24 Novembre/4 Décembre 2008
Dossier Courrier Internationale Chine, du rififi dans l’usine du monde Chutian Dushi Bao (Wuhan) Les ouvriers migrants renvoyés dans leurs villages - Retour massif et précoce des « mingong » vers leur région d’origine (ici, le Hubei) Transhumance comparable à celles, exceptionnelles, du nouvel An chinois Sur les mois de Septembre et Octobre, 300 000 retour dans le Hubei !! ( 20% des voyageurs venant du Sud du pays) - C’est une illustration directe du marasme économique qui s’empare de l’Est et du Sud-est de la Chine De + en + de licenciements Dans d’autres entreprises, 20 à 30% des salaires Les salaires tombent ainsi au niveau minimum, et les mingong ayant une famille à charge sont nombreux à préférer rentrer - De +, début d’éveil du Hubei, qui manque de main d’œuvre ; Création d’entreprise capacité d’embauche des salaires Retour des migrants, en partie - En outre, Novembre = Mois des moissons d’automne Nécessité de bras - Hubei = Zone d’émigration économique : 7,5 millions d’émigrés travailleurs Mais depuis, le mois de Septembre, annulation puis inversement de la balance migratoire - Dégringolade, cet été, des commandes de jouets salaires (ici, exemple de 800 yuans/mois, somme à la limite de la pauvreté absolue) - Mais, dans le Hubei, les embauches décentes ne sont pas aisées non plus Exemple d’un mingong de retour, qui de demande s’il ne va pas repartir, car il ne trouve pas d’emploi correctement payé dans le Hubei Zhujiang Wenbao (Zhuhai) Attention à la paupérisation - Pour certains, cette vague massive de retours des mingong n’est pas forcément un phénomène négatif, mais la conséquence des mesures prises par le gouvernement pour soutenir l’agriculture et le monde rural. De +, ces départs allègent la pression démographique pesant sur les grandes villes, ainsi que le marché de l’emploi = [Selon l’auteur, Analyse témoignant d’une méconnaissance de la Chine] - Mais : - En fait, ces départs ne sont pas du tout un libre choix Repli causé par le marasme et la série de faillites - La retour en zone agricole signifie CHÔMAGE et MISERE En 2007, 226 millions de mingong fournissaient 90% des revenus de 728 millions de ruraux La réforme foncière profite seulement aux paysans habitant des zones en voie de d’urbanisation, pax ceux qui habitent des régions isolées, qui fournissent la majorité des mingong - Dépôt de bilan de 67 000 PME pour le premier semestre 2008
- Selon un responsable de la Fédération des Industries de Hong-Kong : ¼ des 700 000 entreprises sont menacés de liquidation pour la fin 2008 - Si 1/10 seulement des mingong est touché (soit 23 millions de chômeurs en +), 60 à 70 millions de personnes qui comptent sur eu seront touchés
La Chinafrique
Michel Beuret et Serge Michel
- Milieu des années 90 : Afrique délaissée puis intérêt de la Chine pour elle Comment cela va transformer le monde et surtout nos comportements - La Chine agit sur plusieurs plans à la fois Etat chinois : Stratégies propres (= un des derniers Etats centralisés du monde) Offensive diplomatique (= paquets économiques/prêts avantageux) La centralisation de l’Etat permet à la Chine de faire ce que les autres Etats ne peuvent plus faire Chine possède les hommes : Milliers de chinois qui immigrent en Afrique = Ils n’ont rien à perdre - Ainsi la Chine possède de grands avantages : Moyens publics + Masse d’individus prêts à tout ≠ Limitation à aucun secteur : Restauration, Boîtes de nuit, Commerce, Usines « Envahisseurs » Présence dans tous les pays : Angola, Congo, … (≠ pré-carré français, anglais, …) - La Chine privilégie l’Est, notamment le Soudan - « La Chine fait exploser tous les schémas du siècle dernier. » L’objet de la Chine n’est pas de développer l’Afrique mais : Accéder aux matières premières Construction de routes, voies de chemin de fer, ports, pipelines, adduction d’eau, réseaux de téléphones, … Répondant aux intérêts chinois Sortir de l’isolement des territoires longtemps restés délaissés Mise en valeur des territoires Développement du continent africain - Mais construction de rapports différents de ceux entretenus entre Europe et Afrique Europe-Afrique : Rapports plutôt paternalistes, ≠ égalitaires Chine : Proposition du modèle de développement chinois reposant ni sur la démocratie ni la transparence ( intérêts des dictatures locales) mais a permis un développement économique (et sociale) considérable Exemple : Importation de la médecine chinoise (≠ des médicaments occidentaux chers, complexes à utiliser, …) : Médecine chinoise répondant aux besoins africains du moment Même idée pour les infrastructures : Européens : Routes conçues pour tenir 50 ans mais avec des coûts élevés Chine : Construction de routes de moindre qualité mais à des coûts – élevés = Durée des routes – longues mais permettant la circulation pour le moment - 1er forum Chine-Afrique à Pékin en 2000 « Le + grand pays en développement du monde » investit « le continent qui compte le + grand nombre de pays en développement. »
- Objet économique de la Chine ? Sécurisation des matières premières Conquêtes de marchés pour entreprises nationales 20 milliards d’investissement sur 3 ans - Objet diplomatique de la Chine ? La constitution d’un cercle de « pays amis » à l’ONU pour affirmer sa puissance (Afrique = 50 pays) Imposition de son modèle [« consensus de Pékin » contre « consensus de Washington » avec ses outils (BIRD, FMI …), son idéologie libérale, privilégiant les privatisation, le remboursement de la dette …] Volonté de la Chine de prouver sa puissance = Développement époustouflant chez eux = J.O. = « Miracle » dans le pays les plus pauvres Réussir là où l’Occident a échoué = Le développement de l’Afrique - Pourquoi une installation chinoise si facile ? Afrique délaissée par l’Occident Respect des autorités en place par les Chinois, ≠ Recherche d’imposition de leur vision du monde comme les occidentaux Contexte favorable : Pays d’Afrique dans une situation économique catastrophiques Chinois « Sauveurs » - Cependant, les Chinois connaissent encore mal l’Afrique ≠ Analyse complète du contexte Absence de connaissances profondes des dynamiques ethniques et des mouvements rebelles dans certains pays Manque de connaissance qui les conduit, parfois, à prendre de grands risques sans connaître tous les paramètres Mais, là encore, ils apprennent vite : Consultation de cabinets d’avocats européens pour préparer leurs contrats - Mais « les choses changent » : Beaucoup de pays africains s’enrichissent A terme : Transformation autonome de leurs matières premières ou valorisation de ces matières premières - Compétition est de retour Renouveau de l’intérêt pour l’Afrique de la part des occidentaux = Renouement de liens (France, Russie, Japon, Inde, Brésil, …) Bénéfique pour l’Afrique = Echanges équilibrés et accords durables = Montée de jeunes élites remplaçant les vieux dictateurs = des cours des matières premières Enrichissement de certains pays
Le Monde Diplomatique Septembre 2008 Rivalités militaires en Asie d’Olivier Zajec, Chargé d’études à la Compagnie européenne d’intelligence stratégique (Paris) - Succès d’une série documentaire produite en 2006 par la Télévision centrale de Chine (CCTV) = Daguo Juequi (« L’ascension des grandes puissances ») = Explication de la construction, de la prospérité ou du déclin d’empires (Portugal, France, Angleterre, Japon, Russie, Etats-Unis …) Explication du succès ? = « Notre Chine, le peuple chinois, la ‘‘race’’ chinoise se sont revitalisés et accèdent de nouveau à la scène mondiale. » = Importance donné aux efforts maritimes des grandes puissances dans leur processus de domination du globe Ouverture vers l’extérieur, contrôle des couloirs maritimes majeurs et des points d’appui en eau profonde, maîtrise technologique et perfectionnement des vecteurs d’action et d’influence navals (= Points communs aux divers empires) - Ces caractères sont au cœur de la base des nouveaux axes prioritaires du gouvernement = Plan « Haute technologie maritime » lancé en 2000 = de la Marine de l’Armée Populaire de Libération (MAPL) - Daguo Juequi = Pragmatisme extraverti d’une puissance en plein développement Ouvrir la Chine au monde et le monde à la Chine = Credo de Hu Jintao 2007 : Effort de diplomatie navale nouveau Visites officielles de la marine chinoise dans des ports étrangers Participation à des manœuvres internationales contre la piraterie maritime - Ambition de ce soft power à mettre en perspective avec : Environnement régional Revendications territoriales sur Taïwan et sur la Zone Economique Exclusive (ZEE) chinoise Libre accès aux vastes espaces océaniques du Pacifique et les couloirs maritimes du Sud-est asiatique Protection des voies maritimes d’approvisionnement en hydrocarbures (2ème importateur de pétrole) - Règlement amiable des contentieux frontaliers terrestres avec ses 13 voisins Mais persistance de quelques problèmes « mineurs » avec l’Inde et avec le Bhoutan Problème au niveau des revendications chinoises sur sa ZEE (4 millions de km²) sources potentielles de crises et de frictions - Position officielle = Récupération de Taïwan « si besoin par la force » Logique de la dissuasion-fascination = Rapide en puissance de la MAPL + Déclin relatif de l’US Navy ; Missiles pointés sur Taïwan + Position ambigüe des Etats-Unis Intégration économique à la façon de Hong-Kong Un objectif : l’accès à la haute mer - Taïwan = 1 pièce de la stratégie maritime chinoise Existence d’autres contentieux maritimes : Chine/Japon = Îles Diaoyu Potentiels gisements de 200 millions de mètres cube de gaz Chine/Taïwan/Vietnam/Philippines/Malaisie/Brunei/Indonésie = Îles Spratleys et archipel des Pratas
Chine/Vietnam/Taïwan = Archipel des Paracels - Réactivité ancienne et très importante de la Chine dans le domaine maritime Reprise par la force de tous les îlots du littoral contrôlés par les nationalistes dans les années 1950 1974 : Prise de contrôle des Paracels avec la défaite du Sud-Vietnam 1988 : Prise par la force du récif de Fiery Cross aux Vietnamiens Peur de la réaffirmation des ambitions navales de Pékin chez les anciens pays liés à l’Empire du Milieu - En dehors des ressources exploitables, Importance de l’accès à la haute mer pour la MAPL Vœu de s’imposer sans contestation maritime possible à l’ouest d’une « ligne verte » allant du Japon à la Malaisie en passant par Taïwan et les Philippines Principal concurrent de cette stratégie = Marine japonaise Mais lancement de « tests » déjà effectué = Incursion sous-marines répétées Vœu ensuite de forcer la « ligne verte » et d’entrer dans les « eaux bleues » (du Japon à l’Indonésie en passant par Guam) où patrouille la VIIème flotte états-unienne Principal obstacle = Taïwan, qui dénonce vivement l’intense activité de la MAPL - Une fois ces verrous ouverts, Vœu de sécurisation des couloirs d’approvisionnement en hydrocarbures en Asie du Sud Détroit de Malacca : Afrique et Proche-Orient Détroit de la Sonde et de Gaspard : Afrique et Proche-Orient Eaux philippines : Amérique latine Détroits de Lombok et de Macassar : Voie alternative pour l’Afrique et le ProcheOrient - Principal problème = Goulet d’étranglement de Malacca Passage utilisé par 80% des importations en hydrocarbures = Dépendance inquiétante Tentative de diversification des voies d’acheminement : Réseau ferré reliant les membres de l’ASEAN Oléoduc sino-birman de Sittwe à Kunming Développement des capacités de production officiel-shore de gaz naturel liquide en Asie du Sud-est asiatique Canal à travers l’isthme de Kra possible dans le sud de la Thaïlande Des couloirs sécurisés pour les importations énergétiques - Ces projets Réduction partielle des dépendances aux voies d’acheminement maritimes La nécessité de les protéger contre : la piraterie en pleine expansion ou les ambitions des Etats-Unis, du Japon ou de l’Inde = Renforcement de la politique de « marine en haute mer » chinoise Mise en place d’un « collier de perles » par la Chine : Série de bases permanentes chinoises ponctuant les rivages de l’Océan Indien et les routes maritimes menant à Malacca (Birmanie, Bengladesh, Maldives, Pakistan) mais aussi prévision de bases sur les côtes africaines (Cas existant où la Chine a offert des navires aux pays alliés pour protéger leur zones d’exploitation d’hydrocarbures) - Les grands rivaux de la Chine dans la zone : Etats-Unis, Japon et Inde Méfiance tenace entre l’Inde et la Chine + Importantes ambitions maritimes équivalentes de l’Inde (faire de l’Océan Indien « l’océan des Indiens » Construction de porte-avions et de sous-marins de technologie française Mais Chine et Inde évitent avec soin toute tension sur mer
Progrès dans les relations perceptibles avec la signature d’un partenariat stratégique entre Pékin et New Dehli en avril 2005 - Tensions entre la marine chinoise et la marine japonaise plus moderne et plus puissante qui manœuvre déjà avec l’US Navy Mais obstacle de la constitution pacifiste, critique menée par le courant nationaliste et position indécise face aux audaces chinoises - Inquiétude présente aussi en Malaisie, en Indonésie et à Singapour : Pays renforçant et modernisant leurs flottes Crainte d’un retrait temporaire voire permanent de l’influence états-unienne dans la zone avec les problèmes en Irak et Afghanistan - Conscience des problèmes états-uniens = Multiplication et modernisation des infrastructures maritimes civiles et militaires 90% du commerce extérieur dépend des voies maritimes Industries de mer = 10% du PIB Sept des dix premiers ports = Chinois Effort civil : Système satellitaire de géopositionnement (Beidou), moyens de surveillance maritime + Développement des chantiers navals 1995 : Troisième constructeur mondial dans le domaine civil Avec la Chine State Shipbuilding Corporation (CSSC) et la China Shipbuilding Industry Corporation (CSIC), grandes chances d’être le premier vers 2020 Quand les Etats-Unis se font peur - Evolution en matière militaire en Chine selon le Livre Blanc de 2006 Passage d’une armée de terre traditionnellement dominante à une marine et une armée de l’air dominants : Importante évolution de la composition de la puissante commission militaire centrale vers des marins et aviateurs - Grands efforts de modernisation de la marine chinoise Dotation de chacune des trois flottes chinoises d’une division aéroportée Développement de systèmes plus modernes : Destroyers de défense aérienne, frégates furtives des navires-patrouilleurs des côtes ; de la flotte de haute mer Développement du domaine amphibie + Achats de dragueurs de mines, patrouilleurs lance-missiles, pétroliers ravitailleurs Participation récurrente de pays étrangers et de leurs technologies : Australie, Russie, France, Pays-Bas … Importation, copie, adaptation et amélioration de technologies étrangères Mais dépendance constante dans certains domaines très performants, notamment auprès de la Russie Place centrale de la flotte sous-marine, en absence de porte-avion seule une flotte sous-marine moderne est capable de potentiellement dissuader la VIIème flotte - Inquiétude de la VIIème flotte devant le développement de la flotte sous-marine chinoise Inquiétude à relativiser : Absence d’une connaissance parfaite des performances des meilleurs sous-marins chinois, Suprématie numérique des flottes états-uniennes (le double du total des autres marines mondiales au niveau des Sous-marin Nucléaire d’Attaque, 13 des 15 porte-avions existant), La plus importante flotte anti-sous-marine existante - Absence d’une réelle course à l’armement déclaré dans les mers d’Asie du Sud Opposition à géométrie variable entre les flottes indienne, états-unienne, australienne et japonaise « contre » les flottes chinoise et pakistanaise
- Ambition maritime chinoise Frustration d’une puissance orgueilleuse ayant négligé de prendre un tournant lors de la première globalisation, qui aurait pu lui permettre de dominer le monde Sur les traces du premier grand navigateur, Zheng He - Fin de la dynastie Ming (1358-1644) = Détournement de la Chine des expéditions maritimes et d’une stratégie navale En rupture avec les imposantes expéditions de Zheng He au XVème Erreur clairement identifié + Héritage de Zheng He valorisé - Propagande tiré de l’héritage de Zheng He, appliqué sur les relations sino-africaines via le site Chinafrique - Multiplication d’initiatives états-unienne en vue de consolider les échanges et la coopération avec les marines asiatiques : Indienne, Japonaise mais aussi Chinoise Volonté de contrôler autan que possible son expansion Proposition par la marine états-unienne de la Global Maritime Partnership Initiative (2007) fondant une alliance maritime globale luttant contre la piraterie Scepticisme de la Chine sur les arrière-pensées et les multiples implications à long terme - Refus de la Chine de rater une nouvelle fois sa « chance » et d’être menacé et contrainte Nombreux défis à relever avant d’atteindre le poids de l’US Navy