0706-036

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Le Temps

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Le Temps Mercredi 6 juillet 2005

Temps d’été

Jean-Quentin Châtelain L’acteur lutte chaque soir avec Marlon Brando sur la scène du Théâtre de l’Orangerie à Genève

Dix kilos de perdu, avant de se mesurer à Marlon Brando. Jean-Quentin Châtelain, 46 ans, a certes joué au Festival d’Avignon 2000 le mythique Jason, blessé à mort par une Médée incarnée par Isabelle Huppert. Le comédien genevois a certes l’habitude d’être célébré pour sa façon d’enfiévrer les textes. Mais là, quand le metteur en scène Patricia Bopp lui propose de vivre chaque soir l’enfer d’Un tramway nommé désir de Tennessee Williams et d’enfiler le débardeur prolétaire de Stanley Kowalsky, identifié à jamais à Brando, il tremble. Puis tranche: «Cela aurait été lâche de refuser un tel rôle, même si Brando est indépassable dans le film d’Elia Kazan.»

«J’adorais apprendre mes vocabulaires d’allemand. Apprendre un texte, c’est prier» Jean-Quentin Châtelain a donc fondu. Chassé le superflu pour se concentrer sur l’essentiel: la peau du personnage, mais aussi celle du monstre sacré qui l’a vampirisé. Afin de tenir le choc dans l’étuve du Théâtre de l’Orangerie, au milieu du parc de la Grange à Genève, il a aligné les kilomètres sur son vélo, entre Carouge où il a ses habitudes et Vésenaz, sur les hauteurs. Il a sué en juin, comme il a besogné l’hiver passé pour être ce rescapé d’Auschwitz dans Kaddish pour l’enfant qui ne naîtra pas au Théâtre de Vidy. Bonheur du labeur: sur scène, il paraissait travailler son texte en direct, s’exposait en plein effort, luttait avec des débris de mémoire. On en sortait cassé comme l’interprète, ravi aussi. L’autre matin, sous un ciel d’orage, Jean-Quentin Châtelain, chapeau bas sur le front, racontait ainsi son métier: «Pour

tous mes personnages, j’entreprends un entraînement physique. Il faut faire un effort pour aller vers un rôle. Quand je répétais Premier amour de Samuel Beckett, je faisais au quotidien Genève-Nyon à vélo, aller retour. Pour Kaddish, j’arpentais Paris trois heures chaque jour. Le personnage incube pendant qu’on fait du sport. Je marche et je rêve dans le même mouvement. J’ignore toujours où cette rêverie me conduira.» Ça, c’est la mise en condition. A côté, l’acteur pénètre le texte, pas à pas. «Je suis un obsédé de la mémoire. Quand j’étais enfant, j’adorais apprendre mes vocabulaires d’allemand. Apprendre un texte, c’est prier. Je dis les phrases des centaines de fois, je les ressasse, elles entrent en moi comme une prière.» La méthode est efficace, pas infaillible. Le texte peut échapper. Mais comme il est incorporé, Jean-Quentin Châtelain sait qu’il retrouvera sa ligne, même lorsque le coup de chaleur menace, comme certains soirs à l’Orangerie. «Je préfère avoir trop chaud. L’acteur Serge Merlin, une référence, surchauffe sa loge, avant d’entrer en scène. Il considère qu’il faut être en sueur pour jouer. L’imagination travaille mieux quand elle est surchauffée.» En combustion, Jean-Quentin Châtelain peut se fondre dans l’inconnu: ce personnage qui est toujours au départ, selon son expression, une masse informe. De la glaise à modeler. L’acteur comme sculpteur. Cette image vient de l’enfance. Sa mère sculpte. «Elle avait une douce folie, ses œuvres font penser à Camille Claudel, bouleversantes», souffle un ami. A 16 ans, Jean-Quentin Châtelain sait qu’il ne sera pas avocat comme son père – peintre aussi, dès qu’il le pouvait. Il donne sa démission, comme il dit, à son professeur de latin. Et se choisit des guides en théâtre, Georges Wod et Philippe Mentha. Jean-Quentin Châtelain ne vivra désormais que pour le plateau. «C’est comme s’il avait un compte à régler avec la vie à travers le théâtre, suggère son ami, l’acteur Robert Bouvier. Il veut défier tous les

Le comédien Jean-Quentin Châtelain: «L’imagination travaille mieux quand elle est surchauffée.» GENÈVE, 4 JUILLET 2005

Vie privée 18 janvier 1959. Naissance à la maternité de Genève. 22 novembre 1988. Naissance de Virgile, son premier fils, alors que l’acteur joue Prométhée. 20 janvier 1990. Naissance de Margot, sa fille, et dernière de Prométhée enchaîné. 20 novembre 1991. Naissance de Côme, qui porte le même nom que le héros du Baron perché d’Italo Calvino.

KEYSTONE

Questions à chaud Tous les jours de l’été, une personnalité répond à notre questionnaire – Votre mot le plus fréquent? Thérèse Meyer-Kaelin – Le talent qui vous manque?

Politicienne, 57 ans, présidente du Conseil national – Vous entrez dans le Larousse, rédigez votre notice. – Politicienne fribourgeoise, 1recitoyenne 2005 éphémère, maman du congé maternité payé.

– Aller à bicyclette.

– Courage, on y va….

– L’âge de votre vie que vous aimeriez revivre? – Tous les âges.

– Trois mots qui disent la Suisse? – Il y en a 4. Bonjour, Guten Tag, Buongiorno, Bun Di: mon salut du matin au Conseil national.

– La plus belle fois où vous vous êtes dit: «La vie vaut la peine d’être vécue.»? – Quand mes enfants ont commencé à bouger dans mon ventre. – L’humanité se divise en deux catégories, lesquelles? – Ceux qui ont de l’humour, et les autres. – A quoi reconnaît-on le plus bel homme du monde? – Je l’ai reconnu à son regard.

– Qui êtes-vous d’autre? – Une épouse, une maman et une grand-maman.

– La partie la plus attirante de votre corps? – L’aile du nez quand je n’ai pas le rhume.

– Le moment chaud de votre été? – Je chanterai le matin du 1er août au Palais fédéral avec mon chœur mixte.

– Chirurgie esthétique, qu’est-ce que vous vous faites opérer? – Rien, mais je fais du sport.

– L’indice de votre crème solaire? – Cinq, j’ai la peau dure.

– L’invention qui a changé le XXe siècle? – Le Natel aïe, aïe, aïe…

– Votre héroïne ou votre héros dans la vie réelle? – Jean-Philippe Maître pour son courage extraordinaire. – Devant qui vous inclinez-vous? – Devant les petits enfants pour leur parler les yeux dans les yeux. – Aimeriez-vous être votre enfant? – Pourquoi pas? ***

– Votre souhait pour le XXIe? – Beaucoup d’enfants heureux – Cornet glacé: vous sucez, vous léchez, vous mordez? – Je lèche un peu et je donne le reste à mon mari. – Qu’êtes-vous certaine d’aimer toujours? – Ma famille.

– Pour ou contre le Cenovis? – Pour, mes tartines préférées. – A quoi avez-vous renoncé? – A la cigarette, il y a douze ans. – La dernière chose que vous avez perdue? – Un match de tennis (après 4 victoires). – Un livre pour la vie? – Le Petit Prince d’Antoine de Saint-Exupéry. – A quoi ne résistez-vous pas? – Au sourire d’un enfant – Quelle musique pour accompagner votre dernier soupir? Le Salve Regina de Poulenc. – Votre devise? – Tu ne penses pas comme moi, mais je t’aime. – L’être que vous aimeriez soumettre à ce questionnaire? – Samuel Schmidt, président de la Confédération Stéphanie Germanier

Tous les jours de l’été, une personnalité répond à notre questionnaire.

dieux.» Des maîtres comme Claude Régy et Joël Jouanneau le poussent à se dépasser. Fascinés par sa puissance terrienne, son phrasé qui musarde et chante, lyrique au ras de la terre. «Sa maman avait ce genre d’accent», note un proche. Jacques Lassalle, qui en fait son Jason à Avignon, disait: «Je l’ai choisi parce que c’est un comédien qui a un arrière-pays, je ne voulais pas d’un garçon de plage.» Arrière-pays? Oui. Mais tellement singulier qu’il lui a valu d’être sifflé en 2000 dans Médée. Au Palais des papes, 2000 spectateurs n’avaient d’yeux que pour Isabelle Huppert, brûlante comme une madone byzantine. Et quand Jean-Quentin Châtelain surgissait, plus paysan qu’héroïque, la foule le conspuait. Comme si elle ne supportait pas son poids de

vérité irréductible à un cliché hellénique. Aujourd’hui, il reconnaît: «J’ai souffert. Enormément.» Puis corrige: «J’adore ça, l’adversité. Entrer en scène, c’est se jeter dans l’arène, sans avoir des idées gentilles en tête.» Au travail, Jean-Quentin Châtelain est possédé. «Je me rappelle un article de Libération à propos d’Exécuteur 14 que je jouais seul. Le critique, qui n’aimait pas le texte, avait écrit: «L’acteur y croit tellement qu’on est forcé d’y croire.» C’est le plus beau compliment qu’on m’ait fait.» Un tramway nommé Désir, Théâtre de l’Orangerie, parc de la Grange, av. William-Favre, jusqu’au 9 juillet. Puis Premier amour, du 4 au 8 août (Loc. 022/786 55 15).

Sudoku N° 3

                            Solution grille N°2

➔ Des astuces et des explications sur le phénomène du sudoku se trouvent sur le site du «Temps»: www.letemps.ch/sudoku

        

        

        

        

        

        

        

        

        

• Le sudoku est un jeu

de logique. Ce puzzle constitué de chiffres a déjà fait des millions d’accros dans le monde. Une grille de départ comporte 81 cases, sur laquelle une vingtaine de chiffres sont déjà disposés.

• Le but du jeu: Remplir #OPYRIGHT¥-ICHAEL-EPHAM

Alexandre Demidoff

EDDY MOTTAZ

Bain de sueur théâtral

toute la grille en ajoutant un chiffre par case. Attention: le même chiffre de 1 à 9 ne peut figurer qu’une seule fois par colonne, qu’une seule fois par ligne et qu’une seule fois par petit carré de neuf cases.

• Donc, pas besoin de

calculer le total de chaque ligne ou colonne: il n’y a aucune addition à effectuer. Le remplissage de la grille demande une certaine logique. Et de la patience! En japonais, le mot «sudoku» signifie d’ailleurs «chiffre unique».

• Chaque jour de l’été,

Le Temps publie une nouvelle grille de sudoku. La solution est publiée le lendemain, à la même page.