Faire Un Vrai Break

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Faire un vrai break

Pression du quotidien, saturation... faire une vraie coupure, et se ressourcer devient parfois une nécessité vitale. Il faut alors décider d'appuyer sur « pause » pour continuer à avancer. Marianne Rey | LEntreprise.com | Mis en ligne le 09/07/2008

Passer pour un « looser », freiner sa carrière, abandonner ses collaborateurs, risquer de couler sa boîte... autant de raisons pour ne jamais appuyer sur « stop » et ne pas relever la tête du guidon. Pourquoi s'arrêter quand le corps tient la route et que le quotidien draine encore son lot de satisfactions ? Pour ne pas mourir à 60 ans

d'un infarctus sans s'être interrogé sur le sens de sa vie, répondent beaucoup de ceux qui ont sauté le pas. « J'ai bien vu qu'on me prenait pour un original lorsque j'ai quitté mon poste de directeur général chez DTZ pour partir sur les chemins de Saint-Jacques-de-Compostelle. Dans un monde où seule la réussite financière compte, expliquer que l'on part pour explorer sa dimension spirituelle reste souvent mal perçu », affirme Philippe Leignel. Un choix plutôt radical mais qui ne l'a pas empêché après cette coupure de reprendre le collier au poste de président du directoire de la même société. Ces mêmes interrogations lancinantes sur le but de l'existence ont poussé Emmanuel Grimaud, président de Maximis Retraite, à tout lâcher en septembre 2001, à l'aube de la quarantaine, alors qu'il était directeur financier d'une grande entreprise de logiciels. « Mon travail m'amusait mais je passais mon temps dans les avions et sentais que je risquais ma santé pour des choses qui n'auraient pas de valeur à mes yeux le jour où viendrait le grand bilan. »

Quelques divergences de vue avec ses patrons lui font dire stop. Loin de se lancer dans un grand voyage, il se remet à niveau dans sa vie quotidienne : courrier entassé depuis deux ans - en découvrant au passage qu'il a perdu des fortunes en Bourse ! -, inventaire de sa cave à vins, déballage d'anciens cartons de déménagement... Surtout, il retrouve le goût des choses simples et passe du temps avec son fils de six ans. « Je me souviendrai toujours des mots violents qu'il a employés pour me dire à quel point je lui avais manqué. » La prise de conscience d'Emmanuel de son absence dans son rôle de père aura été tardive mais, grâce au break, elle aura eu lieu... A 48 ans, Pierre Van den Broek, le président de Nim, société de management d'intérim, a lui pris le large au sens littéral du terme en participant à la transat Jacques-Vabre 2007. Ce passionné de voile de longue date décide de plonger dans cette folle aventure alors qu'il vient juste de rencontrer Lalou Roucayrol, son futur coskippeur, chez un ami commun. « Je me suis lancé ce défi car j'avais besoin de me prouver que je n'étais pas entravé malgré

mes fonctions de dirigeant, que je pouvais encore être libre », analyse-t-il. Un manager intérimaire le remplacera durant six mois, dont trois au cours desquels il coupera complètement les ponts avec sa boîte. Les semaines de préparation intensive et la peur de ne pas être prêt à temps vont développer sa résistance au stress. Les dixneuf jours de course, avec une quatrième place à la clé, ne seront pas non plus de tout repos : « Par un vent de force 9, à la pointe de l'Espagne, notre système de barre a cassé. Pour moi, cela signifiait la fin de l'aventure. Mais le lendemain, Lalou a sorti les pots de résine, le tissu carbone et s'est débrouillé pour reconstituer le tout. J'avais crié défaite trop tôt, j'ai pris ce jour-là ma plus belle leçon d'entrepreneur. » Faire un break peut aussi changer sa façon de diriger. Eric Merlin, gérant de l'agence de communication Les Enchanteurs, l'a vérifié au retour de son tour du monde, initié en pleine crise de la quarantaine. « J'ai appris à prendre de la distance, à déléguer davantage, à réfléchir à travers des réseaux comme Entreprendre ou l'Association progrès pour le

management (APM), explique-t-il. Mais j'ai surtout radicalement changé ma manière de gérer mon business. De bon père de famille, qui attendait d'avoir gagné un dossier avant de recruter, je suis devenu preneur de risques. Comme si m'être détaché de ma boîte m'avait fait accepter l'idée qu'elle puisse disparaître. » Jean-François Du Payrat, PDG d'EM2 Emballages, est lui aussi revenu transformé. A 50 ans, il s'est octroyé unbreak « spirituel ».Direction Saint-Jacques-deCompostelle au printemps 2003. « En cinquante-deux jours et 2 600 kilomètres de marche, je n'ai passé qu'un seul coup de fil à mon entreprise depuis un bistrot, juste pour prendre des nouvelles de mes collaborateurs », se souvient-il. Aujourd'hui encore, on sent l'émotion qui le submerge à parler de ces semaines passées sur les routes de France, à ne rien faire d'autre que manger, boire, dormir... et bien sûr marcher. « Retrouver sa dimension d'homo erectus, renouer avec la nature, c'est une sensation incomparable. Lorsque vous passez du massif de l'Aubrac à la vallée du Lot, vous quittez l'hiver pour le printemps en quelques heures. C'est olfactif, ça vous prend aux tripes. Cinq ans après, j'en

ressens toujours les effets, j'ai trouvé une forme de sérénité qui n'était pas forcément dans mon tempérament. » Parfois, le break n'est ni plus ni moins qu'une question de survie. A 30 ans, Claudia KapsyYahi est responsable import dans une centrale d'achat Euromarché, où, pour cause de rachat de l'entreprise, l'ambiance est devenue détestable : « J'étais dégoûtée de l'égoïsme de tous ceux qui ne cherchaient qu'à sauver leur peau et j'ai fait mes valises pour tenter de retrouver confiance en l'être humain », résume-t-elle. Par hasard, elle tombe sur un navire-hôpital de l'ONG américaine Mercy Ships, à quai au Havre... Son coup de tête humanitaire durera deux ans, entre l'Europe (pour la récolte de fonds) et l'Afrique, où l'équipe médicale du bateau réalise l'ablation de tumeurs bénignes déformantes, guérit les enfants atteints de cataracte, s'attaque aux becs-de-lièvre. Claudia joue l'attachée de presse, la traductrice, prend part à l'organisation logistique. « Près de quinze ans plus tard, cette expérience continue encore à me porter, elle m'a prouvé qu'on peut retrouver espoir et soulever des montagnes. » Elle saura ainsi se

montrer persévérante lorsqu'il lui faudra trouver un lieu d'accueil pour son projet de crèche interentreprises, Cap Enfants, finalement implantée à Gennevilliers (92). C'est aussi un grand break qui a insufflé l'énergie de monter sa boîte à Bertile Burel et Jacques-Christophe Blouzard, couple à la ville comme en affaires. En 2003, ces deux trentenaires ont déjà une belle carrière derrière eux, Bertile comme responsable business développement chez TPS, JacquesChristophe en tant que DG France de Lastminute. com et de NetCrawling. C'est la cession de cette dernière société qui va décider les deux jeunes mariés à appuyer sur « pause » et à partir en direction de l'Asie. « Nous avions décidé de prendre notre temps mais comme nous n'avions pas de job au retour, notre situation était quand même un peu stressante. Nous avons bien vite oublié nos inquiétudes car, après cinq mois de voyage, l'envie irrésistible de créer une boîte s'est imposée », constate Bertile. Inspirés par leur périple, ils choisiront pour leur projet un concept lié à l'évasion (coffrets-cadeaux aventure, bien-être, etc.), qui se concrétisera avec la création de Wonderbox. Prendre du

recul, se retrouver en position de spectateur à observer le monde peut donner envie de passer à l'action... Partir en assurant la pérennité de l'entreprise L'envie de faire un long break a beau tarauder nombre de chefs d'entreprise, peu passent à l'acte par peur d'abandonner leurs troupes. Et si ce n'était qu'une question d'organisation ? Pierre Van den Broek a su trouver un remplaçant auquel laisser les clés. Pas étonnant qu'il y soit parvenu : sa société, Nim, est spécialisée dans l'intérim de managers et de dirigeants ! Pour autant, des patrons moins « outillés » réussissent ce pari. A chacun d'imaginer sa solution. Jean-François Du Payrat a déniché, via son réseau professionnel, un dirigeant venant juste de vendre sa boîte. Il lui a confié un rôle de référent pour ses salariés, au cas où ces derniers rencontreraient des difficultés .Le remplaçant venait une fois par semaine seulement, l'entreprise étant en vitesse de croisière. L'erreur à éviter, c'est d'organiser son remplacement dans la précipitation. Eric

Merlin en a fait les frais : « Trois mois avant mon départ, les deux collaboratrices sur qui je comptais m'ont fait faux bond. Pour ne pas tout annuler, j'ai confié la direction à une personne connue dans la profession, mais sans la tester. J'ai mis dix mois à regagner l'argent qu'elle m'a fait perdre et à retrouver la confiance de mon équipe. »

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