L’INTERNATIONALISATION DES ECONOMIES
CHAPITRE 3 : L’ORGANISATION DES ECHANGES MONDIAUX ET LA CONSTRUCTION D’ESPACES ECONOMIQUES REGIONAUX DEPUIS 1945.
INTRODUCTION • Depuis la seconde guerre mondiale, le commerce mondial est organisé au sein du GATT (General Agreement on Tariffs and Trade) puis de l’OMC (Organisation Mondiale du commerce). L’objectif est : - De promouvoir le libre-échange en supprimant progressivement les barrières douanières. - De défendre une approche multilatérale du commerce. • Pour autant le commerce mondial se développe largement dans le cadre d’accords régionaux. • J-M Siroën, (La régionalisation de l’économie mondiale (2000)) : l’intégration régionale « lie des pays géographiquement proches entre lesquels les relations économiques tendant à s’affranchir des frontières politiques pour favoriser la formation de marchés intégrés ».
INTRODUCTION
• Ambiguité de l’existence d’espaces régionaux : les accords préférentiels constituent une étape vers le libreéchange MAIS ils favorisent des politiques discriminatoires à l’égard de pays tiers. • Sont-ils un obstacle au multilatéralisme ?
INTRODUCTION • Plan du chapitre : multilatérale des échanges - L’organisation depuis la seconde guerre mondiale et les difficultés de la mise en œuvre de cette logique. - L’émergence d’accords commerciaux régionaux et leurs enjeux au regard du multilatéralisme. - Les étapes de la construction européenne, union la plus aboutie à ce jour.
I) UNE ORGANISATION MULTILATERALE DES ECHANGES. 1. L’essor du multilatéralisme depuis la fin des années 1940. 1.1. Un cadre institutionnel établi au lendemain de la seconde guerre mondiale : la création du GATT. 1.1.1. Les accords de Bretton Woods (Juillet 1944, New Hampshire, USA). • Objectifs : • Mettre en place un système monétaire cohérent et stable, susceptible de garantir la stabilité des équilibres internationaux ; • Restaurer la liberté du commerce international ; • Défendre et promouvoir la croissance et le développement économiques. • Réalisations : • Création du Fonds Monétaire International (F.M.I) et la Banque internationale pour la reconstruction et le développement (B.I.R.D) lors de la réunion de Savannah en 1946.; • Adhésion au Gold exchange standard (changes fixes mais ajustables) • Les accords prévoient un organisme de surveillance du commerce mondial, l’Organisation Internationale du Commerce.
I) UNE ORGANISATION MULTILATERALE DES ECHANGES. 1. L’essor du multilatéralisme depuis la fin des années 1940. 1.1.2. La mise en place du GATT. • L’Organisation Internationale du Commerce ne sera pas créée à l’issu de la Conférence de la Havane (1948). • L’accord du GATT signé en 1947 par 23 pays (80% du commerce international), supposé provisoire, deviendra peu à peu une institution internationale : - Dès l’origine, deux logiques contradictoires : libre-échange et acceptation du principe d’accords régionaux. - Les principes fondamentaux (non-discrimination / transparence / réciprocité) et des exceptions. - Des cycles de négociations basés sur la recherche du consensus (principe d’unanimité).
I) UNE ORGANISATION MULTILATERALE DES ECHANGES. 1. L’essor du multilatéralisme depuis la fin des années 1940. 1.2. Une nouvelle coopération internationale avec la création de l’OMC. Accords de Marrakech (15 Avril 1994) marquent la fin de l’Uruguay Round et posent les bases de la création de l’OMC au 1e janvier 1995. Plusieurs différences par rapport au GATT : • Une extension de la régulation multilatérale : - Libéralisation des échanges s’étend aux produits agricoles, aux produits textiles et à certains services ; - Suppression des barrières non tarifaires et des restrictions volontaires à l’exportation. • Une réforme profonde du système de négociation commerciale : - Les arbitrages rendus doivent être rejetés à l’unanimité. - Possibilités de sanctions en cas de non respect des règles au sein de l’Organe de Règlement des Différents (ORD).
I) UNE ORGANISATION MULTILATERALE DES ECHANGES. 1. L’essor du multilatéralisme depuis la fin des années 1940.
• L’OMC doit faire face à quatre types de difficultés : - L’accroissement des domaines concernés et du nombre de membres concernés par les négociations. - Assurer une équité entre pays membres en rendant l’ORD efficace face aux Etats qui pourraient imposer leurs vues. - Tenir compte des différences de développement entre pays et aider les pays en développement à se doter d’une capacité d’expertise pour peser dans les négociations face aux pays industrialisés. - Faire face aux mouvements sociaux qui contestent les effets de la mondialisation et du libre-échange. tensions persistantes lors des conférences • Des ministérielles de l’OMC (Seattle en 1999, Doha dès 2001.)
I) UNE ORGANISATION MULTILATERALE DES ECHANGES. 2. Les obstacles au multilatéralisme. 2.1. La participation du GATT n’induit pas d’avantages particuliers. Le GATT n’induit pas d’accroissement du volume échangé pour les pays membres. Etude d’Andrew K.Rose (UC Berkeley). 2.2. Les principes du multilatéralisme énoncés par le GATT et l’OMC ne s’appliquent pas systématiquement. • Certains produits bénéficient de règles exceptionnelles. • La clause de la nation la plus favorisée n’est pas toujours appliquée (exemple du système généralisé de préférence de promu par la CNUCED ou des accords régionaux). • L’acceptation d’un recours au protectionnisme temporaire. • La persistance de pratiques protectionnistes (dumping monétaire ou social).
I) UNE ORGANISATION MULTILATERALE DES ECHANGES. 2. Les obstacles au multilatéralisme. 2.3. Un paradoxe: depuis les années 1940, l’extension du libre-échange résulterait d’une « mercantilisme éclairé ». • Selon Paul Krugman, le GATT constitue une forme de « mercantilisme éclairé »: si les pays ont intérêt à promouvoir leurs exportations et à limiter leurs importations, la coopération entre Etat est indispensable pour éviter la généralisation du protectionnisme. • Pour Jean-Marc Siröen, risque « d’ultramercantilisme » depuis la fin des années 1990, car toute mesure faisant obstacle aux exportation est considérée comme protectionniste (exemple du bœuf aux hormones). Paradoxale convergence entre « ultralibéralisme » et « ultramercantilisme ».
II) LA CONSTITUTION D’ESPACES REGIONAUX. 1.La régionalisation des échanges s’amplifie depuis les années 1960. • Coexistence de deux phénomènes qui semblent contradictoires : - La poursuite de négociations multilatérales au sein de l’OMC ; - La multiplication d’accords commerciaux régionaux (ACR) par nature contraire à « la clause de la nation la plus favorisée ».
1.1. La progression et la mesure du phénomène. 1.1.1. Une multiplication des accords. Plusieurs vagues de régionalisation. 200 accords depuis 1948.
1.1.2. Une intensification des échanges intra et extrazone. On observe que les grands ensembles régionaux participent d’autant plus aux échanges mondiaux (échanges extrarégionaux) qu’ils échangent beaucoup au sein de leurs zone d’accord régional (échanges intrarégionaux).
II) LA CONSTITUTION D’ESPACES REGIONAUX. 1.La régionalisation des échanges s’amplifie depuis les années 1960. • 1.2. Une réalité institutionnelle : les accords commerciaux régionaux (ACR). 1.2.1. Les différents types d’accords régionaux. - Typologie de Bela Balassa (The Theory of Economic integration (1961)). - Jean-Marc Siroen (La régionalisation de l’économie mondiale (2004) ) complète par deux autres types d’accords préférentiels : les associations et forums de coopération économique / les accords de préférence non réciproque.
1.2.2. Quelques modèles d’intégration régionale. - ALENA (Accord de Libre Echange Nord Américain) ou NAFTA. - MERCOSUD (Mercodo comùn del Sur). - ASEAN (Association des pays d’Asie du Sud Est).
II) LA CONSTITUTION D’ESPACES REGIONAUX. 2. Les justifications et les limites de la régionalisation. • 2.1. L’intégration régionale : entre création et détournement de trafic. • Jacob Viner (1892-1970) : création et détournement de trafic. La création d’une union douanière ne conduit pas nécessairement à un accroissement du surplus collectif des pays membres par rapport à une situation de protectionnisme. • Etude de Soloaga et Winters : mesure statistique des détournement et création de commerce par zone dans la décennie 1990.
II) LA CONSTITUTION D’ESPACES REGIONAUX. 2. Les justifications et les limites de la régionalisation. 2.2. Les apports des théories du commerce international pour l’analyse des gains de l’échange. • Au regard des théories traditionnelles du commerce international, la création de trafic au sein d’un accord régional : - Est liée à l’existence de différences de technologies de production soit de productivité (modèle ricardien) ou à des différences de dotation sfactorielles (modèle HOS). - Est d’autant plus importante que les pays ont des niveaux de développement différents (avantages comparatifs très marqués).
Ces théories ne permettent pas d’expliquer les créations de commerce entre pays de niveau de développement comparable (échanges croisés de produits similaires).
II) LA CONSTITUTION D’ESPACES REGIONAUX. 2. Les justifications et les limites de la régionalisation. • Les nouvelles théories du commerce international complètent les analyses de Viner. L’ouverture aux échanges entre partenaire d’un ACR permet : - De réaliser des économies d’échelle internes et externes au sein de la zone, ce qui induit un « effet de réduction des coûts ». - D’élargir la gamme de produits à la disposition des consommateurs et producteur de chaque pays. - D’accroître la concurrence au sein de la zone et de favoriser la rationalisation de la production et l’innovation des entreprises. Pour Paul Krugman, les effets de détournement sont moins importants lorsque les accords commerciaux régionaux recouvre des zones d’intégration « naturelles » : « les pertes potentielles relatives au détournement de commerce [y] sont limitées et les gains potentiels relatifs à une création de commerce [y] sont importants. »
II) LA CONSTITUTION D’ESPACES REGIONAUX. 3. Le processus d’intégration régionale : un obstacle au multilatéralisme ? • 3.1. La régionalisation des échanges apparait comme une forme de protectionnisme entravant le libre-échange. Les accords régionaux préférentiels : - Sont contraires aux principes du multilatéralisme. - Peuvent induire un « effet de détournement » de commerce. - Accroissent les risques de conflits commerciaux majeurs.
• 3.2. Le libre-échange progresse grâce à la régionalisation des échanges. Les accords régionaux préférentiels: - Peuvent étendre la logique libre-échangiste au-delà de ce qui est obtenu lors des accords multilatéraux de l’OMC. - Peuvent compléter le système commercial multilatéral et non le mettre en danger. - La croissance des échanges intra-zone dope la croissance mondiale.
II) LA CONSTITUTION D’ESPACES REGIONAUX. 3. Le processus d’intégration régionale : un obstacle au multilatéralisme ? •
3.3. La constitution de zones régionales accompagne et tempère la mise en œuvre du libre-échange.
3.3.1. La régionalisation réduit les risques de comportement de passager clandestin. - La proximité géographique est une forte incitation à la loyauté et au respect des règles qui fondent l’entente. - Les accords régionaux limitent les effets pervers de la clause de la nation la plus favorisée (J-M. Siröen, Relations économiques internationales, 2002). 3.3.2. La constitution de blocs régionaux peut faciliter les négociations multilatérales en promouvant le libre-échange. La position harmonisée des Etats des blocs régionaux limite le nombre de négociateurs. 3.3.3. La régionalisation des échanges tempère à la fois le libreéchange et le protectionnisme. La régionalisation des échanges évite un protectionnisme et un libreéchange excessifs (Maurice Allais).
III) L’ESPACE REGIONAL : L’INTEGRATION ECONOMIQUE REGIONALE LA PLUS ABOUTIE. 1. L’Europe des utopistes ou des réalistes (1946-1956)? • • -
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Deux courants favorables à la construction d’une Europe politique: Les partis d’obédience catholique et centriste (MRP en France (R.Schumann), Démocratie chrétienne en Italie (De Gasperi), CDU en RFA (Adenauer). La plupart des partis socialistes. Le choix d’une Europe économique : la création de la Communauté européenne du charbon et de l’acier (CECA). Impulsion de Jean Monnet (1888-1979) et Robert Schuman (1886-1963) le 9 mai 1950, lorsque Schuman propose « de placer l’union de la production franco-allemande du charbon et de l’acier, sous une Haute autorité commune. » Suppression des tarifs douaniers entre 1953 et 1954 : les échanges sont décuplés entre 1953 et 1970. La Haute autorité dirige la CECA = instance supranationale. Un contexte politique favorable à l’idée européenne dans les années 1950.
III) L’ESPACE REGIONAL : L’INTEGRATION ECONOMIQUE REGIONALE LA PLUS ABOUTIE. 2.La CEE et la création du marché commun (19571972). • 2.1. Le projet du traité de Rome (25 mars 1957). - Création de la Communauté économique européenne (CEE), zone de libre circulation des hommes, des marchandises, des services et des capitaux. Elaboration d’un marché commun avec un programme de suppression des barrières douanières entre 6 pays étalé sur 12 ans. Mise en place de politiques communes comme la PAC, Euratom.
- Progression du commerce intracommunautaire (27% des échanges de la CEE en 1950 à 52% des échanges en 1967).
III) L’ESPACE REGIONAL : L’INTEGRATION ECONOMIQUE REGIONALE LA PLUS ABOUTIE. 2.La CEE et la création du marché commun (19571972). • 2.2. Les avantages attendus de la construction européenne. -
La compétitivité des firmes doit s’accroitre dans un contexte de concurrence accru. Les firmes doivent faire des économies d’échelle grâce à l’accroissement de la taille du marché. Le pouvoir d’achat des consommateurs doit s’accroitre. La spécialisation selon l’avantage comparatif doit permettre d’aboutir à à optimum économique. La coordination des politiques économiques doit amortir les chocs exogènes. L’interdépendance des économies doit induire des phénomènes de rattrapage.
• 2.3. Le lancement de la politique agricole commune (PAC) en 1962.
III) L’ESPACE REGIONAL : L’INTEGRATION ECONOMIQUE REGIONALE LA PLUS ABOUTIE. 3. « L’eurosclérose »: l’Europe face à la crise (1973-1981). • 3.1. Les élargissements successifs de la CEE. - 1973: Entrée de l’Irlande, du Royaume-Uni et du Danemark. - 1981: Entrée de la Grèce. • 3.2. Le Serpent monétaire européen et le SME. Déstabilisation du système de Bretton Woods dès la fin des années 1960 = les pays membres de la CEE vont envisager une harmonisation plus poussée de leurs politiques économiques et monétaires. Plans Barre de 1969 et Werner de 1970 : réduction des marges de fluctuation entre monnaies. Accords de Bâle (Avril 1972) : instauration du « serpent monétaire européen ». 1979 : création du Système monétaire européen (SME) fondé sur une unité de compte commune, l’ECU.
III) L’ESPACE REGIONAL : L’INTEGRATION ECONOMIQUE REGIONALE LA PLUS ABOUTIE. 4. L'élargissement à 15, l'Acte Unique et le traité de Maastricht (1985-1996). • 4.1. La CEE passe à 12 puis 15 pays. -
1986: Entrée de l’Espagne et du Portugal. 1995: Entrée de l’Autriche, de la Suède, de la Finlande.
• 4.2. Une relance de la construction européenne à partir de 1985.
4.2.1. L’Acte Unique Européen (1985): Création d’un grand marché intérieur où circuleront sans aucune restriction marchandises mais aussi capitaux, services et personnes.
4.2.2. Vers l'Union Européenne : Le Traité de Maastricht . -
Traité signé par les gouvernements nationaux parlements nationaux ou par référendum, puis 1994. Volet politique sur la citoyenneté européenne, de Schengen. Volet économique avec la mise en œuvre de Monétaire (UEM) en trois étapes.
en 1991, validé par les entré en application fin la défense, les Accords l’Union Economique et
• 4.3. Un nouvel élargissement : l'arrivée des pays d'Europe du Nord.
III) L’ESPACE REGIONAL : L’INTEGRATION ECONOMIQUE REGIONALE LA PLUS ABOUTIE. 5. L’UE entre élargissement et approfondissement (1997-2009) . • 5.1. Le Traité d'Amsterdam de 1997 (Juin 1997). - Le traité crée "un espace de liberté, de sécurité et de justice" à l'intérieur de l'Union européenne. La Convention de Schengen va désormais s’appliquer à l’ensemble des pays de l’UE. - Il donne pour objectif à l'Union "un niveau élevé d'emploi" et prévoit pour y parvenir une meilleure coordination entre les politiques nationales . - Il renforce la politique étrangère et de sécurité commune (PESC). - Il modifie les institutions européennes avant l’élargissement aux pays d’Europe centrale et orientale (PECO). - Il fixe des règles de conduite en matière de déficit budgétaire par un "pacte européen de stabilité et de croissance "
III) L’ESPACE REGIONAL : L’INTEGRATION ECONOMIQUE REGIONALE LA PLUS ABOUTIE. 5. L’UE entre élargissement et approfondissement (1997-2009) . • • -
5.2. Les critères de Copenhague et l’élargissement. Conseil Européen de Copenhague (Juin 1993): l’élargissement est conditionné par un critère politique, économique, par un « critère d’adhésion ». Mars 2004: le groupe du Luxembourg (Estonie, Chypre, Slovénie, République Tchèque, Pologne, Hongrie) et le groupe d’Helsinki (Slovaquie, Lituanie, Lettonie, Malte) rejoignent l’UE. 1e Janvier 2007: Entrée de la Roumanie et de la Bulgarie. 5.3. Du Traité de Nice au Traité de Lisbonne. L'objectif du traité de Nice (2001 entré en vigueur le 1e Février 2003) était de préparer les institutions européennes aux prochains élargissements de l'Union européenne (UE). Adoption par les gouvernements du Traité constitutionnel le 18 juin 2004 à partir d’un texte fondé sur les dispositions du traité de Nice. Mais rejet par referendum de la ratification par la France et les Pays-Bas. Relance du processus : Traité de Lisbonne signé en décembre 2007. Rejet des Irlandais en juin 2008.