Snatches One

  • June 2020
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  • Words: 1,962
  • Pages: 9
Bribes I 1978 - 1985

Jean-Paul Margnac

[email protected]

Bribes I

L'oiseau mécanique Pour Elisabeth l'amour assassiné arrache des cris Je crie dans ma tête Pourquoi le beau canard sauvage de notre amour Sûr de sa force Sûr de l'immensité qui s'ouvrait devant lui Dans le bleu du ciel, dans le soleil Le beau canard de notre passion Pourquoi l'as-tu abattu Irresponsable chasseur

Ouverture C'est à la fois très simple Et … Un peu compliqué

De quel droit De quel droit m'arraches-tu à ce lieu que mon doigt pointe Sur tous les plans de métro De quel droit m'arraches-tu à cette rue où s'enferma mon bonheur Et que je dois oublier

En trois ans Trois Barbara ont disparu Pfutt, volatilisées Dur, dur pour un petit garçon A peine sorti de l'enfance

Pourquoi ce lit dont tu me prives Ce radeau de toutes mes dérives Ce ventre chaud vers lequel je rame De toutes mes forces

Vous avez compris ? Moi, oui.

Pourquoi

Ça n'a pas d'importance …

Pourquoi cette fuite Ces yeux qui se détournent des miens Cette voix qui me tourmente Par téléphone D'un lieu anonyme

Les mots qui s'alignent dans ces Bribes Leurs sont dédiés Rue Doudeauville

Mais pourquoi Aussi Cette voix haletante, oppressée Cette voix qui semblait Tapie dans l'ombre Trahir une souffrance

4 décembre 1997

Tout est énigme, tout est supplice Tout est espoir Comme le bonheur scintille quand il s'éloigne de nous ! Hélas, dans ton délire, pauvre fou Tu refuses de voir que ton oiseau sauvage N'était que l'oiseau mécanique Qui battait des ailes Ce dimanche d'automne devant Beaubourg Et retomba Dérisoire Quand l'élastique fut détendu .... Beaubourg 3 décembre 1979

•2•

Bribes I

Il neige sur Créteil . . .

Hôtel Lafortune

Pour Elisabeth Pour Elisabeth

Les flocons de mes souvenirs Fondent au soleil de mes nouvelles amours

Barbara Aimes-moi J’ai tout compris Et j’ai honte Honte de l’humiliation Que tu as subi au petit café Honte des coups qui suivirent Honte de ma cécité devant ton amour De ma suffisance De mon arrogance …

Mais dans ta fuite N’avais-tu pas pris la symbolique précaution de débrancher le congélateur Malgré mon désir de tout effacer La neige Si bien accordée à ton teint Fille du Nord Me rend plus sensible ton absence Elle tombe sur Créteil En petits flocons insignifiants Insignifiants comme les bribes de souvenirs Disparaissant un à un de ma mémoire

Barbara Aimes-moi J’ai tout compris Et j’espère . . . Tu es un être humain Pas une encyclopédie Tu vis, souffres et aimes Je suis un con …

Te rappelles-tu pourtant Fille du Nord Le premier tapis blanc Déroulé par les cieux pour nos rencontres hivernales Avivant la flamme de mes regards amoureux

Barbara Aimes-moi J’ai tout compris Et je t’attends . . . Viens Le jour que tu auras choisi Seule Je te serrerai longuement dans mes bras Comme si c’était la première fois Et Pour la vie entière Nous retournerons enlacés Hôtel Lafortune Le bien nommé Chambre numéro trois Rue de Lévis

La neige Ton élément Eclatante sous le soleil Mais glacée comme toi Tu y es retournée Seule Sans moi J’ai choisi Pour redonner sens à ma vie Un retour à mes sources En Algérie A Cherchell Où j’ai Il y a presque un génération déjà Arraché la tunique de Nessus de l’adolescence Et forgé mes certitudes d’homme Fort de son corps Sûr de ses choix

Les Batignolles 10 janvier 79

Je n’y ai puisé que des doutes Mais aussi l’évidence d’une vie nouvelle à conquérir Et de mille passions naissantes à assouvir Il neige sur Créteil . . .

Créteil 5 janvier 1979 •3•

Bribes I

L’hirondelle

Le petit navire Pour Martine

Pour Suzanne S.

Chaque navire Disent les marins Reçoit la vague qu’il mérite

Mon hirondelle à moi Pour mon printemps à moi Ce fut cette longue fille blonde Joggant Indifférente Boulevard des Batignolles Dans ce matin ensoleillé d’hiver En pantalon de soie rouge Et baskets légères

Celle que j’ai reçu Et que désormais vous connaissez tous M’a roulé bord sur bord Elle fut si haute et si brutal Que pendant des mois J’en ai perdu mon cap

C’était l’avant-coureur du printemps Le messager de l’éternel recommencement Le signe évident que tout renaît

Alors A votre avis Quelle était la taille du navire Et l’âge du capitaine . . .

D’où venait-elle Où allait-elle Nulle part et partout Comme la prochaine fille Qui te guette au coin du cœur

Rocquencourt 16 janvier 1980

London Tavern 24 janvier 1979

•4•

Bribes I

La marelle diabolique

Feu d’artifice

Pour Denise

Pour Françoise T.

Comment te dire le bonheur d’être à toi Comment te dire l’attente de ton retour Comment te dire l’angoisse de la bêtise du monde Toujours menaçante aux amants

Créer Maître mot d’une existence sinon désespérée Créer dans l’instant ou la durée Dans le bonheur ou du fond de l’angoisse Dans la pierre ou sur le sable Dans l’écume d’un sillage Dans la trajectoire d’une moto Dans l’impact fulgurant des tôles écrasées

Comment te dire tout ce que j’ai éprouvé Depuis le jour de notre rencontre Comment Dans quelques mots Enfermer le torrent d’images éclaboussant mes yeux

Créer par les rêves immenses d’un cerveau débridé Créer par son sang, ses larmes ou sa sueur

Comment rallumer un à un Dans le clair-obscur de mes souvenirs Ces brasiers qui me consumèrent

Mais Par-dessus tout

Comment faire ressurgir L’éclat de ton sourire Perçant ma nuit à chaque retrouvailles

Engendrer dans une étincelle d’amour Le jaillissement de milliards de soleils

Comment te dire je t’aime Après te l’avoir si souvent et si souvent répété Comment te faire comprendre Que Pour l’éternité Jean-Paul rime avec Denise Et que Jean-Paul sans Denise C’est une mer sans eau Un désert sans sable Un enfant sans sourire

Paris 28 juillet 1980

Comment pousser plus loin Le palet de notre passion Et par quelle marelle diabolique Terre, Ciel, Enfer Devrais-je encore passer Pour épuiser tout le reste Sans perdre l’essentiel Ton Amour Zermatt Août 1980 •5•

Bribes I Les moteurs Ah les moteurs !

Prolégomènes d’un art poétique

J’ai idolâtré les moteurs

Collages

Les beaux moteurs acérés Animant la divine machine A flasher les pays A vriller les boyaux La grande Bécane cosmique Narcissique et orgasmique Chevauchée des nuits et des jours Sur les fleuves impassibles des routes bitumineuses Des années-lumière Des années Lula Des années lanlaires …

Pour Denise

J’aime l’orgue de barbarie J’aime l’orgie de Barbara Quand Barbara paraît Quand Barbara sourit Quand Barbara s’élance Vers celui qui l'aime Vers ceux à qui l’on dit toujours “tu” Quand on aime

La grande Odyssée Des mots, des odeurs, des douleurs Pêle-mêle projetés

J’aime son visage mouillé Son Cri Quelle connerie la guerre !

J’ai aimé la traversée épique De ces espaces infinis …

Même ces chiens crevés Vers l’Ouest dont il nous reste ...

Ma chambre L’Europe Ton corps … Dont le centre est partout, la circonférence nulle part …

La musique de Kosma Cette musette cosmique J’aime la musique La muse L’âme qui s’amuse

J’ai rêvé des nuits pleine aux mystères mystiques Sans songer que les pieds lumineux des Maries Pussent forcer le doute de mes élans poussifs

La belle âme d’Hugo Drue, paillarde, réaliste Mais tellement poëtique

J’ai pris ma part aux banquets des vivants Dévoré les petits fours de la sotte vanité Vidé la coupe de l’ivresse des corps Vomi sur la nappe trop blanche de la trahison Puis dressé pour d’autres convives La table du festin

J’aime les tiques qui toquent les chiens Les chattes qui lapent le lait des petits chiens J’aime lécher la chatte des jolies rousses C’est Lou qu’on la nommait … Ces jolies filles aux cuisses ouvertes Sur des toisons moutonnant Jusque sur l’emplanture … J’aime la verdure J’aime la verdeur La moiteur …

Et maintenant J’attends Patiemment Barbara … Les Batignolles 22 décembre 1980 •6•

Bribes I

L’amour violé

Rais de lumière

Pour Denise

Pour Nika S. Ne plonge ni dans le passé ni dans l'avenir. Que ta pensée ne dépasse pas le moment! C'est le secret de la paix. Omar Khâyyam.

Corps de marbre Cœur glacé Ame blessée Sanglots rentrés Dents qui claquent C’est le néant

Subvertir le réel banalisé Aseptisé et insidieusement dévorant Par la SITUATION sciemment construite Et dérobée à l’ennui

Tout s’écroule Je suis seule Pourquoi ment-il

Dans le clair de soleil D’une chambre d’amour aux persiennes micloses Dans le sourire échangé Dans l’orgasme cosmique Qui roule comme la vague

Sans répit C’est fini Je n’en peux plus

La faire surgir du bric et du broc Avec des moyens si dérisoires Parfois même d’un instant si bref Que tu es seul à la reconnaître

Alchimie des sentiments

Et Dans la parfaite conscience de ta finitude En jouir A perdre vie

Pour Françoise T.

Insupportable le bonheur Dont on n'est pas la cause

Paris 30 novembre 1980

Intolérable l'absence énigmatique De celle que l'on attend et ne vient Ecœurant le flot des mensonges Dont l'écume nous étouffe Brutal le torrent de l'amour mué en haine Acre le remord d'avoir détruit Là où l'on croyait bâtir Zermatt 23 août 1981

•7•

Bribes I

Belle, Belle, Belle, ...

Le téléphone triste

Pour Denise

Il n’y a plus d’amour Au numéro que vous n’avez pas composé Un jour Un jour seulement être belle M’as-tu dit

Nous vous prions de ne plus refaire votre appel

Quelle tristesse

Le numéro de mon cœur est en dérangement

L’être Le porter et ne le pas savoir Ne pas le sentir dans le regard De celui qui te boit Depuis le jour où tu l’as enfanté

De lassitude J’ai laissé tomber le combiné de mes sentiments Coupé le fil de l’amitié Brouillé le cadran du plaisir Et Bloqué la sonnerie de l’espoir

Belles tes hanches qui m’attirent si fort Beaux tes seins, ta bouche, tes yeux Beau l’instant qui passe avec toi Beau le métro dans toute sa laideur Quand tu te serres près de moi

Il n’y a plus . . . Les Batignolles 17 octobre 1980

Splendide

L'art de vivre ou l'éternelle jeunesse

Paris Toi et moi Indéfiniment réunis

Pour Françoise G. Les Batignolles Mars 1979

Je t'aime, moi non plus ... et ne souhaitais pas qu'il en fut ainsi. Cœur meurtri, je renoue avec la douleur familière. Sans espoir de ne jamais l'éviter, je me vautre un court moment dans son ventre accueillant... Repartir, régénéré, vers d'autres rencontres aux douteuses issues. 5 avril 1985

•8•

Bribes I

Vive la Pologne, Monsieur

Mode d’emploi

Pour Nika S.

A Sylviane de B.

J’ai écouté une polonaise Dont la langue familière Faisait resurgir un passé très ancien Probable réminiscence d’une vie antérieure

Sans ambition Sans désir de paraître Ne courant après rien Je déguste ma vie à petite lampées

J’ai suivi une polonaise et j’ai beaucoup voyagé

Mais un pavé parfois Lancé par une gamine De l’onde la plus tranquille Trouble le repos

Sa pensée vagabonde A déroulé pour moi d’exotiques paysages Des espaces glacés de l’Ontario Aux nuées de kangourous Echappés L’instant d’un mirage De leur lointain continent

Poésie Art des feignants Tu me plais et me soulages Tu m’offres de transcrire avec tes mots La musiquette lancinante Triste ou gaie selon les jours Que je fredonne Que je chantonne Que je mâchonne

J’ai bu aux yeux d’une polonaise Et me suis baigné dans une mer très douce Où le ciel Accordé aux vagues Brassait indéfiniment mon désir J’ai aimé une polonaise Si spontanément Que j’en fus tout étonné et ravi

En poursuivant d’un air distant Les chemins de mon destin

.........

Paris la Défense 20 novembre 1980

Une polonaise m’a laissé choir Si vite et de si haut Qu’il me fallut une bonne semaine Pour guérir mon pauvre petit cœur Brisé en mille morceaux Zermatt 13 août 1980

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