98-805

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Psychiatrie

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Syndrome maniaque Orientation diagnostique et principes du traitement Pr Marie-Christine HARDY-BAYLÉ Service hospitalo-universitaire de psychiatrie, CH, hôpital Richaud, 78000 Versailles

Points Forts à comprendre • Le prototype du syndrome maniaque est l’accès maniaque survenant dans le cours de la maladie maniaco-dépressive. • Sur le plan sémiologique : les signes s’opposent à ceux de l’état dépressif. Le syndrome maniaque associe une tétrade symptomatique : un trouble de l’humeur (euphorie, variabilité de l’humeur, hyperesthésie affective), une accélération psychique et motrice, une insomnie et un trouble de contenus de pensée (vision positive de soi, du monde, de l’avenir). • Cet état s’accompagne de troubles de comportement qui engagent le sujet dans des situations à risque dont il méconnaît les conséquences. • Sur le plan diagnostique : – ce syndrome peut être « pur » (dit alors primaire) c’est-à-dire ne comporter que des signes de la série thymique sus-décrits. Il signe alors le diagnostic de maladie maniaco-dépressive bipolaire. • Il peut s’accompagner de signes n’appartenant pas à la série thymique et évoquant d’autres diagnostics : – signes dits « atypiques » évoquant le diagnostic de schizophrénie ; – signe de la série confusionnelle évoquant une pathologie organique ou iatrogène. • Sur le plan thérapeutique : – l’hospitalisation s’impose en règle du fait des risques encourus par le patient. Le traitement repose sur les thymorégulateurs et (ou) les neuroleptiques, beaucoup plus rarement sur la sismothérapie. • Le suivi à plus long terme dépend du cadre diagnostic dans lequel s’inscrit l’épisode.

Orientation diagnostique Sémiologie : syndrome maniaque typique Il associe :

1. Un trouble de l’humeur Deux types d’états d’humeur se rencontrent classiquement : – soit l’humeur est euphorique, gaie, expansive et cela de

manière indépendante des situations. Rien ne peut ébranler l’élation du sujet maniaque. Dans ce cas, l’euphorie paraît non réactive à l’environnement ; – soit l’humeur est versatile et la réactivité à l’environnement est majeure. Même si l’euphorie est le plus souvent au premier plan, des moments de tristesse peuvent survenir. Ils sont en règle extrêmement brefs et ne remettent pas en cause le diagnostic de syndrome maniaque. De même, des réactions de colère sont fréquentes, se manifestant surtout en réponse à une opposition. Certains auteurs considèrent que l’irritabilité et la versatilité de l’humeur avec sentiments dépressifs fluctuants sont plus fréquents que l’euphorie. Dans tous les cas, l’hyperesthésie affective s’oppose à l’anesthésie affective du déprimé. Quel que soit le mouvement d’humeur vécu par le sujet maniaque, il est vécu intensément.

2. Accélération psychomotrice L’incapacité à freiner ses pensées et ses actions. Au ralentissement dépressif s’oppose l’accélération maniaque : • Dans le champ de la pensée et du discours : à la brandypsychie du déprimé s’oppose la tachypsychie du maniaque (ou fuite des idées), le sujet pouvant avoir la sensation subjective du défilement rapide de sa pensée. Son discours est rapide et prolixe (logorrhée). Parfois, il utilise l’écriture pour exprimer cet emballement psychique (graphorrhée). La rapidité des associations de pensée s’accompagne souvent d’un relâchement des associations. Les liens entre les pensées sont superficiels et ludiques : les jeux de mots sont fréquents. Dans les formes modérées, le maniaque peut faire rire et son discours peut être riche et brillant. Mais lorsque le rythme s’accélère, il passe du coq à l’âne, associe sur les mots qui viennent d’être prononcés plutôt que sur le thème de son discours et devient impossible à suivre. Le discours devient désordonné, voire incohérent. L’accélération touche aussi d’autres facultés que le langagé : l’attention est facilement attirée par des stimulus extérieurs sans rapport avec la conversation ou l’action en cours, l’hypermnésie est fréquente. • Dans le champ de l’action on retrouve la même agitation. Le maniaque a de grandes difficultés à rester inactif. L’efficacité des actions entreprise est variable. Dans les formes de moindre intensité l’efficacité reste bonne voire LA REVUE DU PRATICIEN (Paris) 1998, 48

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supérieure à celle qu’elle est en dehors de périodes maniaques. L’activité reste orientée vers un but. Dans les formes d’intensité importante, l’hyperactivité est stérile. Le sujet présente une agitation psychomotrice.

3. Les troubles du contenu de pensée L’incapacité à avoir une perception objective de soi-même, du monde et de l’avenir. • Le maniaque a une vision positive de lui-même. Cette augmentation de l’estime de soi peut aller d’une confiance accrue dans ses capacités, à la conviction d’être génial ou porteur de dons extraordinaires. Des idées délirantes mégalomaniaques ne sont pas rares dans ces états : le malade peut alors se croire inspiré par Dieu (thème mystique), issu d’une famille royale (thème de filiation) ou investi d’une mission telle que sauver l’humanité (thème messianique). On parle alors de manie délirante. • Le maniaque a une vision positive du monde (« tout est beau dans le monde »). • Le maniaque a une vision positive du futur. Au pessimisme du déprimé s’oppose l’optimisme du maniaque. Cette triade, associée au manque de contrôle lié à l’accélération psychomotrice, conduit fréquemment le maniaque a élaborer des projets irréalistes.

Signes somatiques La réduction du temps de sommeil est un signe constant, quand il n’est pas masqué par une prise d’hypnotique. Classiquement, le maniaque n’en ressent aucune fatigue.

Autres éléments du diagnostic L’ensemble de ces perturbations rend compte des troubles du comportement observés chez le sujet maniaque, marqués par l’engagement dans des activités agréables mais présentant de grands risques : achats inconsidérés, conduites sexuelles inconséquentes, investissements commerciaux déraisonnables… Cet état est en rupture avec l’état antérieur du sujet. La connaissance de cet état antérieur est donc un élément important du diagnostic. Le plus souvent le maniaque ne reconnaît pas le caractère pathologique de son comportement. Cet élément est à prendre en compte dans sa prise en charge. La survenue d’un état maniaque pose le diagnostic de maladie maniaco-dépressive de forme bipolaire. Le risque évolutif de la maladie maniaco-dépressive est la récurrence des accès. C’est pourquoi un traitement préventif est proposé au sujet atteint de ce type de trouble. La subdivision de la maladie maniaco-dépressive en deux formes : unipolaire (accès dépressifs récurrents) et bipolaire (alternance d’accès dépressifs et maniaques ou accès maniaques récurrents), selon que des accès maniaques surviennent dans le cours évolutif de la maladie, bien que contestée par certains auteurs, se justifie par un certain nombre d’arguments (génétique, évolutif, clinique, de personnalité) et notamment par des conduites thérapeutiques différentes. Ainsi, les formes bipolaires seraient plus sensibles aux thymorégulateurs que les formes unipolaires. 806

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Formes cliniques Elles ne posent pas de problèmes diagnostiques. Mais comportant des spécificités évolutives et (ou) thérapeutiques.

1. Formes mixtes C’est l’intrication, stable dans le temps, de symptômes dépressifs et maniaques. À titre d’exemple, devant un étant remplissant tous les critères d’un syndrome maniaque, vont être observés : une humeur dépressive stable, une diminution marquée d’intérêt dans presque toutes les activités, une hypersomnie, une fatigue ou une perte d’énergie, des sentiments d’indignité ou de culpabilité excessive… Ces états, qui peuvent facilement être attribués à la maladie maniaco-dépressive (pas de difficultés de diagnostic), méritent d’être décrits du fait de leur résistance aux thérapeutiques habituelles de l’accès maniaque (difficultés thérapeutiques).

2. Épisodes hypomaniaques Ce sont des formes atténués de manie. Dans ces formes, on peut observer un accroissement des performances et une créativité inhabituelle. Le diagnostic peut être difficile. Un élément important est alors la rupture que constitue cet état en regard de l’état habituel du patient, rupture souvent évidente pour l’entourage, mais fréquemment non reconnue par le patient. La gravité de ces formes tient à leur caractère instable et au risque d’aggravation symptomatique qu’il implique. La reconnaissance de ces formes est particulièrement importante dans le cours d’une maladie maniaco-dépressive puisqu’elle permet de poser le diagnostic de forme bipolaire de trouble de l’humeur qui impose certaines mesures thérapeutiques. C’est pourquoi, ces dernières années, de nombreuses données ont été apportées à la connaissance de ces formes d’intensité modérée. La notion de tempéraments affectifs ou de formes sub-syndromiques de l’humeur qualifie ces états proches dans leur description de troubles de la personnalité (il s’agit plus d’une manière d’être que de symptômes francs de l’humeur), antérieurement nommées personnalités cyclothymique ou hyperthymique et aujourd’hui plus clairement considérées comme des formes a minima de troubles maniaco-dépressifs.

3. Manies délirantes Nous l’avons déjà évoqué dans la description des contenus de pensée de la forme typique. L’une des caractéristiques de ce délire aigu est la « congruence à l’humeur » des idées délirantes, c’est-à-dire que la thématique délirante est de contenu positif comme l’est une idée délirante mégalomaniaque. Cependant, des thèmes de persécution (dits « non congruents à l’humeur » car de contenu douloureux et angoissant) peuvent apparaître. Il faudra toujours en rechercher le lien avec les idées mégalomaniaques : « on

Psychiatrie me persécute parce que je suis important » ce qui permet de rattacher ce thème de persécution à une thématique « congruente à l’humeur ». En l’absence d’incohérence, cet état est facilement reconnu comme appartenant à la maladie maniaco-dépressive. Cette forme mérite d’être décrite du fait de ses spécificités évolutive et thérapeutique. En effet, une activité délirante, surtout de contenu mégalomaniaque et donc investie positivement par le sujet, peut avoir des conséquences évolutives graves. Il n’est pas rare, en effet, après quelques épisodes de ce type, au cours desquels la même construction délirante resurgit régulièrement, de constater, entre les épisodes, la persistance d’une croyance d’ordre délirant, de même contenu que celui exprimé durant l’accès. On peut ainsi observer l’autonomisation d’une activité délirante, évoluant pour son propre compte, indépendamment du trouble thymique qui lui a donné naissance, et pouvant induire un diagnostic de délire chronique primaire, le plus souvent dans ce cadre, de type paraphrénique. Du fait de ces risques évolutifs, un épisode de manie délirante doit être considérée comme une « urgence psychiatrique » et impose des mesures thérapeutiques spécifiques.

4. Fureur maniaque Bien que rare, elle impose des mesures thérapeutiques d’urgence (le plus souvent des sismothérapies d’emblée) du fait de la gravité du tableau. Elle se caractérise par un état de fureur où l’agitation agressive et violente domine.

Formes cliniques pouvant poser des problèmes diagnostiques 1. Signes évoquant une schizophrénie: la manie dite atypique Parmi ces signes, il faut citer : – l’incohérence du discours qui en impose pour une discordance intellectuelle, et qui, lorsqu’elle apparaît chez un sujet jeune, peut faire évoquer le diagnostic de schizophrénie ; – l’absence de syntonie (accord affectif avec l’entourage) et d’hyperesthésie affective fait penser à une discordance affective (émoussement affectif) ; – une hyperactivité stéréotypé, mécanique et pauvre. L’absence de tout trouble psychopathologique antérieur à l’épisode, certaines caractéristiques cliniques comme la persistance d’un « bon contact » (argument contre l’existence d’une discordance affective), la prévalence des idées délirantes congruentes à l’humeur sur d’autres idées non congruentes à l’humeur (comme des thèmes hypocondriaques, de transformation corporelle ou d’influence) et des antécédents familiaux de troubles thypiques, évoquent le diagnostic de trouble de l’humeur. Mais souvent il faudra attendre la résolution de l’accès et la restitutio ad integrum constatée dans le seul trouble thymique pour porter le diagnostic.

2. Signes évoquant une pathologie organique ou iatrogène La présence de signes confusionnels ou de la série démentielle doit toujours évoquer l’organicité des troubles, surtout lors d’un premier accès chez un sujet âgé. L’irritabilité, les comportements agressifs, les idées délirantes seraient plus constantes dans ce cas. Un examen somatique s’impose même en l’absence de signes confusionnels lors d’un premier accès chez un sujet âgé. La présence des autres signes de la maladie organique en cause orientent le diagnostic étiologique. Chez un sujet jeune, les signes confusionnels doivent faire rechercher, en premier lieu une prise de toxiques. Elle doit être de recherche systématique.

Syndrome maniaque et organicité L’examen somatique d’un patient présentant un syndrome d’excitation est indispensable surtout dans certaines circonstances : – en présence de signes de confusion (désorientation temporo-spatiale ; troubles de la vigilance ; perplexité anxieuse) ; – chez un sujet âgé ; – en l’absence d’antécédents personnels et familiaux de troubles de l’humeur ; – chez un sujet ayant des antécédents personnels mais présentant une symptomatologie inhabituelle ; – en présence d’une maladie somatique connue pouvant entraîner des désordres ioniques ou métaboliques.

De nombreuses pathologies organiques, de nombreux toxiques (cocaïne, hachisch, amphétamines, hallucinogènes…) et certaines médicaments (corticoïdes, isoniazide, L-dopa, cyclosérine) peuvent induire des états d’excitation. Les pathologies sont essentiellement neurologiques (lésions des lobes frontaux et du diencéphale antérieur notamment) ou endocriniennes (maladie de Cushing notamment). La question qui se pose toujours dans de telles intrications est celle de l’influence réelle de la pathologie organique ou toxique : cause exclusive de l’excitation ou simple facteur déclenchant chez un maniaco-dépressif ?

Principes de traitement Traitement de l’accès maniaque de la maladie maniaco-dépressive En dehors des formes d’intensité légère ou modérée, l’hospitalisation est indispensable du fait de la fréquence des troubles du comportement et de la non-reconnaissance habituelle de la pathologie par le patient. Lorsque des troubles du comportement existent, a fortiori en cas d’activité délirante (projets délirants), et en cas de refus du patient d’être hospitalisé, un recours à une mesure légale peut se justifier : plus souvent hospitalisation sur la demande d’un tiers (HDT) qu’hospitalisation d’office (car il existe rarement un risque pour autrui). LA REVUE DU PRATICIEN (Paris) 1998, 48

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Dans tous les cas, il faudra penser à la protection des biens du sujet. En cas de risques de dépenses excessives, une sauvegarde de justice (mesure peu contraignante) peut se justifier.

1. Traitement initial Il est fonction de l’intensité de l’accès et de sa forme clinique. • Dans les formes modérées. La prescription d’un thymorégulateur seul se justifie. Trois thymorégulateurs peuvent être utilisés : le lithium, la carbamazépine (Tégrétol) ou le Dépamide. L’avantage d’un thymorégulateur sur un traitement neuroleptique repose sur une action antimaniaque plus spécifique et plus globale et sur une meilleure tolérance. Son inconvénient tient au caractère moins incisif et plus tardif de son action, qui ne se manifeste en général pas avant 7 à 10 jours de traitement. C’est pourquoi, dans les formes plus sévères, un traitement neuroleptique est en règle proposé. • Dans les formes de forte intensité. Le traitement initial fait le plus souvent appel aux neuroleptiques. Tous les neuroleptiques ont une action antimaniaque. Le choix du produit repose sur différents critères : le respect des contre-indications (elles sont rares et en règle relatives), les antécédents du sujet (un neuroleptique qui se sera révélé efficace et bien toléré lors d’épisodes antérieurs devra être retenu en première intention), les habitudes de prescription. L’association de deux neuroleptiques n’a jamais fait la preuve de sa supériorité sur la monothérapie. Le choix de la posologie repose sur trois critères : la posologie moyenne efficace du produit, l’existence de prescriptions antérieures (la posologie précédemment efficace peut servir de guide), la réactivité aux premières prises du produit et en particulier l’effet sédatif obtenu. En début de traitement la tolérance est un meilleur indicateur que l’’efficacité qui impose quelques jours de traitement pour être évaluée. À partir de ces indices la posologie adéquate pourra être ajustée en quelques jours (2 à 5 jours). À titre d’exemple, on pourra proposer un traitement par halopéridol, Haldol – à la dose de 5 à 30 mg par jour ou de chlorpromazine, Largactil – de 150 à 400 mg par jour. Cependant, lors d’états maniaques très agités, des doses de neuroleptiques considérées comme importantes peuvent être justifiées (400 à 500 mg de chlorpromazine ou équivalent). L’action antimaniaque d’un neuroleptique ne peut être évalué qu’après 10 à 14 jours de traitement. Après ce délai, en l’absence d’efficacité, un changement de traitement se justifie : autre neuroleptique, association d’un thymorégulateur ou électroconvulsivothérapie. L’association à un thymorégulateur peut se justifier dans le traitement de l’accès lui-même. Sa poursuite ultérieure, dans un but prophylactique, devra être discutée avec le patient. Une telle prescription ne se conçoit en effet que dans le cadre d’une alliance thérapeutique dans laquelle le malade accepte un traitement au long cours à visée préventive. Les sismothérapies sont réservées aux formes sévères ou résistantes aux traitements neuroleptiques. 808

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Après disparition de la symptomatologie maniaque le traitement neuroleptique sera progressivement réduit en surveillant l’absence de résurgence symptomatique. Aucun critère, a priori, ne permet de prévoir de manière sûre, la durée du traitement. Dans la pratique, un traitement de 34 mois est souvent nécessaire. En cas de thymorégulateur associé, l’arrêt des neuroleptiques peut être plus rapide, le thymorégulateur ayant un effet antimaniaque.

Recherches en matière de traitement L’efficacité de nombreux produits a été testée dans le syndrome maniaque. Des produits d’action aussi diverse que la clonidine (clonidine, Catapressan), les anticalciques, certaines benzodiazépines (clonazépam, Ritrovil ; lorazépam, Témesta)… ont aisi montré une efficacité. Aux États-Unis, les benzodiazépines sont souvent prescrites en première intention dans des formes d’intensité légère ou modérée. L’ensemble de ces tentatives s’explique par la mauvaise tolérance habituelle des neuroleptiques et l’espoir de trouver des molécules efficaces dénuées de tels effets secondaires.

• Dans les hypomanies. Le traitement est thymorégulateur. La poursuite de ce traitement, prescrit alors à visée préventive, est lié à l’accord du patient. • Dans les formes délirantes. Le traitement est neuroleptique. En cas de résistance au traitement, l’électroconvulsivothérapie peut être proposée. • Dans les formes mixtes. Les antidépresseurs doivent être arrêtés, et un thymorégulateur prescrit. Les anticonvulsivants seraient plus efficaces dans cette indication. En cas de formes d’intensité sévère, et en l’absence d’efficacité des neuroleptiques, l’électroconvulsivothérapie se justifie. • Dans les manies furieuses. Les sysmothérapies d’emblée se justifient.

2. À plus long terme C’est le traitement de la maladie maniaco-dépressive bipolaire dont le risque est la récurrence des accès. Il repose sur le traitement préventif des récidives que permet, le plus souvent, la prescription d’un thymorégulateur.

Stratégies thérapeutiques en cas de pathologie associée 1. Dans les pathologies organiques Le traitement est celui de la cause. Le protocole de traitement de l’accès maniaque dans ce cadre est le même que celui d’un accès maniaque d’une maladie maniaco-dépressive. Cependant, dans le cas d’une pathologie cérébrale concomitante, les traitements psychotropes sont moins bien tolérés et peuvent notamment induire plus fréquemment des états confusionnels. Concernant les thymorégulateurs, il serait plus adapté dans cette indication d’utiliser les anticonvulsivants en première intention plutôt que la lithothérapie.

Psychiatrie 2. En cas de pathologie iatrogène Si le produit en cause peut être interrompu, on traitera le trouble de l’humeur selon les mêmes modalités que dans la maladie maniaco-dépressive.

Dans la schizophrénie Lorsque les oscillations de l’humeur sont importantes (formes dysthymiques de schizophrénie) les thymorégulateurs peuvent être associés avec les neuroleptiques, prescrits au long cours. Son efficacité sur les rechutes est moindre que dans la maladie maniaco-dépressive et elle n’a aucune action sur les signes schizophréniques. ■

Points Forts à retenir • La reconnaissance d’un syndrome maniaque repose sur une tétrade symptomatique (trouble de l’humeur, accélération psycho-motrice, insomnie, troubles de contenus de pensée). • Le tableau peut être « pur » c’est-à-dire ne comporter que des signes de la série thymique. Il n’est pas toujours de reconnaissance facile car il peut prendre de nombreux masques. Il peut être très polymorphe dans son expression symptomatique ou variable dans son intensité faisant douter du diagnostic syndromique. Chacun de ses masques (forme délirante, forme mixte, hypomanie) possèdent une spécificité évolutive qui implique des mesures thérapeutiques spécifiques. • Des syndromes d’allure maniaque peuvent s’observer soit dans le cours d’une schizophrénie (des signes schizophréniques évoquent le

diagnostic) soit au cours d’une pathologie organique, soit induit par des substances pharmacologiques (un examen médical doit être réalisé surtout devant des signes de la série confusionnelle). • Le traitement est syndromique et, à plus long terme, repose sur le cadre diagnostic dans lequel l’épisode est survenu. • Dans la maladie maniaco-dépressive le traitement au long cours est préventif des rechutes : c’est le traitement thymorégulateur. • Dans la schizophrénie, le traitement est celui de la schizophrénie auquel il faut associer un thymorégulateur. • Dans les pathologies organiques, le traitement et le pronostic sont liés aux possibilités thérapeutiques de la maladie en cause.

SCHÉMA THÉRAPEUTIQUE Conduite à tenir devant un état maniaque – L’hospitalisation est en règle nécessaire du fait des troubles du comportement comportant des risques (conséquences socio-professionnelles possibles) et de l’absence habituelle de reconnaissance des troubles par le patient. – Le traitement associe diversement neuroleptiques et (ou) thymorégulateur ou sismothérapie en fonction de la forme clinique, de l’intensité de la symptomatologie et de l’étiologie du trouble. – À plus long terme, le traitement dépend du cadre diagnostic dans lequel l’accès maniaque s’inscrit. En cas de maladie maniaco-dépressive bipolaire, le traitement est préventif et thymorégulateur. La mise en route d’un tel traitement au long cours, non plus curatif mais préventif, impose l’acceptation du patient et ne peut se concevoir que dans le cadre d’une alliance thérapeutique.

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