00-1723

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Pédiatrie B 262 (1re partie)

Diagnostic prénatal des maladies génétiques Indications, méthodes, aspects juridiques et éthiques DR Perrine MALZAC, PR Jean-François MATTEI Département de génétique médicale, hôpital des enfants de la Timone, 13385 Marseille Cedex 5.

Points Forts à comprendre • Un diagnostic prénatal est proposé aux couples qui ont un risque élevé d’avoir un enfant atteint d’une affection génétique grave. Dans le contexte d’un antécédent familial, ce risque est évalué, avant la grossesse, au cours d’une consultation de conseil génétique. En l’absence de risque familial connu, un diagnostic prénatal peut être envisagé en cours de grossesse en raison de signes d’appel échographiques, biologiques ou d’un âge maternel avancé. • Des techniques de plus en plus performantes sont aujourd’hui disponibles : échographie, analyses chromosomiques, moléculaires ou biochimiques. La démarche de diagnostic prénatal fait donc appel à des compétences variées et nécessite une prise en charge par une équipe pluridisciplinaire. • En fonction de l’indication, une stratégie est établie, dont les étapes, les résultats attendus, les limites et les incertitudes doivent être détaillés à la femme enceinte. • L’établissement de textes législatifs et réglementaires a été nécessaire pour faire face aux nombreux problèmes éthiques et pratiques soulevés et pour assurer un contrôle de qualité des analyses.

Indications Consultation de conseil génétique Les indications d’un diagnostic prénatal pour une maladie génétique sont retenues lors d’une consultation de conseil génétique avant ou au cours de la grossesse. En effet, avant d’entamer cette démarche, il est important de déterminer son impact en vue d’un traitement efficace et d’une prise en charge précoce de la maladie ou bien d’envisager la possibilité d’une interruption médicale de

grossesse lorsque l’affection est « d’une particulière gravité » (en fonction de la demande des parents, du cadre des lois de bioéthique et du contexte familial, psychologique et social) ; de s’assurer qu’il est techniquement possible de faire, in utero, un diagnostic de certitude ou de forte probabilité en ce qui concerne l’affection recherchée ; d’évaluer le risque d’atteinte fœtale et de le mettre en balance avec le risque lié aux prélèvements ; d’expliquer aux parents les avantages, les inconvénients et les limites de chaque analyse et de recueillir leur consentement.

Circonstances d’un diagnostic prénatal Un diagnostic prénatal est entrepris dans plusieurs circonstances : soit pour rechercher une aberration chromosomique grâce aux techniques cytogénétiques ; soit pour identifier une affection héréditaire en caractérisant un gène muté par des analyses de biologie moléculaire ou en recherchant un déficit enzymatique par des dosages biochimiques ; soit pour visualiser un syndrome génétique malformatif à l’échographie. Il s’agit donc d’une approche pluridisciplinaire qui fait appel à des obstétriciens, des échographistes, des généticiens, des biologistes (cytogénéticiens, biologistes moléculaires, biochimistes), des fœtopathologistes, des pédiatres (médecins et [ou] chirurgiens) et des psychiatres.

1. Indications du caryotype fœtal Un caryotype fœtal est indiqué dans plusieurs cas. • Le risque chromosomique est connu : – un remaniement chromosomique équilibré ou une anomalie chromosomique (en mosaïque par exemple) sont retrouvés chez l’un des 2 parents ; – le couple a déjà un enfant porteur d’une anomalie chromosomique de nombre ou de structure ; – à part, un diagnostic chromosomique de sexe fœtal est fait pour les maladies héréditaires liées au chromosome X (le plus souvent, dans ce cas, une analyse moléculaire complète les investigations, si le fœtus est du sexe masculin). • En l’absence de risque préexistant : – lorsque l’âge maternel est supérieur ou égal à 38 ans ; – si un signe d’appel est constaté à l’échographie : au cours du 1er trimestre, la mesure de la clarté nucale est

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utilisée comme « test de dépistage » de la trisomie 21; au cours du 2e ou du 3e trimestre, lorsqu’une anomalie de la morphologie fœtale est observée, le caryotype fœtal est l’un des examens indispensables du bilan materno-fœtal. En effet, environ 10 % des malformations décelées à l’échographie sont associées à une anomalie chromosomique ; – depuis 1997, un test basé sur le dosage d’au moins 2 marqueurs : l’αFP (pour αfœto-protéine) ou l’œstriol et la βhCG (pour β human chorionic gonadotropin) dans le sang maternel est proposé, selon un protocole précis, pour évaluer le risque de trisomie 21. En général, la réalisation d’un caryotype fœtal est proposée chaque fois que le risque estimé avec ces marqueurs sériques est supérieur à 1/250.

• Les affections dominantes liées au chromosome X sont rares. Le syndrome de l’X fragile en est l’exemple le plus connu. • Les maladies autosomiques dominantes sont moins souvent concernées en raison de caractéristiques qui rendent le conseil génétique et a fortiori les indications de diagnostic prénatal difficiles : un phénotype plus modéré (puisque la maladie permet à un sujet atteint de procréer) ; une variabilité d’expression intrafamiliale avec parfois un début tardif à l’âge adulte (comme dans la chorée de Huntington) ; de fréquentes néomutations (comme dans l’achondroplasie). • Les maladies à hérédité mitochondriale posent de difficiles problèmes de diagnostic prénatal, qui sont résolus au cas par cas par des équipes spécialisées.

2. Indications de la biologie moléculaire

3. Techniques d’imagerie médicale

La plupart des indications de la biologie moléculaire prénatale concernent des couples à risque. Au préalable, plusieurs conditions sont nécessaires. • Le diagnostic précis de la maladie est connu chez le cas index. Il a été posé sur des critères cliniques, paracliniques ou biologiques indiscutables. • Le gène impliqué est identifié (c’est-à-dire que sa séquence et [ou] les mutations en cause sont caractérisées) ou localisé sur le génome. • L’étude de la mutation en cause ou de marqueurs liés à l’affection a été faite, dans la famille, avant la grossesse (ou elle est réalisable en urgence). • Les couples à risque ont été reconnus en tenant compte des données moléculaires, du mode de transmission de l’affection et du degré de parenté avec le cas index. Différentes situations sont envisageables en fonction du mode d’hérédité. • En cas de maladies autosomiques récessives, un diagnostic prénatal est proposé lorsque les 2 parents sont porteurs d’une mutation à l’état hétérozygote. Ces couples ont 25 % de risque de transmettre l’affection à chaque grossesse. Il peut s’agir d’un couple ayant déjà un enfant atteint (par exemple, une maladie métabolique). De plus, dans un couple, l’un peut être reconnu comme porteur en raison de son lien de parenté avec un sujet atteint et l’autre du fait de la fréquence élevée de la maladie (par exemple, la mucoviscidose dont la fréquence est estimée à 1/2 500 en France). Enfin, un couple d’hétérozygotes a pu être diagnostiqué lors d’un programme de dépistage dans une population à risque (par exemple, la drépanocytose dans des populations originaires d’Afrique sub-saharienne). • Dans les maladies récessives liées à l’X, un diagnostic prénatal est envisagé chaque fois que la mère est certainement ou probablement conductrice d’après les données de l’arbre généalogique et (ou) de la biologie moléculaire et (ou) des études biochimiques (dosage des CPK [créatine phosphokinase] dans la myopathie de Duchenne par exemple). Enfin, l’appréciation du risque doit prendre en compte la possibilité d’une mosaïque germinale en cas de néomutation.

Le recours à des techniques d’imagerie médicale est indiqué pour le diagnostic prénatal de syndromes génétiques malformatifs, lorsqu’une étude moléculaire est impossible (gène inconnu, cas index décédé, hétérogénéité génétique).

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4. Diagnostic préimplantatoire Le diagnostic préimplantatoire est, à certains égards, considéré comme la forme la plus précoce de diagnostic prénatal. Le principe est de faire un diagnostic génétique sur les zygotes obtenus après fécondation in vitro (FIV), à partir d’un globule polaire ou d’un blastomère prélevé par micromanipulation quelques heures après la fécondation. Seuls les embryons indemnes de l’affection sont transférés in utero. Les indications concernent des couples à risque génétique élevé, essentiellement dans le cadre des maladies héréditaires récessives (25 %) ou dominantes (50 %) qui ont déjà été confrontés à l’affection (enfant atteint, interruptions médicales de grossesse à la suite de diagnostics prénatals).

Méthodes Imagerie médicale 1. Échographie • L’échographie est l’examen de choix pour la surveillance de la morphologie fœtale et le dépistage des malformations viscérales. Ses performances sont très étroitement liées à la qualité de l’opérateur. En dehors d’indications particulières, 3 échographies sont préconisées au cours de la grossesse : – l’échographie de la 12e semaine d’aménorrhée (SA) donne des informations sur le nombre de fœtus et le terme exact de la grossesse. Elle permet de dépister des malformations majeures telles que l’anencéphalie, les anomalies des membres ou de la paroi abdominale. C’est au cours de cet examen qu’est réalisée la mesure de la clarté nucale, espace physiologique situé entre le revêtement cutané et les tissus mous, au niveau de la nuque. Un élargissement de la clarté nucale, mesurée

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minutieusement, est corrélé à une augmentation du risque chromosomique et particulièrement de la trisomie 21. Le calcul de risque est établi en tenant compte de la mesure observée et de l’âge maternel ; – l’échographie de la 22e semaine d’aménorrhée (échographie morphologique) permet une étude précise de la morphologie externe et interne du fœtus. Elle s’attache à analyser attentivement chacun des organes à la recherche de malformations, dont beaucoup sont visibles à ce stade ; – l’échographie de la 32e semaine d’aménorrhée permet de retrouver les malformations à révélation tardive (notamment cérébrales et rénales) et d’apprécier la croissance fœtale. • L’échographie tridimensionnelle permet de visualiser les malformations fœtales, d’en apprécier la gravité et d’adapter la prise en charge chirurgicale. • L’échographie a un double intérêt. Toute anomalie morphologique (élargissement de la clarté nucale, malformations, retard de croissance intra-utérin, anomalie de la quantité de liquide amniotique : hydramnios ou oligoamnios) constitue un signe d’appel pour pratiquer un caryotype fœtal. Lorsque le caryotype est normal, il reste, le plus souvent, très difficile de relier avec certitude un tableau malformatif à un diagnostic précis. Dans des situations à risque génétique élevé, lorsqu’une étude moléculaire est impossible, l’échographie est parfois le seul examen réalisable pour le diagnostic prénatal de syndromes polymalformatifs. L’échographiste doit alors être informé des malformations à rechercher, de façon systématique et répétée, en tenant compte d’une possible variabilité d’expression.

2. Autres techniques • L’imagerie par résonance magnétique (IRM) fœtale est utile notamment pour apprécier la gravité de certaines malformations cérébrales (anomalie de la giration, anomalie de structures cérébrales). • La radiographie du contenu utérin permet le diagnostic de certaines anomalies squelettiques (chondrodysplasies).

Techniques de prélèvements Ces différentes techniques permettent d’obtenir des cellules ou tissus d’origines fœtale ou placentaire. Le choix de la technique dépend de l’indication, des analyses à pratiquer, du risque fœtal lié au prélèvement et de l’âge gestationnel. Le but est de favoriser les examens les plus précoces et les moins invasifs, avec des résultats à la fois fiables et rapides. Les prélèvements sont réalisés par un obstétricien entraîné, sous contrôle échographique, dans des conditions d’asepsie rigoureuses. Si la femme est Rhésus négatif, une injection de gammaglobuline anti-D est faite à titre préventif.

1. Ponction de liquide amniotique (amniocentèse) Le prélèvement est pratiqué entre la 15e et la 20e semaine d’aménorrhée. Il consiste en une ponction à l’aiguille, effectuée sous anesthésie locale, par voie transabdo-

minale. Les risques principaux sont la fausse couche (0,5 à 1 %) et l’échec de ponction ou ponction blanche (environ 1 %). Les infections, les hémorragies ou le décollement placentaire sont devenus des complications exceptionnelles.

2. Prélèvement de villosités choriales (choriocentèse, placentocentèse) La ponction est effectuée par voie transabdominale sous anesthésie locale, dès la 10e semaine d’aménorrhée. Le risque de fausse couche est de 1 à 2 %. La qualité du prélèvement est systématiquement vérifiée à la loupe binoculaire afin de séparer le tissu fœtal de la caduque maternelle, et d’éviter ainsi les problèmes de contamination maternelle.

3. Ponction de sang fœtal (cordocentèse) Ce prélèvement est fait dans une veine, à la base du cordon, à partir de la 20e semaine d’aménorrhée. Le risque de fausse couche ou de mort fœtale in utero est élevé (2 à 5 %). Il est réservé à des indications bien précises et rares : signes d’appel échographique tardifs, maladies hématologiques identifiables sur le sang fœtal, vérification d’anomalies chromosomiques en mosaïque ou confinées au placenta. Il est surtout utile dans le cadre des maladies infectieuses.

4. Prélèvements de tissus fœtaux Il est exceptionnellement indiqué de réaliser des biopsies de tissus fœtaux : peau (dermatoses), foie (déficits enzymatiques) ou muscle fœtal (myopathies).

Analyses biologiques 1. Techniques de cytogénétique Les amniocytes obtenus à partir d’un prélèvement de liquide amniotique sont cultivés pendant 10 à 15 jours avant la réalisation du caryotype. Le résultat d’une étude cytogénétique sur liquide amniotique est obtenu en 2 à 3 semaines. Le résultat est fiable, le taux de faux négatifs est évalué à moins de 0,01 %. Une technique directe sur les mitoses existant in vivo est possible à partir des prélèvements de trophoblastes et permet d’obtenir un résultat rapide (en 24 heures) mais moins fiable (discordances fœtoplacentaires). Le résultat d’un caryotype réalisé sur sang fœtal est rendu en 5 à 7 jours. • La majorité des anomalies dépistées sont les anomalies chromosomiques de nombre : trisomies 21, 13, 18 et les anomalies gonosomiques (47XXY ou syndrome de Klinefelter, 45X ou syndrome de Turner, 47XYY, 47XXX). Elles sont parfois présentes en mosaïque. La découverte d’anomalies gonosomiques, correspondant à des phénotypes peu sévères ou mineurs, est une situation toujours très délicate en regard de la décision à prendre. Des chromosomes surnuméraires remaniés, de pronostic sévère, sont aussi décelables.

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• De nombreuses anomalies de structure peuvent être repérées (translocations robertsoniennes ou réciproques, inversions). Le pronostic dépend de plusieurs arguments : le remaniement est-il apparemment équilibré ? est-il hérité ou de novo ? s’accompagne-t-il de signes d’appel échographiques ? Dans le cas particulier des translocations robertsoniennes, une disomie monoparentale associée peut avoir des conséquences phénotypiques, comme lorsque les chromosomes 14 ou 15, soumis à l’empreinte, sont impliqués. • Pour certaines indications, telles que la recherche de microremaniements chromosomiques ou l’analyse de translocations complexes, il est nécessaire de recourir à des techniques de cytogénétique moléculaire (hybridation in situ, HIS) à l’aide de sondes fluorescentes appropriées.

2. Techniques de biologie moléculaire En pratique, l’ADN est extrait d’un prélèvement de villosités choriales, à la 10e ou 11e semaine d’aménorrhée, permettant un résultat rapide et une éventuelle interruption de grossesse précoce. En fonction de la maladie étudiée et de caractéristiques génétiques propres à la famille, 2 types d’approches sont envisageables. • Le diagnostic moléculaire direct a pour but de rechercher, sur l’ADN fœtal, la présence ou l’absence de mutation(s) précise(s) à l’origine de l’affection et permet d’en déduire avec certitude si l’enfant est ou non atteint. La ou les mutations en cause ont été préalablement identifiées chez le cas index ou les porteurs hétérozygotes de la famille. Les techniques utilisées sont diverses et adaptées à chaque cas. • Le diagnostic moléculaire indirect peut être utilisé lorsque la mutation ou la séquence du gène en cause sont encore inconnues. Il repose sur l’étude de marqueurs polymorphes intra- ou extragéniques. Lorsqu’ils sont informatifs, il est possible de déterminer quel(s) allèle(s) supposé(s) normaux ou mutés a (ont) reçu le fœtus et d’en déduire son statut. Le résultat est rendu avec un certain degré d’incertitude, lié au risque de recombinaison et fonction de la distance génétique entre les marqueurs utilisés et le gène d’intérêt. Le recours aux méthodes indirectes n’est possible qu’à certaines conditions : il s’agit d’une forme familiale de la maladie, le diagnostic a été posé avec certitude chez le cas index, il n’existe pas d’hétérogénéité génétique, une étude familiale préalable a permis d’identifier l’haplotype à risque, le risque de recombinaison est faible et acceptable. • La spécificité du diagnostic préimplantatoire réside dans le fait que l’analyse moléculaire est réalisée à partir d’une seule cellule pour chaque embryon. À partir de cette cellule obtenue par micromanipulation, l’ADN est amplifié par PCR (polymerase chain reaction). Une mise au point technique est donc indispensable pour déterminer, au cas par cas, la stratégie moléculaire, rapide et fiable, à appliquer. En raison d’un risque d’erreur lié, par exemple, à une contamination par de l’ADN étranger, 1726

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un diagnostic prénatal de contrôle est toujours préconisé. Le taux de réussite est de l’ordre de 20 % de grossesses obtenues à chaque tentative.

3. Techniques biochimiques • Les marqueurs sériques permettent une évaluation du risque de trisomie 21 basée sur leur dosage dans le sang maternel. Ce dosage est proposé à toutes les femmes enceintes, quel que soit leur âge. La démarche leur est expliquée préalablement, en précisant les avantages, les limites et le déroulement du test, notamment la possibilité d’une amniocentèse secondaire. Elles peuvent ainsi choisir ou refuser de réaliser cet examen. Les marqueurs étudiés sont l’αFP ou l’œstriol et la βhCG. Le prélèvement est réalisé entre la 15e et la 17e semaine d’aménorrhée, âge gestationnel qu’il est important de préciser exactement, à partir des données échographiques. Un taux significativement abaissé d’αFP ou d’œstriol non conjugué est corrélé avec un risque accru de trisomie 21, de même qu’un taux élevé de βhCG. Selon les protocoles, 2 ou 3 marqueurs sont pris en considération. Le calcul de risque est fait à l’aide d’un logiciel informatique qui intègre les valeurs des dosages, l’âge maternel et l’âge gestationnel. Si le risque est supérieur à 1/250, un caryotype fœtal est proposé à la patiente. Par ailleurs, un taux d’αFP élevé doit faire rechercher une anomalie de fermeture du tube neural. Sur l’ensemble des femmes enceintes testées, 5 % ont un risque supérieur à 1/250. Dans cette population à risque, une anomalie chromosomique est retrouvée sur le caryotype fœtal dans environ 2 % des cas (valeur prédictive positive) ; 98 % ont donc un caryotype normal. Le pourcentage de fœtus trisomiques diagnostiqués par le biais de ces dosages varie entre 60 et 80 % selon les protocoles (sensibilité du test). En clair, tous les fœtus trisomiques ne sont pas dépistés par les marqueurs sériques (faux négatifs). • Les dosages enzymatiques ou de métabolites, réalisés sur le trophoblaste ou dans le liquide amniotique, permettent le diagnostic prénatal de diverses maladies métaboliques héréditaires par déficit enzymatique.

Aspects juridiques et éthiques Le diagnostic prénatal est un acte médical individuel. Il doit être accessible pour toutes les femmes qui le souhaitent. Cependant, il n’est ni obligatoire, ni systématique. Sa pratique pose de nombreux problèmes éthiques concernant notamment la conduite à tenir devant une pathologie fœtale diagnostiquée en cours de grossesse, soit en raison d’antécédents, soit fortuitement, en fonction d’examens échographiques ou biologiques. Aussi, il est apparu indispensable qu’un encadrement législatif et réglementaire fixe à la fois les objectifs du diagnostic prénatal et les garanties d’une pratique de qualité. La loi du 29 juillet 1994 relative, entre autres, au diagnostic prénatal, puis ses décrets d’application ont fixé des modalités précises d’organisation et des éléments de contrôle strict.

Pédiatrie

• Une consultation médicale de conseil génétique doit précéder les prélèvements en vue d’établir un diagnostic prénatal. Elle doit évaluer le risque pour l’enfant à naître d’être atteint d’une maladie d’une particulière gravité, informer la femme enceinte sur les caractéristiques de cette maladie (moyens de diagnostic, possibilités thérapeutiques) et sur les risques inhérents aux prélèvements. Le médecin délivre alors une attestation signée certifiant qu’il a correctement informé la patiente, au praticien effectuant les analyses qui la conservera. • Afin de garantir la fiabilité des analyses biologiques, les structures et personnes habilitées à les réaliser sont nommément reconnues par le ministère de tutelle. L’agrément est donné pour 5 ans et un rapport d’activité annuel est demandé. • Le consentement éclairé de la femme enceinte est recueilli par écrit. Les résultats des examens biologiques doivent être expliqués à la patiente par le médecin prescripteur au cours d’un entretien personnalisé. • Il existe une éventuelle indication d’interruption de grossesse s’il y a « une forte probabilité que l’enfant à naître soit atteint d’une affection d’une particulière gravité reconnue comme incurable au moment du diagnostic ». La décision d’interruption de grossesse appartient aux parents dûment informés sur les résultats des examens. • La création, la composition et les conditions d’agrément des centres pluridisciplinaires de diagnostic prénatal sont fixées par décret. Leur mission est de donner des avis et conseils, en matière de diagnostic, de thérapeutique et de pronostic, lorsqu’une affection est suspectée in utero. Toute indication d’interruption de grossesse doit être signée par 2 médecins dont l’un « doit exercer son activité dans un centre de diagnostic prénatal multidisciplinaire ».

Les indications de l’amniocentèse classiques se sont désormais élargies aux grossesses à risque de trisomie 21 supérieur ou égal à 1/250 après dosage des marqueurs sériques maternels, dans des conditions bien définies. Tout récemment, les premiers agréments ont été délivrés pour assurer les indications du diagnostic préimplantoire. ■

Points Forts à retenir • Avant d’entreprendre le diagnostic prénatal d’une maladie génétique, les éléments majeurs à apprécier sont le risque d’atteinte fœtale, la gravité de l’affection, les possibilités (ou impossibilités) thérapeutiques et diagnostiques, ainsi que la demande du couple et plus particulièrement de la femme enceinte vis-à-vis de cette affection. En dehors des cas, rares, où le diagnostic prénatal permet une prise en charge thérapeutique adaptée, il aboutit le plus souvent, lorsque le fœtus est atteint, à une interruption de grossesse toujours très douloureuse psychologiquement. • Le diagnostic préimplantatoire, devenu possible en France, s’il permet d’éviter l’interruption de grossesse, soulève d’autres difficultés, notamment en raison du nécessaire recours à la fécondation in vitro. Ainsi, au-delà des solutions techniques à mettre en œuvre, il reste fondamental de replacer la démarche de diagnostic prénatal dans son contexte psychologique, sa dimension éthique et ses implications sociales.

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