droits d’association, de sa liberté d’expression, et plus généralement de ses chances d’atteindre ses buts, même si parmi ses objectifs, un d’entre eux est de nature positive. En réalité, ces mesures ont pour effet de pousser des organisations déjà suspectes à entrer dans une clandestinité plus profonde qu’auparavant. Un fait incontestable est que « les mouvements de résistance légitime593 », comme le MEK et le CNRI sont des organisations qui en réalité souffrent particulièrement de ce statut car elles mènent leurs opérations à un niveau visible et public. Pis encore, sont les conséquences pour les organisations qui se retrouvent sur la liste noire «suite à un jugement politique », comme c’est le cas pour le MEK et le CNRI594. Le MEK n’a eu de cesse de plaider pour un Iran libre et moderne et à cette fin a « rendu le monde plus sûr » en révélant le programme nucléaire clandestin de l’Iran et fourni les identités de terroristes reconnus appartenant au régime595. Malgré cela, on constate combien le maintien de sa désignation comme organisation terroriste limite sérieusement les progrès qu’il pourrait accomplir s’il s’établissait des liens entre les organisations et les États-Unis dans le futur596. Ces questions font écho à celles de plusieurs figures politiques, à des responsables militaires américains, ainsi qu’à des responsables iraquiens597. (Voir la section III A. 8, le soutien international au MEK). Bien que les États-Unis aient accepté d’être renseignés par le MEK, une relation continue avec l’organisation, tant que cette dernière reste désignée comme « terroriste », est indéniablement gênante. Le caractère paradoxal de cette situation a refait surface au cours d’une conférence de presse au ministère des Affaires Étrangères le 25 juillet 2004, à travers des questions posées sur la désignation du MEK dans la liste des organisations terroristes malgré ses services rendus aux États-Unis par la communication de renseignements sur les avancées nucléaires de l’Iran598. Des reporters disaient ressentir un mélange de confusion et de frustration au sujet de cette relation599. En effet, recevoir un support concret de la part d’une organisation terroriste, même si ce n’est pas totalement proscrit par la loi, n’est pas cohérent avec la vision à l’origine de cette désignation. Supprimer le MEK et le CNRI de la liste noire éliminerait ce paradoxe qui fruste tant les responsables américains – ce qui leur confèrerait une nouvelle marge de confort. Ce confort serait précisément un motif de soutien pour la suppression du MEK de la liste d’organisations terroristes, suppression qui faciliterait en outre la réception de renseignements que le groupe fournit déjà volontairement. Au court terme, cela simplifierait les relations aujourd’hui « officieuses » qui lient les États-Unis au MEK. Au long terme, cette suppression forgerait des liens plus solides encore, qui seraient en harmonie avec les intérêts de la sécurité américaine600. La présente analyse des enjeux révèle par conséquent qu’il est dans le meilleur intérêt pour la sécurité nationale des États-Unis de supprimer le MEK de la liste des organisations internationales.

592 593 594 595 596 597 598 599 600

Voir id. Voir Congressional Press Release, supra note 343. Voir International Conference of Jurists, supra note 466. Voir David Johnson, A Third Option for Iran, FrontPageMagazine.com, 6 mai, 2005. Voir id. Voir Symposium, supra note 51; see also Congressional Briefing, supra note 431. Voir Department of State Press Briefing, supra note 527. Voir Department of State Press Briefing, supra note 527. Voir Washington Seminar, supra note 342, quoting attorney Ronald Precup.

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IV. Le rejet des allégations contre le MEK/CNRI sur les évènements des années ‘70 Si les allégations selon lesquelles le MEK aurait menacé la sécurité américaine, il y a plus de vingt-cinq ans, en soutenant le renversement du Shah sont peu concluantes, elles appellent néanmoins à un retour sur le contexte historique de l’époque. Dans les années ’70, le Shah dirige l’Iran d’une poigne autocratique, brimant les aspirations du peuple iranien à la liberté et à la démocratie. S’ajoutait à cette oppression le rôle des États-Unis dans le maintien du Shah au pouvoir. Cette prise de position américaine provoquait la colère de nombreux iraniens qui y voyait une sorte d’hypocrisie de la part d’une nation démocratique dont les dirigeants appuyaient un régime anti-démocratique en Iran. Entre temps, le Shah réprimait violemment toute opposition à son règne et résistait à toute tentative du peuple iranien d’établir ne serait-ce que les formes les plus élémentaires d’une représentation démocratique. Pour les iraniens, les américains étaient complices – ou au mieux complaisants – face à un régime qui bafouait largement les droits de l’homme. C’est dans un tel contexte que de nombreux iraniens exprimeront, dans les années ’70, leur déception, voire leur colère envers Washington.

A. Le putsch à l’Ambassade des États-Unis en 1979

Le but affiché du MEK au moment du putsch à l’ambassade des États-Unis était le même qu’aujourd’hui : liberté et fin de l’oppression pour peuple iranien601. Cet objectif fédérateur gagna le soutien d’un grand nombre d’iraniens à la fin des ’70, préparant le terrain pour la révolution de 1979 au cours de laquelle le Shah fut renversé et dut fuir l’Iran. Même après que le régime du Shah ait été dissous en 1979, les actions américaines précédentes avaient mené beaucoup d’iraniens à croire que leur pays pouvait à tout moment subir une intervention américaine. Les étudiants auteurs du putsch de l’ambassade des États-Unis, le 4 novembre 1979, étaient en grande partie motivés par cette crainte et la colère accumulée envers les ÉtatsUnis qui avaient offert l’asile politique au Shah, pour eux symbole de l’oppression. Même si certains membres du MEK peuvent avoir partagé les inquiétudes de ces étudiants, les dirigeants du MEK avaient à plusieurs reprises nié l’implication et même le soutien de la part de membres de leur groupe dans ce putsch602. Le MEK était opposé au putsch et à une confrontation aux États-Unis dès le départ. La prise d’assaut de l’ambassade, en effet, fut initiée par un petit groupe d’étudiants universitaires iraniens affiliés à l’Union Islamique des Étudiants, qui avaient planifié et mené à bien cette action dans une quasi-isolation au cours des quelques jours fatidiques de novembre 1979603. Un examen plus détaillé des événements qui entourent le putsch de l’ambassade confirment ces faits. Selon un ouvrage faisant autorité, de 450 pages, et publié en 2004, consacré à l’assaut de l’ambassade des États-Unis, un homme à l’origine de cette idée – Ibrahim Asgarzadeh – un étudiant de 22 ans en génie civil, à l’université de Technologie Aryamehr à Téhéran604. Asgarzedeh, et deux amis

601 602 603

Voir généralement Abrahamian, supra note 348. Voir Letter to Richard Boucher, supra note 460. Massoumeh Ebtekar, Takeover in Tehran, Northwestern University Press (2000), at 106.

604

Voir David Harris, The Crisis: The President, the Prophet, the Shah – 1979 and the Coming of Militant Islam, Little Brown & Company, 2004, at 199. David Harris est l’auteur de plusieurs ouvrages, y compris The Last Strand and Our War. Il a écrit pour le New York Times, Rolling Stones et de nombreuses autres publications.

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proches qui furent à l’origine du putsch « étaient encore actifs dans l’Union des Étudiants Islamistes, un mouvement dominant dans la politique des campus ».605 L’idée initiale d’ Asgarzedeh était de prendre l’ambassade d’assaut dans le même esprit de protestation pacifique et de désobéissance civile qu’ils avaient jusque là opposé au Shah. Le petit cercle d’amis commença par organiser, le 2 novembre 1979, une réunion secrète à l’Université de Polytechnique, auxquels participaient les membres des branches de l’Union des Étudiants Islamistes venus des quatre universités de Téhéran606.

Au cours d’une de ces réunions secrètes, un petit groupe d’étudiants mettent au point un plan d’action. Ils décident de ne pas chercher l’aval de l’Union des Étudiants Islamistes mais plutôt de créer un groupe nouveau qu’ils nomment les Étudiants Musulmans qui Suivent la Ligne de l’Imam (Étudiants Musulmans)607. Dans les jours qui suivent, ils partent en visites de reconnaissance aux alentours de l’ambassade des États-Unis. Le jour de leur dernière réunion de mise au point, les étudiants avaient pu établir « plusieurs plans grossiers du complexe et des bâtisses de l’ambassade ainsi qu’une feuille d’horaires de moyenne précision des allers et venues des forces de sécurité »608. Tout se passe comme prévu : le dimanche 4 novembre 1979, à 10 heures du matin, un groupe de 300 étudiants, qui avaient reçu l’ordre de venir désarmé et de garder captifs les américains sans leur faire de mal, défoncent le portail d’entrée de l’ambassade. C’était le début de la crise des otages en Iran qui durera 444 jours609.

Aucun rapport contemporain sur l’événement n’exfiltrera vers le MEK. Au contraire, les Étudiants Musulmans impliqués dans le putsch à l’époque « dénonçaient le [MEK] comme un groupe secrètement marxiste qui est de connivence avec les « libéraux pro-américains »610. Plus tard, Massoumeh Ebtekar, le porte-parole des étudiants durant le putsch et plus tard le vice président du Président Khatami, confirmera que le MEK n’était pas impliqué dans la prise d’otages de l’ambassade611.

D’autres éléments à l’appui de la non-participation du MEK dans le putsch se trouvent dans la base de données de MIPT de la Rand Corporation, en partie financée par la Direction de la Sûreté du Territoire américaine, qui ne mentionne pas le MEK en conjonction avec la crise des otages de l’ambassade612. De plus, aucune mention n’est faite non plus d’une possible implication du MEK par Barry Rosen, un des 52 otages américains connu pour sa remarquable mémoire et son récit détaillé

605 606 607 608 609 610

Id. at 200. Voir Id. at 200. Voir Id. at 202. Voir Id. at 203. Voir Id. at 204. Abrahamian, supra note 348 at 211, citant la Proclamation des Etudiants Musulmans Ettela’at, le 9 juil, 1980.

611

Voir généralement Ebtekar, supra note 603. Il est intéressant de noter qu’un grand nombre des cerveaux qui étaient derrière ce putsch occuperont plus tard des postes importants au sein du régime.

612

Voir MEK Profile – MIPT, supra note 390.

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des évènements de 1979613. Enfin, le plus indéniable des arguments, les enquêteurs américains ont disculpé tous les membres du MEK du camp d’Ashraf en Iraq de toute implication passée dans des activités terroristes, y compris du putsch de l’ambassade des États-Unis. Globalement, il n’existe aucune preuve suffisante pour conclure que la direction du MEK d’aujourd’hui ait eu un quelconque lien avec la crise des otages. Face à des arguments accusant le MEK d’avoir « soutenu » tout du moins moralement le putsch de l’ambassade, il importe de rappeler le contexte historique. Les iraniens étaient outrés par le comportement du Shah, qui bénéficiait de l’asile politique aux États-Unis après avoir fui l’Iran614. Il n’était donc pas étonnant que la prise de l’ambassade – toute inacceptable qu’elle paraisse aux yeux des américains – soit plébiscité par les iraniens de l’époque, et si plébiscité que toute opposition ouvertement exprimée à cet acte par une organisation iranienne aurait été suicidaire615. Le silence, par conséquent, était la prise de position la plus sûre. Mis à part cette réalité, il n’existe aucune preuve que les membres du MEK ait jamais revendiqué le soutien du groupe pour le putsch616. A contrario, les dernières déclarations par Massoud Rajavi condamnaient particulièrement le putsch617. Finalement, Ebtekar déclarait que « la plupart des factions d’oppositions618 » étaient en fait contre le putsch619.

B. L’assassinat d’américains On a accusé le MEK d’avoir tué six américains en 1973, 1975 et 1976 .620 Malgré le soutien public par le MEK pour le renversement du Shah, les dirigeants et les membres du MEK d’aujourd’hui n’ont jamais prôné la violence contre les civils, une action qui va à l’encontre des croyances fondamentales du groupe, et le MEK continue à nier ces accusations621.

Un bref passage en revue de l’histoire mettra en lumière les réels enjeux. Comme nous le notions dans la Section III. A 1., le Shah avait emprisonné ou tué le noyau central du groupe – à cette époque encore le MEK islamique dirigé par Massoud Rajavi. Tandis que le MEK était à un stade de quasi-extinction, une petite faction composée des derniers fidèles du MEK 613

Once Upon a Time in Tehran, Maxwell Perspective (the Maxwell School of Syracuse University), Vol. 16, No. 1, Autumn 2005. Dans cette revue, les évènements tels que se les remémore Barry Rosen sont relaté et particulièrement la ferveur des foules à l’extérieur et de leur particulière dévotion à Khomenei ; « De la fenêtre de son bureau, Rosen pouvait apercevoir un rassemblement de jeunes hommes et femmes – des photos de Khomenei épinglé à la poitrine – et qui, en quelques minutes atteindra 500 personnes. Armés de battes, de tuyaux et de cutters, plusieurs jeunes gens escaladent la barrière, coupent la chaine et défoncent les portes. Rosen voit les manifestants « déferler comme un déversement de frénésie ». En quelques minutes, la sécurité de l’ambassade était totalement violée.

614

Voir Khorrami, supra note 367.

615

Voir généralement Ebtekar, supra note 603 at 106, qui se remémore la popularité de ce putsch en Iran et note que de nombreux groupes d’opposition, remarquant l’engouement chez le peuple envers cette prise d’otages, essayèrent d’entrer dans les bonnes grâces des Étudiants Musulmans.

616

Il est à noter, toutefois, que bien que le MEK, en tant qu’organisation et ses dirigeants n’aient apparemment pas soutenu le putsch, il est théoriquement possible que certains membres aient à l’époque appuyé cet acte. Ebtekar indique que plusieurs membres « étaient venus à la rencontre des Étudiants Musulmans ». Le sens de cette affirmation n’est pas tout à fait clair puisqu’elle ne l’étaye pas. Pareillement, on peut conclure que ces membres n’auront pas conservé leur appartenance au MEK.

617

Voir ABC-TV, Nightline, Une interview par Tek Koppei avec Massoud Rajavi, le 20 octobre, 1984. « Je peux donc dire que c’est non seulement cette crise des [otages], mais également la politique belliciste de Khomeini, les acitivités de terrorisme international et toutes ses mesures répressives, que nous regrettons profondément. Tout cela est contre le peuple iranien et contre la démocratie ».

618 619 620 621

Ebtekar, supra note 603 at 234. On présume que cela comprend le MEK qu’elle mentionne dans le même paragraphe. Id. at 234. Voir MEK Profile – MIPT, supra note 390. Voir Mohaddessin, supra note 384.

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reprirent la tête de l’organisation. Cette reprise du MEK par une faction marxiste marquèrent le début d’une série d’évènements tragiques qui seront à tort et inexactement attribués par certains observateurs au MEK principal, le MEK islamique dirigé par Rajavi. Le mode opératoire de la mouvance marxiste du MEK était à l’opposé de la doctrine, philosophie, et principes pro-démocratiques du MEK dirigé par Massoud Rajavi. Comme nous le détaillons plus loin, les faits tendent tous à accuser la faction marxiste et non le MEK principal, des meurtres tragiques d’américains dans le milieu des années ’70. La confusion des noms et le flou laissé par la rapide succession des évènements ont contribué à ne plus distinguer les deux groupes – une bévue qui ne résiste pas à une analyse critique. En 1971, lorsque le MEK était en phase de formation et épousait la cause de la démocratie et des droits de l’homme, l’organisation, comme d’autres groupes dissidents iraniens, devinrent la cible principale du Shah. Mission fut donnée à la police secrète du Shah – la SAVAK – d’exterminer le MEK, mission accomplie de manière impitoyable622. La SAVAK commença par organiser la surveillance de certains membres du groupe au début des années ’70. En février 1972, 69 membres du MEK, y compris ses 3 fondateurs et 12 membres du Comité Central, furent arrêtés, et tous inculpés pour « possession d’armes, intention de renverser la monarchie constitutionnelle et études… d’auteurs subversifs ».623 Ces arrestations et celles qui suivront décimeront l’organisation. En mai 1972, 11 membres du MEK furent condamnés à mort ; 16 furent condamnés à perpétuité ; 11 eurent des peines de 10 à 15 ans ; 25 à des peines allant de 3 à 9 ans ; et 6 furent condamnés à des peines de 1 à 2 ans624. Vers la fin de 1972, plus de 95 pourcent des membres de l’organisation, y compris tous ses dirigeants, avait été exécuté, emprisonné ou tué625.

En effet, le MEK, tel qu’il avait existé avant février 1972, cessa d’exister. Massoud Rajavi, dont la peine de mort fut commuée à une peine de prison à vie, durant sa détention conserva maintiendra vivant le MEK islamique626. Certains membres subalternes du MEK restés à l’écart avaient peu de relations entre eux car l’organisation était structurée en « cellules compartimentées soumises à l’autorité d’un collectif central627 ». C’est précisément cette fragmentation qui permit à quelques-uns de ses membres – qui incidemment n’étaient pas jugés assez importants par la SAVAK pour être inquiétés de reprendre le contrôle de l’organisation et de la reconstituer en un groupe marxiste. Cette organisation marxiste nouvelle et secrètement formée s’appropria alors le nom très respecté de MEK en 1972 ; elle agira par la suite et publiera des communiqués de presse au nom de l’organisation. Cette organisation qui se faisait appeler « MEK », en réalité, était une toute autre organisation, avec une philosophie différente et contrôlée par des dirigeants différents628. Aucun des membres de cette organisation ne faisait partie du MEK reformé plus tard par Massoud Rajavi en 1979. Ils étaient plutôt interlopes, et avaient usurpé le nom de MEK pour leurs propres desseins extrémistes. L’organisation actuelle ne peut être tenue

622 623 624 625 626 627 628

Voir Khorrami, supra note 367; Mohaddessin, supra note 384. Abrahamian, supra note 348 at 128. Abrahamian, supra note 348 at 131-133. Abrahamian, supra note 348 at 128, 142. Abrahamian, supra note 348 at 165. MEK State Department Report, supra note 352. Voir generally Abrahamian, supra note 348 at 165.

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responsable des meurtres perpétrés par les marxistes. De plus, des rapports de l’époque viennent corroborer le fait qu’il s’agissait d’une organisation marxiste et non du MEK, qui avait commis ces actes.

En 1973, le New York Times rapportait que « des guerrillas gauchistes » avaient abattu le Lieutenant Colonel Lewis L.Hawkins de l’armée de l’air américaine629. On présume que cet article faisait référence aux marxistes qui avaient récupéré la direction du MEK et non de l’organisation que devait reformer Rajavi et dont la direction et les membres à l’époque avaient été tués ou emprisonnés. Preuve supplémentaire à ces faits : l’homme qui plus tard revendiquera le meurtre, Vahid Afrakhten, affirmera être le dirigeant de cette organisation (à savoir le groupe marxiste MEK).630 Pareillement, les meurtres des colonel Paul R. Shaffer et du Lieutenant Colonel John H. Turner de l’armée de l’air américaine, en mai 1975 à Téhéran furent perpétrés par le MEK marxiste. En fait, un article du NewYork Times décrivant l’incident attribue la responsabilité de ces assassinats à un groupe nommé « les Combattants du Peuple631 ». Étant donné que le MEK marxiste prit le nom de Peykar dar Rah Azadi Tabageh Kargar (« Combat sur le Chemin de la Liberté de la Classe Ouvrière »),632 la logique voudrait que ce nom ne soit qu’une traduction générale du MEK marxiste. En effet, le ministère des Affaires Étrangères, reconnaitra également qu’il « [est] exact que certains de ces assassinats ont été perpétrés par des membres de l’organisation qui sont de leur propre aveux marxistes, et qui…se sont séparés de la branche « musulmane »…633 Quelques mois plus tard, les deux hommes responsables des deux assassinats de 1975 furent identifiés et arrêtés par la police du Shah634. Vahid Afrakhten, un des hommes arrêtés, fut jugé être le meneur des Combattants du Peuple635. Il admit avoir personnellement tué le Lieutenant Colonel Hawkins en 1973, être le dirigeant des Combattants du Peuple, et que ce groupe était responsable des assassinats du Colonel Turner et du Lieutenant Colonel Shaffer en 1975636. Les assassinats en 1976 de trois entrepreneurs de Rockwell américains ont également été attribués aux Combattants du Peuple637. Dans un article qui suivra immédiatement l’événement, le NewYork Times rapportait que les assassinats avaient été commis par le même « groupe terroriste qui avait été officiellement accusé des assassinats de deux colonels américains à Téhéran en 1975 ».638 Plus tard le New York Times rapportera que les individus étaient tenus responsables des assassinats de Hassan Alan-Poush639 et Bahran Aram.640 Aram 629 630 631 632

Voir Abstract, NEW YORK TIMES, 3 juin, 1973 (1973 WLNR 91120). Voir William Branigin, Iran Says Guerilla Trained in Cuba, WASHINGTON POST, 11 mai, 1976. Voir Abstract, NEW YORK TIMES, 30 juil, 1975 (1975 WLNR 117202). State Department’s Views of the MEK, supra note 359.

633

Letter to Chairman Lee Hamilton, Subcommittee on Europe and the Middle East, from Janet Mullins, Assistant Secretary, Legislative Affairs, US Department of State, 2 avril, 1992 [Ci-après State Department Letter to Lee Hamilton].

634

Voir Eric Pace, Abstract, NEW YORK TIMES, Sept. 21, 1975 (1975 WLNR 44054); Deux hommes identifièrent Mohsen Khamoushi et le « meneur » Vahid Afrakhteh (il est à noter que les orthographes de noms erronées ont été corrigées), voir également Branigin, supra note 630.

635 636 637 638 639 640

Voir id. Voir Branigin, supra note 630. Voir MEK Profile – MIPT, supra note 390. Voir Eric Pace, Abstract, NEW YORK TIMES, 29 août, 1976, citant l’incident mais ne mentionnant par l’organisation responsable. Voir Abstract, NEW YORK TIMES, 18 nov, 1976 (1976 WLNR 104065). Voir Abstract, NEW YORK TIMES, 6 sept, 1976 (1976 WLNR 80386).

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avait été identifié comme le membre dirigeant du MEK marxiste641. Par la suite, la Defense Intelligence Agence, affirmera que les entrepreneurs de Rockwell avaient été tués par les Combattants du Peuple642. L’universitaire Ervand Abrahamian, auteur d’un récit historique sur le MEK, confirme que les assassinats des américains survenus dans les années ’70 étaient le fait d’un groupe extrémiste marxiste/maoïste « meurtrier » qui avait repris le contrôle du MEK suite à la suppression ou à l’emprisonnement de sa direction entière643. Les faits associés à l’usurpation marxiste et à la réappropriation du nom de MEK comme nous l’avons exposé, ont également été documentés par le ministère des Affaires Étrangères644. Par ailleurs, le ministère des Affaires Étrangères a reconnu la culpabilité des marxistes dans les assassinats de 1975 et de 1976 en opposition au MEK islamique, l’organisation aujourd’hui dirigée par Massoud Rajavi645. Faute d’éléments d’accusation à l’encontre de l’organisation actuelle du MEK pour ces crimes, le ministère des Affaires Étrangères, s’est contenté de noter qu’il n’existait aucune preuve que les membres du MEK islamique incarcérés dans les années ’70 se soient opposés aux assassinats commis sous le nom de l’organisation646. Sachant que les membres du MEK étaient à cette même époque incarcérés et virtuellement coupés du monde extérieur – il est difficile de concevoir comment ils auraient pu protester publiquement. Enfin, il est important de noter à nouveau que Massoud Rajavi, libéré de prison en 1979, reformera l’organisation telle qu’elle existe aujourd’hui. En fait, la vaste majorité des membres du MEK d’aujourd’hui a rejoint l’organisation après 1979 en particulier parce qu’elle visait le renversement du régime iranien647. Par ailleurs, tous les membres du MEK au camp d’Ashraf ont fait l’objet d’une enquête et ont été disculpés par les services de sécurité américains en Iraq. Aucune charge n’a été retenue contre aucun des membres du MEK ni du CNRI pour ces crimes ou pour toute autre action terroriste. Au regard de ces faits, il serait injuste de conclure que le MEK, en tant qu’organisation, ou les membres du MEK actuel en tant qu’individus, puissent avoir été impliqués dans l’assassinat de citoyens américains.

641

Maziar Behrooz, Iran’s Guerrillas: the Legacy of Iran’s Guerrilla Movement, Iranian.com, 13 sept, 2004, à http://www.iranian.com/Berooz/2004/September/Left/. Maziar Behrooz est un professeur assistant d’histoire à la San Francisco State University et l’auteur d’articles et de livres sur l’histoire iranienne. L’auteur cite Bahram Aram, parmi d’autres individus, comme étant « les premières personnalités du MEK marxiste alors en scission » ; voir aussi Abrahamian, supra note 348 at 146.

642

Voir Assassinations of August 28, 1976: A Case Study, Defense Intelligence Agency (1976). Ce document fut obtenu à la demande du Freedom of Information Act (FOIA).

643

Voir Abrahamian, supra note 348 at 166, 257. Les assassinats de Rockwell étaient particulièrement mentionnés comme ayant été perpétrés par le MEK marxiste après sa scission. Ces assassinats étaient un exemple de la tournure violente qu’ils avaient amorcé et poursuivi.

644 645 646 647

Voir MEK State Department Report, supra note 352; see also State Department’s Views of the MEK, supra note 359. Voir State Department Letter to Lee Hamilton, supra note 633. Voir State Department Letter to Lee Hamilton, supra note 633; voir aussi State Department’s Views of the MEK, supra note 359. Voir Letter to Richard Boucher, supra note 460.

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V. Documentation supplémentaire

A. Le MEK n’a pas réprimé les kurdes

On a prétendu que le MEK était financé par Saddam Hussein et collaborait avec le régime irakien dans la répression d’irakiens et de kurdes depuis qu’il s’est installé en Irak. Une telle allégation, lancée par le régime iranien, n’apparaît fondée sur aucun autre élément que la situation géographique du MEK. Il n’existe aucune preuve démontrant que le MEK ait collaboré avec Saddam Hussein d’une part, et les preuves que l’on détient révèlent d’autre part une réalité contraire. Il importe en premier lieu de savoir que plus de 2,8 millions d’irakiens, et parmi eux de nombreux kurdes, ont signé une pétition de soutien à l’organisation648. Un soutien d’une telle ampleur serait hautement improbable si les irakiens avaient pensé que le MEK était impliqué dans des violations des droits de l’homme. De plus, une agence indépendante a enquêté sur l’allégation selon laquelle le MEK aurait apporté une aide à Saddam dans la persécution des kurdes mais a trouvé ces présomptions infondées649. Enfin, un ex-agent des renseignements iraniens a confirmé le caractère mensonger de telles allégations en révélant que des « agents » avaient répandu de telles rumeurs à la demande de Téhéran650. Pour resituer le contexte, il faut se rappeler que le MEK s’établit en Irak au milieu des années ’80 à une époque où les relations entre l’Irak et les pays occidentaux et avec les États-Unis en particulier étaient plutôt harmonieuses. En fait, après l’arrivée du MEK en Irak, les États-Unis soutenaient Saddam Hussein alors en guerre contre l’Iran. Toutefois, l’installation du MEK en Irak fut motivée par la situation géographique – le camp d’Ashraf étant exactement de l’autre côté de la frontière iranienne – et par les réalités politiques – aucun autre pays n’ayant offert l’asile au MEK651. Quoiqu’il en soit, le MEK a négocié son transfert en Irak préalablement et n’a installé ses camps qu’après un accord octroyé à ses dirigeants d’une totale autonomie et de la non-ingérence du gouvernement irakien652.

En 1986, le président d’Irak, Saddam Hussein, annonçait que « les relations entre l’Irak et la résistance iranienne sont fondées sur la paix, le respect mutuel de la souveraineté nationale ainsi que le respect des choix politiques et idéologique de chaque nation. »653

648

Voir Al-Jabouri, supra note 109.

649

Voir Economic and Social Council, UN Commission on Human Rights, 47th session, Statement submitted by International Educational Development, Implications of Humanitarian Activities for the Enjoyment of Human Rights, 21 août, 1995 [ci-après IED Statement].

650

Voir Profile of Iran’s Master Terrorist, Iran Focus, 28 mai, 2005; Affidavit de Jamshid Tafrishi, soumis au ministère des Affaires Étrangères américain. Étant donné que le soutien de M. Tafrishi au MEK était quelque peu contradictoire, puisqu’il fut également un agent du régime iranien et critique du MEK à l’époque, il faut noter que son témoignage sans constituer une source exclusive de renseignements, est utile à corroborer les propos d’autres sources plus fiables.

651

Voir Mohaddessin, supra note 384. Le sénateur Robert Torricelli a comparé le choix de résidence du MEK à la brève alliance entre les États-Unis et la Russie et d’autres ennemis de la Guerre Froide durant la Seconde Guerre Mondiale. Bien qu’en pleine Guerre Froide, ils ont provisoirement partagé un objectif commun et les États-Unis n’ont pas hésité à établir des bases dans des pays comme l’Espagne de Franco pour des raisons stratégiques de situation géographique.

652 653

Voir Mohaddessin, supra note 384. BAGHDAD OBSERVER, 15-16 juin 1986, (Summary of Legal Opinion by Lord Slynn, Status of the People’s Mujahedin Organization of Iran as a Resistance Movement)

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Lorsque le MEK est entré en Irak, ses membres ont installé des camps indépendants le long de la frontière iranienne, vivant séparés des irakiens, avec le statut de réfugiés, et isolés de la politique et des activités de Saddam Hussein. Les irakiens ont clairement établi que ces zones appartenaient exclusivement au MEK et aucune intrusion ne devait avoir lieu654. Une fois installé, le MEK ne s’associa que rarement au gouvernement, n’ayant que des interactions restreintes avec les irakiens, auprès desquels il avait néanmoins gagné un immense respect655. Bien que nous puissions présumer qu’il y avait eu des contacts entre le MEK et le gouvernement irakien, durant la guerre Iran-Irak, il n’existe certainement pas de preuves indiquant que les membres du MEK ait participé à l’invasion de l’Iran par l’Irak656. Déjà en 1982, le MEK avait appelé à la fin du conflit et avait cherché à servir de médiateur pour la résolution du conflit657. Des rapports parus en 1987 contenaient d’ailleurs le plaidoyer de Rajavi auprès de Saddam Hussein pour un cessez-le-feu avec l’Iran658. Il a été en effet confirmé par le ministère des Affaires Étrangères américain que le très « pacifiste » Rajavi avait tenté d’intervenir dans le conflit et faisait campagne auprès de Saddam Hussein pour un cessez-le-feu avec l’Iran659. En 1988, après que l’Iran ait envahi l’Irak, le MEK riposta aux attaques iraniennes, mais il le fit sans l’aide ni la coopération de l’armée irakienne660. En août 1988, le secrétaire général des Nations-Unies le Général Javier Perez de Cuellar réussit à négocier un cessez-le-feu ente l’Iran et l’Irak, mettant fin à la guerre. L’allégation selon laquelle le MEK aurait combattu contre le peuple iranien n’était qu’une tentative de plus par le régime de discréditer et diffamer le MEK, cherchant cette fois à réduire son soutien en Iran. Pareillement, au milieu des conflits internes en Irak et ses heurts avec les Nations-Unies et les États-Unis, le MEK est resté relativement isolé dans ses camps du nord661.

Aucun élément ne tendrait à suggérer que le MEK ait jamais soutenu les forces de Saddam Hussein que ce soit pendant l’Opération du Désert ou l’Opération Liberté en Irak. En fait, l’autorité intérimaire de la coalition en Irak a émis un ordre de dissolution de toutes les entités connues comme étant affiliées au parti Baas de Saddam, et le nom du MEK n’est pas apparu dans cet ordre662. Le MEK n’apparaît pas non plus sur une liste similaire de 206 entités qui a été compilée par les NationsUnies663. Le MEK est resté en retrait de la politique irakienne et du régime de Saddam Hussein en général car ses intérêts en Irak se trouvaient uniquement liés à ses combats contre le régime de Téhéran. L’Irak se trouvait être le lieu de résidence des 654

Voir Letter from the UN Secretary-General to the President of the UN Security Council, S/1998/1172, 15 déc, 1998. L’UNSCOM fut sollicité pour obtenir un accord séparé du MEK afin de pouvoir inspecter leurs camps et rechercher la présence éventuelle d’armes de destruction massive.

655 656 657 658 659 660 661 662

Voir Al-Jabouri, supra note 109. Voir Abrahamian, supra note 348 at 213. Voir Terry Povey, War Weary Nation Puts Pressure on Regime, FINANCIAL TIMES, 21 mai, 1982. Voir Iran Accepts Iraq Offer to Spare Cities, MIAMI HERALD, 20 fév, 1987. MEK State Department Report, supra note 352. Voir Bernard E. Trainor, Iran Dissidents Enter Gulf War, NEW YORK TIMES, 16 mai, 1988. Voir Mohaddessin, supra note 384, quoting Professor Marius Deeb of John Hopkins University. Dissolution of Entities, Coalition Provisional Authority Order Number 2, 23 mai, 2003.

663

Security Council Committee, List of Entities: Established Pursuant to Security Council Resolution 1483 (2003), dernièrement mis à jour le 2 juin, 2004. La Résolution 1483 prévoit pour les états membres le gel de l’argent ou des avoirs que l’on soupçonne de provenir ou d’être associés à une ou plusieurs entités figurant sur la liste et qui sont connues comme des entités associées à l’ancien gouvernement d’Iraq. Ceci inclut des entités « possédées ou contrôlées, directement ou indirectement par des personnes associées avec ce gouvernement ou agissant en son nom3 ». Voir Security Council Resolution 1483, S/RES/1483 (2003), 22 mai, 2003.

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membres du MEK, qui aujourd’hui encore sont basés dans le camp d’Ashraf, sous le contrôle des forces de la coalition. Les allégations les plus dérangeantes émises par le ministère des Affaires Étrangères sont celles qui accusent le MEK d’avoir participé à la répression du peuple kurde en Irak664. Cette accusation comme d’autres qui ont été émises à l’encontre du MEK, ne peut soutenir une analyse plus profonde des faits. Le peuple kurde lui-même l’a contredite. L’agence de presse Reuters avait obtenu une copie d’un document signé par un responsable de haut rang d’une organisation kurde d’Irak, identifié comme Hoshyan Zebari,665ancien dirigeant du Parti Démocratique Kurde (et aujourd’hui ministre des Affaires Étrangères en Irak), et qui indiquait en particulier que le MEK n’avait jamais fait preuve d’hostilité envers les kurdes : « nous n’avons trouvé aucun élément probant suggérant que les Moudjahidin aient exercé des actes d’hostilité envers le peuple kurde d’Irak ».666

En plus de l’absence de preuves contre le MEK, le soutien important dont il jouit auprès du peuple irakien vient catégoriquement démentir ces allégations. En 2003, 2,8 millions d’irakiens, dont de nombreux kurdes, ont signé une déclaration où est exprimé leur incontestable soutien envers le MEK667. Le docteur Abdullah Rasheed Al-Jabouri, ancien gouverneur de la province de Diyala (où est situé le camp Ashraf), a également confirmé que le MEK n’a jamais été impliqué dans des actes contre les kurdes668. Par ailleurs, le gouverneur Al-Jabouri se souvient que le MEK n’était pas représenté dans le sud de l’Irak en 1991, région où les kurdes auraient subi des attaques669. Bien que le MEK ait établi ses camps à une époque dans des régions où les kurdes vivaient, au nord du pays, le groupe avait quitté la région dès le début des hostilités de Saddam contre les kurdes670. A cette époque, les dirigeants du MEK avaient même envoyé des messages aux dirigeants kurdes déclarant leur non-ingérence dans le conflit kurde671. Al-Jabouri pense que les rumeurs sur des attaques du MEK portées aux kurdes ont été initialement répandues et sont encore maintenues par le régime de Téhéran comme moyen de discréditer le MEK672. Une recherche menée par l’International Educational Development (IED) une organisation nongouvernementale, vient étayer le fait que jamais le MEK ne s’est associé à Saddam. En 1995, l’IED a transmis aux NationsUnies une déclaration officielle sur la question673. L’IED concluait, au terme de sa propre enquête, que toute allégation sur la

664

Voir “Country Reports on Terrorism,” supra note 104.

665

Friends of a Free Iran (European parliamentarians), Peoples Mojahedin of Iran: Mission Report, Sept. 21, 2005, 29-30. (Amis de l’Iran Libre (parlementaires européens), les Moudjahidin du peuple d’Iran : Rapport de Mission, 21 sept., 2005, 29-30)

666

Voir Wright, supra note 434, où il est affirmé que le document obtenu était un document légal pris au cours d’une poursuite judiciaire aux Pays-Bas. « (Nous) pouvons confirmer que le Mujahidin (sic) n’étaient pas impliqués dans l’éradication du peuple kurde ni durant le soulèvement ni lors de ses retombées. Nous n’avons trouvé aucun preuve suggérant que les Moudjahidin aient exercé des actes d’hostilité envers le peuple kurde d’Iraq. »

667 668 669 670 671 672 673

Voir Al-Jabouri, supra note 109. Voir Al-Jabouri, supra note 109. Voir Al-Jabouri, supra note 109. Voir Mohaddessin, supra note 384. Voir IED Statement, supra note 649. Voir Al-Jabouri, supra note 109. Voir IED Statement, supra note 649.

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collaboration du MEK aux agressions de Saddam contre les kurdes était fausse674. Il est intéressant de remarquer que l’IED a découvert qu’il n’y a rien de moins vrai : ses investigations ont en effet révélé des preuves que le régime iranien recrutait activement des kurdes pour combattre le MEK en Irak. Ces faits ont été par la suite confirmés par le Comité International de la Croix Rouge675. Le régime iranien alla jusqu’à vêtir ses propres soldats de costumes kurdes pour donner l’illusion que le MEK était impliqué dans des combats contre les kurdes676. Les conclusions du Gouverneur Al-Jabouri et IED ont été par ailleurs corroborées par Jamshid Tafrishi, un ancien responsable des renseignements iraniens. Tafrishi avait résidé dans un camp du MEK en Irak pendant environ 18 mois dans les années ’80677. Tafrishi affirme que, peu après son départ du camp, il fut recruté par le service de renseignements iranien et se retrouva rapidement le pion d’une vaste campagne de désinformation visant à discréditer le MEK678. On lui demanda spécifiquement d’informer les organisations internationales, ainsi que les représentants gouvernementaux que le MEK recevait d’une part le soutien de Saddam, et que le groupe aidait aussi le dirigeant irakien à acquérir des armes et avait participé à la répression de la rébellion kurde679. Ses formateurs organisèrent des interviews avec les média pour Tafrishi, lui fournissant des scenarii préparés pour être certains qu’il saurait propager une version cohérente et crédible des choses. Il était question dans ces histoires d’une alliance supposée du MEK avec Saddam et d’actes de torture perpétrés par le MEK. Tafrashi raconte qu’on lui avait intimé l’ordre de répandre ces accusations à quiconque lui prêtait attention680. Tafrishi finira par rompre tout lien avec le régime. Le départ de Tafrishi était motivé en partie par le dégoût que lui inspirait le rôle qui lui était imposé dans une campagne de diffamation contre ses anciens hôtes, mais également par une conscience grandissante que les individus avec qui il avait travaillé n’étaient pas des agents d’espionnage quelconques mais plutôt des « assassins brutaux » au service du régime681.

Il existe certainement de nombreux Tafrishi, à savoir d’autres agents que le régime continue à recruter en vue de diffuser une désinformation au sujet du MEK. (Un des rôles de Tafrishi, notamment, était de recruter un ou plusieurs membres du MEK pour des missions similaires682). Récemment, 500 anciens membres du MEK ont également affirmé que peu après leur séparation du MEK et leur émigration vers les États-Unis ou vers l’Europe, ils furent eux aussi contactés par des responsables des renseignements iraniens cherchant à obtenir leur collaboration dans une campagne de désinformation683. Au regard de ces

674 675

Voir IED Statement, supra note 649. Voir IED Statement, supra note 649.

676

Voir IED Statement, supra note 649, où il est affirmé que les iraniens habillés à la manière kurde furent faits prisonniers de guerre lorsqu’ils attaquèrent le MEK. Cette réalité sera plus tard confirmée par la Croix Rouge lorsque les prisonniers de guerre seront par la suite libérés et présentés à la Croix Rouge.

677 678 679 680 681 682 683

Voir IED Statement, supra note 649. Voir Affidavit of Jamshid Tafrishi, supra note 650. Voir Affidavit of Jamshid Tafrishi, supra note 650. Voir Affidavit of Jamshid Tafrishi, supra note 650. Affidavit of Jamshid Tafrishi, supra note 650. Voir Affidavit of Jamshid Tafrishi, supra note 650. Voir Iran: 500 Former Iraq-based MEK Members Reject Abuse Claims, Iran Focus, 5 juin, 2005.

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faits, on peut aisément conclure que les allégations suggérant la collaboration du MEK avec Saddam Hussein ainsi qu’une supposée implication du MEK dans l’oppression des kurdes sont fausses.

B. Le MEK n’est pas une « secte »

En plus de la campagne de désinformation par le régime en vue de discréditer le MEK en les décrivant comme des alliés de Saddam Hussein, le régime iranien a redoublé d’efforts dans une campagne similaire quoique plus sophistiquée en accusant le MEK de violations de droits de l’homme contre ses propres membres684. Plus spécifiquement, de faux rapports suggéraient que le MEK présentait tous « les pièges d’une secte religieuse 685». Ces intentions diffamatoires sont la touche finale de la stratégie iranienne de discrédit du MEK, qui espère ainsi faire perdre à l’organisation sa légitimité et précipiter sa fin avec un peuple iranien persuadé qu’il n’existe pas d’alternative à la théocratie686. Un exemple récent illustrant cette campagne nous est donné par un rapport publié par Human Right Watch qui accuse le MEK de violations de droits de l’homme. Ce rapport se fonderait sur les témoignages de « victimes » du MEK dont un grand nombre ont en réalité été publiquement identifiés comme des agents du régime iranien687. Plus précisément, le rapport accuse le MEK de gérer une geôle secrète dans le camp d’Ashraf, où il retient et torture arbitrairement quiconque souhaite quitter le MEK688. Ces affirmations, selon Human Right Watch, étaient extraites d’une conversation téléphonique de douze heures avec d’ « anciens » membres du MEK689. Depuis la publication de ce rapport, toutefois, un grand nombre d’informations ont été fournies concernant ces « victimes » avec qui Human Right Watch s’était entretenu. Il ne fait aucun doute, que ces dites « victimes », dont certaines avaient un temps été d’anciens membres du MEK, étaient en réalité des agents de propagande au service du régime iranien690. Beaucoup d’entre eux, d’ailleurs, avaient été identifiés comme tel depuis longtemps691. Jamshid Tafrishi, en fait, avait déjà révélé l’identité de ces hommes dans ses rapports précédents où il décrivait son travail au service du régime692. Ces agents, tout comme Tafrishi, étaient spécifiquement formés à la fabrication de témoignages où il est question d’incarcérations et de tortures par le MEK sur toute personne tentant de quitter l’organisation693.

684

Voir Shakiba, supra note 379.

685

Voir Terrorism: Questions & Answers, Council on Foreign Relations (en coopération avec la Markle Foundation), à http://cfrterrorism.org/groups/mujahedeen_print.html, dernièrement visité le 29 avril, 2005.

686

Voir Shakiba, supra note 379.

687

No Exit: Human Rights Abuses Inside the MKO Camps, Human Rights Watch, disponible à http://hrw.org/bacgrounder/mena/iran0505/ [ci-après Human Rights Watch Report].

688 689 690 691 692 693

Voir Human Rights Watch Report, supra note 687. Voir Human Rights Watch Report, supra note 687. Voir Human Rights Watch Report on the Iranian Opposition: A Reward for the Iranian Regime; a Penalty for the Iranian People, US NEWSWIRE, 19 mai, 2005. Voir id. Voir Letter from Jamshid Tafrishi to Danby Copithorne, UN Special Representative to Iran, 13 déc, 2000. Voir Letter from Jamshid Tafrishi, supra note 692.

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En fait, Tafrishi décrivrait dans un affidavit adressé au ministère des Affaires Étrangères comment lui et d’autres comme lui étaient encadrés par des formateurs iraniens pour la communication de ce rapport à Human Right Watch694. Il est choquant de constater que Human Right Watch ayant immédiatement enregistré ces témoignages ne contactera ni ne visitera à aucun moment le MEK695. Par cette erreur, Human Right Watch a violé une règle de procédures établie de longue date voulant que « les enquêteurs d’une organisation de défense des droits de l’homme digne de ce nom » contacte systématiquement les partis concernés pour leur laisser « un droit de réponse 696 ». On peut également s’étonner que Human Right Watch n’ait jamais contacté la Croix Rouge, le HCR, des traducteurs expérimentés, ni une multitude de sources qui auraient su démentir ces affirmations697. C’est pourquoi on jugea que ce rapport, dès les premières heures de sa publication, comportait des « vices de procédures et était dans sa substance inexact698 ». En fait, 500 anciens membres du MEK se sont depuis manifestés à travers une déclaration signée exigeant de Human Right Watch le retrait de ce rapport. Dans cette déclaration les membres du MEK affirmaient que « le rapport était absolument faux et en contradiction flagrante avec nos observations des camps du MEK, où certains d’entre nous ont vécu pendant plus d’une décennie699 ». Autre élément capital : les sources les plus fiables et les plus compétentes – en l’occurrence les responsables militaires américains et irakiens – n’ont jamais été contactées par Human Right Watch. Les responsables militaires irakiens vivent aux côtés du MEK depuis plus de deux ans et auraient donc été en mesure d’offrir un point de vue plus approfondi sur cette organisation. Une telle bévue dépasse la négligence. Les représentants des forces de la coalition ont indiqué en conclusion que durant tout le temps où ils étaient postés en Irak, ils n’ont trouvé aucune preuve suggérant que de telles allégations contre le MEK pouvaient être vraies700. Mais plus probant encore, comme mentionné plus haut, les enquêteurs américains présents au camp d’Ashraf qui avaient cherché à vérifier consciencieusement et en toute équité chacune des allégations portées contre le MEK, avaient apporté la preuve en conclusion que ces accusations n’étaient pas fondées701. Le colonel David Philips, qui commandait la brigade de la coalition du camp Ashraf, indiquait qu’il avait eu de nombreuses conversations en tête-à-tête avec des membres, et qu’à aucun moment un membre du MEK n’avait évoqué de possibles abus commis par l’organisation702. A vrai dire, chacun des résidents du camp d’Ashraf avait été soumis à un long entretien par les agents de renseignements américains, et il n’a à aucun moment été fait mention de mauvais traitement au cours de ces entretiens. Les seules déclarations explicites entendues exprimaient plutôt le dévouement et l’engagement à l’organisation.

694 695

Voir Affidavit of Jamshid Tafrishi, supra note 650. NCRI Statement, Human Rights Watch Pushes a Discredited Political Agenda, 19 mai, 2005.

696

Nooredin Abedian, Rights Watchdog Accused of Playing Politics, Intellectual Conservative, 31 mai, 2005, consultable à http://www.iranfocus.com/modules/news/article.php?storyid=2249, citant les membres du Parlement Européen.

697

Voir UN, Red Cross Translator Disavows HRW Report on Iran Opposition, Iran Focus, 28 mai 2005. Hami Riahi était traducteur officiel pour l’ICRC et le HCR durant deux ans et il participa à au moins 300 missions d’interviews d’iraniens en Iraq qui sollicitaient le statut de réfugiés. Riahi affirme n’avoir jamais « entendu d’aucune personne qu’il ou elle avait été emprisonné ou torturé par le [MEK] ».

698 699 700 701 702

Abedian, supra note 696. Iran Focus, supra note 679. Voir Letter to Kenneth Roth, Executive Director of Human Rights Watch from Col. David Philips, 27 mai, 2005. La lettre est reproduite dans l’Annexe C. Voir id. Voir id.

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Par ailleurs, les militaires avaient fouillé le camp d’Ashraf de fond en comble à maintes occasions, sans découvrir la moindre trace d’une éventuelle prison secrète703. Le Colonel Phillips indiquait aussi que durant tout le temps où il était en poste au camp, les forces de la coalition avaient effectué de nombreuses inspections surprise et n’avaient jamais découvert quoique ce soit de suspect704. Tafrishi affirmera d’ailleurs qu’aucune prison n’a jamais existé dans ce camp et que les personnes qui souhaitaient quitter l’organisation, loin de languir dans des prisons pendant des années, étaient relogées temporairement en attendant que la Croix Rouge puisse arranger leur départ705. Ce témoignage est confirmé par le Colonel Phillips, qui se souvient que lorsque des membres souhaitaient partir, le MEK en avertissait simplement la brigade et que des arrangements étaient faits avec la Croix Rouge pour faciliter leur départ, comme le prévoit la Convention de Genève706. Il est regrettable de constater que l’Iran en est réduit à propager des mensonges dans le seul but de diffamer ses principaux opposants. Mais plus regrettable encore est de voir Human Right Watch, une organisation de défense des droits de l’homme respectée, négliger d’aller jusqu’au bout de ses pouvoirs d’investigations réels, et, par un désinvestissement honteux, et être prise au piège des conspirations de Téhéran. En conséquence des manquements de ce rapport, Human Right Watch, dit-on, a « terni sa réputation et a affecté la confiance du public en son intégrité de travail pour les droits de l’homme en général707 ». En plus de répandre de faux témoignages sur la torture et les violations de droits au sein du MEK, le régime s’attachait à disséminer des rumeurs plus bénignes et quelque peu bizarres sur le MEK. Par exemple, il a été suggéré que les membres du MEK menaient l’existence d’une secte religieuse au sein de l’organisation. Ces rumeurs ont certainement pris une certaine ampleur étant donné l’isolement du MEK dans un camp en Irak. La vérité est que le MEK est une organisation de résistance qui est obligée de vivre ailleurs qu’en Iran. L’Irak était un choix stratégique logique. Mais le MEK, malgré son isolement physique en Irak, a toujours maintenu des contacts et une totale transparence avec le monde extérieur. A cette fin, le MEK étend à tous, et plus particulièrement aux représentants des Nations-Unies, aux gouvernements étrangers, et aux organisations nongouvernementales, son invitation à visiter ses camps pour qu’ils puissent se forger leur propre opinion, en se fondant sur les faits et non sur des rumeurs. Lord Ayebury, un défenseur des droits de l’homme de grande renommée et sympathisant du MEK, a récemment tancé Human Right Watch, en rappelant au groupe qu’il lui avait pendant des années et à plusieurs reprises réitéré l’invitation de visiter le camp d’Ashraf708. Le MEK est une organisation ouverte avec des dirigeants et une structure qui est à la fois visible et collective. Ces caractéristiques sont totalement incompatibles avec le concept de secte religieuse. A ce propos, Danielle Mitterrand, première dame de France, avait publiquement mis en garde les français sur toute allégation suggérant que le MEK était une secte709. 703 704 705 706

Voir US Commander in MEK Enclave Clears Iran Group of Abuse, Iran Focus, 30 mai, 2005. Voir id; voir aussi Letter to Kenneth Roth, supra note 700. Voir Letter from Jamshid Tafrishi, supra note 692. Voir Iran Focus, supra note 703.

707

Iran Focus, supra note 703, citant Lord Avebury, fondateur et ancien président du Britain’s Parliamentary Humain Right Group (Group de Défense des Droits de l’Homme du Parlement Britannique). Lord Ayebury notait par ailleurs que les individus mentionnés dans le rapport avaient depuis longtemps été identifiés comme des agents du régime de Téhéran.

708

Voir Britain’s Veteran Rights Advocate Challenges Human Rights Watch on Iran Report, IranFocus.com, 26 mai, 2005, à http://www.iranfocus.com/modules/news/article.php?storyid=2209.

709

Voir Mohaddessin, supra note 384 at 238, citant un discours par Mitterrand en 2003 dans lequel elle se remémore ses années dans la résistance française, une organisation très similaire et que l’on pourrait difficilement qualifier de secte.

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Il importe maintenant d’examiner de près les exemples cités comme preuves que les membres du MEK agiraient comme une secte. Un exemple se distingue particulièrement : il concerne l’immolation par le feu de deux sympathisants au cours d’une manifestation à Paris en 2003710. Selon un récent article dans le New York Times, qui détaillait le contexte de la situation, ces incidents avaient eu lieu immédiatement après l’arrestation d’une figure centrale du CNRI, Maryam Rajavi711. En entendant la nouvelle de l’incarcération de Rajavi, et de sa probable déportation vers l’Iran, les sympathisants du CNRI avaient réagi avec une émotion mal contenue tant leur crainte était grande de perdre leur leader, si précieuse et une source d’inspiration, car son retour en Iran signifiait une mort certaine712. Rajavi avait par ailleurs expliqué que si les autorités françaises l’avaient autorisée à s’exprimer et à expliquer la situation aux manifestants du MEK, cet incident aurait pu être évité713. Par ailleurs, dès qu’elle le put, Rajavi demanda immédiatement à ses sympathisants de cesser toute action extrême714. On a en fait accusé les membres du MEK de vouer un culte à Rajavi. Ces charges s’appuient sur le fait que certains membres du MEK gardent des photos de Rajavi.715 Ces photos sont en fait une source d’inspiration visuelle - et non un objet d’idolâtrie – au même titre que les catholiques gardent des photos du Pape, les Bouddhistes tibétains celles du Dalai Lama et certains américains affichent des photos de leur président. Également discutables sont les histoires entourant des séances spectaculaires d’autocritique716. Bien qu’il y ait eu réellement des séances de mise au point stratégique basées sur des éléments de motivation, ces réunions visaient à assurer le maintien de l’objectif du MEK qui est l’instauration de la démocratie en Iran. Les accusations de secte probablement les plus répandues sont celles qui concernent certaines décisions du MEK sur les familles de l’organisation. Il faut noter que le MEK a toujours valorisé la famille. L’organisation fait construire des résidences familiales, des écoles et des haltes garderies pour les familles717. Malheureusement, durant la guerre du Golf de 1991, certaines circonstances rendirent impossible une vie de famille au camp d’Ashraf718. Le camp était vulnérable aux bombardements accidentels ; les forces iraniennes, par ailleurs, avaient porté de graves attaques sur le camp.719 La situation du MEK était déjà très incertaine. Les sanctions économiques imposées à l’Irak affectaient également sérieusement la capacité du MEK à pourvoir à la survie de tous dans le camp, et le sort des enfants qui y vivaient était particulièrement inquiétant720. Au regard de ces circonstances, les dirigeants du MEK avaient décidé de s’arranger pour que les enfants du

710

Voir Rajavi calls on Supporters Not to Set Themselves on Fire, DAILY TIMES OF PAKISTAN, 20 juin, 2003.

711

Voir Craig S. Smith, Exiled Iranians Try to Foment Revolution from France, NEW YORK TIMES, 24 sept, 2005. Dans une interview avec The New York Times, Maryam Rajavi admettait que la dévotion à la cause avait parfois « pris une mauvaise direction », mais elle expliquait qu’il importait tout de même de comprendre les circonstances qui entouraient l’événement.

712 713

Voir id. Voir id.

714

DAILY TIMES OF PAKISTAN, supra note 710, citant Rajavi, « J’ai été profondément attristée et tourmentée lorsque j’ai su que vous, mes bien-aimés, vous immoliez si bien qu’il m’est à présent très difficile de contrôler mon chagrin et de surmonter mes émotions ».

715 716 717 718 719 720

Voir Elizabeth Rubin, The Cult of Rajavi, NEW YORK TIMES MAGAZINE, 13 juil., 2003. Voir id. Voir Mohaddessin, supra note 384. Voir Mohaddessin, supra note 384. Voir Mohaddessin, supra note 384. Voir Mohaddessin, supra note 384.

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camp soient relogés721. Un célèbre avocat allemand s’est proposé d’emmener des enfants en Europe, et ces derniers y résident encore aujourd’hui722. Si la décision d’expédier les enfants dans un pays lointain peut paraître dure, cette attitude ne correspond en rien à l’image d’une secte. Une secte exercerait plutôt une volonté de retenir tous ses membres et de les isoler de toute influence extérieure. Il est intéressant de remarquer que les enfants qui furent envoyés loin, sont revenus vivre auprès de leurs parents à Ashraf, une fois devenus adultes. Pleinement conscients du danger de la situation dans laquelle vivaient les membres du MEK, les dirigeants du groupe décidèrent d’exiger le départ du camp des membres ou leur divorce723. Cette exigence qui pourrait paraître étrange obéissait à une logique spécifique. Le but de cette requête était d’assurer le plein engagement des résidents du camp dans leur mission de renverser le régime clérical au pouvoir en Iran. Après tout, le camp d’Ashraf n’est « pas un lieu pour d’attachements sentimentaux »724. L’objectif du MEK et les dangereuses circonstances dans lesquelles vivent les membres en Irak ont poussé les dirigeants du MEK à prendre de grandes précautions pour s’assurer que le mouvement perdure et que ses membres restent en sécurité. Même au regard de ces mesures, aucun aspect du MEK, lorsque resitué dans son contexte, ne peut évoquer une secte.

721 722 723 724

Voir Mohaddessin, supra note 384; voir aussi Camp Ashraf, Iraq, supra note 406. Voir Mohaddessin, supra note 384 at 257. Voir Mohaddessin, supra note 384. Camp Ashraf, Iraq, supra note 406.

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ANNEXE A QUARTIERS GENERAUX Force Multi-nationale-IRAK BAGHDAD –IRAK APG AB 08242-1400

Le Commandant Adjoint La population d’Asrhaf Ashraf Iran Je suis heureux d’annoncer, par le présent courrier, que chaque habitant du camp d’Ashraf sera reconnu personne protégée en vertu de la Quatrième Convention de Genève. Cette désignation facilitera les efforts des organisations internationales à vous apporter assistance, conformément aux lois internationales conformément aux lois internationales en vigueur. Vous avez signé un accord rejetant toute violence et terrorisme. Cela représente un signe fort et une première étape décisive vers la solution prochaine de votre situation individuelle. Dans nos efforts d’accéder à une paix future pour la population du camp d’Ashraf, nous continuerons à rechercher les meilleures solutions à votre situation individuelle et sollicitons votre patience et coopération dans ce long processus.

Très respectueusement,

Geoffrey D. Miller Général de Division, Armée des USA Général Commandant Adjoint

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ANNEXE B L’accord pour les individus de l’Organisation des Moudjahidin du Peuple d’Iran Il vous est proposé d’être libres du contrôle et de la protection en échange de votre allégeance à certaines conditions. En échange de vos promesses, vous serez libres du contrôle et de la protection des forces multinationales en Irak dans les délais jugés les plus raisonnables. Veuillez prendre connaissance de l’Accord ci-dessous. Si vous acceptez de souscrire aux conditions du présent Accord, veuillez signer au bas de la page.

Je, ________________________________, soussigné, souscrire, en toute connaissance de cause, de mon plein consentement et volontairement à l’Accord avec les Forces Multi-Nationales – Irak, et je m’engage à respecter les conditions suivantes :

A. Je refuse de participer ou de soutenir le terrorisme.

B.

J’ai remis tout matériel militaire et armes qui étaient sous mon contrôle et ma responsabilité

C. Je refuse toute violence et je ne prendrai pas les armes illégalement ni ne m’engagerai dans des actions hostiles. Je me conformerai aux lois irakiennes et aux mandats pertinents des Nations-Unies durant mon séjour dans ce pays. Je suis conscient que je suis libre de partir et de regagner mon pays d’origine lorsque des options de dispositifs viables seront disponibles. Je suis conscient que certaines options de ces dispositifs comprennent : un retour à mon pays d’origine ; un accueil dans un tiers pays ; une demande auprès du ministère du Déplacement et des Migrations pour l’obtention d’un permis de séjour permanent en Irak, ou une demande auprès d’organisations internationales comme le HCR. Je m’engage à coopérer avec les Forces Multinationales en Irak basées au camp d’Ashraf jusqu’à ce que ces options soient mises à effet. Si je devais commettre une violation d’une ou des conditions du présent Accord, je ferai l’objet de poursuites ou d’incarcération, et de sanctions administratives. Je m’engage à me conformer scrupuleusement au présent Accord.

____________________________________________________________________________________ SIGNATURE NOM (EN CARACTERES D’IMPRIMERIE) NUMERO D’IDENTITÉ

_____________________________________________________________________________________ Représentants des FMN –Irak NOM EN CARACTERES D’IMPRIMERIE, GRADE, DATE

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ANNEXE C M. Kenneth Roth Directeur Exécutif Human Right Watch 350 Fifth Avenue, 34th floor New York, NY 10118-3299 USA

Le 27 mai 2005

Référence au récent rapport de Human Right Watch sur des allégations concernant la conduite du Mujahedin e-Khalq (MeK)/ Organisation des Moudjahidin du Peuple d’Iran (OMPI) au camp d’Asharf, Irak. J’étais aux commandes de la brigade de la 89ème brigade de la police militaire et j’étais responsable de la sécurité et de la sûreté au camp d’Ashraf de janvier à décembre 2004. Au cours de cette année j’ai été informé de l’existence de nombreux rapports de torture, de caches d’armes, et d’individus retenus contre leur volonté par le Mujahedin e-Khalq. J’ai donné ordre à mes subordonnés d’enquêter sur chacune de ces allégations. Dans de nombreux cas, j’ai moi-même dirigé les équipes d’inspection, organisant des visites non annoncées dans les structures où le MeK/OMPI aurait été perpétré les abus suggérés par ces allégations. Au cours de ces 12 mois nous n’avons pas une fois découvert de preuve crédible pouvant étayer les allégations mentionnées dans votre récent rapport. Je n’aurais pas toléré les abus que vous décrivez dans votre rapport, et n’aurais autorisé aucune action de la part du MeK/OMPI relative à la détention de personnes contre leur volonté. Chacun des rapports faisant état de torture, d’enlèvement, et de dépravation psychologique s’est révélé infondé. En réalité, le MeK/OMPI nous tenait régulièrement des personnes souhaitant quitter l’organisation, les transportant jusqu’à nos portes. A votre demande, je suis en mesure de vous fournir des explications détaillées sur certaines allégations spécifiques et les investigations subséquentes conduites par mes unités. A ma connaissance, en tant que haut responsable du maintien de la sûreté et de la sécurité du camp d’Ashraf durant l’année 2004, je puis affirmer qu’aucun des incidents relatés dans votre rapport, ne peut être étayé par des preuves substantielles. Je suis devenu assez intime avec les dirigeants du MeK/OMPI et connaît personnellement de nombreux individus parmi les quelques 3000 résidents du camp. J’ai régulièrement visité les quartiers réservés aux hommes et aux femmes. Ces visites étaient parfois annoncées mais le plus souvent il s’agissait d’inspections effectuées à l’improviste. Mes unités subordonnées sélectionnaient au hasard des cantonnements, les quartiers généraux, les entrepôts et les bunkers pour des visites impromptues. A aucun moment, les hommes de mes unités n’ont découvert de conduites réprouvables de la part du MeK/OMPI. Il est à noter aussi que pas une fois les membres du MeK/OMPI n’ont refusé l’entrée dans leurs structures. Je pense que votre récent rapport se fonde sur des informations infondées fournies par des individus sans la moindre connaissance du sujet ou qui ont communiqué de telles informations pour intérêt personnel. J’ai moi-même passé un an de ma vie en Irak en tant que responsable du camp d’Ashraf. Mes connaissances de prime abord acquises sur le MeK/OMPI et au cours des opérations du camp d’Ashraf sont étendues. Mes commentaires se fondent sur une année d’expérience sur le terrain. Je porte un regard très satisfait sur cette expérience car je sais que mes unités ont fait un travail exemplaire pour le maintien de la sécurité et de la sûreté d’une part forces de la coalition basées à Ashraf mais également de celles des quelques 3000 résidents protégés qui y vivent. J’ai dialogué avec de grands groupes d’individus membres du MeK/OMPI mais ai également eu des conversations en tête-à-tête avec des membres. Au cours de ces entretiens, tant avec de jeunes hommes et femmes qu’avec de hauts responsables de l’organisation, il n’a jamais été fait mention d’une quelconque conduite réprouvable telles que celles mentionnées dans votre rapport. L’Irak en 2004 était très dangereux. Selon mon opinion, le camp d’Ashraf était alors le lieu le plus sûr de toute la zone dont j’avais la responsabilité. Mes forces basées au camp d’Ashraf n’ont à aucun moment été victimes d’incidents ou de blessures de combat. Je me suis sentie personnellement en sécurité même lorsque je me suis trouvé seul dans une même pièce entouré de centaines de Moudjahidin. Nous avions des dialogues ouverts et avons débattu de sujets difficiles. J’ai été extraordinairement impressionné par la dévotion qui régnait dans les quartiers des femmes. Ces unités étaient gérées professionnellement et montraient un profond soutien pour la liberté, la démocratie et l’égalité des

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droits des femmes. Le dévouement de ces membres féminins de l’organisation était inspirante. Au cours de l’année 2004, seules quatre femmes ont demandé à quitter le MeK/OMPI. Il y eut le cas d’une jeune femme qui souhaitait partir mais voulait d’abord honorer son rôle de chanteuse dans une des festivités religieuses. Tandis qu’un de mes commandants l’encourageait vivement à quitter le camp immédiatement, elle insista pour rester et chanter pour cette fête avant de rentrer chez elle retrouver sa mère. Quelques jours plus tard, nous avons été avertis que la jeune était prête à partir et nous sommes allés la chercher dans un bâtiment de type hôtelier où elle nous attendait. Les trois autres femmes ont également quitté de leur plein gré le MeK/OMPI. Je n’ai jamais constaté d’incidents dans lequel une femme ou un homme aurait été retenu par l’organisation contre sa volonté. J’ai pu constater que les membres de l’organisation étaient totalement libres de rester ou de quitter le MeK/OMPI. Comme je l’ai précédemment dit, j’ai été particulièrement impressionné par ma visite des quartiers de femmes. Je souhaiterais que ma propre fille visite un jour ces unités pour des échanges culturels. S’il ne régnait pas actuellement en Irak une insurrection permanente, j’autoriserais ma fille à voyager à Ashraf pour qu’elle puisse rencontrer ces membres féminins du Mudjahedin-e- Khalq si professionnelles et si dévouées à leur cause. Merci d’avoir eu la patience de lire mes commentaires, sachant que votre rapport est en directe confrontation au professionnalisme de mes unités. Nous avons maintenu la sécurité et la sûreté du camp d’Ashraf et nous pourrons dans quelques années nous en souvenir avec la certitude que notre présence a apporté une différence. Respectueusement,

Col. David Phillips « Griffin 6 » 89th Military Police Brigade Fort Hood Texas 76544 Duty : 254-287-3700 « Proven in Battle » Source: Rapport de Human Rights Watch sur le Mujahedin-e Khalq, CONGRESSIONAL RECORD, E1299, 21 juin, 2005 .

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Rapport d’Évaluation indépendant sur le Mujahedin-e Khalq et sur le Conseil National de Résistance Iranienne Pour le DLA Piper Rudnick Gray Cary US LLP

Préparé par GlobalOptions, Inc.

Aucun des rapports du DLA Piper ni de GlobalOptions n’ont été préparés sous la direction, le contrôle ou le financement du MEK ou du CNRI. © DLA Piper Rudnick Gray Cary US LLP 2006

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Table des matières I. Sommaire ............................................................................................................................................................................... 93 II. Introduction........................................................................................................................................................................... 96 III. Les Moudjahidin du Peuple de l’Iran................................................................................................................................... 97 A. Les membres arrêtés ............................................................................................................................................... 98 B. Les attaques........................................................................................................................................................... 100 IV. Les marxistes reprennent le MEK ..................................................................................................................................... 101 A. L’organisation de Peykar ...................................................................................................................................... 103 B. Les attaques........................................................................................................................................................... 104 V. Le MEK original ressuscité ................................................................................................................................................ 107 A. Le Conseil National de Résistance de l’Iran ......................................................................................................... 111 VI. Qui sont les Moudjahidin?................................................................................................................................................. 113 A. Les Moudjahidin constitutionalistes .................................................................................................................... 113 B. Les Moudjahidin de la jungle révolutionnaire ..................................................................................................... 113 C. Le Mouvement de Libération.............................................................................................................................. 114 D. Moudjahidin et non Marxistes ............................................................................................................................. 115 1. La plate-forme politique du CNRI.......................................................................................................... 116 VII. Les raisons de l’opposition du MEK au Shah .................................................................................................................. 120 VIII. La désignation d’organisation étrangère terroriste.......................................................................................................... 121 A. Les allégations du ministère des Affaires Étrangères en 2005.............................................................................. 122 IX. Accusations d’assassinats d’américains............................................................................................................................. 124 A. Général de Brigade Harold Price .......................................................................................................................... 124 B. Lt. Col. Lewis Hawkins ........................................................................................................................................ 125 C. Col. Paul R. Schaffer et Lt. Col. John H. Turner .................................................................................................. 127 D. Les employés de Rockwell ................................................................................................................................... 129 X. Allégations de soutien au putsch de l’ambassade des Etats-Unis ....................................................................................... 131 XI. Allégations du bombardement du Parti Islamique d’Iran par le MEK .............................................................................. 133

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XII. Allégations de participation à des actions militaires avec Saddam Hussein .................................................................... 135 A. La guerreIraq-Iran................................................................................................................................................ 136 B. L’Irak supprimé de la liste des terroristes ............................................................................................................. 137 C. Le ministère des Affaires Étrangères s’en prend au MEK/CNRI.......................................................................... 140 1. Les otages américains .............................................................................................................................. 143 D. Le MEK/NCRI relocalisé en Irak ......................................................................................................................... 145 E. L’Armée de Libération Nationale ......................................................................................................................... 148 F. Les rencontres du ministère des Affaires Étrangères avec le MEK/CNRI ........................................................... 150 XIII. Allégations de suppression des kurdes............................................................................................................................ 152 XIV. Allégations d’attaques d’ambassades iraniennes ............................................................................................................ 159 XV. Allégations d’objectifs d’attaques à l’encontre de responsables militaires iraniens stratégiques..................................... 165 XVI. Allégations d’attaques sur les quartiers généraux du NASR .......................................................................................... 168 XVII. Allégations d’une attaque contre l’Iran en février 2000 ................................................................................................ 170 XVIII. Allégations d’attaques de mortiers près de la frontière irano-irakienne ...................................................................... 172 XIX. Les gestes de bonne volonté de l’Iran............................................................................................................................. 179 A. La désignation des Moudjahidins parmi les Organisations Étrangères Terroristes.................................................. 179 B. La désignation du CNRI parmi les Organisations Étrangères Terroristes ................................................................ 181 C. La fermeture des bureaux du CNRI.......................................................................................................................... 182 XX. Raid sur les quartiers généraux du CNRI à Paris en 2003 ............................................................................................... 184 XXI. Conclusion ...................................................................................................................................................................... 188 XXII. Annexe .......................................................................................................................................................................... 192

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I. Sommaire Le rapport d’évaluation indépendant rédigé par GlobalOptions, Inc., examine la logique derrière la désignation par le ministère des Affaires Étrangères du Moudjhahidin-e Khalq (MEK) et du Conseil National du Conseil de Résistance de l’Iran (CNRI) comme Organisations Étrangères Terroristes. Si l’on s’en réfère à l’étude par GlobalOptions des documents officiels et rapports, témoignages, mémorandum, rapports de presse et interviews avec d’anciens responsables et agents de renseignements au sein des gouvernements américains et français, il apparaît clairement que les raisons avancées pour justifier la désignation du MEK/CNRI sur la liste des Organisations Terroristes comportent un vice de procédure fondamental.

Le MEK est une organisation laïque, islamique et pro-démocratique qui, depuis plus de 40 ans, se consacre à l’établissement d’une démocratie en Iran. Le MEK n’est pas marxiste. L’organisation est née à partir de l’opposition contre le régime du Shah Mohammad Reza, qui était anti-démocratique et oppressif. Le MEK s’oppose aujourd’hui au régime théocratique actuellement au pouvoir en Iran pour les mêmes raisons. Dans leur tentative d’apporter la démocratie et la liberté en Iran, l’organisation du MEK et ses membres ont souffert des décennies de persécution, emprisonnement, torture et exécutions.

Le MEK a à plusieurs reprises été réduit à l’état de pion, sacrifié dans les relations États-Unis/Iran et franco-iraniennes. Le gouvernement iranien craint que le MEK car il est pro-démocratique et soutient le changement de régime. Téhéran a utilisé toutes les opportunités possibles pour exiger de la France et des États-Unis le sacrifice du MEK comme concession nécessaire au soutien de l’Iran : • En 1985, les États-Unis désignent le MEK comme « terroriste et marxiste », dans le cadre d’une apparente négociation en vue de faire libérer les otages américains au Liban. • En 1986, le gouvernement français chasse le MEK de Paris en vue de s’assurer l’aide iranienne dans la libération des otages français au Liban. • En 1997, le MEK est mis sur la liste des Organisations Étrangères Terroristes comme « geste de bonne volonté » envers l’Iran, selon un haut responsable de l’administration Clinton et ancien officier de haut rang de la CIA. • En octobre 1999, le MEK figure à nouveau sur la liste des organisations terroristes et le CNRI y est ajouté en vue d’encourager l’Iran à extrader des poseurs de bombe saoudiens responsables de l’attaque les tours Khobar en Arabie Saoudite. • En juin 2003, une brigade de 1200 policiers français lourdement armés fait irruption dans les locaux du CNRI/MEK à Paris et procède à l’arrestation de 164 personnes. Dix-sept membres sont accusés de conspiration criminelle. Selon les nouvelles de la presse et une source haut placé des renseignements français, le but de ce raid était de gagner les faveurs de Téhéran pour le compte d’entreprises françaises à l’époque en concurrence pour l’obtention de contrats commerciaux avec l’Iran. • En août 2003, les États-Unis ferment les bureaux du CNRI basés à Washington DC comme un autre geste de bonne volonté envers l’Iran. A l’époque, les États-Unis négociaient secrètement avec Téhéran des questions relatives à l’Irak,

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al-Qaida, et du programme nucléaire de l’Iran. Avant que les bureaux ne soient fermés, un responsable iranien avait déclaré, « nous réagiront de notre côté à tout geste de la part des États-Unis ».

Quatre allégations sont le plus souvent citées pour appuyer la décision de désigner le MEK comme organisation terroriste. Ces points sont résumés ci-dessous, avec une brève description des raisons pour lesquelles ils sont inexacts et ne justifient pas le maintien de cette désignation sur la liste noire. • Des allégations d’assassinats d’américains dans les années ’70 : L’organisation du MEK original n’était pas impliquée dans les assassinats d’américains en Iran qui eurent lieu dans les années ’70. Entre 1971 et 1972, 69 membres du MEK – et la presque totalité de la direction du MEK - furent exécutés ou emprisonnés. Les membres sympathisants qui survécurent se trouvèrent isolés, leur groupe fragmenté et privé de hiérarchie de commandements. Parmi les membres restant, se trouvait une poignée de marxistes qui réorganisèrent un groupe avec les quelques éléments restants et menèrent des opérations au nom du MEK dont il détournaient le sens initial. Ces membres marxistes étaient violents et plus radicaux. Ils visaient spécialement les américains pour démontrer que leur doctrine était plus efficace que celle du MEK original, et cela dans le but de gagner l’allégeance des membres les plus radicaux parmi les survivants. Vahid Afrakhteh, un de ces dirigeants marxistes, confessa le meurtre du Lieutenant Colonel Lewis Hawkins, du Colonel Paul Shaffer et du Lieutenant Colonel Jack Turner. Les marxistes revendiquèrent également les assassinats de trois employés de Rockwell en 1976. Ils continuèrent à opérer jusqu’au début des années ’80 époque lorsqu’ils furent éradiqués par le régime de Khomeiny. Massoud Rajavi, membre original et non-marxiste du MEK qui fut emprisonné en 1971, fut libéré en 1979. Il reforma l’organisation telle qu’elle existe aujourd’hui. • Des allégations de soutien au putsch de l’ambassade des États-Unis en 1979 : Le MEK n’a pas aidé à la planification ni à l’assaut de l’ambassade des États-Unis à Téhéran. En réalité, selon le porte-parole des étudiants radicaux responsables de l’assaut de l’ambassade, le MEK « s’était opposé à cet assaut et à la confrontation avec l’Amérique dès le départ ». Le MEK considérait que la crise des otages était regrettable et nuisible à leur position politique. La crise des otages a permis par ailleurs au régime de Khomeiny de consolider son pouvoir et d’écarter le gouvernement intérimaire pro-démocratique, que le MEK soutenait. • Des allégations d’une coopération militaire avec Saddam Hussein : En juin 1987, le MEK annonce la formation de l’Armée de Libération Nationale, basée en Irak. Le MEK opérait en toute indépendance vis-à-vis de Saddam Hussein. La plupart des armes de l’Armée Nationale de Libération furent saisies durant les confrontations avec l’Iran. Le ministère des Affaires Étrangères américain reproche au MEK de s’être aligné à la politique de Saddam Hussein durant la guerre Iran-Irak. Il faut toutefois rappeler que les États-Unis étaient également alliés de Saddam durant la guerre Iran-Irak. En 1982, le président Ronald Reagan émet une Directive de Décision de Sécurité Nationale autorisant les États-Unis à utiliser tous les moyens nécessaires pour empêcher l’Iraq de perdre la guerre contre l’Iran. Par la suite, les États-Unis offrirent à l’Irak un important soutien financier. Par ailleurs, plus de 60 responsables de l’agence de renseignements de la défense fournirent à Saddam des informations détaillées sur les déploiements iraniens tandis que

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la CIA tranmettait des photos satellites du front iranien. Le blâme du ministère des Affaires Étrangères américain adressé au MEK pour sa coopération avec l’Irak est par conséquent tout à fait incohérent si l’on garde à l’esprit l’alliance des États-Unis avec l’Irak à la même époque. • Allégations de suppression des kurdes : Il n’existe aucune preuve crédible confirmant la collaboration du MEK dans la répression du soulèvement de Shia et des kurdes ou de toute autre rébellion en Irak. L’allégation est basée sur de fausses informations disséminées par le régime iranien et ses alliés ainsi que par d’autres sources peu fiables. En 1999, le Parti Démocratique Kurde, affirmait publiquement que le MEK n’était pas impliqué dans la répression du peuple kurde lors de son soulèvement et durant ses retombées. Le MEK et le CNRI ont été désignés Organisations Étrangères Terroristes pour des raisons politiques et non sur la foi d’une analyse objective et globale des faits. Par conséquent, le maintien du classement de ces groupes parmi les organisations terroristes ne se fonde sur aucune base concrète. Il serait même juste d’avancer que le retrait de ces groupes de la liste noire renforcerait l’influence américaine dans ses relations complexes avec Téhéran tout en constituant un soutien matériel pour les objectifs de politique régionale et mondiale des États-Unis, à savoir le combat contre le terrorisme et contre la prolifération des armes nucléaires.

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II. Introduction

Le rapport d’évaluation indépendant sur le Moudjahidin-e Khalq et sur Conseil National de Résistance de l’Iran a été rédigé par le DLA Piper Rudnick Gray Cary US LLP. En complément de cette évaluation, GlobalOptions, Inc., a procédé à l’examen des informations individuelles et open source, interviewé des responsables clés très informés des politiques et des évènements et a parlé aux membres de MEK et du CNRI. Depuis sa fondation en 1965, plusieurs volumes ont été écrits au sujet du MEK, dont la plupart portent à confusion, sont inexacts et contradictoires. Le MEK a souvent été la cible d’une propagande haineuse et de stratégies politiques destinées à gagner les faveurs de l’Iran. Les rapports rédigés par le gouvernement américain sur cette organisation contiennent de nombreuses erreurs factuelles. Dans certains cas, des détails cruciaux relatifs à certains évènements ne sont pas accessibles parce qu’une chronique précise des faits n’a pas été conservée. Il en résulte qu’une évaluation objective du MEK et du CNRI est devenue au mieux une tâche ardue. Le présent rapport d’évaluation donne un aperçu de l’histoire du MEK afin de mieux comprendre ses racines et ses objectifs politiques. GlobalOptions s’est efforcé d’exposer des allégations et des preuves disponibles afin de permettre au lecteur de tirer ses propres conclusions sur le MEK et le CNRI.

GlobalOptions, Inc.

GlobalOptions, Inc. est un cabinet international pluridisciplinaire de conseil en business solutions et gestion des risques dont le siège social se trouve à Washington, DC. La société, fondée en 1998, a offert son assistance à des centaines de corporations, célébrités et gouvernements dans la gestion des complexités et des tribulations du monde moderne. Nous comptons parmi nos clients réguliers deux des dix plus grands groupes commerciaux du monde moderne, ainsi que quelquesuns des noms et visages les plus célèbres de la planète. La spécificité de GlobalOptions réside dans notre large gamme de services regroupés sur un même site et notre capacité à combiner la diversité de nos compétences pour offrir les solutions adéquates. Notre équipe d’experts compte des enquêteurs privés, des professionnels de la sécurité, des experts en relations publiques de haut niveau, ainsi que des spécialistes chevronnés du monde juridique et politique.

LE COMITE CONSULTATIF SUPERIEUR

Le Comité Consultatif Supérieur est présidé par l’Amiral William J. Crowe, ancien président du Comité des chefs d’Étatsmajors inter-armés. Le vice-président du comité est R. James Woosley, ancien directeur de la Central Intelligence Agency. Parmi les autres membres du comité consultatif figurent également William H. Webster, ancien directeur du FBI et de la CIA ; le juge William Sessions, ancien directeur du FBI ; Sir Richard Needham, ancien ministre du commerce de la GrandeBretagne ; Robert L. Livingston, ancien porte-parole désigné de la Chambre des Députés américaine ; et Rod Slater, ancien secrétaire d’État aux Transports américain.

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III. Les Moudjahidin du Peuple d’Iran L’organisation des Moudjahidin du Peuple d’Iran (OMPI), ou comme elle est appelés en farsi, le Moudjahidin-e Khalq (MEK) est une organisation laïque, islamique et pro-démocratique fondée en 1965 par trois jeunes ingénieurs qui étaient d’anciens membres du Mouvement de Libération1.

Le Mouvement de Libération, également connu sous le nom de Mouvement de la Liberté, fut fondé en mai 1961, par Mehdi Bazargan, un ingénieur qui avait suivi ses études en France et devint plus tard professeur. Le Mouvement de Libération prônait « la liberté politique et la séparation des pouvoirs » et faisait preuve d’un « véritable engagement aux principes démocratiques consacrés par les lois fondamentales de la Constitution de septembre 1905 2». Durant deux ans, le Mouvement de Libération put jouir de l’autorisation de rassemblements et de publication de matériel en Iran. Puis, le 5 juin 1963, un groupe de religieux, parmi lesquels se trouvait Ayatollah Ruhollah Khomeiny, dénonce publiquement Mohammad Reza Shah. Ce sera le catalyseur d’immenses manifestations dans les grandes villes iraniennes. La répression face à ce soulèvement – le Soulèvement de Juin – sera féroce, avec une police faisant massivement feu et tuant des milliers de personnes3. Khomeiny sera emprisonné avant d’être déporté vers la Turquie tandis que le Shah resserrera son étau sur tous les groupes de résistance. Le Mouvement de Libération fut interdit et Bazargan condamné à dix ans de prison. C’est sur les ruines du Mouvement de Libération que les trois jeunes ingénieurs créeront un groupe de discussion pour développer une nouvelle stratégie et apporter la démocratie en Iran. Le groupe se rencontre une première fois le 20 septembre, 1965, avec 20 amis de confiance. Les membres fondateurs étaient : • Mohammad Hanifnejad : Un ingénieur en machinerie agricole issu d’une famille pauvre travaillant au bazar de Tabriz • Said Mohsen : Un ingénieur civil issu d’une famille de la classe moyenne de Zanjan. • Ali-Asghar Badizadegan : Un ingénieur chimiste issu d’une famille de la classe moyenne d’Isfahan. Hanifnejad a participé au Soulèvement de Juin et sera par la suite arrêté et emprisonné pendant quelques mois4. Mohsen, qui avait rejoint le Mouvement de Libération alors qu’il était lycéen, avait été incarcéré pour avoir participé à des « turbulences » d’étudiants universitaires en 1962 et en 19635. La plupart des membres des groupes de discussion avaient un travail à Téhéran. Ils se rencontraient deux fois par semaine, étudiaient la religion, l’histoire, et la théorie de la révolution (les combats armés). Le groupe acquit une connaissance du marxisme assez approfondie sans pour autant en adopter l’idéologie. S’ils exploraient en profondeur les principes de l’économie marxiste, ils mettaient toutefois de côté sa philosophie. Comme 1 2 3 4 5

Tandis que l’organisation prônait à l’origine des politiques de gauche, elle a modéré ses points de vue et soutient aujourd’hui le libre marché et la propriété privée. Elle a toujours soutenu la démocratie et la liberté qui sont au centre de ses objectifs. The Iranian Mojahedin, Ervand Abrahamian, Yale University Press, 1989, p. 83. Des estimations du nombre de manifestants blessés se situent aux alentours de 20 000. Revolutionary Islam in Iran, Suroosh Irfani, Zed Books Ltd., London, 1983, p. 91.

Id.

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l’un des premiers membres le déclarera, le groupe tournait volontairement le dos à la philosophie marxiste dans le souci de protéger ses sensibilités religieuses6. Le groupe étendra son emprise en organisant des groupes de discussion dans d’autres villes, y compris Qazvin, Tabriz, Isfahan, Shiraz et Mashhad. En 1968, au terme de trois ans d’études, le groupe forma un comité central composé de dix membres7. Ce comité s’élargira plus tard à 12 membres puis à 16 membres8.Le comité central comptait également Massoud Rajavi, diplômé en science politique de l’Université de Téhéran et qui était ami de Hanifnejad. Rajavi, le plus jeune membre, devait réapparaitre des années plus tard en tant que dirigeant du MEK. Le Mouvement de Libération avait cherché à instaurer la démocratie et la liberté en Iran par des moyens pacifiques. Il avait toutefois échoué tandis que le Shah renforçait sa politique d’oppression. Le groupe, qui se fera connaître plus tard sous le nom de MEK, planifiera alors une nouvelle ligne d’actions, cette fois soutenue par un combat armé, pour établir la démocratie et la liberté en Iran. Pour mieux comprendre la stratégie des combats armés, le comité central entra en relation avec d’autres groupes de résistance, dont l’Organisation de Libération de la Palestine (OLP) qui offrit aux membres du groupe des entrainements dans leurs camps en Jordanie et au Liban9.

A. L’arrestation de membres

Encore inconnue du MEK, la SAVAK - service des renseignements iranien - arrêta Allah-Morad Delfani, un membre du Parti Tudeh, une organisation communiste10. Lorque Delfani fut libéré, il entra en contact avec un membre du MEK. Or , la SAVAK qui tenait le MEK sous une surveillance rapprochée depuis le début des années ’70 suivit le membre du MEK jusqu’au lieu secret des réunions du groupe. C’est ainsi qu’elle put découvrir l’identité des autres membres associés au groupe11. Peu après, la SAVAK procéda à la rafle de nombreux membres du MEK. James A. Bill, dans son ouvrage intitulé The Eagle and the Lion écrivait : « début avril cinquante autres jeunes gens accusés de complot « contre l’État » furent arrêtés par les forces de sécurité gouvernementales 12». Ervand Abrahamian évoque l’arrestation de 35 membres le 17 août, 1971. Les membres restants planifièrent rapidement une attaque contre les centrales électriques de Téhéran. Il fut également question d’enlever le Prince Shahram, le neveu du Shah, qu’ils espéraient échanger contre des membres emprisonnés de MEK13. Ces attentats seront devancés avant leur réalisation14. Grâce aux informations recueillies lors des interrogatoires des 6

The Iranian Mojahedin, Ervand Abrahamian, Yale University Press, 1989, p. 89.

7

Hanifnejad, Mohsen, Badizadegan, Mahmud Asgarizadeh, Abdol-Rasul Mekhkinfam, Ali Milandust, Ahmed Rezai, Naser Sadeq, Ali Bakeri, Mohammad Bazargani, Bahman Bazargani, Massoud Rajavi.

8

Les membres du comité original plus Ahman Rezai, Hosayn Ruhani, et deux membres non-identifiés.

9

The Iranian Mojahedin, Ervand Abrahamian, Yale University Press, 1989. p. 129. Dans les années qui suivront la CIA et d’autres sources américaines affirmeront: « plusieurs centaines » de membres du MEK assistaient aux entrainements dans ces camps. Seul un petit nombre toutefois, aura réellement fait le voyage vers ces camps.

10

Ce récit des évènements est étayée par un rapport du FBI de 1987 sur le MEK. Il y est indiqué que « selon un ancien responsable de la SAVAK, la SAVAK avait infiltré le groupe à environ la même époque [1971] ce qui avait causé l’arrestation, l’emprisonnement, la mort et l’exécution de nombreux autres groupes… » (Voir « The Mujahedin-e Khalq: An Open Source Review, 1er décembre, 1987. »)

11 12

Interview avec des membres du CNRI, août 2005. The Eagle and the Lion, James A. Bill, Yale University Press, 1988, p. 190.

13

Abrahamian, dans son livre The Iranian Mojahedin, suggère que le MEK aurait planifié un attentat sur les centrales électriques avant que la SAVAK ne les arrête quelques jours seulement avant la date prévue de l’attentat.

14

Interview avec NCRI members, Août 2005.

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prisonniers du MEK, la SAVAK procéda à une seconde rafle. Au total, 150 à 160 personnes seront détenues. Les autorités iraniennes mirent en examen 69 membres du MEK, dont la plupart des membres du comité central15. Au moment des arrestations, deux membres, Hosayn Ruhani et Torab Haqshenas étaient en voyage à l’étranger ; deux autres membres non identifiés avaient quitté l’organisation. Avant le début du procès des 69 membres, Reza Rezai fut le seul à pouvoir s’échapper. Dès février 1972, les membres emprisonnés du MEK étaient jugés devant les tribunaux militaires pour tentative de renversement de la monarchie, possession d’armes, usage de faux passeport et autres délits de moindre gravité.

Parmi les 69 membres du MEK, il y avait 27 ingénieurs, 24 étudiants, ainsi que des fonctionnaires, des professeurs de lycée, des universitaires, des médecins, des commerçants, et un conducteur de train. L’ouverture des procès se déroula devant un tribunal militaire et en public, mais se poursuivit en huit-clos après que les média aient relayé des témoignages de tortures qu’avaient subies les accusés durant leur garde à vue. Onze membres du MEK furent condamnés à mort. Parmi les autres accusés, seize furent condamnés à perpétuité, onze membres écopèrent de dix à quinze ans de prison, et vingt-cinq à des peines d’emprisonnement allant de trois à neuf ans. Parmi les seize condamnés à mort, neuf furent exécutés16.

Bazargani et Rajavi eurent leur peine commuée en prison à vie. Bazargani fut épargné car il était issu d’une famille riche tandis que Rajavi eut la vie sauve grâce à une campagne internationale organisée par son frère, un résident suisse. L’arrestation et la poursuite des membres du MEK devait porter un coup presque fatal à l’organisation. A l’exception de rares survivants, l’intégralité des quatre ou cinq cercles hiérarchiques de l’organisation fut décimée ou emprisonnée17. Reza Rezai, qui s’était évadé de prison, tenta de reconstituer le groupe, et forma un comité central avec Kazem Zolanvar et Bahram Aram18. Ce comité connut une brève existence, durant laquelle son travail fut sérieusement miné par les poursuites incessantes de la SAVAK. En mai 1972, Zolanvar fut arrêté ; le 15 juin 1972, Rezai fut tué dans une fusillade19. Sans hiérarchie de commandements, et avec des cellules secrètes isolées les unes des autres, le MEK, tel qu’il avait été initialement formé, cessa d’exister, sauf dans les prisons où ses membres étaient incarcérés. A l’origine, les membres emprisonnés étaient détenus dans deux centres et ne bénéficiaient que de rares droits de visite de leur famille et amis. Lorsque les autorités iraniennes comprirent que le MEK tentait d’entrer en contact avec des membres de l’extérieur, de nouvelles règles furent instaurées. Les membres du MEK furent disséminés à travers quatre centres carcéraux. Les gardes procédèrent à des fouilles quotidiennes et leurs contacts avec d’autres membres incarcérés ou avec des visiteurs furent sévèrement restreints20.

15

Hanifnejad, Mohsen, Badizadegan, Mahmud Asgarizadeh, Abdol-Rasul Mekhkinfam, Ali Milandust, Ahmed Rezai, Naser Sadeq, Ali Bakeri, Mohammad Bazargani, Bahman Bazargani, Massoud Rajavi.

16 17

Id. Interview avec des members du CNRI, août 2005.

18

The Iranian Mojahedin, Ervand Abrahamian, Yale University Press, 1989, p. 136. Le statut de dirigeants de ce nouveau comité ne fut pas adoubé par les membres du CNRI avec qui un dialogue avait été engagé. Parce que le comité eut une existence très brève et que ses membres furent par la suite assassinés, on sait très peu de choses sur le groupe.

19 20

Abrahamian avait indiqué une date erronée pour la mort de Rezai, en la situant après mars 1974. C’est à cette époque que les journaux avaient rapporté la nouvelle de sa mort.

Interview avec les membres du CNRI, août 2005.

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B. Les attaques

En juillet 1970, sept membres du MEK visitèrent des camps d’entrainement dirigés par l’OLP situés en Jordanie et au Liban21 et y reçurent un entrainement de plusieurs mois. A leur retour, six autres membres se rendirent dans les camps de l’OLP22. Les membres du MEK d’un second groupe se trouvaient à Dubai et étaient en route vers la Jordanie lorsqu’ils furent détenus par la police pour suspicion de faux passeports. Dans le groupe des détenus figurait Musa Khiabani, qui deviendra plus tard le « bras droit de Rajavi23 ». Lorsque Khiabani fut libéré de prison en 1979, il devint le porte-parole du MEK. Ces membres du MEK passèrent quatre mois en prison, avant d’être remis à la SAVAK. De retour vers l’Iran, Meshkinfam, Ruhani et un troisième membre du MEK qui étaient sur le même vol détournèrent l’avion vers Baghdad. La police iraquienne les incarcéra immédiatement. La branche de l’OLP al-Fatah interviendra par la suite et obtiendra leur libération et autorisation à gagner la Syrie24.

21 22 23 24

Badizadegan, Reza Rezai, Bakeri, Meshkinfam, Rajavi, Haqshenas, Mohammad Bazargani. The Iranian Mojahedin, Ervand Abrahamian, Yale University Press, 1989, p. 127. Id. at 172. Id. at 127.

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IV. Les marxistes reprennent le MEK Les membres subalternes du MEK se trouvaient totalement isolés et le groupe fragmenté après l’arrestation, l’exécution, et l’emprisonnement de ses dirigeants en 1971-72. Sans cohésion structurelle ni commandement central, les membres restants n’avaient plus qu’à redonner vie à l’organisation à partir de leurs propres desseins et idéologie.

Le MEK en tant que concept, toutefois, restait plus puissant que jamais. Après les procès des membres du MEK et l’audience publique qu’ils attirèrent, l’organisation prit une aura de héros martyres, ce qui contribua au ralliement de nouveaux membres. De nouvelles cellules furent formées avec de nouvelles recrues et des sympathisants, dont certains étaient autoproclamés et opéraient de façon autonome. Le MEK donnera naissance à d’autres groupes de militants islamiques, dont le Groupe Mahdaviyan (Goruh-e Mahdaviyan) à Isfahan, le Groupe du Vrai Shiis (Goruh-e Shi’iyan-e Rastin) à Hamadam, et le Cri du Peuple ne Sera pas Réduit au Silence (Faryad-e Khalq Khamush Nashodani Hast) à Tabriz. Ce dernier groupe aura à son actif l’assassinat de quatre agents de la SAVAK ainsi que des braquages de banques nationales. A Mashhad, des militants religieux créèrent un groupe qui se mit à agir au nom du MEK. Ses membres « posèrent des bombes dans plusieurs bâtiments y compris le Consulat Britannique et la Société Culturelle irano-américaine locale 25». Avec le temps, les membres suivants devaient assumer les responsabilités de dirigeants du « MEK » ressuscité : • Taqi Shahram : un mathématicien arrêté au cours de la première rafle et condamné à une longue peine de prison ; il s’évadera en 1972. • Bahram Aram : diplômé de l’Université Industrielle Arya Mehr et membre du MEK depuis 1969, a échappé à la rafle. • Vahid Afrakhteh : on sait peu de choses sur son passé. Il avait un frère. Rahman qui « ne fut jamais sérieusement impliqué dans aucune activité politique26 ». En 1976, il avoue avoir assassiné Lt. Col. Lewis Hawkins, Col. Paul Shaffer, et du Col. Jack Turner27. • Majid Sharif-Vaqefi : ingénieur électricien issu d’une famille de classe moyenne très religieuse.

Ce nouveau groupe de résistance était plus radical que le MEK original. Sa direction était fragmentée et idéologiquement instable. Si certains membres étaient attirés par ses liens avec l’Islam, d’autres, comme Shahram, Aram, et Afrakhteh étaient marxistes et cherchaient de plus en plus à prendre leur distance avec l’idéologie initiale du groupe. L’entité une fois ressuscitée « elle se tournera d’avantage vers le marxisme dès 1972 », explique Ervand Abrahamian. « Vers la fin de 1973, ils se mirent à lire abondamment tout ce qui concernait les révolutions cubaine, vietnamienne, chinoise et russe 28». Collaborèrent également à cette reformation du groupe, Ruhani et Haqshenas qui avaient beaucoup voyagé et rencontré des 25 26 27 28

Id. at 165. Democracy Betrayed, The National Council of Resistance of Iran, 1993, p. 17. “Iran Says Guerrilla Trained in Cuba,” The Washington Post, 11 mai, 1976. Iran Between Two Revolutions, Ervand Abrahamiam, Princeton University Press, 1982, p. 493.

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représentants de l’OLP, de la Lybie, du Front de Libération du Peuple d’Oman (les rebelles de Dhofar), du régime Baasiste irakien, et de la République Démocratique du Yémen29. Ces groupes leur offraient un soutien politique et logistique. Au début 1973, des cellules secrètes opéraient « non seulement à Téhéran mais également à Ispahan, Shiraz, Mashhad, Qazvin, Kermanshah, Zanjan et Tabriz30 ». Progressivement, Shahram, Aram, et Afrakhteh feront basculer le centre idéologique de l’organisation de résistance. Ils cesseront progressivement leurs séances de prières et remplaceront les termes de « frère » par « camarade ». L’insigne originale du MEK fut modifiée. Son inscription coranique fut supprimée ainsi que l’inscription « au Nom de Dieu ». La date de fondation du groupe fut également modifiée et le poing serré dans l’insigne agrandi pour « symboliser une haute conscience prolétarienne31 ». L’argument de ces dirigeants marxistes était qu’en assimilant la pensée marxiste et par une « conscience politique » développée, on devenait plus lucide sur les erreurs de l’Islam. Shahram, Aram, et Afrakhteh procédèrent également à une purge touchant tous les membres restés sympathisants de la doctrine du MEK original, et firent entrer des membres pro-marxistes dans le groupe pour qu’ils prennent progressivement le contrôle des cellules secrètes32. Au milieu de l’année 1974, Aram se mit à concevoir l’ébauche d’un manifeste pour annoncer officiellement le changement d’idéologie du groupe33. L’année suivante, Shahram, Aram, et l’Afrakhteh avaient pris suffisamment d’assurance et de contrôle sur le groupe pour communiquer un Manifeste expliquant la position idéologique des Moudjahidin du peuple. Ce document déclarait que le marxisme, et non l’Islam, était la vraie philosophie révolutionnaire. Il y était proclamé que l’Islam était « l’idéologie de la classe moyenne34 ». Le manifeste annonçait par ailleurs que l’organisation avait rejeté « l’Islam en faveur du marxisme-léninisme car l’Islam était l’opium du peuple et n’était au mieux qu’une idéologie petit-bourgeois et utopiste 35». Il y était également affirmé que le marxisme était la seule vraie « philosophie scientifique » de la classe laborieuse et la vraie voie de libération de l’humanité36 ». Sharif-Vaqefi soutenait toujours la doctrine originale du MEK, tandis qu’une majorité des membres de la cellule sous son contrôle était favorable aux idées de la direction marxiste. Shahram et Aram confrontèrent Sharif-Vaqefi et lui posèrent l’ultimatum suivant : il devait soit renoncer au contrôle et passer à une autre cellule à Mashhad, soit travailler en usine pour élever « sa conscience politique », soit quitter le pays37. Sharif-Vaqefi « feignit d’accepter l’option de Mashhad », mais en réalité il transféra secrètement du matériel et des équipements vers une nouvelle cache38. Le 7 mai 1975, Aram, et Shahram et « leurs sympathisants », dont Vahid Afrakhteh, tentèrent « d’attaquer Sharif-Vaqefi ». Dans la fusillade qui suivit Sharif-Vaqefi fut tué. Les membres musulmans du MEK original incarcérés ignoraient les changements idéologiques qui avaient lieu au sein de l’organisation reformée. Lorsqu’ils 29 30 31 32 33 34 35 36 37 38

The Iranian Mojahedin, Ervand Abrahamian, Yale University Press, 1989, p. 137. Id. at 129. Id. at 165. Interview avec les membres du CNRI, août 2005. The Iranian Mojahedin, Ervand Abrahamian, Yale University Press, 1989, p. 146. Iran Between Two Revolutions, Ervand Abrahamiam, Princeton University Press, 1982, p. 419. The Iranian Mojahedin, Ervand Abrahamian, Yale University Press, 1989, p. 145 Id. at 145. Id. at 162. Id. at 146.

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apprirent que le groupe s’était transformé en faction marxiste, ils appelèrent au renversement des dirigeants, affirmant que le nom de leur organisation avait été usurpé39. Les membres musulmans du MEK exhortèrent les éventuels sympathisants à désavouer le groupe marxiste qui avait détourné leur nom40. En réaction à cette scission ouvertement déclarée, Abol-Hasan Pani-Sadr, à Paris, publia un article où il expliquait que les musulmans ne devraient jamais faire confiance aux marxistes41. Le 4 mai, 1976, Aram fut tué dans une fusillade lorsque les autorités iraniennes « firent irruption dans sa cache à Téhéran42 ». (Selon Abrahamian, Aram et les deux autres dirigeants furent tués en novembre 197643).

En 1978, le groupe marxiste renonça à sa bannière usurpée et annonça son nouveau nom : la Branche Marxiste-léniniste de l’Organisation des Moudjahidin du Peuple Iranien (Bakhsh-e Marksisti-Leninisti-ye Sazeman-e Mojahedin-e Khalq-e Iran). Ce nom changera par la suite pour devenir Peykar44. La formation de ce groupe marxiste donnera naissance à d’autres groupes de résistance radicaux comme le Sazeman-e Kargazan-e Engelabi-ye Iran (l’Organisation des Travailleurs Révolutionnaires Iraniens). Ce groupe deviendra plus tard le Rah-e Kargar (La Voie des Travailleurs)45.

A. Peykar Organisation

Le nouveau nom de la Branche Marxiste-léniniste de l’Organisation des Moudjahidin du Peuple Iranien (Bakhsh-e MarksistiLeninisti-ye Sazeman-e Mojahedin-e Khalq-e Iran) fut officiellement annoncé en 197846. Le groupe par la suite fusionna avec des entités maoïstes pour former l’Organisation de la Lutte sur le Chemin de l’ Émancipation de la Classe Laborieuse (Sazeman-e Paykar dar Rah-e Azadi-ye Tabaqueh-ye Kargar) qui devint l’organisation Paykar47. En dehors de Shahram, ses dirigeants principaux étaient entre autres : •

Jalil Ahmadian : Membre de l’Association des Étudiants Islamistes et le Mouvement de Libération, il est condamné à une longue peine de prison et ne sera libéré qu’en 1979. Pendant sa détention, il devient marxiste, et prend la tête d’un communauté de Moudjahidin Marxistes dans la prison de Sharaz. A sa sortie de prison il rejoint Paykar mais sera tué deux ans plus tard48.

39 40 41 42 43 44 45 46 47 48

Id. at 164. Id. Id. ”Iran Says Guerrilla Trained in Cuba,” The Washington Post, 11 mai, 1976. The Iranian Mojahedin, Ervand Abrahamian, Yale University Press, 1989, p. 166. Id. at 146. Id. Id. Id. Id. at 147.

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Ali Reza (Sepasi) Ashtiyani : incarcéré en 1964 pour appartenance au Parti de la Nation Musulmane. En 1971, il intègre le MEK alors qu’il est encore étudiant; juste avant une vague d’arrestations massives, il passe dans la clandestinité.



Puran Bazargan : Premier membre féminin du MEK, elle était mariée à Hanifnejad. Elle deviendra plus tard marxiste.



Morteza Aladpush : Un membre fondateur de Paykar, il est incarcéré en 1972 et prend la tête d’un groupe de Marxiste Moudjahidin dans la prison de Qasr.



Hasan Aladpush : Lui et son épouse, Mahbubeh Motahedin-Alapush, tous deux enseignants, seront tués par la police en août 1976.

Ruhani et Haqshenas, qui soutenaient le groupe marxiste, jouèrent également « un rôle crucial au sein de Paykar 49». Le groupe Paykar fit sa première apparition dans les média occidentaux en 197950. Jusqu’en 1982, le groupe fut occasionnellement cité comme un groupe de résistance, d’abord en opposition du Shah puis contre le Parti Républicain Islamique (PRI) de Khomeini. En juillet 1981, les Gardiens de la Révolution firent irruption chez seize membres du Paykar et s’emparèrent aussi d’une cache d’armes qui comprenaient 120 revolvers, 60 fusils, 40 mitraillettes et 1200 grenades à main51. En août, le gouvernement iranien annonçait l’exécution de 12 membres du groupe marxiste-léniniste Paykar52. En novembre 1981, le PRI annonçait l’arrestation de grandes figures dirigeantes du Paykar ainsi que la saisie de « leurs documents organisationnels, leurs machines à écrire, leurs polycopieuses, leurs armes chinoises, leurs munitions anti-char et leurs roquettes, leurs fusils mitrailleurs et pistolets égyptiens et pakistanais, leurs bombes fabriquées en Égypte et leurs armes chimiques53 ». Dix caches du Paykar furent découvertes et détruites par les Gardiens de la Révolution et environ 70 membres furent arrêtés en mai 1982, ce qui mit fin aux activités de l’organisation54.

B. Les attaques

Il est pratiquement impossible de déterminer, parmi ces organisations de résistance, les vrais auteurs d’attentats commis en Iran au début des années ’70. Dans certains cas, des communiqués furent diffusés, revendiquant les attentats. Dans d’autres cas, divers groupes revendiquaient simultanément une même attaque. Certaines attaques en revanche ne furent jamais revendiquées. Des groupes disaient agir au nom du MEK, bien mais étaient en réalité totalement autonomes55.

49 50 51 52 53 54 55

Id. at 146. “Iran’s Guerrillas: Different Beliefs, Common Goal,” The Washington Post, 20 février, 1979. “Fourteen Die in Election Violence,” Associated Press, 25 juillet, 1981. “International,” United Press International, 4 août, 1981. Capture of ‘Left-Wing’ Terrorist Group,” Security Forces Announcement, BBC Summary of World Broadcasts, 11 novembre, 1981. “More Hideouts of Armed Opposition Group Discovered in Iran,” Xinhua, 13 mai, 1982. The Iranian Mojahedin, Ervand Abrahamian, Yale University Press, 1989, p. 165.

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Selon un officier traitant de la CIA en poste à Téhéran de juillet 1973 à août 1975, l’agence ne sut faire la distinction entre l’organisation marxiste qui avait repris le contrôle des éléments restants du MEK après la décapitation du groupe, et le MEK musulman original dont les membres furent incarcérés en 1971 et en 1972. A cause des arrestations massives des membres du MEK original, de leurs procès et de la publicité qui leur fut faite, le nom du MEK était largement connu. Des attentats perpétrés par d’autres groupes furent fréquemment attribués au MEK. L’officier traitant de la CIA (cité dans le paragraphe précédent) affirma qu’il ne connaissait pas l’existence du Feda’iyan, le groupe de résistance marxiste qui perpétra entre 1971 et 1975 trois fois plus d’attentats que le MEK marxiste, dont des assassinats de responsables, des braquages de banque, et des attentats à la bombe dans des locaux governementaux56. A l’époque le Feda’iyan était mieux organisé et « réussissait » mieux que d’autres groupes de résistance, en terme de recrutement, de propagande, de martyres, et de grèves universitaires57 . Avant 1972, le comité central du MEK élabora une stratégie de lutte armée qui ciblait essentiellement la police et la SAVAK. Le MEK se rendit compte qu’il n’aurait pas la force suffisante de défier directement le Shah. En revanche, en ciblant les services de sécurité, il espérait dissiper chez le public la crainte de se joindre à des manifestations massives contre le Shah58. L’organisation du MEK marxiste développa sa propre stratégie. Elle visait des corporations occidentales et des américains, cherchant à prouver que les projets marxistes rendaient le MEK plus efficace que ne l’aurait jamais été le MEK musulman d’origine. Les marxistes affirmaient que le MEK musulman avait échoué dans ses objectifs car sa doctrine était inadéquate mais qu’après sa refondation en tant qu’organisation marxiste, il avait gagné en puissance et réussite, preuves en étant ses attentats réussis contre les américains59. Dans un document exfiltré d’une prison en 1976 et publié en 1979, Massoud Rajavi condamnait les attaques du MEK à l’encontre de citoyens américains : au milieu des conflits idéologiques au sein de l’organisation, tandis que les dirigeants de pleine intégrité morale gardent une conduite juste et réaliste, des dirigeants opportunistes à la tête d’une organisation remaniée ont lancé des opérations militaires (l’assassinat du Colonel Zandipour, les Colonels américains, etc.). La survie de l’organisation en tant qu’entité unique était en question , après cette purge massive et le découragement de ses membres, mais voici que (les dirigeants opportunistes) ont fait porter à l’organisation le fardeau d’opérations militaires majeures. Ces opérations ont été entreprises dans une tentative d’écraser tout conflit larvé au sein du groupe et de permettre aux opportunistes de défier les véritables Moudjahidin [musulmans] en étant en position de force… Ces opérations ont servi les intérêts des opportunistes, qui ont consolidé la base de leur pouvoir. Par ces mêmes moyens, ils ont su utiliser le prestige d’opérations militaires pour gagner en crédibilité et assoir leur nouvelle position d’opportunistes60.

Le « MEK » marxiste ont cherché à former un front uni avec le Feda’iyan marxiste. Mais les Feda’iyan ont refusé de coopérer, car ils étaient contre la tactique du MEK qui consistait à cibler les conseillers étrangers plutôt que les dirigeants iraniens. Les deux groupes, toutefois, ont réellement coopérer sur plusieurs évènements, tels que l’organisation d’une grève

56 57 58 59

Id. at 152. Id Interview avec les membres du CNRI, août 2005. Id.

60

Tahlil-e Amouzeshi-ye Bayaniye Apportunist-haye Chapnama (Educational Analysis of the Statement of the Pseudo-Leftist Opportunists), People’s Mojahedin of Iran, Printemps 1979, pp. 237-239.

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en février 1974 pour attirer l’attention sur l’usage de la torture par la SAVAK61. Une lecture précise des faits autour d’un attentat est également rendue plus difficile par la désinformation. Le Shah affirmait régulièrement que des civils innocents, surtout des femmes et des enfants, avaient été tués dans des fusillades et des attentats à la bombe. Pour engendrer l’hostilité envers les révoltes armées qui le visait lui et son gouvernement, le Shah diffusait régulièrement à la télévision les funérailles des soldats tués dans ces attentats62.

61 62

The Iranian Mojahedin, Ervand Abrahamian, Yale University Press, 1989, p. 141. Id. at 143.

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V. La renaissance du MEK original Sous la pression des groupes de défense des droits de l’homme, au début des années 1977 et 1978, le Shah libéra des centaines de dissidents politiques, parmi lesquels figuraient des membres du MEK. Durant cette même période, des groupes de résistance se regroupèrent en front commun contre le Shah. En décembre 1978, ils abandonnèrent la lutte armée au profit des grèves et des manifestations63. Massoud Rajavi et d’autres membres du MEK musulman qui avaient été condamnés à de longues peines de prison ne furent libérés qu’une semaine après la chute du régime de Pahlavi – 12 jours avant le retour de Khomeini en Iran, le 21 janvier 1979. A cette époque, le MEK musulman ne comptait plus que 100 membres64. Ils amorcèrent la reconstruction et la réorganisation de leurs hiérarchies65. En février 1979, ils avaient reconstitué des cellules secrètes à Téhéran, Tabriz, Mashhad, et Ispahan. Rajavi forma un nouveau comité central, composé principalement de membres anciennement incarcérés. Les dirigeants les plus visibles étaient : •

Massoud Rajavi : Chef du MEK musulman



Musa Khiabani:. Fils d’un commerçant du bazar de Tabriz, second dans la hiérarchie et porte-parole du MEK.



Mehdi Abrishamchi : ancien étudiant en chimie, on lui doit la survie du MEK musulman après le « schisme » avec les marxistes.



Abbas Davari : Pour son association avec le MEK, il est incarcéré en 1972 et sera longtemps en relation avec Rajavi, Khiabani, et Abrishamchi, à la prison de Qasr, étant co-détenus.



Ali Zarkesh : Il succède à Mousa Khiabani, mais sera assassiné à Téhéran en février 1982.



Mohammad Zabeti : A la tête de la section sociale du MEK, il sera tué en avril 1982, au cours d’un assaut sur sa résidence à Téhéran par les forces de sécurité iraniennes.



Mohammad Sayyed Kashani : A intégré le MEK en 1965.



Mansour Bazargan : Il intègre le MEK à la fin des années ’60 mais sera tué en juillet 1988 au cours de l’opération Lumière Eternelle.

63

Id. at 171. Abrahamian affirme que la violence n’était autorisée que si Khomeini l’autorisait. Selon le MEK, ces propos sont inexacts et Khomeini n’avait pas une telle autorité. Voir Facts and Myths on the People’s Mojahedinof Iran, Association of Committed Professors of Iranian Universities, 1990.

64 65

Interview avec des membres du CNRI, août 2005. Id.

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L’objectif du MEK était le soulèvement d’un mouvement de masse pour soutenir ses ambitions politiques. Rajavi donnait régulièrement des conférences dans les universités, dont les textes furent reproduits et distribués pour une large audience. Parmi les premiers textes de ces interventions on trouvait : « conjectures modernes concernant de la femme ». Le discours du MEK se fit par la suite plus explicite, se faisant le chantre des droits de la femme, « y compris le droit à un statut légal identique à celui de l’homme 66». La nouvelle direction élabora un plan autour de 14 propositions pour le futur de l’Iran. Parmi ces objectifs : •

La nationalisation de toutes les banques, usines et exploitations agricoles



L’abrogation de tous les « traités inéquitables » et les concessions accordées aux puissances étrangères



L’augmentation du crédit d’état aux petits entrepreneurs



La création d’une armée du peuple sans conseillers étrangers



Une garantie de liberté d’action pour les journaux, les partis politiques, et les associations



La reconnaissance des droits de la femme67

Dans les derniers jours du régime de Pahlavi, le MEK islamique contribua « à porter le coup de grâce » par sa victoire sur les gardes policière d’élite du Shah, qu’il combattit à l’aide d’armes subtilisées dans des postes de police, des armuriers et des baraquements militaires. Après la fuite du Shah à l’étranger, le fondateur du Mouvement de Libération en 1961 Medhi Bazargan prit la tête du gouvernement intérimaire. Le Gouvernement Intérimaire exigeait la formation d’une république laïque et démocratique, tandis que l’Ayatollah Khomeini et d’autres clercs cherchaient à créer un état théocratique. Bazargan loua le MEK comme le descendant du Mouvement de Libération, et le désigna comme l’un des trois piliers de la révolution, au même titre que Khomeini et Ali Shariati, un érudit qui combinait l’Islam et la théorie de la libération. Le MEK commençait à gagner une large adhésion populaire. En commémoration à ses sacrifices, des institutions furent renommées des noms de fondateurs de l’organisation. Ainsi, l’université Tabriz devint l’université Hanifnejad. •

L’école d’agriculture fut rebaptisée l’école Hanifnejad



La plus grande clinique de cardiologie de Téhéran devint le centre hospitalier de cardiologie de Mehdi Rezai



L’université industrielle Ayra Mehr fut renommée l’université Sharif-Vaqefi



Une nouvelle université de femmes fut appelée université Moudjahidin.

Après la révolution, Khomeini offrit le partage du pouvoir au MEK à condition que ce dernier reconnaisse le clergé comme l’autorité suprême. Rajavi relate ainsi cette rencontre :

Les Moudjahidin se trouvaient encore dans leur cache la nuit où Khomeini est arrivé de Paris. Khomeini nous envoya donc son fils Ahmad avec un message. Il voulait deux choses : que nous acceptions ses ennemis comme nos ennemis et que les 66 67

The Iranian Mojahedin, Ervand Abrahamian, Yale University Press, 1989, p. 184. The Iranian Mojahedin, Ervand Abrahamian, Yale University Press, 1989, p. 185.

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Moudjahidin reconnaissent publiquement la nature divine de l’Ayatollah. Nous avons renvoyé Ahmad. Je devais plus tard rencontrer Khomeini. Il me tendit la main pour que je l’embrasse et j’ai refusé. Depuis ce jour [sic] nous sommes ennemis68. Khomeini reçut un soutien public unanime et le MEK n’était de toute évidence pas politiquement de taille pour défier frontalement ce nouveau dirigeant et son gouvernement clérical. En attendant un basculement des pouvoirs, le MEK « se cantonna scrupuleusement à une politique de non-confrontation 69». En août 1979, le MEK présenta 26 candidats aux élections devant l’Assemblée des Experts. Aucun des candidats n’obtint de siège. Rajavi gagna quelques 300 000 voix sur un total de 16 millions d’électeurs. Le Gouvernement intérimaire publia les premières ébauches d’une constitution sur le modèle de la constitution de la Cinquième République française promulguée par le Général de Gaulle. L’Assemblée des Experts, sous la direction de l’Ayatollah Hosayn Beheshi, modifia des sections clé du document, et transforma radicalement la structure de ce nouveau gouvernement. Il fut ajouté au document « une longe série de clauses qui transféraient la souveraineté du peuple vers celle des Ouléma [le conseil des théologiens musulmans] et le réel pouvoir du président et des députés élus aux clercs de haut rang70.

Ces changements suscitèrent un débat public fiévreux. Des organisations et des individus jugeaient anti-démocratique l’ébauche de la constitution car elle accordait l’autorité suprême au clergé. Le gouvernement intérimaire menaça de présenter publiquement la constitution d’origine pour la soumettre à un vote. Au plus fort du débat, l’après-midi du 4 novembre 1979, 400 étudiants envahissaient l’ambassade des États-Unis et prenaient 73 américains en otage. En décembre, un référendum sur la constitution fut organisé. Le MEK boycotta le vote. Dans l’atmosphère orageuse de la crise des otages, le public approuva la constitution. En janvier 1980, Rajavi tenta de se présenter aux élections présidentielles, mais Khomeini lui fit obstacle prenant pour motif son refus d’adhérer à la constitution. Des élections finales eurent lieu pour sélectionner les membres du parlement. Étant donné que le régime de Khomeini avait perdu sa présidence, il devait regagner le contrôle du parlement s’il voulait maintenir son autorité. Durant cette élection, le MEK soutint 127 candidats. En dépit du million de voix rassemblées par ces candidats, lorsque les résultats officiels furent annoncés, le MEK découvrit qu’il n’avait gagné aucun siège. A Téhéran, Rajavi reçut un quart des voix des 2.1 millions d’électeurs, ce qui le qualifiait pour le second tour. Mais là encore, en dépit des 20 pourcent de voix rassemblées, le MEK n’obtint aucun siège. Le MEK se plaignit auprès du Président BaniSadr que ses réunions avaient été perturbées, que ses électeurs avaient subi des intimidations, ses aides de campagne battus, et ses urnes brûlées. Ces plaintes resteront toutefois vaines71. Après les élections, le MEK comprit qu’il jouissait d’un soutien important de la population mais qu’on ne le laisserait pas exercer en tant que parti d’opposition légal dans la République Islamique72. Il durcit ses positions contre le PRI.

68 69 70 71 72

“Why the Shah’s Pilot Flew Bani-Sadr to Paris,” Christian Science Monitor, 11 août, 1981. The Iranian Mojahedin, Ervand Abrahamian, Yale University Press, 1989, p. 189. Id. at 55. Id. at 204. Id. at 205.

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Il mit en marche une campagne médiatique contre les mollahs. Au milieu des années ’80, le tirage de son article, Mojahed, atteint les 500 000 exemplaires. Le président Bani-Sadr joignit à son tour l’opposition, dénonçant le PRI comme « une menace à la démocratie islamique ».

Le MEK « élargit sa milice et son organisation clandestine, recrutant du personnel militaire, construisant ses caches d’armes, aménageant de nouveaux abris de sûreté, et installa une presse d’imprimerie secrète73 ». A la fin des années ’80, le MEK accusait ouvertement Khomeini de « détournement de la révolution », « de monopoliser le pouvoir » et de « bafouer les droits démocratiques74 ». Par ailleurs, le MEK reprochait au gouvernement clérical sa mauvaise gestion économique et son incapacité à venir en aide aux pauvres. Dans la sphère économique, il dénonçait l’impuissance du régime à améliorer le niveau de vie de la population, à affronter les problèmes de chômage, à contrôler la spirale de l’inflation - en particulier pour les prix des loyers et des denrées alimentaires - à diminuer la dépendance de l’Iran vis-à-vis des pays occidentaux - en particulier dans le domaine vital des importations agricoles - à diversifier les exportations et diminuer la dépendance vis-à-vis de l’industrie pétrolière, à distribuer des terres aux sans-terres, à construire des logements pour les sans logis, à gérer l’expansion continuelle des bidonvilles urbains, et enfin - la plus sensible des questions : à éradiquer la corruption présente dans les hautes sphères75. Khomeini et les Ayatollas ripostèrent avec des propos diffamatoires sur le MEK dans les publications du PRI et les médias. En novembre 1980, le procureur en chef du gouvernement fit fermer le Mojahed , le journal du MEK. Des bandes organisées appelées hazbollahs (les partisans de Dieu), fondées par le clergé, « tiraient sur les marchands de journaux qui vendaient la presse du Mojahedin, molestaient les sympathisants soupçonnés, posaient des bombes dans les maisons (celle de la famille Rezai fut visée), faisaient irruption dans les bureaux de l’Association des Étudiants Musulmans, perturbaient les conférences - en particulier celles du Syndicat du Congrès - perpétrant des agressions physiques lors de réunions, et criant « les hypocrites sont pires que les infidèles76 ». Le régime de Khomeini fit fermer les bureaux du MEK, bannissant ses militants, et émit un mandat d’arrêt à l’encontre de certains des dirigeants du groupe, le contraignant à passer dans la clandestinité. Le MEK se plaignit auprès du président Bani-Sadr, « nous avons ignoré les provocations passées, mais en tant que bons musulmans nous sommes en droit de résister et de prendre les armes si nécessaire, en particulier si ces monopolisateurs nous privent de nos droits de manifester77 ». « En tant que musulmans, nous avons le droit sacré de résister à un comportement tyrannique 78» insistait Rajavi. Le président Bani-Sadr, qui subissait aussi les attaques du Parti Républicain Islamique, forma une alliance avec le MEK. Ensemble, ils organisèrent plusieurs manifestations où se rassemblaient des foules de 500 000 personnes. Ils exhortaient le public à protester contre « la dictature

73 74 75 76 77 78

Id. at 207. Id. at 206. Id. Id. at 213. Id. at 217. Id. at 216.

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des mollahs », qui selon eux était de loin pire que le Shah. Le MEK fit de la démocratie l’enjeu essentiel de sa lutte pour le pouvoir, affirmant que les clercs « avaient brisé toutes les promesses démocratiques faites durant la révolution79 ».

Le 1er juin 1981, le président Bani-Sadr exigea un référendum sur le PRI et sa politique. Quelques jours plus tard, le ministre de l’intérieur faisait fermer le bureau de la présidence. Le 10 juin, Khomeini démit Bani-Sadr de ses fonctions au Conseil Suprême de la Défense et émit un mandat d’arrêt à son encontre. Une immense manifestation fut organisée en signe de protestation. Le 11 juin, Bani-Sadr prit la fuite. Khomenei annonça alors à la télévision que les manifestations étaient des actes contre Dieu. Le MEK et Bani-Sadr appelèrent la population à manifester son opposition au régime et à renverser son pouvoir. Le 20 juin, on assista à un soulèvement massif à travers tout l’Iran avec près d’un demi-million de personnes qui déferlèrent dans les rues de Téhéran. Les clercs donnèrent l’ordre aux Gardiens de la Révolution (pasdars) de faire feu sur la foule. On compta environ 50 morts et plus de 200 blessés. L’Ayatollah Sadeq Khalkhali « annonça qu’il incombait aux tribunaux le devoir sacré de fusiller aux moins cinquante fauteurs de trouble par jour80 ». Le 21 juin 1981, les Majles iraniens (le parlement et l’assemblée consultative) démirent Bani-Sadr de ses fonctions de président. Khomeini le remplaça en créant un conseil présidentiel où il nomma l’Ayatollah Mohammad Beheshti, Hojjat al-Islam Rafsanjani, et Mohammad-Ali Rajai. Les manifestations de masse du 20 juin marqueront le début d’un règne de la terreur. Des groupes de résistance à travers l’Iran étaient engagés dans une lutte contre Khomeini et le PRI. Le Time Magazine écrivait que parmi une douzaine de factions le MEK « avait émergé comme le groupe le mieux organisé et le plus susceptible de briguer le pouvoir dans l’éventualité d’une chute du régime81 ». En se remémorant ces évènements, Rajavi déclarera : « Les Moudjahidin n’avaient jamais voulu en venir à la lutte armée. Durant deux ans et demi, nous avons souffert sans agir. A cette époque Khomeini avait assassiné 85 pourcent de nos sympathisants et nous avait dépouillés [de] nos droits constitutionnels82 ».

A. Le Conseil National de Résistance Iranienne L’alliance entre le président Bani-Sadr et le MEK fut annoncée dans une lettre datée du 18 juillet 1981, et signée par l’ancien président. Bani-Sadr se décrivait comme le « président élu et le dépositaire de la révolution islamique et son système constitutionnel».

A Téhéran, le 21 juillet 1981, Massoud Rajavi annonça la formation du Conseil National de Résistance Iranienne (CNRI) qui tiendrait lieu d’assemblée législative en attendant la tenue d’élections libres. D’autres organisations furent invitées à se joindre au camp de l’opposition contre la République Islamique et pour l’instauration d’une république islamique démocratique, garante des libertés fondamentales pour tous les citoyens83. Les principes fondamentaux de ce nouveau

79 80 81 82

“Why the Shah’s Pilot Flew Bani-Sadr to Paris,” Christian Science Monitor, 11 août, 1981. The Iranian Mojahedin, Ervand Abrahamian, Yale University Press, 1989, p. 67. “A Government Beheaded,” Time Magazine, 14 septembre, 1981. Id.

83

En 1983, le Conseil comprenait le Parti Démocratique Kurde d'Iran (PDKI), le Front Démocratique National, le Groupe Hoviyat, le Parti des Travailleurs, l'Union pour la Libération des Travailleurs et Conseil de Gauche Unie pour la Démocratie et l'Indépendance.

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gouvernement se fondaient sur la liberté d’expression, la liberté de presse, la liberté du culte, une justice indépendante, la liberté des partis politiques, et des élections libres. Après leur défaite face aux mollahs de Khomeini, Rajavi et Bani-Sadr partirent pour Paris le 29 juillet, où ils bénéficiaient de l’asile politique. Là, il rédigèrent conjointement un manifeste où ils exposaient en détails leurs griefs contre Khomeini et leur objectif d’instaurer un « gouvernement légitime » en Iran. Ils s’engageaient à tenir des « élections libres » dès leur retour en Iran et dans les six mois. Pendant ce temps, la guerre civile en Iran continuait. Le bras droit de Rajavi, Musa Khiabani, qui dirigeait le réseau clandestin du MEK en Iran, menait des attaques quotidiennes contre les agents gouvernementaux, les Gardiens de la Révolution, et des clercs de haut rang. Le PRI avait alors brutalement augmenté le nombre d’exécutions, passant d’une moyenne de 18 par jour en septembre à 80 exécutions quotidiennes en décembre 1981. Le régime rendait publiques ces exécutions laissant souvent les corps sur la potence. On annonçait même l’exécution de familles entières, où figuraient des jeunes filles adolescentes et des grand-mères de soixante ans. En octobre 1981, le Newsweek rapporta que Téhéran « avait fait irruption dans un combat de rue le plus sanglant depuis la chute du Shah. Les pelotons d’exécution punitifs commandés par Khomeini exécutaient quiconque, y compris les enfants, était soupçonné d’aider les rebelles84 ». Le magazine rapportait que les tribunaux islamiques « délivraient des arrêts de mort comme on distribuerait des contraventions : en une semaine au moins 500 suspects passèrent devant le peloton d’exécution85 ».

Peu à peu, tandis que les clercs gagnaient haut la main cette guerre, leur violence s’atténua. Le nombre d’attaques perpétrées par le MEK chuta brutalement, passant de trois par jour en juillet 1981, à cinq par semaine en février 1982.86 Durant ce règne de la terreur, qui dura de juin 1981 à 1985, le régime de l’Ayatollah Khomeini aura exécuté 12 250 personnes dont 9000 membres du MEK87.

84 85 86 87

“Teheran’s Reign of Terror,” Newsweek, 12 octobre, 1981. Id. The Iranian Mojahedin, Ervand Abrahamian, Yale University Press, 1989, p. 223. Id. at 1.

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VI. Qui sont les Moudjahidin? Le MEK fut nommé après les Moudjahidin constitutionnalistes et les guérillas des Moudjahidin qui combattaient contre les troupes d’occupation russes et britanniques dans la Jungle Revolution.

A. Les Moudjahidin Constitutionnalistes

Les Moudjahidin constitutionnalistes étaient des guérillas armées qui combattirent Mohammad Ali Shah (le grand-père de Mohammad Reza Shah) lorsque ce dernier renversa par un coup d’état, en 1908, un gouvernement élu démocratiquement. Entre 1905 et 1906, l’Iran vécut une révolution pacifique qui aboutira à l’établissement de la première constitution du pays. Cette révolution s’annonça par une série de protestations contre des politiques gouvernementales inefficaces, corrompues et oppressives. Les contestataires exigeaient avant tout la démission du premier ministre Ain-u-Dola, pour ensuite inclure dans la liste de leurs doléances la convocation d’une assemblée nationale et l’élaboration d’un plan de constitution. Le Shah Muzaffar ad-Din alors souffrant, accéda à ces demandes et en 1906 se tenaient en Iran les premières élections parlementaires de son histoire. L’assemblée rédigea ensuite une constitution qui adoptait le modèle de la constitution belge, établissant un gouvernement parlementaire. La constitution accordait au parlement l’autorité ultime « sur toutes les lois, les décrets, les budgets, les traités, les prêts, les monopoles, et les concessions 88». Les ministres de ce gouvernement étaient également redevables devant le parlement. Bien que le Shah détienne l’autorité de nommer la moitié des membres du Sénat, sous la nouvelle constitution, ses pouvoirs restaient largement symboliques. Sur son lit de mort, le Shah donna sa bénédiction à la constitution. Quelques jours après sa mort, son fils Mohammad Ali Shah, lui succéda. Le nouveau gouvernement édicta de nombreuses réformes qui seront controversées. Officiellement, le nouveau Shah cautionnait la constitution, mais en privé il travaillait à saper ses éléments d’autorité. Parmi ses projets figuraient la formation d’une Brigade Cosaque, employant de nombreux mercenaires russes. En juin 1908, le Shah fomenta un coup d’état. La brigade cosaque cerna et bombarda le Parlement. Les dirigeants réformistes furent détenus et exécutés. Le Shah décréta la loi martiale, avec l’interdiction de tout rassemblement social et public, et la dissolution de l’Assemblée Nationale. Une révolte populaire contre le nouveau Shah éclata à Tabriz, la capitale de la province de l’Azerbaïdjan, et embrasa rapidement tout le pays. Les milices populaires s’autoproclamèrent Moudjahidin Constitutionnalistes. Ce soulèvement engendra une guerre civile qui prit fin en 1909 avec la défaite de l’armée du Shah. Mohammad Ali Shah dut fuir vers la Russie et fut remplacé par son fils de 12 ans. Un gouvernement provisoire fut instauré et une seconde Assemblée Nationale convoquée le 5 août, 1909.

B. Les Moudjahidin de la Révolution de la Jungle

La lutte armée éclata à nouveau en 1914 avec la riposte aux déploiements des forces militaires russes, britanniques et turques sur le sol iranien. En 1907, la Russie et la Grande-Bretagne avaient signé un traité officialisant leurs zones d’influence en Iran. Les deux pays étaient de longue date en rivalité pour le contrôle de l’Iran. La Grande-Bretagne se plia à la domination 88

The Iranian Mojahedin, Ervand Abrahamian, Yale University Press, 1989, p. 223.

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russe sur les provinces du nord et du centre, tandis que la Russie accordait à la Grande-Bretagne le contrôle des provinces septentrionales.

La seconde Assemblée Nationale, qui fut convoquée en 1909, fut minée par des dissensions et une incapacité à trouver un consensus sur des propositions de réformes laïques. Les russes comme les britanniques, déterminés à maintenir leur emprise sur l’Iran, cherchèrent à tirer profit de ces conflits internes. En 1911, la Russie tsariste menaça d’envoyer des troupes sur Téhéran à moins que le gouvernement iranien ne lui accorde des concessions assurant l’entrée de marchandises russes dans le pays. La Russie déploya des troupes dans le nord de l’Iran afin de contrer les forces militaires britanniques envoyées dans le pays pour protéger ses intérêts présents dans les provinces du sud. Dès la survenue de la Première Guerre Mondiale, les troupes turques traversèrent les provinces iraniennes de l’Azerbaïdjan et du Kurdistan. L’Iran ne put faire barrage aux incursions et en 1915, son gouvernement central avait « cessé d’exister », selon un ministre britannique89.

En 1914, un petit groupe de guérillas, mené par Mirza Kuchak Khan, ancien membre du clergé, chercha à rétablir l’indépendance du pays et « sa soustraction du joug du colonialisme90 ». Khan libéra la province de Gilan et la déclara une république. On se référa à cette lutte armée, faisant rage dans les montagnes subtropicales, comme la Révolution de la Jungle. La guérilla, nommée Moudjahidin, devint le « mouvement de guérillas le plus puissant de l’histoire iranienne91 ». Les Moudjahidin combattirent à la fois les troupes étrangères et les soldats iraniens qui soutenaient le Shah. Le conflit s’aggrava en 1920 et 1921. Les guérillas ne réussirent jamais à gagner le contrôle de Téhéran. La Russie avait à l’origine soutenu les guérillas, mais, une fois convaincue que les Moudjahidin ne finiraient pas vainqueurs, signa un traité avec le Shah en 1921, mettant fin à la Révolution de la Jungle.

C. Le Mouvement de Libération

Le Mouvement de Libération fut fondé en mai 1961, par Mehdi Bazargan, l’Ayatollah Seyyed Mahmud Taleqani, et dix autres réformateurs de même obédiance92. Les membres du Mouvement de Libération se décrivaient comme musulmans, iraniens, constitutionnalistes et Mossadeqists : musulmans car ils refusaient la scission entre principes moraux et politique ; iraniens car ils exigeaient la liberté de pensée, d’expression et d’association ; Mossadeqists car il voulaient l’indépendance nationale93. Le groupe soutenait la ré-implémentation de la constitution de 1916. Le jour de la formation du mouvement, Barzargan fit les déclarations suivantes (voir l’Annexe pour l’intégralité de ses déclarations). : Nous reconnaissons la liberté comme le premier don divin et sa réalisation et son maintien sont pour nous une tradition islamique et la marque intrinsèque

89 90 91

Id. at 103. Revolutionary Islam in Iran, Suroosh Irfani, Zed Books Ltd., London. 1983, p. 54. Id. at 51.

92

Bazargan, Taleqani, Yadollah Sahabi, Hasan Nazih, Mansur Ata’i, Rahim Ata’i, Abbas Radnia, Abbas Sami’i, Abbas Sheibani, Ezzatollah Sahabi, Ahmad Alibaba’i, et (probablement) Ahmad Sadr Hajj-Seyyed-Javadi.

93

Iran Between Two Revolutions, Ervand Abrahamiam, Princeton University Press, 1982, p. 460.

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du Chiisme. Nous sommes musulmans dans le sens où nous croyons aux principes de justice, d’égalité, de sincérité et d’autres principes éthiques humains et sociaux avant qu’ils ne soient proclamés par la Révolution Française et la Charte des Nations-Unies94. Nous respectons la constitution iranienne comme un ensemble, et n’accepterons pas que ses principes de base, notamment la liberté de pensée, de la presse, et des réunions, l’indépendance des juges, la séparation des pouvoirs, et enfin, des élections honnêtes soient négligés et sacrifiés… »95 Nous honorons Mosaddeq comme le seul chef de gouvernement dans l’histoire de l’Iran qui fut réellement choisi et aimé par la majorité du peuple, qui agit dans le sens des souhaits du peuple, et ayant su nouer des liens profonds entre les gouvernants et les gouvernés, put expliquer la vraie signification du mot « gouvernement » et réaliser les plus grands succès dans l’histoire récente de l’Iran, et parmi ceux-là la victoire sur le colonialisme 96». Bazargan, un ingénieur cultivé, forma la Société des Étudiants Islamiques à l’Université de Téhéran pour contrer l’influence du Parti Tudeh, un groupe communiste. Lorsque le Parti Tudeh établit une alliance avec le Parti Iranien, Bazargan démissionna du parti en signe de protestation. Il accéda par la suite au poste de doyen de la Faculté des Sciences et de Technologie de l’Université de Téhéran, fut le premier directeur de la Société Nationale Pétrolière d’Iran, puis, en 1977, co-fondateur de l’Association Iranienne des Droits de l’Homme. Lorsque Mohammad Reza Shah fut chassé du pouvoir, Bazargan fut nommé par l’Ayatollah Khomeini comme premier ministre intérimaire. Au bout d’un an, Bazargan démissionna, pour protester contre le radicalisme des clercs qui mettait en danger le gouvernement pro-démocratique et laïque. Taleqani était un dirigeant religieux qui enseignait la calligraphie dans un lycée. Il devint le clerc dirigeant à Téhéran et plus tard Ayatollah. Taleqani est l’auteur de deux ouvrages importants : dans l’un de ces ouvrages, il affirmait que le Chiisme était « de manière inhérente contre l’autocratie et pour la démocratie ».97

Après sa fondation, le Mouvement de Libération put agir ouvertement comme parti au sein du système politique pendant 19 mois. Suite au soulèvement de juin 1963, il fut officiellement banni. Avec la fondation du MEK, le Mouvement de Libération lui offrit un soutien financier et l’aida à publier son journal clandestin.98

D. Moudjahidin non pas marxistes

Près de quarante ans après la fondation du MEK, le ministère des Affaires Étrangères américain décrit l’organisation comme une fusion de l’Islam et du marxisme. [Voir la section VIII pour des extraits de la description de l’organisation par le ministère des Affaires Étrangères américain].

1. Le Programme Politique du CNRI 94 95 96 97 98

Iranian Politics and Religious Modernism: The Liberation Movement of Iran Under the Shah and Khomeini, H.E. Chehabi, Cornell University Press, 1990, p. 158. Id. at 158. Iranian Politics and Religious Modernism: The Liberation Movement of Iran Under the Shah and Khomeini, H.E. Chehabi, Cornell University Press, 1990. Iran Between Two Revolutions, Ervand Abrahamiam, Princeton University Press, 1982, p. 459. Iranian Politics and Religious Modernism: The Liberation Movement of Iran Under the Shah and Khomeini, H.E. Chehabi, Cornell University Press, 1990.

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Depuis sa fondation, les objectifs politiques du Moudjahidin ont évolué et mûri. Les points suivants constituent le programme politique tel qu’il fut annoncé par Maryam Rajavi le 16 juin 199599.

Les libertés fondamentales : •

Le Conseil National de Résistance croit au pluralisme politique et au système multipartiste.



Il reconnaît la démocratie comme unique garantie de l’avancée et du progrès du pays.



Il croit aux droits politiques égaux pour tous et rejette toute discrimination fondée sur le sexe, la foi ou la religion.



Il voit les élections et le vote populaire comme le seul critère de légitimité pour l’élection de responsables.



Le CNRI respecte la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme et s’engage à assurer l’application de cette Déclaration



Il reconnaît la liberté totale de pensée et d’expression et interdit toute forme, pour tout motif, de torture et de surveillance idéologique.



Le conseil permet toute forme d’opposition au gouvernement en-deçà de la rébellion armée. Il garantit la sécurité judiciaire et professionnelle à tous les citoyens et fait le choix de dissoudre les tribunaux militaires, d’état d’urgence ou révolutionnaires, ainsi que tous les organes de répression tels que les Corps Pasdaran. En outre il exclut l’usage de toute forme de torture.

La Séparation de l’Église et de l’État •

Le Conseil National de Résistance croit en la séparation de l’église et de l’état. Son programme, sur ce sujet, stipule que « tout en respectant toutes les religions et dénominations, le Conseil ne reconnaît et ne reconnaitra pas de privilèges accordés à une religion ou à une autre ».



Il refuse toute discrimination parmi les croyants de différentes religions et dénominations. Le programme met l’accent sur le principe suivant : « aucun citoyen ne se verra refuser des droits ou accorder des privilèges par le biais d’un choix électoral, d’un suffrage, d’un emploi, de l’éducation, et d’un jugement ou tout autre droits sociaux ou individuels sur la base de sa religion ou de son absence de religion ».



Il garantit une liberté totale pour les croyants de toutes les religions dans la pratique de leurs traditions et cultes.

L’Économie •

La politique économique du CNRI est fondée sur une économie du libre marché, la reconnaissance du capitalisme national et du système commercial de bazar, de la propriété privée et personnelle et de l’investissement.

99

http://www.iran-e-azad.org/english/maryam/plan.html

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Selon le point de vue du Conseil, la reconstruction de l’économie iranienne ne sera possible que si tous les citoyens s’engagent à investir et seulement avec la coopération des technocrates, spécialistes, et hommes d’affaires iraniens qui se résident aujourd’hui à l’étranger.



Le gouvernement Intérimaire envisage l’abolition des lois rétrograde et réactionnaires, dès le renversement du régime actuel, comme une priorité.



Le programme du CNRI insiste sur l’importance du renforcement de la production industrielle, de la formation technique et professionnelle, et l’utilisation des dernières avancées scientifiques et technologiques.



Le Conseil a pour objectif d’apporter assistance et soutien aux petits commerces en vue de leur expansion. Le CNRI pense que les subsides pour les matières premières et les biens de première nécessité ne sont acceptables que comme des mesures temporaires, jusqu’au rétablissement de l’économie du pays.



Les autres priorités du CNRI incluent le combat contre l’inflation et le chômage.

L'égalité entre les hommes et les femmes •

Le Conseil National de la Résistance croit en la complète égalité entre les femmes et les hommes.



La conduite du CNRI durant ces dernières années est le meilleur témoignage de son engagement. La Déclaration sur les Droits et les Libertés du Conseil met l’accent sur « l’égalité totale sociale, politique, culturelle et économique entre les hommes et les femmes ».



Le projet du CNRI met également l’accent sur les droits et les libertés des femmes dans le choix de leur métier, de leur tenue vestimentaire, de leur éducation et du choix de leur conjoint ainsi que dans la décision de divorce.



Selon la vision du CNRI, la participation étendue de femmes dans le Conseil et dans d’autres aspects de la Résistance, y compris la prise de poste à haute responsabilité, la présidence, représente un coup stratégique porté à la vision fondamentalisme des mollahs et dont la principale caractéristique se trouve dans son hostilité envers les femmes.



Le CNRI croit également que le progrès et le degré d’évolution d’une société se mesurent aux droits et aux libertés acquis par les femmes dans cette société.

Les minorités ethniques •

Le Conseil National de la Résistance reconnaît les droits de toutes les minorités ethniques.



Le Conseil pense que l’accord de droits à tous les secteurs de la société garantit la solidarité nationale et une démocratie durable.



Le CNRI a adopté un projet reconnaissant l’autonomie du Kurdistan Iranien dans l’intégrité territoriale de l’Iran.



Pour la première fois dans l’histoire de l’Iran, les kurdes iraniens peuvent administrer leurs propres affaires et enseigner le kurde dans leurs écoles. Sans discrimination sexuelle, ethnique, raciale, et religieuse ils pourront jouir comme tous les autres citoyens de droits sociaux, économiques, politiques et culturels égaux.

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Les Affaires Culturelles et Artistiques •

Le Conseil National de la Résistance considère que la lutte contre toute culture fondamentaliste et extrémiste promulguée par les mollahs est une de ses principales responsabilités. Cette position se reflète dans les programmes démocratiques et l’attitude du Conseil.



Contrairement au régime du mollah, qui prône l’extrémisme, la brutalité, la vengeance, et le deuil pour le peuple iranien, le CNRI veut mettre en avant les valeurs de la modération, de la compassion, de la miséricorde et du bonheur pour tous les iraniens.



Maryam Rajavi, notre présidence, décrit parfaitement les vues du CNRI concernant l’art et son importance : « nous espérons que notre culture authentique et l’art pourront transmettre dans le cœur de tous les iraniens et à travers tout le pays, l’esprit de la vie et de l’espoir, de la lumière et de la clarté, de la prospérité et l’abondance et raviver les flammes de l’espoir pour une vie meilleure et un futur plus lumineux ».

La Politique Étrangère •

La politique étrangère du CNRI est fondée sur l’indépendance, le respect de la Charte des Nations-Unies et des alliances et traités, le bon voisinage, la paix et la coopération internationale et régionale ainsi que la non-intervention dans les affaires des autres pays.



La promotion de la stabilité et de la paix dans les questions sensibles concernant la région du Moyen-Orient constitue l’un des piliers de la politique étrangère du CNRI.



Le CNRI soutient l’instauration de la paix entre Israël et la Palestine et les autres pays arabes.



Il cherche à établir des relations amicales avec les pays limitrophes. Le CNRI considère l’élargissement des relations avec les pays industrialisés comme essentiel à la reconstruction du futur Iran.

La Défense •

Le CNRI s’engage à préserver la paix et la quiétude dans la région et condamne toute forme d’agression et d’expansionnisme.



Le Conseil National de la Résistance est fortement opposé à la prolifération nucléaire et à la production d’armes de destruction massive et de missiles balistiques. Le Conseil fut le premier à révéler au grand jour les efforts du régime iranien pour acquérir des armes nucléaires.

Les Commentaires

La description du MEK par le Département d’État sous les traits d’une organisation marxiste islamique est globalement erronée et ne reflète pas les changements politiques qui ont traversé le groupe depuis sa fondation ni sa longue histoire de soutien à la démocratie et à la liberté. Ce portrait fallacieux pourrait en partie refléter la propagande menée par le Shah contre

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le MEK. Pour affaiblir un soutien considérable apporté au MEK, le Shah s’était attaché à diaboliser ce groupe, le désignant comme un groupe marxiste. Le Shah a par ailleurs « lancé une propagande de grande envergure sur le thème de l’incompatibilité du marxisme et de l’Islam » avec l’argument que le marxisme étant « matérialiste », il ne pouvait que « vouloir la destruction de l’Islam 100». Massoud Rajavi réagit à cette description mensongère en octobre 1981. « Si vous nous demandez si nous sommes de gauche, nous disons oui, si être de gauche signifie pour vous la justice sociale, la liberté, et l’indépendance, » déclare Rajavi. « Si cela signifie marxiste, alors nous disons non101 ». La plupart des membres fondateurs du MEK sont nés dans le milieu de la communauté commerçante des bazars, qui considère que le « marxisme est synonyme d’athéisme matérialiste102 ». Les membres du MEK ont cependant été influencés par la pensée marxiste. A l’origine l’organisation soutenait la réforme agraire, la redistribution des richesses et l’abolition des classes sociales.

Le Département d’État affirme que les rapports sur le MEK ne fournissent pas la preuve substantielle que le MEK a la capacité et l’intention d’être démocratique103. Rien ne pourrait être plus éloigné de la vérité. Le MEK avait choisi son nom, en partie, d’après les Moudjahidin Constitutionnalistes, qui luttèrent pour rétablir un gouvernement démocratique après que Mohammad Ali Shah renversa le gouvernement iranien élu démocratiquement en 1908. Le MEK s’est également baptisé ainsi d’après les Moudjahidin de la Révolution de la Jungle, des nationalistes islamiques qui s’opposèrent à l’oppression exercée par les forces militaires d’occupation britanniques, russes et turques.

Les membres fondateurs du MEK étaient des membres du Mouvement de Libération fondé en 1961 dans le but d’instaurer un régime pleinement démocratique en Iran. Les membres du Mouvement de Libération se disaient constitutionnalistes car ils souhaitaient rétablir la constitution du 1905-09 mise en place par le premier parlement iranien élu démocratiquement. Lorsque le MEK musulman réapparut sur la scène politique en 1979, il soutenait le gouvernement intérimaire de Mehdi Bazargan qui s’opposait aux mollahs théocratiques et anti-démocratiques. Le MEK, participa aux élections présidentielles et parlementaires, dans l’espoir de devenir un parti d’opposition légitime.

Durant 13 mois, le MEK s’efforça d’introduire la démocratie dans le nouveau gouvernement iranien – mais ce fut en vain. Au cours des derniers mois, le président iranien élu démocratiquement, Bani-Sadr, se joignit au MEK dans une tentative de démettre du pouvoir le régime de l’Ayatollah Khomeini. Après s’être relocalisés à Paris en 1981, le MEK/CNRI formèrent un gouvernement en exil pro-démocratique. Le programme politique du CNRI élaboré en 1995, ne pouvait être plus clair dans ses principes démocratiques. Il y était affirmé sans équivoque que le groupe « croyait au pluralisme politique et au système multipartiste ». Le groupe déclarait également « reconnaître la démocratie comme seul garant de l’avancée et du progrès du pays ». Si l’on se fonde sur une compréhension objective du MEK, on reconnaît que l’organisation n’est de toute évidence pas marxiste.

100 101 102 103

The Iranian Mojahedin, Ervand Abrahamian, Yale University Press, 1989, p. 143. “International News,” Associated Press, 28 octobre, 1981. The Iranian Mojahedin, Ervand Abrahamian, Yale University Press, 1989, p. 101. “Report on the People’s Mojahedin of Iran,” Unclassified document, US State Department, 1994

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VII. Les raisons pour lesquelles le MEK s’opposait au Shah Le MEK affirmait que le régime de Pahlavi s’était maintenu au pouvoir en terrorisant et en traumatisant la population. Le peuple iranien fut contraint à la soumission par peur des représailles, de pertes de travail, des arrestations arbitraires et de la torture. Les raisons invoquées par le MEK pour justifier son opposition au régime de Pahlavi sont exposées ci-dessous. •

Le régime a accédé au pouvoir en 1921 par un coup d’état financé par la Grande-Bretagne



Il s’est maintenu au pouvoir à l’aide d’un coup d’état en 1953 sponsorisé par la CIA



Les événements sanglants du Soulèvement de 1963.



Le régime a bafoué la constitution



Il a capitulé devant les consultants américains



Il a terrorisé le public par le biais de la SAVAK et des tribunaux militaires



Le régime est devenu l’allié de l’Occident, d’Israël, et des pays qui sont ennemis du Tiers-Monde, des nations arabes, des peuples d’Afrique, et du mouvement de libération vietnamien.



Le régime autorise une corruption courante et incontrôlée



Il gaspille les maigres ressources du pays en les distribuant aux forces armées



Il a permis à une petite élite de s’enrichir au dépens des masses misérables



Il a vendu le pays aux corporations occidentales



Il détériore les valeurs chiites en répandant le consumérisme, l’impérialisme culturel et le monarchisme.

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VIII. La désignation de FTO (Foreign Terrorist Organization)

En octobre 1997, l’ancienne Secrétaire d’État Madeleine Albright approuva la première liste des Organisations Terroristes Étrangères. Parmi les 30 premières désignées figurait l’organisation du Moudjahidin-e Khalq (MEK).104 Le groupe est également connu sous les noms suivants : •

MKO



Organisation des Moudjahidin du Peuple d’Iran



OMPI



L’organisation des Guerriers Saints du Peuple d’Iran



Sazeman-e Mujahedin-e Khalq-e Iran



Conseil National de la Résistance Iranienne)



CNRI



Armée Nationale de Libération de l’Iran



NLA105

Selon le Département d’État (Ministère des Affaires Étrangères américain), le nom complet du groupe est Sazeman-e Mujahedin-e Khalq-e Iran ou Organisation des Guerriers Saints du Peuple d’Iran. Ce nom est “généralement abrégé” pour devenir Mojahedin-e Khalq ou les Moudjahidin du Peuple106. Les acronymes utilisés pour le groupe incluent MKO, pour l’Organisation Mujahedin-e Khalq; MEK, pour Mujahedin-e Khalq., et OMPI pour Organisation des Moudjahidin du Peuple d’Iran.

Le Département d’État (Ministère des Affaires Étrangères américain) décrit le MEK selon les caractéristiques suivantes :

La philosophie du MEK combine le marxisme à l’Islam. Formé en 1961, l’organisation a été chassée d’Iran après la Révolution islamique de 1979, et son principal soutien provient de l’ancien régime iraquien de Saddam Hussein dès la fin des années ’80. Le MEK a perpétré des attaques anti-occidentales avant la révolution islamique. Depuis, il a commis des attentats terroristes contre les intérêts du régime clérical iranien et à l’étranger. Le MEK prône le renversement du régime iranien pour installer son groupe à la tête du pays.107

104 105 106 107

“Secretary of State designates Foreign Terrorist Organizations (FTOs),” US State Department, 5 octobre, 2001 US State Department, 2005. “Report on the People’s Mojahedin of Iran,” Unclassified document, US State Department, 1994 “Country Reports on Terrorism,” US State Department, 27 avril, 2005.

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Le Département d’État (Ministère des Affaires Étrangères américain) émet des soupçons concernant le MEK « et sa campagne mondiale contre le gouvernement iranien qui s’appuie sur la propagande et fait parfois appel à des actes de violence terroriste108 ».

A. Les allégations du Département d’État en 2005

Ci-dessous sont énumérées les activités que le Département d’État (Ministère des Affaires Étrangères américain) soupçonne le MEK de mener, qui en conclusion justifie la désignation du groupe dans la liste des Organisations Terroristes Étrangères109. •

Au cours des années ’70, le MEK tua des membres du personnel militaire américain et des civils américains travaillant sur des projets de défense à Téhéran ».



[Le MEK] « a soutenu l’assaut de l’ambassade des États-Unis en 1979 ».



« En 1981, le MEK fit exploser des bombes au siège du Parti Républicain Islamique et du Premier Ministre, tuant 70 fonctionnaires iraniens de haut rang y compris le Garde des Sceaux l’Ayatollah Mohammad Beheshti, le Président Mohammad-Ali Rajai et le premier ministre Mohammad-Javad Bahonar ».



« Vers la fin de la guerre contre l’Iran (1980-1988), Bagdad a fourni au MEK un équipement militaire et l’a envoyé se battre sur le front contre les forces iraniennes ».



En 1991, le MEK aida le gouvernement iraquien dans la répression des soulèvements des Shia et des kurdes dans le sud de l’Iraq et dans les soulèvements kurdes du nord ».



« En avril 1992, le MEK mena des attaques quasi simultanées contre les ambassades et infrastructures iraniennes dans 13 pays, démontrant la capacité du groupe à monter des opérations à grande échelle à l’étranger ».



« En avril 1999, le MEK visa des officiers militaires de haut rang et assassina le chef-adjoint du comité des Chefs d’États-majors interarmées iranien ».



En avril 2000, le MEK tenta d’assassiner le commandant des Quartiers Généraux de Nasr, du comité interinstitutionnel de Téhéran, responsable de la coordination des polices en Iraq ».



« Le rythme normal d’opérations anti-iraniennes augmenta durant « Opération Great Bahman » en février 2000, lorsque le groupe lança une douzaine d’attaques contre l’Iran. Une de ces attaques était une attaque au mortier contre le complexe gouvernemental de Téhéran qui logeait les bureaux du Guide Suprême et du Président ».



En 2000 et en 2001, le MEK fut régulièrement impliqué dans des attaques au mortier et des fusillades en voiture sur des unité de renforcement militaires et juridiques iraniens ainsi que des bâtiments gouvernementaux près de la frontière IranIraq. Les actions terroristes du MEK ont toutefois diminué vers la fin de 2001 ».

108 109

“Country Reports on Terrorism,” US State Department, 27 avril , 2005. Id.

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Selon le Département d’État, après « que des avions de la coalition aient bombardé les bases du MEK au début de l’Opération Liberté pour l’Iraq, les dirigeants du MEK ont donné l’ordre à ses membres de ne pas opposer de résistance. Les forces de la coalition et le MEK ont conclu un accord de cessez-le-feu officiel en mai 2003 ».

Ce qui suit sont des commentaires détaillés sur chaque allégation avancée par le Département d’État américain.

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IX. Allégations d’assassinats d’américains

Les allégations du département d’État

« Durant les années ’70, le MEK tua un membre du personnel militaire américain et des civils américains qui travaillaient sur des projets de défense à Téhéran110 ». Ce qui suit sont des informations sur ces attentats qui proviennent d’open source, et un commentaire sur chacun des incidents.

A. Brig. Gen. Harold Price

En mai 1972, une bombe détonna sous un véhicule qui transportait le Brig. Gen. Harold Price de la force de l’Air, lui brisant les deux jambes. Le Washington Post rapporta que « une femme iranienne et un enfant marchant dans la rue avaient été tués par l’explosion 111».

Selon le département d’État américain, l’attaque avait été planifiée par « Kazem Zul Ani-Anvar » (Kazem Zolanvar), un membre du Comité Central qu’avait créé Reza Rezai après la rafle et l’exécution de membres du comité central du MEK112. Ervand Abrahamian affirme que le « MEK » était responsable de l’attaque, affirmation qui se fonde sur une des publications du groupe113.

Commentaires

Il n’est pas possible de déterminer qui a perpétré l’attentat. Lorsqu’il a eu lieu, les tribunaux militaires iraniens jugeaient les derniers procès des membres du MEK arrêtés. Seule une poignée de la direction originale vivait en liberté. Il n’existait plus de hiérarchie de commandement. Le MEK était principalement constitué de membres subalternes qui étaient isolés les uns des autres et sans ressources. Dans de telles circonstances, il est difficile de comprendre comment le MEK aurait pu organiser une telle attaque, sachant surtout que ses membres étaient incapables de porter un coup d’une telle ampleur. Zolanvar fut arrêté avant la tentative d’assassinat de Price et n’aurait donc pas pu avoir pris part à l’attentat. A l’époque, l’annulation d’une opération planifiée lorsqu’un membre était arrêté avant une attaque était une pratique courante pour éviter de le compromettre. Zolanvar fut condamné à la prison à vie. S’il avait été impliqué dans l’attaque, il aurait sûrement été exécuté.

110 111 112 113

Id. “U.S. Officer Shot Dead by Iran Gunmen,” The Washington Post, 3 juin, 1973. “Report on the People’s Mojahedin of Iran,” Unclassified document, US State Department, 1994. The Iranian Mojahedin, Ervand Abrahamian, Yale University Press, 1989, p. 140.

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Mohammad Bazargani et Ali Bakeri, qui furent arrêtés à peu près à la même époque au motif de crimes moins graves et n’étaient pas impliqués dans des opérations armées, furent eux exécutés114.

Lorsque l’attentat contre Price eut lieu, les renseignements sur les divers groupes de résistances iraniens furent remis en cause. Selon un officier traitant de la CIA en poste à Téhéran de juillet 1973 à août 1975, aucune distinction n’a été faite entre l’organisation du MEK original (qui a survécu aujourd’hui) et le groupe qui opérait après la rafle et l’exécution de 1971-72. Ce dernier donna naissance au « MEK » marxiste115 ». Deux sources d’informations qui fournissent des détails sur des attentats précédents contre des américains en Iran ont été fournies par le Bureau des Enquêtes Spéciales des Forces de l’Air américaines en décembre 1975 : Terrorist Movements in Iran (les Mouvements Terroristes en Iran) and Anti-American Terrorism in Iran (Anti-terrorisme en Iran). Ces documents dressent la liste des actes d’anti-américanisme commis en Iran entre 1970 et 1975.116 L’exactitude de ces rapports, toutefois, est discutable. Dans son histoire du MEK qui fait autorité, Abrahamian faisait les commentaires suivants sur ces documents :

A la fin de 1975 le Pentagone commandait des rapports spéciaux sur les terroristes iraniens en général et les Moudjahidin en particulier – ces rapports entretenaient l’illusion que les Moudjahidin recevaient un entrainement en Chine et fonctionnaient comme bras armé du Mouvement de Libération de Bazargan117.

B. Lt. Col. Lewis Hawkins

Le Lt. Col. Lewis Hawkins - consultant militaire américain - fut assassiné le 2 juin 1973 à Téhéran « par un terroriste iranien, qui lui tira une balle dans la tête et s’enfuit en motocyclette » selon l’ambassade des Etats-Unis118. Le Washington Post rapporta que Hawkins avait été assassiné par deux « hommes 119». L’attentat, indiquait le Washington Post, est le fait de « membres d’un groupe de guérilla de la gauche radicale 120». Il s’est produit un an exactement après l’attentat à la bombe contre le véhicule du Brig. Gen Price121. En 1972, on estimait qu’il

114

Discussion with the NCRI, septembre 2005, (Trois ans après son arrestation, Zolanvar fut tué par la SAVAK ainsi que huit autres prisonniers politiques sur les collines de la prison Evin ; la SAVAK prétendit qu’ils avaient tenté de s’enfuir.

115 116 117 118 119 120 121

Interview with CIA case officer, 1er septembre, 2005. The Eagle and the Lion, James A. Bill, Yale University Press, 1988. See footnote no. 16, p. 483. The Iranian Mojahedin, Ervand Abrahamian, Yale University Press, 1989, p. 144. “Iran Terrorist Kills American Military Aide,” (Associated Press), Los Angeles Times, 3 juin, 1973. Iran Vows Action Against Assassins,” The Washington Post, 6 juin, 1973.

U.S. Officer Shot Dead by Iran Gunmen,” The Washington Post, 3 juin, 1973.

“Iran Vows Action Against Assassins,” The Washington Post, 6 juin, 1973.

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existait à Téhéran quelque 500 groupes de guérillas, dont un petit nombre seulement semblait bien entrainé122. Selon le Washington Post , « les guérillas iraniennes faisaient rarement des communiqués pour revendiquer ou expliquer leurs motivations dans des actions spécifiques123 ». Les deux plus petits groupes s’identifiaient comme des marxistes révolutionnaires. L’un est un avatar de l’ancien Parti Communiste Tudeh, qui était pro-soviétique. Dans une émission, de Bagdad, hier ce groupe exprimait sa désapprobation vis-à-vis de l’assassinat de Hawkins… l’Organisation Maoïste Révolutionnaire de Tudeh, est, selon des sources diplomatiques plus petit et moins actif. Le groupe le plus important est l’Organisation de la Libération de l’Iran, qui, en dépit des efforts du gouvernement à en faire le portrait d’un groupe communiste, revendique fortement son fondamentalisme islamique et une philosophie politique conservatrice124.

Le New York Times rapporte que « les guérillas gauchistes opposés au Shah Mohammed Riza Pahlevi [avaient] avaient fait des américains une des cibles d’une campagne menée depuis le début des années ’70 125». Un programme diffusé dans une station de radio clandestine et que l’on pense être basée en Iraq, parlait de l’assassinat d’un consultant américain qui ne « serait qu’un début ». Les guérillas, selon les Washington Post, étaient « divisées en au moins trois factions rivales » dont on sait qu’elles diffusaient des communiqués à partir de stations de radio clandestines à Bagdad, en Iraq ; à Baku en URSS, et à Sofia en Bulgarie126. Abrahamian prétend que cet attentat fut perpétré « en représailles au meurtre de neuf prisonniers politiques127 ». Le Département d’État suggère que Reza Rezai aurait été « arrêté et exécuté par le gouvernement du Shah pour le meurtre du Colonel Hawkins128 ». Cependant, un article du 11 mai 1976 paru dans le Washington Post, Vahid Afrakhteh (aussi épelé Afrakhten) confessa qu’un occidental avait été autorisé à le voir avant son exécution. Afrakhteh aurait dit à l’occidental qu’il était responsable de la mort du Lt. Col. Hawkins : Afrakhteh aurait avoué qu’il avait lui-même tué le Col. Lewis Hawkins à Téhéran en 1973 et qu’il dirigeait la faction ayant abattu le Col. Paul Schaffer et le Lt. Col. Jack Turner après avoir arrêté leur véhicule conduit par un chauffeur en 1975129.

Les Commentaires

Il est fort probable que Vahid Afrakhteh ait été effectivement responsable de la mort du Lt. Col. Lewis L. Hawkins. Afrakhteh, avec Taqi Shahram et Bahram Aram assuraient alors le contrôle du « MEK » ressuscité après l’arrestation et l’incarcération des membres de la direction du groupe initial en 1971 et en 1972. Les trois hommes avaient reformé l’organisation, rejetant l’idéologie islamique du MEK original et imprégnant le groupe de l’idéologie marxiste. Ils prirent les 122 123 124 125 126 127 128 129

Id. Id Id. Terrorist in Iran Kills U.S. Advisor,” Associated Press article in The New York Times, 3 juin, 1973. Iran Vows Action Against Assassins,” The Washington Post, 6 juin, 1973. The Iranian Mojahedin, Ervand Abrahamian, Yale University Press, 1989, p. 142. The People’s Mojahedin Organization of Iran, Kenneth Katzman, Washington, novembre 1992. Iran Says Guerrilla Trained in Cuba,” The Washington Post, 11 mai, 1976.

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américains pour cible cherchant à prouver le plus grand impact de leur idéologie en comparaison au MEK original. Les allégations du Département d’État sur l’exécution de Reza Rezai pour l’assassinat du Lt. Col. Hawkins sont par conséquent inexactes. Reza Rezai fut tué par la police en 1972 et n’aurait donc pas pu être impliqué dans l’assassinat du Lt. Col.Hawkins en 1973.

C. Col. Paul R. Schaffer et Lt. Col. John H. Turner

Selon des sources publiées, le 21 mai 1975, trois « terroristes armés de fusils mitraillettes abattirent deux officiers des forces de l’air américaines 130». Ces officiers étaient le Col. Paul R. Schaffer, Jr. et le Lt. Col. John H. Turner. Selon les « responsables iraniens », les tueurs étaient « de jeunes gauchistes cherchant à semer le trouble et à affaiblir le gouvernement du Shah ». Un groupe qui se faisant appeler « l’Organisation des Combattants du Peuple Iranien » revendiqua la responsabilité dans un coup de téléphone anonyme à l’ambassade des États-Unis. Le New York Times affirmait, « que l’on ignorait les noms des dirigeants de l’organisation 131». Des pamphlets furent distribués sur le site de l’attentat132.

Le 9 juillet 1975, UPI rapportait que des agents de la sécurité avaient capturé deux « terroristes gauchistes » impliqués dans une embuscade où deux colonels des forces de l’air américaines avaient été tués 133» . La police identifia les deux comme « Wahmid Rahman Afrakheh » (sic), qui, selon elle, était un des meneurs du « groupe clandestin de marxistes islamiques », et Moshen Khamoushi134 ».

Le 11 août 1975, quatre autre « terroristes furent arrêtés dans l’affaire du meurtre de deux colonels des forces de l’air américains135. Selon le New York Times, neuf « guérillas » furent exécutés le 24 janvier 1976 en relation avec le meurtre de « plusieurs personne[s], dont trois colonels américains ». Au cours de leur procès, « les accusés ont avoué avoir tué les américains, un employé iranien du Consulat des États-Unis, un brigadier général de police, et trois autres iraniens 136».

Vahid Afrakhteh (qui s’écrit aussi Afrakhten) avoua l’assassinat du Lt. Col. Hawkins, selon un article du Washington Post. Afrakhten dit avoir personnellement tué Col. Lewis Hawkins à Téhéran en 1973 et avoir dirigé la cellule qui avait abattu le Col. Paul Schaffer et le Lt. Col. Jack Turner après avoir arrêté leur véhicule conduit par un chauffeur en 1975137.

130 131 132 133 134 135 136 137

“Iranian Terrorists Slay 2 U.S. Colonels,” The New York Times, 22 mai, 1975. Id. Id. “Two Iranians Are Arrested in Killing of US Officers,” UPI report, The New York Times, 30 juillet, 1975. Id. “Iran Arrests 4 Terrorists,” The New York Times, 12 août, 1975. “9 Are Executed in Iran,” AP Report, The New York Times, 25 janvier, 1976. “Iran Says Guerrilla Trained in Cuba,” The Washington Post, 11 mai, 1976.

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Afrakhten faisait partie des six hommes exécutés par les autorités iraniennes138.

Les Commentaires

Vahid Afrakhten est très probablement le responsable des assassinats du Col. Paul R.Schaffer, Jr., et Lt. Col John H Turner. Afrakhten était membre du « MEK » marxiste qui préconisait l’assassinat des américains. Comme nous l’expliquons plus haut, Afrakhten, Taqi Shahram, et Bahram Aram avaient pris le contrôle du « MEK » ressuscité lorsque les dirigeants de l’organisation initiale furent exécutés ou emprisonnés en 1971-72. Lorsque Schaffer et Turner furent assassinés le 21 mai 1975, ces membres avaient pris le plein contrôle de l’organisation, et réalisaient ses opérations. Une preuve supplémentaire corroborant la théorie d’un « MEK » marxiste à l’origine des attentats contre le Col. Schaffer et Lt. Col. Turner se trouve dans un document revendiquant les attentats et sur lequel figure l’emblème des Moudjahidin sans le verset du Coran traditionnel au-dessus. Le « MEK » marxiste avait en effet retiré ce verset de l’emblème de l’organisation reformée pour marquer leur rejet de l’Islam139.

Comme l’explique Ervank Abrahamian, le marxiste « MEK » avait repris l’insigne, mais en abandonnant « l’inscription coranique et la date de la fondation du groupe, avec le symbole du poing fermé agrandi, sensé figurer une conscience prolétarienne élevée 140». Par ailleurs, l’organisation avait fait du livre de Mao Tse-tung « Contradictions au sein du peuple 141» sa nouvelle bible.

Les américains furent ciblés par le MEK marxiste à des fins de publicité et pour prouver que la doctrine marxiste était plus efficace que le MEK musulman original142. Le Département d’État américain, s’appuie sur l’article du New York Times (voir ci-dessus), pour affirmer que Rahman Vahid Afrakhteh était responsable du meurtre des Cols. Schaffer et Turner143. Toutefois, le nom de « Rahman Afrakhteh », est inexact car il fait la confusion entre les noms de deux frères : Rahman Afrakhteh qui n’a « jamais été sérieusement impliqué dans aucun parti politique », 144 et Vahid Afrakhteh qui avait avoué l’assassinat145.

138 139 140 141 142 143 144 145

Id. Democracy Betrayed, The National Council of Resistance of Iran, 1993. The Iranian Mojahedin, Ervand Abrahamian, Yale University Press, 1989, p. 165. Id. Interview avec le CNRI, août 2005. “The People’s Mojahedin Organization of Iran,” Kenneth Katzman, Congressional Research Service, Washington, novembre 1992. Democracy Betrayed, The National Council of Resistance of Iran, 1993. Id

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D.

Les employés de Rockwell

Le New York Times rapportait que le 28 août 1976 des « terroristes » avaient assassinés trois employés de Rockwell, prestataires de service pour le compte des forces armées iraniennes146. Le journal n’identifiait que deux victimes :

William C. Cottrell et Donald G. Smith. Le troisième employé, qui n’était pas nommé par le Times, était Robert R. Krongrad. L’article relayait les circonstances des assassinats selon les termes de responsables iraniens, à savoir que les victimes civiles avaient été tuées par des membres d’un même groupe terroriste anti-gouvernemental et autoproclamé « marxiste islamique » qui par ailleurs avait été officiellement reconnu coupable des assassinats à Téhéran, l’année précédente, de deux colonels américains147.

Les employés « étaient conduit en véhicule sur leur lieu de travail par un chauffeur iranien lorsqu’il furent pris dans une embuscade, aux environ de 7 heures du matin dans la périphérie de la capitale148 ». L’attentat, selon le New York Times, « était similaire à celui perpétré en mai 1975 dans lesquels les colonels américains avaient trouvé la mort tandis qu’il se rendaient sur leur lieu de travail149 ». A l’époque, les employés de Rockwell participaient à la construction d’une infrastructure de surveillance de communications électroniques de grande envergure pour le compte des renseignements iraniens. L’attentat de Rockwell est décrit dans l’Institut de Commémoration pour la Prévention du Terrorisme en ces termes :

Trois employés de Rockwell International furent assassinés à 7 heures du matin tandis qu’ils se rendaient sur une base des forces de l’air iraniennes à Téhéran, conduits par un chauffeur. Les Combattants du Peuple ( Mujahiddin e Khalq) utilisèrent une Volkswagen pour barrer la route par devant à la Dodge des employés tandis qu’un second véhicule les cernait par l’arrière. Quatre hommes armés firent irruption, et ordonnèrent au chauffeur de s’allonger avant de mitrailler le véhicule avec des pistolets Polish M-63 et un pistolet Browning 9mm. Le groupe prit ensuite la fuite dans la voiture stoppée à l’arrière. Les rapports affirment que la mallette d’un des hommes tués avait été volée. Les trois hommes travaillaient sur le projet IBEX, un projet de surveillance électronique d’un $1 milliard, pour le compte de l’armée iranienne150. Quelques mois plus tard, le gouvernement du Shah annonçait l’exécution de huit « terroristes » condamnés pour les assassinats151.

146 147 148 149 150 151

“Three U.S. Civilians Slain by Guerrillas in Teheran,” The New York Times, août 29, 1976. Id. Id. Id. http://www.tkb.org/Incident.jsp?incID=1816 The Iranian Mojahedin, Ervand Abrahamian, Yale University Press, 1989, p. 165.

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Commentaires

Les employés de Rockwell furent probablement assassinés par des membres du « MEK » marxiste qui avaient auparavant tué d’autres américains. L’attentat avait été perpétré à la date anniversaire de l’arrestation de Vahid Afrakhteh, un membre du « MEK » marxiste qui avait avoué l’assassinat du Lt. Col. Lewis Hawkins, du Col. Schaffer et du Lt. Col. Turner. Comme nous l’expliquons plus haut, à l’époque de ces assassinats, le « MEK » marxiste contrôlait l’organisation. Un communiqué fut diffusé par le « MEK » marxiste qui revendiquait l’attentat. Le document, communiqué militaire n°.24, annonçait que les « trois avaient été « exécutés » pour venger les récentes condamnations à mort et pour protester contre le gaspillage de milliards dans l’équipement militaire 152». Bien que le communiqué affiche l’emblème des Moudjahidin, 153Abrahamian confirme que ce sont les membres du « MEK » marxiste qui ont assassiné les employés de Rockwell.

En août 1975, les marxistes [MEK marxiste] avaient posé une bombe dans un commissariat de police de la banlieue du nord de Téhéran ; en plein jour, ils avaient assassiné trois employés américains de Rockwell International154.

Massoud Rajavi, un membre fondateur du MEK qui était en prison de 1971 à 1979, déclara publiquement que le « MEK » marxiste étaient responsables de l’assassinat des américains.

Le dirigeant des Moudjahidin Massoud Rajavi, réagissant à une série d’allégations faites récemment par le Département d’État, a nié toute responsabilité dans les tueries de six américains en Iran dans les années ’70. Il attribuait ces tueries à des groupes dissidents d’extrémistes marxistes.155

152 153 154 155

Id. at 166. Democracy Betrayed, The National Council of Resistance of Iran, 1993. The Iranian Mojahedin, Ervand Abrahamian, Yale University Press, 1989, p. 166. “International News,” Associated Press, 8 août, 1985.

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X. Des allégations de soutien dans la prise d’assaut de l’ambassade des États-Unis

Allégation de Département d’État Le MEK « soutenait la prise d’assaut de l’ambassade des États-Unis à Téhéran en 1979156 ».

Le contexte

Cette allégation fut précédemment exprimée par le Département d’État le 24 juillet 1985 lorsque le secrétaire d’État assistant pour les Affaires du Proche Orient, Richard Murphy, intervint devant la Chambre du sous-comité des Affaires Étrangères pour l’Europe et le Moyen-Orient. L’ Associated Press cite ici ses propos : « Les Moudjahidin avaient pris parti dans la séquestration prolongée des diplomates américains pris en otages, proposant de les juger pour espionnage et organisant une manifestation de masse à Téhéran en janvier 1981 pour protester contre leur libération. » [Murphy] affirmait. Les Moudjahidin, toutefois, n’étaient pas le groupe directement responsable de la rétention de 444 jours des 52 otages américains qui commença le 4 novembre 1979157. Selon le Département d’État, le jour où la crise des otages éclata, le MEK avait émis une proclamation intitulée Après le Shah, c’est au tour de l’Amérique158. Il a été également affirmé que « les Moudjahidin avaient physiquement pris part aux évènements sur place, fournissant une aide dans la prise d’assaut, et s’opposant à la libération de l’ambassade 159». Les otages furent relâchés en janvier 1981. Le Département d’État américain affirme, dans le numéro suivant du Mojahed, que « Mojahedin-e Khalq était la première force qui s’érigea ouvertement comme un soutien à l’occupation du centre d’espionnage américain, » et notait par ailleurs que ses membres avaient passé « des jours et des semaines » « qu’il pleuve ou qu’il vente » devant l’ambassade160.

Les commentaries

Les allégations du Département d’État (Ministère des Affaires Étrangères américain) reflètent le malentendu sur les événements en Iran qui aboutirent à la crise des otages et à la prise de position du MEK dans le soutien des libertés démocratiques en Iran. Tandis que le MEK et Khomeini s’alignaient avec le front national en opposition avec le Shah, lorsque ce dernier fut renversé, le MEK et Khomeini devinrent des adversaires politiques. Deux jours après la révolution, 156 157 158 159 160

“Country Reports on Terrorism,” US State Department, 27 avril, 2005. “Murphy Warns Congress of Campaign by Iranian Leftists,” Associated Press, 25 juillet, 1985. “Report on the People’s Mojahedin of Iran,” Unclassified document, US State Department, 1994 Id. Id.

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Rajavi et plusieurs de ses collaborateurs influents rencontrèrent Khomeini. Durant cette rencontre, Rajavi mit l’accent sur l’importance de la liberté. Par la suite, Khomeini envoya son fils, Ahmad, pour lui faire l’offre d’un poste ministériel important dans le nouveau gouvernement mais à la seule condition que le MEK reconnaisse les clercs comme l’autorité suprême. Le MEK déclina l’offre. Depuis, l’organisation a continué sa lutte pour les libertés politiques et la séparation des pouvoirs. Le MEK ayant refusé tout compromis sur l’essentiel de ses principes, une lutte de pouvoir s’en est suivie. Le MEK avait initialement suivi une politique de non-confrontation avec Khomeini dans l’espoir de jouer le rôle d’une opposition légitime dans le nouveau gouvernement. Lorsque la crise des otages éclata le 4 novembre, 1979, le MEK choisit de ne pas défier Khomeini, qui avait immédiatement repris le relai du pouvoir. Le jour où les étudiants envahirent l’ambassade des États-Unis, Khomeini avait désigné l’Amérique comme source de tous les maux dans un discours adressé à un groupe d’étudiants universitaires. « Il s’est avéré plus tard que ces étudiants universitaires étaient sous la commande de Hojjat alIslam Khoiniha, un membre influent du PRI et dirigeant du komiteh de l’Université de Téhéran [l’organisation des gardiens de la morale]161. Selon Massoumeh Ebtekar, qui était le porte-parole des étudiants radicaux durant la crise des otages, le MEK « s’était opposé au putsch et à la confrontation avec l’Amérique dès le début 162». Ebtekar, un étudiant en chimie qui devint plus connu sous le nom de Sister Mary, « était responsable des interventions devant la grille principale de l’ambassade chaque fois que des étudiants souhaitaient s’adresser à la presse en anglais163 ». Pour les iraniens, la crise des otages fut « en grande partie une crise interne ancrée dans la lutte constitutionnelle 164».

Dans la confusion de la crise des otages, les clercs se hâtèrent de ratifier leur proposition de constitution, à laquelle le MEK refusait d’adhérer. Le document original prenait modèle sur la constitution promulguée par le Général de Gaulle, mais il avait été modifié par l’Assemblée des Experts, afin d’y transférer les pouvoir du président et des députés élus vers des clercs de haut rang. Le MEK boycotta cette ratification. Avec la montée des hostilités entre le MEK et Khomeini, le MEK critiqua ouvertement la crise des otages. Le MEK affirma que les clercs « avaient orchestré la crise des otages pour imposer à la nation « leur conception médiévale du velayat-e faqih [le titre de l’ouvrage de Khomeini qui préconise la création d’un état théocratique] 165».

Pour appuyer ces accusations, le [MEK] publia des articles où il était révélé comment les étudiants preneurs d’otages étaient connectés au PRI [Parti Républicain Islamique] ; comment les pasdars [volontaires armés] avaient facilité l’effraction à l’intérieur de l’ambassade ; comment ceux qui avaient refusé de suivre le PRI avaient été chassé hors du bâtiment ; comment l’Ayatollah Beheshti [à la tête du Conseil Suprême de la Magistrature] avait profité de l’incident

161

The Iranian Mojahedin, Ervand Abrahamian, Yale University Press, 1989, p. 57. Une histoire récente de la crise des otages par David Harris (The Crisis: The President, the Prophet, the Shah – 1979 and the Coming ofMilitant Islam, Little Brown, 2004) rapporte que le putsch fut d’abord amorcé par Ibrahim Asgarsadeh, un étudiant de l’Université de Technologie Aryamehr de Téhéran, et deux autres étudiants.

162

Takeover in Tehran, Massoumeh Ebtekar, Talon Books, Canada, 2000, p. 234. David Harris, dans un récent ouvrage, The Crisis, ne fait aucune référence aux Moudjahidin ce qui indique que l’organisation n’était pas impliquée.

163 164 165

The Crisis: The President, the Prophet, the Shah – 1979 and the Coming of Militant Islam, by David Harris, Little, Brown and Company, 2004, p. 236. The Iranian Mojahedin, Ervand Abrahamian, Yale University Press, 1989, p. 57. Id. at 208.

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132

pour écarter du pouvoir Bazargan du Gouvernement [intérimaire], et comment Hojiat al-Islam Kkhoiniha, l’homme nommé par Khomeini pour guider les étudiants, avait prudemment exfiltré de l’ ambassade tous les documents qui faisaient référence à des rencontres entre des responsables américains et les clercs dirigeants durant la révolution de 1979166.

Le MEK accusait le gouvernement clérical de « perturber ses rassemblements et réunions, d’interdire la publication de ses journaux et de brûler ses livres, tronquant les résultats des élections, fermant les universités [et] procédant à des enlèvements, emprisonnements et tortures aux activistes politiques167… » En réaction, « les Adeptes des Étudiants Musulmans de la Lignée de l’Imam, les étudiants occupant l’ambassade des Etats-Unis, dénoncèrent les Moudjahidin en tant suiveurs « des libéraux pro-américains » mais secrètement marxistes168 ». Selon Abrahamian, « en critiquant le rapport politique du régime, les Moudjahidin ramenait la question de la démocratie au centre des débats 169».

Le MEK argumentait que le régime avait brisé toutes les promesses de démocratie faites pendant la révolution, et que toute attaque sur un groupe concernait tous les groupes, que la question de la démocratie était « d’une importance fondamentale » , et que les autres problèmes, y compris celui de l’impérialisme, en dépendaient étroitement, car sans liberté politique le pays restait vulnérable aux complots étrangers170.

Six mois après la prise d’otages, le MEK put rallier plus d’un demi-million de personnes dans les rues de Téhéran. Ses journaux se vendaient plus que ceux du parti clérical à une proportion de seize pour un171 ». Dans l’ensemble, le MEK s’opposait à la prise d’otages. Le MEK n’était pas allié aux Adeptes des Étudiants Musulmans de la Lignée de l’Imam, une organisation d’étudiants qui avait pris d’assaut l’ambassade, ni l’allié des clercs. Le MEK profita de la crise pour révéler l’implication de Khomeini et comment son régime utilisait l’incident pour usurper le pouvoir et en écarter le Gouvernement Intérimaire. Au regard de ces faits, il est inexact d’affirmer que le MEK était responsable de la crise des otages ou qu’il l’ait soutenue.

166 167 168 169 170 171

Id. at 208. Id. Id. at 205 Id. at 209. Id. Id. at 1.

IRAN: DÉFIS ET CHOIX DE POLITIQUE ETRANGÈRE

133

XI. Des allégations de pose de bombes par le MEK dans les bureaux du Parti Républicain Islamique

Allégations faites par le Département d’État :

« En 1981, le MEK fit exploser des bombes dans les bureaux centraux du Parti Républicain Islamique et le bureau du Premier Ministre, tuant quelques 70 dignitaires de haut rang iraniens, le garde des sceaux l’Ayatollah Mohammad Beheshti, le Président Mohammad-Ali Rajaei, et le premier ministre Mohammad-Javad Bahonar ».172

Le Contexte Trente kilos d’explosifs avec un détonateur sophistiqué furent placés dans une corbeille près du podium173. Une seconde bombe fut placée près d’un pilier d’un couloir. L’attentat eut lieu durant une réunion hebdomadaire de membres du PRI. « Quelques minutes avant l’explosion, [Ministère des Affaires Exécutives Behzad] Navavi annonça à ceux qui l’entouraient à la conférence qu’il se sentait mal. [Le Premier Ministre Mohammad Ali] Rajai et [Hojiat al-Islam] Rafsanjani [rapporteur des Majles ou Assemblée Consultative] aurait répondu que s’il quittait la salle, il partirait avec lui. L’explosion eut lieu juste après leur départ 174». Après l’attentat, « plusieurs responsables gouvernementaux diffusèrent des communiqués attribuant l’attentat au Mujahedeen Khalq gauchistes…et au Fedayeen Khalq…175 ». Aucun groupe ne revendiqua jamais la responsabilité de cet attentat. On a spéculé, toutefois, sur le fait que des forces armées auraient pu être impliquées d’après le mode opératoire de l’attaque176. L’Associated Press rapportait le 6 juillet, que la Garde Révolutionnaire avait identifié les suspects poseurs de bombes comme étant Mohammad Reza Kolahi, qui « travaillait pour le Mujahedeen Khalq marxisteislamique 177». Plus tard, la version officielle donnée par le PRI attribua l’explosion au « travail des guérillas Moudjahidin178 ». Khomeini accusa publiquement le MEK d’avoir également orchestré les attentats à la bombe179. Des rapports affirmaient que les agents iraniens, ayant placé les Moudjahidin sur écoute téléphonique, avait intercepté les messages suivant : « nous avons réussi à tuer Beheshti ». Cependant, le Time Magazine expliquera qu’il « était fort possible

172 173 174 175 176 177 178 179

“Country Reports on Terrorism,” US State Department, 27 avril, 2005. “Iran: A Blast at the Mullahs,” Newsweek, 13 juillet, 1981. “Mullahs Watch Each Other’s Glances,” Christian Science Monitor, 9 juillet, 1981. “Clergy Vows Vengeance for Bombing,” Associated Press, 29 juin, 1981. “Khomeini Appoints New Chief Justice; Bombing Toll is 72,” The New York Times, 30 juin, 1981. “27 Leftists Executed, Governor Assassinated,” Associated Press, 6 juillet, 1981. “Mullahs Watch Each Other’s Glances,” Christian Science Monitor, 9 juillet, 1981. “Parliament in Tearful Session, 10 Executed,” Associated Press, 1er juillet , 1981.

IRAN: DÉFIS ET CHOIX DE POLITIQUE ETRANGÈRE

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qu le gouvernement ait simplement tenté de discréditer les Moudjahidin, qui représente l’opposition potentielle la plus sérieuse pour les mollahs 180».

Après l’attentat, des articles de presse évoquaient la possibilité que l’attentat soit lié à un coup d’état potentiel. Le Time Magazine rapporta que Radio Iran « avait attendu trois heures avant d’annoncer qu’une explosion avait causé des dégâts considérables et pertes humaines au siège central du parti ». Craignant qu’un coup d’état soit en cours de préparation, le gouvernement avait coupé la communication avec le monde extérieur181. « L’armée, selon cette théorie, préparait le terrain pour l’élimination des hommes de Khomeini au Conseil de Défense, et…que l’attentat à la bombe devait être le coup de grâce ».182

Les Commentaires

Les auteurs de l’attentat ne sont toujours pas clairement identifiés. Cette vision est soutenue par Abrahamian : « Immédiatement après cet évènement, les autorités blâmèrent les survivants de la SAVAK et le régime irakien. Deux jours plus tard, Khomeini pointait du doigt les Moudjahidin183 ». Par ailleurs : des années plus tard, un tribunal à Kermanshah exécuta à l’insu du public quatre « agents irakiens » accusés de l’attentat. Un autre tribunal à Téhéran exécuta également en secret un certain Mehdi Tafari accusé des mêmes faits mais ne lui attribuant aucun lien interne ou externe. Shaykh Tehrani, le beau-frère du président Khamenei, révéla, après sa fuite vers Baghdad que le régime savait que M. Kolahi avait placé la bombe mais avait été incapable de remonter ses affiliations d’organisation. Enfin, le chef des renseignements militaires informera la presse en avril 1985, que l’attentat était l’œuvre non pas des Moudjahidin mais d’un officier de l’armée royaliste184. De nombreux groupes de résistance avaient violemment défié le Parti Républicain Islamique au cours des 13 mois qui précédèrent l’attaque du siège social du PRI. Une semaine avant l’attentat, des Gardiens de la Révolution avaient tiré dans une foule de manifestants, faisant une douzaine de morts. Le règne de la terreur avait commencé.

Étant donné les remous qui ont secoué l’Iran au moment des attentats à la bombe, le manque de preuves, le nombre de personnes accusées et punies pour ces attaques, et le nombre de groupe de résistance et autres qui avaient un intérêt dans l’assassinat de membres du PRI, il est difficile de savoir qui aurait pu agir. Sachant qu’à cette époque le MEK était le groupe d’opposition le plus puissant, l’insistance de Khomeini à attribuer l’attentat au MEK émanait très probablement de motivations politiques. Aucun des tribunaux par la suite ne poursuivra le MEK ni ses membres pour l’attentat.

180 181 182 183 184

“Iran: A Blast at the Mullahs,” Newsweek, 13 juillet, 1981. “Lurching Bloodily Onward,” Time Magazine, 13 juillet, 1981. “Iran: A Blast at the Mullahs,” Newsweek, 13 juillet, 1981. The Iranian Mojahedin, Ervand Abrahamian, Yale University Press, 1989, p. 220. Id.

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XII. Des Allégations d’actions militaires aux côtés de Saddam Hussein

Les allégations du Département d’État

« Vers la fin de la guerre irano-irakienne (1980-88), Bagdad approvisionna le MEK avec de l’équipement militaire et l’envoya se battre sur le front contre les forces iraniennes ». Telles sont les allégations du Département d’État185.

A. La guerre irano-irakienne

Le 17 septembre, 1980, le président irakien Saddam Hussein abrogea l’accord d’Alger de 1975 avec l’Iran, faisant le vœu de « libérer » un territoire disputé. Les combats éclatèrent le long de la voie d’eau de Shatt al-Arab et connurent une rapide escalade jusqu’à aboutir à une guerre totale. Les États-Unis annoncèrent qu’ils observeraient une stricte neutralité. Des avions iraniens bombardèrent Bagdad et d’autres cibles, tandis que les forces irakiennes envahirent le sud-ouest de l’Iran sur un front de 480 kilomètres. Après avoir pris le contrôle du Shatt al-Arab entier et de trois îles à l’embouchure du Golf Persique, l’Irak annonça le 29 septembre qu’elle acceptait le cessez-le-feu. L’Iran rejeta cette offre et s’engagea à poursuivre les combats jusqu’à ce que l’Iraq soit expulsé de son territoire. Les combats se poursuivirent jusqu’au point mort, puis l’Iran monta une contre-offensive réussie avec l’aide de la Syrie et de la Lybie. En juin 1982, Saddam Hussein proposa le retrait unilatéral de ses troupes du territoire iranien. L’Iran rejeta à nouveau ce cessez-le-feu exigeant des conditions de pourparlers plus radicales, dont $150 milliards de dommages.

Au début le MEK était opposé à l’invasion irakienne de l’Iran, et il prit part au combat aux côtés des troupes iraniennes. Mais en juin 1982, après que l’Irak se soit retirée du territoire iranien et ait appelé à une solution négociée, et face au refus de l’Iran de s’y soumettre, le MEK tenta d’agir en tant que médiateur. Le 9 janvier 1983, Rajavi tint une réunion avec Tariq Aziz, le vice-premier ministre irakien. Au terme de cette rencontre, l’Irak et le CNRI firent une déclaration commune « appelant à la juste application de solutions pacifiques et de paix pour mettre fin au conflit entre les deux pays, par le biais de négociations fondées sur l’intégrité territoriale 186».

Ce plan demandait expressément la mise en vigueur d’une déclaration immédiate de cessez-le-feu, d’un retrait de part-et d’autre des troupes irakiennes et iraniennes, de l’échange de prisonniers, d’un processus d’évaluation des dommages dus à la guerre, de modalités de rétablissement des droits iraniens », et de l’élaboration d’un plan pour un traité de paix définitif entre les deux pays. En soutenant le cessez-le-feu, le MEK cherchait à s’opposer politiquement au régime de Khomeini, et lui attribuer la responsabilité de la non-résolution du conflit. Le MEK était donc l’allié naturel de l’Irak puisqu’ils souhaitaient tous deux mettre un terme au conflit. La guerre Iran-Irak devait durer encore cinq ans. Le Secrétaire-Général des Nations185 186

“Country Reports on Terrorism,” US State Department, 27 avril, 2005. “Peace Plan of the National Council of Resistance,” 13 mars, 1983.

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Unies Javier Perez de Cuellar négocia un cessez-le-feu en août 1988, mettant fin à un conflit qui aura coûté la vie à un million de soldats.

B. L’Irak retiré de la liste des terroristes

Bien que les États-Unis aient affirmé leur « stricte neutralité » dans la guerre Iran-Irak, l’émergence d’un Iran vainqueur restait une source d’inquiétude. Les responsables politiques américains distinguaient deux menaces dans le Golf Persique : « l’expansionnisme communiste mené par l’URSS dans la région, et l’expansion du fondamentalisme anti-américain venu de l’Iran187 ». L’URSS était le fournisseur d’armes principal de l’Irak188. Mais elle approvisionnait également en équipement militaire la Corée du Nord, qui à son tour vendait des chars soviétiques, des mortiers et mitrailleurs anti-aériens ainsi que des armes de petits calibres à l’Iran189. L’idée que l’Iran puisse gagner cette guerre et étendre son offensive plus à l’Ouest vers Israël était une source d’inquiétude grandissante. L’Iran représentait également une menace pour les ressources vitales en pétrole. Pour contrer la menace de l’Iran, les États-Unis prirent la décision stratégique de soutenir l’Irak. « Si l’Irak avait chuté, les conséquences auraient été catastrophiques pour le Koweït et l’Arabie Saoudite, et la région entière aurait pu s’embraser, » déclara plus tard un ancien responsable du Bureau des Renseignements de la Défense « tels étaient les enjeux derrière notre décision politique190 ». En juin 1982, le Président Ronald Reagan émit une Directive de Décision de Sécurité (NSDD) autorisant toute action nécessaire et légale visant à prévenir une défaite de l’Irak contre l’Iran191.

Selon Howard Teicher, un ancien membre du Conseil National de Sécurité, «le directeur de la CIA [William] Casey consacra personnellement tous ses efforts à la garantie que l’Irak serait suffisamment approvisionné en équipement militaire, en munitions et véhicules pour lui éviter une défaite face à l’Iran 192». Teicher ajoutait : dans certains cas, où un composant essentiel dans une arme n’était pas immédiatement disponible, les plus hautes figures du gouvernement américain faisaient le nécessaire pour que l’Irak puisse l’obtenir, directement ou indirectement. Je me souviens que l’approvisionnement de pénétrateurs anti-armure fut spécifiquement le cas193. Avant que les États-Unis puissent venir en aide à l’Irak, il fallait préalablement le retirer de la liste du Département d’État recensant les nations sponsors du terrorisme international. « L’Irak figurait dans cette liste, aux côtés de la Syrie, la Lybie, après l’entrée en vigueur de Export Administration Act de 1979 qui

187 188

“Inverse Engagement: Lessons from US-Iraq Relations, 1982-1990,” Douglas H. Borer, Ph.D. Parameters, été 2003. “Iran is Said to Get North Korea Arms,” The New York Times 19 décembre, 1

982.

189

“Stalemated Gulf War Awaits Events in Iran,” The Washington Post, 5 décembre, 1

982.

190

“Officers Say US Aided Iraq in War Despite Use of Gas,” The New York Times, 18 août, 2

002.

191

“Déclaration de Howard Teicher (Ancien responsable du NSC, 1982-87),” Affidavit, United States of America vs. Charlos Cardoen et.al., 31 janvier, 1

995.

192 Id.

193

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autoriserait à l’administration l’usage du contrôle des exportations pour des raisons de sécurité nationale et de politique étrangère, » rapportait le Congressional Quarterly194.

Parmi les raisons de la désignation de l’Irak sur cette liste, on peut citer les suivantes : •

Au début des années ’70, Saddam Hussein a offert un asile politique, un entrainement militaire, des armes et autres formes d’assistance aux extrémistes palestiniens et arabes.



Bagdad a été le refuge de l’Organisation d’Abu Nidal (ANO). Tout en bénéficiant de l’asile politique, l’organisation a mené des offensives terroristes contre des cibles juives et israéliennes dans les années ’70 et ’80, y compris des meurtres dans des synagogues et des attentats contre des passagers de la ligne aérienne El Al en Turquie, en Autriche, en Belgique et en Italie et le détournement d’un vol de Pan Am Airlines (Pan Am 73) à Karachi, au cours duquel 22 personnes furent (dont 2 américains) furent assassinées.



Saddam a aussi offert l’asile au Front Populaire de Libération de la Palestine (FPLP), au Front Démocratique pour la Libération de la Palestine (FDLP) et à la faction Hawari de l’OLP.



Le terroriste palestinien Mahmud Abbas, connu comme Abu Abbas, et son organisation, le Front de Libération de La Palestine (FLP) trouvèrent refuge en Irak et bénéficièrent du soutien de Saddam Hussein.



En 1970, Saddam aida les factions radicales palestiniennes à mener des opérations terroristes visant des cibles israéliennes, juives, occidentales et arabes modérées.



Bagdad créa le Front de Libération Arabe (FLA) représentant son combat mené contre Israël195.

En dépit du soutien officiel de l’Irak au terrorisme, en mars 1982, le Département d’État supprimera son nom de la liste des états sponsorisant le terrorisme196.

Le 27 mars 1982, le Département d’Etat envoya un télégramme confidentiel sur la « dé-désignation de l’Irak en tant que soutien du Terrorisme International ». Les lecteurs auront sans doute vu les média rapporter que l’Irak ne figure pas dans la liste actuelle des pays qui sponsorisent en permanence le terrorisme international, liste qui est soumise à l’administration du Congrès chaque année. Cette décision résultait d’une révision annuelle selon les conditions de l’Export Administration Act (amendement Fenwick) et n’est pas inclus dans une série de changements dans les contrôles d’exportations entrepris par l’Administration197. La raison officielle invoquée dans la « dé-désignation» de l’Irak était l’amélioration de ses

Id.

194

“Congress’ Record on Saddam: Decade of Talk, Not Action,” Congressional Quarterly Weekly Report, 27 avril, 1991.

1 9

195

« La déclartion de Judith S.Yaphe à la Commission Nationale sur les Attentats Terroristes contre les États-Unis », « Troisième audition publique auprès de la Commission Nationale sur les Attentats Terroristes contre les Etats-Unis, 9 juillet, 2003.

196

“Saddam’s Secret Allies: The Legions of Terror,” The Washington Post, 23 septembre, 1

990.

197

“Department of State Telegram: De-Designation as Supporter of International Terrorism (Confidential), 27 février, 1

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138

performances ». Mais « personne ne doute du fait que les [irakiens] continuent à être impliqués dans le terrorisme… La véritable raison était la volonté d’aider l’Irak à gagner la guerre contre l’Iran 198». Le Congrès demanda à l’Administration Reagan si l’Irak avait été retiré de la liste pour l’aider dans son combat contre l’Iran. « La réponse officielle fut non, mais [Richard] Murphy [Sous-Secrétaire d’État pour le Moyen-Orient et Asie du Sud] reconnut [en 1991] que la politique des États-Unis apportait son « soutien » à l’Iraq199 ». Une fois que l’Irak fut retiré de la liste des terroristes, les États-Unis autorisèrent l’expédition de technologies à double usage vers l’Irak en utilisant le budget destiné à promouvoir l’exportation des biens américains. En matière d’assistance militaire, les États-Unis maintenaient officiellement une position de neutralité dans la guerre Iran-Irak tout en continuant toutefois à vendre à l’Irak une large gamme d’articles à « double usage ». A titre d’exemple, l’Irak acheta plus de 100 hélicoptères de fabrication américaine, qui dans les documents d’exportation étaient définis comme des biens destinés à un usage civil et de divertissement. Dès l’arrivée de l’équipement en Irak ils étaient immédiatement détournés vers le front iranien sans que s’ensuive la moindre protestation de la part de Washington.

L’Administration Reagan donnait également son accord tacite pour des transferts illégaux d’armes américaines provenant de pays tiers, y compris la vente de missiles anti-char TOW, d’hélicoptères, d’armes de petits calibres, de mortiers, et de munitions qui venaient d’Égypte, de Jordanie, du Kuweit, et de l’Arabie Saoudite. Mais l’aide militaire la plus précieuse restait les renseignements fournis à l’Irak par le biais de photos satellites américaines200. Par ailleurs, la Commodity Credit Corporation (Corporation de Crédit des Biens de Première Nécessité) fournissait également à l’Irak des denrées agricoles201. Par l’intermédiaire de la Banque d’Import-export, les États-Unis aidèrent l’Irak à acquérir des biens manufacturés. « En 1985, près de $35 millions en garanties étaient disponibles ; de 1987 à 1990, la Banque d’Import-export fournit $267 millions en garanties de crédit à l’Irak202 ». Les États-Unis approuvèrent également et aidèrent la vente par l’Égypte d’armement, de munitions, et de véhicules à l’Irak203. Plus de 60 responsables du Bureau des renseignements de la Défense, fournirent des « informations détaillées sur les déploiements des troupes iraniennes, des plans tactiques de batailles, des plans de frappes aériennes, et des estimations à l’usage de l’Irak des dégâts causés par les bombes 204». Par ailleurs, la CIA aida l’Irak en lui

982.

198

“Inverse Engagement: Lessons from US-Iraq Relations, 1982-1990,” Douglas H. Borer, Parameters, été 2003.

0

199

Congress’ Record on Saddam: Decade of Talk, Not Action,” Congressional Quarterly Weekly Report, 27 avril, 1

991.

200

“Inverse Engagement: Lessons from US-Iraq Relations, 1982-1990,” Douglas H. Borer, Parameters, été 2

003.

201

”Congress’ Record on Saddam: Decade of Talk, Not Action,” Congressional Quarterly Weekly Report, 27 avri l, 1991. En 1989, l’Irak est le plus grand importateur de riz américain et le second plus important participant au programme du crédit agricole.

202 Id.

203

Une déclaration par Howard Teicher (Former NSC Official, 1982-87),” Affidavit, United States of America vs. Carlos Cardoen, 31 janvier, 1

995.

204

“Officers Say US Aided Iraq in War Despite Use of Gas,” The New York Times, 18 août, 2

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fournissant des photos satellites du front205. Les États-Unis fournirent à l’Irak « des milliards de dollars en crédits, par la communication de renseignements et conseils militaires américains, et par un suivi des ventes d’armes de pays tiers vers l’Irak afin de s’assurer que l’Irak bénéficierait de l’arsenal requis206 ». En novembre 1982, Saddam Hussein reconnaissant le changement de la politique américaine, déclara officiellement que le traité d’amitié avec l’Union Soviétique « n’avait pas fonctionné » durant la guerre et exprima son intérêt pour l’amélioration de ses relations avec les Etats-Unis207. En novembre 1984, les États-Unis et l’Irak rétablirent des relations diplomatiques, qui avaient été interrompues avec la guerre des six jours israélo-arabe en 1967. Durant la guerre Iran-Irak, le montant des ventes d’armes par la France vers l’Irak s’élevait à $25 milliards.208

Les Commentaires

Le Département d’État reproche au MEK de s’être aligné à Saddam et à l’Irak tandis qu’à la même époque les États-Unis pratiquaient exactement la même politique, fournissant à l’Irak des millions de dollars en équipement militaire et aide alimentaire. Le Département d’État ne parvient pas à expliquer pourquoi le MEK est blâmable pour s’être aligné avec l’Irak, alors que les États-Unis étaient également un solide allié de l’Irak à cette époque. Le Département d’État a également suggéré que Bagdad aurait fourni un équipement militaire au MEK et l’aurait envoyé au front combattre les troupes iraniennes. » En 1987, le MEK annonça la formation d’une Armée de Libération Nationale [voir ci-dessous]. Il opérait en toute indépendance de l’Irak. La plupart armes que possédait l’organisation avaient été récupérées lors de ses confrontations avec les troupes iraniennes. En juin 1988, par exemple, l’Armée de Libération Nationale réussit à s’emparer de 64 chars irakiens, des dizaines d’APCs et des centaines de fusils de manouvres et d’armement anti-frappe aériennes209.

C. Le département d’État blâme le MEK/CNRI

Le 24 juillet, 1985 durant la guerre Iran-Irak, le Département d’État, de façon inexplicable, fit une déclaration publique au cours d’une audience devant le Congrès, où il critiquait très durement le CNRI d’Iran. Le sous-secrétaire d’État pour l’Europe et le Moyen-Orient Richard Murphy apparut devant le Sous-comité sur l’Europe et le Moyen-Orient pour discuter « des récentes évolutions au Moyen-Orient 210». 002.

205 Id.

206

“Déclaration par Howard Teicher (Former NSC Official, 1982-87),” Affidavit, United States of America vs. Carlos Cardoen., 31 janvier 1

995.

207

“Iraq Says Its Treaty with Soviet Hasn’t Worked,” The New York Times, 17 novembre, 1

982.

208 209 210

“French Industry Stands to Lose,” The International Herald Tribune, 7 mars, 2003. “Remarks Followed by Press Questions; Speaker: Alireza Jafarzadeh,” Federal News Service, 4 avril, 1991. “Developments in the Middle East, July 1985,” House Foreign Affairs Subcommittee on Europe and the Middle East, 24 jullet, 1985.

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140

Cette déclaration s’articulait autour de trois questions : le processus de paix, les retombées du détournement de la TWA et les efforts pour réformer l’économie israélienne211. A la fin de son intervention, Murphy s’en prit sévèrement aux Moudjahidin, accusant l’organisation « de prêcher l’usage de la violence depuis leur formation, et d’avoir travaillé à retour de la société iranienne vers l’Islam Shia réformé à la lumière de principes marxistes ». Murphy affirmait que le MEK était « le groupe iranien le plus engagé dans un terrorisme anti-américain et anti-occidental » qu’il avait « assassiné sept américains en Iran212 ». Il ajouta que le MEK n’avait pas changé sa doctrine de façon significative depuis les années ’70.

« En dépit de certaines tactiques d’ajustements et de séduction auquel il a recours pour attirer la sympathie à l’étranger, » dit-il « le mouvement reste être une organisation collectiviste, prêchant un islam militant, antidémocratique, anti-américain et anti-occidental et qui continue à faire usage du terrorisme et de la violence comme les outils standards de sa politique213 ».

Murphy affirma qu’il avait fait cette déclaration parce que le Conseil National de Résistance de l’Iran était engagé « dans une active campagne de relations publiques auprès du Congrès et du public américain214 ». Le président du sous-comité Lee Hamilton (D-IN) demanda à Murphy pourquoi il avait inclus une critique des Moudjahidin dans son intervention, alors ce n’était pas le sujet de l’audience. A cela Murphy répondit :

« J’ai demandé à mes collaborateurs dans le Bureau du Moyen-Orient avant l’audience présente, tandis que nous nous y préparions, s’il y avait un sujet qu’ils souhaitaient voir abordé. Nous essayons [aussi] d’être prêts à réagir aux questions du comité. Dans le cas présent, on m’a soumis un problème qui, selon le directeur responsable du pays concerné n’avait pas été traité de manière appropriée. Il m’a expliqué qu’il y avait – et je dois avouer que je n’y avait pas porté une attention particulière – une campagne de relations publiques assez active en cours depuis près d’un an, et qui était menée par une organisation cherchant à gagner le soutien américain215.

Hamilton demanda à Murphy si un soutien aux groupes d’oppositions iraniens vivant à l’étranger, faisait partie de la politique des États-Unis, ce à quoi Murphy répondit :

« A vrai dire, nous ne sommes pas en train d’essayer d’établir un gouvernement iranien en exil pour nous opposer au gouvernement iranien.216

211

212 213 214 215 216

Id. at 4. Id. at 11. Id. at 12. “Developments in the Middle East, July 1985,” House Foreign Affairs Subcommittee on Europe and the Middle East, 24 juillet, 1985, p. 10. Id. at 42. Id. at 43.

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141

En réponse à la déclaration de Murphy, le Conseil National de Résistance de l’Iran envoya une lettre de quatre pages au souscomité réfutant les allégations du Département d’État. Ci-dessous sont une sélection des déclarations exprimées dans la lettre :

[toutes] les décisions à l’intérieur du Conseil sont prises selon des procédures démocratiques où chacun des membres jouit d’un vote exclusif et où tous les membres de l’organisation ont un droit de vote égal.217

D’un point de vue économique et social, nous acceptons la propriété privée, le capitalisme national et le marketing, ainsi que les investissements personnels218.

Les Moudjahidin ne croient pas et n’ont jamais cru dans la philosophie de la violence et de la terreur et nous avons condamné toutes les formes de terrorisme. Il y a, toutefois, une immense différence entre la terreur (pratiquée par de petits groupes, isolés des autres, qui cherchent à faire avancer leurs objectifs à travers la violence) et ce qui est simplement une résistance populaire pour la paix et la liberté contre le règne de la terreur de Khomeini ; une Résistance qui est de même nature que celle qu’adoptèrent les américains lorsqu’ils s’engagèrent dans la guerre de l’Indépendance219.

En ce qui concerne la participation des Moudjahidin dans l’assassinat d’américains au sujet duquel M. Rajavi a été harcelé, il faut garder à l’esprit que jusqu’au mois d’août 1971, lorsque la totalité des membres dirigeants de l’OMPI (PMOI) fut arrêtée par la SAVAK, les Moudjahidin n’avaient mené aucune opération militaire. Les dirigeants Moudjahidin furent tous exécutés par le Shah ou, comme M.Rajavi, restèrent en prison jusqu’en février 1979. Depuis 1973, le OMPI avait été temporairement traversé par un courant marxiste qui sera renommé plus tard Paykar. Ce courant marxiste, aurait même assassiné certains dirigeants du Moudjahidin… Le OMPI, aujourd’hui la force principale dans la Résistance iranienne, a été réorganisé et ses activités sont canalisées selon les directives de son dirigeant, M. Massoud Rajavi depuis 1979, suite à la libération des prisonniers politiques220.

Ironiquement, en Iran, Khomeini et Tudeh Parti (communiste) ont constamment essayé de faire le portrait des Moudjahidin comme des agents des États-Unis – probablement à cause de leur caractère indépendant – tandis qu’à l’extérieur de l’Iran, le régime de Khomeini et les derniers membres de l’entourage du Shah ont tenté de dépeindre les Moudjahidin comme des communistes221.

217 218 219 220 221

Id. at 90. Id. Id. Id. at 91-92. Id. at 90.

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Un haut responsable du Département d’État, a déclaré que le MEK en 1984 était jugé « irritant » pour l’Iran et son allié. La CIA, de son côté voyait ce groupe de résistance comme une force majeure ayant des liens avec l’Union Soviétique.

Le directeur adjoint des Opérations de la CIA considérait que le Mujaheddin e Khalq marxiste était bien organisé, influencé par les Soviets, et susceptible de succéder à Khomeini222.

En 1984, les États-Unis avaient commencé à réévaluer leurs relations avec l’Iran. Les responsables politiques pensaient que le régime de Khomeini était défaillant et qu’une lutte de succession serait bientôt déclenchée. Les États-Unis voulaient être en mesure d’influencer les évènements autant en Iran que dans les avancées du bloc soviétique. Les États-Unis espéraient qu’avec le temps, ils pourraient retrouver la place dont ils avaient jouie sous le régime du Shah.

Les membres du Conseil de la Sécurité Nationale avaient élaboré le plan d’une série d’initiatives qui devait être soumise à examen. Comme objectif premier, le Conseil de la Sécurité Nationale, cherchait à prévenir la « désintégration de l’Iran » et préserver « l’Iran comme tampon indépendant entre l’Union Soviétique et le Golf Persique ».223

Dans ce processus de réévaluation, et peu de temps après l’intervention de M. Murphy au Capitol Hill, le Département d’État fit paraître un feuillet blanc le 14 juin 1985, dénonçant le Conseil National de la Résistance de l’Iran, événement qui fut relaté dans un article de septembre 1985 dans le Los Angeles Times224. Un responsable américain y affirmait que le MEK serait bien pire que Khomeini. »225

1. Les otages américains Lorsque Murphy dénonça le MEK au Capitol Hill, en juillet 1985, sept américains étaient retenus en otage au Liban226. Près de neuf mois plus tard, en novembre 1984, tandis que les États-Unis réévaluaient sa politique vis-à-vis de l’Iran, Manucher Ghorbanifar, un trafficant d’armes et ancien agent de la SAVAK, émit la possibilité de fournir des armes à l’Iran en échange de la libération des otages au Liban. Quelques semaines plus tard, avant Murphy n’intervienne au Capitol Hill, le Président Reagan avait autorisé au conseiller de la sécurité nationale, Robert McFarlane à entrer en contact avec l’Iran. Tout se passa ensuite très vite. En août 1985 une livraison d’armes fut envoyée en Iran via Israël. Une seconde livraison fut faite le 14 septembre. Ce même jour, le Rév. Benjamin Weir fut libéré. Après une accalmie, les Etats-Unis envoyèrent deux autres livraisons d’armes à l’Iran en février 1986. Vers la fin mai, McFarlane partit à la tête d’une délégation pour Téhéran, où une 222 223 224 225 226

The Tower Commission Report; The New York Times Company, février 1987, p. 105. Id. at 116. “Iran Dissidents Seek Help From Ex-Enemy U.S,” Los Angeles Times, 1er Septembre , 1985. Id William Buckley, Rev. Benjamin Weir, Peter Kilburn, Rev. Lawrence M. Jenco, Terry Anderson, David P. Jacobson, et Thomas Sutherland.

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réunion de quatre jours avec des responsables fut tenue. Suite à cela, les progrès ralentirent, et les deux partis semblaient être dans une impasse. Le 8 juillet 1986, Ghorbanifar écrivit une lettre à un contact iranien, expliquant les huit actions prises par les États-Unis pour obtenir l’aide de l’Iran dans la libération des otages américains. La quatrième action était :

La [diffusion] d’une annonce officielle désignant le Mojahedin-e Khalq Organization de terroriste et marxiste ; la [diffusion] d’une circulaire à travers le Congrès et à travers toutes les firmes américaines et les institutions, interdisant toute forme d’aide aux opposants au régime de la République Islamique de l’Iran227 ».

Les autres actions que les États-Unis devaient entreprendre pour obtenir les faveurs de l’Iran et qu’expose Ghorbanifar sont : •

Les responsables américains devaient s’abstenir de se référer à l’Iran comme un pays qui soutient et encourage le terrorisme.



Le Département d’État a envoyé une missive officielle condamnant l’utilisation des armes chimiques.



L’ambassadeur des États-Unis aux Nations-Unies fut le premier à voter pour une condamnation officielle de l’usage des armes chimiques.



Les États-Unis se sont opposés à une baisse supplémentaire du prix du pétrole



Des avions ont été envoyés avec des missiles TOW



Certaines informations militaires ont été communiquées sur l’Irak.



Une délégation de responsables de haut rang, menée par Robert McFarlane, attaché spécial et Conseiller auprès du président Reagan, a rencontré des responsables iraniens et livré des pièces détachées d’équipement militaire228. Le 26 juillet 1986, peu de temps après la lettre de Ghorbanifar, Père Lawrence Martin Jenko, qui avait été retenu en otage par des extrémistes libanais depuis le 8 janvier 1985, était libéré. Le mois suivant, les États-Unis expédièrent une autre cargaison d’armes vers l’Iran. En novembre, l’otage David Jacobson était à son tour libéré.

Les Commentaires

Les donnes ont considérablement changé en 1985, dans la politique américaine envers le MEK, qui en 1984 n’était encore perçu que comme un élément « irritant » pour l’Iran. Dès l’année suivante le groupe est devenu le sujet central de plusieurs rapports émis par le Département d’État tandis qu’au Capitol Hill, le sous-secrétaire d’État pour le Moyen-Orient et l’Asie du Sud, M. Murphy, de manière impromptue entreprenait un travail de sape en décrivant le MEK comme le groupe de l’islam militant, anti-démocratique, anti-américain, et anti-occidental ».

Murphy prétend que sa déclaration n’a aucun lien avec l’obtention de la libération des otages américains. Si c’est le cas, il est alors difficile de comprendre pourquoi le MEK, un allié des États-Unis dans la guerre Iran-Irak, devient brusquement la cible 227 228

The Tower Commission Report, The New York Times Company, février 1987, p. 360. Id. at 360-361.

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de critiques aussi sévères. La déclaration de M. Murphy a nui au MEK et par la même occasion gravement entamé les chances de construire une politique américaine à même de tenir l’Iran en respect. Le 6 février 1985, le MEK annonçait publiquement une offensive contre le régime de Khomeini, désignant sa démarche comme l’effort de lutte contre ce gouvernement le plus considérable jamais investi depuis 1979229.

En dehors de ses plans d’attaques, le MEK a également organisé des manifestations à travers tout l’Iran. Le 10 mai 1985, l’Associated Press rapportait qu’une « vague de protestations contre la guerre » avait fait « ébranlé les villes iraniennes ». Selon le MEK, les manifestations anti-guerre avaient fait une avancée sur 74 villes et communes iraniennes et l’on compta 900 arrestations. Il est peu plausible que le Département d’État n’ait pas été au courant des activités anti-Khomeini menées par le MEK en Iran, ni qu’il ait pu être ignorant du fait qu’une attaque publique du MEK amenuiserait gravement les capacités du groupe à organiser des offensives. Il est bien plus probable que les États-Unis aient en réalité poursuivi un tout autre objectif – la libération des otages américains. La lettre de Ghorbanifar à son contact iranien vient étayer cette présomption. Il y est spécifiquement indiqué que le gouvernement des États-Unis, dans le cadre des négociations pour la libération des otages, avait diffusé une « annonce officielle dans laquelle il qualifiait l’organisation du Mujahedin-e Khalq de terroriste et marxiste ». Ce ne sera pas la première fois que le MEK aura été un enjeu dans les négociations avec l’Iran. A maintes reprises, Téhéran a exigé que les États-Unis et la France portent atteinte au MEK contre l’accord d’une aide iranienne.

D. MEK/CNRI se relocalisent en Irak

Il existe d’autres preuves que l’Iran aurait exigé des États-Unis une sanction contre le MEK en échange d’une assistance dans la libération des otages. Elles se trouvent dans la similarité des actions entreprises par la France en 1986 pour obtenir la libération d’otages kidnappés par le Jihad Islamique. Suivant les traces des États-Unis, le gouvernement français avait sollicité le soutien iranien pour la libération des otages. Le MEK était là encore une question au cœur des négociations françaises. Des discussions initiales entre la France et l’Iran furent tenues le 20 et le 23 mai 1986. Durant ces pourparlers, Téhéran émit l’exigence suivante en échange de ses aides231. •

Extrader les membres du MEK/CNRI vers l’Iran



Rembourser $1 milliard de paiement fait par Mohammad Reza Shah à la France pour une centrale de reconditionnement nucléaire qui ne fut jamais construite.



229 231

S’engager à cesser toute vente d’armes à l’Irak

“International News,” Associated Press, 6 février 1985. “Claim Rajavi’s Move to Iraq Part of New Phase in War Against Iran,” Associated Press, 8 juin, 1986.

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Le premier ministre Jacques Chirac avait répondu « qu’il n’est pas dans les traditions de la France d’extrader les réfugiés politiques » et « qu’il était absolument hors de question que de telles mesures soient prises 232». Comme alternative, Chirac déclara que la France assurerait la fin de « certains excès commis par ces réfugiés iraniens qui ne respectent par la neutralité exigée chez tous les demandeurs d’asile en France233 ».

Le 7 juin 1986, Massoud Rajavi et quatre autres personnes quittèrent la France sur un vol charter. Les quartiers généraux de la police régionale affirma qu’ils étaient partis volontairement et n’étaient sous le coup d’aucun ordre d’expulsion234. Le jour où Rajavi quitta la France, la police locale cerna le siège du MEK à Paris, procédant à des contrôles d’identité ostensibles. Mais selon le journal le Monde, la rafle était organisée pour envoyer un signal positif à l’Iran235. En référence à la déclaration de Chirac sur le devoir de neutralité des réfugiés politiques, l’Associated Press notait que le MEK émettait régulièrement de son siège à Paris des communiqués sur « les activités de guérillas en Iran » - ce que la France considérait comme une violation à l’engagement pris par le MEK d’observer une neutralité politique236. Le vol charter de Rajavi atterrit à Bagdad où « des responsables irakiens de haut rang » l’accueillirent237. A cette époque, la guerre Iran-Irak avait duré pendant six ans et l’Irak voyait le MEK comme un allié. Rajavi voyagea à Najaf et Karbala, les deux cités musulmanes chiites sacrées dans le sud de l’Irak. Khomeini avait basé sa résistance à Najaf entre 1964 et 1978, année où il fut expulsé du pays et se relocalisa en France238. Le MEK voyait son arrivée en Irak comme une nouvelle phase de ses opérations. Il établit ses quartiers généraux à Bagdad et l’asile lui fut accordé le long de la frontière irano-irakienne. Le 9 juin, 1986 le MEK émit un communiqué, accusant l’Iran d’exercer un chantage sur la France.

Le régime de Khomeini, confronté aux pires crises internes, a une fois de plus recours à ses méthodes habituelles, y compris les prises d’otages, le chantage politique, dans une tentative de faire pression sur d’autres pays et restreindre la résistance iranienne239. Saddam Hussein autorisa le MEK à opérer en toute autonomie. « Nous avons une liberté de mouvement total en Irak ». disait Hossein Madani, un porte-parole du MEK en 1988240. Saddam Hussein, selon le MEK, avait garanti la liberté idéologique du groupe sur le sol irakien. Comme l’explique le NewYork Times « le groupe avait cherché à maintenir une relation correcte et formelle avec les irakiens, qui leur laissèrent l’usage d’au moins deux bâtiments élevés à Bagdad pour

232 233 234 235 236 237 238 239 240

France and Iran Meet to Improve Ties,” The New York Times, 24 mai, 1986.

“Mujahedeen Leader Apparently to Leave France,” Associated Press, 7 juin, 1986. Id. “Exiled Guerrilla Leader, Wanted by Iran, Arrives in Iraq,” Associated Press, 7 juin, 1986. “Mujahedeen Leader Apparently to Leave France,” Associated Press, 7 juin, 1986. “Exiled Guerrilla Leader, Wanted by Iran, Arrives in Iraq,” Associated Press, 7 juin, 1986. “Claim Rajavi’s Move to Iraq Part of New Phase in War Against Iran,” Associated Press, 8 juin, 1986. “Opponents of Khomeini Said to Leave France For Iran-Iraq Border,” The New York Times, 10 juin, 1986. “Exiled Iranians Press a Political Cause From Iraq,” The New York Times, 7 février, 1988.

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leur hôpital, musée et bureaux 241». Deux ans plus tard, en 1984, le MEK avait signé un traité de paix avec l’Irak. « Les deux partis avaient conclu un accord sur la non-interférence dans leurs relations mutuelles » expliquait le porte-parole du MEK242. Par la suite, le MEK avait rencontré Saddam Hussein, selon le New York Times.243 Les dirigeants du MEK maintiennent qu’ils n’ont jamais reçu de financement de la part de Saddam et que leur soutien financier provenait d’iraniens qui adhéraient à leur cause244. « Ce mouvement de résistance est totalement financé par des iraniens » insiste le MEK245. Le 9 juin 1986, à peu près deux semaines après que le MEK ait quitté Paris, deux otages français – Philippe Rochot, un correspondant permanent, et Georges Hansen, un caméraman – furent libérés. Ils avaient été kidnappés le 8 mars 1986, dans Beirut Ouest246. Au début novembre 1986, le gouvernement français annonça « qu’un accord avait été trouvé avec Téhéran pour effectuer des paiements initiaux de $330 millions pour le règlement d’un conflit au sujet d’un prêt247 ». Une semaine plus tard l’accord était conclu, et deux autres otages français, tous deux hommes d’affaires, étaient libérés – Marcel Coudari et Camille Sontag, âgé de 84 ans.

Près d’un an plus tard, en novembre, les kidnappeurs relâchèrent deux autres otages français, Jean-Louis Normandin, un preneur de sons pour un chaine de télévision, et Roger Auque, un journaliste249. Avant leur libération, la France avait annoncé qu’elle ferait un paiement de $330 millions pour un « prêt de $1 milliards » relatif à la construction d’une centrale nucléaire de reconditionnement qui ne fut jamais construite250. Onze jours plus tard, les otages étaient libérés, le 7 décembre 1987, les autorités en France « procédèrent à une vague d’arrestations d’iraniens anti-Khomeini » en vue de possibles expulsions251. Bien que le ministre de l’intérieur Robert Pandraud ait prétendu qu’il n’y avait eu « aucun marchandage », le jour suivant les iraniens furent expulsés vers l’ancienne colonie africaine, le Gabon en Afrique occidentale252. L’UIP rapporte que ces expulsions « paraissaient avoir lieu dans le cadre de pourparlers diplomatiques menés par le premier ministre Jacques Chirac pour normaliser les relations avec l’Iran dans l’espoir que le régime musulman fondamentaliste de Téhéran ferait pression sur les kidnappeurs pro-iraniens pour la libération des otages 253».

241 242 243 244 245 246 247 249 250 251 252 253

Id. Remarks Followed by Press Questions; Speaker: Alireza Jafarzadeh,” Federal News Service., 4 avril, 1991. “Exiled Iranians Press a Political Cause From Iraq,” The New York Times, 7 février 1988. Interview avec des membres du CNRI, août 2005. “Remarks Followed by Press Questions; Speaker: Alireza Jafarzadeh,” Federal News Service, 4 avril, 1991. Freed Frenchmen Arrive in Paris, Syria Pledges to Help Free Other Captives,” Associated Press, 21 juin, 1986. West Europeans Adopt Sanctions Against Syria; 2 French Hostages Reportedly Released,” The Washington Post, 11 novembre, 1986. Two French Hostages Released in Lebanon, “ United Press International, 27 novembre, 1987. “French Expels 17 anti-Tehran Activists to its Former Colony,” United Press International, 8 décembre, 1987. “Dozens of Iranians Arrested; Mujahedeen Call It a Deal with Iran,” Associated Press, 7 décembre, 1987. Id. “French Expels 17 Anti-Tehran Activists to Its Former Colony,” United Press International, 8 décembre, 1987.

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Rajavi rappela que les personnes arrêtées étaient des résidents légaux en France qui bénéficiaient du statut de réfugiés politiques. « Je suis effaré de voir ces victimes de violations des droits de l’homme devenir les victimes de marchés secrets » declarera-t-il254. Quatre organisations de défense des droits de l’homme protestèrent également contre ces arrestations255. Le ministre de l’intérieur français déclarera pour sa part que les activités du MEK « constituaient une menace grave et immédiate pour l’ordre public » et que « les mesures d’expulsions à l’encontre de ces citoyens avaient été immédiatement mises à effet, pour des raisons urgentes de sécurité nationales256 ».

E. L’armée de Libération Nationale

Le 19 juin 1987, une année après s’être relocalisé en Irak, le MEK annonça la formation de l’Armée de Libération Nationale (ALN). Sur la façon dont Saddam percevait cette formation de l’ALN, Mohammed Mohaddessin, le directeur politique du MEK disait : « Naturellement lorsque nous combattons Khomeini les irakiens sont heureux. Cela consume l’énergie de Khomeini257 ».

« Les premières recrues qui répondirent à l’appel aux armes étaient… de jeunes idéalistes parmi les dizaines de milliers d’étudiants iraniens qui vivaient à l’étranger » rapportait un correspondant du Los Angeles Times en décembre 1987258. « On comptait également dans l’Armée de Libération Nationale des déserteurs de l’armée iranienne. Le fait que tant de recrues soient des universitaires firent de l’ALN l’une des armées les plus cultivées au monde259 ».

Le correspondent du Los Angeles Times ajoutait : ces soldats cultivés en exil ont non seulement sacrifié leurs études et carrières mais toute perspective financière immédiate car l’ALN ne paie pas de salaire260. Les bases du MEK sont situées « dans les zones du centre et du nord d’une ligne de front de 1120 km261. Les bases militaires typiques comprennent une armurerie, des salles de réfectoire, des baraquements, et d’autres installations262. Le MEK avait également « un hôpital pleinement équipé 263». En décembre 1987, l’effectif total de l’ALN était estimé à environ de 10 000 à 15 000 hommes264.

254 255 256 257 258 259 260 261 262 263 264

Id. Id. Id. “Iranian Rebels Based in Baghdad Unhappy with Iraq’s War Strategy,” The Washington Post, 1er juin, 1988. “Inside a Moujahedeen Camp: The Face of Iran-to-be?” Los Angeles Times, 20 décembre, 1987. Id. Id. “Iranian Rebels Based in Baghdad Unhappy with Iraq’s War Strategy,” The Washington Post, 1er juin, 1988. “Underground Iranian Army Fights Khomeini Regime,” Associated Press, 3 février, 1988. “Exiled Iranians Press a Political Cause From Iraq,” The New York Times, 7 février, 1988. “Inside a Moujahedeen Camp: The Face of Iran-to-be?” Los Angeles Times, 20 décembre, 1987.

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Environ un tiers des membres de l’armée étaient des femmes265. Une nouvelle recrue racontait qu’il avait reçu un entrainement de base de six mois dans le maniement des armes « avant de participer à l’action militaire 266». Les soldats étaient vêtus « d’uniformes bouffants verts » et portaient des armes « fabriquées en Union Soviétique ou en occident267 ». L’ALN menait des missions de reconnaissance permanentes pour rassembler des renseignements sur les positions iraniennes. Lorsqu’ils se trouvaient confrontés à des soldats iraniens, tous les efforts étaient faits pour minimiser les pertes : des officiers qui avaient participé à la dernière et plus importante bataille dans la région du Piranshahr, où 310 hommes furent faits prisonniers, expliquaient que grâce à des methodes de renseignements très performantes ils étaient capables de surprendre l’ennemi en entourant ses positions, habituellement la nuit. L’ALN utilisait ensuite sa force de feu supérieur pour créer une sorte de barrage enveloppant. Les garnisons sous le choc étaient alors bombardés de messages de haut-parleurs annonçant que les attaquants n’étaient pas des irakiens mais des iraniens ; ils appelaient à leur reddition avant de se lancer dans une réelle attaque. Peut-être est-ce à cause de telles tactiques, ou alors du moral en berne des iraniens, mais l’ALN affirme que le soldat iranien pas un combattant endurci et dévoué, mais plutôt prêts à courir ou à céder. Un Pasdaran – ou Gardien de la Révolution – enrôlé de force n’aura pas l’engagement d’un volontaire cultivé268. L’ALN commencèrent avec des attaques éclair sur des petites positions, progressivement augmentant pour devenir des assauts de brigades. En février 1988, l’ALN déclara avoir capturé « des milliers d’armes, de petits à gros calibres, y compris des chars269 ». Le Colonel Khorramroudi, un officier de l’armée iranienne, fut cité par un journal de Téhéran comme ayant déclaré, « que contrairement aux soldats irakiens », les soldats de l’ALN…qu’ils sont durs au combat et déterminer à en découdre avec l’ennemi 270».

Début 1988, l’Iran et l’Irak décidèrent l’un et l’autre de viser de leurs missiles les grandes villes. Le MEK déplora cette action et déclara « nous ne sommes absolument satisfaits d’entendre que les irakiens lancent des missiles sur l’Iran ». Le MEK trouvait cette stratégie « inhumaine ». De même que le MEK s’opposait aux armes chimiques qu’il qualifiait « d’encore plus inhumaines 271». Le MEK dissociait sa stratégie de celle de l’Irak : « notre guerre n’est offensive que dans le but de renverser Khomeini tandis que celle des irakiens ne combattent que dans la défensive, pour se protéger272 ».

265 266 267 268 269 270 271 272

“Underground Iranian Army Fights Khomeini Regime,” Associated Press, 3 février, 1988. “Iranian Dissidents Waging War Against Khomeini,” Associated Press, 6 décembre, 1987. “Underground Iranian Army Fights Khomeini Regime,” Associated Press, 3 février, 1988. Inside a Moujahedeen Camp: The Face of Iran-to-be?” Los Angeles Times, 20 décembre, 1987. Underground Iranian Army Fights Khomeini Regime,” Associated Press, 3 février, 1988. “The Ayatollah and Rajavi’s Gangs,” The Economist, 21 novembre, 1987. “Iranian Rebels Based in Baghdad Unhappy with Iraq’s War Strategy,” The Washington Post, 1er juin, 1988. Id.

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En juin 1988, l’ALN connut un succès important avec la capture d’une ville de Mehran à la frontière centrale.273 En juillet, les forces du ALN, flanquées de chars, traversèrent l’ouest de l’Iran et s’emparèrent de deux villes, Islamabad –e Gharb et Karand274. Le ALN se dirigea alors vers Bakhtaran, la capital provinciale de Kermanshah275. Tandis que l’ALN avançait d’environ 160 kilomères à l’intérieur des terres iraniennes, Téhéran, dans une « décision surprise » annonça le 18 juillet, son accord de la Résolution 598 du Conseil de Sécurité des Nations-Unies et un échange de prisonniers276. A près de 80 kilomètres de Bakhataran, les offensives de l’ALN stagnèrent et ses soldats furent contraints de battre en retraite277.

Le 1er août, 1988, les mollahs de Khomeini annoncèrent qu’ils avaient publiquement pendu des membres du MEK qui avaient collaboré à l’invasion278. Saddam Hussein, fit pression sur ses voisins du Golf Persique, annonçant officiellement le consentement de l’Irak à l’accord de cessez-le-feu des Nations-Unies279. D’autres négociations s’ensuivront et le Secrétaire Général Javier Perez de Cuellar annonça que l’Iran et l’Irak avaient accepté un cessez-le-feu qui devait prendre effet le 20 août, 1988. Après la trêve, l’ALN précipita les opérations. L’Iran, toutefois, se lança dans une « vague d’exécutions » de prisonniers politiques. La plupart des victimes étaient des sympathisants du MEK, selon Amnesty International280. Sur une période de six mois, plus de 1000 prisonniers politiques seront exécutés281. S’étant emparés d’une quantité importante d’armements militaires d’Iran, l’ALN commença à se passer de la taille d’une force d’infanterie à celle d’une petite armée équipée de chars, artillerie, batteries anti-aérienne, et lanceurs de missiles mobiles.282 Par exemple, en une seule opération en juin 1988, le MEK put s’emparer de 64 chars, 10 APCs, des centaines de fusils de manœuvres, et des armements antiaériens283. Les hostilités sporadiques continuaient entre l’Iran et le MEK. Le 30 avril 1990, le frère de Massoud Rajavi, Kazem Rajavi, fut assassiné « dans une explosion de coups de feu » près de son domicile dans la banlieue de Genève, en Suisse. Kazem était le principal lobbyiste du MEK auprès du Conseil d’Europe et d’autres organisations internationales.

F. La Rencontre du Département d’État avec le MEK/CNRI

273 274 275 276 277 278 279 280 281 282 283

“Iranian Rebels Control Town Near Iraq,” The Washington Post, 21 juin, 1988. “International,” United Press International, 26 juillet, 1988 Id. International,” United Press International, 26 juillet, 1988. “Iran Claims Victory in Gulf Offensive,” Courier-Mail, 30 juiillet , 1988. “International,” United Press International, 1 aout 1988. “Iraq Shifts, Agrees to Truce Followed by Direct Talks; Pressure from Arabs let to Compromise,” The Washington Post, 7 août, 1988. “Iranian Resistance Says Hundreds Left US to Fight Khomeini,” Associated Press, 2, juin 1989. “Rights Group Reports 1,000 Iran Executions,” The New York Times, 30 janvier, 1989. Ashraf Camp Journal,” The New York Times, 5 Juin, 1991. “Remarks Followed by Press Questions; Speaker: Alireza Jafarzadeh,” Federal News Service, 4 avril, 1991.

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En novembre 1986, après que l’Irangate fut révélée au grand jour, le Département d’État, adressa une proposition formelle de dialogue au CNRI284. Un responsable du Gouvernement d’État lors d’une rencontre avec le CNRI déclara que les déclarations du 14 juin 1986 de Richard Murphy sur le MEK avaient été retirées et que le MEK représentait « la seule force sérieuse pouvant jouer un rôle décisif dans les futurs développements de l’Iran 285».

Ces rencontres entre le Département d’Etat et le CNRI furent confirmés en 1987 par Murphy :

« Nous nous rencontrons, nous nous sommes rencontrés » avec les Moudjahidin » a déclaré Murphy au Congrès le mois dernier [novembre 1987]. « Nous ne les boycottons pas ». C’est un aspect nécessaire de notre travail que de les écouter ainsi que les visions des autres groupes (d’opposition) également » dit-il286. Murphy décrivit le MEK /CNRI comme « des acteurs » d’une importance croissante dans le long combat vers la liberté en Iran287.

Par ailleurs, des sources émanant de Capitol Hill, auraient avancé que le gouvernement américain fournirait au groupe confidentiellement des subsides d’au moins $100 000 par mois et peut-être autant que $300 000 par mois pour acheter des armes et alimenter la machine propagandiste288. Les États-Unis comme le moudjahidin ont nié l’existence de cette aide289. Un porte-parole du CNRI avoua que le groupe avait volé près de $20 million du gouvernement iranien en 1986 dans ce qu’il appelle « une opération complexe ».

Les Commentaires

La déclaration du responsable du Département d’État, Robert Murphy, a été retirée. Ce geste prouve pleinement que la dénonciation de Murphy sur le MEK était motivée par des enjeux politiques, tels que la libération des otages américains.

284 285 286 287 288 289

Interview avec des membres du CNRI, août 2005. “Legacy of a Misguided Policy,” National Council of Resistance of Iran Foreign Affairs Committee, 1988, p. 68. Mujahedeen Get Some U.S. Backing; Rebels Wage Campaign Of War, Words Against Iran,” Los Angeles Times, 30 novembre, 1987. Mullahs of Iran Vie For Power,” Los Angeles Times, 21 juin, 1987. Mujahedeen Get Some U.S. Backing; Rebels Wage Campaign of War, Words Against Iran,” Los Angeles Times, 30 novembre, 1987. Id.

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XIII. Les accusations de suppression des kurdes

Les allégations du Département d’État

« En 1991, le MEK a aidé le gouvernement irakien à réprimer les soulèvements Shia et kurdes dans le sud de l’Irak et le soulèvement des kurdes dans le nord290 ».

Le contexte

La source de ces allégations semble se trouver dans un rapport de la presse sur les soulèvements kurdes en 1991 que Human Right Watch a publié en juin 1992, ainsi qu’un rapport publié par le Département d’Etat en 1994. En ce qui concerne le rapport de presse du 26 mars 1991 The Gardian citait Jalal Talabani, qui dirige l’Union Patriotique du Kurdistan (PUK), concernant le soulèvement qui commença début mars. Talabani disait que Saddam Hussein rassemblait des troupes qui devaient écraser le soulèvement « y compris des dissidents iraniens qui bénéficiaient de l’asile politique en Irak291 ». Talabani avançait « que plus de 5000 mercenaires des [iraniens] Moudjahidin sont préparés et équipés de chars pour mener des attaques terrestres 292». Le jour suivant, le PUK « faxait » une déclaration à l’Associated Press accusant « des dissidents iraniens basés en Irak d’avoir attaqué les forces kurdes le lundi matin près de la frontière iranienne au nord-est de Bagdad 293». Le PUK « affirmait qu’ils avaient mené des représailles envers les Moudjahidin, et avaient tué plusieurs soldats ».294 En réponse à ces allégations, le MEK envoya sa réponse à l’Associated Press, dans laquelle il affirmait que les affirmations du PUK étaient un « mensonge flagrant295 ». Les dirigeants en exil du parti chi’ite d’Irak – le Parti Muslim alDawa - affirmait par ailleurs que les «forces des Moudjahidin combattaient aux côtés de l’armée irakienne dans une tentative d’écraser la rébellion 296».

En juin 1992, Human Right Watch publia un rapport sur le soulèvement kurde et où l’on pouvait lire :

Des témoins ont également affirmé que certains combattants appartenaient à l’opposition iranienne, soit l’organisation Mojahedin-i-Khalq (les Moudjahidin du Peuple d’Iran) et que d’autres étaient des mercenaires jordaniens, soudanais,

290 291 292 293 294 295 296

“Country Reports on Terrorism,” US State Department, 27 avril, 2005. “UN Allies Urged to Save Iraqi Rebels,” The Guardian, 26 mars, 1991. Id. “Kurdish Leader Returns to Iraq, Vows Flight to Free Nation,” Associated Press, 27 mars, 1991. Id. “Kurdish Leader Returns to Iraq, Vows Flight to Free Nation,” Associated Press, 27 mars, 1991. “Iranian Forces, Exiled Opposition Said to be in Bloody Clash,” Associated Press, 1er avril, 1991.

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palestiniens et des yéménites et que tous collaboraient à la répression du soulèvement. Ils assuraient avoir reconnu les nationalités des combattants à leur apparence et à leur accent. Si les témoignages recueillis étaient convaincants et semblaient corroborer l’allégation d’une collaboration du Mojahedin-i-Khalq et des mercenaries avec les soldats irakiens dans la répression du soulèvement, il n’est cependant pas possible d’évaluer l’importance du rôle qu’ont joué ces différents groupes297.

Dans ce rapport, des notes de bas de page indiquaient :

Les témoignages des réfugiés kurdes en Iran sur les atrocités des Mojahedin-i-Khalq peuvent être suspects à la vue d’évidents encouragements reçus de la part des hôtes iraniens pour qu’ils formulent ces dénonciations. Quoiqu’il en soit, même en ne tenant pas compte de ces pressions subies, il existe des preuves significatives montrant que le groupe de rebelles soutenus par Bagdad avait joué un rôle dans la répression de la révolte. Après ce soulèvement, les Moudjahidin exposèrent leurs chars et autres artilleries lourdes aux journalistes venus visiter la base des Moudjahidines à quelques 100 kilomètres de la frontière iranienne, près du Kurdistan 298».

Cette note de bas de page citait l’article du New York Times que signait Alan Cowell et paru le 5 juin 1991, pour prouver que le MEK exhibait volontiers son artillerie299.

En octobre 1994, le Wall Street Journal répétait des allégations d’articles précédents sur le MEK.

La seule offensive majeure à laquelle le groupe aurait participé au cours des six dernières années a eu lieu en 1991, juste après la guerre du golf, lorsque Saddam Hussein donna l’ordre à M. Rajavi d’aider à écraser la révolte kurde au nord de l’Irak, selon les dires des participants à cette opération.

Enfin, en 1994, le Département d’État produisit un rapport sur le MEK, basé en partie sur les rapports officiels. Le rapport répétait les allégations de la presse :

Les kurdes d’Irak affirmaient que les Moudjahidin avaient aidé l’armée irakienne dans la répression des kurdes, « une affirmation étayée par des réfugiés qui avaient fui la frontière iranienne ». Le dirigeant l’Union Patriotique du Kurdistan d’Irak, Jalal Talabani, dirent aux journalistes que 5000 Moudjahidin iraniens s’étaient joints aux forces de Saddam dans la bataille de Kirkuk ». Le Wall Street Journal rapporte que, selon les membres qui prirent part à l’offensive, la seule opération majeure menée l’ALN au cours des six dernières années fut celle de 1991, juste après

297 298 299

“Endless Torment: The 1991 Uprising in Iraq and its Aftermath,” Human Rights Watch, Juil 1982. Voir Id., voir aussi note 12. “Ashraf Camp Journal: Facing Iran, an Army with Resolve and Day Care,” The New York Times, 5 juin, 1991.

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la Guerre du Golf, lorsque Saddam Hussein donna l’ordre à M. Rajavi de l’aider à réprimer la révolte dans le Nord de l’Irak.»

Les Commentaires

Les sources et les preuves étayant les allégations d’une collaboration du MEK dans la répression des soulèvements Shia et kurdes dans l’Irak du Sud-ouest et dans ceux des kurdes du Nord, sont, dans les faits, erronés et se fondent sur des sources peu fiables ou motivées par une politique choisie. La rébellion kurde commença en mars 1991 dans la ville de Rania, au Nord-ouest de Suleimaniyya. Dix jours plus tard, les kurdes « contrôlaient chacune des villes du nord à l’exception de Kirkuk et de Mosul ». Le 20 mars, ils s’emparaient de Kirkuk300.

Selon l’Associated Press de nombreuses villes et communes étaient « écartelées entre le contrôle du gouvernement et celui des insurgés 301». Pour réprimer le soulèvement, les chars irakiens « pénétrèrent Dahuk et Irbil le 30 mars, Zakho le 1er avril, et Suleimaniyya, le dernier bastion important détenu par les rebelles, au cours des deux jours qui suivirent 302». Puis, le 1er avril, l’Associated Press citait les propos des dirigeants exilés du parti Chi’ite Musulmane al-Dawa d’Irak, accusant les forces des Moudjahidin d’avoir combattu aux côtés de l’armée irakienne dans une tentative d’écraser la rébellion303».

Durant cette période chaotique en Irak, le MEK fut la cible de deux attaques majeures par la Garde Révolutionnaire Iranienne, selon les dires du groupe qui y prirent part. Les forces iraniennes espéraient profiter de la confusion en Irak et porter un coup fort au MEK. « Le projet était de supprimer l’ALN et ses bases » expliqua le MEK dans une conférence de presse de Washington D.C. 304» La première attaque portée par les Gardes de la Révolution Iranienne eut lieu le 21 et 25 mars lorsque les forces iraniennes traversèrent la frontière et entrèrent en Irak. Le MEK s’est engagé dans un combat contre les Gardes de la Révolution « sur toute la région couvrant Kefri, Jalulah, Kelar et autour le Khaniqin305 ». La seconde offensive « commença après qu’ils [les Gardes de la Révolution] aient pénétré le territoire irakien dans le Qasr-Shirin » le 31 mars306.

Les gardes lancèrent une attaque le matin suivant à 1 :30 du matin sur trois axes majeurs et un axe mineur. Le MEK contreattaqua, et la Garde Révolutionnaire, après avoir subi des pertes lourdes battit en retraite. L’Associated Press publia un article 300 301 302 303 304 305 306

“Endless Torment: The 1991 Uprising in Iraq and its Aftermath,” Human Rights Watch, juin 1982. “Iranian Forces, Exiled Opposition Said to be in Bloody Clash,” Associated Press, 1er avril, 1991. “Endless Torment: The 1991 Uprising in Iraq and its Aftermath,” Human Rights Watch, juin 1982. “Iranian Forces, Exiled Opposition Said to be in Bloody Clash,” Associated Press, 1 er avril, 1991. “Opposition Trains on Plains of Iraq to Topple Iranian Rulers,” Associated Press, 8 mai, 1991. “Remarks Followed by Press Questions; Speaker: Alireza Jafarzadeh,” Federal News Service, 4 avril, 1991. Id.

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sur la seconde attaque du 1er avril, 1991. Il y était indiqué que le MEK avait repoussé une attaque sur une base au nord de la ville irakienne de Jalola.307 Pour faire valoir ses victoires et pour attirer l’attention sur les attaques infligées à l’Irak par la Garde Révolutionnaire, le MEK tint une conférence de presse au National Press Club à Washington, DC le 4 avril, 1991. Le MEK expliqua qu’il ne s’était impliqué dans le conflit du Golf que lorsqu’il s’était trouvé lui-même attaqué. « Que pouvionsnous faire d’autre pour nous défendre ? », interrogeait un officier308. Le MEK affirma qu’il était resté neutre durant tout le conflit and avait délibérément gardé un profil bas. Après l’attaque de Saddam Hussein sur le Koweït, le MEK « interrompirent leurs diffusion sur la radio et la télévision et cessèrent de publier309 ». Pour minimiser les conflits, le MEK avait évacué toutes leurs bases se trouvant dans les zones kurdes du nord et dans les régions septentrionales de l’Irak 310». En début mars, il envoya plusieurs messages via le Parti Démocratique de l’Iran – Les Directions Révolutionnaire, aux dirigeants des kurdes irakiens, affirmant son intention de ne pas engager de combat contre les kurdes irakiens à moins d’être attaqué luimême, et que son objectif unique était le renversement du gouvernement iranien.311 Les allégations de Talebani contre le MEK doivent être sujettes à caution sachant que le PUK s’était aligné avec l’Iran durant la guerre Iran-Irak et qu’il était un adversaire du MEK. Comme nous l’expliquons dans l’article de l’Associated Press :

D’un côté l’Iran se tient derrière les guérillas kurdes dans leur combat contre Bagdad, et de l’autre l’Irak, soutenant les kurdes iraniens dans leur combat contre la République Islamique de l’Ayatollah Ruhollah Khomeini312.

L’année précédente, « un communiqué non-programmée fut diffusé sur une radio de Téhéran : on y affirmait qu’une attaque perpétrée par le PUK à Kirkuk, avait endommagé une centrale électrique et une raffinerie pétrolière, et avait détruit les quartiers généraux du MEK313.

D’après le MEK, « des membres armés de ce groupe [PUK] avaient pris en embuscade quatre membres du Moudjahidin sur la route reliant Kirkuk à Suleimaniya, et les avait tués dans une rafale de balles 314».

Le MEK affirma qu’il y avait eu « d’autres attaques au cours des années qui suivirent » et que le PUK y « avait tué et blessé plusieurs membres des Moudjahidin et de l’Armée de Libération Nationale ». En dépit de leur capacité à réagir militairement, les Moudjahidin affirmaient qu’ils « n’avaient jamais riposté ».315 Il n’existe aucune preuve appuyant les propos du PUK

307 308 309 310 311 312 313 314 315

Iranian Forces, Exiled Opposition Said to be in Bloody Clash,” Associated Press, 1er avril, 1991. “After the War; Kurds Fall Back From Iraq Forces,” The New York Times, 2 avril, 1991. Democracy Betrayed, The National Council of Resistance of Iran, 1993. Id. at 129. Id. at 130. “Iranians Say Their Forces, Allied with Kurds, Kill 1,500 Iraqi Troops,” Associated Press, 18 avril 1987. “Iran Launches New Offensive in Northern Iraq,” BBC Summary of World Broadcasts, 13 octobre, 1986. Democracy Betrayed, The National Council of Resistance of Iran, 1993, p. 128. Id.

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disant que le MEK se préparait à mener une offensive contre les kurdes. A l’époque de leur soulèvement, le MEK était pleinement engagé dans son combat contre les Gardes de la Révolution Iranienne qui avaient traversé l’Irak.

Il fut rapporté le 26 mars que le PUK avait « tué plusieurs soldats [du MEK] ». Ce rapport, selon le MEK se rapporte peutêtre à un incident qui eut lieu pendant que l’ALN combattait les Gardes de la Révolution Iranienne. Ce qui suit est une description par le MEK du déroulement des faits :

Un bataillon de 19 combattants, à bord de quatre véhicules blindés perdirent le contact de leur radio avec leur centre de commandement. Le groupe qui se trouvait en terrain inconnu s’était égaré, et par erreur s’avançaient sur plusieurs kilomètres dans la ville de Kelar, où ils furent capturés par des membres du groupe de Talabani et du Hezbollah kurde (un mandataire du régime iranien). Bien que les Moudjahidin et l’ALN reconnaissent immédiatement leur erreur et émirent sur le champ des communiqués à cet effet, le groupe de Talabani et d’autres kurdes proches du régime, exécutèrent 17 d’entre eux316. L’accusation portée par le parti Dawa le 1er avril, selon laquelle le MEK « combattrait aux côtés de l’armée irakienne » est également fausse. Al-Dawa (l’Appel) est une organisation chi’ite fondamentaliste radicale, similaire au Hezbollah libanais, et qui est directement financée par l’Iran317. Al-Dawa apparaît être l’instrument de la propagande iranienne et toutes ses déclarations doivent être accueillies avec le plus grand scepticisme. Une large part des actualités concernant la rébellion des kurdes est fournie par l’Agence de Presse de la République Islamique d’Iran, précise l’Associated Press318. Par exemple, l’ Agence de Presse de la République Islamique d’Iran « citait un porte-parole non-identifié de l’Union Patriotique du Kurdistan (PUK) ayant affirmé que le gouvernement irakien avait menacé de tuer 5 000 otages kurdes, dont une majorité de femmes et d’enfants, qui auraient été raflés et emmenés à Kirkuk319 ».

Pendant la guerre du Golf, l’Agence de Presse de la Réplique Islamique d’Iran avait propagé de nombreux mensonges dans une campagne de propagande sur le MEK. •

On y trouvait l’allégation qu’une « femme Moudjahidin conduisait un char sur les corps de blessés et de morts ».



Les forces des Moudjahidin ont activement collaboré avec le parti baasiste d’Irak dans la répression des soulèvement du

peuple irakien et avaient commis de nombreux crimes. C’est pour ces raisons que les habitants de Suleimaniya ont exéctué six femmes Moudjahidin.

316

Id. at 130.

317

Threats and Responses: Muslims; Shiites in Southern Iraq Loom as a Serious Threat to Hussein,” The New York Times, 14 janvier, 2003. Voir également: “Iraqis and Iranians Hurl Sharp Insults,” The New York Times, 26 juin, 1980.

318 319

“Saddam’s Troops Said to Retake Holy Cities, Use Napalm,” Associated Press, 12 mars, 1991. Id.

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A kifri, Kelar … les Moudjahidin ont fait face au combat à des personnes ordinaires. Les forces du peuple en ont tué beaucoup et en ont arrêté plusieurs, y compris des femmes320 ».

Le ministère des renseignements iraniens a activement mené une campagne de désinformation sur le MEK. En 1995, Karen Parker, une avocate du Sous-comité sur la Promotion et la Protection des Droits de l’Homme, a témoigné à propos de Jamshid Tafrishi-Enginee, qui avait passé 18 mois avec l’ALN. Selon Parker, Tafrishi-Enginee était « un agent du régime iranien avec pour mission de rassembler des renseignements sur les exilés iraniens à la recherche de moyens pour les discréditer ainsi que tous les opposants au régime et pour mener une campagne d’information falsifiées contre eux321 ». Elle ajoutait :

M.Tafrishi a récemment adressé une lettre dans lequel il révèle que le ministère des renseignements iranien l’avait engagé (apparemment contre une rémunération de $72 000 en plus des frais de voyage et autres dépenses) spécialement pour qu’il organise une campagne de fausses informations sur l’ALN, en portant des accusations mensongères selon lesquelles l’ALN pratiquait des actes de violations de droits de l’homme, d’intimidation et de racket auprès de la communauté iranienne exilée. Plusieurs organisations de défense des droits de l’homme ont été dupées par ces faux témoignages et campagnes de dénonciations orchestrées par le gouvernement. Il est regrettable de constater que certaines de ces organisations pourraient avoir prêté crédit à ces informations mensongères322.

Les informations fournies à Human Right Watch pourraient émaner de efforts orchestrés par l'Iran pour discréditer le MEK. Tout au moins, l’information devrait être appréhendée avec le plus grand scepticisme. Le rapport affirmait clairement « qu’il était impossible d’évaluer l’importance du rôle de chacun dans ce soulèvement. Le rapport reconnaissait en outre que les allégations d’atrocités commises étaient devenues « suspectes du fait qu’elles avaient été fortement encouragées par les hôtes iraniens ». Après avoir admis que ses informations étaient de sources douteuses, Human Right Watch a fourni de fausses informations sur des actions menées par le MEK à l’encontre de la Garde Révolutionnaire de l’Iran et prêté une interprétation erronée à un article du New York Times.

Comme preuves que le MEK aurait collaboré à la féroce répression du soulèvement, Human Right Watch parlait d’un « étalage » de ses chars et autres artilleries lourdes par le MEK aux journalistes en juin 1992. Si le MEK avait en effet invité les média à venir visiter leur base en juin, cette action n’avait aucun lien avec le soulèvement des kurdes. Il s’agissait plutôt d’une tentative de faire valoir ses prouesses militaires et ses victoires contre les Gardes de la Révolution Iranienne. L’article du New York Times parlait de Saddieghah Hosseini, une mathématicienne et mère d’une petite fille de sept ans qui s’était battue contre les Gardes de la Révolution Iranienne. 320

Democracy Betrayed, The National Council of Resistance of Iran, 1993, p. 131.

321

Question of the Violation of Human Rights and Fundamental Freedoms in Any Part of the World,” Testimony of Karen Parker, International Educational Development, Inc.le 23 janvier, 2001; UN Commission on Human Rights, 13 février, 2001.

322

Id.

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La campagne offrait à Mme Hosseini pour ses premiers pas de combattants la conduite d’un T-55 [char de combat russe]. « J’essayais de tout maitriser et d’accomplir mes responsabilités de mon mieux », dit-elle. Son mitrailleur, ajoutait-elle, frappait directement « l’ennemi » qui riposta en lançant une grenade à rocket venue percuter mon char sans le pénétrer. Tous les membres de l’équipe dans son char étaient des femmes, bien que l’essentiel de l’équipage des chars de l’armée sembla être constitué d’hommes.

L’article du NewYork Times ne fait pas mention du soulèvement des kurdes et Human Right Watch a manifestement mal interprété l’invitation des média par le MEK à venir visiter sa base en Irak. Le fait que le MEK possède des chars et autres armes lourdes n’est en rien une preuve qu’ils « aient joué un rôle quelconque dans la répression de cette révolte ».

Enfin, le 4 juillet 1999, le Parti Démocratique Kurde (KDP) affirmera que le MEK n’était pas impliqué dans la répression du peuple kurde, ni durant le soulèvement ni au cours retombées de ce soulèvement. Le Directeur des Affaires Étrangères du KDP, Hoshyar Majmood Mohammad Zebari établissait les faits suivants dans un affidavit :

Le KDP, en tant que grand parti politique kurde, a mené et a participé au soulèvement kurde du printemps 1991 au kurdistan irakien. Le soulèvement a entrainé l’effondrement des structures militaires, sécuritaires et administratives régionales du gouvernement irakien. Le pétrole de Kirkuk a été libéré par le peuple et les forces kurdes (peshmerga). Lorsque les troupes irakiennes ont contre-attaqué et regagné le contrôle de Kirkuk et d’autres grandes villes, des rumeurs ont circulé selon lesquelles l’unité des Moudjadihin auraient prêté assistance aux troupes irakiennes. Mais étant donné la confusion de la situation il a été difficile d’établir la vérité. Cependant, lorsque les dirigeants du Kurdistan se sont engagés dans des négociations avec le gouvernement irakien entre avril et septembre 1991, et que la situation s’est stabilisée, ces rumeurs se sont avérées fausses.

Le KDP peut confirmer que les Moudjahidin n’étaient pas impliqués dans la répression des kurdes, ni durant le soulèvement ni au cours de ses retombées. Nous n’avons trouvé aucune preuve suggérant que les Moudjahidiin aient fait montre d’hostilité envers le peuple kurde irakien. Le Mujahedin-e Khalq possède sa propre feuille de route politique pour l’Iran et ses membres ne souhaitent par intervenir dans les affaires internes irakiennes.323

Le Département d’État ne fournit aucune preuve venant étayer les allégations que le MEK aurait réprimé le soulèvement kurde. Ces deux sources manquent de crédibilité. Le rapport du Département d’État de 1994 cite le PUK et inclut une citation tirée d’un article du Wall Street Journal qui réaffirme tout simplement les allégations précédentes du PUK. Aucune source significative d’information n’est fournie. On y trouve toutefois de nombreuses sources d’informations fiables qui viennent contredire les allégations du Département d’État.

323

Iraq’s Major Political Groupings, Middle East Reference, Glen Rangwala, University of Cambridge, UK, http://middleeastreference.org.uk/iraqiopposition.html

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XIV. Les allégations d’attaques sur des ambassades iraniennes

L’allégation du Département d’État

« En avril 1992, le MEK mena des attaques quasi simultanées sur des ambassades et les installations iraniennes de 13 pays, démontrant la capacité du groupe à monter des opérations à grande échelle à l’étranger ».324

Le contexte

Le dimanche 5 avril 1992 13 jets Phantom F4 et F5 iraniens qui survolèrent la frontière irakienne et en « cinq vagues » de tirs de rockets et de grappes de bombes lâchées sur la base de l’ALN à Asrhaf, tuèrent un combattant MEK et en blessa une douzaine d’autres325. Des douzaines de grappes de bombes qui n’avaient pas explosé étaient disséminées autour du centre de logistique… et les feux tirés des canons avaient creusé deux lignes de petits cratères sur la route 326». L’Irak abattit l’un des ces jets Phantom et captura les deux membres de l’équipage. Ce fut le premier raid aérien mené par l’Iran sur le territoire irakien depuis le cessez-le-feu conclu à la fin de la guerre Iran-Irak en 1988327. Massoud Rajavi envoya un télégramme à Boutros Boutros-Ghali, à l’époque secrétaire-général aux Nations-Unies, demandant au Conseil de Sécurité des NationsUnies de condamner cette attaque et d’imposer un embargo sur le pétrole et les armes iraniens.328 « Téhéran de son côté affirma que l’attaque aérienne venait en représailles à un raid par les guérillas du Mujahedeen Khalq ou des Guerriers Saints du Peuple sur deux villages à l’ouest de l’Iran le samedi précédent. L’Iran accusait également les Moudjahidin…d’attentats contre des diplomates iraniens à Bagdad, » rapportait l’Associated Press329. Le bombardement iranien par des jets Phantoms eurent lieu huit jours avant les élections parlementaires iraniennes. Dans les semaines qui précédaient les élections, le MEK avait redoublé d’efforts dans sa « guerre de propagande » contre le Président Ali Akbar Hashemi Rafsanjani330.

« Des diplomates en poste dans la région du Golf rapportèrent que le raid iranien était un avertissement aux rebelles qu’ils ne pouvaient plus opérer en toute impunité en Irak 331». Ce que réfuta Alizera Jafarazadeh, un porte-parole du MEK affirmant que « la vraie raison de [cette] attaque c’est la terrible crise politique que connaît actuellement le régime de Téhéran à 324

Country Reports on Terrorism,” US State Department, 27 avril, 2005.

325

Les avions iraniens font un raid sur la base des rebelles en Irak ; Bagdad parle d’un mort,” Associated Press, 5 avril, 1992. CNN rapporta qu’il y avait une douzaine de jet combattants, F-4s and F-5s qui attaquèrent la base. Voir “Reprisals Against Iran After Jet Attack in Iraq,” CNN, 5 avril 1992.

326 327 328 329 330 331

“Iranian Planes Attack Rebel Base in Iraq,” Seattle Post-Intelligencer, 6 avril, 1992. “Iranian Planes Raid Rebel Base in Iraq; Baghdad Claims 1 Shot Down,” Associated Press, 5 avril, 1992. Id. Id. Iraqis Down Iranian Plane Near Baghdad,” The Independent (London), 6 avril, 1992. “Iran Bombs Rebel Camps in Iraq,” The Times (London), 6 avril, 1992.

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l’intérieur du pays face aux élections parlementaires332 ». Une déclaration faite par le MEK à Cologne en Allemagne, indiquait que ses sympathisants avaient organisé une manifestation à Bonn pour protester contre les attaques aériennes sur la base d’Ashraf en Irak.333 Les sympathisants Moudjahidin manifestèrent également devant et/ou attaquèrent des ambassades iraniennes dans d’autres capitales à travers le monde, y compris en Australie, Grande-Bretagne, Canada, Danemark, France, Pays-Bas, Norvège, Suède, Suisse et États-Unis.

Ce qui suit sont les détails sur ces manifestations tels qu’ils ont été relayés par les média : •

Bern : Les manifestants ont saccagé l’ambassade de l’Iran. La police a arrêté 24 personnes334.



Bonn : des douzaines de manifestants « ont fait irruption dans l’ambassade d’Iran, se battant avec le personnel et saccageant les pièces sur les cinq étages 335». « La foule en furie a jeté par la fenêtre des papiers et du mobilier au cours de ce sac 336». Plusieurs manifestants et policiers ont été blessés.



Canberra : Environ 40 manifestants armés de marteaux, de battes de baseball, de bâtons et de barres de fer sont entrés dans l’ambassade le 6 avril et ont blessé trois membres du personnel diplomatique. Le troisième secrétaire d’ambassade, Ali Borghie-Nejad, a eu le nez fracturé et des blessures à la tête 337». Les manifestants ont fracassé les vitres des fenêtres, démoli le mobilier et l’équipement de bureau, et ont mis le feu à des documents ». Des véhicules stationnés dans les prémices du bâtiment ont été endommagées. Sur les murs les manifestants ont inscrit à la bombe des graffitis et des bouteilles de teinture rouge et des œufs ont été lancées contre les murs de l’ambassade338. Les assaillants sont partis avec 217 passeports vierges et $65 000 en devises américaines »339 Un des manifestants a été condamné à 18 mois de prison ferme, trois autres à 12 mois et les six autres écopèrent de peines de sursis340. Le gouvernement australien dut payer $329 000 de dommages et intérêts pour ces attaques341.



Copenhague : Environ 50 personnes ont manifesté devant l’ambassade iranienne ; des fenêtres ont été brisées et 11 personnes arrêtées342.



Hambourg : Environ 30 personnes « armées de pierres et de bombe à pétrole ont tenté d’attaquer le consulat iranien 343». Près de 20 personnes ont été arrêtées344.

332 333 334 335 336 337 338 339 340 341

“Foreign General News,” The Canadian Press, 5 avril, 1992. Id. “Iran Rebels Hit Missions in 10 Nations,” The New York Times, 6 avril, 1992. “Iraqis Down Iranian Plane Near Baghdad,” The Independent (London), 6 avril, 1992. “Iran Rebels Hit Missions in 10 Nations,” The New York Times, 6 avril, 1992. “Four Jailed Over Attack on Iranian Embassy,” United Press International, 18 février, 1994. “Embassy Attack Fury,” Courier-Mail, 7 avril, 1992. Early Warning But No System,” Sunday Herald Sun, 12 avril, 1992. “Four Jailed Over Attack on Iranian Embassy,” United Press International, 18 février, 1994. “Iran Compensated for Attack on Embassy,” Associated Press, 28 octobre, 1992

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La Haye : La police a arrêté 35 manifestants après qu’ils aient défoncé l’enceinte des bâtiments de l’ambassade avec un minibus et aient saccagé l’intérieur des bâtiments.345



Londres : Cinquante personnes se sont réunies devant l’ambassade de l’Iran à Londres, scandant « Rafsandjani terroriste !346 » Ils ont fracassés sept fenêtres avec des briques et ont causé d’autres dégâts mineurs347. Le groupe s’autoproclamait sympathisants iraniens des Moudjahidin en Grande-Bretagne348. Plus tard dans la journée, « une bombe à pétrole fut lancée contre le bâtiment de l’Iran Air à Piccadilly au centre de Londres, causant des dégâts sans gravité sur le bâtiment349 ».



Munich : Le rez-de-chaussée du consulat iranien a été « détruit dans un incendie volontaire 350».



New York : Cinq manifestants « armés de couteaux » ont assiégé la délégation iranienne auprès des Nations-Unies durant deux heures, retenant trois employés en otage. « Deux des otages ont réussi à s’échapper lorsque la police a fait irruption par une porte arrière ». et le troisième à été relâché lorsque les manifestants se sont rendus calmement351. Du mobilier, des télévisions et des ordinateurs ont été fracassés et les murs de la délégation aspergés de peintures… »352 Les cinq hommes étaient des membres de l’Organisation des Moudjahidin du Peuple basée à Bagdad353.



Oslo : Plus de 20 manifestants ont forcé l’entrée de l’ambassade et ont saccagé le bâtiment. Un employé a été blessé354.



Ottawa : Des manifestants armés de massues, maillets et de clubs ont fracassé l’entrée du bâtiment de trois étages de l’ambassade, trouvant ainsi accès à l’intérieur du bâtiment, où ils ont brisé le mobilier et les fenêtres, et ont pillé les placards à dossiers ; l’ambassadeur iranien a été matraqué avec le pied d’une chaise cassée355. Trois employés ont été « légèrement blessés ». Les manifestants sont partis en emportant « sous les bras de nombreux dossiers ». Ils ont badigeonné les murs de slogans à la peinture et ont tenté de mettre le feu au bâtiment356. Deux employés ont été blessés par des bris de verre alors qu’ils tentaient de maitriser les manifestants. Trente-une personnes ont été arrêtées357. En mars

343 344 345 346 347 348 349 350 351 352 353 354 355 356 357

“Iraqis Down Iranian Plane Near Baghdad,” The Independent (London), 6 avril, 1992. Iran Rebels Hit Missions in 10 Nations,” The New York Times, 6 avril, 1992. “Tehran Hits Rebel Base in Iraq in Most Serious Attack Since ‘98,” The Houston Chronicle, 6 avril, 1992 “Protesters Seize Iranian Mission in New York,” United Press International, 5 avril, 1992. “Iran Bombs Rebel Camps in Iraq,” The Times (London), 6 avril, 1992. “Demonstrators Smash Embassy Windows,” Press Association, 5 avril, 1992. “Protesters Seize Iranian Mission in New York,” United Press International, 5 avril, 1992. “Iran Demands Compensation for Embassy Attacks and Extradition of Perpetrators,” BBC Summary of World Broadcasts, 7 avril, 1992. “Iran Rebels Hit Missions in 10 Nations,” The New York Times, 6 avril, 1992 “Protestors Occupy UN Mission in New York for Two Hours,” Associated Press, 5 avril, 1992. “Protesters Seize Iranian Mission in New York,” United Press International, 5 avril, 1992. “Iranian Embassies in Sweden, Norway Attacked,” Xinhua, 5 avril, 1992. “Man Guilty of Assaulting Iranian Ambassador,” The Ottawa Citizen, 2 juillet, 1994. “Violence Escalates Between Iran and Iraq Again,” CBS News Transcripts, 6 avril, 1992. “Mob Ransacks Iranian Embassy,” The Ottawa Citizen 6 avril 1992.

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161

1993, Robab Farahi- Mahdavieh, « le cerveau du groupe de manifestants » fut déportée vers le Grande-Bretagne. Son avocat expliqua qu’il s’agissait « d’une grossière exagération que d’appeler cette femme une terroriste. Tout ce qu’elle a fait c’est de concevoir le plan d’action d’une manifestation qui a échappé à tout contrôle358 ». Quatre-vingt dix manifestants « ont plaidé coupable des diverses charges d’effraction et de possession de biens volés359 ». Ils ont écopé de peines de sursis. Deux autres ont été acquittés. Un manifestant a été condamné à une peine de six mois ferme et un second à une peine d’un an.360 •

Paris : Une vingtaine de personnes a participé à une « manifestation non-autorisée » et ont été retenus en garde à vue. Cinq manifestants ont escaladé une barrière, cassé une vitre et s’est emparé d’une caméra de surveillance.361 Le 25 avril, 1992, un tribunal de Paris a distribué des peines de six ans avec sursis aux manifestants et offert $ 16 650 (12 385 euro) de dommages et intérêts à l’ambassade.362



Stockholm : Plus de cinquante sympathisants ont mis le feu à deux bâtiments et à six véhicules. Quatre employés ont été blessés.363 Vingt-un manifestants ont été arrêtés par la police.364 Un étudiant iranien en génie électrique au Canada prit la défense des protestations, en demandant si « l’on considère que les 140 000 personnes que [le régime iranien] a emprisonné, et les 90 000 exécutions ne valent rien ?365 Des quartiers généraux du MEK en Allemagne on déclara que les manifestations voulaient exprimer leur condamnation « de l’agression et les graves atteintes aux droits de l’homme par Téhéran ».366

Un des manifestants arrêté lors de l’attaque contre l’ambassade iranienne à Ottawa, Nezamalddin Afraz, n’était pas un membre du MEK. Depuis qu’il avait quitté l’Iran il avait activement été impliqué dans la sensibilisation au sujet des violations des droits de l’homme dans son pays natal. La veille de l’attaque contre l’ambassade, Afraz déclare qu’il a pris un bus de Toronto pour se rendre à Ottawa. Il affirme qu’il n’avait aucune idée qu’il participerait à cet effort coordonné d’attaques contre les ambassades iraniennes à travers le monde367. Sous le régime oppressif de Khomeini, Afraz avait été fait cinq ans et demi de prison. Durant son incarcération, se souvient-il, un co-détenu demanda une couverture à un gardien. Il fut aspergé d’essence et brûlé vif. Dans le milieu des années ’80, Afraz a vu de ses propres yeux un codétenu être décapité. « Devant tous les autres, ils lui ont coupé la tête ». En prison, les vendredi étaient appelés « les vendredi des larmes » parce

358 359 360 361 362 363 364 365 366 367

“Woman Ordered Deported; Not a Terrorist, Lawyer Says,” The Vancouver Sun, 8 avril, 1993. “Iranians to Recount Khomeini Horrors at Sentencing,” The Ottawa Citizen, 29 mai, 1994. “Agency “Erred” in Embassy Siege,” The Vancouver Sun, 10 septembre 1994. “Tehran Hits Rebel Base in Iraq in Most Serious Attack Since ‘98.” The Houston Chronicle, 6 avril, 1992. “Iranian Paper Slams French Court Over the Trial of Anti-Tehran Activities,” Agence France Presse, 25 avril, 1992. “Iranian Embassies in Sweden, Norway Attacked,” Xinhua, 5 avril, 1992. “Iran Rebels Hit Missions in 10 Nations,” The New York Times, 6 avril, 1992. Refusing to Leave Their Conflicts Behind,” The Ottawa Citizen, 7 avril, 1992. “Dissidents Storm Iranian Missions Worldwide to Protest Air Raid,” Associated Press, 5 avril, 1992. “Man Regrets Assault on Iranian Ambassador, Trial Told,” The Ottawa Citizen, 23 juin, 1994.

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que les gardiens sélectionnaient des prisonniers au hasard pour une exécution immédiate. Après sa libération, Afraz monta un commerce prospère en tant que mécanicien automobile. Mais, en 1987, il fut à nouveau incarcéré et battu. A sa seconde libération, il s’enfuit au Canada368. Lorsqu’il s’entendit dire qu’il était considéré comme terroriste par le gouvernement iranien, Afraz répondit : « Khomenei a exécuté un prêtre chrétien âgé de 70 ans qu’il avait désigné terroriste. Il assassinait des femmes de 80 ans qu’il qualifiait de terroristes. Il violait des filles de 13 ans et disait qu’elles étaient terroristes. Vous n’avez qu’a écouter Salman Rushdie pour comprendre qui est le terroriste ».369 L’avocat d’Afraz, Norman Boxall, dit qu’il n’y avait aucune preuve derrière l’affirmation très répandue que les manifestants qui ont participé aux attaques à Ottawa étaient des membres du groupe dissident Mujahedin Khalq, que l’on dit responsable d’attaques coordonnées contre les ambassades iraniennes à travers le monde.370 Afraz fut poursuivi pour avoir agressé l’ambassadeur d’Iran et condamné à un an de prison371.

Les Commentaires

L’attaque perpétrée sur le camp du MEK par 13 jets Phantom iraniens était sans précédent et avait provoqué de vives réactions de la part des iraniens expatriés à travers le monde. Les tensions déjà étaient déjà élevées à cause des élections parlementaires, programmées pour le lundi 13 avril.

Il n’existe aucune preuve que le MEK ait demandé à ses sympathisants de faire usage de la violence dans des manifestations contre le régime iranien. Par ailleurs, il est évident que tous les manifestants n’étaient pas affiliés au MEK. Les manifestants à Ottawa n’étaient d’ailleurs pas des membres du MEK, selon le juge Pierre Mercier, qui jugea le cas de deux manifestants. Il n’y avait pas de preuves non plus que les 21 accusés appartenaient au groupe dissident Mujahedeen Khalq ou, comme le déclare la justice canadienne, à un groupe de terroristes. Les manifestants avaient des raisons d’être en colère étant donné les atrocités qu’ils avaient endurées sous le régime de l’Ayatollah Ruhollah Khomeini372.

Nezamalddin Afraz, qui avait été emprisonné par le régime de Khomeini, n’était pas membre du MEK mais partageait son objectif de renverser le régime iranien répressif. Les manifestations devant les ambassades iraniennes dans le monde entier avaient été planifiées avant l’attaque contre le camp d’Ashraf. Le samedi soir, le jour avant l’attaque, Afraz avait déjà quitté son appartement à Toronto et était dans le bus pour Ottawa. Pour contrer ces manifestations et envoyer un message sévère au MEK, il est fort probable que l’Iran ait alors organisé l’attaque contre le camp d’Ashraf. Téhéran affirmera que le bombardement était en représailles contre des raids que le MEK conduits sur des villages de l’ouest de l’Iran. Cette justification paraît être une fabrication. Aucune information n’a pu être identifiée pour soutenir cette affirmation. Cette 368 369 370 371 372

“Man Charged in Assault on Iranian Ambassador Suffering from Post-Traumatic Stress, Court Told,” The Ottawa Citizen, 22 juin, 1994. “Man Regrets Assault on Iranian Ambassador, Trial Told,” The Ottawa Citizen, 23 juin, 1994. “Leniency Sought for Iranian Protesters,” The Ottawa Citizen, 29 juin, 1994. Judge Criticizes CSIS, Crown Over Siege Trial; Only Two of 21 Iranian Embassy Protestors Jailed,” The Ottawa Citizen, 10 septembre, 1994. “Mujahedeen Organization is Falsely Accused of Attacks,” The Ottawa Citizen, 2 février, 2000.

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attaque mit le feu aux poudres. Le régime iranien évoque de l’amertume et de la haine. Pour de nombreux sympathisants du MEK leur opposition est d’ordre personnel. Parmi leurs amis et proches nombreux ont été incarcérés, torturés, et exécutés par le gouvernement. Dans le cas d’Afraz, il a subi des centaines d’heures de torture infligée par les gardiens de prison – une police employée par le gouvernement iranien pour maintenir l’ordre public. La nouvelle du gouvernement iranien ayant envoyé des jets Phantom pour attaquer la base du MEK en Irak, a immédiatement provoqué de violentes réactions qui se sont multipliées à travers le monde. A Ottawa et dans d’autres villes, des manifestations ont basculé dans la violence qui voulaient certainenement venger des injustices non exprimées et les attaques des Phantoms. « Ce crime, [le bombardement d’Ashraf] était inacceptable pour moi » dira Afraz. « Comment un gouvernement peut-il faire une chose pareille ? » Afraz, avec d’autres attaquèrent l’ambassade iranienne et Afraz attaqua l’ambassadeur. Lorsque la colère est redescendue, Afraz se rendit compte qu’il avait eu tort d’avoir agi ainsi. « Si j’avais pu réfléchir avant d’agir, je ne l’aurais probablement pas fait. » dira-til plus tard.

Les manifestants dans de nombreux pays ayant enfreint les lois, ils furent condamnés à des peines de prison. D’autres reçurent des peines de sursis. Depuis 1992, le MEK et d’autres organisations opposées au régime iranien ont participé à de nombreuses manifestations qui se sont déroulées pacifiquement. L’Iran a tout de même poursuivi ses attaques aux jets Phantom contre le MEK. Le 25 mai 1993, des avions de chasse F4 lâchèrent 34 bombes lors de raids près du village de Jalula et d’autres bombes sur le camp d’Ashraf, selon l’Armée Nationale de Libération. Les nouvelles de la presse mentionnaient deux bâtiments gravement endommagés.373

373

“Iranian Strike on Rebel Bases Leaves Craters, Damaged Buildings,” Agence France Presse, 25 mai, 1993.

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XV. Des allégations sur l’intention de cibler des responsables militaires iraniens

L’Allégation du Département d’État

« En avril 1999, le MEK cibla des responsables militaires et assassinat du chef-adjoint du Comité des chefs d’États-majors inter-armés »374

Le Contexte

Le 10 avril, 1999, le Lt. Gen. Ali Sayyad Shirazi, chef-adjoint du Comité des chefs d’États-majors inter-armés » en Iran fut abattu alors qu’il se rendait sur son lieu de travail, par des tueurs déguisés en balayeurs de rue. Sherazi fut touché de trois balles à la tête et au cou.

Un porte-parole du MEK, au téléphone avec Reuters à Dubaï, affirma que ses unités avaient commis cet attentat. « Sayyad Shirazi a été tué tandis qu’il était escorté d’un groupe de Gardiens de la Révolution lourdement armés et qui faisaient office de gardes du corps ».375 Shirazi, un vétéran commandant de l’armée durant la guerre Iran-Irak, avait « personnellement mené plusieurs des principales offensives iraniennes376 ». Surnommé l’Homme de Fer, Shairazi avait été décoré de la médaille du Fateh (le Conquérant) en 1989, ce qui représente le plus grand honneur dans les forces armées.377Le MEK affirma que Shairazi était également connu sous le nom de Boucher du Kurdistan et était responsable de purges et d’exécutions du personnel militaire durant la guerre Iran-Irak379.L’Agence France Presse dit avoir reçu un communiqué de la part du MEK dans ses bureaux à Nicosia, où le groupe revendiquait l’attentat380. Le commandement des quartiers généraux du MEK en Iran rapporta que plusieurs unités opérationnelles du MEK avaient « puni le Général Ali Sayad Shairazi » selon des rapports de presse issus par l’Agence FrancePresse.381

374 375 376 377 379 380 381

Country Reports on Terrorism,” US State Department, 27 avril, 2005. “Top Iranian General Slain by Gunmen,” San Jose Mercury News, 11 avril, 1999. “Top Iranian General Assassinated in Tehran,” Agence France Presse, 10 avril, 1999. Id. “Iranian Army Commander Assassinated,” Associated Press, 10 avril, 1999. “Top Iranian General Assassinated in Tehran,” Agence France Presse, 10 avril, 1999. Id.

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Discussion

Les Commentaires

En dépit d’une signature de cessez-le-feu entre l’Iran et l’Irak en août 1988, mettant fin à une guerre de huit ans, le MEK et l’Iran ont poursuivi leurs hostilités. Le MEK confirma publiquement sa responsabilité dans l’attentat contre Sayyad Shairazi. Selon la vision du MEK, Shairazi était une cible militaire légitime, comme nombre de ses autres attaques dirigées contre le gouvernement iranien. Ce qui suit sont la recollection de tous les évènements qui précédèrent l’attentat contre Shairazi. •

Le 5 janvier 1999 : Deux hommes sur une motocyclette commirent un attentat contre Hojatolislam Ali Razini, président du Tribunal de Téhéran, alors qu’il conduisait sa voiture. Des explosifs avaient été fixés sur voiture, et ils explosèrent le blessant à la jambe, à la poitrine et à l’abdomen. Un passant âgé de 30 ans fut tué dans l’explosion. Le MEK faxa un communiqué à l’Associated Press au Caire, qui félicitait « le peuple iranien de l’opération héroique ayant fait justice à Ali Razini, un des plus impitoyables juges du régime clérical ». Le MEK ne revendiqua pas la responsabilité de cet attentat.382



Le 31 janvier 1999: Des mortiers ont « pilonné » les quartiers généraux du Ministère de Téhéran, qui est responsable de la sécurité, causant de « lourds dégâts ».383 Il n’y aurait eu aucune victime. Le MEK, dans un communiqué à l’Associated Press, au Caire, affirmera que l’attaque était en représailles d’une vague d’assassinats politiques en Iran.384



Le 7 février, 1999 : Le gouvernement iranien arrêta 27 personnes au motif d’accusations « d’espionnage et trahison », dont dix membres du MEK, selon le ministère des Renseignements385



Le 9 mars 1999 : Une foule estimée de 5000 manifestants ont protesté contre la visite du Président Mohammad Khatami à Rome386



Le 11 mars 1999 : Des hommes armés de mitraillettes et de rockets RPG 7 (des grenades rockets) ont tiré sur un convoi du MEK près d’Amara dans le sud de l’Irak. Un des assaillants a été tué par un retour de balle, selon le MEK, qui déclarera dans un communiqué que les assaillants étaient des agents du régime clérical iranien.387

382 383 384 385 386 387

Iranian Judge in Intensive Care After Assassination Attempt,” Associated Press, 6 janvier , 1999. “Dissidents Claim a Mortar Raid in Teheran,” The New York Times, 1er février, 1999. Id. 27 Arrested in Iran Intelligence Crackdown,” Agence France Presse, 7 février, 1999. “Iranian President Greeted by Protests on Landmark European Trip,” Agence France Presse, 9 mars, 1999. “Iranian Opposition Says Its Convoy Attacked in Iraq,” Associated Press, 11 mars, 1999.

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Après la mort de Shiraizi, le MEK continua à attaquer des figures clé du gouvernement iranien et le gouvernement iranien poursuivit à son tour les attaques contre le MEK/ALN en Irak et les autorités du MEK à l’étranger. •

Le 5 juin, 1999 : Deux bombes explosèrent près des quartiers généraux du MEK, sans causer de dégâts selon le MEK388



Le 9 juin 1999 : Une bombe télécommandée tua quatre membres du MEK et une femme non identifiée, qui se trouvait dans un bus non loin de Bagdad. Vingt-trois autres femmes furent blessées. Un porte-parole du MEK attribua cet attentat au gouvernement iranien.389



Le 11 juin, 1999 : L’Iran lança un missile Scud de longue portée contre le camp d’entrainement du MEK à Ashraf.390



Le 2 novembre 1999 : Une attaque de missile contre un camp du MEK en Irak tua cinq personnes et en blessa 78 autres. Un porte-parole du MEK attribua l’attentat à l’Iran.391



Le 26 novembre 1999 : les agents du MEK dirent avoir lancé des tirs de mortiers vers le ministère des Renseignements iranien. Selon le MEK « de nombreux agents ont été tués ou blessés ».



Le 11 décembre 1999 : le MEK lança un tir de mortier de 82mm vers le siège du 23ème commandement de la Division des Forces spéciales, un centre de surveillance électronique du Commandement septentrional infligeant de lourdes pertes et de graves dégâts ». Le MEK émit un communiqué envoyé à l’Agence France Press à Nicosia affirmant sa responsabilité pour cet attentat393



Le 6 décembre, 1999 : Un soldat iranien fut tué dans une confrontation avec les forces du MEK le long de la frontière Irano-irakienne dans au sud de la province Khuzestan. Un fax envoyé par le MEK à l’Agence France Press au Caire affirme que ses combattants ont attaqué des baraquements de Gardes de la Révolution iranienne. Il y était affirmé en outre que deux combattants du MEK et de nombreux autres troupes iraniennes avaient été tués dans l’incident.394

388 389 390 391 393 394

“Car Bomb Kills Four Iranian Opposition Fighters in Iraq,” Agence France Presse, June 9, 1999. Id. “Iraq Accuses Iran of Firing Three Missiles,” The Seattle Times, 11 juin, 1999. “International Affairs; Middle East,” Facts on File, World News Digest, 31 décembre 1999. “Report: Rebels Killed After Planting Bomb in Iran,” Associated Press, 26 novembre, 1999. “Iranian Soldier Dies in Clashes with Opposition,” Associated Press, 27 décembre, 1999.

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XVI. Des allégations sur des attaques dirigées contre le siège du NASR

Les allégations du Département d’Etat

« En avril 2000, le MEK tenta d’assassiner le commandant du siège du NSAR, comité inter institutionnel de Téhéran responsable de la coordination des politiques sur l’Irak395 ».

Le Contexte

La description par le Département d’Etat de l’attaque perpétrée par le MEK contre le commandant du NASR, le Brigadier Général Reza Seifollahi (qui s’écrit également Seyfollahi, , Seifollahi,Seifullahi, and Sayfullahi) est incorrecte. Le MEK a cependant bien tenté de tuer Seifollahi en août 2000 et une nouvelle fois en mai 2001. Seifollahi est un des cerveaux de l’assaut de l’ambassade des États-Unis en 1979 et en 2000 il était ministre des renseignements, dirigeant un groupe qui « exporte le terrorisme » selon le MEK.396

En avril 1991, il fut élevé au rang de lieutenant général et placé à la tête de la division des Renseignements et de la Sécurité du ministère de l’Intérieur397. En 2002, Seifollahi coordonnait la politique iranienne en Irak398. A présent, le NASR possède également des centres opérationnels à Basra, Nassiriyah, Nataf, Khanaqin, al-Kut et al-Amarh. Seifollahi est aujourd'hui supervise des efforts secrets visant à chasser les forces américaines hors d’Irak399. Dans la première attaque du dimanche 27 août, 2000 le MEK tendit une embuscade à Seifollah tandis que son convoi passait sur une intersection du nord-ouest de Téhéran. Dans un communiqué à l’Agence France Press, le MEK fournissait les détails de l’incident. Sept des gardes du corps ont sauté et ont commencé à tirer au hasard pour aider Seifollahi et son député à s’échapper. Un des Moudjahidin fonça sur les Gardes Révolutionnaires et dégoupilla sa grenade à main.400

Le MEK affirma que Seifollahi et son député, ainsi que six gardes du corps étaient blessés.401Par la suite, le MEK et ses forces gouvernementales se confrontèrent dans « des attaques éclair » à Téhéran, dans lequel au moins 15 gardes ou agents avaient été tués ou blessés, selon leMEK.402 Quelques jours après les attaques, les services de presse iraniens citaient les 395 396 397 398 399 400 401 402

“Country Reports on Terrorism,” US State Department, 27 avril, 2005. “Protesters Break Windows in Latest Unrest in Western Iranian City,” Agence France Presse, 29 août, 2000. Crisis in the Gulf; Iran Shakes up Internal Security,” The Independent, 2 avril, 1991. Iran Invites Iraqi Opposition Leaders to Seminar on Iraq ‘Invasion’ – Report,” Al-Sharq al-Awsat, 26 janvier, 2002 ; BBC Monitoring Middle East, 28 janvier, 2002. “Iran’s Path; Stopping the Mullahs in their Tracks,” National Review, mai 14, 2003. http://www.nationalreview.com/ledeen/ledeen051403.asp “Protesters Break Windows in Latest Unrest in Western Iranian City,” Agence France Presse, 29 août, 2000. Id.

Id.

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propos de Seifollahi : « Je suis absolument sain et sauf. Il y a eu à mon encontre un projet d’assassinat qui a toutefois été déjoué avant qu’ils ne puissent m’atteindre403. Plus tard, le 28 mai 2001, le MEK annonçait dans un communiqué à l’Agence France Press qu’il frapperait à nouveau, ajoutant que ses unités de commandements à l’intérieur de l’Iran avaient attaqué le siège militaire du NASR et les bureaux de son commandant, le Brigadier Général Reza Seifollahi.404 Les Commentaires Le MEK revendiqua officiellement l’attentat contre le Brigadier Général Reza Seifollahi. Le groupe considérait que Seifollahi, en tant que dirigeant du service des Renseignements, était une cible militaire légitime. En plus de l’incident d’avril 2000, le MEK mena de nombreuses offensives y compris : Le 9 janvier, 2000 : le MEK affirme qu’il a lancé des tirs de mortiers 82mm vers le siège des renseignements et des forces armées régionales à Ilam. Dans un communiqué à l’Agence France Press à Dubaï, le MEK affirme qu’ une douzaine forces de sécurité iranienne sont mortes dans l’attaque et que le bâtiment central et les infrastructures du centre du commandement ont été endommagés.405 L’Iran démentit affirmant que trois civils avaient été tués et cinq blessés. Le MEK, dans un communiqué à l’Agence France Press affirma à son tour que les victimes étaient des membres vétérans de la milice islamique Bassiji et que les blessés étaient d’autres « agents »406 Bassiji. Le 12 janvier 2000 : La police iranienne tua trois combattants MEK le long de la frontière avec l’Irak, selon un rapport de la télévision nationale iranienne. Le MEK, dans un communiqué, confirma la mort de trois de ses combattants407. Un porteparole du MEK rapportera à l’Agence France Press que le groupe avait monté 23 offensives en 40 jours, expliquant que ces heurts étaient liés à la capacité croissante du groupe et aux élections parlementaires du 18 février en Iran. Le 16 janvier, 2000 : Le MEK annonça que l’Iran avait lancé une rocket 107mm sur un de ses camps près de la ville du sud de la ville Al-Kut. L’attaque n’a fait aucune victime.409 Le 25 janvier, 2000 : Le MEK annonça qu’il avait mené une attaque contre deux bases iraniennes de la 16ème division blindée dans les régions de Sarnay et Saleh-Abed et lancé une autre attaque contre la 23ème division des Forces Spéciales à Dehloran410.

403 404 405 406 407 409 410

“Iran Dismisses Opposition Mujahedeen as “Child’s Play,” Agence France Presse, 31 août, 2000. “Iranian Opposition Claims New Attack in Tehran,” Agence France Presse, 28 mai, 2001. “Three Dead, 4 Injured in Clashes with Iranian Opposition,” Associated Press, 9 janvier, 2000. “Three Killed in Iran Opposition Attack: Television,” Agence France Presse, 9 janvier, 2000. “Report: Iranian Police Kill Three Opposition Fighters, “ Associated Press, 12 janvier, 2000. Iranian Opposition Accuses Tehran of Rocket Attack in Iraq,” Agence France Presse, 17 janvier, 2000.

“Iran Opposition Claims New Attacks in Western Iran,” Agence France Presse, 25 janvier, 2000.

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XVII. Allégations sur des attaques menées contre l’Iran

Les allégations du Département d’État

« Le rythme normal des opérations anti-iraniennes augmenta durant «l’Opération Great Bahman » en février 2000, lorsque le groupe lança une douzaine d’attaques contre l’Iran. Une de ces attaques était une attaque au mortier contre le groupe de bâtiments gouvernementaux à Téhéran qui abritaient les bureaux du Dirigeant Suprême et du Président411 ».

Les Commentaires

Une série d’attaques furent organisées par le MEK au début de l’année 2000 en vue d’influencer les élections du 18 février 2000. Le MEK revendiqua officiellement l’attaque du complexe gouvernemental, jugeant qu’il avait visé une cible militaire légitime. D’autres attaques par le MEK incluent :

Le 5 février, 2000 : Le MEK tira « plusieurs obus de mortier » vers le palais du Président Mohammad Khatami, qui se trouve tout près des bureaux du Dirigeant Suprême l’Ayatollah Ali Khamenei, du parlement, de la justice et du corps suprême d’arbitrage. Selon l’Associated Press, un des mortiers aurait frappé une maison d’édition située à l’opposé du bâtiment de la Justice. Téhéran affirma qu’une personne a été tuée et que quatre ont été blessées412. Le MEK toutefois rectifia : « tous les tirs de mortiers ont frappé les bâtiments visés » et il n’y a eu aucune victime civile413. Le MEK envoya un communiqué à l’Associated Press au Caire revendiquant l’attentat414 et indiquant que les mortiers avaient touché les bureaux et résidence de Khamenei. L’attentat était perpétré dans le cadre d’une opération appelée Le Soulèvement de Téhéran en mémoire des personnes tuées par les Gardes de la Révolution415. L’attentat était important car il intervenait dans une zone hautement protégée, démontrant la capacité du MEK à s’attaquer à n’importe quelle cible. Le MEK dit que « unités opérationnelles » avaient réussi à pénétrer cette zone « avec l’aide de personnes et plusieurs membres du personnel 416».

Le 6 février 2000 : Le MEK affirme avoir mené 12 attaques contre les forces iraniennes qui étaient en manœuvre dans la province de Kermanshah et d’Ilam. Le MEK émit un communiqué à l’Agence France Presse à Nicosia qui fournissait tous les détails de l’offensive, et dont le nom de code était Operation Great Bahman. Le MEK disait avoir utilisé des mortiers

411 412 413 414 415 416

“Country Reports on Terrorism,” US State Department, 27 avril, 2005. “Blasts Heard Near Parliament,” Associated Press Online, 5 février, 2000. “Iranian Opposition Denies Civilians Hurt in Blasts,” Agence France Presse, 6 février, 2000. Blasts Heard Near Parliament,” Associated Press Online, 5 février, 2000 “Explosions Near Iranian President’s Office Kill One, Wound Five: TV,” Agence France Presse, 5 février, 2000. “Iranian Opposition Denies Civilians Hurt in Blasts,” Agence France Presse, 6 février, 2000.

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120mm et 82mm, ainsi que des missiles 107mm pour attaquer les forces iraniennes dans la région de Qasr-e Shirin. Le MEK expliqua qu’il avait également pris en embuscade des agents de renseignements et des patrouilles militaires sur la route de Sumar-Natsfshahr417.

Le 7 février 2000 : Le MEK annonce avoir déjoué un plan d’attaque contre le groupe par le gouvernement iranien. Une patrouille de l’ALN a découvert six rockets visant le camp militaire du groupe418.

Le 12 février, 2000 : Au cours de deux opérations, le MEK a attaqué des cibles militaires dans le sud-ouest de l’Iran, selon un communiqué envoyé par le groupe à l’Agence France Presse419. Le MEK dit avoir lancé des mortiers 82mm sur le siège du 782ème bataillon de la 23ème division aéroportée. Il affirme avoir également pris en embuscade « plusieurs patrouilles militaires ».420

Le 23 février, 2000 : l’Agence France Presse a rapporté que le MEK avait tué deux soldats iraniens qui patrouillaient le long de la frontière irakienne.421

417 418 419 420 421

“Iranian Opposition Claims Series of Attacks in South and West Iran, “ Agence France Presse, 6 février, 2000. Iran and Guerrillas Clash,” United Press International, 7 février, 2000. “Armed Opposition Claims Fresh Attacks in Iranian Border Province,” Agence France Presse, 12 février, 2000. Id. Id.

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XVIII. Des allégations d’attaques de mortiers près de la frontière Iran-Irak

Les allégations du Département d’État

« En 2000 et 2001, le MEK fut régulièrement impliqué dans des attaques de mortier et des raids éclairs sur les unités militaires et de sécurité iranienne et des bâtiments gouvernementaux près de la frontière Irano-Irakienne, quoique les actes de terrorisme du MEK aient diminué vers la fin de 2001 ».422

Les Commentaires

En juillet 2001, le Conseil National de Résistance de l’Iran (CNRI) déclara publiquement qu’il avait « mené 261 opérations militaires en Iran au cours de l’année passée » dont 180 en 2001.423 Le MEK affirmait que les attaques visaient des cibles militaires légitimes. Ce qui suit sont les détails des attaques rapportées par les média :

2000

Le 13 mars, 2000 : le MEK déclare avoir lancé « jusque dix » obus de mortier 60mm vers le siège des forces de sécurité et le Corps des Gardes de la Révolution Islamique et son commandant, le Général Rahim Safavi.424 Les tirs ont atterri à l’intérieur du grand complexe résidentiel près d’une base militaire.425 Au moins deux personnes ont été blessées.

Le 13 mars 2000 : Le MEK a fait parvenir un communiqué à l’UPI à Londres, déclarant que les guérillas avaient pris en embuscade le Colonel Zinal Zadeh et deux officiers de la Garde Révolutionnaire dans la ville d’Aroumeh.426

Le 14 mars 2000 : Des avions de chasse iraniens ont bombardé la base d’entrainement du MEK à Ain Zaleh, à environ 130 km de Bagdad, selon le MEK.427

422 423 424 425 426 427

“Country Reports on Terrorism,” US State Department, 27 avril, 2005. “Iran’s Opposition Determined to Overthrow Tehran’s ‘Religious Dictatorship,” Agence France Presse, 29 Juillet, 2001. “Mortar Attack in Iran Wounds 4,” United Press International, 13 mars, 2000. “Mortars Hit Apartment Complex in Tehran, 2 Injured,” Associated Press International, 13 mars, 2000. “Mortar Attack in Iran Wounds 4,” United Press International, 13 mars, 2000. “Iran Rebels Say Tehran Bombed Base,” United Press International, 14 mars, 2000.

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• 28 mars 2000: Le MEK déclare avoir déjoué une attaque de mortier 60mm visant ses quartiers généraux à Bagdad. Par ailleurs, le MEK a affirmé que les forces iraniennes avaient attaqué un véhicule avec à bord des membres du MEK près de la ville de Al- Sawira.428

• 13 avril, 2000 : L’Iran affirme avoir intercepté et tué un nombre non spécifié de membres combattants du MEK près de la frontière irakienne429.

• 22 avril, 2000 : Quatre membres combattants du MEK ont été tués dans des heurts avec la police iranienne à la frontière de Hosseibieh, selon les autorités iraniennes.430

• 1er mai, 2000 : Le MEK a lancé plusieurs tirs de mortiers au siège du commandement des forces de police nationale de Téhéran, selon un porte-parole du MEK qui a contacté l’Agence France Presse. L’attaque précédait le premier tour des élections, prévu le 5 mai, 2000.431

Le porte-parole a précisé que l’attaque a été commis « en solidarité avec les étudiants qui protestent et se mettent en grève à travers tout le pays432 ».

• 13 mai, 2000 : Cinq obus de mortier ont explosé dans le district de Kermanshah, au sud-ouest de Téhéran. Le MEK a envoyé un communiqué à l’Associated Press au Caire indiquant qu’il avait visé les quartiers généraux des forces antiémeute433.

• 15 mai, 2000 : L’Iran a dit avoir arrêté deux combattants du MEK qui étaient entrés dans le pays avec l’intention de perpétrer des attentats en Iran434 Il a déclaré que des « groupes d’agents avaient été tués ou blessés dans l’attaque435.

• 30 mai, 2000 : Le MEK a annoncé avoir lancé une attaque de mortier 60mm dans les quartiers généraux gardes révolutionnaires de Téhéran. Il a affirmé qu’un certain nombre de responsables de haut rang ont été tués et blessés436.

428 429 430 431 432 433 434 435 436

“Iran Opposition Says it Foils Baghdad Mortar Attack by Iranian Regime,” Agence France Presse, 28 mars, 2000. “Iranian Rebels Killed Near Iraqi Border,” Agence France Presse, 13 avril, 2000. “Iranian Opposition Members Killed Near Iraqi Border,” Agence France Presse, 23 avril, 2000. “Six People Wounded in Tehran Mortar Attack Claimed by Armed Opposition,” Agence France Presse, 1er mai, 2000. Id “Iran Denies Involvement in Baghdad Explosions,” Associated Press, 15 mai, 2000. “Iran Says it Has Attested ‘Saboteurs’ Belonging to Armed Opposition,” Agence France Presse, 15 mai, 2000. “Iranian Opposition Claims Kermanshah Explosions,” Agence France Presse, 14 mai, 2000. “Mujahedin Claims Attack on Revolutionary Guards HQ in Tehran,” Deutsche Press-Agentur, 30 mai, 2000.

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• 11 juin, 2000 : Selon les communiqués envoyés à l’Agence France Presse, le MEK aurait déclaré avoir attaqué la division des renseignements régionaux et autres bâtiments gouvernementaux à Tabriz437.

22 juin, 2000 : Le MEK a affirmé que ses unités avaient traversé la frontière pour pénétrer en Iran et y lancer des attaques de mortier sur une période de 33 jours contre les positions militaires et de renseignement iraniennes dans les villes de Ahwaz et Tabriz.438

16 juillet 2000 : Le MEK a fait parvenir un communiqué à l’Agence France Presse annonçant qu’il avait attaqué le ministère des Renseignements avec 20 tirs de mortiers 82mm, provoquant des dégâts « importants »439.

16 juillet, 2000 : Le MEK a annoncé qu’il lancerait des attaques de mortier contre la Garde Révolutionnaire près d’Ahwaz au sud de l’Iran440.

18 juillet, 2000 : Le MEK a annoncé qu’il avait lancé une attaque de rocket Katyusha sur les quartiers généraux du commandement de la 35ème brigade de commandement à Drabalout et sur la garnison de Gilan-e Gharb.

31 juillet, 2000 : le MEK a annoncé dans un communiqué envoyé à l’Agence France Presse qu’il avait tué des douzaines de soldats de troupes iraniennes dans des heurts qui avaient duré deux jours. Il indiquait avoir tiré quelques 200 obus au cours d’un combat de 30 heures.441

18 août 2000 : Les gardes révolutionnaire ont traversé la frontière vers l’Irak et ont lancé des tirs de mortier 120 mm au Camp Habib, une structure d’entrainement du MEK située dans le sud de l’Irak. Au cours des trois dernières semaines, le MEK a affirmé avoir tué ou blessé « des douzaines » d’hommes des forces iraniennes dans une série d’attaques dans provinces frontalières de l’ouest de l’Iran422.

19 août, 2000 : Deux membres féminins du MEK ont été blessées dans une échauffourée avec des soldats iraniens sur la frontière irakienne, selon des sources iraniennes.443

437 438 439 440 441 422 443

“Mortar Bombs Go Off in Iranian City of Tabriz,” Agence France Presse, 11 juin, 2000. “Iran Says Seven Rebels, One Man Killed in Border Clashes,” Associated Press, 22 juin, 2000. “Blasts in North-East Tehran Damage Houses: Radio,” Agence France Presse, 16 juillet, 2000. Iranian Opposition Mujahedeen Claim Attacks on Garrisons in South and West,” Agence France Presse, 18 juillet, 2000 “Iran Says Two Troops, Five Rebels Dead in Border Clashes,” Agence France Presse, août, 2000. “Iranian Armed Opposition Says Tehran Forces Shell One of its Iraq Camps,” Agence France Presse, 18 août, 2000 Two Female Opposition Members Wounded While Smuggling Weapons into Iran: TV,” Agence France Presse, 19 août, 2000.

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26 août 2000 : Le MEK a annoncé avoir mené 15 attaques de grande envergure danq les provinces de Khuzestan, Kermanshah et Ilam contre des unités de l’armée iranienne, de la sécurité nationale et des renseignements. Le MEK a affirmé que des « centaines » de membres des forces gouvernementales avaient été tuées ou blessées444.

6 septembre, 2000 : l’Iran a annoncé avoir arrêté des membres du MEK après qu’ils aient traversé la frontière et pénétré en Iran dans la région de Marivan, au sud de Sanandaj445.

14 octobre 2000 : Le MEK a annoncé avoir attaqué les quartiers généraux de la division anti-émeute de la sécurité nationale. Selon le MEK, la cible aurait été « pilonné par des tirs de mortiers 82mm, infligeant des pertes et dégâts aux forces ennemies 446».

18 octobre 2000 : Le MEK a annoncé que l’Iran avait lancé des tirs de rockets sur leur camp à Jalawla, à environ 32km de la frontière iranienne447.

22 octobre, 2000 : le MEK a annoncé qu’il avait attaqué les quartiers généraux de la Garde Révolutionnaire avec des mortiers, tuant ou blessant un certains nombre de soldats. Dans un communiqué envoyé à l’Agence France Presse, le MEK a affirmé que les cibles étaient les quartiers généraux du Commandant en Chef des Gardes de la Révolution, le Général Rahim Safavi, et le Commandant Brigadier Général Mohammad- Ali aaziz Jaafari448. L’Iran affirme d’avoir subi aucune perte449.

Le 25 octobre 2000 : Le MEK dit avoir lancé des tirs de mortiers sur les quartiers généraux de Tehran. L’unité, selon le MEK était exclusivement composé de femmes450.

31 octobre 2000 : Le MEK a annoncé que l’Iran avait lancé des tirs de rockets 107mm à leur camp à Homayun, à environ 48 km de la frontière. Le MEK a indiqué que c’était la 102ème attaque sur le MEK depuis 1993.451

2 novembre 2000. Dans un communiqué envoyé à l’Agence France Presse le MEK a déclaré que ses combattants avaient tiré des tirs de mortiers sur les quartiers généraux d’une brigade de l’armée. L’Iran affirme que le MEK a lancé cinq obus de mortier à Kermanshah qui auraient atterri dans un terrain vague sans faire de victime452. 444 445 446 447 448 449 450 451

“Iranian Armed Opposition Claims Series of Attacks on Government Forces,” Agence France Presse, 26 août 2000 “Two Members of Iran’s Armed Opposition Arrested: Tehran,” Agence France Presse, 6 septembre, 2000. “Strong Blast Rocks Arms Depot in Iran,” Agence France Presse, 25 octobre, 2000. “People’s Mujahedeen Says Iranian Forces Shell Camp in Iraq,” Agence France Presse, 31octobre, 2000. “Tehran Hit by Several Violent Explosions: IRNA,” Agence France Presse, 22 octobre 2000. “Iran Opposition Launches Mortars,” Associated Press Online, 22 octobre, 2000. Strong Blast Rocks Arms Depot in Iran,” Agence France Presse, 25 octore, 2000. “People’s Mujahedeen Says Iranian Forces Shell Camp in Iraq,” Agence France Presse, 31octobre, 2000.

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15 novembre, 2000 : le MEK a connu des heurts avec les forces iraniennes dans la province du sud de Fars. L’Iran a indiqué que ses forces avaient saisi des munitions et des tubes de mortiers des MEK, qui avaient « pénétré le pays dans l’objectif de poser des bombes et mener des opérations de sabotage ». Le MEK, dans un communiqué a déclaré que le combat avait duré plusieurs heures et annonçait avoir tué 20 iraniens ; deux combattants MEK auraient été tués453.

4 décembre 2000 : le MEK a dit avoir lancé des tirs de mortier sur la garnison de Hossein-Abad, sur les quartiers généraux de la 21ème division de bataillon de comandement de Hamzeh. à l’est of Mehran454.

2001 18 avril 2001 : Le MEK a indiqué que l’Iran avait lancé des missiles «surface-to- surface » sur ses camps455. Selon le MEK cette attaque était le plus lourde en dix ans qui ait été portée sur ses bases en Irak456.

28 avril, 2001 : Le MEK a déclaré avoir eu des heurts avec les forces iraniennes de Gilan-e Gharb, qui se sont étendus à Kermanshah. Il annonçait que des « douzaines » de soldats troupes iraniennes avaient été tués ou blessés tandis que l’Iran affirme que huit membres du MEK ont été tués457. L’Iran affirme par ailleurs que 70 membres du MEK ont tués depuis le début de l’année.458

29 juillet, 2001 : Le Conseil National de Résistance de l’Iran (CNRI) a annoncé qu’il avait « mené 261 opérations militaires en Iran au cours de l’année passée, dont 180 en 2001459. 1er mai 2001 : L’Iran a annoncé avoir tué cinq membres du MEK durant des heurts avec les forces iraniennes. Le MEK a démenti dans un communiqué transmis à l’Associated Press au Caire le rapport de l’Iran, affirmant que l’Iran avait « exagéré les pertes du [groupe] de 500 pourcent ».460

452 453 454 455 456 457 458 459 460

“Iran City Hit by Mortar Attack, No Injuries or Damage,” Agence France Presse, 2 novembre, 2000. “Iran Reports Clashes with Opposition Guerrillas,” Associated Press, 15 novembre, 2000. “Iran’s Armed Opposition Shells Western Border City: Papers,” Agence France Presse, 4 décembre 2000. “Iranian Opposition Claims New Attack in Tehran,” Agence France Presse, 28 mai, 2001. Mujahedeen Says it Killed Several Iranian Troops Attacking Base in Iraq,” Agence France Presse, 7 juin, 2001. “Iran Says It Killed 8 Members of Mujahedeen Rebel Group,” Associated Press, 28 avril, 2001. Top Iranian Commander Says 70 Rebels Killed Since March,” Associated Press, 29 avril, 2001. Iran’s Opposition Determined to Overthrow Tehran’s ‘Religious Dictatorship,’” Agence France Presse, 29 juillet, 2001. “Iranian Army Says it Killed Five Rebels Trying to Cross Border from Iraq,” Associated Press, 1er mai, 2001.

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12 mai, 2001 : Le MEK, dans un communiqué à l’Agence de France Presse à Nicosia, a déclaré avoir mené une attaque contre l’Organisation de la Culture et Communications Islamiques (OCCI) et les quartiers généraux des opérations de contre-espionnage des forces de la sécurité nationale au nord de Téhéran451.

20 mai 2001 : Le MEK a annoncé dans un communiqué à l’Agence France Presse qu’il avait « attaqué avec des fusils à grenades et des grenades les quartiers généraux de l’Organisation de la Culture et de la Communication Islamiques (OCCI)… et le complexe de bâtiments de Khomeini ».462

23 mai 2001 : Le MEK, dans un communiqué à l’Associated Press au Caire, a annoncé qu’il avait attaqué le ministère de la Défense à Téhéran avec des grenades autopropulsées « infligeant de lourds dégâts »463.

24 mai, 2001 : Le MEK a déclaré que deux membres des forces militaires iraniennes avaient été tués dans des heurts dans la province occidentale d’Ilam. Le MEK, a dit avoir lancé des grenades, des tirs de mortiers et des fusils mitraillettes au niveau des positions et des patrouilles militaires iraniennes. Il ajoute a ajouté que les grenades avaient été lancées sur les quartiers généraux des forces de sécurité et dans le bureau du gouverneur Abdanan et qu’il a mené dix attaques au cours des derniers jours.464

28 mai 2001 : Le MEK a déclaré dans un communiqué à l’Agence France Presse qu’il avait attaqué les quartiers généraux avec des grenades autopropulsées465. 7 juin 2001 : Les forces iraniennes de la 45ème brigade de commandement a attaqué le camp Habib, au nord de Basra, selon un communiqué duMEK à l’Agence France Presse466. Les élections présidentielles iraniennes ont eu lieu le 9 juin, 2001467.

25 juin, 2001: Dans un courriel envoyé à l’Agence France Presse, le MEK a dit qu’il avait orgnanisé quatre attaques utilisant des grenades auto-propulsées contre les quartiers généraux des forces de sécurité nationale du commandantadjoint des renseignements, Abdul-Hossein Ramezani468.

451 462 463 464 465 466 467 468

“Mujahedeen Says Attack in Tehran Caused Heavy Casualties, Damage,” Agence France Presse, 12 mai, 2001. “Iranian Opposition Claims New Attack on Offices in Tehran,” Agence France Presse, 20 mai, 2001. “Iranian Dissidents Claim Attack on Defense Ministry in Tehran,” Associated Press, 23 mai, 2001. “Iranian Opposition Says Two Killed in Clashes,” Agence France Presse, 24 mai, 2001. “Iranian Opposition Claims New Attack in Tehran,” Agence France Presse, 28 mai, 2001. “Mujahedeen Says it Killed Several Iranian Troops Attacking Base in Iraq,” Agence France Presse, 7 juin, 2001. Id. “Iran’s Armed Opposition Claims New Attacks in Central Tehran,” Agence France Presse, 25 juin, 2001.

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8 juillet 2001 : le MEK dans un communiqué envoyé à l’Agence France Presse a déclaré avoir « mené deux attaques simultanées dans un périmètre rapproché sur les quartiers généraux de l’Organisation des Industries Militaires et l’usine de munition de la Garde Révolutionnaire469 ». 14 septembre, 2001 : le MEK a déclaré que l’Iran avait tiré cinq rockets sur ses camps à Mazarmi.470

17 septembre, 2001 : Selon le MEK, l’Iran aurait fait exploser trois bombes dissimulées le long de la route du camp Muzarmi, tuant cinq irakiens et en blessant plusieurs autres.

20 octobre 2001 : Le MEK a déclaré que l’Iran avait ciblé ses camps à Mazarmi avec une rocket 107 mm. Aucune victime n’a été signalée.471

28 novembre ,2001 : Le MEK a déclaré que l’Iran avait ciblé avec avec une rocket 107 mm. Ce serait la septième attaque contre le MEK sur deux mois et demi passés.472

26 décembre 2001 : Le MEK a déclaré que l’Iran avait lancé une attaque avec une rocket 107 mm contre ses camps de Mazarmi ; à environ 64 km de la frontière iranienne.473

469 470 471 472 473

“Iran’s Mujahedeen Claim Rocket Attack on Military Targets in Tehran,” Agence France Presse, 8 juillet, 2001. Iran Opposition Says Five Iraqis Killed in Iranian Bomb Attack,” Agence France Presse, 17 septembre, 2000. “Iran Armed Opposition Says ‘Terrorists’ Rocketed Iraq Camp,” Agence France Presse, 20 octobre, 2001. “Iran Armed Opposition Says ‘Terrorists’ Rocketed Iraq Camp,” Agence France Presse, 28 novembre, 2001. “Iran Armed Opposition Says ‘Terrorist Agents’ Rocketed Iraq Camp,” Agence France Presse, 26 décembre, 2001.

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XIX. Des gestes de bonne volonté envers l’Iran

Le MEK a à maintes reprises servi de pion sacrifié sur l’autel des bonnes relations entre les États-Unis et l’Iran. La critique acerbe prononcée en 1985 par le Département d’État à propos du MEK était une condition pour obtenir l’aide de l’Iran dans la libération des otages américains.

La volonté de l’Iran de faire des concessions aux Etats-Unis s’il arrivait à museler le MEK/CNRI fut ouvertement déclarée en février 1987, lorsque Hashemi Rafsanjani, alors rapporteur des Majles « suggéra que le gouvernement iranien mettre un terme à son soutien aux groupes terroristes du Liban si le gouvernement américain acceptait de restreindre les activités des Moudjahidin aux États-Unis 474». Depuis, le gouvernement américain a agi contre le MEK/CNRI à de nombreuses occasions, dans le but de s’assurer les faveurs de l’Iran. La décision de placer le MEK sur la liste des Organisations Étrangères Terroristes en 1997 était « un geste de bonne volonté » selon les termes d’un responsable du gouvernement Clinton et d’un ancien responsable de haut rang de la CIA. En 1999, lorsque les États-Unis ont exigé que l’Iran extrade les poseurs de bombe saoudiens responsables des attentats du complexe militaire des Tours Khobar, Téhéran a à nouveau demandé en retour que les États-Unis resserrent l’étau sur le MEK. Au cours de négociations secrètes, les États-Unis ont à nouveau désigné le MEK Organisation Étrangère Terroriste et l’a ajouté sur la liste le Conseil National de Résistance (CNRI). Le 15 août 2003, le gouvernement américain ordonna la fermeture du CNRI à nouveau comme geste de bonne volonté envers l’Iran. Les actes de répression eurent lieu pendant des négociations secrètes avec l’Iran lorsqu’il s’agit de trouver un entendement sur l’Irak, al Qaida, et le programme d’armement nucléaire de l’Iran. Un responsable iranien annonça, avant la décision de fermeture des bureaux du CNRI : « Nous répondrons à tout geste de la part des États-Unis ». Ce qui suit sont des exemples supplémentaires de la volonté des États-Unis de faire barrage au MEK /CNRI afin de gagner les faveurs de l’Iran.

A. Mujahedin Placé sur la liste des FTO (Organisations Etrangères Terroristes)

Le 8 octobre 1997, la Secrétaire d'Etat Madeleine Albright, a identifié 30 groupes étrangers comme étant des organisations terroristes. La désignation par le Département d'Etat est une condition prévue par le Décret Antiterroriste, édicté en 1996.

Inscrits dans cette liste pour la première fois: les Moudjahidin du Peuple d'Iran. D'après un responsable de l'Administration Clinton cette désignation est un signal adressé à l'Iran sur « la volonté de l'Amérique d'améliorer ses relations » comme l'explique le Los Angeles Times

Un haut responsable de l'Administration Clinton a déclaré que l’inscription des Moudjahidin du Peuple sur cette liste se veut être un geste de bonne volonté envers Téhéran et son nouveau président et modéré, Mohammad Khatami. Les Moudjahidin du Peuple qui furent un temps accusés d'anti-américanisme, ont concentré, ces dernières années, leurs principales attaques sur 474

“Mullahs of Iran Vie for Power,” Los Angeles Times, 21 juin, 1987.

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des cibles iraniennes. La décision d’inscrire le MEK sur la liste des organisations terroristes pour des raisons politiques est étayée par un agent haut placé dans les renseignements.

Le gouvernement américain chercha à améliorer les relations avec Téhéran en mai 1997, après que Mohammad Khatami ait été élu nouveau président de l’Iran. Le Président William Jefferson Clinton avait déclaré à l’époque qu’il « n’avait jamais été heureux de la rupture des relations entre les Etats-Unis et le peuple iranien » and qu’il espérait que des ponts puissent à nouveau « renouer » ces liens puissent être renoués477. Peu après, l’Administration Clinton « avait fait des propositions secrètes à Khatami comme première étape vers la fin des hostilité478 ». Les Etats-Unis avaient manifesté leur volonté d’améliorer les relations en ne s’opposant pas à la construction d’une important gazoduc traversant tout l’Iran. L’Iran jugea ces signaux insuffisants, et déclara en septembre 1997, que les dirigeants américains « n’étaient pas sincère lorsqu’ils exprimaient leur désir de réellement dialoguer avec nous. »479 Trois semaines plus tard, le Département d’État américain désignait officiellement le MEK comme organisation terroriste. Selon le Washington Post, le Département d’Etat américain avait plu à Téhéran en incluant un groupe d’opposition iranien connu comme Moudjahidin dans une liste de 30 organisations étrangères terroristes.480»

En octobre 1997, le président Khatami offrait une vision positive des États-Unis. « Pour nous, disait-il, « il n’a jamais existé d’obstacle à une coopération économique avec les États-Unis. Ce sont les américains qui ont dressé ces obstacles et se sont privés des bénéfices de cette coopération481 ». Le 8 décembre 1997, il a été annoncé que le FBI rouvrait « un dossier laissé en berne depuis longtemps sur l’Organisation des Moudjahidin du Peuple Iraniens, suite à sa désignation dans la liste des Organisations Étrangères Terroristes482 ». La semaine suivante, le 15 décembre, le Président Khatami appela à un « dialogue de considération » avec les États-Unis. Au cours d’une conférence de presse à Téhéran, il déclara : « Je déclare mon respect au grand peuple des Etats-Unis et j’espère que dans un futur proche j’entretiendrai un dialogue et parlerai avec le peuple d’Amérique, et j’espère que cela ne tardera pas à se faire ». D’après le Los Angeles Times, le président Clinton et le Président Khatami dirigeaient personnellement ces initiatives délicates.484 Le président Clinton répondit avec enthousiasme aux remarques de Khatami : « Je n’aimerais rien tant que d’avoir un dialogue avec l’Iran à condition d’avoir une discussion honnête au sujet des questions pertinentes ».485 Khatami dit à un interviewer de CNN qu’il avait décidé de parler avec le

477 478 479 480 481 482 484 485

Clinton Sees Hope in Results of Iranian Election,” Chicago Tribune, 29 mai, 1997. U.S. Won’t Object to Gas Pipeline Through Iran,” Los Angeles Times, 27 juillet 1997. Iran Sees No Change in US Attitude Since Khatami’s Election,” Agence France Presse, 15 septembre, 1997. “More Signs of Thaw in Icy U.S.-Iran Relations,” The Washington Post, 27 mars 1998. “Iran Hopes For Better Ties With US, But Pledges to Keep Missile Program,” Agence France Presse, 25 octobre, 1997. “FBI’s Operation Suture,” The Iran Brief, 8 décembre 1997. “Iranian Leader Plans to Address the U.S. on TV,” Los Angeles Times, 31 décembre, 1997. “Iran, US Face Host of Obstacles on the Road to Dialogue,” Agence France Presse, 15 décembre, 1997.

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peuple américain486. D’après des responsables politiques américains, les propos chaleureux de Khatami envers les États-Unis en surprirent plus d’un, sachant qu’il n’était en poste que depuis août.

B. CNRI Placé sur la liste des Organisations Étrangères Terroristes (FTO)

En août 1999, le président Bill Clinton envoya une lettre secrète au président iranien Mohammed Khatami, lui demandant son aide dans la recherche des trois saoudiens soupçonnés d’être à l’origine de l’attentat au camion piégé près des Tours Khobar du complexe militaire en Arabie Saoudite. Si l’Iran coopère, le président Clinton laissait entrevoir des perspectives de meilleures relations.

Le 7 octobre, 19991 les nouvelles télévisées rapportaient que l’Iran avait rejeté la demande du président Clinton. « Ces évènements n’ont rien à voir avec l’Iran, » avait déclaré le porte-parole du ministère des Affaires Étrangères iranien488. Le jour suivant, le Département d’État annonçait la mise à jour de la liste des organisations étrangères terroristes489. Après le refus de l’Iran d’accéder à la demande du président Clinton, le secrétaire adjoint du Département d’État, Martin Indyk « renouvela la demande de Washington d’un dialogue inconditionnel avec le gouvernement iranien 490». Pour démontrer la bonne volonté des États-Unis Indyk déclara que le 14 octobre, les États-Unis avaient « redésignés le MEK comme organisation étrangère terroriste ».491 En outre, il déclara que pour la première fois les États-Unis, avaient aussi désigner le Conseil National de Résistance de l’Iran comme un allié du MEK. Ces désignations ont pour effet de rendre illégal toute aide financière apportée à ces organisations492 ». Le président Mohammad Khatami dit au Mideast Mirror qu’il s’agissait là d’une demande de longue date que celle que les Etats-Unis durcissent leur position envers le CNRI493. Comme l’explique le Mideast Mirror :même si la politique américaine envers l’Iran, comme l’exposait le secrétaire adjoint d’Etat Steve Marin Indyk jeudi, reste largement inchangée, Washington a fait un geste de bonne volonté envers Téhéran en confirmant qu’il resserrait l’étau sur le Conseil National de Résistance (CNR), le front civil du principale branche politique d’opposition iranien, commentera l’observateur iranien Ali Nouri-Zadeh Cette requête de la part du président Khatami est de longue date ajouta-t-il au Mideast Mirror vendredi492 .

486 488 489 490 491 492 493 492

“Iranian Leader Plans to Address the U.S. on TV,” Los Angeles Times, 31décembre, 1997. “Iran Rejects U.S. Request for Help in Bombing Investigation,” The Washington Post, 7 octobre, 1999. Bin Laden Group on Terrorism List,” Associated Press Online, 8 octobre, 1999. “U.S. Goodwill Gesture To Iran,” The Mideast Mirror, 15 octobre, 1999. Text of Remarks Given by Martin S. Indyk, Assistant Secretary For Near Eastern Affairs,” Federal News Service, 14 octobre 1999. “Text of Remarks Given by Martin S. Indyk, Assistant Secretary For Near Eastern Affairs,” Federal News Service, 14 octobre, 1999. “U.S. Goodwill Gesture To Iran,” The Mideast Mirror, 15 octobre, 1999. Id.

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C. La fermeture des bureaux du CNRI

Le 15 août 2003, le Conseil National de Résistance (CNRI), branche politique du Moudjahidin, était fermé par ordre du Département d’État, du Trésor et de la Justice américains. Selon un responsable du Département d’Etat, la décision de fermer les bureaux « était fondée sur des informations de diverses sources selon lesquelles ces entités [CNRI, le Conseil National de Résistance], fonctionnaient comme une partie intégrante du MEK et soutenaient les actions terroristes du MEK495.

Le Département d’État agissant en tant que porte-parole de Tom Casey, affirma que ces décisions n’avaient par de connexion avec la politique américaine envers l’Iran.496Cependant, quelques semaaines auparavant, les médias avaient annoncé aux nouvelles que les Etats-Unis étaient en négociations avec l’Iran pour obtenir l’extradition de membres dirigeants d’al Qaida et que l’Iran demanderait un « geste » de la part des États-Unis avant d’entreprendre toute action. A l’époque, l’Admnistration Bush menait des pourpalers secrets avec les responsables iraniens pour tenter d’aboutir à une entente sur l’Irak, al Qaida, et les armes nucléaires qu’elle pense que l’Iran cherche à développer 497». Colin Powell, alors secrétaire d’État, reconnut publiquement que le MEK était un point important dans les négociations avec l’Iran. Le 1er août, 2003, un reporter demandait : « Une question sur un autre sujet ? L’Iran ? Je ne m’attends pas à ce que vous disiez que des négociations sont en cours mais elles le sont, M. Le Secrétaire, les rapports selon lesquels les iraniens sont prêts à nous remettre des membres importants d’al Qaida qu’ils détiennent, signifient qu’ils vous attendre de nous que nous prenions de nouvelles mesures contre le MEK en Irak, le démanteler, l’éliminer, tout ce que vous voudrez. Est-ce une description juste de la situation ? Estce un marché qui en vaut la peine quand on pense au cas de la liste des terroristes ?498 Powell répondit que les Etats-Unis étaient « en contact avec les iraniens sur les deux questions ».499

USA Today donnait plus de détails sur les négociations quelques jours plus tard :

Le responsable iranien, qui est directement informé des négociations entre l’Iran et les États-Unis, a suggéré que l’Iran pourrait être prêt à se plier aux requêtes des États-Unis d’extrader les prisonniers de leur pays d’origine, comme l’Égypte et l’Arabie Saoudite…. Mais pour l’instant, le gouvernement iranien refuse de le faire car dit-il l’administration Bush a négliger de mettre fin aux activités d’un groupe en exil violent que l’on appelle le Mujahedin el Khalq (MEK)500. L’Iran a indiqué qu’elle pourrait revoir ses positions. « Nous saurons réagir à tout geste de la part des États-Unis » a affirmé un responsable iranien501.

495 496 497 498 499 500 501

Id. “U.S. Shuts Offices of Iran Rebel Group,” United Press International, 15 aout, 2003. Id. “Colin L. Powell Holds News Conference with Regional Syndicates,” FDCH Political Transcripts, August 1, 2003. Id Iran Might Swap Terrorists for Help From U.S,” USA Today, August 4, 2003. d.

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Le 15 août, 2003, les États-Unis ordonnèrent la fermeture des bureaux du CNRI. Le lendemain, le ministre des Affaires Étrangères iranien Kamal Kharrazi loua cette action et, déclara que c’était un pas positif qui était conforme aux responsabilités internationales des États-Unis 502».

502

“Iran Praises U.S. Closure of Dissident Group’s Offices as Positive Step,” Associated Press, August 16, 2003.

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XX. 2003 - Le raid au siège du CNRI à Paris

Le CNRI/MEK a également été un pion dans les négociations entre la France et l’Iran. En 1986, l’Iran demanda à la France d’extrader les membres du CNRI vers l’Iran comme condition pour leur aide dans la libération des otages français. Le CNRI/MEK partirent pour l’Irak et bientôt, les otages étaient libérés. Puis le 17 juin, 2003, le CNRI devint l’agneau à sacrifier, lorsque 1200 policiers français lourdement armés firent irruption dans les locaux du CNRI, y compris dans l’enceinte fermée d’Auvers-sur-Oise qui avait longtemps servi de quartiers généraux à l’organisation. La plupart des policiers étaient masqués et armés de pistolets automatiques. A l’époque, le CNRI opérait sur le territoire français depuis plus de deux décennies. La police détint 164 personnes, y compris Maryam Rajavi, le président-élu du CNRI, et Saleh Rajavi, le frère de Massoud Rajavi. Près de $1.3 million, principalement en coupures de $100, fut saisi, ainsi que des ordinateurs, et un équipement de communication satellite. Le raid fut ordonné par le juge Jean-Louis Bruguière suite à la découverte d’une « conspiration criminelle avec intention de préparer des actes de terrorisme et de financer une entreprise de terrorisme », selon le ministre de l’Intérieur.503 Le ministre de l’Intérieur français Nicolas Sarkozy déclara qu’une enquête était en cours concernant le MEK soupçonné « de préparer des actes de terrorisme et de financer une entreprise terroriste504 ». Il déclara également que le MEK se préparait à utiliser la France comme « base arrière », ce qui, dit-il, était inacceptable505. Pierre de Bousquet de Florian, directeur de la DST (Direction de la Surveillance du Territoire) affirma que le MEK « se préparait à commettre des attentats en dehors de l’Iran, y compris en Europe 506». Puis le ministre des Affaires Étrangères, Dominique de Villepin, déclara que le MEK « avait revendiqué la responsabilité de nombreux attentats en Iran. Cette dimension terroriste ne peut être masquée ».507Un document interne de la DST, fut exfiltré vers le journal le Figaro déclarant que le MEK organisait des opérations contre les consulats et les ambassades de Téhéran en Europe ainsi que l’élimination physique de tout ancien membre du mouvement collaborant avec les services de renseignements iraniens, dans l’éventualité où les États-Unis devaient attaquer l’Iran508.

503 504 505 506 507 508

France Frees Iranian Opposition Leader,” The International Herald Tribune, 3 juillet, 2003. “French Police Seize 158 Iranians in Raid on Terror Group,” The Independent, 18 juin, 2003. “Paris Says People’s Mujahedeen Wanted to Use France as Rear Base,” Agence France Presse, 17 juin, 2003. Spy Chief Says Opposition Group Planned Attacks as Three Iranians Set Themselves on Fire,” Associated Press, 18 juin, 2003. “French Judge Confirms Detention of People’s Mujahedeen Members,” Agence France Presse, 24, juin 2003. Shadowland: Most-Favored Terrorists,” Newsweek, 27 juin, 2003.

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Les autorités françaises déclarèrent que leur raid avait était programmé depuis plus d’un mois, en réaction à un enquête sur des activités terroristes, enquête qui débuta en 2001509. En réaction au raid, le CNRI insista sur le fait que les personnes détenues en France était sur le territoire français en toute légalité et n’avait mené aucune activité illicite510. Un porte-parole du CNRI qualifia le raid « d’injustifiable, d’irresponsable d’impardonnable politiquement, moralement et éthiquement.511 Les iraniens, dans de nombreuses villes protestèrent contre ce raid. Un manifestant s’immola devant l’ambassade de France à Paris. A Hambourg, une cinquantaine de personnes manifestèrent contre la répression, jetant des pierres et des fruits devant le consulat d’Iran et brûlant un drapeau iranien. Quelques douzaines de personnes purent entrer dans le consulat où ils renversèrent des tables, et barbouillèrent les murs de peinture rouge512. Dans d’autres manifestations par la suite un plus grand nombre de manifestant se réuniront pour exprimer leur colère. L’Iran accueillit avec satisfaction la répression du CRNI, qualifiant ce geste de « d’étape positive de la part de la France513 ». Un porte parole du ministère des Affaires Étrangères déclara : « nous avons longtemps attendu le moment où les autorités françaises agirait à leur encontre et se conformerait à la décision de l’Union Européenne, qui a désigné ce petit groupe comme étant terroriste ».514 Le 22 Juin, un juge plaça 17 membres, y compris Maryam Rajavi sous serveillance judiciaire ». Maryam Rajavi ne devait pas être libérée avant le 2 juillet. Un an après le raid de la police une motion a été prise pour abandonner toute charge à l’encontre des 17 membres encore font encore l’objet d’une enquête. Henri Leclerc, représentant la défense affirmait : « il n’existe pas le début d’une preuve révélant qu’une action quelconque était en cours sur le territoire français ou sur un tout autre pays que l’Iran 515».

Les Commentaires

Le raid sur le CNRI par la police française était destiné à gagner la faveur de l’Iran au sujet de contrats commerciaux en cours, selon une source haut placée dans les renseignements français516. Comme le commente le journal The Independant, le moment choisi pour effectuer le raid « suggère que la France tente de retirer toute source de friction occidentale avec l’Iran tandis que Téhéran est sous pression tant du côté des États-Unis que du côté de l’Union Européenne pour coopérer avec la communauté internationale sur son programme d’armement nucléaire517 ». Les avocats qui assuraient la défense du CNRI annoncèrent qu’il existait des « coïncidences troublantes » dans le timing du raid et une séries de marchés conclus avec

509 510 511 512 513 514 515 516 517

France Mounts Massive Raids on Mujahedeen Khalq to Check Reported Rear-Guard Activity, Associated Press, 17 juin 2003. id. “Iranian Protestor Sets Self on Fire Near French Embassy,” Associated Press, 17 juin, 2003. “Fifty Held After Riot at Iranian Consulate in Germany,” Agence France Presse, 17 juin, 2003. “Iran Welcomes French Crackdown on Opposition as ‘Positive Step,” Agence France Presse, 17 juin, 2003. “France Frees Iranian Opposition Leader,” International Herald Tribune, 3 juillet, 2003 Year After French Round-Up, Iranian Opposition Demands Charges Be Dropped,” Agence France Presse, 17 juin, 2004. Confidential source in French intelligence. “French Police Seize 158 Iranians in Raid on Terror Group,” The Independent, 18 juin, 2003.

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Téhéran.518 Patrick Baudoin, un des avocats, déclara « l’état français se déshonore lorsqu’il bafoue le droit par intérêt pour les pétro-dollars 519 ». Le Ministre des Affaires Étrangères de Villepin, se rendit en Iran avant le raid pour « négocier de gros contrats avec son homologue, qui à maintes reprises l’interrogea sur les Moudjahidin en France. » selon un article du quotidien Libération520. Les échanges commerciaux entre la France et l’Iran s’élevaient à $2 milliards en 2001. Suite à des annonces faites en début 2003, de projets et entreprises de grande envergure français en Iran, de même que les efforts du gouvernement français à promouvoir le commerce franco-iranien :

7 février 2003 : Le français Alstom soumet une offre avec le japonais Mitsubishi Heavy Industries pour la construction de quatre centrales électriques en Iran.

15 février 3003 : l’Iran annonce qu’il octroierait prochainement un contrat pour le développement de la Phase 11 de l’exploitation du gisement de gas naturel du sud de la région de Fars, ce qui représente une quantité de gas estimée à 14 trillions de mètres 3. En concurrence sur ce contrat sont, français TotalFinaElf, le britanninque avec BP, l’italien ENI, et le norvégien Statoil521. L’investissement dans ce projet a été établi à $8 milliards522.

18 mars 2003 : Une société pétrochimique Iranienne conclut un contrat €183 millions avec un grand groupe français d’ingénierie pétrochimique Technip-Coflexip SA pour la construction d’une centrale de biosynthèse en Iran d’éthylène523.

27 mars 2003 : Le français Renault entre dans les négociations avec l’organisation de l’Industrie et du Développement Iranien, une branche du ministère de l’industrie pour une joint venture pour produire un véhicule étant développé par Renault524.

24 avril 2003 : Le ministre des Affaires Étrangères se rend en Iran pour rencontrer son homologue iranien Kamal Kharrazi pour se concentrer sur les relations bilatérales525.

10 mai 2003 : L’Iran dit qu’il choisirait un des trois groupes pétroliers pour développer le gisement de gas naturel : Royal Dutch Shell, British Petroleum, ou TotalFina Elf526 518 519 520 521 522 523 524 525 526

French Arrests ‘Timed to Seal Deals with Iran,’” The Daily Telegraph, 19 juin, 2004. Year After French Round-Up, Iranian Opposition Demands Charges Be Dropped,” Agence France Presse, 17 juin, 2004. “Moudjahidin victimes d’un deal avec l’Iran,” Libération, June 18, 2004. Iran to Award Phase II of South Pars Gas Field,” Agence France Presse, 15 février, 2003. “Iran Seeks Eight Billion Dollar Investment in South Pars Gas Field,” Agence France Presse, 5 mars, 2003. “Iran, French Company Sign Contract for Ethylene Plant,” BBC Monitoring International Reports, 19 mars, 2003. “Iran Industry: Automotive Updates,” EIU ViewsWire, 27 mars 2003. “Iran Refutes US Charges of Interference in Iraq,” Xinhua, 24 avril, 2003. “Deal Close to Iranian Oil Field: Official,” Agence France Presse, 10 mai, 2003.

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12 mai 2003 : le ministre du Commerce et de l’Industrie français François Loos signe un accord avec le ministre des Finances iranien à Téhéran sur la promotion et le soutien des investissements conjoints. Accompagnant M. Loos, des responsables du gouvernement français et du secteur privé, un certain nombre de parlementaires, et des représentants des 27 plus grandes entreprises françaises527. 22 mai 2003 : Le ministre Villepin rencontre le ministre Kharrazi à Paris.528

Quelques semaines après la réunion du 22 mai, la police française fait un raid aux quartiers généraux du MEK. Le 28 octobre 2003, Renault finalisait une joint venture avec l’Iran pour produire le modèle low-cost L-90 de Renault en Iran529. Le 8 décembre 2004, l’Iran signait un contrat attribuant à TotalFinaElf, une part de 60 pourcent et au malaisien Petronas une part de 40 pourcent pour développer la phase 11 de l’exploitation du gisement de gas naturel dans le sud du Fars, y compris la production et l’exportation du gas naturel liquéfié530.

Une année après le raid, les avocats défendant les 17 membres du CNRI qui font encore l’objet d’une enquête, en France ont organisé une pétition pour que leur dossier soit clos. Les avocats affirment que le gouvernement n’a fourni aucune preuve qu’un ou plusieurs membres du CNRI ait jamais été impliquer dans une conspiration ou ait jamais soutenu des activités terroristes. Le déploiement de plus de 1200 policiers lourdement armés semble avoir pour but d’impressionner le public que par réelle nécessité. Le CNRI est sur le sol français depuis 1981 et n’a jamais représenté de menace publique. L’organisation n’a jamais monté d’opérations en dehors de l’Iran et a coopéré régulièrement avec les gouvernements occidentaux. De nombreux élus en France soutiennent le CNRI. Le gouvernement français a même offert des dispositifs de sécurité à l’organisation. Comme l’explique le maire d’Auvers-sur-Oise, huit policiers étaient régulièrement assignés pour la protection de l’enceinte des bâtiments « car ils [CNRI] étaient menacés de mort par le régime iranien] 531» . Enfin, d’après le journal français l’Humanité, le prétexte pour le raid de la police était fallacieux532.

527 528 529 530 531 532

“Iran, France Sign Joint Investment Agreement,” BBC Monitoring International Reports, 12 mai, 2003. “Iranian, French Foreign Ministers Discuss Nuclear Plans,” BBC Monitoring International Reports, 23 mai, 2003. “Iran, France Sign Deal on Manufacturing New Model Car,” BBC Monitoring International Reports, 28 octobre, 2003. Iran Signs Pars LNG Deal with TotalFinaElf, Petronas,” OPEC News Agency, 8 décembre, 2004. “France Mounts Massive Raids on Mujahedeen Khalq to check reported rear-guard activity,” Associated Press, 17 juin, 2003 When Sarkozy Returned the Ball to Tehran,” translated from the original article in French “Quand Sarkozy renvoyait la balle à Téhéran,” Humanité, 19 juin, 2004.

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XXI. La Conclusion

Une évaluation indépendante, menée par GlobalOptions, Inc., la logique du Département d’Etat derrière sa décision de désigner Mujahedin-e Khalq (MEK) et le Conseil National de Résistance de l’Iran (CNRI) Organisations Etrangères Terroristes (FTO). L’évaluation analyse également les évènements clés dans l’histoire du MEK et du CNRI. Ce qui suit sont les conclusions de cette évaluation :

Des allégations de meurtres d’américains : L’organisation du MEK original n’était pas impliquée dans les assassinats d’américains en Iran dans les années ’70. Ces assassinats ont plutôt été commis par des individus qui se regroupés après que 69 membres – presque l’intégralité des dirigeants du MEK – aient été exécutés ou emprisonnés en 1971-72. Les membres subalternes qui avaient survécu étaient isolés, leur groupe fragmenté et, privé d’une hiérarchie de commandement. Une poignée de marxistes ont pris le contrôle de ce qui restait de l’organisation et commencèrent à mener des opérations en usurpant le nom de MEK. Ces marxistes étaient plus radicaux et violents et ils visaient spécifiquement les américains afin de prouver que leur doctrine était plus effective que celle du MEK original et tenter ainsi de rallier l’allégeance des anciens membres ; Vahid Afrakhteh, un member de cette faction marxiste, avoua l’assassinat de deux soldats américains, Lt. Col. Lewis Hawkins, Col. Paul Shaffer, et Lt. Col. Jack Turner. Le groupe marxiste revendiquait également le meurtre des employés de Rockwell en 1976. Ces marxistes continuèrent d’opérer jusqu’au début des années ’80 lorsqu’ils furent décimés par le régime de Khomeini. Massoud Rajavi, un membre du MEK original, fut incarcéré en 1972, et libéré en 1979. Il reforma l’organisation telle qu’elle existe encore aujourd’hui.

Des allégations de soutien au putsch de l’ambassade des États-Unis : Le MEK n’a pas collaboré à la planification ni à l’assaut de l’ambassade des États-Unis à Téhéran. En fait, selon un porte-parole des étudiants radicaux qui étaient les responsables du siège de l’ambassade, le MEK « était opposé au siège et à une confrontation avec les américains dès le départ ». Le MEK considérait la crise des otages comme regrettable et nuisible à sa position politique. La crise permit au régime de Khomeini de consolider son pouvoir et d’en écarter le gouvernement intérimaire pro-démocratique, que le MEK soutenait.

Des allégations d’attentats à la bombe par le MEK contre le Parti de la République Islamique : On ne sait toujours pas exactement qui furent les poseurs de bombe dans cet attentat. Ce point de vue est également soutenu par Ervand Abrahamian. Des années après l’attaque, le tribunal exécuta quatre « agents iraquiens » pour l’attentat. Certains responsables des renseignements de la défense en 1985 affirmeront que ce sont des officiers de l’armée royaliste qui étaient responsables et non le MEK.

Des Allégations d’actions militaires aux côtés de Saddam Hussein : En juin 1987, le MEK annonça la formation de l’Armée de Libération Nationale, qui opérait en toute indépendance de l’Irak. La plupart des armes de l’ALN étaient saisies durant les confrontations avec l’Iran. Le Département d’État reproche au MEK de s’être aligné à Saddam Hussein durant la

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guerre Iran-Irak. Mais les États-Unis s’étaient également ralliés du côté de l’Irak durant cette guerre. En 1982 , le président Reagan une émit une Directive de Décision de Sécurité (NSDD) autorisant toute action nécessaire et légale visant à prévenir une défaite de l’Irak contre l’Iran. Les États-Unis fournirent par la suite un soutien financier substantiel à l’Irak. Par ailleurs plus de 60 agences de renseignements de la défense américaines fournirent à l’Irak des informations détaillées sur les déploiements iraniens tandis que la CIA fournissait aux officiers des photos satellites du front . Il n’est donc pas logique que le Département d’État fasse le procès du MEK pour s’être rallié à Saddam Hussein sachant que les États-Unis furent également alliés de l’Irak à cette même époque.

Allégations de répression des kurdes : Il n’existe pas de preuve crédible que le MEK ait collaboré dans la répression des soulèvements des Shia et des kurdes en Irak. Cette allégation s’appuie sur de fausses informations répandues par l’Iran et ses alliés ou d’autres sources peu fiables. Le Parti Kurde Démocratique en 1999 avait publiquement affirmé que le MEK n’était pas impliqué dans la répression du peuple kurde, ni durant le soulèvement ni durant ses retombées.

Des allégations d’attaques contre les ambassades iraniennes : Il n’existe pas de preuve montrant que le MEK ait exhorté ses sympathisants à faire usage de la violence dans des manifestations contre le régime iranien. La veille de ces manifestations huit Jets Phantoms ont attaqué le camp du MEK en Irak. Cette frappe aérienne était sans précédent and provoqua une vive réaction émotionnelle parmi les expatriés iraniens à travers le monde. Le MEK avait déjà planifié des manifestations devant les ambassades iraniennes en réaction aux élections qui s’annonçaient. Après l’attaque iranienne, les manifestations dégénérèrent en violences incontrôlées, et actes de vengeance.

Des allégations sur des attaques ciblées contre les officiers militaires : Le MEK a publiquement revendiqué l’attentat contre le Lt. Gen. Ali Sayyad Shirazi, Chef Adjoint du Commandement des Etat-majors inter-armés en Iran. Le Mek considérait Shirazi comme une cible militaire légitime.

Allégation d’attaques sur les quartiers généraux du NASR : Le MEK revendiqua publiquement la responsabilité des attaques contre les Gardes Révolutionnaires Brig . Gén. Reza Seifollahi, commandant de Nasr. Seifollahi était un des cerveaux du siège de l’ambassade des États-Unis et avait été nommé responsable de la division des Renseignements et de la Sécurité du Ministère de l’Intérieur. Le MEK considérait Seifollahi, comme une cible militaire légitime.

Allégation d’attaques contre l’Iran en février 2000 : Une série d’attentats visant les structures militaires et gouvernementales ont été perpétrées par le MEK début 2000 dans une tentative d’influencer les élections parlementaires qui ont eu lieu le 18 février 2002 ; Le MEK revendiqua publiquement ces sites qu’il considérait comme cibles non-civiles légitimes.

Allégations d’attaques au mortier sur la frontière irano-irakienne : En juillet 2001, le CNRI déclara publiquement qu’il avait mené 261 opérations militaires en Iran dans le courant de l’année dernière et 180 en 2000. Le MEK a affirmé que toutes ces attaques visent des cibles militaires et gouvernementales légitimes. Les rapports du Département d’État sur le

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MEK pour 1984 et 1985 sont à la base de la plupart des allégations contre l’organisation. Les rapports contiennent des informations qui sont soit inexacte, soit incomplètes et/ou obsolètes. Le Département d’État décrit le Moudjahidin comme un groupe marxiste dans le but de saper tout soutien public. La même stratégie de propagande est utilisée par le régime en Iran pour diaboliser les organisations.

Les racines historiques du MEK sont pro-démocratiques. En 1908, la guérilla Moudjahidin originale combattait Mohammad Ali Shah car il avait organisé un coup d’État et avait rejeté la première constitution du pays. Le Moudjahidin menèrent une révolte populaire, vainquirent le Shah et rétablirent le constitution. Les membres fondateurs du MEK étaient les membres du Mouvement de Libération, qui prônait la ré-application de la démocratie constitutionnelle de 1906. Le MEK a depuis longtemps rendu public son programme politique. Le CNRI défend des principes démocratiques. Il affirme sans équivoque qu’il croit au pluralisme politique et au multipartisme. Il reconnaît la démocratie comme la seule garantie d’avancée et de progrès pour le pays. « Il considère que les élections et le vote populaire, comme seul critère de légitimité pour les responsables élus. »

La description inexacte que fait le Département d’État sur le MEK/CNRI peut être liée aux évènements politiques. De manière récurrente, le MEK a été utilisé comme un pion dans les relations américaines et françaises avec l’Iran.

En 1985 les Etats-Unis ont étiqueté le MEK « terroriste ou marxiste » dans le cadre d’un arrangement pouvant aider à la libération des otages américains au Liban.

En 1986 le gouvernement français expulsa le MEK de Paris pour s’assurer une part du marché et l’aide iranienne qui aboutirait à la libération des otages français.

En 1997, le MEK fut désigné sur la liste des Organisations Étrangères Terroristes comme geste de bonne volonté envers l’Iran selon l’Administration Clinton et ancien haut responsable de la CIA.

En octobre 1999, la MEK était de nouveau placé sur la liste FTO et le NCRI était ajouté à la liste pour encourager l’Iran à extrader les terroristes d’Arabie Saoudite responsables de l’attaque sur les Khobar Towers en Arabie Saoudite.

En juin 2003, 1200 policiers français armés entrent dans les locaux 13 NCRI/MEK à Paris. Les autorités arrêtent 164 personnes. Dix-sept membres sont inculpés de conspiration criminelle. La raison: Le raid avait pour but de gagner les faveurs de l’Iran pour des contrats commerciaux alors en attente avec des sociétés françaises, selon les rapports des journaux et une source haut placée dans l’organe de sécurité nationale française.

En août 2003, Les États-Unis ont fermé les bureaux de la NCRI à Washington, dans un autre geste de bonté envers l’Iran. À l’époque, les États-Unis étaient en négociation secrète avec l’Iran, cherchant un accord sur la question irakienne, sur Al

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Qaeda et sur le programme d’armes nucléaires de l’Iran. Avant que les bureaux de la NCRI ferment, un officiel iranien avait annoncé, “Nous gratifierons réciproquement tout geste de la part des États-Unis.”

La MEK et le NCRI ont été placés sur la liste FTO pour des raisons politiques, qui n’ont pas été basées sur une analyse objective et globale des faits. De plus, la justification offerte par le Département d’État pour inscrire les organisations sur la liste FTO est imparfaite. En conséquence, il n’y a aucune base essentielle pour continuer d’étiqueter ces organisations FTO, et elles devraient être retirées de la liste.

Retirer ces organisations de la liste renforcerait les États-Unis dans la relation complexe qu’elle entretient avec Téhéran, et serait une aide cruciale pour atteindre les objectifs américains, aussi bien à niveau régional qu’à niveau international, en matière de lutte contre le terrorisme et la prolifération des armes nucléaires. De plus, retirer ces organisations de la liste ferait progresser la question de la démocratie et des réformes en Iran.

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ANNEXE I Ce qui suit est discours de Mehdi Bazargan prononcé le jour de la fondation du Mouvement de Libération, et qui explique les raisons pour lesquelles le mouvement a été créé ainsi que ses objectifs politiques533.

Avec l’aide de Dieu Tout-Puissant.

En Vérité, Dieu Ne Change Pas Ce Qu’un Peuple A Jusqu’à Ce Que Celui-ci Ne Le Change Lui-Même.

Etant donné le besoin de sauvegarder les droits du peuple iranien, de qui, par la volonté de Dieu, émane tous les pouvoirs qui le gouvernent,

Etant donné le besoin de [jouir] de la liberté de créer des organisations nationales destinées à porter plus avant le principe selon lequel le peuple iranien est à la source de toute évolution sociale correcte, et ce, aussi longtemps que tout Iranien ne se sent pas qu’il ne dispose pas de sa dignité, de sa liberté et d’une valeur sociale, qu’aussi longtemps qu’il n’est pas autorisé à s’impliquer dans l’activisme social, les protestions, et ni à émettre des critiques constructives, alors les talents nationaux ne s’épanouiront pas et la nation ne parviendra pas au bonheur.

Etant donné le besoin d’établir une justice sociale, qui est d’une importance vitale pour maintenir l’ordre sur le territoire national, pour éviter l’ingérence étrangère et pour maintenir la paix dans le monde, et tout particulièrement dans le Moyen-Orient.

Etant donnée le besoin urgent d’un groupe dirigeant dont les pouvoirs lui sont conférés par la confiance et le soutien du peuple et d’un groupe ayant connaissance de la situation du monde et de notre temps, qui doit être déterminé à appliquer véritablement des politiques nationales et à faire face à toute sorte d’agression et de provocation pour sauvegarder les principes sacrés de Mouvement National d’Iran

Et, enfin, étant donné la vérité évidente que le progrès de chaque mouvement et la survie de toute nation ne peuvent exister sans les actions, les sacrifices et la pitié à la fois de la société et de chaque individu :

Conformément Aux Principes Fondamentaux de l’Islam et les Lois Constitutionnelles de l’Iran A La Déclaration Universelle des Droits de l’Homme A La Chartre des Nations Unies ___________________ 533

Iranian Politics and Religious Modernism: The Liberation Movement of Iran under the Shah and Khomeini

IRAN: DÉFIS ET CHOIX DE POLITIQUE ETRANGÈRE

192

Le Mouvement de Libération de l’Iran débute ses activités à la poursuite des objectifs suivants :

Objectifs et Points du Programme du Parti

Politique Intérieure

Premier point

Rétablir les droits fondamentaux du peuple iranien et mettre en place l’état de Droit et ainsi délimiter les pouvoirs et les responsabilités des différentes branches du gouvernement dans le but d’établir la le gouvernement du peuple par le peuple.

Confier le gouvernement aux individus qui sont dignes de diriger le pays dans le monde développé actuel parmi ses nations éclairées.

Deuxième Point

Répandre les principes moraux, sociaux et politiques fondés sur la religion exaltée de l’Islam avec une attention particulière pour les conditions politiques et culturelles du monde actuel.

Encourager l’honnêteté, la pitié et la lutte contre la corruption morale, les dépendances et les publications nuisibles.

Se débarrasser des éléments de malhonnêteté et corruption, en particulier les symboles de la dominance étrangère, et écarter tous ces éléments qui entravent la route vers des réformes efficaces, réelles et rapides ou qui contribuent à l’affaiblissement des individus ou de groupes d’individus iraniens.

Lutter contre les ennemis de la santé physique, intellectuelle et morale du peuple, c’est-à-dire surmonter la peur, le sentiment d’impuissance, la pauvreté, l’ignorance, le sous-développement et la désunion.

Troisième Point

Préparer graduellement [le peuple iranien] à participer à la gestion des affaires publiques, à faire bon usage de la démocratie et à réclamer ses droits sociaux.

Quatrième point

Atteindre l’indépendance économique. Mettre en place des institutions correctes financières, commerciales, sociales, culturelles, sanitaires, agricoles et industrielles.

IRAN: DÉFIS ET CHOIX DE POLITIQUE ETRANGÈRE

193

Établir des relations justes et pacifiques entre les travailleurs et les employeurs, et entre les paysans et les propriétaires terriens.

Développer une sécurité sociale et créer un système d’assurances pour les paysans.

Distribuer les revenus du pétrole et les prêts financiers étrangers à des projets de développement en matière d’agriculture, d’industrie, et d’infrastructure, et retirer les revenus et les prêts mentionnés du budget actuel du pays.

Créer une sécurité financière et économique pour encourager la répatriation des capitaux privés placés dans des banques à l’étranger.

Cinquième point

Réformer progressivement les lois du pays, en créant une organisation centrale pour l’élaboration des projets de lois.

Respecter totalement l’indépendance de la magistrature, élargir les compétences des juridictions générale set abolir les juridictions spéciales.

Réformer les instruments existants en matière de sécurité et de justice, afin d’atteindre la sécurité et de gagner pour eux la confiance et la bienveillance du peuple.

Sixième point

Utiliser la main-d’oeuvre de toute la nation comme principal capital du pays, et mettre en place la confiance et la croyance dans le principe que “une vie meilleure résulte d’une activité plus utile.”

Combattre le chômage et le désœuvrement, l’égoïsme, le laisser-aller, et les privilèges résultant de paramètres discriminatoires.

Septième point

Fournir au pays une administration saine en stabilisant les fonctions, en respectant l’indépendance des responsables et en les encourageant de chercher plus d’expertise et de compétence, en entraînant les dirigeants et en renforçant les fonctions de direction, statistiques et de recherche dans tous les domaines, en utilisant les méthodes modernes de gestion, et en garantissant le bien-être matériel et spiritual des responsables gouvernementaux.

IRAN: DÉFIS ET CHOIX DE POLITIQUE ETRANGÈRE

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Affaires Étrangères

Huitième Point

Lutter pour le transfert du droit de déterminer le destin du monde des nations les plus puissantes aux Nations Unies, afin d’assurer la liberté et l’indépendance des petites nations. Justice Internationale. Paix dans le Monde.

Neuvième Point

Lutter pour la neutralité de l’Iran.

Dixième Point

Fonder des relations étrangères à partir de la Charte des Nations Unies. Créer une bonne entente entre l’Iran et toutes les nations, plus particulièrement avec ses pays voisins.

Onzième Point

Lutter pour l’unité entre les nations pacifistes et neutres partageant des intérêts historiques, géographiques, culturels, sociaux ou religieux communs et lutter pour l’unité de tous les pays musulmans afin de faciliter la réalisation de ces objectifs.

Douzième Point

Accepter la responsabilité et participer aux efforts internationaux dans le but de résoudre paisiblement les problèmes mondiaux.

Soutenir de vrais mouvements nationaux et l’indépendance et la liberté de tous les peuples.

IRAN: DÉFIS ET CHOIX DE POLITIQUE ETRANGÈRE

195

DLA Piper Rudnick Gray Cary LLP est un cabinet d’avocats de droit international qui compte plus de 3000 avocats répartis à travers 58 bureaux et 22 pays Nous offrons une assistance juridique à nos clients dans une très large gamme de pratique qui comprend l’entreprise et les finances, le domaine législatif et règlementaire, les litiges commerciaux ordinaires, et le conseil en stratégie sur des questions internationales. Notre travail sur ce rapport a été dirigé par le très respectable Richard K Amey, ancien dirigeant de la majorité à la Chambre des Députés des Etats-Unis, et Conseiller politique auprès de DLA Piper Pour plus d’informations sur Une nouvelle Approche de la politique États-Unis/iran : Une réponse à l’échec de l’engagement. (DLA Piper Report) veuillez contacter : Lawrence E. Levinson, Esq. ([email protected]) Jared Genser, Esq. ([email protected]) DLA Piper Rudnick Gray Cary US LLP 1200 Nineteenth Street, NW Washington, DC 20036-2412 202.861.390

GlobalOptions, Inc. GlobalOptions, Inc. est un cabinet international pluridisciplinaire de conseil en business solutions et en gestion des risques dont le siège social se trouve à Washington, DC. La société, fondée en 1998, a offert son assistance à des centaines de corporations, célébrités et gouvernements dans la gestion des complexités et des tribulations du monde moderne. Nous comptons parmi nos clients réguliers deux des dix plus grands groupes commerciaux du monde moderne, ainsi que quelques-uns des noms et visages les plus célèbres de la planète. Le Comité Consultatif Supérieur est présidé par l’Amiral William J. Crowe, ancien président du Comité des chefs d’Étatsmajors inter-armés. Le vice-président du comité est R. James Woosley, ancien directeur de la Central Intelligence Agency. Parmi les autres membres du comité consultatif figurent également William H. Webster, ancien directeur du FBI et de la CIA ; le juge William Sessions, ancien directeur du FBI ; Sir Richard Needham, ancien ministre du commerce de Grande-Bretagne ; Robert L. Livingston, ancien porte-parole désigné de la Chambre des Députés américaine ; et Rod Slater, ancien secrétaire d’État aux Transports américain. Pour plus d’informations sur Rapport d’Évaluation indépendant sur le Mujahedin-e Khalq et sur le Conseil National de Résistance Iranienne (GlobalOptions Report), vous pouvez contacter : Neil Livingstone ([email protected]) GlobalOptions 1615 L Street, NE, Suite 300 Washington, DC 20036 202.293.2490

Aucun des rapports de DLA Piper ou de GlobalOptions n’a été rédigé sous la direction, le contrôle ni grâce à un financement de MEK ou du CNRI.

IRAN: DÉFIS ET CHOIX DE POLITIQUE ETRANGÈRE

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