Fonds Souverains_sept2008

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Université de Nice - Sophia Antipolis, Nice Hedge Funds Research Institute, Monaco

FONDS SOUVERAINS Aperçu, justification et impact sur les marchés financiers Kazım Memmedhüseyn

Directeurs : Prof. Dr. Claude Berthomieu et Dr. Nathalie Hilmi

Septembre 2008

Plan Introduction I-

Mise en contexte : qu’est-ce qu’un fonds souverain? 1. Une définition commune a) Essais de définition b) Consensus impossible ? 2. Les fonds souverains dans l’économie mondiale a) L’état des lieux actuel b) Perspectives d’évolution c) Les fonds souverains et les hedge funds : analyse comparée 3. La théorie sous-jacente de la création des FS : les objectifs a) La raison d’être : les avantages attendus b) La portée pratique : mission impossible ?

II-

Conséquences de l’émergence des FS sur l’économie des pays récepteurs

1. Les enjeux de comportement des FS a) Stratégies de placement b) Questions autour de transparence 2. Effets sur les marchés financiers a) Impact sur les prix d’actifs b) Impact sur la liquidité 3. Quelle réglementation pour les FS ? a) Faut-il réguler les FS ? b) Les propositions de réformes Conclusion

2

Introduction Les fonds souverains (FS) sont en train de devenir aujourd’hui un élément important du système financier international en étant bénéfiques pour les pays d’origine, tout comme les pays destinataires de leurs investissements. Ce sont des fonds publics d’investissements financiers, gérés indépendamment du bilan de la Banque Centrale du pays. Ainsi, leurs réserves de devises ne font pas partie de la masse monétaire et le pays peut les réinvestir à l’étranger, ce qui permet une diversification accrue du portefeuille financier à un taux d’intérêt plus élevé. Ne comprenant pas des obligations directes à court terme, ils peuvent tolérer des niveaux de risque plus élevés. Contrairement aux hedge funds, ils ne se servent pas de l’effet de levier pour se financer et donc ne sont pas exposés au risque de contrepartie. Bien que très divers selon leurs pays d’origine, leurs objectifs, leurs stratégies, leur mode opératoire etc., les FS ont des caractéristiques communes qui permettent de les regrouper sous cette appellation. Selon une étude de Morgan Stanley1, les fonds souverains doivent présenter les cinq aspects suivants : contrôle de l’Etat, une grande partie d’actifs libellée en devises, pas d’engagements explicites2, tolérance au risque élevé, horizon d’investissement long. L’essor des FS est dû à la situation macroéconomique mondiale actuelle marquée par des déséquilibres mondiaux battant leur plein, par les réserves de changes asiatiques importantes et par les prix des matières premières atteignant un niveau record (céréales, pétrole, métaux, etc.). La Chine avec sa monnaie largement sous-évaluée, a amassé des excédents importants se traduisant par une accumulation de réserves de devises dans la Banque Centrale du pays. Les pays asiatiques, après l’expérience amère de la crise financière et économique de 199798, ont accumulé, eux aussi, des réserves de change importantes grâce à leurs exportations. Enfin, les pays exportateurs de matières premières ont pu profiter des prix mondiaux fort élevés pour constituer un niveau considérable de réserves de change. Dans certains cas, ce sont les recettes de la privatisation des entreprises publiques qui se sont rajoutées aux avoirs

Jen (2007b) Contrairement aux fonds de pensions qui eux, doivent se provisionner en fonction des obligations de prestations prédéfinies par ces fonds pour leurs cotisants. 1 2

3

des FS. Ceci a créé un contexte propice à l’introduction des véhicules d’investissement publics : l’importance de ces flux est devenue tellement grande pour ces pays qu’il devenait difficile pour les autorités monétaires de contrôler les agrégats macroéconomiques. Malgré leur existence depuis les années 50s du siècle passé, les fonds souverains n’ont commencé à attirer l’attention du grand public que depuis septembre 2007 avec leurs acquisitions de parts importantes dans les grandes banques américaines troublées par la crise actuelle du crédit, dite de sub-primes. Vue la grande sensibilité de l’opinion publique des pays industrialisés aux questions de l’achat des entreprises locales par les étrangers (sans parler des fonds régis par les Etats), il y a actuellement un danger de voir les politiciens verser dans le populisme s’ouvrant sur un protectionnisme, néfaste pour les économies tant des pays industrialisés que des pays en développement. Ceci dit, les risques politiques ne sont pas absents, car ces fonds restent des entités étatiques et donc soumis aux contraintes de la stratégie globale de l’Etat. Dans ce contexte, il devient obligatoire pour les économistes de présenter une analyse scientifique robuste, libre de toute charge idéologique, pour pouvoir peser sobrement tous les risques, mais aussi les bénéfices que présente ce phénomène que sont les fonds souverains. L’émergence des FS dans ces circonstances est à la fois prometteuse et inquiétante. Grace à leur horizon d’investissement plus long, ils constituent une source importante de liquidités pour les marchés financiers. Ils peuvent également jouer un rôle important dans le développement financier des pays en développement. En même temps, il y a eu des interrogations sur la neutralité politique de leurs investissements car la plupart de ces véhicules financiers ne sont pas assez transparents. Aussi, le poids individuel de certains FS les positionne comme potentiellement perturbateurs pour les marchés financiers internationaux. L’importance des FS a été longtemps soulignée dans les recherches concernant les fonds pétroliers comme une solution au paradox of plenty, où l’abondance de ressources naturelles conduit les économies exportatrices à des performances médiocres au lieu qu’elles soient le moteur de leur développement. Or, les arguments théoriques avancés pour la

4

création de ces fonds ont été souvent critiqués, car ceci peut soulever de nouveaux défis pour les économies des pays exportateurs de ressources naturelles3. D’un autre cote, les fonds pétroliers ont été souvent vus comme un instrument de la politiques fiscale, un simple « voile », dans le sens où les pays qui les établissent sont ceux qui sont déjà soucieux de l’avenir de leur rentrées fiscales et donc sont les plus prudents. Pourtant, cet argument néglige le rôle des FS dans la conduite de la politique monétaire et leur effet sur la stabilité macro financière du pays. Les FS permettent ainsi de baisser la volatilité des prix des actifs financiers locaux tout en évitant une inflation excessive causée par les flux entrants importants4. Il faut dire que les arguments valables pour les fonds pétroliers ne le sont pas toujours pour la totalité des FS, car une partie importante d’entre eux ont des origines, des objectifs et des stratégies différentes. Donc, une classification des FS selon ces caractéristiques est nécessaire avant d’analyser leur impact sur l’économie internationale. Parallèlement, des auteurs se sont interrogés sur le niveau de liquidité internationale et le rôle nouveau pour les FS de fournisseurs de cette liquidité. Une fois de plus, la définition et les mesures de liquidité doivent être précisées pour pouvoir traiter de l’impact des FS sur les conditions de liquidité globale. Dans ce travail, nous allons aborder les sujets mentionnés dans l’ordre suivant : nous allons commencer la première partie en donnant les différentes définitions des FS afin de voir s’il serait possible d’en arriver à une définition commune. Puis, nous allons essayer de déterminer la place des FS dans l’économie mondiale et d’examiner leur évolution future. Leur classification sera faite sur la base de ces définitions. Après avoir distingué ainsi les FS dans la panoplie des acteurs financiers publics, nous allons regarder leurs différents objectifs et les stratégies qu’ils adoptent pour les atteindre. En suite, nous allons essayer d’analyser en détail les mécanismes par lesquels se propage l’abondance de liquidité en provenance des FS dans les marchés financiers internationaux. Nous allons clore par une tentative de synthèse critique.

3 4

Davis et al. (2001) Shabsigh et Ilahi (2007)

5

I.

QU’EST-CE QU’UN FONDS SOUVERAIN ?

1. FS : Une définition commune ? a) Essais de définition La nécessité d’une définition claire des FS acceptée par la communauté scientifique semble évidente afin qu’on puisse comparer les analyses et ne pas avoir des avis divergents sur la base de raisonnements semblables. Cela permettrait une délimitation statistique entre les différents acteurs publics intervenants sur les marchés financiers et ne préjugerait pas des résultats analytiques. De même, cela faciliterait la tache du régulateur public confronté au défi de dresser ou de modifier les règles concernant les investissements directs étrangers dans le pays. Pourtant, les travaux existants sur les FS font souvent défaut d’une définition commune de ce que sont les FS et de ce qu’ils ne sont pas. La pratique courante est d’adopter une « définition de travail » au début de l’ouvrage pour justifier le choix des fonds considérés. E. Truman (2008c) voit les FS comme « les avoirs en possession ou sous le contrôle du gouvernement dont une partie contient des actifs internationaux». Il inclut dans la notion des FS - à coté des fonds publics hors-pensions - les fonds de pensions souverains (FPS), dans la mesure où les deux entités « gèrent des actifs échangeables sur le marché5».

Le Fonds Monétaire International définit ainsi les FS comme : « Les fonds ou les arrangements 6 d’investissement publics qui sont en possession ou sous administration de l’Etat et qui détiennent, gèrent, ou régissent des actifs, principalement pour réaliser des objectifs financiers et macroéconomiques de moyen et long terme. Ils sont habituellement établis à partir des opérations sur devises par les autorités monétaires, des recettes de privatisations, des excédents fiscaux et/ou des recettes des exportations des matières

Truman (2008b), Témoignage auprès du Congrès américain. Sous le terme diffus « arrangement », il faut probablement comprendre des entités telles que « autorité d’investissement », « conseil d’investissement » ou encore « agence d’investissement », ces appellations étant répandues parmi les FS à travers le monde. 5 6

6

premières. Ces fonds adoptent des stratégies variées dont les placements en actifs financiers étrangers. »7 Cette définition parait la plus complète, car elle regroupe et détaille les éléments les définitions précédentes.

Remarquons, toutefois, qu’elle n’évoque pas explicitement la

séparation des avoirs des FS des bilans des Banques Centrales. Or, plusieurs auteurs s’accordent sur ce point particulier8. Contrairement à cette vision assez restreinte des FS, Nugée(2008)9 remarque que les placements de Korea Investment Corporation et de Hong Kong Monetary Authority ne sont pas techniquement séparés des réserves de change des banques centrales. Or, ce sont des FS de fait, dotés de portefeuilles d’actifs considérables. En ce qui concerne les placements à l’étranger, il nous fait remarquer que le Khazanah malaysien, le Samruk kazakh, le SASAC chinois et même le fameux Temasek singapourien détiennent une partie considérable (et même essentielle) de leurs actifs en actifs locaux. Il en va de même pour beaucoup de fonds de pensions souverains tel que le fonds japonais à titre d’exemple. Dés lors, pour élargir au maximum le concept de « fonds souverain » afin d’inclure toutes ces formes possibles, Hoguet et al. (2008) proposent d’appeler FS « tous les ensembles d’actifs en possession étatique qui ne sont ni les fonds publics de pensions traditionnels, ni réserves traditionnelles qui soutiennent la devise nationale ». Jen (2008b) donne cinq éléments nécessaires pour définir un FS. Selon lui, ce sont des fonds publics dont la plupart des actifs est libellée en devises. Ils n’ont pas d’obligations explicites dans leurs bilans (ce qui les distingue des fonds de pensions privés) et acquièrent des actifs à risque plus élevé et donc à rendement respectivement plus élevé, effectuant des placements à plus long-terme que les Banques Centrales, car les besoins en liquidité immédiate des FS ne sont pas élevés.

FMI (2008). La définition contient également une référence aux différents objectifs des FS. Nous nous y référons plus loin dans cet ouvrage, 8 Voir par ex. Lowery(2007), Truman (2008b), Jen(2007a,b,c), Miracky et al.(2008). 9 J. Nugée, «The growing role of SWFs‛ in Hoguet et al.(2008) 7

7

Miracky et al. (2008) du Monitor Group mettent en avant trois critères pour définir ce qui constitue, pour eux, un FS. Ils évoquent la propriété étatique, la séparation des bilans de la Banque Centrale, du Ministère des Finances et du Trésor Public. En revanche, la propriété de tolérance plus élevée au risque est plus élaborée dans la définition de Monitor Group que dans les définitions du FMI(2008) et de Jen(2007) : « les fonds souverains investissent dans des actifs de différentes classes et profils, y compris des obligations, des actions, de l’immobilier et des instruments alternatifs10, avec une part considérable d’actifs sous gestion (AsG) investie dans des actifs à plus haut risque à l’étranger ». Ce dernier point reflète l’essence du débat sur les FS : s’ils investissaient dans des actifs à bas risque ou alors uniquement chez eux, cela ne susciterait pas d’inquiétudes. Malgré leur choix d’une « définition de travail » pour constituer une base de données sur les FS11, les auteurs du rapport de Monitor Group tiennent toutefois à remarquer que chaque fonds est unique et est créé dans un contexte spécifique pour atteindre des objectifs particuliers de son pays d’origine. Donc, il est impossible de donner une définition des fonds souverains exacte sans laisser certaines de ces entités publiques en dehors des lignes d’analyse.

b) Un consensus impossible? C’est dans ce contexte que Jen (2007) met en perspective lesdites cinq caractéristiques des FS avec d’autres entités publiques, soutenant que celles-là ne sont pas uniquement propres aux FS. De surcroit, si on tient compte de la grande diversité des FS eux-mêmes, ainsi que des fonds de pensions publics, cela fait que la frontière entre les FS et les autres acteurs publics s’estompe. Alors, au lieu d’une définition précise des FS, Jen propose une Les placements alternatifs incluent, entre autres, des achats de titres OPCVM, des participations aux hedge funds et aux sociétés de capital-investissement ou des achats directs de parts non-cotées, des fonds d’indices ou d’achat direct de métaux précieux (et surtout l’or), etc. Ce sont des actifs absents des portefeuilles de placement traditionnels, car leur valorisation efficace par le marché n’est pas facile. 11 Monitor SWF Transaction Database qui contient 1180 transactions d’achat d’actions par les FS parues dans les rapports disponibles au public entre 1975 et mars 2008 et qui représentent 250 mlrds de USD en valeur. Les auteurs avouent cependant que c’est probablement juste la partie émergée de l’iceberg. 10

8

présentation de tous ces acteurs le long des axes de caractéristiques d’abord sur le plan «engagements – actifs en devises », puis sur le plan « risque – horizon de placement». Une telle approche permet de situer les FS dans la gamme des véhicules publics de placements financiers et de les mettre en perspective avec les fonds collectifs privés. Le diagramme 1 ci-contre montre le degré d’exposition des FS aux devises étrangères par rapport au reste des entités en question, ainsi que la nature de leurs engagements. Les dimensions des rectangles

de

chaque

représentant

l’intensité

caractéristique

considérée,

organisme de

la

on

peut

observer que les FS, tout comme les fonds de pensions souverains (FPS), sont très étendus sur ces deux dimensions. Ce fait témoigne de leur diversité et contraste avec les fonds de pensions privés qui ont des engagements explicitement définis par les contrats d’assurance passés auprès des souscripteurs. En revanche, le contenu en devises est assez variable, tout comme celui des FPS. Quant aux réserves de devises, elles sont par définition au coin droit du diagramme et tout en bas car les FS n’ont aucun engagement explicite (les bons du Trésor émis pour financer les opérations de stérilisation des flux financiers entrants ne constituent, pour Jen, que des engagements implicites. Sur ce plan aussi, les FS présentent plus de variabilité12, ce

Par exemple, le capital initial du CIC – le FS chinois – vient explicitement des bons du Trésor spéciaux sur lesquels il a l’obligation de payer des intérêts annuels de 4.3% à effectuer sur une base biannuelle (ChinaStakes.com « China's sovereign wealth fund in interest troubles » 5 Mars, 2008). Ceci revient à devoir gagner 300 mln yuans par jour pour honorer ses engagements – une tache toujours pas accomplie par le CIC, vu ses acquisitions de parts dans les entreprises souffrant de la crise des subprimes, l’appréciation permanente du yuan et l’écart entre ses engagements en yuans et ses actifs en dollars (currency mismatch). A présent, un arrangement a été trouvé entre le CIC et le Ministère des Finances, selon lequel ce dernier honore l’intérêt sur la dette en tant qu’émetteur et le CIC lui verse les dividendes sur les profits (Ibidem, Interest payments? That’s none of CIC’s business, 28 août, 2008). 12

9

qui est traduit par un rectangle plus large). Le chevauchement entre les FS et les FPS vers le centre du diagramme représente la difficulté-même de la définition des fonds souverains.13 Le diagramme 2 montre le positionnement des

acteurs

en

matière

d’horizon

d’investissement et de tolérance au risque selon Jen (2008). La petite taille des rectangles de la partie inférieure traduit l’homogénéité relative des hedge funds et des Banques Centrales, en ce qui concerne ces deux dimensions. Ces deux groupes sont semblables du point de vu de leur besoin élevé de liquidité et donc d’un horizon de placement très court, mais ils différent en matière de degré d’aversion au risque. En revanche, les FS et les FPP se placent dans la partie supérieure du diagramme, ce qui révèle leur préférence pour les placements de moyenne et longue durée avec un degré plutôt élevé de tolérance au risque. Cette caractéristique les distingue des fonds de pensions privés qui se situent au centre du diagramme, manifestant une neutralité sur les deux dimensions avec un léger penchant vers un horizon plus court et un risque plus élevé. Remarquons que les FS présentent, encore une fois, une grande diversité allant jusqu’à un risque très élevé et un horizon très long, alors que les FPP sont un peu plus homogènes, dans ces deux dimensions que dans le diagramme 1. Ce positionnement des FS le long des axes des principales caractéristiques à coté des autres entités publiques, est complété par le tableau à la page suivante. Il donne un bon aperçu des différences entre les entreprises publiques, les fonds de pensions publics et les fonds souverains proprement dits en ce qui concerne la propriété et le contrôle des actifs (le Cet exemple chinois présente l’inverse du phénomène du « péché originel » où les entreprises des pays émergents s’endettent en devises alors que leurs avoirs sont libellés en monnaie locale. 13 A ce propos, rappelons que Truman (2008) ne fait pas de distinction entre les FS et FPS car ils « gèrent des actifs échangeables sur le marché ».

10

dernier point évoqué par Jen, mais absent de ses diagrammes), mais aussi sur les caractéristiques secondaires relatives à la nature des FS, telles que la source de financement, la croissance des actifs, la transparence et l’objectif principal.

Ces caractéristiques sont

susceptibles de changer avec le temps et ne rentrent pas dans la définition des FS. Il est évident à la vue de ce tableau, que les FPP sont plus transparents car le contrôle de l’Etat y est moins direct. Ceci peut être attribué aux cotisants qui sont des propriétaires directs des actifs sous gestion des FPP. On pourrait songer que, la plupart des FPP provenant de pays à institutions plus développées, le contrôle de l’Etat est effectivement négligeable. Ainsi, les FPP sont soumis à la contrainte de prestations définies par ces fonds et le respect de ces obligations est assuré par la supervision des organismes représentant les cotisants.

Propriété des actifs

Fonds Souverains

Entreprises Publiques

Fonds de Pension Publics

Public

Principalement publique

Cotisants

Objectif principal Varié

Varié

Source de Matières premières / financement Réserves de change Contrôle de l’Etat Total Information Varié publique Croissance des actifs Rapide

Exemples

ADIC (Emirats) CIC (Chine) Temasek (Singapour) KIA (Kowaït)

Recettes fiscales / profits Considérable

Négligeable

Varié Stable

Transparents Stable

Chinalco Banco da Amazonia Rosneft EDF

Source : swfinstitute.org

11

Obligation de bénéfices définis par le fonds. Cotisations

CalPERS CalSTRS NYSTRS TRS of Texas

2. Les FS dans l’économie mondiale a) L’état des lieux actuel Les FS ne sont pas un fait nouveau dans la finance internationale. Sous des noms différents, ils ont existé et investi et se sont répandus à travers le monde depuis plus de cinquante ans. Le premier a été l’Autorité d’Investissement de Kuwait (KIA) dont la fondation remonte à 1953 dans le but de gérer les excédents des rentrées pétrolières du pays. Dans les décennies suivantes, les Emirats, le Singapour, le Brunei, et d’autres exportateurs

Source: Trésor-Eco (2008)

de pétrole, mais aussi la Norvège, les Etats-Unis et le Canada ont mis en place des FS. Le diagramme ci-contre montre la progression du nombre des FS dans le monde. On voit bien que les années 2000 ont connu une explosion de nouveaux FS dans les pays en développement comme dans les économies industrialisées. Si on inclut dans ce diagramme les FS en cours de création ou ceux dont la création est envisagée par de nombreux gouvernements dont ceux du Japon, de l’Inde et du Brésil, on voit clairement l’intérêt que représentent ces fonds. Et c’est bien dans les années 2000 (et surtout dans la deuxième moitie de celles-ci) que l’activité des FS a connu un essor particulier – la valeur des transactions effectuées pas les FS a été multiplié par plus de trente fois, comme le met en évidence le diagramme ci-dessous.

En revanche, malgré ces chiffres, l’intérêt médiatique pour les FS n’a été suscité qu’après la création du fonds chinois CIC qui a investi 3 mlrd. d’euros dans les 9.9% du capital de Blackstone, groupe de capital-investissement 12

américain. Après cet événement clé, les FS en provenance de Chine, de Singapour et des pays du Golfe ont encore investi dans les banques américaines au bord de la faillite à la suite de la crise des sub-primes. Malgré le silence obligé des politiciens dans cette période cruciale de l’industrie

Source: Blundell-Wignall, Yermo et Hu (2008)

financière américaine, une montée des sentiments protectionnistes est évidente chez les politiciens comme dans l’opinion publique14. Toutefois, ce qui inquiète les politiciens semble être plus la concentration de la richesse dans quelques fonds clés plutôt que l’augmentation du nombre total de ces fonds. Ci-dessous on peut observer l’écart entre le nombre limité des grands FS et le reste de ce groupe.

14

Voir par ex. : Financial Times, 29 Avril 2008

13

Distribution des fonds de pensions souverains Cet écart peut paraitre encore plus saillant si l’on se reporte à la distribution de richesse parmi les fonds

de

pensions

publics

(souverains) si l’on se reporte au diagramme suivant. Or, si on exclue les fonds de pensions souverains (FPS) japonais et, à la rigueur, le FPS coréen, on voit que la richesse est beaucoup plus équitablement distribuée parmi les FPS. Ceci dit, l’écart entre le Source: Blundell-Wignall, Yermo et Hu (2008), OECD

FPS japonais et le reste du lot est très grand : les FPS suivants (comme le chinois et le suédois) sont dix fois plus petits que le fonds japonais. En termes de pourcentage, ces chiffres nous donnent l’image suivante pour les FS hors-pensions. Trois quarts des FS du monde entier appartiennent seulement à cinq pays dont quatre n’ont pas de mécanismes d’approbation

institutionnels de

décisions

gouvernementales15.

www.swfinstitute.org, calcul de l'auteur

Bien que l’importance des institutions démocratiques ne soit jamais exagérée, on a pu constater que leur présence n’a pas empêché l’Etat perçu comme un des plus démocratiques de bafouer les principes de base du droit international (en Serbie, en Irak) et d’observer en silence quand un autre a fait la même chose (en Géorgie). 15

14

La répartition géographique des actifs gérés par des FS est représentée dans le diagramme ci-contre avec plus de moitié provenant du Moyen Orient (essentiellement du Conseil de Coopération du Golfe) et prés d’un tiers de l’Extrême Orient (Chine, Singapour, Corée du Sud, Malaisie). L’Europe est représentée à l’hauteur de 18% par le FS norvégien, l’Afrique compte pour 3% essentiellement avec les fonds de l’Algérie, de la Lybie, du Nigeria et du

Source: Maslakovic (2008)

Botswana. En Amériques se distinguent les fonds vénézuélien et chilien qui occupent ensemble avec les fonds des états américains (Wyoming, Alaska, New-Mexico, Alabama) et des provinces canadiennes (Alberta, Québec), 2% du spectre. Enfin, l’Australie et l’Océanie comptent pour 3%. La perception conventionnelle de la répartition géographique des acquisitions

des

FS

est

qu’ils

effectuent des placements dans les entreprises

des

pays

développés

(d’où les craintes nourries par les théories des complots 16 , etc.). Les diagrammes

suivants

donnent

l’image des investissements des FS par région. On peut remarquer que, si l’on se réfère au nombre de transactions plutôt qu’à leur valeur par région, cette perception devient impertinente. Ainsi, Miracky et al. (2008)

16

Reisen (2008) cite le journaliste Jim Cramer de la chaîne CNBC: «Voulons-nous que les communistes ou les terroristes détiennent les banques? Je prendrai tout ce qui s’offre, j’imagine, parce que nous sommes aux abois.» (CNBC, 18 janvier 2008).

15

constatent que la moitié des transactions examinées par leur étude statistique ont eu lieu dans les pays en développement hors BRIC17. Farrel et al. (2007) de McKinsey Global Initiative comparent les industries entières des FS, HF et private equity avec les gestionnaires d’actifs individuels et en déduisent leur influence potentiellement importante sur les marchés financiers. Or, vu leur diversité, une approche plus minutieuse consisterait à comparer les FS individuels aux grands acteurs de la finance mondiale. Ainsi, Lyons(2007) de Standard Chartered trouve à l’aide du tableau cidessous qu’ils disposent pour le moment d’actifs nettement moins importants par rapport aux

entités

privées

en

question.

Ainsi, même le fonds géant d’Abu Dhabi qui détient a lui seul 25% 18 des actifs des FS, n’atteint que la moitié de la moyenne des actifs des dix premiers groupes financiers privés. Par ailleurs, seulement quatre FS individuels dépassent les avoirs du cinquantième plus grand groupe financier privé. Ceci dit, comme le met en évidence le tableau ci-dessous ils sont largement plus grands que les fonds privés de capital-investissement (private equity) et de

gestion

alternative

(hedge

funds).

Brésil, Russie, Inde, Chine. En tant que membre de l’OECD, la Turquie et le Mexique sont aussi exclus de ces 50%. 18 Et encore, ceci ne reste qu’une estimation très approximative des avoirs de l’ADIA. Lesdits 25% correspondent au plafond d’une estimation que différents auteurs placent dans une très large fourchette de 200 à 875 mlrds USD(voir FMI (fev 2008). 17

16

Sources: Alpha Magazine, May 2007; Cerulli Associates; IMF; Private Equity International, May 2007; Public Information; and Citi

Les analystes de Citigroup qui ont construit ce diagramme font une comparaison très intéressante: chacun des six plus grands FS dépasse les actifs de chacun des trois plus grands hedge funds et des groupes de private equity augmentés d’un levier financier de quatre à sept fois. Dans l’ensemble, il faut dire que les fonds souverains méritent bien l’attention qui leur est accordée par les médias de par leur taille considérable. Toutefois, ils sont loin d’être le seul acteur décisif sur la scène financière mondiale et encore plus loin d’en être le principal. Ce positionnement est susceptible de changer au cours du temps, mais le changement est conditionnel au plusieurs facteurs de l’environnement économique mondial. C’est cette évolution que l’on va essayer de tracer dans la section suivante. b) Les perspectives d’évolution Malgré son effet palpable sur les marchés financiers internationaux, à moyen terme, cet effet ne restera que limité, même avec le taux d’accumulation courant. Si on suppose que les prix des matières premières reviendront, à moyen terme, à leurs niveaux historiques, cet effet parait encore plus modeste. Les diagramme suivants corroborent bien ce raisonnement et permettent de mettre en échelle les FS avec les principaux acteurs sur les marchés financiers.

17

Les avoirs des FS dépassent les actifs cumulés des industries de HF et de private-equity. Cependant, leur taille reste modeste, comparée à l’ensemble du

marché

mondial

des

valeurs

mobilières, ainsi qu’à la plupart de ses constituants, tel que les investisseurs institutionnels, le marché des actions et des

obligations.

Il

est

également

inférieur à la valeur globale de toutes les actions et obligations échangées sur le marché américain, mais aussi sur l’ensemble des marchés émergents. Cependant, la taille des SWFs Source: Hoguet et al. (2008)

ne peut pas être négligée à l’égard des

marchés des pays émergents pris séparément, surtout si l’on compare la taille des FS individuels avec les marchés financiers des petits pays 19 . Les cycles d’expansion et de contraction rapides peuvent s’avérer fatals, amplifiés par les actions des FS20. De surcroit, afin d’appréhender le potentiel perturbateur des FS, il semble plus logique de comparer la taille d’un segment donné du marché financier d’un pays aux avoirs des FS individuels, plutôt que de considérer la taille de l’ensemble du marché financier du pays. Un exercice illustratif Ce danger est illustré par un incident récent impliquant le FS norvégien dans la spéculation contre les banques islandaises. Alors que le fonds norvégien disait avoir poursuivi une logique strictement financière, le gouvernement islandais l’a qualifiée de politique et d’hostile (B.Setser «Norway was against Iceland before it was for iceland » Blog Follow the Money, Council on Foreign Relations). Cela montre l’importance du simple rapport de taille, même si les intentions ne sont pas politiques (l’incident a été résolu par un contrat de swap d’urgence de devises par les trois Banques Centrales nordiques). 20Ceci dit, les grandes entreprises privées des pays développés ne sont pas non plus immunes aux influences politiques de leurs pays d’origine. Rappelons-nous de l’article célèbre de J.Bhagwati où il qualifie la mobilité notoire des dirigeants entre les secteurs privé et public américains de « Wall-Street – Treasury Complex ». (Bhagwati,J. (1998) ‚The capital myth : the difference between trade in widgets and dollars‛ Foreign Affairs, mai-juin) 19

18

serait de prendre un pays comme le Chili et de comparer la capitalisation boursière de ses entreprises avec un fonds «moyen » comme celui du Qatar. De même, on peut prendre la valeur de l’ensemble des obligations d’Etat émises par la Turquie et la comparer à la moyenne arithmétique des actifs des dix plus grands FS. Les écarts, dans ces deux cas de figure, apparaitront loin d’être modestes. Une autre observation importante que dégage le tableau, est la vitesse d’accumulation des fonds dans les FS : elle est largement supérieure à la croissance de tous les segments du marché des investisseurs institutionnels et plus de deux fois supérieure à la croissance des réserves officielles de devises. La croissance des fonds souverains ces dernières années est expliquée par l’image ci-contre qui représente l’équilibre de la balance mondiale de

paiements.

L’importance

de

l’énorme déficit americain et des plus modestes déficits européens est à la fois la cause et la conséquence de l’essor des FS asiatiques et dans Source : Citigroup (2008)

une moindre mesure, des exportateurs de pétrole. Même sous l’hypothèse des prix élevés de pétrole, les FS qui atteindront 12 mlrd de doll. en 2012. seront quand même plus de quatre fois plus petits que le marché des actifs des investisseurs institutionnels (diagramme rouge) et sept fois plus petits que toute l’industrie des fonds d’investissement. Tout ceci sans parler du marché financier global, de 167 trlns. USD en fin 200721 selon McKinsey Global Institute et 190 trlns selon le FMI22 – donc des montants quarante fois plus importants que ceux de l’industrie des FS. Toutefois, 21 22

McKinsey (2007) FMI (fev, 2008). Cette estimation serait encore plus élevée si on incluait les actifs réels.

19

remarquons que la valeur des titres échangés réellement sur les marchés financiers est inférieure à ces chiffres. Ce calcul de l’ordre des grandeurs n’est valable que si l’on considère l’hypothèse selon laquelle le prix du pétrole restera au niveau

élevé

actuel.

Or,

les

transferts futurs dans les fonds souverains des pays exportateurs de pétrole (actuellement deux tiers des actifs totaux des FS) dépendent

fortement

de

l’évolution du prix du pétrole. Ainsi, les recherches de JP Morgan envisagent différents surplus

deux selon

des

scénarios lesquels

les

exportateurs

de

pétrole varient considérablement. Dans le cas où le scénario à prix bas se réalise (fourchette 50-70 USD par baril; points jaunes,) les rentrées pétrolières (et donc les transferts conséquents aux FS) seront

deux

fois

moins

importantes que dans le cas où le pétrole

reste

qu’aujourd’hui.

20

aussi

cher

Or, c’est le scénario à prix élevé qui est envisagé dans la plupart des travaux émergents sur les FS. C’est ainsi que S. Jen, de Morgan Stanley Research, estime que, vers 2011, la situation actuelle - où les réserves de devises sont plus importantes que les actifs des FS (chart 4) - sera renversée. Le graphique suivant illustre ses calculs. Avec une telle vitesse d’accumulation les FS atteindraient la valeur de près de 12 trlns dollars en 2015, alors que les réserves officielles monteront à moins de 8 mlrds USD seulement. En revanche, Farrel et al. (2007) de McKinsey Global Institute considèrent qu’au prix du baril à 50 USD, les pays-pétroliers auront près de 6 mlrd USD d’actifs sous leur gestion. Même si l’on considère que la bulle pétrolière dégonfle jusqu'à 30 dollars par baril, la croissance des réserves des pays pétroliers restera très forte. BlundellWignall et al. (2008) remarquent que, même s’il y a des coûts de production pour le pétrole et si une partie des recettes est consommée, les recettes nettes resteront très importantes 23 .

Le

diagramme ci-contre illustre les besoins immédiats en liquidité des pays pétroliers du Moyen Orient selon leurs balances commerciales. Vu les excédents déjà importants de cette liquidité, il serait judicieux de considérer que les nouvelles recettes seraient canalisées vers leurs fonds souverains respectifs. Ce raisonnement est encore plus renforcé par le résultat empirique du travail récent de Wiegand (2008), selon lequel le recyclage des pétrodollars en provenance du Moyen-Orient ne s’est pas effectué par des dépôts bancaires lors du boom pétrolier actuel24.

Selon l’exemple des auteurs, au prix de 100 USD et à la consommation journalière mondiale de 85 mln de barils, une somme de 3 mlrds USD est transférée aux pays pétroliers. 24 La période étudiée par Wiegand est 2001- 2006. 23

21

Cependant,

l’évolution

des

réserves officielles suggère que les fonds asiatiques dépasseront, dans un futur proche, les fonds pétroliers. Ainsi, S.Jen voit ce renversement à l’horizon de 2015 (diagramme cicontre). Le diagramme suivant (cidessous) met en échelle les réserves

Source : Morgan Stanley

de devises des pays avec leurs parts transférées aux FS respectifs. On peut remarquer que les pays comme la Chine et la Russie, ont encore beaucoup de marge de transfert vers leur FS, vu leur réserves abondantes en devises. Ruiz-Arranz et Zavadjil (2008) dans un travail empirique confirment cette intuition en trouvant que la Chine, Singapour, la Malaisie (et dans un moindre degré la Corée du Sud) ont récemment dépassé le seuil optimal des réserves

et

suggèrent

que l’émergence de leur FS respectifs serait due à ce constat25. Selon

Portman

(2008), avec le temps l’accumulation

d’actifs

Source: Financial Times

stratégiques à l’étranger va induire des flux considérables de revenu de placements et de profits d’investissements en provenance des pays développés vers les pays en développement. Cela va contribuer à la réduction des déséquilibres mondiaux.

Remarquons, tout de même, que le niveau des réserves actuelles des pays asiatiques (à l’exception de la Chine) n’est pas jugé excessif selon les auteurs, mais l’émergence des FS serait un signe de saturation. 25

22

Il est vrai que, à l’issue de la crise actuelle du crédit, les pays industrialisés seront graduellement amenés à réduire leurs déficits commerciaux, ce qui peut ralentir la croissance des FS. D’autre part, si le prix de pétrole baisse, suite au ralentissement de la croissance mondiale ;

Source : Portman (2008). Mlrds USD. Le tableau exclue les réserves de la Chine.

cela va contribuer à la hausse des exportations des produits manufacturiers

des pays asiatiques. Par conséquent, les excédents commerciaux vont encore augmenter se traduisant par une accumulation des ressources dans les FS. Et, si les prix des matières premières montent, cela va augmenter les excédents des exportateurs de pétrole26. Dans ce contexte, les déséquilibres mondiaux des balances de paiements n’ont manifestement pas de tendance à la baisse à moyen terme et donc les fonds souverains qui sont une conséquence directe d’une telle situation ne seront pas qu’un phénomène temporaire. De surcroit, même si les ressources naturelles sont épuisées (bientôt pour certain pays, plus tard pour d’autres), les fonds souverains resteront des acteurs permanents de la scène financière internationale27 (bien entendu, à condition que les Etats respectent les limites qu’imposent, en général, les législations nationales sur le financement du budget par les FS). S’ils sont gérés prudemment, ils peuvent générer du profit qui suffira largement pour couvrir les engagements implicites de financement des projets publics.

Johnson, 2007 Ainsi, un bon exemple est celui de Kiribati dont la production de phosphates est depuis longtemps terminée, mais le FS destiné à recycler les surplus de ses recettes est bien là (The Economist(2008)). 26 27

23

c) Les fonds souverains et les hedge funds : une analyse comparée Pour compléter l’exposé sur la place des FS dans l’économie mondiale, nous allons les confronter, dans cette section, avec leurs cousins issus du monde privé, en matière de taille, d’évolution, de stratégies, etc. Cette démarche permettra, également, de mieux saisir la nature des placements par les FS et de comprendre les enjeux dans le débat de la réglementation. Au niveau de la taille, l’industrie actuelle des FS est, d’après les plus modestes calculs, au moins trois fois plus importante que le secteur des hedge funds (HF). Si on prend en compte également les fonds de pensions souverains, l’écart monte à plus de cinq fois. L’accumulation des fonds dans les FS est plus rapide que dans les HF. Ainsi, les FS reçoivent des transferts réguliers des recettes des Etats, alors que l’industrie des HF connaît actuellement une période très délicate de son évolution avec des pertes importantes liées à la crise des sub-primes28. Tandis que les FS n’ont pas d’engagements explicites, le bilan des HF présente un usage de l’effet de levier considérable, le ratio de levier allant souvent jusqu’à 10:129 et même plus30 . Comme nous l’avions remarqué dans la section précédente, il serait judicieux, en comparant l’industrie des FS à celle des HF, de prendre en compte l’utilisation de ce levier financier par les HF. Cela montre leurs véritables capacités d’agir sur les marchés. Ainsi, un ratio de levier de 3:1 étant courant dans la plupart des HF, ceci augmente leur capacité de placement de trois fois. Dès lors, l’industrie des HF est loin d’être complètement dépassée par les FS. Ainsi, Farrel et al. (2008) estiment qu’avec un levier de 2,5 à 3,531, les HF atteignent 6 trlns. de USD, ce qui est plus important que les actifs des gouvernements asiatiques et de ceux des pays pétroliers. Par ailleurs, il existe de nombreux cas où les FS ont investi dans les entreprises à forte présence du levier financier. Ainsi, selon Farrel et al. (2007), les placements cumulés des FS Reuters, ‚U.S. hedge funds managing $3.9 bln closed in 2008‛, 26 mars 2008 Johnson(2007) 30 Lewitt (2008) 31 Ceci inclut l’endettement intégré au bilan, ainsi que le hors-bilan. 28 29

24

dans les hedge funds et les sociétés de capital-investissement ont atteint 350 mlrds. de USD fin 2007. Les exemples incluent les groupes de private equity Blackstone, TPG, Och-Ziff, GLG Partners, JC Flowers. Chez les hedge funds, les principaux bénéficiaires ont été « les fonds des fonds »32. D’après le rapport du groupe d’analyse et conseil Preqin (2008), 95% des SWF ont déjà investi dans le private equity. Une autre différence entre les FS et les HF réside dans la durée de leurs investissements. Les HF investissent à CT, alors que les FS investissent à LT. Dès lors, contrairement aux HF endettés et donc très attentifs au risque de contrepartie, les FS sont incités, du fait de la nature de leurs stratégies d’investissement, à intervenir sur les marchés financiers dans les périodes de déprime financière pour faire des achats bon marché en attendant que les prix se stabilisent à plus long-terme. Dans cette optique, la perte par CIC de 1 mlrd. de USD de valeur de son investissement dans Blackstone, société de capital – investissement américaine, n’apparait pas tellement dramatique. Une caractéristique importante de l’activité des HF est qu’ils prennent des risques et génèrent de l’innovation financière. Dans ce rôle, ils contribuent à une meilleure allocation de ressources financières. D’où, une approche assez tolérante de la part des régulateurs envers ces institutions. Et, pour se prémunir contre le risque systémique que représente la pratique du levier élevé, il est recommandé de surveiller leurs emprunts auprès des entités réglementées (donc, les banques, en général) plutôt que de les réglementer directement. Les FS, en revanche, posent un défi aux autorités de régulation, car tout en étant largement non-réglementés, ils sont susceptibles d’investir dans les HF (et plus généralement, dans des institutions non-réglementées), ce qui peut avoir des implications systémiques dangereuses, car ces derniers sont souvent « too-interconnected-to-fail »33. Ce sont les sujets sur lesquels nous allons réfléchir dans la partie suivante.

‚Foreign wealth pours into London's hedge funds‚, Guardian, 30 juin 2008. Les fonds des hedge funds spécialisent dans la diversification des placements à travers une large gamme de hedge funds. 33 K.Guha « The cost of a lifeline: humbled financial groups brace for more regulation‛ Financial Times, Analysis, 23 avril 2008. 32

25

2. La justification analytique de la création des FS

a) La raison d’être : les avantages attendus Les stratégies des FS obéissent aux objectifs initiaux que se fixent les Etats en les créant. Ces objectifs reposent sur les avantages attendus de la création des FS. Les théories économiques en matière de développement, de ressources naturelles, de finances publiques, ainsi que l’économie monétaire apportent un cadre analytique à ce raisonnement. Elles avancent ces arguments principaux en faveur de la création des FS : la stabilisation intertemporelle des flux de revenu national, l’optimisation du rapport risque-rendement, la diversification de la richesse nationale, la transparence accrue de la gestion des réserves, l’évitement de l’appréciation du taux de change. Dans la présente section, nous allons voir de plus près ces quatre points.

Les ressources naturelles ont deux caractéristiques importantes qui les rendent moins préférées en tant que réserves de valeur. Ce sont le fait qu’elles sont non-renouvelables et donc épuisables et la volatilité de leur prix sur le marché mondial. Davis et al.(2001)

proposent

le

graphique

suivant pour illustrer cette volatilité ; en termes réels elle est encore plus élevée qu’en termes nominaux. Une

telle

volatilité

des

recettes

pétrolières pose le défi de stabilisation des flux du revenu national afin de faciliter les prévisions budgétaires à court terme et d’atteindre une certaine équité

Source : Davis et al. (2001)

intergénérationnelle

revenu, à plus long terme.

26

de

ce

Une fois les ressources épuisées, la réhabilitation de l’économie devenue mono-productrice est difficile et on risque de voir le revenu de la population s’effondrer. La nation peut, certes, conserver les ressources sans les extraire, mais dans ce cas de figure, elle court le risque de transmettre aux générations futures les ressources dépréciées du point de vue de leur valeur marchande. De même, la compétitivité internationale d’un pays peut être passagère et donc présenter les mêmes défis en matière d’équité intergénérationnelle que les ressources naturelles épuisables.

Stabilisation Un fonds de stabilisation du revenu national est alors souhaitable. Il pourrait servir de dispositif fiscal de lissage du revenu entre des périodes de recettes élevées et basses, mais aussi il jouerait un rôle crucial dans la période de transition vers une économie qui ne serait plus basée sur les ressources naturelles. Vu la volatilité des prix de matières premières, un tel fonds de stabilisation viserait surtout la liquidité à court terme.

Diversification et optimisation de rendement Si, au lieu de les conserver, la nation décide d’extraire les ressources naturelles (surtout si la conjoncture mondiale est favorable) et d’investir les recettes dans un éventail plus large d’instruments financiers à travers le monde, cela peut permettre une diversification accrue des ressources. Si un tel changement de la structure géographique des placements s’accompagne d’un mouvement vers des actifs à rendement plus élevé dans la limite de risques raisonnables, la nation peut optimiser le rapport risque/rendement et faire fructifier ses réserves de change accumulées. Certes, l’extension du portefeuille de placements vers des instruments comme des titres de propriété et de dette privée, s’accompagne d’un risque plus élevé à court et moyen terme. Or, à long terme, ces risques sont moindres par rapport au rendement attendu, ce qui justifierait la décision de diriger les excédents de réserves de change vers des fonds d’investissement séparés et spécialisés dans ce type de placements. 27

Equité intergénérationnelle La décision d’extraire le pétrole se fait en arbitrant entre les gains futurs sur le produit de sa vente et le taux de l’appréciation future du pétrole. La règle de Hotelling de « déplétion efficace » permet au pays exportateur de choisir un taux d’extraction auquel le pays serait indifférent s’il veut conserver sa richesse dans le sol ou l’investir dans le marché international des capitaux. Une fois prise la décision d’extraire la matière première, elle se traduit par une réduction du capital global du pays, si les recettes ne sont pas entièrement réinvesties dans du capital financier, humain ou corporel. C’est la règle de Hartwick en matière d’équité intergénérationnelle. Amenuiser le capital global aujourd’hui en consommant les produits des ventes des matières premières équivaut à laisser moins de possibilités de consommation aux générations suivantes. Dès lors, les FS servent d’outils d’épargne pour ces générations futures. Le tableau suivant résume ces règles de décision en matière d’extraction minière.

Source : Collier(2007), Van der Ploeg(2008), résumé in Reisen (juin 2008).

28

Outils de la politique macroéconomique Nous avons évoqué ci-dessus que la volatilité des prix des matières premières peut engendrer une volatilité des revenus dans les pays explorateurs. Or, ses effets peuvent aller bien au-delà d’une distribution inégale du revenu dans le temps, – elle peut également compromettre la politique monétaire et modifier le niveau des prix et le taux de change. D’abord, il y a la question des flux de capitaux externes instables qui jouent directement sur les indicateurs monétaires. Dans le cas où le pays n’est pas mono-producteur et où il existe d’autres secteurs à capacité d’exportation, les FS peuvent garder l’économie contre le malaise hollandais, en évitant une appréciation du taux de change prohibitive pour ces secteurs industriels. Indirectement, la volatilité de ces flux affecte les agrégats monétaires par la réaction de la politique fiscale à la situation. A part les effets sur la volatilité des prix, de l’inflation et de la devise forte, la volatilité du taux de change est aussi un facteur nuisant au secteur nonpétrolier, à la formation du capital et à la croissance économique en général. Dès lors, l’établissement d’un FS peut aider à se prémunir contre la transmission de la volatilité des prix des matières premières aux agrégats monétaires. Shabsigh et Ilahi (2008) remarquent que, lorsque la stérilisation est effectuée via les fonds pétroliers, la pression sur la politique monétaire est moindre. Dans la même lignée, Prasad et Rajan (2005) proposent « une sorte de fonds mutuel » pour éviter la stérilisation de plus en plus couteuse par émission de bons de Trésor par les pays qui font face à des entrées excessives de capitaux. Cela aiderait à canaliser les fonds en dehors du système monétaire et donc à éviter l’inflation à moindre frais, tout en faisant fructifier ce capital au passage. Dans le cas où une cible d’inflation est visée par les autorités, mais où les instruments indirects de la politique monétaire ne sont pas bien développés, les FS peuvent être également utiles pour limiter l’inflation34. Toutefois, à coté de leur vertu dans le contrôle des agrégats monétaires, le FMI (feb 2008) note que, en rapatriant les dividendes, les FS peuvent perturber la politique monétaire si une coordination bien organisée n’est pas mise en place entre le FS et les autorités monétaires, car le rapatriement des dividendes des placements à 34

Wakeman-Linn et al (2003).

29

l’étranger implique une conversion en monnaie locale. De plus, les placements des FS à l’intérieur du pays émetteur peuvent générer une hausse de la demande intérieure, des bulles financières, ainsi qu’une liquidité élevée dans le système, facteurs pas forcément destructeurs, mais causes d’une complication supplémentaire de la politique monétaire.

Développement industriel En investissant les produits des ventes des matières premières dans les secteurs industriels à l’échelle internationale, les FS peuvent aider leurs pays respectifs à importer les techniques modernes de gestion et de production nécessaires à créer des secteurs compétitifs dans la période « après ressources ». C’est ce que sont en train d’accomplir, avec un visible degré de succès, les FS des EAU (les fonds de Dubaï et d’Abu Dhabi) en s’offrant des parts importantes des firmes des secteurs aéronautique, touristique et financier. Ceci paraît d’autant plus logique que, dans les pays qui s’attendent à une exploitation durable des ressources, une certaine appréciation réelle devient inévitable35. Alors, investir les recettes dans les secteurs non-pétroliers porteurs de croissance dans le futur semble une décision bien réfléchie. Certes, on pourrait imaginer de meilleures solutions pour maximiser le bien-être des citoyens. Ainsi, pour les dépenses d’investissement face à la vague de pétrodollars, Khan(2005) recommande les priorités suivantes pour une croissance durable dans le futur : des investissements dans des infrastructures, l’éducation, la santé et des programmes de création d’emplois. Il suggère aussi une augmentation de la demande adressée au reste du monde par le pays. Or, la taille de plusieurs pays dotés de grands FS (demande d’importations vite saturée, dette publique relativement peu élevée, etc.) est insuffisante et il existe des dangers d’injections de liquidité dans des systèmes financiers souvent peu développés. Donc, un complément nécessaire serait la politique de placement des excédents dans les grandes entreprises mondiales afin de bénéficier des avantages de réseaux et de Ibidem. Les auteurs comparent ainsi l’Azerbaïdjan (boom court) et le Kazakhstan (recettes élevées prévues sur période plus longue). Lutter contre l’appréciation réelle dans le premier pays est critique pour pouvoir profiter des revenus pétroliers, alors que pour le deuxième, à plus long terme, cette éventualité devient inévitable. 35

30

transfert de technologie, selon Reisen (2008). De surcroît, vu le contexte géographique de ces pays, les investissements en infrastructure seront forcement d’envergure régionale. A coté des pays pétroliers, les pays asiatiques à excédent commercial élevé suivent la même logique dans l’allocation de leurs fonds souverains36.

b) La portée pratique : mission impossible ? Nous avons exposé dans la section précédente les justifications analytiques avancées en faveur de la création des FS. Maintenant, nous allons essayer d’examiner les arguments empiriques qui sous-tendent cette analyse. Les FS comme outil fiscal de stabilisation Kern (2007) propose une excellente illustration de la volatilité des prix de pétrole comparée à celles de l’or, des bons de Trésor américains et d’un indice boursier américain37 dans le diagramme ci-contre. Davis et al. (2001) admettent le problème posé par la volatilité, mais critiquent fortement l’établissement d’un FS pour y remédier. Leur critique trouve sa justification dans l’analyse économétrique que les auteurs effectuent sur un échantillon de 12 pays exportateurs de matières premières, dont cinq dotés des FS. D’après le résultat de cette étude, la création d’un FS n’a pas eu d’impact identifiable sur les dépenses fiscales. Il semblerait que la causalité va dans le sens inverse, les pays les plus prudents en matière de dépenses créant des FS, alors que ce sont ces derniers qui sont censés augmenter la prudence des gouvernements. Aussi, les plus grandes difficultés de gestion des fonds sont survenues Vu la réévaluation faible, mais régulière du yuan, on peut présumer que le gouvernement chinois va décider d’abandonner à moyen terme l’ancrage de sa devise. Si tel est le cas, l’avantage des entreprises chinoises lié à la sous-évaluation actuelle sera perdu. De ce point de vue, on peut comprendre la volonté de l’Etat de moderniser ses entreprises pour une période où la concurrence serait plus dure, ceteris paribus. 37 L’indice S&P 100 (Standard & Poor); il représente la valeur globale des parts des 100 plus grandes entreprises américaines dont les options sont également cotées en bourse. 36

31

lorsque l’économie était le plus dépendante des matières premières 38 . En conclusion, ils recommandent aux Etats de passer directement par une meilleur politique fiscale et surtout de montrer une volonté politique car, en son absence, les FS restent caducs en ce qui concerne les objectifs fiscaux affichés. Shabsigh et Ilahi (2008) critiquent la façon de procéder de Davis et al.(2001). D’après eux, une estimation qui compare deux échantillons de pays avec et sans FS, butte sur l’existence de caractéristiques constantes dans le temps, mais non-observées par les statistiques. Ainsi, la décision d’établir un FS peut ne pas être arbitraire, mais elle peut être fonction desdites caractéristiques 39 . Dès lors, une estimation qui compare les résultats macroéconomiques avant et après l’établissement des FS souffrirait du même biais. En outre, on serait tenté de reprocher à Davis et al.(2001) la nature restreinte de leur échantillon, surtout vu l’essor du nombre de FS créés dans les années 2000. Toutefois, étant donnée l’absence d’un long historique de données sur ces nouveaux fonds, des travaux plus exhaustifs ne sont pas possibles pour le moment. Le Borgne et Medas (2007) dans une étude portant sur les FS des petits Etats de l’Océanie estiment que les FS ont joué un certain rôle dans la poursuite des objectifs macroéconomiques et fiscaux, mais leur efficacité a été considérablement réduite à cause d’une mauvaise coordination avec le budget et d’un développement institutionnel insuffisant, sans parler de leur mauvaise gestion des actifs financiers. D’après eux, un FS peut soutenir la politique budgétaire, mais ne doit pas remplacer les réformes fiscales visant une autosuffisance budgétaire et une position fiscale soutenable.

Effectivement, il est facile d’emprunter pour un gouvernement lorsque le prix du pétrole est élevé, et donc il n’est pas vraiment contraint par son fonds pétrolier en ce qui concerne ses dépenses publiques. En revanche, lorsque le prix est bas et donc lorsque le gouvernement fait face à une contrainte de liquidité, le fonds devrait au mieux lisser, mais ne pas couvrir entièrement, les dépenses de l’Etat. 39 Selon un exemple de ces auteurs, l’inaptitude de l’environnement politique du pays à gérer les chocs pétroliers peut être liée à sa susceptibilité d’établir un fonds pétrolier. Le degré de cette inaptitude étant inconnu des chercheurs, il est intégré dans le terme d’erreur. Ceci va se traduire par une corrélation non-nulle entre la variable explicative et le terme d’erreur, c’est-à-dire, créer de l’hétérogénéité non-observée. 38

32

Diversification et recherche de rendement La portée des arguments relatifs à la diversification et à la recherche de rendements supérieurs est illustrée par le tableau suivant.

Source : Kern (2007), Summers(2007), Banque Mondiale. Modification de l’auteur.

Ce tableau montre les profils de risque et de rendement annualisés des portefeuilles d’investissement types des Banques Centrales, des fonds de pensions et d’un investisseur plaçant ses capitaux uniquement dans les actions des entreprises américaines. A long terme, le portefeuille de type fonds de pension a une probabilité moins élevée de rendement négatif comparée à celui d’une Banque Centrale. Ceci justifie la composition des portefeuilles d’investissement des fonds souverains qui vont vers les actifs à risque et à rendements plus élevés. La diversification géographique des placements des FS se justifie également par ce risque de perte moindre, à long terme, d’un portefeuille type d’un fonds de pension par rapport à un portefeuille constitué uniquement d’actions d’entreprises américaines. Equité intergénérationnelle Nous avons dit, que les pays exportateurs de pétrole et les pays asiatiques à excédent commercial élevé devraient obéir aux règles de Hartwick et de Hotelling pour assurer un niveau égal de consommation pour les générations suivantes. Alors, qu’en est-il au niveau de l’expérience des pays? Reisen (2008), à l’aide des données ci-contre, suggère qu’au niveau de

33

l’épargne nationale les placements financiers des pays du Golfe sont bien justifiés, car ils obéissent à la règle de Hartwick en transformant le capital minier en capital financier. Ce constat

Pays

découle des taux d’épargne nette ajustée 40 négatifs pour les pays du Golfe et de la Russie. Cela revient à

EAU

Epargne Brute National (% de PNB, fin 2000)

Epargne Nette Ajustée (% de PNB, fin 2000)

-

-

Chine

38 ,8

25,5

pour assurer l’équité intergénérationnelle et font

Singapour

47,7

35,2

baisser leur capital total. Dès lors, l’établissement

Norvège

36 ,9

18,5

d’un FS afin d’investir les pétrodollars devient plus

Arabie S.

29,4

-26 ,5

qu’une nécessité.

Koweït

40,0

-12,9

Russie

37,1

-13,4

dire que ces pays épargnent moins que ce qu’il faut

En revanche, le même indicateur est négatif

Source : Banque Mondiale(2006), Reisen(2008)

pour les pays de l’Asie Orientale dont les FS sont financés par l’excédent structurel de la balance commerciale. Ainsi, ils épargneraient plus qu’il faut en diminuant le rendement de capital par des investissements excessifs et en sacrifiant le niveau de consommation de la génération présente. Dans cette optique, la décision de transférer une partie des réserves dans les FS afin de les investir à l’étranger peut apparaître problématique. Là encore, l’évaluation de cette décision ne devrait pas se faire, à notre avis, sans prendre en compte son bienfait sur la politique monétaire41. Enfin, Reisen(2008) remarque que, dans une économie de type norvégien qui s’attend à des problèmes démographiques, un FS peut aider à garder le même niveau de consommation des générations suivantes sans recours à une immigration massive. Bien entendu, cela présuppose une transparence accrue dans la gestion des recettes.

Il s’agit de l’épargne qui tient compte du capital sous toutes ses formes (capital financier, corporel, environnemental, humain, etc.), et non seulement du capital financier et physique. 41 Les bourses chinoises présentant des signes de surchauffe, les FS aident la politique monétaire à 40

lutter contre les entrées de capitaux excessives.

34

Un outil de la politique macroéconomique Tout en acceptant le rôle des FS en tant qu’institution fiscale, Shabsigh et Ilahi (2008) estiment que cela ne doit pas faire oubier leur importance pour la politique macroéconomique. Ainsi, ils examinent le rôle de la présence des FS sur la volatilité macroéconomique. En utilisant les techniques économétriques de contrôle de l’hétérogénéité non-observée (telle que la politique spécifique au pays constante dans le temps), les auteurs trouvent un effet bénéfique de la présence des FS sur l’inflation et la volatilité des prix et de la masse monétaire(M2). En revanche, le même effet n’est pas statistiquement significatif sur la volatilité des taux de change. Toutefois, les auteurs avouent qu’ils ne sont pas capables de contrôler les facteurs qui varient dans le temps , ainsi que l’endogénéité et donc, leur résultat n’affirme pas de sens de causalité, mais seulement une existence d’une « association robuste non-causale » entre la présence des FS et la stabilité des variables macroéconomiques.

Développement industriel Le développement industriel à partir des avantages de réseaux et des transferts de technologie, semble être une cause valable du recyclage des capitaux en excès, si on en croit ce que sont en train d’accomplir, avec un visible degré de succès, les FS des EAU (fonds de Dubaï et d’Abu Dhabi). En s’offrant des parts importantes des firmes des secteurs aéronautique, touristique et financier, ils diversifient leurs économies en s’appuyant sur les opportunités offertes par les marchés des capitaux. Singapour a la même stratégie de placement dans la région. Les diagrammes suivants permettront de visualiser les préférences sectorielles des FS en valeur et en nombre de transactions. Bien que le cas de figure représentant la valeur sectorielle des transactions, entre 1975 et 2008 (Q1), soit quelque peu biaisé par les investissements importants suite à la crise des sub-primes, le nombre de transactions dans ce secteur constitue quand même un quart du nombre total.

35

Nous allons revenir sur ces diagrammes dans la section consacrée à l’analyse des stratégies des FS. Contentons-nous pour l’instant de noter que Miracky et al. (2008), auteurs de ces diagrammes, voient ces placements dans le secteur financier comme une volonté des pays de Moyen Orient et de l’Asie de l’Est de renforcer leur rôle de centres financiers en bénéficiant de l’expertise technique et opérationnelle des entreprises concernées. Le reste des transactions est assez bien reparti entre différents secteurs et laisse encore penser à un objectif de diversification industrielle.

36

II Partie. Conséquences de l’émergence des fonds souverains sur les économies des pays-récepteurs. Nous avons examiné, dans la partie précédente, les origines et la place des FS dans l’économie mondiale. Maintenant, nous allons examiner la nature des investissements par les FS afin de voir si leur comportement nécessite une plus grande réglementation de la part des autorités financières. L’étude de leur impact potentiel sur les prix des actifs financiers apporte également une réponse à cette question. Ces deux éléments vont nous amener à conclure sur l’impact général du phénomène des FS sur l’économie mondiale.

1. Les stratégies d’investissement et la transparence des FS a. Transparence Plusieurs critiques des fonds souverains ont mentionné leur manque de transparence. Effectivement, très peu d’information est disponible sur la constitution de leur portefeuille financier. Notamment, on ne connaît pas avec certitude la structure d’actifs financiers, dans quelles sociétés et à quelle hauteur sont placés les fonds de tel ou tel FS. Très peu est connu également sur leurs stratégies. Rares sont les fonds qui dévoilent la structure de leurs placements et mettent en avant explicitement leurs stratégies financières. Cela suscite évidemment des suspicions dans les économies industrialisées quant aux vraies intentions des gouvernements derrière ces véhicules financiers publics. Ces derniers se défendent en affirmant que révéler des informations de ce genre leur enlève un avantage compétitif par rapport à d’autres investisseurs institutionnels qui révèlent, eux aussi, peu d’information sur ces sujets, tels les hedge funds ou les private equity funds. Là où cette information est dévoilée indirectement par les rapports d’entreprises ou rapports publics sectoriels, elle ne comporte jamais les chiffres exacts, sans parler de la difficulté à compiler et à trier ces maigres données. De surcroît, certains pays, tels que le Koweït, ont des lois interdisant aux FS de révéler ces informations. Dans ce contexte, le besoin d’une plus grande transparence pour calmer les sceptiques devient nécessaire pour la «légitimation» de l’activité des FS dans les pays ou ils effectuent leurs placements.

37

Le diagramme actifs/transparence ci-dessous montre effectivement que les plus gros investisseurs souverains ne sont pas les plus transparents.

Actifs, mlrd USD (G) Transparence (D)

1000 900

875

9

800

8

700 600

10

7 590,6

6

464 396,5 370,5

500 400

5 4

264,4

300

173

200

3

60

100

2

162,5 16,6 10,2 13,8 58,5 50 47 39,8 30 25,7 15,5 12,9 21,55 6,9

0 EAU Chine(4) Singapour(2) Norvege Arabie Saudite(2) Kowaït HK, Chine Russie Qatar Australie Libya Algerie US-Alaska Corée du Sud Malaysia Kazakhstan Canada- Alberta Chili Nouvelle Zellande Iran Azerbaïdjan Botswana

0

1

www.swfinstitute.org, calcul de l'auteur

Le diagramme suivant permet de visualiser les stratégies d’investissement des FS et leur degré de transparence. Les FS qui sont placés dans la moitié gauche du plan sont très opaques, ceux de droite assez transparents. Les fonds qui sont sur la partie supérieure du plan investissent stratégiquement, ceux qui sont en bas ne visent pas le contrôle des sociétés investies.

38

Le premier quadrant contient les FS des pays-producteurs de pétrole (cercles oranges). Ils sont relativement petits et sont des investisseurs passifs à transparence basse. A l’opposé, le quadrant 3 contient principalement les pays dont les FS sont formés par les transferts des excédents commerciaux (cercles verts). Ce groupe investit stratégiquement (p.ex. achète des parts importantes dans les sociétés, s’il s’agit du marché des actions) avec un degré de transparence élevé. Les pays du Golfe et la Chine sont cantonnés dans le quadrant 2 à basse transparence et à investissement stratégique. En revanche, le quadrant 4 contient les FS transparents avec une stratégie d’investissement passive (p.ex. le FS de la Norvège investit dans un grand nombre d’entreprises différentes dans plusieurs pays ne dépassant pas le seuil de 3% de la valeur boursière des firmes dans ces placements). L’analyse qui est dégagée par ce diagramme suscite quand même deux remarques : -

Le diagramme ne considère

que les FS les plus importants. Le nombre actuel de FS est au moins deux fois plus élevé que sur le diagramme. Les FS qui n’ont pas été pris en compte ici ne suivent pas forcement la même logique d’investissement et de communication. Alors, tandis qu’il est raisonnable d’analyser les comportements des fonds les plus importants du fait de leur impact possible sur les marchés financiers, il ne faudrait pas être tenté d’assimiler les autres pays des groupes-cibles pétrolier, asiatique ou occidental aux modes de comportement implicitement suggérés par le diagramme. Par exemple, les FS des petits pays pétroliers comme l’Azerbaïdjan ou encore Timor Leste, qui ont des indices de gouvernance assez

39

médiocres42, sont très transparents et passifs dans leur stratégies d’investissement et tombent dans le quadrant 4 où se placent les FS des pays occidentaux43. -

Les modes de comportement des FS ne sont pas stables dans le temps. Les

investisseurs passifs peuvent augmenter leurs parts dans les sociétés investies, mais aussi les vendre selon les conditions de marché. Ils peuvent également changer la donne en fournissant plus d’information et donc en augmentant leur positionnement dans les classements de transparence (p.ex. ADIA, un des FS les plus opaques, a récemment gagné des points dans le classement en ouvrant un site-web et en

entamant la première

communication avec le public occidental44; SOFAZ a été placé très haut dans l’échelle de transparence après les derniers rapports d’audit indépendant rendus publics, KIA a été surclassé de 8 a 9 selon l’indice de Linaburg-Maduell, le CIC a récemment révélé des points importants sur sa stratégie d’investissement45) A ce propos, il est plus intéressant d’observer le diagramme suivant qui met en relation la forme de gouvernement des pays avec la transparence de leurs fonds respectifs. La relation linéaire est évidente. Alors, il semblerait plus raisonnable de considérer que la transparence des FS est liée plutôt à la forme de gouvernement qu’à leurs intentions stratégiques.

42

Worldwide Governance Indicators(WGI) Database 1996-2007, Banque Mondiale. (Kaufmann D., A. Kraay,

and M. Mastruzzi 2008: Governance Matters VII: Governance Indicators for 1996-2007)

Ceci dit, on peut considérer que ce profil bas par des FS relativement nouveaux des pays « peu démocratiques » provient actuellement de leur manque de compétences techniques et donc cette tendance peut très bien se renverser au fur et à mesure que ces FS attirent et développent des gestionnaires de fonds compétents et se lancent sur les marchés à profil de risque plus élevé, notamment, dans l’achat d’actions. 44 Y.Al-Otaiba, ‚Our sovereign wealth plans‛ Wall Street Journal, 19 mars 2008 45 L.Zhang ‚Inside the CIC‛ China International Business, 18 juillet 2008 43

40

Source: Bhagwati (08) Témoignage auprès du Congres

On voit, une fois de plus, combien sont divers les véhicules des investissements publics qualifiés collectivement de « fonds souverains ».

Le

diagramme

donne

un

ci-dessous

aperçu

de

la

transparence des ressources accumulées dans les Banques Centrales

et

les

FS.

On

distingue nettement que la majorité est concentrée dans des entités souveraines nontransparentes.

Source: Setser (2008)

41

b. Stratégies Les questions autour des FS et leur comportement n’ont pas été suffisamment traitées en profondeur. Les médias étant la principale source d’information, l’interprétation était très limitée suscitant des réactions hostiles de la part des politiciens. De plus, la délimitation du concept n’étant pas effectuée dans la plupart des cas, même les études sérieuses suscitent souvent des controverses. Un rapport de Monitor Group(2008) est particulièrement intéressant dans ce contexte, car il renverse, dans son étude menée à l’aide de statistiques descriptives, les perceptions traditionnelles des comportements des FS. Ses principaux résultats sont les suivants : -

Les FS investissent intensivement dans les pays émergents ;

-

Les investissements financiers récents par les FS aux USA et en Europe sont atypiques et sont dus à la crise du crédit 2007-2008 ;

-

Les FS évitent les secteurs sensibles et n’investissent manifestement pas pour des raisons politiques ;

-

Les FS ont tendance à acquérir des parts de contrôle dans les sociétés46 ;

-

Les FS modifient de plus en plus le profil du risque financier de leurs investissements et vont vers des actifs plus risqués;

-

Chaque fonds a un comportement unique d’investissement ce qui fait qu’une information précieuse est perdue dans les efforts de classement par groupe, âge, taille, objectif, forme de propriété souveraine, niveau de développement de leur pays d’origine, etc.) ;

-

Deux regroupements principaux peuvent être dégagés : risque financier et risque de propriété souveraine 47 . A présent, les niveaux de risques financier et de propriété souveraine sont rassurants et ne présentent pas de signes de détérioration;

46

Depuis l’an 2000, les FS ont acquis des parts de contrôle dans la moitié des transactions pour

lesquelles l’information est disponible. La plupart des ces transactions se réfèrent aux marchés émergents. Le FS norvégien est exclu de l’étude pour ne pas introduire de biais dans l’échantillon avec ses plus de cinq mille prises de participation dans des sociétés cotées à travers le monde, toutes en dessous du seuil de 5% de la valeur boursière de ces sociétés. 47

Le risque posé par les Etats dont relèvent les FS, aux pays où ils investissent.

42

-

Plus de transparence n’apaisera pas les inquiétudes politiques, même si sur d’autres domaines une transparence accrue serait très utile;

-

La réglementation coordonnée des FS ne sera pas possible, ni efficace, faute de définir les FS et de délimiter ce qui constitue les secteurs stratégiques.

Reisen (2008) propose le tableau suivant pour classer les motivations des plus grands FS. Le lien avec le raisonnement de notre section sur les raisons de création des FS est évident.

Reisen (2008)

L’observation de ce schéma révèle une prise de participation probable à long-terme des FS dans les économies des pays en développement. Ainsi, Santiso (2008) parle de « fonds souverains de développement ». C’est le cas, notamment, des fonds asiatiques. Par exemple, le mandat du FS chinois CIC inclut l’investissement d’un tiers de ces fonds dans les actifs locaux. Un autre tiers qui est destiné aux investissements à l’étranger, est investi aussi bien à l’Ouest que dans la région. La Chine investit également en Afrique à l’aide de ces FS48. Temasek investit dans la région asiatique (même si parfois il y a des difficultés d’origine politique qui concernent les secteurs « stratégiques » 49). Récemment, le FS norvégien Global a révélé son intention d’augmenter son exposition aux actifs des

48 49

Xinhua, ‚More Chinese enterprises aiming for investment in Africa‛, 9 septembre 2008 Reuters, ‚Indonesia turns down Temasek appeal in anti-trust case‛, 12 septembre 2008

43

marchés émergents et asiatiques. Cela inclurait une allocation de 5% de son portefeuille d’actions aux pays émergents de seconde vague, tels que l’Egypte et le Pérou50.

Quelle approche : purement économique ou (géo) politique? De nombreuses difficultés dans l’analyse économique des FS proviennent des aspects qui relèvent du domaine politique et du domaine de la politique économique internationale. Cela nécessite un champ de vision large qui intégrerait des questions très diverses. En voici une liste non-exhaustive : -

Les pays qui accusent ne sont pas si innocents non plus51 (In-Q-Tel, Carlyle)

-

La dimension éthique est porteuse quand même d’un jugement de valeur52 (conflit Norvège-US (tabac, armement, Wal-Mart, Exxon) , projet de lois interdisant à CalPERS d’investir dans les actifs des firmes dont le capital contient des investissements des entreprises originaires des pays qui ne respecteraient pas les droits de l’homme53)

-

Quels arguments sont avancés pour la sécurité économique et politique ?

-

Il n’y a pas de précédent de malveillance des FS à ce jour ; les FS sont investisseurs plutôt passifs. Evidemment, ceci

ne les empêche pas d’investir plus

stratégiquement dans le futur. -

Au niveau des pays d’accueil, il est difficile de définir un secteur stratégique sans plonger dans un protectionnisme populiste.

‚Interview – Norway’s wealth fund to lift emerging market exposure‛, Reuters India, 8 juillet Jegourel (2007). 52 Ibidem 53 The Sacramento Bee ‚CalPERS, CalSTRS, balk at bill to limit foreign investments‛ 18 mars, 2008 50 51

44

2. Effets sur la liquidité du marché et sur les prix des actifs a. Impact sur la liquidité Les injections répétées de liquidités par les FS dans les grandes banques occidentales lors de la crise financière a fait la une des journaux et a confirmé la place des FS dans les actualités du monde de la finance globale. Avant de regarder les placements des FS qui ont dérangé beaucoup de gens à Wall-Street, comme au Congrès, regardons la définition de la liquidité proposée par P.Vernimmen54 : « La liquidité de l'entreprise est son aptitude à faire face à ses échéances financières dans le cadre de son activité courante, à trouver de nouvelles sources de financement, et à assurer ainsi à tout moment l'équilibre entre ses recettes et ses dépenses.” Cette avec, en tête, cette définition de la liquidité (transposée à l’ensemble des entreprises sur le marché), que nous allons regarder un bilan de ce « sauvetage de nos entreprises privées par les gouvernements étrangers ». Il est présenté dans le diagramme ci-dessous.

Source: Kumaria(2008)

On voit bien que Citigroup a pu lever presqu’autant de capitaux qu’il en a perdus dans la crise actuelle, auprès des FS asiatiques et moyen-orientaux. Merrill Lynch a levé près de deux tiers,

Morgan Stanley plus de la moitié et UBS plus des deux tiers des capitaux perdus

dans la crise. Ceci dit, Miracky et al. (2008) considèrent ces placements comme des achats Disponible sur son site internet : www.vernimmen.net. Pierre Vernimmen est le co-auteur du manuel « Finance d’entreprise »(2008), 7e ed., Dalloz, 1198 p. 54

45

opportunistes qui ne correspondent pas tout à fait à la stratégie typique des FS. Par ailleurs, on serait tenté de confirmer leur remarque par le fait que, lors des événements clés du mois de septembre de cette année (2008) les fonds souverains n’ont pas joué ce rôle présumé « d’acheteurs en dernier ressort » pour les géants de Wall-Street tels que Lehman Brothers. Ils sont également restés dans l’ombre lors de la reprise par l’Etat des agences financières hypothécaires américaines Fannie Mae et Freddie Mac. Cependant, n’oublions pas la liquidité que les FS ont déjà fournie à Wall Street. Exhibit 2 ci-dessus montre la baisse spectaculaire de la valeur des placements par les SWFs (59 mlrds à ce jour) de 14 mlrds de dollars. Les SWFs gardent, malgré ce fait, leurs parts dans les sociétés investies, ce qui ne serait probablement pas le cas d’un spéculateur individuel, mais aussi de la plupart des investisseurs institutionnels privés. Ce constat est, pour plusieurs commentateurs, la preuve de l’impact positif sur la stabilité financière par ces

Source : Farrel et al. (2008)

46

actions contre-cycliques, malgré l’aversion au risque traditionnelle des Etats. A titre d’exemple, le FS chinois CIC tient à garder sa part dans Blackstone (acquise pour 3 mlrds de USD), malgré des critiques fortes à l’intérieur du pays du fait de pertes très importantes (plus de 1,3 mlrd à ce jour) dans ce placement. Ceci dit, il est engagé pour au moins quatre ans dans sa

participation

au

capital de ce groupe américain

de

capital-

investissement.

Un

réajustement n’est

pas

même

brusque à

si

exclure,

une

telle

probabilité nous paraît Source: Blundell-Wignall et al.(2008)

très faible, vu la sensibilité politique du sujet. Le graphique ci-dessus montre les mouvements synchronisés des valeurs de liquidité globale exprimées en réserves globales de devises avec les prix des matières premières exprimés par l’indice des prix de matières premières de la Banque Centrale d’Australie. Les

FS

peuvent

augmenter

la

liquidité des marchés financiers, ce qui se révèle

pertinent

surtout

dans

périodes

de

les crises

financières telles que nous

traversons

aujourd’hui. Source: Blundell-Wignall et al.(2008)

47

A

ce

propos, l’articulation particulièrement intéressante des FS avec l’industrie de private equity pèse sur les économies des pays des marchés développés. Sa dynamique est illustrée par le graphique ci-dessus. Il est intéressant de noter que les mouvements du stock global de devises correspondent généralement aux mouvements du stock global de transactions de l’industrie de private equity.

b. Impact sur les prix d’actifs Considérons, à présent, l’impact de changements dans des stratégies des FS sur les cours des devises clés et les prix des actifs financiers. Le FMI (février 2008) propose les profils suivants pour la composition des portefeuilles de placements des FS et pour la répartition selon la devise de dénomination des actifs desdits portefeuilles. Alors que les placements des Banques Centrales se limitent à des obligations

Source: FMI (février,2008)

d’Etats, les FS ont des portefeuilles plus diversifiés. Parmi les portefeuilles des FS, les analystes du FMI distinguent un portefeuille plus traditionnel de type norvégien qui inclut des actions et des obligations et un portefeuille plus diversifié qui comporterait des actions, des obligations, de l’immobilier et des placements dans les fonds à formule, ainsi que des parts non-cotées sur les marchés publics. Dès lors, la 48

répartition entre ces deux types de portefeuilles de placements des FS va déterminer la dynamique des prix des actifs et celle des taux de change des devises. Dans ce qui suit, nous allons essayer de regarder chacun de ces groupes de plus près.

Impact sur les devises En ce qui concerne les devises principales, Merrill Lynch (2008) prévoit une baisse du dollar, mais un euro largement stable. Vu la crise du crédit qui est en train de s’aggraver, cette prévision est plus que crédible, car les opérateurs sur les marchés financiers éviteront les actifs américains qui sont, en règle générale, dénominés en dollars. Jen (2007a) est d’accord avec les analyses ci-dessus : la diversification des réserves de change va faire baisser encore plus le taux de change du dollar et renforcer les devises telles que l’euro, le yen, etc. Dans une analyse plus détaillée, Beck et Fidora (2008) classent les placements des réserves de devises des pays émergents par région, dans le tableau suivant. La composition actuelle (partie A) de ces placements ne contient pas d’actions et la majorité des bons du Trésor, qui y sont présents, provient des Etats-Unis. Or, si les FS diversifiaient leurs portefeuilles selon la capitalisation du marché de chaque région (partie B), le niveau des actifs dénominés en dollar américain baisserait de plus d’un quart. Cette baisse proviendrait surtout des placements accrus dans des actions des autres pays émergents. Ce résultat de

Source: Beck et Fidora (2008)

49

Beck et Fidora (2008), en ce qui concerne les avoirs en dollars, est dans la même lignée que la composition hypothétique du portefeuille « traditionnel » de FS envisagé par le FMI (fév, 2008). Quant à l’euro, Beck et Fidora estiment que la diversification diminuerait quelque peu les avoirs en euros des FS par rapport à l’allocation actuelle des réserves des pays émergents. Cela les positionne entre les deux types de portefeuilles du FMI mentionnés : le portefeuille « traditionnel » donne un poids plus important à l’euro, alors que le portefeuille «diversifié » réduit sa part considérablement (cf. tableau du FMI ci-dessus).

Effet sur les prix des matières premières Le marché des matières premières, de par sa taille relativement petite, comparée aux actifs des FS, présente une vulnérabilité aux mouvements brusques des investisseurs financiers. A la fin de l’année dernière, les allocations des fonds souverains sur ce marché constituaient seulement 5% de la valeur de leurs placements. Ces placements passaient par des fonds d’indices de matières premières. Ils font, certes, profiter les FS, mais augmentent les prix des matières premières au passage. Des commentateurs avaient déjà noté55 la pression à la hausse qu’exercent les fonds d’indices de matières premières. Ces fonds d’indices spécifiquement de placements à long-terme, dans lesquels les FS placent leur argent, achètent des contrats swaps auprès des banques commerciales, mais les prolongent juste avant qu’ils arrivent à maturité. Cela leur permet de dépasser leur quota mensuel autorisé par la législation pour participants de marchés noncommerciaux. Récemment,

un rapport de la Commodity Futures Trading Commission (2008) a révélé la

présence des FS dans les bourses américaines de contrats à terme de matières premières. Leurs transactions représenteraient, selon ce régulateur américain, 9% de la valeur totale (soit près de 20 mlrds.) des transactions sur le marché des matières premières. Les quatre FS repérés par la CFTC, qui ne dépassaient pas leurs quotas, appartenaient aux structures souveraines européennes et canadiennes. Les FS asiatiques et moyen-orientaux ne figurent 55

Par ex.: Mauldin, J.(2008), ‚When bubbles collide‛ Blog Thoughts from the frontline, 6 juin

50

pas parmi eux. En revanche, il est intéressant de noter que, parmi les huit FS dépassant le quota, seulement deux ont été identifiés comme des FS asiatiques et six comme européens et canadiens. Le marché américain des commodity futures étant la base du marché à terme des matières premières, ceci signifie que les ajustements de portefeuille possibles par les FS peuvent avoir une incidence également sur ce marché des matières premières. Impact sur les prix des actions, obligations et CDS D’après Jen (2007a), l’émergence des FS comme classe d’investisseurs actifs avec des ressources importantes, pourra avoir les effets probables suivants sur les marchés financiers : - Effet sur la liquidité : des marchés financiers plus profonds ; - Augmentation du prix des actions avec la recherche de diversification et de rendement plus élevés - Baisse de la prime sur les swaps de défaut de crédit (CDS) va baisser en vue de la liquidité plus abondante. Le FMI suppose intuitivement que l’impact est positif, au moins, à court terme. Le graphique suivant sert de base à cette conjecture. On peut observer la baisse des spreads sur les CDS (crédit default swaps). Cette baisse des primes sur les contrats d’assurance contre la perte de valeur de placements en obligations traduit la confiance du marché après les injections de liquidité par les FS. Les hausses observées dans certains cas sont attribuées, selon l’hypothèse des auteurs du rapport originel56, aux annonces

Source: IMF Global Financial Stability Report (avril 2008)

56

FMI (2008) GFSR, Avril

51

Source: Beck et Fidora(2008)

simultanées de write-offs57. Ceci reste évidemment une hypothèse qui doit être confirmée par des analyses plus rigoureuses. Le même raisonnement est présent dans l’analyse de Beck et Fidora(2008). En revanche, le rapport de la BCE disposant de plus de recul que celui du FMI, les auteurs notent que l’effet de stabilisation sur les marchés a été de courte durée, tandis que les spreads de CDS n’ont baissé que légèrement. Approfondissant cette remarque de Beck et Fidora(2008), l’analyse de Bortolotti, Fotak et Megginson (2008) basée sur 21 observations vient confirmer cette intuition : les FS ont à court terme un effet positif qui consiste à permettre aux entreprises de ne pas baisser leurs actifs. Les gains de valeur anormaux des actions des firmes en question (c.a.d. les gains supérieurs à ce qui serait suggéré par les fondamentaux de marché) sont positifs à court terme (à l’horizon d’un jour). Ceci reflète le sentiment du marché qui réagit positivement à l’annonce

d’injection

de

liquidités

dans

les

entreprises

en

difficulté.

Source : Fotak et al. (2008)

Or, Fotak et Megginson (2008) constatent un impact de plus en plus négatif, plus la période considérée est longue : au bout de 120 jours, on obtient une baisse de -6,63% de C'est-à-dire pertes (on a supprimé de l’actif du bilan la contrepartie du passif qui a été dévalorisée par la crise des subprimes) 57

52

rendements anormaux des actions des entreprises.

Source : Fotak et al. (2008)

Les auteurs voient ceci comme l’indication d’un impact négatif sur les incitations des gestionnaires des firmes dont les parts ont été acquises. Kotter et Lel (2007) examinent aussi la réaction du marché aux annonces d’acquisitions de parts par les FS58. Ils trouvent 2,1% de rendement anormal positif ajusté au risque dans les deux jours suivant l’annonce. En revanche, contrairement à Beck et Fidora (2008) ils trouvent que cet effet significatif continue en moyenne pendant une période de 20 jours suivant la date de l’annonce. Ceci constitue, pour les auteurs, l’indication d’un signal positif pour les intervenants sur le marché financier sur les futurs gains des entreprises cibles. Par ailleurs, Kotter et Lel trouvent que les rendements totaux cumulés des firmes investies augmentent avec la transparence des FS à l’origine des transactions59. Ce dernier constat nous amène à l’utilité d’une autoréglementation des FS par un code de bonnes pratiques dont les principes ont été dressés par un group de travail de représentants des 24 pays disposant de FS, à Santiago ce mois de septembre. Cependant, vu la difficulté de surveillance de son application et l’absence d’un système de sanctions en cas de non-respect dudit code, ces critiques militent en faveur d’une réglementation plus stricte. C’est à ce sujet d’actualité que nous nous intéresserons dans la section suivante.

Leur étude porte sur 163 transactions dans 28 pays. A l’aide d’une analyse multivariée de régression en coupe transversale; la transparence est mesurée par le tableau d’évaluation des FS introduit par Truman (2008). 58 59

53

3. La question de réglementation Les inquiétudes sur la véritable stratégie et la transparence des FS ont suscité des appels constants à leur réglementation.

a. Quelle réglementation pour les FS ? Mason (2008) met en avant une raison d’efficience économique afin d’éviter la réglementation des FS dans les pays d’accueil. Selon lui, les gouvernements étrangers prennent des décisions plus efficientes économiquement, car ils sont à l’abri des pressions politiques des populations du pays récepteur de placements des FS. Rose (2008) affirme que les dispositifs de réglementation aux USA sont suffisants, mais les placements qui sont insuffisamment réglementés ailleurs, créent des risques pour les intérêts des Etats-Unis. Ceci le conduit à soutenir le code volontaire de bonnes pratiques qui est actuellement en chantier. Monk (2008) voit ces efforts de réglementation par un code volontaire de bonnes pratiques comme une voie de sortie de la « crises de légitimité » que vivent les FS dans l’environnement où ils investissent. Ledit code aiderait à restaurer leur légitimité en alignant ces pratiques de transparence avec celles des entreprises traditionnelles.

b. Des propositions de réforme D’après Hall (2008), la réglementation est nécessaire, mais la Securities and Exchange Commission - le régulateur public des marchés financiers américains – ne dispose pas des outils suffisants pour accomplir cette tâche. Les dispositifs de Bâle II et le FMI n’offrent pas une solution efficace en ce qui concerne les placements par les entités publiques. Il faut donc les modifier ces dispositifs en visant explicitement les FS. Ainsi, Setser (2008), face à l’inaction pour augmenter la transparence volontaire par les FS eux-mêmes, propose d’obliger les entreprises dans lesquelles ils investissent de déclarer l’identité de l’investisseur souverain, dès que son placement a dépassé le seuil de 1% de la valeur boursière de l’entreprise.

54

Par ailleurs, Fleischer (2008) propose d’annuler les exemptions fiscales dont bénéficient les FS en tant qu’ «entités souveraines en gestion de portefeuille passif ». Son argument est que les FS en bénéficient en tant qu’entités non-commerciales, alors que leur stratégie est commerciale. Donc, la gestion active de portefeuille de la part des FS doit, d’après lui, être taxée au même titre que celle des acteurs privés. Quant aux réformes de la gouvernance des entreprises que touche l’activité des FS, Buiter (2007) propose de refuser tout droit de vote aux FS dans les conseils d’administration des entreprises. En revanche, Gilson et Milhaupt (2008) proposent une solution plus flexible, qui consisterait, d’abord, à suspendre les droits de vote des parts acquises par des entités publiques étrangères. Une fois rachetées par des entités privées (nationales ou étrangères), des parts regagneraient leurs droits de vote. Ce dispositif dissuaderait les gouvernements cherchant une influence politique sur les pays dont les firmes ont une part de leur capital investie par les FS, et seuls les Etats qui ne cherchent qu’à maximiser le rendement de leurs investissements continueraient à bénéficier de leurs droits d’actionnaires. Les auteurs sont conscients de l’effet de retour que cela susciterait dans les législations nationales des pays dont relèvent les FS en question et ils le prennent en considération.

Conclusion : synthèse et perspectives de recherche Les fonds souverains sont donc devenus, de par leur taille et leur stratégie d’investissement à profil de risque plus élevé, un acteur indéniablement clé de la finance internationale contemporaine. Cette taille va augmenter avec le temps à une vitesse plus élevée que celle des autres gestionnaires d’actifs, publics ou privés, même sous les hypothèses les plus restrictives. De même, le profil du risque des actifs financiers qu’ils gèrent va augmenter. L’incertitude demeure, pour l’instant, sur la stratégie des FS sur leur degré d’implication dans les entreprises acquises. Or, nous avons vu dans ce travail que la notion de fonds souverain n’est pas facile à saisir et que toute conclusion doit faire attention à la définition que l’on retient. Si on s’en tient à la définition la plus inclusive de ces fonds, leur impact en tant que véhicule 55

d’investissement public dépend de la stratégie que vont poursuivre les FS. S’ils continuent à investir en tant qu’investisseurs politiquement neutres, les fonds souverains vont, avec le temps, exercer une influence comparable à celle des investisseurs institutionnels privés. Ils vont causer une hausse de la demande mondiale des titres de propriété et une baisse de la demande de la dette souveraine. Leur souci de diversifier leur portefeuille de placements va également augmenter la demande globale pour les produits alternatifs. La diversification géographique bénéficiera aux marchés émergents et à leur pays d’origine. Le traitement de ce dernier point sera vital pour la viabilité des économies à l’origine des FS et particulièrement des économies qui abritent les FS de matières premières. Les raisons économiques pour établir des fonds souverains étant très pertinentes, les pays qui possèdent des FS, doivent veiller à ce que l’activité de ces derniers corresponde à cette logique de départ. Aussi, la coordination avec les autorités fiscales et monétaires doit être soigneusement mise en place afin d’éviter de perturber les marchés au point de rendre inefficace la politique monétaire en place. ***** Ce travail devrait s’ouvrir sur une étude plus approfondie et ciblée de l’impact des FS sur l’économie réelle et sur les marchés financiers, notamment par une étude économétrique. La démarche initiale serait de comparer, d’abord, les graphiques de volatilité des taux de change entre les pays cibles des FS et ceux où ils n’ont pas investi. En suite, si l’écart est important, on pourra faire de la statistique descriptive pour identifier s’il y a corrélation. Si celle-ci s’avérait elle positive et significative, on pourrait envisager une régression des flux financiers en provenance des FS sur la volatilité des agrégats monétaires, des taux de change, des prix d’actifs etc. des pays dans lesquels les FS ont investi. L’un des apports importants serait la construction d’une mini-base de données qui contiendrait des listes prêtes-à-employer des fonds souverains (fonds de pensions et horspensions confondus) correspondant à tel ou tel besoin de recherche. Par exemple, s’il s’agit de l’effet sur le marché global des actions, l’activité des fonds de pensions se composant d’actifs uniquement domestiques sera peu pertinente et donc ces fonds seraient exclus de la 56

liste thématique respective. Les fonds qui ont plus d’un objectif seraient inclus dans plusieurs listes. Quant au problème du changement des objectifs qui survient avec l’évolution des fonds, on peut le pallier par des mises à jour régulières. Ayant ainsi défini les FS, on va pouvoir traiter les deux volets de la problématique sans le biais d’inclusion des FS non pertinents. De surcroît, ceci serait une solution à la difficulté d’arriver à une définition globale des FS. La communauté scientifique gagnerait sensiblement à cette uniformisation relative et adaptée à la pratique des fonds souverains.

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Actualités et analyses en ligne - www.portfolio.com - www.chinastakes.com - www.pionline.com - www.seekingaplha.com - www.privateequityonline.com - www.marketwatch.com

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