CADOUX Damien GOHIER Malo POINT Benoît
Le lundi 5 mars 2007
Réflexion sur la réalité de la prison dans le tissu urbain mitoyen
Anthropologie Urbaine
Pour introduire cette réflexion sur la place de la prison dans la société et plus particulièrement dans la ville, on pourrait citer une phrase que Winston Churchill a dit un jour « montrez-moi vos prisons et je vous dirai quel genre de gouvernement vous avez ». Cette citation très célèbre invite les sociétés démocratiques à réfléchir sur une meilleure intégration du système carcéral dans la société mais aussi de la prison dans son environnement spatial, les deux étant fortement liés. Pour notre étude, un regard extérieur sur la prison nous a semblé être plus approprié qu’une analyse de la vie carcérale puisque l’anthropologie urbaine est une discipline avant tout fondée sur l’importance accordée aux relations de la société avec la ville.
Université de Marne-La-Vallée Cité Descartes 77420 Champs-sur-Marne L3 STPI Génie Urbain
REMERCIEMENTS
Nous remercions les commerçants qui ont acceptés de servir de relais pour récupérer les questionnaires, les services de la mairie de Fresnes qui nous ont généreusement donnés les cartes que nous recherchions, ainsi que le livre des associations de la commune. Nous tenons à remercier tout particulièrement les personnes qui ont accepté de répondre à nos questionnaires et celles qui se sont soumises avec générosité au jeu des entretiens.
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TABLE DES MATIERES
I.
Problématique et méthode ____________________________________________ 4 A.
Contexte d’étude : la place de la prison dans la société française _________________4 1. 2. 3.
B.
Questionnement personnel _______________________________________________9 1. 2. 3.
C.
Objectifs de l’étude ____________________________________________________________ 9 Prénotions __________________________________________________________________ 10 Problématique _______________________________________________________________ 11
Conception de l'enquête ________________________________________________ 11 1. 2. 3.
II.
La situation française __________________________________________________________ 4 L’histoire de l’enfermement et du système carcéral français ___________________________ 5 Les objectifs du système et les questions essentielles ________________________________ 6
Schéma d'intelligibilité ________________________________________________________ 11 Champs d'étude _____________________________________________________________ 11 Méthodologie _______________________________________________________________ 12
Présentation, enquête et résultats _____________________________________ 13 A.
Présentation du lieu d'étude _____________________________________________ 13 1. 2. 3.
B.
Histoire de la prison __________________________________________________________ 13 Caractéristiques du bâti _______________________________________________________ 14 Caractéristiques sociales _______________________________________________________ 16
Commentaires sur la mise en oeuvre ______________________________________ 16 1. 2. 3.
C.
Recueil de données ___________________________________________________________ 16 Questionnaire _______________________________________________________________ 16 Entretiens __________________________________________________________________ 18
Présentation des résultats et interprétation ________________________________ 19 1. 2. 3.
Questionnaires ______________________________________________________________ 19 Entretiens __________________________________________________________________ 20 Interprétation _______________________________________________________________ 23
III. CONCLUSION GENERALE _____________________________________________ 24 A. En quoi les données recueillies ont-elles modifiées la perception initiale et nos prénotions ? _______________________________________________________________ 24 1. 2. 3.
B.
La vision du tissu urbain autour de la prison _______________________________________ 24 Les gênes ___________________________________________________________________ 25 La qualité de vie______________________________________________________________ 25
Limites techniques de la mise en œuvre____________________________________ 27 1. 2. 3.
C.
Le questionnaire, les entretiens et les recherches __________________________________ 27 Une démarche couplée questionnaire / porte-à-porte / entretien _____________________ 28 Une approche comparative ____________________________________________________ 28
Elargissement du sujet__________________________________________________ 28 1. 2. 3.
Architecture de la prison_______________________________________________________ 28 Repenser l’urbanisme _________________________________________________________ 29 Accepter la prison et intégrer le personnel pénitentiaire à la vie communale _____________ 29
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INTRODUCTION
A l’heure où la France est fortement critiquée par l’Union Européenne pour ce qui est de l’état de ses prisons et du niveau de confort qu’elles offrent à ses détenus, le propos de l’ex chef du gouvernement britannique lors de la seconde guerre mondiale ressurgit avec vigueur. L’important balayage médiatique autour des centres pénitentiaires a attiré notre attention, et ainsi nous avons choisi de nous intéresser aux relations entretenues entre les prisons et leur environnement urbain proche. Dans cette étude, inscrite dans notre cours d’anthropologie urbaine, il ne s’agira pas d’étudier la place de la prison et de l’incarcération dans la société, ni même l’état actuel du système carcéral français mais il est évident que nous serons obligés, ne serait-ce que brièvement, d’y faire référence, sans quoi nous ne pourrions totalement cerner tous les aspects qui gravitent autour de notre recherche. Dans la mesure où l’on se place dans une enquête de sociologie urbaine, il s’agira pour nous, non pas de regarder la prison de l’intérieur mais plutôt de l’extérieur et à partir de là, d’essayer d’évaluer l’impact que peut avoir un centre pénitentiaire sur le tissu social et urbain mitoyen. Dans une première partie nous présenterons la problématique et la méthode de notre enquête. Nous aborderons d’abord des notions plutôt théoriques sur la place de la prison dans une société démocratique comme la France, puis nous introduirons les questions fondamentales qui se posent sur les relations qui existent entre la ville et la prison. Dans un deuxième temps, nous parlerons de l’étude que nous avons menée sur le centre pénitentiaire de Fresnes, une des plus grandes prisons françaises. L’objet est d’établir les relations qui lient la prison à la ville. Finalement nous ferons une synthèse des résultats de l’enquête et nous nous interrogerons sur la cohérence de la méthode que nous avons employée et sur les aspects à approfondir pour une meilleure compréhension du sujet.
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I.
Problématique et méthode A.
Contexte d’étude : la place de la prison dans la société française 1.
La situation française
LE PORTRAIT Même si l’objectif de cette étude ne se trouve pas dans l’analyse du système carcéral français, on ne peut prétendre s’intéresser à des questions qui lui sont rattachées si on ne dresse pas un minimum le tableau de ce dernier. On ne peut pas comprendre comment la ville va interagir avec l’établissement pénitentiaire si on n’a aucune idée de son fonctionnement et de sa réalité. Quelques chiffres, tout d’abord, pour dresser un panorama très général du système carcéral actuel : - la part des femmes dans la population carcérale est de l’ordre de 3.7 %, soit environ 96.3 % d’hommes, - un taux de détention en France de l’ordre de 85 pour 100 000 habitants contre 702 aux Etats-Unis (la population carcérale américaine étant un cas à part car ayant quadruplée en 30 ans), - un tiers des personnes incarcérées sont des prévenus (personnes en attente d’un jugement), les deux autres tiers sont des condamnés (particularité française), - 31 % des condamnés purgent une peine inférieure à un an, 32 % une peine comprise entre un et cinq ans et 37 % une peine supérieure à cinq ans, - les principaux chefs d’accusation sont les agressions sexuelles et les viols (22.2 %), les vols simples ou aggravés (20.3 %), les infractions à la législation sur les produits stupéfiants (12.7 %) et les homicides volontaires (9 %)1. Au 1er décembre 1999, le taux moyen d’occupation des prisons françaises était de 119 %. Plus de la moitié (51%) des établissements pénitentiaires avaient une densité de population supérieure à 100 %, soit plus de prisonniers que de places disponibles, répartis de la manière suivante : - 31 % des prisons se situaient entre un taux d’occupation de 100 et 150 % - 13 % entre 150 et 200 % - 7 % supérieur à 200 % L’ACTUALITE La France est un très mauvais élève en Europe. Afin de retrouver son rang, d’éviter des sanctions plus importantes de la part de la communauté internationale et par voie de conséquence dans le but de redorer quelque peu son blason, le gouvernement, via son exministre de la justice, Dominique Perben, a proposé une loi, adoptée en 2002, qui prévoit la construction de 7 000 places supplémentaires ainsi que la rénovation de 4 000 places existantes qui ne répondent pas aux objectifs de confort demandés par l’Union Européenne. Cette politique est en cours de réalisation avec la construction de plusieurs établissements en France comme à Bourg-en-Bresse (01), Mont-de-Marsan (40), Rennes et Vezin-le-coquet (35),… 1
Données recueillies sur Encarta 2005.
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Maintenant que nous situons mieux ce qu’il en est de la position du système carcéral français, ses difficultés aussi bien quantitatives que qualitatives d’accueil, nous allons tenter de comprendre comment, à travers le temps, l’idée de l’enfermement s’est imposée à notre société. Le but, ici, est de comprendre pourquoi ces prisons existent, cet éclairage est essentiel à une bonne compréhension de l’étude menée par la suite puisque la prison, en tant qu’institution et matérialité de l’espace urbain, constitue l’objet vers lequel tous les projecteurs seront tournés. 2.
L’histoire de l’enfermement et du système carcéral français
DURANT L’ANTIQUITE Avant de parler du système français, intéressons-nous à la manière dont les romains et les grecs à l’antiquité s’occupaient des indésirables, de ceux qui avaient une certaine déviance par rapport à la norme. A cette époque on préférait la privation des droits civiques ou bien l’exil à l’enfermement pour punir un citoyen qui avait été considéré dangereux pour l’ordre public ou les bonnes mœurs. Les prisons existaient tout de même mais étaient principalement destinées aux prisonniers politiques et aux grands criminels. A L’EPOQUE MOYENAGEUSE À l’époque féodale, les puissances royales et seigneuriales disposaient également de lieux d’isolement. Les premiers ont pour objectif l’oubli social du détenu, comme c’est le cas des donjons et des oubliettes. Les cachots quant à eux, bas et étroits, sont l’antichambre de la torture. La justice est alors royale, ecclésiastique ou seigneuriale et par voie de conséquence totalement arbitraire. Là encore, la prison n’est réservée qu’aux opposants politiques et aux grands criminels même si on commence déjà à incarcérer les personnes accusées en attente de leur condamnation (par exemple, les séjours respectifs de Denis Diderot et du marquis de Sade à la Bastille et au château de Vincennes). LE SIECLE DES LUMIERES ET LA NAISSANCE DE LA REPUBLIQUE La révolution marque une nouvelle approche dans les objectifs qui sont donnés à la prison. Les philosophes des Lumières sont très critiques sur les pratiques punitives (les supplices) exhibées à la foule durant l’ancien régime. Lors de la Révolution, ce sont les élites qui aboliront ces formes de barbarie même s’ils opteront pour une autre mise en scène de la punition à savoir la guillotine. La population, quant à elle, reste attachée à ces spectacles et on rapporte souvent que, lors de la première utilisation de la guillotine à Paris, le peuple attroupé s’est mis à crier « rendez-nous nos supplices !2 ». L’exaltation envers les supplices comme jadis envers les combats de gladiateurs et plus récemment les travaux de Stanley Milgram montrent à quel point l’être humain peut être traversé de violence et de cruauté, comme si cela faisait parti intégrale de sa nature. Il faut attendre Jeremy Bentham et son fameux panoptique pour qu’une nouvelle idée de la justice naisse, ce dernier propose une nouvelle prison où les cellules convergeraient toutes vers une unique salle de surveillance. La prison est devenue « la peine idéal-typique des démocraties2 » car la liberté était considérée depuis la Révolution comme le bien le plus précieux
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de la société, sa privation devient donc « la sanction la plus cruellement ressentie par le citoyen qu’elle frappera2 ». Après avoir passé en revue, très synthétiquement, les différentes étapes de la construction du système carcéral français (mais celui-ci vaut aussi pour un grand nombre de démocraties en place), nous allons aborder avec un peu plus de détails ce que la législation française entend défendre à travers son système pénitentiaire, autrement dit, les objectifs qu’elle assigne à ce dernier. 3.
Les objectifs du système et les questions essentielles
L’ESPRIT REVOLUTIONNAIRE Nous avons auparavant développé les processus relatifs à la construction du système d’enfermement mais nous n’avons pas vraiment abordé les questions relatives au pourquoi, qui ni comment punir. Dans un rapport établit par la Commission extra-municipale du Respect des Droits de Lyon en 2000 à propos des prisons lyonnaises, on peut y lire un raisonnement qui mérite d’être mentionné. En effet, ces auteurs énoncent, avec justesse, une réponse à ces trois questions. Pour eux, « la société a besoin de marquer sa réprobation lorsqu'un de ses membres contrevient aux règles de respect d'autrui et de ses biens. Elle doit pouvoir se protéger des comportements qui mettent en danger le bien public et la sécurité des personnes. Les victimes, enfin, doivent pouvoir obtenir réparation des préjudices subis. Le souci de protection s'accompagne de la nécessité d'obtenir de la part du délinquant [une volonté de changement] qui lui permettra de reprendre sa place au sein de la collectivité. Par conséquent l'objectif de réinsertion sociale doit être inscrit dans la peine prononcée3 ». De plus, cet écrit souligne l’esprit de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789, texte fondateur de notre Constitution, qui parle de « peines strictement et évidemment nécessaires3 », pour bien marquer que la France souhaite sortir des peines inhumaines et cruelles de l’ancien régime. LES OBJECTIFS REAFFIRMES RECEMMENT Pour connaître le rôle actuel du système pénitentiaire français, il faut aller voir l’article premier de la loi de juin 1987 qui le définit comme un service public participant à l’exécution des sentences pénales et au maintien de la sécurité publique. Mais, outre cet aspect sécuritaire, cet article réaffirme la notion de réinsertion sociale des personnes. On a donc deux objectifs, sanctionner l’individu et lui donner toutes les chances de repartir dans la vie après avoir purgé sa peine dans le but d’éviter toute récidive ; récidive qui remettrait en cause l’efficacité du système. L’analyse de cet article est très intéressante dans le sens où deux objectifs sont énoncés sans vraiment analyser les difficultés qui pourraient y avoir à répondre aux deux en même temps. Cette erreur est fondamentale et permet de mieux comprendre les difficultés actuelles du système et surtout l’enjeu majeur qui devra être analysé par les pouvoirs publics, mais avant tout par les citoyens en tant qu’acteur de la démocratie : comment concilier sécurité et réinsertion. Ainsi « si on associe forcément à l’objectif sécuritaire la vision d’une prison étanche, la notion de 2
Anne-Marie Marchetti avec la collaboration de Philippe Combessie, « la prison dans la Cité », Desclée de Brouwer, 1996, p.16 3 Commission extra-municipale du Respect des Droits, « Prisons de Lyon, regards et réflexions », juin 2000, p. 10
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réinsertion évoque, quant à elle, les idées de porosité et d’échanges. D’un côté donc sécurité et fermeture, de l’autre, réinsertion et ouverture4 ». Il semble que le modèle actuel de la prison traditionnelle ne soit pas en mesure de répondre aux deux objectifs et donc que d’autres systèmes doivent être expérimentés puis plus rigoureusement analysés par les chercheurs afin de garantir le respect total de notre législation. De nouvelles formes de pénalisation sont d’ores et déjà en place sans qu’il y ait un retour d’expérience suffisant pour être généralisées, on peut penser à la semi-liberté, le bracelet électronique, les placements extérieurs ou encore les Jeunes en Equipe de Travail5. Afin de continuer sur cette première partie plutôt introductive mais néanmoins indispensable, il serait bon, à l’heure où il semble que les pouvoirs publics aient pris le sujet enfin au sérieux (du moins en ayant déjà fait l’effort de reconnaître notre retard en la matière), de réfléchir aux solutions qui pourraient être trouvées quant à la question de la réinsertion des prisonniers. Dans la mesure où ce mot signifie « retour à la vie sociale6 », il paraît légitime de se poser la question de l’insertion des prisons dans le tissu urbain, les deux approches semblant fortement liées. LA PLACE DE LA PRISON DANS LA VILLE La place de la prison est dans la ville, avant tout parce que la prison est née de l’urbanisation. Au moyen âge, les villages hébergeaient la majeure partie de la population et le contrôle social pouvait s’exercer au plus prêt des habitants. Les comportements marginaux pouvaient ainsi être facilement détectés et les problèmes pouvaient être résolus localement. Les fauteurs de trouble pouvaient être chassés du territoire ou châtiés sur place. Par la suite, avec le développement du commerce et des industries, les villes prennent plus d’importance, se peuplent de paysans entrainant « une diminution du maillage d’interconnaissance et la création de corps de professionnels spécialisés dans la contrôle et le maintien de l’ordre, ainsi que le soutien aux personnes démunies7». Trois sortes de bâtiments en résultent : - salles d’attente et parfois de torture, adjacentes aux tribunaux, situées en plein cœur des villes, - hôpitaux généraux et autres lieux destinés à occuper et prendre en charge les vagabonds et les mendiants (hospices de Beaune par exemple) situés dans les faubourgs, - les bastilles où étaient enfermés tous ceux qui n’avaient pas la sympathie du roi, se situaient dans les faubourgs, voir complètement isolées sur des îles (château d’If dans la rade de Marseille). Aussi, au moyen-âge, on pouvait construire les prisons dans les quartiers où la violence et les problèmes étaient monnaie courante, ceci afin de bénéficier des mesures de sécurité de ces infrastructures pour rendre les lieux plus sécurisants. Peu à peu, les mentalités ont changé et depuis le milieu du 19ème siècle jusqu’à récemment, les prisons étaient la plupart du temps rejetées vers les campagnes.
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Anne-Marie Marchetti avec la collaboration de Philippe Combessie, « la prison dans la Cité », Desclée de Brouwer, 1996, p. 9 5 Pour plus d’informations, voir Anne-Marie Marchetti avec la collaboration de Philippe Combessie, « la prison dans la Cité », Desclée de Brouwer, 1996, p. 198, 199 et 202 6 Définition empruntée au dictionnaire d’Encarta 2005 7 Philippe Combessie, « La ville et la prison, une troublante cohabitation », article paru dans la revue Projet, n° 269, 2002, pp.70-76.
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Ce phénomène, appelé « relégation géographique et sociale des prisons8 » vise à tenir les prisons éloignées des villes et plus particulièrement des centres urbains. Cela se traduit par des stratégies au niveau local et national pour « éviter à certains lieux la stigmatisation que produit la présence d’une prison8 » en reléguant les centres pénitentiaires dans « des lieux de moindre visibilité sociale8 ». Ainsi, depuis bien longtemps, face au développement des villes et plus récemment à l’embourgeoisement des centres urbains, les prisons sont « de façon systématique, écartées des secteurs les plus nobles. Les anciennes sont détruites ou conservées et reçoivent d’autres affectations plus dignes de la qualité de l’environnement et moins stigmatisantes8 » comme cela fut le cas avec l’ancienne prison du centre de Strasbourg qui a perdu sa fonction initiale pour devenir l’Ecole Nationale d’Administration. « A tous les niveaux on rejette les prisons. On les a éloignées de Paris, des lieux touristiques ou chargés d’histoire, le conseil général du chef lieu de canton, la mairie du centre ville …9 ». Cette philosophie, se retrouve notamment dans le programme 13 000, lancé en 1987 et qui organise la construction d’une vingtaine de prisons nouvelles toutes « éloignées de Paris et de tous centres urbains8 ». Cette logique de relégation sociale est renforcée par une logique économique car après l’annonce du programme, beaucoup de communes se sont portées volontaires pour accueillir une prison. Certaines grandes villes ont encouragé leurs voisines rurales, par des compensations financières, à proposer des terrains (car elles voyaient l’occasion de supprimer leurs anciennes prisons souvent vétustes). Face à l’engouement grandissant des petites communes pour le projet 13 000, il fut pris la décision que « si les communes en veulent, elles devront donner leurs terrains8 ». Concernant notre sujet d’étude, à Fresnes, la position de la prison (implantée initialement à l’écart de la ville de Fresnes-lès-Rungis, coupée de tous les centres administratifs) résulte d’une opération de relégation à la périphérie parisienne. Comme le mentionne « un document des autorités des départements de la Seine de 18858 », inscrivant le projet dans « un programme d’éloignement des prisons de la capitale8 », Fresnes répondait à l’époque de sa construction au critère principal d’implantation, à savoir « un site isolé, dans une région où ne se porte pas la villégiature […] et en dehors du panorama de lieu saint8 ». Depuis cette époque, les mentalités ont encore évolué et l’implantation des prisons est devenue un sujet sensible, source de multiples préoccupations pour les autorités. Ainsi, l’implantation de prisons est sujette à l’hostilité des responsables politiques locaux, de la population vivant aux alentours des futurs sites concernés, comme se fut le cas pour l’ouverture en 2004 d’un centre pénitentiaire dans la périphérie de Meaux (77). Dans certaines villes, cette opposition s’est traduite par exemple par la contestation « de plusieurs centaines de défenseurs de l’environnement qui ont attiré l’intérêt du Président de la République en fonction9 » ou par « l’enchaînement au monument aux morts de membres du conseil municipal9 ». L’installation d’un centre pénitentiaire est également source de nombreux problèmes d’ordre administratif nous semblant de notre point de vue secondaires mais pris au sérieux par les élus. Nous citerons par exemple le litige induit pour le choix du nom de l’établissement. Ainsi, « à Joux la Ville, le maire a émis deux souhaits, que le mot détention n’apparaissent 8
Philippe Combessie, « Prisons des villes et des campagnes. Etude d’écologie sociale », Editions de l’Atelier – Editions ouvrières, 1996, p. 19 et 20 8 Philippe Combessie, « Prisons des villes et des campagnes. Etude d’écologie sociale », Editions de l’Atelier – Editions ouvrières, 1996, p. 20, 21, 22, 24, 25, 27 et 42. 9 Claude Veil et Dominique Lhuilier, « La prison en changement », Eres, 2000
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pas ou qu’il soit associé au mot réinsertion8 ». A Blois d’Arcy la maison d’arrêt s’appelle maison d’arrêt des Yvelines et celles de Fresnes, portaient comme nom lors de l’inauguration le 19 juillet 1898, « Les prisons départementales de la Seine à Fresnes-lès-Rungis ». A l’extrême, il fut même proposé dans une commune pour éviter le stigmate carcéral « de modifier le cadastre pour que la prison dépende d’une autre commune et change de nom8 » ou « de modifier la dénomination de la commune pour atténuer le tort moral8 ». L’autre problème des villes à l’égard des prisons concerne le consensus lié à la mort des détenus, en effet « quand les détenus meurent en détention, que la famille ne se préoccupe pas de la sépulture du défunts, ce sont les autorités du lieu du décès qui la prennent en charge8 ». A Fresnes les autorités usant d’arguments symboliques et hygiéniques ont obtenu la mise en place d’un cimetière spécial affecté à l’inhumation des prisonniers. De plus en plus de voies s’élèvent en faveur de la construction de nouvelles prisons en zone urbaine. C’est le cas par exemple des familles de détenus, et des syndicats de personnel pénitentiaire, les premiers afin de pouvoir rendre visite à leurs proches incarcérés sans trop dépenser d’argent, et en bénéficiant des facilités des transports en commun, plus développés dans les villes qu’en rase campagne, les seconds insistent sur les facilités de scolarisation pour leurs enfants, et d’emplois pour leurs conjoints 10. Il s’avère que les uns et les autres ont été un peu entendus : les programmes de construction des dernières années et actuels sont majoritairement dans des zones urbanisées. Après avoir étudié le contexte dans lequel s’inscrit notre étude, nous allons maintenant présenter les questions que l’on se pose ainsi que notre démarche afin de mieux cerner ce sujet quelque peu délaissé par la société. B.
Questionnement personnel 1.
Objectifs de l’étude
L'objet de notre étude est d'analyser les relations établies entre la ville et les prisons. Le terme de « ville » sera pris au sens large, c'est-à-dire en prenant en compte aussi bien la structure physique (morphologie du bâti, des voiries,...) qu'économique (prix du foncier, type d'activité rencontrée,...) et sociale (relations entre habitants, trajectoires résidentielles, mobilité, perception de l'espace...). Le terme prison regroupe, quant à lui, les notions d'architecture, d'insertion urbanistique mais aussi les flux engendrés par l'activité (personnel pénitentiaire, visiteurs, détenus,...) ainsi que des notions plus abstraite comme l’image renvoyée à la société (rumeurs, vision générale, préjugés). Un intérêt secondaire relatif à cette étude réside dans le fait qu'aucun des membres du groupe n'est sensibilisé à ce sujet. Cela constituera donc aussi un enrichissement personnel, en dehors du cadre scolaire, et nous apportera une vision concrète de l'incidence d'un tel établissement sur la ville. Étant donné le temps qu'il nous est imparti et l'éloignement de notre lieu d'enquête, il nous a fallu opter pour une démarche plutôt sociologique que purement
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Philippe Combessie, « Prisons des villes et des campagnes. Etude d’écologie sociale », Editions de l’Atelier – Editions ouvrières, 1996, p. 83. 10 Myriam Ezratty-Bader, « Architecture et prisons : rapport présenté à Monsieur le garde des Sceaux par la commission d’étude », ronéo, Paris, Direction de l’administration pénitentiaire, 1985, pp. 84-85.
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anthropologique, l’immersion et l’observation participante n’étant pas réalisable dans ces conditions. Dans notre note d’engagement, nous avions choisi d’étudier deux types de population : une vivant à côté d’un centre pénitentiaire, la seconde dans une zone concernée par l’implantation prochaine d’une prison. L’objectif était d’établir une relation entre prénotions et réalité, c'est-à-dire entre les préjugés, les représentations que l’on a de la prison et les impacts concrets d’une prison sur son environnement. Nous voulions nous baser sur les prisons de Fresnes et de la Santé, comparer et regrouper les résultats des enquêtes sur les deux sites. Faute de moyens (coût des frais de transport, problème d’impression des questionnaires en grande quantité,…), de temps et compte tenu de la complexité de l’étude (première étude anthropologique), nous nous sommes recentrés sur une seule prison, celle de Fresnes. Nous avons privilégié une approche qualitative plutôt que quantitative. La prison de Fresnes, qui était initialement située en dehors de la ville, sur un coteau presque inhabité et qui est maintenant située dans l’agglomération, entourée par la ville et de nombreuses infrastructures, va nous permettre de savoir comment la ville a intégré un tel établissement et comment elle fonctionne dans sa proximité immédiate. 2.
Prénotions
Comme nous l’avons dit aucun de nous trois et aucune de nos connaissance n’habite prêt d’une prison. Comme tout le monde nous avons bien sûr des prénotions. Nous les avons acquises par nos connaissances personnelles, pendant nos études, en regardant les séries télévisées et des films essentiellement (La grande évasion, Alcatraz, Prison break pour ne citer qu’eux). Pour la bonne réalisation d’une étude de type anthropologique, il est important de ne pas prendre parti et de ne pas émettre de jugement personnel afin de rester neutre. Toutefois, nous émettons inévitablement quelques hypothèses de travail auxquelles nous espérons avoir des réponses lors de l’étude sur le terrain. Nous prendrons le soin, bien sûr, que ces préjugés n’interfèrent pas dans nos jugements et nos démarches. Parmi, nos hypothèses nous pensons que la proximité d’une prison engendre de façon inévitable des gênes (de type sonore, visuelle et peut être olfactive…) et des modifications sur le tissu urbain (position des bâtiments, intégration de la prison, mouvements générés….). Ainsi, nous espérons comprendre comment les riverains, venus après la création de la maison d’arrêt se sont acclimatés à la présence d’un tel édifice à proximité et quels sont les efforts fournis pour rendre cet espace (au premier abord non attractif) plus attrayant. De plus, nous pensons trouver un environnement très homogène autour de la prison de Fresnes qui est probablement séparée des bâtiments à proximité par une zone vierge, sorte de « No man’s land ». Ainsi, nous allons sur le terrain avec pour hypothèse que bien que la maison d’arrêt de Fresnes soit aujourd’hui entourée par la ville, elle reste toutefois séparée de celle-ci, en rupture avec son environnement mitoyen.
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3.
Problématique
« La ville étant devenu un milieu de vie dominant, tout ce qui se passe dans la ville relève de la sociologie urbaine11 », la prison étant maintenant parfaitement insérée dans la commune de Fresnes, son étude relève donc de la sociologie urbaine. Notre étude portera donc sur l’analyse des rapports entre la prison et son environnement immédiat. Ainsi nous posons pour problématique : Quelles sont les conséquences sociologiques de la présence d’une prison urbaine avec son environnement avoisinant ? C.
Conception de l'enquête 1.
Schéma d'intelligibilité
Cette étude s’intéressant aux différentes relations qui unissent la prison et la ville, il va de soit que notre entrée d’étude est ici l’espace. Nous ne nous intéressons pas à un groupe social en particulier mais bien aux différentes populations qui occupent, de manière transitoire ou permanente, l’aire d’étude (voir paragraphe suivant). Nous n’étudions pas non plus un système d’organisation spécifique mais les différents systèmes présents sur notre site, systèmes pouvant répondre à des logiques différentes, l’étude sera aussi de cerner les différents enjeux de ces logiques. Enfin, nous ne nous centrerons pas sur un processus mais tenterons d’analyser tous les processus remarquables sur notre espace comme ceux de gentrification ou paupérisation des lieux, de rejet, d’indifférence ou bien d’acquiescement du paysage urbain et des activités spécifiques au centre pénitentiaire… L’entrée espace, ici la prison de Fresnes, est comme son nom l’indique un lieu par lequel on s’introduit, le but est de comprendre son influence, son importance dans l’espace physique mitoyen mais pas seulement, nous nous intéresserons bien sûr à son influence sur le tissu social afin d’établir un tableau complet sans quoi l’étude pourrait être qualifiée de simpliste. Le schéma d’intelligibilité pour lequel nous avons opté est celui de l’organisation, le but n’étant pas de rechercher des causalités de faits (que nous aurions appréhendées pendant des observations, des entretiens, des questionnaires, …) mais plutôt de comprendre comment tous les acteurs du secteur d’étude sont en relation, comment ils interagissent et bien entendu quelles sont les incidences de ces processus dans la vie des individus même, mais aussi dans celle du quartier. 2.
Champs d'étude
On entend par champs d’étude, aussi bien la sphère sociale que la zone géographique concernée. Dans notre cas les deux sont intimement liées puisque c’est cette dernière qui va déterminer la population que l’on va enquêter. Cette zone doit correspondre à une échelle relativement juste qui nous permettra de répondre aux questions que nous nous posons sans trop nous en éloigner. Le choix de la prison de Fresnes est décisif car c’est une prison urbaine entourée de logement et de commerces. Nous allons réaliser notre enquête sur son environnement immédiat, à savoir l’espace urbain qui jouxte directement la prison ou bien qui peut être concerné directement ou indirectement par cette dernière. Par directement on entend par exemple un logement qui a vu sur la prison et indirectement un logement qui peut subir uniquement les conséquences de son fonctionnement.
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Discours de M. Toubon lors d’un cours d’anthropologie de licence 3
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Pour notre type d’étude, nous analyserons le tissu social de l’espace se trouvant à proximité de la prison, la répartition de la population vivant autour de ce type de construction afin de comprendre et de décrire la structuration spatiale spécifique des abords d’une prison. Nous aborderons notamment l’étude des effets de volume et de la densité de population vivant à proximité du centre pénitentiaire et les comportements développés du fait de la particularité de ce cadre de vie. Il sera ainsi intéressant de voir comment une prison est capable de créer une culture spécifique pour les habitants vivant à proximité. En prenant en compte le fait que la prison de Fresnes fut édifiée dans un environnement vierge de toute habitation et que maintenant, des bâtiments se sont implantés tout autour, nous allons tenter de comprendre comment les espaces urbains à proximité de la maison d’arrêt ont été investis par la population. Nous avons réalisé à partir de cartes satellites un plan détaillé de notre zone d’étude avec les différents types de bâti présents12 . Après avoir vu quelle sera le périmètre étudié, nous allons maintenant nous intéresser à notre démarche d’étude. 3.
Méthodologie
Nous avons préparé un questionnaire pour notre enquête. C’est à notre avis la manière la plus simple de toucher le plus grand nombre de personnes au voisinage de la prison. Celle-ci étant située au cœur d’un tissu urbain, il nous fallait questionner un maximum d’habitants, ce qui nous était impossible uniquement avec des entretiens. Le fait d’utiliser un questionnaire nous permet d’établir des questions précises, standardisées. Cette standardisation implique que les habitants auront tous les mêmes questions, celles-ci étant parfois guidées comme un QCM. De leurs réponses, nous ambitionnons d’établir un avis général du ressenti des habitants du périmètre d’étude sur la prison, de réaliser des statistiques sur leur représentativité sociale et de dégager des tendances. Dans un second temps, nous nous sommes rendus sur place pour réaliser des entretiens individuels dans le but de compléter l’étude quantitative. Le but étant ici de dialoguer avec les acteurs de l’espace considéré (passants, habitants, commerçants,…) en espérant aborder des sujets auxquels nous n’aurions pas pensés mais qui les touchent suffisamment pour qu’ils nous en fassent part. En nous rendant sur place nous avons déjà une certaine perception de l’espace qui pourra compléter notre étude sur la population et l’environnement. Cette partie problématique et méthode s’est attachée à mettre en place les bases de la compréhension de notre étude en présentant le contexte, notre questionnement et en précisant la méthodologie qui sera notre pour cette recherche. La partie qui suit est entièrement consacrée à notre étude proprement dite dans laquelle nous présenterons plus précisément notre espace d’étude, la mise en œuvre des outils anthropologiques utilisés et enfin les résultats obtenus que nous interprèterons.
12
Voir carte du périmètre d’étude en annexe 1
12
II.
Présentation, enquête et résultats A.
Présentation du lieu d'étude 1.
Histoire de la prison
La prison de Fresnes (de son vrai nom : Les prisons départementales de la Seine) se situe à Fresnes dans le Val-de-Marne (94). Sa création fut décidée en 1895 en application de la loi du 5 juin 1875 prescrivant le régime cellulaire aux prisons départementales pour les détenus condamnés au plus à un an et un jour d’emprisonnement et en raison des démolitions programmées des prisons de Mazas, SaintePélagie et la Grande Roquette ainsi que l’infirmerie centrale des prisons de la Seine à Paris avant l’exposition universelle de 1900. Il fut donc décidé de construire une nouvelle prison qui sera l'une des plus grandes de France. La commune de Fresnes fut choisie pour sa proximité de Paris (une dizaine de kilomètres), la salubrité de son air, sa facilité d’accès, le prix modéré de ses terrains, la proximité de carrières de pierre, de briqueteries et de tuileries, son absence de lotissement et pour son faible taux de population. Ainsi, la façade principale donnait sur la route nationale Paris/Orléans et l'entrée initiale se situait à 400 mètres du village de la Croix de Berny, sur une autre nationale (Versailles/Choisy-le-roi), et à un kilomètre de la gare ferroviaire de Berny. Elle fut dessinée par l'architecte Henri Poussin (concepteur de la maison de correction de Montesson dans les Yvelines en 1895), implantée au milieu de champs13 (achetés à bons prix). La prison fut inaugurée le 19 juillet 1898. Elle présentait une architecture innovante en totale rupture avec les conceptions traditionnelles du 19ème siècle (abandon de la disposition en forme d'étoile pour adopter la construction de bâtiments longitudinaux) et se voulait hygiénique et fonctionnelle, en séparant notamment les diverses catégories de prisonniers. Ainsi, pour la première fois en France, les blocs cellulaires furent disposés perpendiculairement à un corridor central, desservant les autres blocs et les pièces communes avec des bâtiments de forme longitudinales placés parallèlement les uns aux autres et séparés par des espaces de 50 mètres de largeur. Elle servira notamment de modèle pendant près d'un siècle à bien d'autres prisons en France comme les Baumettes (à Marseille) ou aux Etats-Unis (Rikers Island à New York). A sa conception, la prison de Fresnes était la plus grande prison de France (elle sera détrônée en 1968, avec la construction de la prison de Fleury-Mérogis) et reste aujourd’hui avec le centre pénitentiaire de Fleury-Mérogis et de Paris-la-Santé, l’un des trois grands établissements pénitentiaires de la région parisienne et aussi un des plus importants de France. Elle est composée de trois structures construites sur une surface d’environ quatre hectares : une maison d’arrêt pour hommes (1 346 places) qui abrite le service médico-psychologique régional (48 places), une maison d’arrêt pour femmes (98 places) et l’Etablissement Public de Santé National de Fresnes (EPSNF) qui dispose de 101 lits et est rattaché au ministère de la Santé.
13
Voir photos de la prison au moment de son inauguration en annexe 2
13
Lors de l'Occupation, la prison fut réservée pour les prisonniers britanniques et les résistants. Elle devint alors un lieu de torture sous le joug de la gestapo. A la Libération, lors de l’épuration, de nombreux collaborateurs y furent incarcérés. La maison d'arrêt se dota alors d'un "couloir de la mort", spécialisée dans l'incarcération de condamnés à mort "politiques" (jusqu’en 1951 où on décida de transporter les condamnés politiques à la prison de la Santé) mais recevant également des prisonniers de droit commun. En 1950, la prison de Fresnes accueillit les occupants de la prison militaire du Cherche Midi, vieille et vétuste, qui ferma ses portes la même année. Dès 1954, il fut prévu d'exécuter les condamnés à mort du Val-de-Marne à Fresnes. Pour cela, une guillotine "machine de mort" y fut installée en 1978 sur une dalle de béton lisse, avec un robinet pour permettre de laver les bois après exécution, dans un local de la prison. Toutefois, elle n’a jamais servi. En 1978, il fut décidé que tous les condamnés à mort de France seraient désormais incarcérés dans un quartier réservé de la prison de Fresnes et douze cellules furent spécialement conçues pour accueillir les hommes voués à la guillotine. La dernière exécution eut lieu en 1977 à la prison de Marseille-les-Baumettes et la peine de mort fut abolie en France le 9 octobre 1981 à travers la loi d’Abolition défendue par M. Badinter, le ministre de la justice de l’époque. Concernant l’abolition de la peine de mort on peut ajouter qu’elle a été inscrite dans la Constitution française le 23 février 2007. Depuis, Fresnes est redevenue une maison d'arrêt classique et reçoit aujourd’hui des prévenus (détenus en attente de jugement) ainsi que les condamnés dont la condamnation définitive n’excède pas un an. L’hébergement des détenus se compose de cellules individuelles d’une surface de 9 à 10 m² toutes équipées de WC et de lavabo avec eau chaude mais les douches restent collectives. L’établissement dispose d’équipements collectifs qui permettent la mise en place de nombreuses activités socio-éducatives et d’un local d’accueil pour les familles en attente de parloir (inauguré en 2000), et animé par des bénévoles (grâce au partenariat développé par l’établissement avec des associations caritatives). En 2003, la prison comptait 1 418 places, 1 264 destinées aux hommes, 98 aux femmes, un quartier d'arrivée pouvant accueillir huit détenus, et un hôpital pouvant soigner 48 prisonniers. Au 1er juillet 2003, 1764 détenus vivaient derrière les murs de la prison de Fresnes. La population carcérale reste néanmoins bien inférieure à celle de Fleury-Mérogis, plus grande prison d’Europe, qui atteint plus de 4 000 détenus. 2.
Caractéristiques du bâti
Avec des cartes satellites et photos aériennes nous avons pu repérer les lieux et définir une zone d’étude. Nous avons choisi de distribuer notre questionnaire aux logements les plus proches de la prison, ceux se trouvant dans le périmètre d’étude. Avant d’arriver sur place, la nature de notre échantillonnage nous était inconnue, nous savions juste que les logements étaient composés aussi bien de maisons que d’immeubles mais nous ne connaissions pas les types de logements qu’ils constituent (sociaux, propriétés,…). Une fois sur place, nous avons réalisé un travail d’observation afin de s’approprier pleinement notre espace d’étude.
14
On s’est aperçu que la prison était totalement absorbée par le tissu urbain et entourée de toute part par des voies d’accès. Les immeubles sont peu présents au voisinage immédiat du mur d’enceinte. Il y a toujours une rue pour séparer le bâtiment carcéral du reste. La prison est bordée au Sud par l’avenue de la division Leclerc et l’autoroute A86. A l’Est, de petits immeubles de faible hauteur, des maisons et un groupe scolaire font face à la prison. Au Nord-Est les immeubles sont plus hauts, une dizaine d’étages, ils sont aussi plus espacés. Un chantier de construction de logements et commerces en rez-de-chaussée est en route. Au Nord, sont implantés des immeubles d’habitation de quatre étages entrecoupés de rues. Derrière se trouvent des immeubles d’habitation plus hauts sur le modèle des grands ensembles. On trouve aussi un petit centre commercial composé d’une presse, d’une pharmacie, d’une boulangerie et d’un commerce de proximité. A l’Ouest, on trouve des maisons et de petits immeubles et quelques commerces et industries (pharmacie D.Meunier, boulangerie Le Fournil, pizzeria, étude d’architecte, petites entreprises). On voit donc au premier abord que la morphologie urbaine aux alentours de la prison est hétérogène. Les habitats sont aussi bien collectifs qu’individuels, des commerces sont présents mais en faible quantité. Une zone tampon existe entre les bâtiments pénitentiaires à proprement dit, c'est-à-dire ceux où sont logés les prisonniers (entourés d’un mur d’enceinte d’environ cinq mètres de hauteur) et l’espace public. Dans celle-ci on trouve des bâtiments réservés aux employés de la prison. Cette zone est délimitée par un haut grillage plastifié vert en mailles serrées. Dans la zone tampon, une véritable petite ville s’est érigée, constituée de bâtiments presque tous propriété du centre pénitentiaire (Ministère de la justice) et d’un réseau de ruelles internes. Ces bâtiments, tous destinés aux employés de la prison (environ un millier), sont de hauts immeubles de logements de fonction (le long du quartier pour hommes) ou des maisons individuelles pour les directeurs (le long du quartier pour femmes), des logements sociaux plus petits (dans tout le reste de la prison) et des bâtiments de service annexes à la prison (cantine, garages, salles de dépôt, foyer destinés aux employés de la prison, gymnase). Il est également à noter que l’entrée de cette « zone tampon » est la même que celle de la prison. Elle est également celle des prisons et est surveillée en permanence par un poste de garde qui régule les entrées et sorties des véhicules. A l’intérieur de ce que nous avons appelé la zone tampon, nous distinguons trois types de constructions, des bâtiments (logements de fonction) en briques du même style que les prisons, les bâtiments de logements sociaux datant des années 60 en façade peinte et de même style plutôt simple et enfin des constructions toutes récentes, de style moderne (à l’Est de l’Etablissement Hospitalier Public National et au Sud du quartier pour femme). Sur le plan purement esthétique, nous avons été témoin d’une forme de camouflage de la prison, ainsi, vue des routes aux alentours, les bâtiments pénitentiaires ne sont pratiquement pas visibles, en effet, ils sont presque toujours dissimulés derrière des barrières végétales ou des bâtiments situés à l’intérieur de la zone tampon. Sur le plan morphologique, nous avons observé que les bâtiments aux alentours de la prison évoluent progressivement en hauteur, ainsi, les constructions les plus proches sont 15
moyennement élevées (petits immeubles d’habitation à l’ouest) puis progressivement, plus ils s’éloignent de la proximité du centre pénitentiaire, plus ils s’élèvent. Enfin, sur le plan spatial, la propriété de la prison est délimitée tout autour par un réseau de voies dense épousant la forme de celle-ci auquel sont reliées des rues de moindres importances. A l’intérieur, les bâtiments présents sont desservis des voies de gabarit modeste reliées à une large rue principale droite (stationnement des deux côtés) s’allongeant devant l’entrée sud des bâtiments pénitentiaires et reliée par l’intermédiaire d’une voie à entrée unique. 3.
Caractéristiques sociales
Nous ne connaissons pas les types de milieux sociaux présents. Nous ne savons pas si la population est riche, pauvre, jeune, âgée. Nous ne savons pas non plus de quels types sont les logements : si ce sont des logements sociaux, d’accession à la propriété, des propriétés, des locatifs privés. Notre questionnaire permettra donc de répondre à ces critères qu’une première approche documentaire et visuelle sur site ne nous permet pas de percevoir à priori. Nous avons constaté une sorte de coupure sociale entre le périmètre de la prison et le reste de la ville. Nous avons été surpris de voir si peu de commerces aux alentours comme si ceux-ci avaient peur de s’installer à proximité d’un tel établissement. B.
Commentaires sur la mise en oeuvre 1.
Recueil de données
Afin de réaliser une étude complète de ce sujet, nous avons commencé par faire des recherches sur internet afin d’avoir un premier aperçu. Nous nous sommes rendu à la bibliothèque nationale François Mitterrand (BNF) afin de recueillir des données plus précises avec des documents papiers auxquels nous n’aurions pas accès autrement. Dans cette enceinte, nous avons consulté principalement des documents de Philippe Combessie qui a réalisé plusieurs études instructives sur le thème de la perception des prisons par leur environnement. Nous avons passé une journée entière à nous documenter. Nous pouvons dire que cette recherche nous a été très utile pour la conception de notre dossier. Tous les ouvrages qui nous ont permis d’avancer dans nos recherches sont indiqués dans notre bibliographie. Nous sommes aussi allés à la mairie de Fresnes, aux services techniques et aux archives afin d’avoir un état de l’évolution dans le temps du voisinage de la prison et de son urbanisation. Nous avons récupéré des cartes et plans de Fresnes à différentes dates. Profitant de notre passage en ce lieu nous avons aussi désiré nous renseigner sur l’existence d’associations entre la prison et le reste de la ville. Un livret regroupant toutes les associations du territoire nous a été transmis. 2.
Questionnaire
Comme nous l’avons vu précédemment nous avons décidé de réaliser un questionnaire. Ce questionnaire doit avoir un cadre fixé à l’avance et être standardisé14. Nous avons donc à fabriquer l’échantillonnage. Celui-ci est simple, nous n’allons pas faire de distinction entre les habitats individuels et collectifs. Par contre nous ne distribuerons 14
Voir questionnaire vierge en annexe 3
16
pas le questionnaire aux commerçants car il ne leur ait pas destiné. Nous envisagerons par la suite d’avoir un entretien en face à face avec eux. Notre sondage est donc en quelque sorte aléatoire car nous ne connaissons rien de la population visée. La population mère est composée des habitants à proximité mais aussi des fonctionnaires pénitentiaires vivant dans les logements situés dans l’enceinte. Nous avons appris l’existence de ces logements uniquement en allant sur place car en vue aérienne il nous était impossible de faire de distinction. Notre questionnaire est composé de deux parties : D’abord une partie routinière qui constitue presque tous les questionnaires existants. Elle permet en effet de réaliser une détermination sociale de l’échantillon interrogé. Elle comprend l’ensemble des variables indépendantes (âge, richesse,...) qui peuvent avoir des relations avec la prison. Ces relations ne nous sont pas connues à la réalisation, elle nous apparaitrons au recueillement des réponses. On a divisé cette partie du questionnaire en différents thèmes : -la situation personnelle avec le sexe et l’âge de la personne interrogée, -la situation familiale avec des réponses proposées. Il faut que la personne raye les mentions inutiles (seul[e] sans enfant, seul[e] avec enfant(s), couple sans enfant, couple avec enfant(s) et le nombre d’enfant(s)), -la catégorie sociale (étudiant, actif, inactif, retraité), -la situation résidentielle, type d’habitat (locataire, propriétaire, autres et depuis combien de temps la personne vie dans le quartier), -le capital scolaire (niveau d’étude), -la situation professionnelle (profession, distance du travail : inférieure à un kilomètre, entre un et cinq kilomètres, entre cinq et dix kilomètres et supérieure à dix kilomètres). Ensuite nous avons rédigé une partie comprenant les variables dépendantes, c'est-à-dire celles en rapport direct avec notre sujet d’étude. Pour cette partie, nous avons décidé de coupler des QCM avec différents degrés d’appréciation et des questions où la population peut répondre librement et faire part de ses avis en totale liberté. Voici les questions que nous avons posées : - attrait du quartier (faible, moyen, fort), - tranquillité, sécurité (faible, moyenne, forte), - fréquentation du quartier (faible, moyenne, forte), - accès aux services (faible, moyen, fort), - accès aux transports en commun (faible, moyen, fort), - comment trouvez-vous l’intégration de la prison dans le quartier ? - comment pourrait-on favoriser son intégration ? - est-elle source de gênes, si oui lesquelles ?
Après que le questionnaire eut été élaboré nous l’avons tiré à 450 exemplaires pour être sûr de toucher le maximum de population. Nous sommes donc allés sur place les distribuer dans les boîtes aux lettres du quartier. Nous nous sommes entretenus avec deux pharmacies et une boulangerie (lieux fréquemment ouverts et en contact avec la population locale) pour leur demander si les questionnaires pouvaient leur être déposés une fois complétés ; ce qui nous a été accordé sans problème. Nous sommes allés sur les lieux les mardi 6 et 13 février 2007. Les personnes avaient donc respectivement deux et une semaine pour répondre afin de tous les récupérer en même temps le mardi 20 février 2007. 17
Avant de poser les questions, nous avons procédé à une brève présentation de notre groupe et de notre sujet d’étude. Il faut savoir que ce questionnaire est anonyme. Nous leur avons expliqué premièrement qu’aucune donnée personnelle ne figurerait dans le mémoire et deuxièmement qu’aucune donnée ne serait utilisée à d’autres fins que celles de notre recherche. 3.
Entretiens
En plus de la diffusion de notre questionnaire aux habitants mitoyens de la prison nous avons réalisé des entretiens pour enrichir et diversifier nos connaissances sur l’étude. Ces entretiens ont pour but d’approfondir nos recherches. L’entretien est une démarche qui soumet le questionnement à la rencontre. On essaie de dévoiler une dimension sociale, on rencontre des personnes, on les sollicite, un rapport s’institue avec eux. Nous allons recueillir des faits, des opinions, des attitudes du corps social face au problème de la prison. Nous allons explorer des vécus que nous ne possédons pas nous-mêmes. Les individus interrogés n’ont pas de réponse toute faite, pas de discours préétabli. Pour notre étude nous allons réaliser un entretien semi-directif. Ce type d’entretien nous a semblé le plus approprié pour notre étude. L’entretien directif ne laissant pas part à l’imagination des interviewés, il n’apporterait presqu’aucune valeur ajoutée par rapport au questionnaire. L’entretien libre ou non directif nous paraissait mal approprié à une partie de la population visée (employés de prison) qui pourrait mal comprendre notre intention et ne permettrait pas de relancer le sujet en cas de dérive ou de blocage. Nous allons réaliser les entretiens en groupe afin de recueillir le maximum d’informations sur ce que l’interviewé dira et surtout dans le but de pouvoir rentrer dans les détails des différents aspects nécessaires à la compréhension de notre objet d’étude. Il semble difficile d’être performant sur les deux aspects en réalisant les entretiens chacun de notre côté. Nous devons d’abord définir la population que nous souhaitons interroger. Celle-ci sera composée des commerçants voisins de la prison mais aussi des habitants et des passants que nous arriverons à interroger ainsi que les surveillants de la prison habitants dans la zone tampon. Nous espérons avoir un échantillon le plus représentatif possible du quartier. Les limites seront les mêmes que pour le questionnaire, à savoir le voisinage proche de la prison de Fresnes. On doit constituer un échantillon qualitatif, significatif devant refléter l’objectif de l’étude. Pour que les entretiens se passent dans les meilleures conditions, nous devons réaliser un guide d’entretien dont l’ordre des thèmes est libre. Ce guide a pour but de réaliser un entretien précis, afin de ne pas oublier d’aborder certains aspects du sujet et de rendre les entretiens globalement tous identiques et complets. Il doit avoir une neutralité bienveillante, c'est-à-dire qu’il ne doit pas être trop distant ni trop familier. Il doit mettre l’individu à l’aise en instituant un rapport convivial. Voici les thèmes qui ont été abordés et les questions types qui ont pu être posées lors de l’entretien : •
Identité de la personne avec qui nous nous entretenons : - Où habitez-vous ? - Depuis combien de temps ?
•
Qualité de vie du quartier : 18
- Proximité des commerces et services - Le quartier vous rebute-t-il ou vous incite-t-il à rester ? - Comment qualifiez-vous le quartier ? - Qu’est ce qui selon vous pourrait améliorer la vie dans le quartier ? •
Qualité de l’espace : - Prix du foncier - Desserte et accès au quartier (transport, voirie)
•
Ressenti : - Comment vivez-vous le fait d’habiter à proximité d’une prison ? (avantages et inconvénients) - Quelle est l’insertion du quartier par rapport à la prison ? C.
Présentation des résultats et interprétation 1.
Questionnaires
Le 20 février 2007 nous nous sommes rendus aux trois points de réception des questionnaires où nous espérions récupérer la totalité ! Sur les 450 postés, seuls douze nous ont été retournés, soit environ 2,7 %. PRESENTATION DES RESULTATS15 SITUATION PERSONNELLE Sexe : Hommes : 8 (50%)
Femmes : 6 (37,5%)
Inconnus : 2 (12,5%)
Âge : -de 40 ans : 0 60-70 ans : 2 (12,5%)
40-50 ans : 4 (25%) 70-80 ans : 4 (25%)
50-60 ans : 1 (6,25%) 80 et + : 5 (31,25%)
SITUATION FAMILIALE Seul sans enfant : 3
Seul avec enfant : 1
En couple sans enfant : 4
En couple avec enfant : 3
CATEGORIE SOCIALE Etudiant : 0
Actif : 4 (25%)
inactif : 1 (6,25%)
Retraité : 11 (68,75%)
SITUATION RESIDENTIELLE Nombre d’années dans le quartier : 15
Voir questionnaires remplis en annexe 4
19
0-10 ans : 1
10-20 ans : 2
Type de propriété : Locataire : 4 (33%)
20-40 : 0
Propriétaire : 6 (50%)
40-50 ans : 5
+ 50 ans : 3
Autres : 2 (16%)
SITUATION PROFFESSIONNELLE Niveau d’étude BEPC : 1 (8,3%) BAC+5 : 3 (25%)
BAC : 4 (33%) Inconnus : 3 (25%)
BAC+2 : 1 (8,3%)
entre 1 et 5 km :1 Inconnu : 5
entre 5 et 10 km : 2
DISTANCE DE TRAVAIL : - de 1 km : 3 +10 km : 1
ATTRAIT DU QUARTIER : Faible : 6 (50%)
moyen : 6 (50%)
fort : 0
TRANQUILITE, SECURITE : Faible : 1 (8,3%)
moyenne : 8 (66%)
forte : 3 (25%)
moyenne : 9 (75%)
forte : 3 (25%)
moyen : 3 (27,3%)
fort : 2 (18,2%)
FREQUENTATION Faible : 0 ACCES AUX SERVICES Faible : 6 (54,5%)
ACCES AUX TRANSPORTS EN COMMUN : Faible : 1 (8,3%)
moyen : 9 (75%)
fort : 2 (16,7%)
Il y a plus ou moins 12 résultats car certains couples ont répondu sur le même questionnaire et d’autres n’ont pas répondus du tout à certaines questions. 2.
Entretiens
Nous allons faire dans cette partie un résumé de tous les entretiens que nous avons eu le mardi 13 février 2007. 1ère entretien : une personne promenant son chien dans la rue Marc Sangnier (15 minutes) C’est un homme d’environ une cinquantaine d’années en train de promener son chien que nous avons abordé. Il habite dans le quartier de la Vallée aux Renards depuis 16 ans, il est locataire et travaille de nuit. Il nous a dit qu’il a habité dans un autre quartier du même type (grands 20
ensembles) et trouvait sécurisant la présence des rondes régulières et fréquentes induites par la présence de la prison. Il nous annonce alors des chiffres assez étonnants, une patrouille toutes les 30 minutes voire toutes les 10 minutes lors d’arrivées de détenus. Concernant la qualité de vie dans le quartier, il a souligné la faiblesse de l’offre de services et de commerces mais aussi qu’un petit centre commercial et des logements sociaux et d’accession à la propriété en lieu et place du groupe scolaire de la Vallée aux Renards allaient sortir de terre. Il dénonce aussi la faiblesse du réseau de transport et nous a indiqué la mise en place d’une navette pour les personnes âgées vers les zones commerciales. 2ème entretien : une personne plutôt âgée descendant la rue Marc Sangnier (40 minutes) Sur cet entretien, nous avons eu beaucoup de chance puisque la personne s’avérait être un ancien employé de l’hôpital pénitentiaire et revenait, pour la première fois après son arrêt d’activité, sur place en pèlerinage. Il a déclaré avoir 83 ans, avoir travaillé comme contractuel durant trente ans dans l’hôpital et habité près de vingt-cinq ans dans un logement de fonction à l’intérieur de la caserne, autant dire que pour nous cet homme est une providence ! Il nous a informé que l’hôpital de Fresnes était le seul hôpital pénitentiaire existant pour tout le Nord de la France, c’est-à-dire qu’un prisonnier brestois ayant besoin d’une hospitalisation était directement transféré à Fresnes. L’autre hôpital pour le Sud de la France était situé aux Baumettes à Marseille. Ensuite, il nous a parlé de l’organisation de la prison qu’il a qualifiée de « véritable mafia » à un moment. En effet, des Corses (directeur, sous-directeurs, surveillants) ont pendant un certain temps « gouverné » la prison, rendant le fonctionnement assez opaque, de nombreuses bagarres pouvaient alors éclater dans un café italien voisin de la prison. Concernant l’intégration du personnel à la ville, celle-ci était quasiment nulle : - D’une part, beaucoup de surveillants venaient d’autres régions de France et donc avaient tendance à s’isoler ou se regrouper entre eux, - D’autre part parce que la mutation des surveillants à Fresnes était souvent une punition et non une promotion. Leur passage était souvent bref et donc n’incitait pas l’intégration, - Les surveillants de Fresnes jouissaient d’une mauvaise réputation pour leur brutalité envers les détenus (le contrôle était bien moins strict qu’à l’heure actuelle). L’ensemble de ces facteurs poussait également la population à les mettre à l’écart. Il a souligné la présence en nombre de commerces (bourlerie, droguerie, …) le long de la N186 qui furent par la suite détruits avec l’arrivée de l’A86. De plus, il a insisté sur l’activité importante, en rien comparable à celle d’aujourd’hui, du groupement d’achat (central d’achat, salon de coiffure, bar, vaguemestre) qui était à l’époque détaxé. Le mess était géré par les détenus classés. Dans les années 60, environ un millier de personnes travaillaient à la prison et concernant les gênes, il ironisa en disant que les « policiers étaient parfois plus gênants que les prisonniers ». Les familles des détenus pouvaient discuter avec ceux-ci par-dessus le mur d’enceinte, la prison n’étant pas un espace protégé comme aujourd’hui (absence de grillage et de barrière à l’entrée). Il a été le témoin de plusieurs tentatives d’évasion, notamment une par hélicoptère qui l’a particulièrement marqué. Le rapport avec la municipalité était inexistant malgré les efforts de la direction du centre pénitentiaire, le personnel mal vue de la population n’était pas le bienvenue à la mairie. Des tentatives de mouvements socioculturels internes ont eu lieu (club de football par exemple) mais leur durée de vie était assez courte du fait des mutations incessantes du personnel. A l’époque, des sœurs d’un ordre italien intervenaient directement dans le quartier pour femmes et depuis peu, pour des raisons de place, exercent à l’extérieur à travers l’association l’Escale Louise de Marillac qui propose un accueil et un hébergement des familles de détenus. 21
3ème entretien : une personne rencontrée dans la zone tampon près de l’allée des thuyas en train de nettoyer sa voiture (15 minutes) L’intérêt de cette personne réside dans le fait qu’elle travaille actuellement dans le centre pénitentiaire mais aussi que pour la première fois, nous pouvons nous entretenir avec une personne relativement jeune. Cet homme vient juste d’emménager sur Fresnes et c’est son premier poste en tant que surveillant. C’est lui qui nous a renseignés sur le groupement d’achat en nous disant que peu de personnes y sont aujourd’hui inscrites du fait que les prix soient plus élevés qu’à l’extérieur. Il habite dans un logement social géré par les 3F (et réservé au personnel) et non pas en logement de fonction pour des raisons de principe. En effet il préfère payer un loyer et ne rien devoir à l’administration (astreintes de nuit par exemple). Des associations ont vu le jour depuis quelques années et sont très actives, il nous a parlé de la construction d’un foyer à l’intérieur de la zone tampon, salle qui peut être mobilisée pour des soirées ou des réunions. Concernant l’adaptation au casernement, il nous a bien avoué que ce fut difficile au début mais que la tranquillité de vie et la sécurité du lieu favorisaient son intégration au site. Toutefois, il regrette quelque peu ce regroupement, principalement pour l’éveil de ses enfants qui ne côtoient pas vraiment ceux de la ville. Nous lui avons posé la question de son avenir résidentiel et il nous a répondu que malgré les avantages du lieu, s’il devait faire carrière à Fresnes, il envisagerait d’acheter un logement à l’extérieur de Fresnes puisque les prix pratiqués sont aussi élevés que dans les communes des alentours. Ce choix est dû au fait qu’il ne souhaite pas rester locataire toute sa vie et non parce qu’il ne se plait pas ici. Son loyer actuel correspond au prix du marché, sa taxe d’habitation étant même supérieure à celle pratiquée dans le reste de la ville. Dans l’immédiat, il compte rester ici puisque sa femme travaille sur la commune. 4ème entretien : la pharmacienne de l’avenue de la liberté, Mme Meunier (30 minutes) Elle est originaire de Fresnes, y habite depuis cinquante ans (son âge) et travaille à la pharmacie depuis vingt ans. Elle nous informe que les visites, il y a cinq-sept ans, se déroulaient le lundi et le samedi et aujourd’hui les parloirs sont ouverts tous les jours de la semaine excepté le dimanche. Ceci a pour conséquences une fréquentation accrue des visiteurs et « un défilé de sacs incessant » (change pour les prisonniers). Elle déplore le manque de places de stationnement et de structures d’accueil (toilettes, tables, …) réservées aux visiteurs. A ce propos, elle nous a dit que régulièrement les familles de détenus venaient demander ses toilettes. C’est elle qui nous a parlé du manque de considération de la mairie envers ce quartier de la ville, qu’elle qualifie même de « défavorisé ». Elle indique un changement des modes de vie, à savoir un attachement plus important à la ville alors qu’avant le brassage était permanent. Quand elle était jeune, la prison n’était pas un obstacle à la circulation et les enfants de surveillants côtoyaient les jeunes Fresnois. Elle n’observe aucun incident avec sa clientèle d’agents pénitentiaires et note même que leur image s’est nettement améliorée depuis qu’ils suivent une formation de surveillant à Agen. Elle a été témoin de l’urbanisation progressive de la zone (années 50 : construction du grand ensemble de la Vallée aux Renards, 1963 : immeubles à la place du marécage de la Bièvre, 1966 : construction de l’école de la Vallée aux Renards, années 90 : immeubles derrière le quartier pour femmes). Elle précise aussi qu’elle fut la première commerçante du quartier qui compte aujourd’hui dans son périmètre, une boulangerie, une pizzéria et une petite supérette. Depuis l’attaque de 2003, elle dit ressentir un sentiment d’insécurité qu’elle ne sait expliquer car les choses n’ont pas vraiment changé dans la vie de tous les jours. Elle donne son impression sur l’intégration paysagère de la prison qu’elle juge relativement réussie à comparer avec celle de la Santé.
22
3.
Interprétation
QUESTIONNAIRES La majorité des personnes ayant répondu aux questionnaires sont des personnes relativement âgées, plus de la moitié a plus de 70 ans. De plus, la majorité a un niveau d’étude supérieur ou égal au bac, ce qui est d’autant plus remarquable que la population est âgée (les bacheliers étaient beaucoup moins nombreux à leur époque). La moitié est propriétaire et vie depuis longtemps dans le quartier. Il ressort du questionnaire que le quartier est faiblement attractif mais tranquille et sécurisant. Il est assez fréquenté, moyennement bien desservi et point faible que nous avons déjà signalé : peu de services aux alentours pour les habitants. Sur la question de l’intégration de la prison dans le quartier nous avons remarqué que la majorité connait l’histoire spécifique du quartier, à savoir que la prison était là avant les habitations. Elle est considérée comme une ville dans la ville, mise un peu à l’écart, «entité complètement à part dans la ville de Fresnes », mais les gens s’y sont habitués, « elle fait partie du paysage » mais ont l’impression qu’elle n’est pas intégrée dans le quartier, que « l’intégration dans le quartier est quasi nulle ». Pour favoriser son intégration les conseils sont divers : « réduire son développement », « prise en compte des besoins des personnels pénitentiaires », « création de parking pour les visiteurs et de toilettes », « remettre l’entrée principale sur la N186 », « information auprès des habitants ». A la question si la prison est source de gênes une bonne partie a répondu qu’il n’y a pas de gêne particulière, mais que des problèmes au niveau du stationnement et une image préjudiciable sont à noter. ENTRETIENS Ces quatre entretiens se sont révélés très instructifs dans le sens où les personnes interrogées ont tous des profils différents rendant ainsi notre échantillon plutôt représentatif du quartier. Les discours se complètent assez bien et heureusement pour notre analyse ne se contredisent pas. Du fait de la complémentarité des informations que nous avons pu recueillir et des redondances normales pour ce genre d’exercice, il ne nous a pas paru nécessaire de continuer encore les entretiens même si bien sûr, nous sommes conscients que plus nous faisons d’investigations, meilleure sera la compréhension des systèmes relationnels dans l’espace étudié.
Après avoir présentés notre démarche et les premiers résultats, nous allons maintenant essayer de les interpréter, de faire une autocritique de la manière dont nous avons menée cette étude et enfin aborder d’autres sujets relatifs à cette recherche pour que le lecteur intéressé puisse poursuivre son cheminement intellectuel.
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III.
CONCLUSION GENERALE A. En quoi les données recueillies ont-elles modifiées la perception initiale et nos prénotions ?
Dans ces parties nous allons comparer les prénotions que nous avions avant l’étude et que nous avons développées dans la partie I.B.2. avec les données recueillies par les questionnaires, les entretiens, les observations et les recherches documentaires. Nous allons présenter notre nouvelle perception de l’espace. 1.
La vision du tissu urbain autour de la prison
ZONE TAMPON ET INTEGRATION PAYSAGERE Nous ne nous attendions ni à ce qu’une zone si importante soit réservée aux surveillants et à leur famille ni à ce qu’ils vivent dans un espace confiné entre deux enceintes et coupés de la ville alors qu’ils travaillent déjà derrière des murs. Il n’y a pas de coupure entre leur lieu de travail et leur lieu d’habitation. Cet espace ressemble à une ville dans la ville et permet de faire le lien entre la prison et les habitants du quartier. Cette zone permet aux citoyens de ne pas avoir un lien direct avec le mur d’enceinte contrairement à la prison de la Santé à Paris par exemple. La présence de bâtiments dans la zone tampon permet d’atténuer presque totalement l’incidence visuelle de la prison depuis la ville. Les arbres plantés tout autour de la prison ainsi que la présence d’une clôture banale de jardin ont été pensés dans le but de diminuer le stigmate carcéral ressenti par la plupart des habitants. LENTE ABSORPTION DE LA PRISON PAR LA VILLE Par notre observation de terrain et à travers les documents issus de la mairie16 nous avons étudié le processus d’urbanisation autour de la prison. Sur le plan architectural, nous avons observé que les bâtiments se sont implantés d’abord à l’Ouest, puis cette urbanisation est remontée vers le Nord est a atteint plus récemment l’Est (où se déroulent actuellement des opérations de construction). Autrefois route nationale Paris/Orléans/Versailles, aujourd’hui (A86 et N186, cet axe de circulation a toujours marqué une coupure physique entre le Nord (quartier de la prison) et le Sud de Fresnes (centre historique de la commune où se trouvent la mairie, l’église et le marché). A travers nos différents entretiens, nous avons eu la confirmation que les quartiers Nord ont souvent été délaissés par la mairie au profit du Sud. Néanmoins, en se rendant sur les lieux, nous avons remarqué une forte activité de construction que se soit d’immeubles d’habitation (logements sociaux et privés), de commerces et de services publics (antenne relai de la mairie, direction régionale des services pénitentiaires) au plus près de la clôture grillagée de la zone tampon. Cela montre la volonté de la mairie de redonner vie à ce quartier, même si encore beaucoup de travail peut-être réalisé.
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Voir cartes de Fresnes à différentes époques en annexe 5
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2.
Les gênes
GÊNES AUDITIVES En nous rendant sur place nous n’avons pas perçu de bruit spécifique venant de la prison alors même que nous avons fait par deux fois le tour de l’enceinte principale. En revanche, nous avons entendu l’arrivée de convois de police signalés par leurs sirènes et cela à intervalles relativement réguliers d’une fois par heure. Lors de nos entretiens, nous nous sommes aperçus que la population ne faisait plus très attention à ce bruit qui est surtout présent près de la sortie de prison et le long de l’avenue de la Liberté. Selon les riverains, il y a souvent des abus de la part de la police concernant l’emploi des sirènes. Les seules fois où les habitants des alentours perçoivent les bruits des prisonniers sont lors des matchs de football retransmis à la télévision et de temps en temps des coups de klaxon sont émis par des inconnus pour prévenir leurs amis de leur présence afin de discuter par-dessus le mur d’enceinte. GÊNES OLFACTIVES Contrairement à une idée reçue, nous n’avons observé aucune gêne, aucune odeur dérangeante et les habitants ne s’en plaignent pas non plus. CONSEQUENCES Etant donné le peu de gênes engendrées par la prison et la présence d’une zone tampon, celle-ci a réussie à se faire oublier de la population. La coexistence spatiale entre cette prison et son environnement urbain semble pleinement réussie. La conclusion de notre étude rejoint celle de Philippe Combessie qui dit que « de façon générale, les personnes résidant aux alentours d’une prison ignorent cet établissement qui est ressenti comme une marque infamante sur leur territoire. Elles ne s’accommodent de ce voisinage indésirable qu’en gommant le caractère pénitentiaire de ces bâtiments qui deviennent ainsi des édifices presque ordinaires. » 3.
La qualité de vie
FAIBLESSE DES COMMERCES Comme nous l’avons déjà dit, les commerces sont peu présents dans la zone. Un ancien employé de la prison nous a indiqué lors du deuxième entretien qu’il existait à son époque une centrale d’achat. C’est une sorte de commerce de proximité autogéré par le personnel pour sa propre consommation. Elle était détaxée et attirait beaucoup d’employés, c’était aussi un lieu de fourniture pour les prisonniers (cigarettes, livres,…). Pour éclaircir le sujet, nous voulions nous y rendre mais celle-ci étant fermée, nous l’avons inscrite dans notre guide d’entretien pour les interviews suivantes. Lors du troisième entretien, un surveillant nous a indiqué que cette centrale d’achat est très peu utilisée aujourd’hui car non seulement les produits ne sont plus détaxés mais en plus leur coût est supérieur au prix du marché.
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TRANSPORTS De l’avis général et par nos constatations nous pouvons affirmer que la zone est plutôt bien desservie par les bus au niveau de l’entrée de la prison mais que la fréquence de passage est insuffisante en dehors des heures de pointe. Ce phénomène est à relativiser car présent dans de nombreuses communes de banlieue parisienne. Pour les habitants situés sur les parties Nord (la vallée aux renards) et Est de la prison, la mairie de Fresnes s’étant rendu compte du problème de desserte des transports a mis en place des navettes communales de « transport social » et « la ligne 184 prolongée, devrait desservir le centre ville, les quartiers de la Peupleraie et la Vallée aux Renards aujourd'hui à l'écart de l'offre transport17». QUARTIER SECURISE Un centre pénitentiaire accroit l’effet de sécurité dans le quartier où il est implanté. Lors du premier entretien la personne a clairement abordée le sujet en le présentant comme un avantage notamment avec des rondes de police plus importantes qu’ailleurs. Outre la sécurité accrue aux alentours du centre pénitentiaire, il en va de même pour toute la commune car elle bénéficie d’une augmentation des effectifs de police et de gendarmerie. Par exemple pour la ville de Bourg-en-Bresse (01), 40 000 habitants, qui accueillera en 2008 une prison de près de 690 détenus, 17 emplois seront créés dans la police et 23 dans la gendarmerie.18 Toutefois ce sentiment de sécurité a été mis à mal suite à l’évasion de Antonio Ferrara le jeudi 13 mars 2003. Celle-ci digne d’un scénario hollywoodien a vu ce détenu, réputé pour ses fréquentes évasions, s’évader après un assaut, d’un groupe armé, mené au lance-roquettes et à l’explosif après avoir fait diversion en mettant le feu à un restaurant proche et à plusieurs véhicules. Ceci a montré aux habitants que le risque zéro n’existe pas et qu’une prison ne sera jamais un établissement ordinaire, cela a fait l’effet d’une piqure de rappel. UN QUARTIER RECONSIDERE Les mairies de Fresnes et de l’Haÿ-les-roses ont pris conscience du délaissement du quartier de la prison et pour faire face à ce problème, la municipalité de l’Haÿ-les-roses annonce qu’« à la Vallée-aux-Renards, […] c’est un projet d’ensemble, un projet de quartier qui porte sur tous les problèmes posés », qui va naître ; « petits commerces de proximité, aménagement d’équipements sportifs, de services publics, construction de logements en accession à la propriété ou locatifs, aménagement d’une place de ville. Là, la démarche est intercommunale avec Fresnes et sa réalisation se fera au cours des trente prochains mois. 19»
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Site de la communauté d’agglomération du val de bièvre, http://www.pld-valdebievre.fr/article/simpletext/448/ 18 Dossier de presse, ville de Bourg-en-Bresse, réunion publique du 23 mars 2006, le futur centre pénitentiaire et son insertion dans le paysage. 19 Voir site du PLU de l’Haÿ-les-roses, http://www.lhay-plu.fr/article/articleview/170/1/3/
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B.
Limites techniques de la mise en œuvre 1.
Le questionnaire, les entretiens et les recherches
QUESTIONNAIRE Notre première difficulté a été de trouver des questions pertinentes ne laissant pas place à la confusion. Malheureusement, nous devons admettre que certaines questions ont été mal interprétées. Elles nous semblaient pourtant claires. En revoyant notre questionnaire, nous nous apercevons que certaines questions étaient imprécises (par exemple, on demande la profession de l’homme et de la femme alors que le niveau d’étude ne peut être répondu que par une seule personne, idem pour l’âge et la catégorie sociale). La deuxième difficulté a été de savoir combien de questionnaires nous devions produire. Au début nous étions partis sur 100 questionnaires pour deux prisons (Fresnes et la Santé). Finalement, après avoir été à Fresnes les distribuer sur une seule rue, nous nous sommes aperçus de la nécessité absolue d’en imprimer 350 de plus et de nous concentrer uniquement sur la prison de Fresnes. De plus, des problèmes liés à l’impression nous sont apparus sur ces derniers exemplaires (surchauffe de l’imprimante de la salle informatique). Il nous a fallu l’aide d’un syndicat étudiant pour finir de les imprimer (ces derniers possédant un matériel plus approprié). Avant d’aller sur place nous aurions dû nous renseigner sur les commerces du site afin de savoir chez lesquels nous pouvions faire déposer les questionnaires au lieu d’écrire leur adresse à la main sur les 450 exemplaires, ce qui nous a fait perdre un temps précieux. Sur la question « comment trouvez-vous l’intégration de la prison dans le quartier ? », la plupart des personnes nous ont rétorqués qu’il ne pouvait y avoir d’intégration puisque la prison était présente avant les habitations et que c’est à ces dernières de s’accommoder. De notre point de vue de futurs aménageurs urbanistes nous pensons que même si les habitations viennent après la prison, celles-ci doivent pouvoir être pensées afin d’intégrer l’environnement préexistant. La question sur le nombre d’enfants nous semble maintenant sans intérêt pour notre étude, l’erreur vient du fait que nous n’avons pas pensé, en la rédigeant, à ce qu’elle pouvait nous apporter. La partie « distance du lieu de travail » aurait été utile si la population était composée majoritairement d’actifs, ce qui n’est pas du tout le cas, mais nous ne pouvions pas le prévoir. Nous aurions aussi dû mieux expliquer notre étude et présenter notre groupe car la pharmacienne a reçu des coups de fils de personnes s’interrogeant sur le but de notre démarche. Le fait de laisser nos coordonnées les auraient surement rassurés. Nous avons eu la chance que parmi les quelques questionnaires retournés, deux ont été complétés par des directeurs des prisons. Ceux-ci ont apporté un regard pertinent sur notre sujet. Comme nous l’avons dit plus haut, nous avons été surpris du peu de réponses obtenues. Nous nous interrogeons donc sur la pertinence du questionnaire. Cela peu noter aussi un certain désintéressement des habitants à ce sujet. Etant donné que nous n’avons pas de retour sur expérience on ne peut savoir si c’est un bon résultat ou non. ENTRETIENS Nous avons eu beaucoup de chance de tomber sur des gens aux profils différents et aux connaissances importantes. Nous aurions peut-être dû essayer d’obtenir un rendez-vous avec le directeur de la prison, ou encore de réaliser plus d’entretiens afin de compléter et diversifier encore plus nos recherches.
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RECHERCHES DOCUMENTAIRES La plupart des ouvrages que nous souhaitions consulter se trouvaient dans la section recherche, uniquement réservée aux chercheurs. Nous n’avons trouvé aucun livre spécifique à la prison de Fresnes. Sur internet, étaient présentes seulement des données généralistes. Nous nous en sommes servis exclusivement pour la partie contexte du dossier. A la mairie de Fresnes nous n’avons récolté presqu’aucune information mis-à-part quelques cartes. 2.
Une démarche couplée questionnaire / porte-à-porte / entretien
Après réflexion, nous avons pensé qu’il aurait été judicieux de récupérer les questionnaires en porte-à-porte chez les gens. Cela nous aurait permis, à la fois d’obtenir plus de questionnaires en aidant les personnes à y répondre et d’obtenir des entretiens en même temps si la personne le désirait. Cette démarche aurait bien sûr demandé plus de temps sur place, mais aurait peut-être été source de complications (interphones, personne absente,…). De toute manière il semble qu’aucune démarche ne peut satisfaire à 100% les besoins d’une étude de ce type, l’accès à l’ensemble de la population étant quasiment impossible. 3.
Une approche comparative
Afin de mieux comprendre l’intégration des prisons et non pas d’une prison, il est évident que nous aurions dû mener notre étude sur plusieurs prisons, cela afin de comparer celles-ci dans différentes ambiances, à différents stades d’intégration. Notre idée première (étude des prisons de Bourg-en-Bresse, de la Santé et de Fresnes) était dans cette perspective. Le fait que nous ne l’ayons pas réalisée est seulement dû à un manque de temps et de moyens. Cette étude était de toute évidence trop complexe pour notre niveau (première expérience) et pour ce que l’on nous demandait. Il est à noter que cette approche comparative aurait été plus généraliste que notre étude du cas spécifique de la prison de Fresnes. C.
Elargissement du sujet 1.
Architecture de la prison
Pour l’intégration des prisons, nous pouvons nous intéresser au problème de son architecture. Apporter un nouveau souffle lors de sa conception pour renouveler l’image qu’elle renvoie à la société et repenser son organisation interne pourrait améliorer son efficacité, du point de vue de la réinsertion par exemple. Les besoins architecturaux évoluent dans le temps et une prison qui correspond aux critères d’aujourd’hui pourrait paraître totalement dépassée plus tard, c’est le cas notamment de la prison de Fresnes, qui était un modèle de prison à la campagne, fruit de nombreuses études sur son organisation interne. « Il faut une architecture barbare et terrible » écrivait Blondel en 1771. Ledoux son élève proposera par la suite un projet particulièrement édifiant à Aix-en-Provence, d’une brutalité sans précédent. Etant donné qu’il est impossible de prédire l’avenir, il est intéressant de regarder les besoins actuels du système pénitentiaire et d’analyser les réponses actuelles des architectes à ce sujet. En France, Pierre Sartoux et Augustin Rosenstiehl font figure d’avant-gardistes à ce sujet en intégrant les notions de progressisme et d’humanisme qui animent nos sociétés actuelles. Pour ce qui est de l’architecture intérieure de la prison, il dénonce le fait par exemple qu’à Fleury-Mérogis, les 28
prisons pour hommes et pour femmes aient été conçues de la même manière sans prendre en compte les sensibilités très différentes des deux populations20. Pour ce qui est de l’architecture extérieure, il est intéressant de regarder ce que l’architecte Harry Weese a réalisé aux Etats-Unis. En effet, ce dernier a construit en 1975 une prison en plein cœur de Chicago21 et qui plus est verticale, de quoi bouleverser complètement la représentation que l’on se fait traditionnellement de la prison. Cette tour triangulaire de 88 mètres de hauteur se compose de 27 étages, la toiture terrasse servant de terrain d’activité pour les détenus. Le sujet est assez sérieux pour que le ministre français de la Justice, Pascal Clément, se soit rendu à Manhattan le lundi 10 juillet 2006 pour visiter le Metropolitan Correctional Center (MCC), un établissement pénitentiaire "vertical" de New York, qui pourrait servir de modèle à la construction de nouvelles prisons en France (Nice notamment). 2.
Repenser l’urbanisme
Certes nous pouvons jouer sur l’architecture pour améliorer l’efficacité des prisons vis-àvis des objectifs qui lui sont fixés mais on peut aussi repenser son insertion urbanistique. Aujourd’hui, la prison n’a plus d’urbanité, elle est souvent au loin, éloignée de la ville et de son espace social, cachée et honteuse. Il faudrait peut-être lui redonner son statut d’équipement public à part entière, l’intégrer à un tissu urbain préexistant en jouant sur les façades pour donner du cachet au bâti, comme nous l’avons fait par le passé (c’est moins vrai aujourd’hui quand on regarde le tribunal de Bobigny ou certains autres établissements publics récemment construits) avec nos écoles, nos tribunaux et tous les bâtiments qui faisaient la fierté de la France et la grandeur de notre République. On peut aussi jouer sur l’intégration des prisons en évitant de les séparer des habitants par de larges avenues disproportionnées les encerclant. 3. Accepter la prison et intégrer le personnel pénitentiaire à la vie communale Nous avons vu tout au long de l’étude que les gens et les municipalités ont de gros problèmes à accepter une prison près de chez eux. Pour améliorer l’intégration de ces dernières dans la société et plus particulièrement dans la ville, il serait intéressant de ne plus la rejeter et aussi de prendre en considération les bienfaits qu’elle peut apporter. On peut noter que c’est une manne financière pour les villes qui les accueillent, elles intègrent les prisonniers dans le compte de la population, ce qui a pour conséquence pour la ville de récupérer plus de subventions, bien qu’elles refusent souvent de financer leurs activités culturelles et sportives. La ville gagne aussi en population avec l’arrivée massive de personnel pénitentiaire. Le maire peut même voir son salaire augmenter avec cette augmentation de population22. Une fois construite et opérationnelle, tout est fait pour cacher son existence et pour l’oublier, « rare sont les prisons fléchées et indiquées sur des panneaux23 », notamment à 20
Voir article construire l’abolition, vers la prison constitutionnelle publié le 25/02/2004 sur www.Ciberarchi.com 21 Voir photo du Metropolitan Correctional Center de Chicago en annexe 4 22 Anne-Marie Marchetti avec la collaboration de Philippe Combessie, « la prison dans la Cité », Desclée de Brouwer, 1996, p. 43 23 Philippe Combessie, « Prisons des villes et des campagnes. Etude d’écologie sociale », Editions de l’Atelier – Editions ouvrières, 1996, p. 83.
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Fresnes, où notre pratique du terrain l’a démontrée. C’est d’autant plus aberrant que cette commune est uniquement connue des français pour sa prison et que l’historique de la ville, présenté sur son site internet, ne la mentionne que sur deux ou trois lignes.
CONCLUSION
Notre étude nous a permis d’approfondir un sujet qui nous était presque inconnu. Cela s’est avéré très enrichissant et nous avons réussi à comprendre la situation de personnes vivant à proximité d’une telle infrastructure. Cette recherche pourra peut-être avoir des répercussions dans notre vie professionnelle future, non seulement sur le fond (peut-être aurons-nous à traiter d’implantations et d’intégrations de prisons) que sur la forme (découverte des méthodologies propres à la sociologie pour la réalisation d’études d’impact ou de satisfaction par exemple).
BIBLIOGRAPHIE
Documents papier : • • • • • •
MARCHETTI, Anne Marie avec la collaboration de COMBESSIE Philippe, 1996, « La prison dans la cité », Desclé de Brouwer Commission extra-municipale du respect des Droits, juin 2000, « Prison de Lyon, regards et réflexions » COMBESSIE Philippe, 2002, « La ville et la prison, une troublante cohabitation », article paru dans la revue Projet, n° 269, pp.70-76. COMBESSIE Philippe, 1996, « Prisons des villes et des campagnes. Etude d’écologie sociale », Editions de l’Atelier – Editions ouvrières CLAUDE Veil et LHUILIER Dominique, 2000, « La prison en changement », Eres EZRATTY-BADER Myriam, 1985, « architecture et prisons : rapport présenté à Monsieur le garde des Sceaux par la convention d’étude », Ronéo Paris - direction de l’administration pénitentiaire
Documents numériques : • Encarta 2005 • Site de la communauté d’agglomération du val de bièvre, http://www.pld-valdebievre.fr/article/simpletext/448/ • Dossier de presse, ville de Bourg-en-Bresse, réunion publique du 23 mars 2006, le futur centre pénitentiaire et son insertion dans le paysage. • Site du PLU de l’Haÿ-les-roses, http://www.lhay-plu.fr/article/articleview/170/1/3/
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