Dermatologie B 170
Dermatite atopique Diagnostic, évolution, traitement PR Frédéric CAMBAZARD, DR Jean-Loïc MICHEL Service de dermatologie vénéréologie, hôpital Nord, 42055 Saint-Étienne Cedex 2.
Points Forts à comprendre • La dermatite atopique se traduit par un ensemble de manifestations cutanées inflammatoires, d’évolution chronique ou récidivante, principalement représentées par un eczéma à des antigènes de l’environnement. C’est la plus fréquente des dermatoses de l’enfant. • Elle est particulièrement invalidante en raison de l’importance du prurit qui l’accompagne. • Le diagnostic en est habituellement facile et le problème principal est celui d’une prise en charge thérapeutique adaptée qui évite la survenue de complications dont certaines (surinfections virales ou bactériennes, généralisation de l’eczéma) nécessitent parfois une hospitalisation. • Le traitement repose sur l’emploi d’un dermocorticoïde. Il doit être prescrit rapidement pour éviter l’évolution vers la chronicité qui est souvent désespérante, favorisée par des traitements inadaptés ou mal conduits.
Diagnostic Diagnostic positif • L’interrogatoire doit rechercher des antécédents familiaux d’atopie : dermatite atopique, asthme, rhinite ou conjonctivite saisonnière, urticaire ; des antécédents personnels d’atopie ; la date de début des lésions cutanées, habituellement vers l’âge de 3 mois mais parfois plus tôt ou beaucoup plus tard. • L’examen clinique, très évocateur, permet d’emblée de poser le diagnostic. Les lésions élémentaires sont celles d’un eczéma avec des lésions qui peuvent être aiguës, surtout chez le nourrisson, associant érythème, œdème, microvésicules, suintement, croûtes et desquamation. Ces lésions surviennent au sein d’une sécheresse cutanée diffuse. Chez l’enfant plus grand, la chronicité du grattage conduit à une lichénification des lésions avec une peau épaissie et pigmentée.
Ces 2 formes de lésions peuvent être associées. Dans tous les cas, elles sont mal limitées et prurigineuses, s’accompagnant d’excoriations et retentissant sur le sommeil. La topographie des lésions est très caractéristique. L’atteinte est symétrique, touchant initialement les convexités du visage (avec un respect médio-facial), les plis rétro-auriculaires, le cuir chevelu, les convexités du tronc et des membres. La zone sous la couche est habituellement parfaitement respectée (protection du dessèchement cutané et éviction des aéro-allergènes). Le pouce sucé est souvent atteint. Avec l’âge, l’atteinte se localise dans les grands plis (coudes, genoux, cou) et certaines zones sont particulièrement rebelles telles que les chevilles, les poignets, les mamelons et les plis sous-auriculaires. Classiquement, le diagnostic positif repose sur l’association de critères majeurs (prurit, évolution chronique, topographies suggestives et terrain atopique) et de critères mineurs dont les principaux sont la sécheresse cutanée, des eczématides achromiantes, un prurit déclenché lors de la sudation, une sécheresse cutanée, un âge précoce de survenue, une dermite non spécifique des mains ou des pieds, un eczéma des mamelons, une cheilite, une pigmentation péri-oculaire ou un pli souspalpébral bilatéral (signe de Dennie-Morgan), une pâleur faciale, une intolérance à la laine, une accentuation périfolliculaire, une hypersensibilité alimentaire, un dermographisme blanc… Théoriquement, 3 critères majeurs et 3 critères mineurs sont nécessaires pour diagnostiquer la dermatite atopique mais en fait l’aspect clinique est souvent d’emblée caractéristique et ces critères sont plus théoriques que pratiques. • Les examens paracliniques ont, dans la majorité des cas, peu d’intérêt. La biopsie cutanée n’est pas réalisée en pratique sauf pour éliminer un autre diagnostic. Elle montrerait dans l’épiderme un œdème intercellulaire (spongiose) évoluant vers la formation de vésicules et un afflux de lymphocytes T (exocytose). Les manifestations dermiques sont moins spécifiques avec une dilatation capillaire et un infiltrat lymphocytaire périvasculaire. Les numérations formules sanguines montrent une éosinophilie parfois importante. La normalité des plaquettes permet d’éliminer un syndrome de WiskottAldrich chez les garçons. Le dosage des IgE sériques totales est parfois très élevé. Les IgE sériques spécifiques peuvent être recherchées
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après réalisation des prick tests pour trouver une allergie alimentaire pouvant conduire à un régime d’éviction dans certains cas. La recherche d’une sensibilisation aux pneumallergènes n’a pas d’intérêt car leur éviction n’est pas possible et la mise en route d’une désensibilisation s’accompagnerait de poussées d’eczéma importantes.
Diagnostic différentiel • Un eczéma de contact comporte les mêmes lésions élémentaires mais est suspecté en raison d’une topographie évocatrice. Il peut bien sûr être associé à une dermatite atopique. • La dermite séborrhéique est une dermatose érythémato-squameuse, non prurigineuse du petit nourrisson, de topographie initialement bipolaire (cuir chevelu et siège), touchant également le fond des plis (axillaires, inguinaux), parfois associée à des lésions psoriasiformes à distance. Elle débute souvent dès le 1er mois de vie et traduit probablement des soins d’hygiène mal adaptés sur un terrain psoriasique. • La kératose pilaire est une hyperkératose folliculaire touchant la convexité des joues (où elle s’accompagne d’un érythème diffus), la face externe des bras et la face antérieure des cuisses. De transmission souvent autosomique dominante, elle est stable et non prurigineuse. • La gale peut s’eczématiser mais la présence de sillons, de nodules scabieux dans un contexte familial différent permet de rectifier le diagnostic. • Les histiocytoses langerhansiennes sont souvent diagnostiquées initialement comme une dermatite atopique. En fait, il s’agit de petites papules croûteuses touchant le tronc, le cuir chevelu, associées à des lésions purpuriques du fond des plis et granulomateuses de la région périanale ou de la muqueuse buccale. • Exceptionnellement, la dermatite atopique s’intègre dans le cadre d’un syndrome génétique tel le syndrome de Wiskott-Aldrich lié à l’X, ne touchant que les garçons, s’accompagnant d’une thrombopénie, d’une thrombopathie et d’un déficit immunitaire. Les lésions d’eczéma sont particulières en raison de leur caractère purpurique. Elles disparaissent après une greffe de moelle. La maladie de Buckley s’accompagne également d’épisodes infectieux à répétition et d’une dermatite atopique sévère avec un faciès grossier et d’importantes lésions lichénifiées.
Évolution L’évolution de la dermatite atopique se fait par poussées, favorisées par les saisons (plus de lésions l’hiver en raison de l’effet desséchant du chauffage, des bains chauds et du temps froid), les épisodes infectieux (ORL, poussées dentaires), les stimulations immunitaires (vaccins, aliments exotiques). Globalement, les lésions ont tendance à s’accroître les premières années avant de régresser entre les âges de 3 et 5 ans. Dans 10 à 20 % des cas, les lésions peuvent 1356
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persister à l’âge adulte en particulier lors des formes sévères durant l’enfance. Les complications sont fréquentes.
Extension et généralisation de l’eczéma Il existe lors de la dermatite atopique une hyperréactivité aux allergènes de l’environnement. Les altérations cutanées (lésions d’eczéma, lésions de grattage) favorisent la pénétration des allergènes dans l’organisme et donc la stimulation immunitaire à l’origine de l’eczéma : c’est dire l’intérêt d’un traitement efficace qui, en normalisant la peau et en faisant disparaître le prurit, limite les stimulations antigéniques externes. Ainsi, les dermocorticoïdes ne sont pas un simple traitement symptomatique de la dermatite atopique mais participent bien à son traitement étiologique. Par contre, des traitements locaux inadaptés, qu’il s’agisse de topiques irritants, de savons antiseptiques trop concentrés, d’une corticothérapie locale mal conduite (trop forte, trop courte), vont aggraver progressivement les lésions cutanées, parfois par l’intermédiaire de rebonds, s’accompagnant de poussées aiguës et suintantes. Le prurit souvent insomniant s’accompagne d’un état d’agitation avec accentuation des lésions de grattage, favorisant à la fois les surinfections cutanées et l’aggravation de l’eczéma. La généralisation des lésions peut conduire à une érythrodermie.
Surinfections Elles peuvent être : • bactériennes : la peau atopique est constamment colonisée par du staphylocoque doré, sa pénétration étant favorisée par l’altération du stratum corneum (sécheresse cutanée). Ce germe peut avoir également un rôle allergisant, entretenant de ce fait l’eczéma. La surinfection peut devenir évidente sur le plan clinique avec des lésions de folliculites ou d’impétigo avec parfois de la fièvre. D’autres surinfections sont possibles et en particulier streptococciques. La peau peut être la porte d’entrée d’une infection viscérale plus importante (septicémie, arthrite…). Les adénopathies cervicales, axillaires et inguinales sont fréquentes mais plus d’origine inflammatoire (par stimulation immunitaire) qu’infectieuse ; • virales : si les surinfections par le virus de la vaccine ont disparu depuis l’arrêt de la vaccination contre la variole, l’herpès reste une complication grave de la dermatite atopique lors des primo-infections, pouvant réaliser le syndrome de Kaposi-Juliusberg : apparition rapide sur toutes les lésions d’eczéma de vésicules ombiliquées qui se groupent en placards émiettés, souvent croûteux et hémorragiques, associés à une hyperthermie. L’évolution, autrefois gravissime, a été complètement modifiée depuis l’emploi de l’aciclovir. La prévention de telles complications nécessite l’éducation des parents vis-à-vis de leur récurrence herpétique.
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La fréquence des molluscum contagiosum (petites tumeurs épidermiques à poxvirus) est classiquement plus importante au cours des dermatites atopiques ; • les surinfections fungiques sont exceptionnelles, souvent limitées à une candidose des plis du siège.
Dermites du siège Elles sont exceptionnelles chez le nourrisson atopique où la zone sous la couche est souvent la seule où il n’y a pas d’eczéma. Par contre, lorsque le siège est atteint, la dermite réalisée est souvent intense, associée à une surinfection candidosique, bactérienne, aggravée par une macération sous les couches, source de difficultés thérapeutiques.
Retentissement familial C’est une complication fréquente des eczémas mal ou non traités avec augmentation des tensions familiales favorisant l’aggravation et l’extension des lésions.
Traitement Même si l’évolution de la dermatite atopique se fait de façon spontanément favorable, le plus souvent après quelques années, il est important de mettre en route un traitement adapté dès les premiers mois de vie : en effet, plus il est précoce, plus ce traitement est simple, bien compris par les parents et rapidement efficace. Dans le cas contraire, l’ancienneté du prurit, les habitudes de l’enfant, la certitude des parents de l’absence de toute possibilité de traitement efficace rendent la prise en charge beaucoup plus difficile à un stade évolué. Le traitement repose sur des mesures d’hygiène, des soins topiques et un traitement général.
Mesures d’hygiène Elles sont simples : les bains ne doivent pas être trop chauds ; à plus de 35 ˚C, ils aggravent le dessèchement cutané (effet dégraissant de l’eau chaude). Il faut qu’en sortant du bain les plaques ne soient pas plus rouges (aggravation de l’inflammation cutanée par la chaleur du bain). Après l’âge de 3 mois, les bains ne doivent pas dépasser 32 ˚C. Ils doivent être courts et peuvent être avantageusement remplacés par des douches. Celles-ci seront données 2 fois par jour lors des saisons de fortes chaleurs, sans savon le matin. La chambre ne doit pas être trop chauffée ni trop sèche (mettre de l’eau au-dessus du radiateur l’hiver) ; l’enfant ne doit pas être trop couvert. Il ne doit porter directement sur la peau que des vêtements en coton. Il convient également d’éviter le contact des vêtements irritants (laine, acrylique) des parents lors de la tétée. Il faut limiter
la présence de poussières dans l’environnement et, si possible, les pollens et les animaux à poils ou à plumes. L’introduction de certains aliments (œufs, poissons) sera retardée. La prévention de la contamination en cas d’herpès récurrent de l’entourage doit être expliquée aux parents. Si l’été la lumière et le soleil ont un effet très bénéfique, la chaleur et l’hypersudation vont au contraire aggraver les lésions dans les plis. C’est dire l’intérêt des séjours au bord de mer qui s’accompagnent souvent d’une nette amélioration cutanée.
Soins topiques Ils sont fondamentaux et reposent sur le traitement de 3 facteurs : la sécheresse cutanée, la surinfection cutanée et surtout l’inflammation. • La sécheresse cutanée doit être limitée, outre les mesures d’hygiène habituelles, par l’application biquotidienne de crèmes ou d’émulsions hydratantes, à répéter éventuellement dans la journée sur les zones exposées (visage, mains). • La surinfection cutanée est constante au moins sur le plan bactériologique et elle doit être prise en compte dans le traitement de l’eczéma. En phase aiguë initiale, un topique antiseptique (cuivre, zinc) ou antibiotique (préparation à l’érythromycine, acide fusidique, mupirocine) peut être utilisé le matin. Un savon antiseptique (chlorhexidine) utilisé suffisamment dilué et largement rincé peut être utilisé lors de la douche le soir. Il permet de désinfecter l’ensemble du tégument et de préparer les lésions à l’action des corticoïdes. Très efficace sur les lésions suintantes et surinfectées, ce savon antiseptique risque de favoriser le dessèchement cutané dans les formes simplement sèches et doit être habituellement réservé aux poussées évolutives. Une primo-infection herpétique étendue est habituellement traitée par Zovirax en intraveineux. Des récurrences, habituellement très limitées, souvent bien reconnues par les parents, réagissent favorablement à l’application de crème dermique Zovirax. • L’inflammation cutanée est contrôlée par une corticothérapie locale bien adaptée. Les corticoïdes (d’un niveau II ou III) sont appliqués une fois par jour en dehors des lésions cliniquement infectées, si possible après le bain du soir. On limite ainsi le risque théorique de surinfection cutanée. Ils sont aussi plus efficaces puisque restant en place toute la nuit. La zone sous les couches doit être évitée du fait du risque de potentialisation par l’occlusion et de la survenue de granulomes glutéaux. En cas d’eczéma du siège, les dermocorticoïdes peuvent être utilisés mais en application le matin (les fesses étant lavées souvent dans la journée). Ils doivent être évités sur le visage après la puberté (dermite acnéiforme, dermite aux corticoïdes…) et sur la partie très fine des paupières à tout âge (risque de cataracte ou de glaucome). Les dermocorticoïdes ne doivent être appliqués que sur les lésions (risque d’atrophie dermo-épidermique
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1 Lésions typiques, érythématosquameuses, mal limitées de la convexité des joues et des plis rétro-auriculaires.
2 Eczéma aigu, suitant et croûteux des convexités du visage.
3 Eczéma suraigu, très rouge et suitant.
4 Eczéma aigu et croûteux très étendu.
5 Topographie caractéristique : creux poplités et plis sousfessiers.
6 Eczéma chronique des chevilles. 1358
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7 Atteinte du mamelon très évocatrice.
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8 Eczéma lichénifié très étendu des 2 jambes avec excoriations chez une fillette de 7 ans.
9 Dermatite atopique des plis favorisée par l’hypersudation.
10 Surinfection herpétique : placard suintant formé de la coalescence de vésicules initialement ombiliquées.
11 Eczématides achromiantes.
12 Eczéma lichénifié des poignets : peau épaissie et plaies de grattage.
13 Lichénification par grattage chronique avec lésions épaisses et pigmentées.
14 Surinfection bactérienne : folliculite staphylococcique.
15 Surinfection bactérienne : impétigo, lésions bulleuses superficielles d’évolution rapidement croûteuse, compliquant une fissure chronique sous-auriculaire.
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en raison de leur effet antimitotique en cas d’application sur peau saine). Ils doivent être évités sur la racine des membres lors de la puberté (risque de vergetures). Ils s’accompagnent enfin parfois d’une hypertrichose réversible. Pour éviter un retentissement systémique il est souhaitable de ne pas dépasser 30 g/mois d’un dermocorticoïde de classe II ou 45 g/mois d’un dermocorticoïde de classe III. Il est important de quantifier les corticoïdes utilisés à chaque consultation. L’efficacité du traitement doit être rapide : le dermocorticoïde n’étant appliqué que sur les lésions, l’amélioration quotidienne de celles-ci permet une diminution progressive du traitement. L’absence d’amélioration de certaines zones peut conduire à une application biquotidienne pendant 7 à 10 j sur les zones résistantes. Il est important de bien expliquer ce traitement aux parents, certains ayant tendance à trop utiliser les corticoïdes, d’autres plus souvent à ne pas les utiliser en quantité suffisante soit initialement soit dans un second temps, expliquant les échecs thérapeutiques.
Traitement général • Une antibiothérapie par voie orale est administrée pendant 8 à 10 j (macrolides ou bêtalactamines) dans les formes très étendues ou surinfectées. Cette antibiothérapie est souvent très efficace pour arrêter une poussée évolutive, même utilisée isolément. • Un sirop antihistaminique (donné au début du repas pour éviter les caries dentaires) peut être associé éventuellement en utilisant des anti-H1 sédatifs le soir, avec parfois cependant une hyperexcitabilité paradoxale. • Une éviction alimentaire n’est réalisée que dans certains cas particuliers après une enquête appropriée ; • Une crénothérapie et des vacances ensoleillées au bord de la mer s’accompagnent habituellement d’une nette amélioration cutanée. • L’adjonction d’acides gras essentiels a pu donner des bons résultats. • Les vaccinations doivent être réalisées normalement (sauf la vaccine en raison du risque de pustulose varioliforme). Les poussées évolutives après les vaccins sont facilement contrôlées par un traitement local. La vaccination par le BCG (bacille Bilié de Calmette et Guérin) doit être réalisée en dehors des poussées d’eczéma. Enfin, de façon exceptionnelle, certains traitements peuvent être envisagés en cas de formes rebelles telles que la photochimiothérapie chez le grand enfant, la ciclosporine A (2,5 à 5 mg/kg/j), l’interféron γ… Bientôt, l’emploi de crèmes au tacrolimus (FK 506), immunosuppresseur efficace par voie topique mais sans les inconvénients des dermocorticoïdes, sera probablement un apport thérapeutique très intéressant. Dans tous les cas, l’explication thérapeutique aux parents, la surveillance évolutive pour vérifier leur bonne compréhension des soins et quantifier les dermocorticoïdes utilisés sont très importantes pour éviter la survenue de rebonds les conduisant parfois à employer des traitements totalement inefficaces voire aggravants. ■ 1360
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POUR APPROFONDIR La dermatite atopique s’intègre dans le cadre de l’atopie qui est une pathologie héréditaire de transmission polygénique, se manifestant par une dermatite atopique (nourrisson), un asthme (enfant), une rhinite ou une conjonctivite allergique (adulte). Cette atopie est caractérisée par une hypersensibilité générée par les IgE contre des antigènes naturels de l’environnement ou de l’alimentation appelés atopènes. Il peut s’agir d’allergènes alimentaires (trophallergène : lait de vache, œufs ou poissons, arachides) principalement chez le nourrisson ou d’aéro-allergènes inhalés ou pénétrant par voie percutanée : pollens, acariens, poils d’animaux, staphylocoques, agissant essentiellement chez l’enfant ou chez l’adulte. Les manifestations de la dermatite atopique sont un eczéma qui est une hypersensibilité retardée (type IV de Gell et Coombs) faisant intervenir principalement l’immunité cellulaire : captation des atopènes par les cellules dendritiques cutanéo-muqueuses, qui vont ensuite migrer dans les ganglions lymphatiques régionaux pour présenter les peptides antigéniques aux lymphocytes T, permettant une expansion clonale spécifique avec migration cutanée préférentielle et développement des lésions inflammatoires. Or, l’hyper-IgE atopique devrait s’accompagner d’une hypersensibilité immédiate (type I de Gell et Coombs) de type humoral : le lien entre ces 2 types d’hypersensibilité est dû à la fixation des molécules d’IgE à la surface des cellules de Langerhans. La dermatite atopique représente en fait un eczéma de contact aux protéines de l’environnement avec présentation des peptides d’atopènes par l’intermédiaire des molécules du complexe majeur d’histocompatibilité aux lymphocytes T spécifiques de type TH2 produisant l’interleukine 4 (stimulant la formation des IgE) et l’interleukine 5 (stimulant et attirant les éosinophiles). Ces lymphocytes T spécifiques sont responsables de la production de cytokines inflammatoires expliquant les lésions cutanées. La régulation se fait par l’activation de lymphocytes T (de type TH1), la production d’interféron γ et la rétrorégulation négative sur les TH2. Il existe un facteur génétique net puisque 60 % des sujets porteurs de dermatites atopiques ont un parent du 1er degré ayant une manifestation d’atopie (alors que 30 % des sujets non atopiques ont les mêmes antécédents familiaux). Il existe une certaine spécificité d’organe cible : lorsqu’un seul parent à une dermatite atopique, 50 % de leurs enfants sont atteints, lorsque les 2 parents ont une dermatite atopique, 80 % de leurs enfants sont atteints. L’augmentation de la prévalence de l’atopie est nette, étant passée de 5 % en 1960 à 20 % en 1996, peut-être favorisée par une urbanisation plus importante, un habitat moins ventilé, la présence de polluants automobiles ou industriels, le tabac, les lavages excessifs, l’introduction précoce de trophallergènes.
Points Forts à retenir • Le diagnostic de la dermatite atopique est essentiellement clinique. Il repose sur l’existence de lésions d’eczéma aiguës (suintantes et croûteuses) ou chroniques (lichénifiées, épaisses et pigmentées). La topographie de ces lésions est particulièrement évocatrice (convexité du visage, cuir chevelu, convexité du tronc et des membres chez le petit nourrisson, plis des membres, plis sous-auriculaires ensuite). • L’évolution est souvent chronique pendant quelques années avec des poussées évolutives saisonnières (l’hiver) ou lors des épisodes infectieux ORL, de poussées dentaires ou de vaccins. La chaleur aggrave les lésions, le soleil (vacances au bord de l’océan) les guérit. • Les complications sont principalement infectieuses, bactériennes ou herpétiques (Kaposi-Juliusberg). • Le traitement associe un ensemble de mesures d’hygiène (bains courts, peu chauds, vêtements en coton, éviction allergénique) et une corticothérapie locale adaptée.